Financement de la sécurité sociale pour 2015
Mme la présidente. - L'ordre du jour appelle l'examen du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, de financement de la sécurité sociale pour 2015.
Discussion générale
Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes . - L'examen du PLFSS est l'occasion, chaque année, de rappeler l'attachement des Français à notre modèle de protection sociale. La force de ce modèle est de s'adresser à tous, depuis la naissance jusqu'à la fin de la vie, en passant par l'ensemble de la carrière professionnelle.
Parce que nous voulons garantir les principes qui le fondent, nous faisons le choix de la réforme : ni immobilisme, ni régression, pour plus d'efficacité et de justice.
Entre 2011 et 2014, le déficit des régimes de base de la sécurité sociale a été divisé d'un tiers. Pour que ces efforts ne soient pas vains, nous devons préserver les ressources de la protection sociale. Le transfert des allégements de cotisations sociales prévus par le pacte de responsabilité et de solidarité sera intégralement compensé.
Le choix de la réforme juste, à l'opposé de la majorité précédente, s'est traduit par la réforme de notre système de retraites avec la loi de janvier 2014. Juste parce qu'elle consacre de nouveaux droits, dont la prise en compte de la pénibilité -je regrette que le Sénat l'ait supprimé.
Réforme juste également que celle de l'assurance maladie par le plan d'économies et le projet de loi relatif à la santé. Non par des déremboursements, non par des franchises mais par la recherche d'économies conjuguée à l'amélioration de la qualité des soins.
Ce projet de loi s'inscrit autour de quatre axes.
D'abord, la pertinence des soins. Les agences régionales de santé (ARS) disposeront d'outils pour modifier le comportement des établissements de santé ciblés en raison des problèmes de non-pertinence dans leurs pratiques ou leurs prescriptions.
Puis la recherche de l'efficience de la dépense hospitalière avec la mutualisation des achats et des fonctions supports et un mode de financement adapté des hôpitaux de proximité.
Ensuite, nous engageons un virage ambulatoire. L'Ondam des soins de ville progresse de 2,2 %, soit un taux plus élevé que celui de l'Ondam des établissements de santé. Nous poursuivons la démarche du pacte territoire santé avec des mesures favorables à l'installation de généralistes en zones isolées et de montagne en particulier. Vu les bons résultats, nous allons étendre la mesure à certains spécialistes.
Enfin, nous diminuons le prix des médicaments qui ne présentent pas d'amélioration du Service médical rendu (SMR) et encourageons la dispensation des génériques.
Face à la progression exponentielle des dépenses de traitements de l'hépatite C -qui sont une bonne nouvelle pour les patients-, nous instituons un mécanisme de régulation de ces dépenses : le dépassement éventuel de l'enveloppe consacrée à ces dépenses sera supporté par les laboratoires, et eux seuls.
Ces économies permettent de faciliter la prise en charge des actes innovants : 15 millions d'euros iront au développement de l'imagerie médicale. Les économies nous aident à maintenir l'effort en faveur des personnes âgées et handicapées. Au premier semestre 2015, vous débattrez du projet de loi d'adaptation de la société au vieillissement. La Casa sera bien affectée au financement de la CSNA.
L'investissement en faveur de la prévention sera soutenu avec une aide aux centres de vaccination et la réforme du dépistage du VIH et des maladies sexuellement transmissibles.
Malgré le contexte contraint, nous proposons la mise en place du tiers payant intégral au 1er juillet 2015 pour les bénéficiaires de l'aide à la complémentaire santé. Nous ne comptons pas sur la « responsabilisation » des patients, comme s'ils se soignaient par plaisir : nous ne leur transférons pas de charges.
Preuve que notre réforme, juste, porte des fruits : le reste à charge supporté par les familles est passé de 9,2 % à 8,8 % depuis 2012 ; la reconquête de la sécurité sociale se poursuit avec la suppression des franchises et forfaits pour les bénéficiaires de l'aide pour une complémentaire santé (ACS) -une des mesures les plus injustes votée sous le quinquennat précédent.
J'ai examiné avec intérêt les amendements déposés par le Sénat. Vous prétendez faire des économies -des économies de posture- en reculant devant les mesures qui s'imposent, par exemple en vidant l'article 44, sur la pertinence de la prescription des établissements de santé, de sa substance et en refusant de nouveaux droits sociaux -telle la pénibilité, ou en les réduisant, par le report à 64 ans de l'âge légal de la retraite.
Vous refusez également la modulation des allocations familiales quand nous portons une politique familiale ambitieuse...
M. Gérard Dériot. - Ah bon !
Mme Marisol Touraine, ministre. - ...qui ne se réduit pas aux prestations. Nous poursuivons le développement des places en crèche : 100 000 en tout, 40 000 ont déjà été créées. L'universalité, ce n'est pas l'uniformité : voyez l'APA. La modulation ne remet nullement en cause les fondements de la sécurité sociale : la politique familiale est différente de la politique d'assurance maladie. Cette mesure, que les Français soutiennent, ne touche que 11 % des familles, celles qui gagnent plus de 6 000 euros par mois de revenu net. En-deçà, les allocations familiales seront intouchées. Elles seront divisées par deux jusqu'à 6 000 euros de revenu mensuel net et par quatre au-delà de 8000 euros. Rien ne serait pire que l'immobilisme qui menace notre modèle de protection sociale. Efficacité et justice, voilà les principes qui guident l'action de ce gouvernement. (Applaudissements sur les bancs socialistes)
Mme Nicole Bricq. - Très bien !
M. Christian Eckert, secrétaire d'État auprès du ministre des finances et des comptes publics, chargé du budget . - Après Mme Touraine, je rappellerai les orientations et engagements budgétaires du Gouvernement.
Ce projet de loi s'inscrit dans une stratégie qui conjugue redressement des comptes publics et soutien à l'emploi avec le pacte de responsabilité.
L'objectif d'atteindre l'équilibre structurel de nos comptes publics, constant depuis notre arrivée au pouvoir, est indispensable, y compris pour notre protection sociale.
Tout doit être fait pour réaliser les 50 milliards d'euros d'économies prévues, dont 21 milliards cette année.
Pour l'ensemble de la protection sociale, cela représente 20 milliards d'économies sur trois ans, à comparer avec les 450 milliards d'euros de dépenses pour les seuls régimes obligatoires de base de la sécurité sociale, soit 40 % du total recherché. Une part proche de la proportion que représentent les dépenses sociales dans la dépense publique.
Certains nous reprochent de ne pas faire de « vraies » économies parce que les dépenses de sécurité sociale vont continuer à augmenter inexorablement. Certains responsables de l'opposition proposent 110, voire 150 milliards d'euros d'économies. Que ne l'ont-ils fait entre 2002 et 2012 ?
M. Gilbert Barbier. - Éternel débat !
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. - Ils envisagent une hausse de la TVA qui pèsera sur tous les ménages et la suppression de l'ISF. Où sont les économies ?
Nous prévoyons de réaliser 9,6 milliards d'euros d'économies sur la sphère sociale pour 2015. Quelque 4 milliards d'euros proviendront de réformes déjà engagées : réforme des retraites, réforme de la branche famille dans le PLFSS pour 2014. Les 5,6 milliards d'économies en mesures nouvelles, dont certaines débordent du champ du PLFSS, proviendront de la réforme du capital décès, de la réforme des prestations familiales -qui ne doit pas faire oublier l'importance de l'aide à la garde des jeunes enfants, autour de 9 milliards, et de la réduction des coûts de gestion des organismes.
Ces efforts s'accompagnent de nouvelles mesures de justice pour les jeunes, ou encore les personnes âgées, et le refus des déremboursements.
À votre commission des affaires sociales, je dirai que les partenaires sociaux sont conscients de devoir réaliser des économies. Les mesures permettent de financer la poursuite du pacte de responsabilité et de solidarité sans peser sur les ménages. Les allégements de cotisations seront mis en oeuvre au 1er janvier 2015, les décrets sur le dispositif « zéro charge » seront publiés dans les délais prévus. De même, la réduction des cotisations pour les indépendants sera de 1 milliard d'euros. Il faut y ajouter 1 milliard d'euros de baisse de la C3S sans que le RSI ne soit affecté.
Le Gouvernement s'y était engagé, les pertes de recettes induites par le pacte de responsabilité seront intégralement remboursées à la sécurité sociale. Cela se fera par le transfert des dépenses de la sécurité sociale vers l'État -cas des aides personnalisées au logement (APL)- ou encore par le transfert intégral du produit des prélèvements sociaux sur les revenus du capital. Cette compensation s'appuie, pour 2015, sur un apport exceptionnel de la réforme du recouvrement des cotisations dues par les caisses de congés payés dans le bâtiment, entre autres. Celui-ci ne pèsera ni sur les salariés ni sur les employeurs : les sommes appelées sont déjà détenues par les caisses.
Parallèlement, comme le prévoyait la réforme des retraites, la loi assure le transfert au Fonds de solidarité vieillesse (FSV) des produits entrainés par la fiscalisation à compter de 2014 des majorations de pension.
Enfin, le Gouvernement met en oeuvre des mesures d'équité et de rationalisation, dont la principale consiste à tenir compte des revenus, et non du montant d'impôt dû, pour déterminer le taux -réduit ou plein- de CSG dû par un retraité ou par un chômeur.
S'agissant de l'emploi à domicile pour les gardes d'enfants, nous avons trouvé un compromis.
Nous reviendrons certainement sur le mécanisme anti-optimisation sur les dividendes, qui n'a pas été compris et que nous préférons retirer en précisant qu'il ne s'agit pas d'une mesure de rendement. Nous y reviendrons.
Je vous remercie par avance de ce débat qui s'engage dans la tradition de courtoisie propre au Sénat. (Applaudissements sur les bancs socialistes)
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales . - Madame la ministre, monsieur le secrétaire d'État, vous pensez avoir raison en tout, l'opposition ne peut pas avoir tort sur tout. Je souhaite, en cette période de crise, que nous sachions nous entendre et dialoguer.
Notre déficit n'a cessé de se creuser. En 2012, le Gouvernement y a répondu par une hausse des prélèvements de 11 milliards, dont 7,6 milliards de recettes nouvelles. Elle n'a pas suffi. Pour m'en tenir à un exemple, le départ en retraite anticipée se traduit par une dépense supplémentaire de 830 millions pour le régime général. Au total, le déficit des régimes de base et du FSV n'a diminué que de 3,1 milliards d'euros pour s'établir à 16 milliards en 2013.
Pour 2014, les recettes devraient progresser de 10 milliards d'euros. Celles-ci ont été rectifiées deux fois à la baisse : dans la loi rectificative puis dans le présent projet de loi.
Pour 2015, le Gouvernement a amorcé un changement de cap : pas ou peu de recettes nouvelles mais des compensations à trouver pour financer le pacte de responsabilité.
Le compte n'y est pas, notamment en raison d'hypothèses de croissance par trop optimistes et d'économies aléatoires. D'après nous, il manque 1,5 milliard d'économies sur le périmètre du PLFSS.
La tâche n'est pas aisée. Pour autant, le Gouvernement, à nos yeux, se fixe des limites trop étroites. Il faut aller plus loin dans la maîtrise des dépenses. Nous consacrons 53 % des prélèvements sociaux à la protection sociale, dont les dépenses ne cessent d'augmenter.
Forte de ce constat, notre commission préconise d'adopter les équilibres généraux pour 2013 et 2014 mais non pour 2015. Il y faut des mesures d'économies nouvelles.
À l'issue de nos travaux, le Gouvernement devrait reconnaître son texte. Nous proposons 1 milliard d'économies supplémentaires. D'avance, j'annonce que nos chiffrages sont aussi prudents que ceux du Gouvernement.
Mme Nicole Bricq. - Ils ne sont pas documentés !
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général. - La réforme des cotisations familiales nous semble précipitée ; si vous voulez prendre des mesures de justice, faites-les passer par l'impôt -vous l'avez déjà fait par deux fois avec le quotient familial.
Votre commission attire l'attention du Gouvernement sur le déficit du FSV : 3 milliards d'euros, comme en 2011. L'augmentation des dépenses de retraite n'est pas inéluctable, les exemples étrangers le prouvent. Garantissons un financement durable de notre système.
Concernant la réforme de l'assurance maladie, nous attendons d'en débattre depuis 2004. Le projet de loi de santé, examiné en Conseil des ministres le 15 octobre dernier, nous en donnera l'occasion. Nous nous en réjouissons car la jurisprudence du Conseil constitutionnel y fait obstacle.
Nous attendons du PLFSS qu'il définisse le périmètre de la solidarité nationale et qu'il en garantisse l'équilibre financier. De ce point de vue, ce texte est incomplet. Le contexte de crise n'explique pas à lui seul l'absence de réformes structurelles qui, si la volonté est là, feraient baisser les dépenses sans altérer la qualité de la prise en charge.
Je pense d'abord au renforcement de la pertinence des actes. Près de 30 % des actes pris en charge ne seraient pas pertinents, d'où un surcoût injustifié de quelque 30 milliards d'euros pour l'assurance maladie. Face à une telle situation, les économies proposées par le Gouvernement, y compris les 1 200 millions attendus de mesures réglementaires, ne sont pas à la hauteur. La Cour des comptes a indiqué des pistes d'économies substantielles et consensuelles -désengorgement des urgences hospitalières ou maîtrise des dépenses de personnel des hôpitaux. L'hôpital est le réceptacle de nombreux dysfonctionnements de notre système de soins. Il est indispensable qu'il puisse assurer sa mission de service public, et dans des conditions acceptables. Cela passe par une meilleure gestion du temps de travail, tant au service des établissements que du personnel. Il faut faire confiance aux acteurs de terrains et à leur sens de responsabilité. (Mme Catherine Génisson s'exclame)
L'innovation doit être soutenue. Le Gouvernement nous propose un dispositif spécifique pour contenir les dépenses liées au traitement de l'hépatite C. Il doit être contenu et limité dans le temps. Nous préconisons que la réforme du SMR proposée par la Haute autorité de santé depuis quelques années soit mise en oeuvre, alors que l'arrivée de nouvelles molécules innovantes bouleverse le principe même de l'évaluation. L'intérêt thérapeutique doit devenir le critère unique, nous avons besoin d'un instrument pour comparer les médicaments entre eux.
Toute évolution réglementaire d'ampleur doit s'accompagner d'un dialogue avec les établissements du secteur, pour adapter les évolutions aux enjeux de demain. Pour la commission, l'évaluation médico-économique doit être prise en compte au moment où se pose la question du remboursement ; il s'agit de vérifier l'adéquation du coût du produit et des objectifs en matière de santé publique. Quand un laboratoire demande un prix élevé pour un produit innovant, des études comparatives sont nécessaires pour garantir le plus haut niveau d'évaluation scientifique. Mais le décret d'application de la loi sur le médicament n'est jamais paru. Nous rendons cette disposition d'application directe.
Le statut des hôpitaux de proximité, la prise en charge des actes innovants, le contrôle de la pertinence des soins ont également fait l'objet de propositions de la commission. Le projet de loi étend le mécanisme du tiers payant aux bénéficiaires d'une aide à l'acquisition d'une complémentaire santé. L'Assemblée nationale a décidé que les bénéficiaires de l'ACS seraient dispensés de la franchise et de la participation forfaitaire ; la commission des affaires sociales a maintenu le paiement de la première. D'autres propositions correspondent à des mesures de rationalisation.
Mme la présidente. - Veuillez conclure.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général. - L'article 43 ter permet la substitution par un générique des médicaments nécessitant un inhalateur ; nous avons déposé un amendement de suppression parce que nous ne voyons pas ce qui a conduit le Gouvernement à revenir sur la position qu'il avait l'an dernier.
Je vous ai fait part de mes réserves et de celles de la commission des affaires sociales, qui estime qu'il est possible d'aller plus loin pour économiser 1 milliard d'euros sur l'Ondam : en renforçant la pertinence des actes, en favorisant davantage la prescription des génériques, en renforçant la lutte contre les fraudes, en réformant la tarification des urgences hospitalières, en mettant en place un jour de carence pour le personnel hospitalier ou en renégociant les accords relatifs au temps de travail dans les établissements de santé.
La commission vous demande d'adopter ses amendements ainsi que le texte ainsi modifié. (Applaudissements au centre et à droite)
M. René-Paul Savary, rapporteur de la commission des affaires sociales pour le secteur médico-social . - Nous allons être constructifs, madame la ministre.
L'Ondam médico-social est fixé à 17,9 milliards, en progression de 2,2 % par rapport à 2014. Et l'OGD devrait s'établir à 19,2 milliards.
Longtemps, l'Ondam médico-social a été privilégié, reflet des efforts substantiels de création de places et de renforcement de l'encadrement de soins dans ce secteur. En 2015, il est quasiment aligné sur celui des autres dépenses d'assurance maladie. La commission des affaires sociales a estimé qu'il s'agit d'un choix responsable.
M. Gérard Dériot. - Bravo !
M. René-Paul Savary, rapporteur. - L'achèvement de la médicalisation des Ehpad, l'ouverture du tarif global et la création ou la rénovation des places se poursuivent.
L'OGD est alimenté par une partie des réserves de la caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA) ; or ces réserves diminuent d'année en année. Il faudra prochainement revoir le mécanisme d'abondement.
La commission des affaires sociales a adopté un amendement tendant à rétablir davantage d'équité dans la répartition du produit de la contribution additionnelle de solidarité pour l'autonomie (Casa) afin d'en consacrer la moitié aux dépenses d'APA et de PCH, qui deviennent insupportables pour les conseils généraux. L'an prochain, l'ensemble du produit de la Casa sera affecté à la CNSA.
Le Gouvernement a annoncé un plan d'aide à l'investissement dans le secteur médico-social, qui a vocation à couvrir la période 2015-2017. Il est bienvenu. La commission des affaires sociales a adopté un amendement visant à inscrire dans la loi cet engagement, soit quelque 100 millions d'euros par an sur trois ans.
L'Assemblée nationale a adopté deux articles additionnels pour demander deux rapports : l'un sur la fiscalité des Ehpad, l'autre sur les contrats pluriannuels d'objectifs et de moyens (CPOM). Les rapports ne sont souvent qu'un moyen de retarder la prise de décision. La commission des affaires sociales a choisi de les supprimer.
Priorité à l'action, avec un objectif : la simplification. Il faut clarifier les responsabilités entre financeurs. Je pense en particulier aux foyers d'accueil médicalisés et aux maisons d'accueil spécialisées, qui prennent en charge des publics proches mais dont les financements sont distincts. Pour l'allocation des moyens aux Ehpad, le Gouvernement s'est engagé à mettre en place un groupe de travail. Faisons le point à l'occasion de ce PLFSS sur les objectifs et le calendrier des travaux à venir.
Nous le savons, toute réforme de la tarification crée des gagnants et des perdants, surtout lorsque l'enveloppe progresse peu. Des solutions raisonnables et acceptables par les gestionnaires comme par les usagers peuvent néanmoins être trouvées. Les études doivent devenir de véritables outils d?aide à la décision et des efforts être faits vers la pluriannualité des financements. Une solution devra être trouvée à la persistance des financements en silo, qui bloque toute perspective de coopération entre structures du médico-social et entre ces structures et le secteur sanitaire.
Les expérimentations « personnes âgées en risque de perte d'autonomie » (Paerpa) lancées début 2013 ont été précédées de longs travaux préparatoires. Leur pilotage est complexe. Espérons qu'elles tracent la voie à un travail davantage intégré des professionnels.
Simplification et clarification s'imposent aussi à la gouvernance du secteur. Les Français doivent pouvoir identifier plus clairement les autorités responsables en matière d'accompagnement du handicap et de perte d'autonomie. Les conseils généraux ont su affirmer de longue date leur expertise, leur savoir-faire. Mais ils vont disparaître...
M. Jean-Baptiste Lemoyne. - Nous allons nous battre !
M. René-Paul Savary, rapporteur. - Je forme le voeu que la loi NOTRe et celle d'adaptation au vieillissement affirment leur juste place. (Applaudissements au centre et à droite)
Mme Caroline Cayeux, rapporteure de la commission des affaires sociales pour la famille . - La politique familiale est l'un des atouts de notre pays, qui a connu depuis 1945 l'une des démographies européennes les plus dynamiques. Elle mérite mieux que la gestion empirique et comptable du Gouvernement depuis 2012. L'année 2013 a vu une dégradation spectaculaire, avec un solde négatif de 3,3 milliards d'euros. En 2014, le solde devrait l'être de 2,9 milliards ; et ramené à 2,3 milliards en 2015, sans hausse des prélèvements obligatoires. D'où les économies en dépenses du Gouvernement, chiffrées à 700 millions -plutôt 530 d'après nos calculs.
Le Haut conseil des finances publiques (HCFP) a qualifié « d'optimiste » -bel euphémisme !- le scénario macro-économique retenu pour bâtir ce PLFSS. L'échec du Gouvernement est patent. Sa politique économique tue l'emploi et ce sont les familles qui en font les frais. Les sacrifices qui leur sont une nouvelle fois demandés sont injustes. Les efforts financiers qui leur ont été demandés depuis trois ans sont considérables. Il y eût certes la revalorisation de l'ARS. Mais le Gouvernement a mis en oeuvre en 2014 plusieurs coups de rabots et mesures de gel qui s'ajoutent aux deux baisses successives du plafond du quotient familial. Les classes moyennes sont étranglées. (Protestations sur les bancs socialistes)
Mme Nicole Bricq. - Il ne faut pas exagérer.
Mme Caroline Cayeux, rapporteure. - L'universalité est une pierre angulaire de notre système depuis 1945. Alors que la fiscalité assure un rôle de redistribution verticale, que de nombreuses prestations spécifiques aident les familles en difficulté financière, les allocations familiales assurent une redistribution horizontale entre familles avec enfant et familles sans enfant. Un enfant né dans une famille dite aisée ne mérite pas moins de bénéficier de la solidarité nationale qu'un enfant né dans une famille modeste, tel est le principe auquel le président de la République s'était déclaré en 2012 « très attaché ».
M. Gérard Dériot. - Ah !
Mme Caroline Cayeux, rapporteure. - Ce principe fondamental est désormais mis à bas. Les familles sont réduites à une technique pour faire des économies.
M. Yves Daudigny. - C'est scandaleux de dire cela !
Mme Caroline Cayeux, rapporteure. - Avec l'article 61 A, l'universalité n'existe plus ; ne nous laissons pas abuser par l'ambition proclamée de justice sociale mise en avant par le Gouvernement, seulement inspiré par un froid calcul budgétaire qui témoigne de son manque de considération à l'égard des familles.
Les associations familiales ont été mises devant le fait accompli, aucune concertation n'a eu lieu. Bien des questions se posent cependant. Quelles seront les modalités des échanges d'information entre CAF et services fiscaux ? Comment les changements de situation seront-ils pris en compte ? Fera-t-on la distinction entre familles bi-actives et celles où un seul parent travaille ? Des moyens humains supplémentaires seront-ils alloués aux CAF ?
Au total, 600 000 familles seront stigmatisées et trahies par le Gouvernement. Là où ce dernier parle chiffres et statistiques, je vous parle de parents et d'enfants. Le montant de la perte peut paraître peu élevé mais c'est à la marge, justement, que se prennent les décisions. Des parents renonceront à leurs projets, dont ceux d'achat d'un logement. C'est un bien mauvais signal adressé aux familles.
Avec cette mesure, le Gouvernement ouvre la porte à la remise en cause de l'annualité d'autres prestations, pourquoi pas l'assurance maladie, voire l'enseignement public !
M. Yves Daudigny. - C'est vous qui le dîtes !
Mme Caroline Cayeux, rapporteure. - Il est des valeurs, des acquis sociaux qui n'ont pas de prix. L'universalité est de celles-là. D'où nos amendements de suppression de l'article 61 A et de cohérence au 62.
La réforme du congé parental est également inquiétante. Censée réduire l'éloignement des femmes du marché du travail, ce n'est en fait qu'une nouvelle mesure d'économies. Imposer aux familles un partage du congé parental revient à nier les contraintes réelles qui font que 95 % des congés parentaux sont pris par les mères. La plupart d'entre elles perdent un an de congé parental, au préjudice des familles et des enfants.
Cette réforme pénalise lourdement les ménages et pèsera sur les budgets locaux, en dépit du plan ambitieux que vous avez annoncé pour la garde d'enfants. Nous avons demandé, avec Fabienne Keller, une évaluation.
Mme Aubry a dit : « Oui, il faut arrêter d'entrer dans tous les dossiers par l'argent ». Elle a raison ; la vraie question est : quelle politique familiale voulons-nous pour notre pays ? Au lieu d'être de grandes causes nationales, les familles deviennent des variables d'ajustement. Sommes-nous prêts à sacrifier ces principes fondamentaux, outre l'intérêt des familles, au nom d'économiques budgétaires ? En avons-nous même le droit ?
Les familles sont l'intérêt de la France, ne l'oublions ni trop vite ni trop facilement ! (Applaudissements à gauche et à droite)
M. Gérard Roche, rapporteur de la commission des affaire sociales pour l'assurance vieillesse . - Cette année, la situation de la branche vieillesse et de notre système de retraite ne sont pas au coeur de l'actualité, en dépit des lacunes de la loi de 2014. Confronté à la baisse du ratio cotisations-retraites, notre système de retraite a été réformé en 1993, puis en 2003. Malgré cela, la branche vieillesse est devenue déficitaire depuis 2005 ; le déficit s'est creusé avec la crise de 2008, pour atteindre 15 milliards d'euros en 2010, FSV compris. D'où la loi du 9 novembre 2010 qui a relevé de deux ans l'âge légal de départ en retraite et celui du bénéfice du taux plein sans décote. Elle a porté ses fruits, le déficit s'est réduit : à 11,3 milliards en 2011 et 10,2 milliards en 2012 et 6,5 en 2013.
La nouvelle majorité issue des élections de 2012, après s'être vivement opposée à cette réforme de 2010, s'est rendue compte qu'elle était indispensable mais encore insuffisante pour atteindre l'équilibre des comptes en 2020 ; elle l'a complétée en janvier 2014 pour prévoir une hausse du nombre de trimestres pour le taux plein, une hausse des cotisations et un décalage de six mois de la revalorisation des pensions. Cette année, le déficit revient à 5,4 milliards d'euros ; il sera de 4,2 milliards l'an prochain.
Plus préoccupant, le retour à l'équilibre de la branche vieillesse semble désormais repoussé sine die. Le Gouvernement semble avoir renoncé à juguler le déficit structurel du FSV. Celui-ci apparaît comme un outil commode pour présenter des comptes qui sous-estiment artificiellement la gravité de la situation, laquelle empire avec la crise, l'atonie de la croissance, le papy boom et la progression de l'espérance de vie.
Une nouvelle réforme des retraites est donc indispensable (exclamations sur les bancs socialistes), qui doit être systémique et s'inspirer du modèle suédois par points ou comptes notionnels.
Solliciter de nouveau les retraités serait une erreur. L'âge légal est repoussé chaque année de cinq mois jusqu'à 2017. Pourquoi ne pas poursuivre ce relèvement progressif au-delà de cette date ? Un amendement en ce sens sera présenté par la commission des affaires sociales. Certes, cela exigera un effort de la part de nos compatriotes. Mais plusieurs dispositifs ont été ouverts à ceux qui ont connu des carrières précoces ou pénibles afin qu'ils puissent partir à la retraite avant l'âge légal.
Le compte personnel de prévention de pénibilité (« Ah » sur les bancs socialistes) est séduisant intellectuellement, je le reconnais en tant qu'ancien médecin. Mais je ne puis sous-estimer l'inquiétude de nombreux artisans et patrons de TPE et PME qui craignent la complexité du système. La mission confiée à M. de Virville devait apaiser les tensions. (« Très bien ! » sur les bancs socialistes) Le président de la République a annoncé une mission supplémentaire, associant un parlementaire et un chef d'entreprise. Si les inquiétudes devaient demeurer aussi vives, il faudrait remettre l'ouvrage sur le métier.
Dans la mesure où le départ anticipé pour carrière longue et le compte personnel pénibilité existent, je veux croire qu'un accord est possible sur la base des propositions courageuses et intelligentes du Sénat. (Applaudissements au centre et à droite)
M. Gérard Dériot, rapporteur de la commission des affaires sociales pour les accidents du travail et les maladies professionnelles . - Après un déficit continu entre 2002 et 2012, dans un contexte de crise, la branche AT-MP est revenue à l'équilibre, en 2013, c'est-à-dire à la normale parce que son financement est de nature assurantielle. Mais cet équilibre demeure fragile.
La sinistralité baisse et nous devons nous en féliciter, mais cette tendance générale reflète des évolutions contrastées. Les accidents du travail diminuent mais les accidents de trajet augmentent, alors que les accidents de la route en général refluent. La fréquence des maladies professionnelles ayant entraîné un arrêt de travail a doublé depuis 2001.
La plus grande vigilance est de mise sur la poursuite des efforts de prévention, en particulier pour la mise en oeuvre de la convention d'objectifs et de gestion 2014-2017, avec trois risques prioritaires : les troubles musculo-squelettiques, les risques de chutes dans le BTP et l'exposition à des substances cancérogènes.
Sur les dépenses de la branche, le versement à l'assurance maladie au titre de la sous-déclaration est fixé en hausse de 26,6 % par rapport aux trois dernières années, à un niveau historiquement haut, entièrement supporté par la part mutualisée du financement de la branche. Il nous paraît indispensable de relancer et accentuer les efforts de prévention, notamment pour les intérimaires confrontés à toutes sortes de nuisances. Il paraît difficile d'accepter que les employeurs soient la variable d'ajustement de la branche maladie.
Le Fiva (Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante) offre des indemnisations plus nombreuses et plus rapides, ce dont il convient de se réjouir. Sa réserve prudentielle représente un peu plus de deux mois de dépenses. Nous déplorons cependant le net désengagement de l'État : une dotation en baisse de 12,6 % pour 2015. Son niveau de participation reste bien trop faible. Avec Jean-Pierre Godefroy, nous avions jugé légitime un engagement de l'État à hauteur d'un tiers, alors que la dette du Fiva devait atteindre 26 millions d'euros fin 2015.
La question d'une nouvelle voie d'accès individuelle à l'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante (ACAATA) reste posée. Qu'envisage le Gouvernement ?
Les mesures de simplification pour les non-salariés agricoles sont bienvenues, la commission y est favorable. Mais nous restons très réservés sur les orientations budgétaires de 2015. (Applaudissements au centre et à droite)
M. Francis Delattre, rapporteur pour avis de la commission des finances . - Selon un récent sondage, 93 % des Français estiment qu'il est urgent d'entreprendre des réformes des dépenses sociales. Les Français sont prêts à faire des réformes pour notre modèle de protection sociale que, paraît-il, le monde entier nous envie -ce dont on peut douter quand notre pays compte 5 millions de chômeurs. Le Gouvernement prétend assurer la pérennité de ce modèle ; en réalité, il met sous tutelle le secteur libéral pour créer un système de santé entièrement étatisé sans pour autant tenir ses engagements d'économies.
Ce projet de loi s'inscrit dans le cadre de la loi de programmation des finances publiques. Les administrations de sécurité sociale devront réaliser un effort d'économies important : 21 milliards en trois ans, sur un effort total de quelque 50 milliards d'euros. Cela peut paraître justifié quand les dépenses de sécurité sociale représentent 43,2 % de la dépense publique. Les dépenses sociales dans notre pays sont supérieures de 6,7 points de PIB à la moyenne de la zone euro. Ce niveau élevé contribue pour beaucoup à la différence entre le niveau de la dépense publique en France et le niveau moyen constaté dans la zone euro.
Cependant, le plan d'économies paraît bien fragile eu égard à la croissance tendancielle des dépenses d'assurance maladie.
Il est prévu de réaliser 10 milliards d'euros d'économies dans le champ des dépenses d'assurance maladie, sachant que le projet de loi de programmation des finances publique fixe le taux d'évolution de l'Ondam à 2 % en moyenne annuelle d'ici 2017, taux que le comité d'alerte sur le respect de l'Ondam juge inatteignable sans de rapides réformes de structure. D'autre part, 11 milliards d'euros seraient économisés sur les autres dépenses de protection sociale : 2,9 milliards d'euros résultant de décisions déjà prises en 2013 en matière de retraite et de politique familiale, 2 milliards d'euros sur les régimes de retraites complémentaires AGIRC-ARRCO ou encore 2 milliards d'euros d'économies provenant de la réforme de l'assurance chômage.
Le flou persistant sur 9,6 milliards, M. Eckert a donné quelques précisions : 4 milliards viendraient de mesures déjà engagées et 5,6 de mesures nouvelles et ce PLFSS intégrerait 4,6 milliards d'euros d'économies au titre de l'exercice 2015. En route ! Mais le détail de ces dispositions en montre l'incohérence et le flou, au point qu'au moins 1,5 milliard d'euros d'économies semblent très hypothétiques, reposant sur des effets d'arrondis ou sur l'anticipation de la moindre consommation de certains fonds.
La commission des finances considère que les hypothèses macro-économiques retenues par le Gouvernement pour bâtir ce PLFSS sont très optimistes. L'objectif de généralisation du tiers payant représente des risques majeurs : difficulté de recouvrement des franchises et danger de multiplication des actes. D'où notre amendement de suppression de l'article élargissant le tiers payant aux bénéficiaires de l'allocation de logement social, premier pas vers la généralisation intégrale.
Le texte qui nous vient de l'Assemblée nationale est encore plus critiquable. Premièrement, la soumission des dividendes aux cotisations sociales.
M. Jean Desessard. - Ce n'est pas illégitime !
M. Francis Delattre, rapporteur pour avis. - Pour nous, la bonne réforme serait de soumettre l'ensemble des dividendes à cotisations sociales mais dans la limite du plafond de sécurité sociale.
Deuxièmement, la modulation des allocations familiales. La commission des finances votera l'amendement présenté par Mme Cayeux, qui permet de tenir l'engagement n°15 du candidat François Hollande.
Sous réserve de l'adoption des modifications qu'elle préconise -dont l'introduction de trois jours de carence pour le personnel hospitalier-, la commission des finances invite le Sénat à adopter ce projet de loi (Applaudissements à droite et au centre)
M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales . - Sans mesures nouvelles, notre déficit social s'aggraverait de 10 milliards d'euros cette année. La perspective d'un retour à l'équilibre des comptes en 2017 s'éloigne, la Cour des comptes tire la sonnette d'alarme. Ce gouvernement, comme d'autres avant lui, a construit ce PLFSS sur des hypothèses très optimistes selon le Haut Conseil des finances publiques.
Quels sont les leviers ? Augmenter les recettes ? Même la Commission européenne considère que notre taux de prélèvements obligatoires est trop élevé ; ponctionner encore plus les entreprises ralentirait la reprise. Diminuer les dépenses ? La ministre Touraine a assuré qu'il n'en était pas question. Pourtant, la modulation des allocations familiales, qui a soulevé un tollé, en représente bien une modalité.
Il est temps d'adapter les prestations familiales, de s'interroger sur leur effet redistribué...
Mme Michelle Meunier. - C'est ce que nous faisons !
M. Alain Milon, président de la commission. - ...de redéfinir le périmètre de la solidarité. Comment penser que celle retenue en 1945, au sortir de la guerre (M. Jean Desessard s'exclame), est encore adaptée ?
L'assurance maladie est un chantier permanent : pas moins de vingt réformes depuis la réforme Barre de 1976. Développement des génériques, meilleure efficience des prestations et dépenses, ces réformes consensuelles ne suffisent pas. Le temps est venu d'effectuer des choix courageux.
L'assurance maladie offre l'accès aux soins à 55 millions de personnes. Pour autant, la notion de santé évolue ; de nouvelles maladies surgissent ; la population française vit plus longtemps, certes, mais est aussi plus longtemps malade. La santé reste considérée comme un bien collectif. Le financement pérenne de notre assurance maladie passe d'abord par la suppression des niches sociales et allégements de cotisations -la Cour des comptes évalue le manque à gagner entre 67 et 73 milliards d'euros.
Côté dépenses, il faut mettre l'accent sur la restructuration des hôpitaux. Une particularité de notre système tient aux coûts administratifs trop élevés et à la mauvaise articulation entre soins hospitaliers et soins de ville.
Parmi les pistes à envisager, je propose de renforcer les moyens des ARS, de les mettre au centre du pilotage des soins, entre médecine hospitalière, médecine ambulatoire et secteur médico-social.
Il convient de développer le dossier médical personnalisé et autres dispositifs informatiques qui facilitent la communication entre professionnels pour éviter la redondance des soins.
Certains débats seront explosifs : retour des 39 heures, instauration d'une deuxième journée de solidarité -la première représente 2 milliards par an- et rétablissement de la journée de carence dans la fonction hospitalière avec un renforcement des contrôles.
Comment trancher le débat sur l'assurance maladie ? Le choix est entre une couverture généreuse incitant à une consommation excessive et une couverture moindre, poussant à une rationalisation des dépenses.
Du côté des patients, il faut trouver un équilibre. Pour les praticiens, il faudrait renoncer au paiement à l'acte, qui incite à une multiplication des consultations, pour aller vers une formule de paiement à la performance.
Les retraites nécessitent également une réforme. Nombreux sont ceux à penser que la fixation à 60 ans de l'âge légal de départ à la retraite a joué un rôle non négligeable dans les difficultés actuelles. C'est archaïque, opaque et inégalitaire. Il faudrait réformer cela en respectant trois principes : liberté, égalité, fraternité.
Pour financer notre système de retraite, soit il faut continuer d'emprunter, soit il faut entreprendre une réforme systémique, ce que le Sénat a fait en 2010.
Mme Nicole Bricq. - C'est exact !
M. Alain Milon, président de la commission. - Le système de retraite par points assurerait une meilleure équité entre générations et Français à condition d'une fusion de tous les régimes.
À terme se posera la question du financement de notre protection sociale. Actuellement, il est assis aux trois quarts sur les revenus du travail. Cela pèse sur l'activité. Il faudra trouver une formule neutre.
Madame la ministre, nous devons faire des choix courageux. Nos débats seront intenses ; nous devons, ensemble, trouver des marges de manoeuvre pour notre protection sociale ! (Applaudissements à droite et au centre)
M. Gilbert Barbier . - À entendre M. Eckert, tout serait pour le mieux dans le meilleur des mondes. Quel dommage de ne pas s'attaquer aux réformes profondes quand notre système est à bout de souffle ! Certes, tout n'est pas noir, mais tout n'est pas tout blanc non plus. M. Eckert parle de réformes structurelles ; Mme Touraine, elle, de réformes structurantes. Que recouvre cette différence de vocabulaire ? Comme à l'Assemblée nationale, on nous renvoie à l'héritage. Et le Gouvernement se contente d'utiliser ce merveilleux instrument qu'est le rabot. Résultat, vous avez réalisé l'exploit de dresser contre vous tous les médecins.
Il faut une bonne dose de patience et de paracétamol pour s'y retrouver dans les articles d'équilibre ! Cette année encore, nous contractons une dette de 15 milliards d'euros de plus pour couvrir ce qui n'est que le fonctionnement au jour le jour de notre système. Vous généralisez le tiers payant ? C'est dire aux Français : on vous soigne gratis, vos enfants paieront.
Quoi qu'en dise le Gouvernement, les soins se dégradent. On ne peut pas faire tout, partout et tout bien, la logique de la spécialisation est inévitable. Cela vous gêne, madame la ministre, à tel point que vous préférez dissimuler les statistiques de morbidité dans les établissements de santé. Le directeur de la Cnam qualifie lui-même cette restructuration taboue de mur infranchissable.
Sujets d'inquiétude, la vaccination que vous souhaitez déléguer aux pharmaciens -on a vu ce que cela avait donné pour le H1N1- et les délais d'attente pour obtenir une IRM -ne devaient-ils pas être réduits à vingt jours dans le dernier plan ? Ne faut-il pas dérembourser les examens ostéo-musculaires pour donner priorité à la détection de maladies telles que le cancer du sein ? Hélas, vous avez préféré la méthode du coup de rabot. Idem pour les médicaments. Pourquoi ne pas dérembourser les dix blockbusters représentant plus de 10 milliards d'euros alors que leurs SMR est de 5 ?
Nous reviendrons sur votre revirement incompréhensible concernant le plasma industriel importé. Pour plus de transparence prônée par le président de la commission des affaires sociales, pourquoi pas l'open data à la Cnam ? Son directeur affirme qu'il faut une loi. Si l'on veut conserver notre système de santé -et je ne fais de procès à personne- mettons fin au rabot et engageons une véritable réforme, en concertation avec tous les acteurs de la santé. (Applaudissements au centre et à droite)
M. Yves Daudigny . - Le pilotage des finances sociales s'inscrit dans le cadre d'une politique de santé publique qui a été, aux dires mêmes du rapporteur général, laissée à l'abandon durant dix ans. Cette stratégie repose sur la politique de prévention, l'offre de premier recours, avec un parcours simplifié et décloisonné, et une nouvelle démocratie sanitaire. Après le projet de loi d'adaptation de la société au vieillissement, adopté par l'Assemblée nationale, ainsi que le projet de loi de santé publique, adopté le 15 octobre dernier par le Conseil des ministres, ce PLFSS pour 2015 témoigne de la même cohérence.
En 2014, et ce n'est pas propre à la France, la situation économique reste fragile. Cela n'altère pas la poursuite de la trajectoire de redressement de nos comptes publics. Rappelons le chemin parcouru : le déficit du régime de retraites a été divisé par trois en deux ans, tandis que la revalorisation des petites retraites se poursuit. Seuls la branche maladie et le FSV voient leurs comptes se dégrader.
Les résultats sont là et cette politique est menée sans déremboursements, sans franchises et forfaits. Le reste à charge des familles diminue ; l'Ondam, stable, est respecté depuis plusieurs années. Cher rapporteur général, vous qui le reconnaissez, comment pouvez-vous dans le même temps proposer un milliard d'économies supplémentaires ? Les hypothèses retenues pour élaborer ce projet de budget sont moins optimistes que celles de l'OCDE.
Elles impliquent, il est vrai, un pilotage serré, mais elles sont loin d'être infondées.
La Cades émet désormais sur les marchés ses propres billets de trésorerie. Les conditions d'amortissement à 0,137 % sont sans précédent. D'où l'intérêt d'y recourir pour le régime agricole, ce qui entraînera l'économie de 30 millions d'euros.
Si l'article 27 établit le plafond du besoin de trésorerie pour 2015 à plus de 30 milliards, il avait été porté à plus de 65 milliards en 2010, dois-je le rappeler ? La compensation des mesures du pacte de responsabilité et de solidarité sera bien effectuée à l'euro près, via l'article 14 entre autres.
Notre objectif commun est de faire en sorte que chacun bénéficie à l'avenir du haut niveau de protection sociale qui caractérise notre pays. Les marges de manoeuvre sont étroites, certes, mais elles existent. En commission des affaires sociales, de nombreuses mesures ont recueilli un large assentiment, aux articles 35, 36, 42, 11, 41, 32, 8, 12, 13, 15, 16, 17, 18, 33 ; les articles 38, 39 et 50 peuvent suivre.
Ce projet de loi comporte de nombreuses mesures de justice : l'Ondam augmente plus que le PIB en valeur ; le tiers payant est étendu aux bénéficiaires des complémentaires santé ; calcul plus équitable de la CSG sur les revenus de remplacement ; ouverture des indemnités journalières aux conjoints et aides familiaux des exploitants agricoles en cas d'AT-MP et modulation des allocations familiales, comme l'admet la majorité des Français.
En 1945, les allocations n'étaient pas versées à tous, même si la loi du 22 août 1946 en a étendu le nombre des bénéficiaires. Le premier enfant n'ouvre toujours pas droit aux allocations. (« Eh oui ! » à gauche)
Dire que leur réduction au-delà de 6 000 euros de revenus mensuels détruira les familles est excessif. Fin 2009, la majorité de cette assemblée avait d'ailleurs approuvé sans état d'âme une ponction de 0,28 point de CSG, transféré à la Cades, et remplacé par un panier, percé puisque constitué de ressources non pérennes, qui conduisit aujourd'hui à un déficit injustifié.
Les exigences de rendement des laboratoires sur de nouvelles molécules amènent à reconsidérer les conditions juridiques de l'AMM, sauf à priver, ce qui n'est pas pensable, de nombreux patients de nouveaux traitements.
Enfin, le bilan de la Cour des comptes, effectué à la demande de notre commission des affaires sociales sur les relations conventionnelles avec les professions de santé, contribue à renforcer l'information des commissaires sociaux de l'Assemblée nationale et du Sénat, et je m'en félicite.
Monsieur le ministre, je rappelle le vote unanime de la Haute assemblée pour l'emploi à domicile. J'espère que vous saurez nous entendre.
Madame la ministre, monsieur le ministre, ce projet de loi est nécessaire, responsable, équilibré dans la répartition des efforts, ambitieux pour l'avenir. Les amendements de la majorité sénatoriale, hormis la suppression de trois mesures de justice, ne le réorientent pas significativement. Vous pouvez compter sur le soutien du groupe socialiste. (Applaudissements sur les bancs socialistes)
M. Jean Desessard . - Les écologistes du Sénat se félicitent d'un certain nombre de mesures de ce projet de loi améliorant l'accès aux soins. Ils se réjouissent de celles qui font écho aux 42 propositions d'Aline Archimbaud remises au Premier ministre, comme le tiers payant intégral et la suppression des franchises, ainsi que la prise en compte de la prévention dans les FIR destinés aux ARS et de la qualité des soins et du contexte des structures hospitalières dans la tarification à l'activité.
Le dernier rapport d'évaluation de la loi CMU fait un constat accablant sur l'aide à la complémentaire santé : si entre 2,7 à 3,9 millions de personnes sont éligibles, elles ne sont que 26 % à 38 % à y recourir. Le tiers payant intégral ne concernera donc que trop peu de personnes tant qu'on ne simplifiera pas les démarches de ce parcours du combattant : essayez donc de remplir les formulaires requis ! C'est en ce sens que notre amendement de simplification propose l'utilisation du revenu fiscal de référence pour la constitution du dossier. Cela simplifierait la vie de tout le monde, y compris du personnel chargé de la gestion. Le secrétariat général pour la modernisation de l'action publique (SGMAP) explique aussi qu'on améliorerait ainsi l'état de santé de la population, tout en dégageant un gisement d'économies justes et durables.
Nous persistons à proposer des mesures de fiscalité comportementale.
Sur l'essentiel, le financement de la sécurité sociale, les recettes diminuent, en raison du pacte de compétitivité, induisant des baisses de charges sans contrepartie, pour plus de la moitié du déficit prévu. Certes, le Gouvernement s'est engagé à compenser ces pertes de recettes, mais en trompe l'oeil, puisqu'avec les économies réalisées sur l'assurance maladie et la politique familiale !
Il est inquiétant que le Gouvernement s'engage ainsi et ne finance ces baisses de cotisations que par des mesures non reconductibles. Quel en sera l'impact financier ?
Quant à l'article 22, il permet à l'État de transférer des recettes de sécurité sociale vers l'État au nom de l'exit tax.
Au-delà, on ne peut que s'inquiéter de la volonté du Gouvernement de revenir, sous la pression du Medef, sur l'amendement Bapt, destiné à taxer les dividendes des dirigeants d'entreprises. Les écologistes voteront pour son maintien.
Après sa fiscalisation, la financiarisation de notre modèle social nous place à terme dans une grande dépendance à l'égard des taux d'intérêt.
Quant à la modulation des allocations familiales en fonction du revenu, elle remet en cause le principe fondamental d'universalité de nos prestations. (On approuve ostensiblement à droite)
Oui, l'universalité est un droit pour tous les enfants. L'instauration d'un seuil de modulation lui porte un coup fatal. 6 000 euros dit-on, oui, mais demain ? Pourquoi pas 5 000 euros, voire moins. Une fois le tabou levé, il n'y a plus de limite ! Si l'on veut réduire les injustices sociales, il fallait s'attaquer au quotient familial, ce serait bien plus efficace car cet avantage inégal bénéficie aux plus aisés : il représente 269 euros par an et par enfant au niveau du Smic, contre 2 000 euros par an et par enfant à six fois le Smic. (M. Francis Delattre s'exclame)
Les écologistes sont favorables à la suppression de la modulation et du quotient familial. Je le dis aux collègues de l'UMP qui sont contre la modulation : qu'ils acceptent de supprimer le quotient familial, ce serait une vraie réforme de justice sociale.
M. Francis Delattre. - Nous sommes pour la fiscalisation.
M. Jean Desessard. - Ce texte est plombé par une réduction des recettes dont la compensation est fragile. Comment offrir davantage de services, créer plus d'emplois avec moins de recettes ? Faire plus avec moins ?
Mme Nicole Bricq. - En faisant mieux !
M. Jean Desessard. - Allez voir le film Hippocrate : il montre bien la misère à l'hôpital !
M. Yves Daudigny. - C'est du cinéma !
Mme Laurence Cohen. - Allez voir sur place, dans les hôpitaux.
M. Jean Desessard. - En l'état, les sénateurs écologistes, comme leurs collègues députés, ne voteront pas le PLFSS. (Mme Laurence Cohen applaudit)
Mme Annie David . - Notre modèle social est cher aux Français. « Ils y tiennent » avez-vous dit, madame Touraine, à l'Assemblée nationale comme à cette tribune. Oui, c'est au nom du Conseil national de la Résistance que le ministre communiste Ambroise Croizat l'a mis en oeuvre. Nous pensons que notre modèle social est moderne et qu'il doit être soutenable financièrement. Là-dessus aussi, nous sommes d'accord. Mais nous n'approuvons pas votre chemin. Nous ne sommes pas d'accord sur la façon dont vous vous y prenez pour atteindre votre objectif de réduction des déficits, qui comporte 9,6 millions d'économies sur la santé et la sécurité sociale et 23 milliards d'exonérations de cotisations fiscales et patronales. Vos prévisions budgétaires sont irréalistes.
La compensation que vous proposez est une vaste manoeuvre de vases communicants, une « tuyauterie complexe », disait Yves Daudigny lorsqu'il était rapporteur général de la commission des affaires sociales, un jeu d'écriture qui se conforme à une politique, menée depuis vingt ans le dogmatisme est de votre côté-, de réduction du coût du travail, inefficace, sans contrepartie, fondée sur une approche libérale et erronée de l'économie dénonçant « le coût du travail ». Elle appauvrit et les comptes sociaux et les salariés puisque les exonérations de cotisations représentent des trappes à bas salaires.
Plutôt que de renforcer le pouvoir d'achat en arbitrant le partage des richesses en faveur du travail, vous privilégiez le capital, ce qui entraînera une hausse des taxes et une pression continue à la baisse sur les recettes. Mme Demessine, dans son rapport que le Sénat a refusé de publier, dénonce cette course sans fin à la baisse des salaires, qui anémie la consommation et la croissance en Europe. La CSG, la TVA, impôts supportés par les ménages, reprendront les exonérations et allégement consentis par ailleurs.
Les prestations sociales et les services à la population se dégraderont en conséquence des cadeaux faits au patronat. Bref, vous faîtes payer la crise à ceux qui en sont le plus victimes.
Vous prétendez favoriser la prévention, la proximité et la qualité de l'offre de soins mais l'Ondam de 2,1 % est le plus bas depuis sa création. Il se traduira par des fermetures de services, des réductions d'effectifs et une moindre qualité des soins. Le virage ambulatoire que vous prenez n'a qu'une finalité économique. Il exigera la formation des personnels et la création de nouveaux lieux d'accueil, sans quoi ce sera la sortie de route. Aussi convient-il de rester prudent sur la réalité des économies qu'il entraînera.
Au-delà de l'hôpital, la « pertinence des soins » est censée permettre de nouvelles économies mais elle entrouvre une porte au débat sur l'opportunité des soins en fonction des individus -c'est préoccupant. Nous sommes préoccupés par le renforcement de l'autoritarisme des ARS, promues gendarmes du système de soins.
L'universalité de la protection sociale, issue du Conseil national de la Résistance, au fondement de notre système de protection sociale, est remise en cause par le biais de la modulation des allocations familiales, qui jouent un rôle de redistribution horizontale, sans considération de ressources. Nous voulons combattre les inégalités sociales par une politique fiscale juste.
M. Jean Desessard. - Suppression du quotient familial !
Mme Annie David. - Le Gouvernement prétend améliorer le pouvoir d'achat des retraités les plus modestes mais l'assurance vieillesse est aussi fortement mise à contribution. Le gel des pensions est loin d'être compensé par la prime de 40 euros et la revalorisation du minimum vieillesse, d'autant que le nouveau mode de calcul de la CSG sur les revenus de remplacement pénalisera les retraités.
Face à ce projet que nous ne pouvons accepter, aggravé par la droite sénatoriale, le groupe CRC porte une alternative visant à réaffirmer que le déficit de la sécurité sociale est dû à un manque de recettes. D'où notre proposition de nouvelles recettes avec une modulation des cotisations sociales des employeurs en fonction de leur politique sociale et d'emploi. En faisant contribuer les revenus financiers, nous créerions 87,45 milliards de recettes.
Le coût du capital représentait, en 2012, 299 milliards d'euros, soit plus du double des cotisations patronales. La France est la championne d'Europe des dividendes versés aux actionnaires : 31 milliards en 2013 pour les entreprises du CAC 40. Voilà le coût du capital !
Aux nouvelles recettes que nous proposons devraient s'ajouter les sommes soustraites frauduleusement par les employeurs à la sécurité sociale, 20 à 25 milliards selon la Cour des comptes. Il faut que les agents chargés des contrôles puissent travailler et donc commencer par ne plus réduire leurs effectifs.
Il faut un plan pluriannuel d'investissement dans la santé. Vos mesures ne suffisent pas : il faudrait une politique plus ambitieuse de réduction des inégalités dans l'accès aux soins, développer massivement les structures d'accueil de la petite enfance et l'offre de soins hospitaliers à tarifs opposables sur tout le territoire. Tel est notre projet alternatif de justice sociale, pour redonner tout son sens à notre modèle social, le sortir des ornières de l'immobilisme, lui rendre son éclat pour un « plan complet de sécurité sociale, visant à assurer à tous les citoyens des moyens d'existence, dans tous les cas où ils sont incapables de se les procurer par le travail, avec une gestion appartenant aux représentants des intéressés et de l'État ». Vous aurez reconnu, chers collègues, un alinéa du programme du Conseil national de la résistance. (Applaudissements sur les bancs CRC)
Mme Françoise Gatel . - Cette première intervention pour moi au Sénat m'honore car elle porte sur un texte important, mais mon enthousiasme retombe aussitôt. Au nom du groupe UDI-UC, je me concentrerai sur les équilibres et les perspectives. Or les soldes constatés sont inquiétants. Ils confirment l'enrayement de la dynamique de résorption des déficits depuis 2013. Les hypothèses macro-économiques sont bien optimistes. Les cotisations sociales, assises pour l'essentiel sur la masse salariale, forment encore les deux tiers des recettes de la sécurité sociale. Toute la stratégie du Gouvernement repose sur une réduction des dépenses de 9,6 milliards d'euros. Plusieurs milliards d'économies ne sont pas documentés. Où sont-ils passés, madame la ministre ?
Certes, la situation est difficile. Le courage et la lucidité qui s'imposent font défaut à ce texte. En ces temps de course du rhum, une image me vient à l'esprit : naviguer à vue en colmatant et en écopant n'a jamais constitué une politique.
Vous fragilisez la politique familiale avec une réforme du congé parental, au prétexte fallacieux de l'égalité hommes-femmes et avec la réforme des allocations familiales, alors que la modulation du supplément familial dont les fonctionnaires bénéficient n'a jamais été envisagée.
Vous augmentez la création de places de crèche, mais la disette budgétaire des collectivités locales ne pourra leur permettre d'en assurer leur part de fonctionnement.
Le projet de loi refuse de rétablir un jour de carence dans la fonction publique, il élude la question lancinante du financement des retraites. Il reste très en-deçà des mesures qu'exige la gravité de la situation. Je sollicite, madame la ministre, une écoute très attentive à nos amendements. (Applaudissements au centre et à droite)
M. Jean-Noël Cardoux . - Je commencerai par des chiffres édifiants : le déficit cumulé de trésorerie de l'Acoss en 2014 s'élevait à 33 milliards d'euros, avec une élévation de la masse salariale de 1,6 % et des encaissements en recul de 2,9 milliards d'euros.
Pour 2015, il est annoncé 13,4 milliards d'euros de déficit global pour la sécurité sociale, avec retour à l'équilibre en... 2019 ! Deux ans après l'échéance de l'actuel mandat présidentiel...
Les hypothèses économiques ont été jugées irréalistes par le Haut conseil des finances publiques. L'Ondam à 2,1 % ne s'accompagne d'aucune véritable réforme de fond. La généralisation du tiers payant développera l'assistanat avec un impact négatif sur les déficits.
La FED a récemment décidé de stopper ses perfusions financières, parce que la croissance est revenue aux États-Unis, à quelque 3 %. D'où, au premier semestre 2015, une augmentation prévisible des taux, qui suivra en Europe. Il est à craindre alors que notre déficit explose, ainsi que la charge d'intérêts de l'Acoss.
Relativisons « l'héritage » : en 2008, au plus fort de la crise mondiale, l'Acoss empruntait à 4,5 %, pour 800 millions d'intérêt ; aujourd'hui, elle fait à 0,1 % pour 25 millions d'intérêt ! D'autres pays se sont relevés depuis lors, pas nous ! Si un tel scénario catastrophe devait se produire, je ne vois pas comment échapper à un nouveau transfert de la dette sociale vers le Cades.
Le Gouvernement essaie d'aller dans la bonne direction mais sans réelle vision d'avenir, sans réforme structurelle. Il procède comme un boutiquier qui s'efforce de colmater les trous en attendant de céder son fonds. (M. Jean Desessard s'exclame) Vous usez de mesures à la petite semaine, comme le versement anticipé de 1,5 milliard d'euros par les caisses de congés payés, qui ne pourra se répéter.
Sur les allocations familiales, vous battez en brèche l'universalité, c'est une nouvelle attaque contre la famille, porte ouverte à d'autres atteintes à notre système de protection sociale. Les revenus moyens ont été suffisamment taxés depuis deux ans sans qu'il soit besoin d'en rajouter.
Avec ce bricolage, vous fixez un objectif de 2,1 %. Ce sont les classes moyennes, je le répète, qui seront touchées.
Proposons des réformes de fond.
Mme Michelle Meunier. - Lesquelles ?
M. Jean-Noël Cardoux. - La complexité du régime social est telle que des consultations en amont des partenaires sociaux sont nécessaires pour instaurer une nouvelle « CEFSS » -contribution à l'équilibre financier de la sécurité sociale. Ne pouvant le faire par amendement, nous déposerons une proposition de loi. L'abandon d'un jour de RTT -il y en a suffisamment- pourrait amener les salariés à accepter des efforts supplémentaires et produire des recettes à hauteur de 2,5 milliards d'euros par an.
D'autres mesures relèveraient de la loi de finances : une franchise de 50 euros sur l'AME -le Gouvernement a supprimé la franchise de 30 euros-, avant de supprimer le dispositif, une journée de carence dans la fonction publique et une action plus résolue sur la pertinence des soins.
N'occultons pas trois sujets sensibles. D'abord, le supplément familial de traitement pour un coût de 2,3 milliards d'euros, qui bénéficie aux seuls fonctionnaires et se cumule avec les allocations familiales ; il faudra bien en parler un jour. Deuxièmement, le coût des agences satellites de l'État dans le monde de la santé et le secteur médico-social. C'est un serpent de mer, ciblé par de nombreux rapports. Contentons-nous de quelques chiffres : une quinzaine d'agences dotées d'un effectif de 30 000 personnes pour un budget de fonctionnement de 3,5 milliards d'euros... Trois agences vont être fusionnées, certes ; il faudrait également rapprocher la Haute autorité de santé, l'Agence nationale d'appui à la performance des établissements de santé et l'Agence nationale d'évaluation de la qualité des établissements, dont les compétences sont en fait voisines.
Autre réforme à envisager, la fameuse TVA anti-délocalisation. Ce serait une mesure antisociale... Rien de plus faux ! Seule le taux normal serait concerné, le taux réduit sur les produits de première nécessité ne le serait pas. On pourrait d'ailleurs aller plus loin : des taux moindres pour des produits de première nécessité redéfinis, augmentés sur certains produits comme les gros 4x4 qui polluent -M. Desessard ne me contredira pas...
Une vraie réforme des retraites est indispensable, avec le relèvement de l'âge de départ, l'alignement du régime de la fonction publique sur ceux du privé et la poursuite de la réflexion sur une réforme systémique, par points, plus juste et plus rationnelle ; elle aurait, entre autres mérites, celui de résoudre le lancinant problème du fameux compte de pénibilité.
Ces mesures, et celles que les autres sénateurs de l'opposition ont exposés, dessinent une véritable alternative. Le temps des expédients et des sparadraps est révolu ; celui du volontarisme et du courage est venu ! (Applaudissements à droite)
Mme Élisabeth Doineau . - Si l'enthousiasme de Mme Gatel est tempéré par la fragilité du budget de la sécurité sociale, peut-on trouver dans ce texte des mesures susceptibles de nous réjouir ? Oui, sans doute, mais les mesures structurelles sont ajournées...
Oui à la généralisation du tiers payant ; oui à l'accélération du virage ambulatoire mais la sécurisation de la sortie des patients est-elle garantie ? Les gains escomptés seront-ils au rendez-vous ? Il existe un gisement d'économies inexploité : les actes inutiles ou redondants représentent un coût de 30 milliards d'euros, bien supérieur aux économies espérées de la chasse aux prescriptions inutiles. Comment expliquer pareil décalage ?
Poursuivre l'effort sur le prix des médicaments et le développement des génériques, c'est bien. Mais le système est kafkaïen, notamment lorsque le médecin choisit le princeps et dans les affections de longue durée. Il y a là matière à simplification. Plus fondamentalement, l'objectif de substitution ne risque-t-il pas de devenir une fin en soi ? Parfois, le générique est moins performant et moins bien adapté à la pathologie.
Plus généralement, ce texte donne l'impression d'un bégaiement législatif : la loi de finances pour 2014 comportait déjà des dispositifs sur le prix des médicaments et les génériques. Pourquoi ne pas réintroduire plutôt un jour de carence dans la fonction publique, refondre l'exercice de la médecine libérale comme le préconise Hervé Maurey dans son rapport d'information -que je vous invite à relire- avec le conventionnement sélectif dont d'autres professions de santé, comme les infirmiers et les kinésithérapeutes, se déclarent satisfaits ?
Concernant le médico-social, pourquoi ce flou sur le calendrier d'examen du projet de loi d'adaptation de la société au vieillissement ?
La branche vieillesse... Il faut noter des avancées sociales telle la hausse de l'allocation de solidarité aux personnes âgées, mais la pérennité du régime est en cause. L'objectif est d'atteindre l'équilibre de la branche en 2017 mais elle sera à nouveau en déficit l'année suivante. Le groupe UDI-UC préconise de fixer un calendrier pour la création d'un régime par points universel à partir du premier semestre 2018, précédée d'une conférence sociale et d'un débat national. Pareil régime garantit l'équilibre financier, l'équité, la transparence et la justice sociale.
Faute d'avoir mené les réformes de structure qui s'imposent, le Gouvernement s'attaque à la seule politique qui fait l'unanimité en France et des envieux au-delà de nos frontières : la politique familiale. Je vous proposerai de supprimer la modulation des allocations familiales et d'en rétablir l'universalité et l'uniformité. C'est une question de principe.
M. Gérard Dériot. - Très bien !
Mme Élisabeth Doineau. - Si vous voulez plus de justice, mieux vaudrait fiscaliser les allocations ; ce serait plus pertinent et plus équitable.
Enfin, et j'aurais peut-être dû commencer par là, les projections macro-économiques du Gouvernement sont irréalistes ; la Commission européenne estime que, dans ces conditions, la France ne tiendra pas ses objectifs. Ce texte, comme le projet de loi de financement rectificatif de la sécurité sociale, est d'affichage. Plutôt que se livrer à un spectacle d'illusionniste, il faut réformer comme le voulait Georges Clemenceau, avec courage. (Applaudissements au centre et à droite)
M. Jean-Baptiste Lemoyne . - Rendez-vous traditionnel, non parce qu'il est prévu depuis 1996 dans notre Constitution mais parce qu'il nous revient de constater une fois de plus les déficits sociaux.
Le premier président de la Cour des comptes évoque une réduction du déficit de la sécurité sociale plus lente que prévu en 2013 et une dégradation plus structurelle que conjoncturelle. Le ministre a qualifié les économies que propose notre commission des affaires sociales de « posture » ; celles qui figurent dans le projet de loi sont en trompe-l'oeil : 3 des 9,6 milliards d'économies annoncés pourraient faire défaut.
Toujours du trompe-l'oeil : le financement du pacte de responsabilité, compensé à 25 % par une ponction d'1,5 milliard d'euros sur la trésorerie des caisses de congés payés -un héritage symbolique du Front populaire...
Mme Éliane Assassi. - Exact !
M. Jean-Baptiste Lemoyne. - Mesure à un seul coup, contrairement à la fiscalité anti-défiscalisation évoquée par M. Cardoux. Pour la réforme des retraites, idem. Le courage aurait été, quand un dispositif carrières longues existe, de relever progressivement l'âge légal de départ à la retraite.
S'il est, en revanche, une réforme structurelle, c'est bien celle des allocations familiales après une réduction par deux fois du quotient familial. Le groupe CRC ne s'y est pas trompé... Cela minera le consentement à l'impôt, voyez la pathologie de phobie administrative qui se déclenche dans certains foyers de Saône-et-Loire... (Mouvements divers sur les bancs socialistes)
M. Éric Jeansannetas. - Hors sujet !
M. Jean-Baptiste Lemoyne. - ...mais aussi chez les acteurs économiques ; la société est en ébullition.
La démographie médicale... La seule logique incitative permettra-t-elle d'être au rendez-vous de la desserte des territoires en soins ? J'en doute. Nous proposerons de rendre le cumul emploi-retraite plus attractif. Même à Sens, les départs en retraite des médecins ne sont pas compensés.
Toujours concernant les médecins, certains d'entre eux craignent le transfert de charges et le coût en temps-homme de la généralisation du tiers payant.
Enfin, un sujet trop souvent traité en termes de bons et de méchants, la fiscalité du tabac. Les buralistes sont souvent les derniers commerçants en milieu rural. On les fragilise en augmentant les taxes sur les cigarillos. La consommation hors circuits autorisés risque d'exploser. Ne légiférons en la matière que d'une main tremblante !
Dans la tradition du Sénat, nous espérons une écoute attentive du Gouvernement, qu'il ne balaie pas d'un revers de main les propositions et le travail fourni de nos rapporteurs ! (Applaudissements à droite et au centre)
M. Éric Jeansannetas . - Je suis ravi de monter à cette tribune pour évoquer le secteur médico-social, priorité du Gouvernement comme le montre ce PLFSS.
Il ne s'agit pas seulement de mesures budgétaires. Comme conseiller général, et je ne suis pas le seul ici, je sais que le financement de la dépendance est un enjeu crucial.
Quelles réponses sont apportées aux besoins des personnes âgées et handicapées ? L'Ondam médico-social progresse à 17,9 milliards, soit une hausse de 2,2 %. Les recettes de la CNSA augmentent de 400 millions -le président François Hollande a enfin réalisé le transfert de l'intégralité de la Casa à la CNSA en 2015, qui était sans cesse remis.
Concrètement, la médicalisation des Ephad se poursuit avec une enveloppe de 100 millions d'euros ; 47,4 millions sont consacrés au plan solidarité grand âge, à la lutte contre Alzheimer et les maladies neuro-dégénératives. L'effort pour les personnes atteintes de handicap se poursuit, dont 145 millions pour des créations de places. Elles manquent toujours en France. J'espère la mise en oeuvre effective de l'accord signé avec la Belgique -je salue le travail de Mme Neuville. Une somme de 21,4 millions d'euros sera allouée au plan autisme.
Le nombre de demandes en MDPH a augmenté de 6,4 % mais le délai moyen de traitement s'améliore. La situation est toutefois très contrastée d'un territoire à l'autre ; il n'y aura pas de pilotage ambitieux de la politique du handicap sans une appréciation de la demande au niveau national ni coordination des structures. C'est un chantier rationalisation qu'il faut ouvrir.
L'année 2015 verra la mise en oeuvre des mesures prévues par le projet de loi d'adaptation de la société au vieillissement, avec lequel ce PLFSS forme un ensemble cohérent en actant le grand chantier pérenne de l'autonomie. Au total, la Casa financera 645 millions d'euros.
Ce PLFSS est un signal fort envoyé à l'ensemble de la société. Nous nous devons d'en prendre la pleine responsabilité. Le groupe socialiste apportera son plein et entier soutien au Gouvernement sur le volet médico-social. (Applaudissements sur les bancs socialistes)
Mme Michelle Meunier . - La stratégie du Gouvernement est claire : 10,5 milliards d'économies sont nécessaires pour redresser nos comptes sociaux. Pour ma part, je veux revenir sur la branche famille, qui a fait beaucoup parler d'elle à l'Assemblée nationale. Nous l'avons trouvé, en 2012, avec un déficit de 3 milliards d'euros.
M. Gérard Dériot. - Cela faisait longtemps !
Mme Michelle Meunier. - La principale mesure, qui a fait couler de l'encre, figure à l'article 61 A : la modulation des allocations familiales. Elle rapportera 800 millions d'euros en année pleine pour garantir la pérennité de la branche tout en préservant les moins aisés et les classes moyennes.
Je veux revenir sur des propos hasardeux et des contre-vérités qui circulent à son sujet. D'abord, cette mesure ne vient pas de nulle part : le Haut conseil pour la famille l'a proposé. Ensuite, l'universalité n'est nullement remise en cause : toutes les familles comptant deux enfants et plus continueront de percevoir une allocation.
La fatalité de la pauvreté doit être combattue. Un enfant né dans une famille modeste, madame Cayeux, mérite d'être davantage aidé si on veut que la poursuite de l'égalité des chances ait un sens. Cela n'a rien de scandaleux.
M. Claude Dilain. - Très bien !
Mme Michelle Meunier. - Cette modulation serait la porte ouverte à d'autres à venir ? Arrêtons de jouer sur les peurs.
Une suppression des allocations ? Non, une réduction pour les familles gagnant plus de 6 000 euros. Je rappelle que la moitié des salaires perçus en France sont inférieurs à 1 700 euros...
Cette réforme des allocations familiales s'accompagne d'une réforme du congé parental que je soutiens : 96 % des bénéficiaires sont actuellement des femmes, il importe de favoriser le partage des responsabilités parentales. Faciliter le retour des femmes dans la vie professionnelle, c'est aussi offrir 275 000 solutions d'accueil supplémentaires aux familles -soit une augmentation de 20 % du nombre de places en crèche sur cinq ans. La politique familiale, c'est aussi la revalorisation de 25 % de l'allocation de rentrée scolaire pour trois millions de familles ; de 25 % de l'allocation de soutien familial pour 750 000 familles monoparentales. C'est l'augmentation du budget d'action sociale de la Cnaf. Au total, la politique familiale représente 2,5 milliards d'euros.
Alors non, la gauche n'attaque ni les familles ni les classes moyennes...
Mme Éliane Assassi. - Pas toute la gauche !
Mme Michelle Meunier. - Ce qu'a voulu l'Assemblée nationale mérite le soutien du Sénat, loin des polémiques stériles et des cris d'orfraie, un Sénat constructif plutôt qu'une assemblée qui détricote, un Sénat qui pense aux familles, aux enfants, à l'avenir. (Applaudissements sur les bancs socialistes)
Mme Catherine Génisson . - L'environnement économique est difficile, M. Daudigny l'a dit. Dans cette situation, le Gouvernement se refuse à augmenter franchises, forfaits et déremboursements. Il les supprime même pour les bénéficiaires de l'aide à la complémentaire santé et étend le tiers payant.
Dans la perspective de la loi de santé publique, vous proposez des mesures volontaristes : la possibilité pour les hôpitaux locaux de se définir comme hôpitaux de proximité, le soutien aux contrats d'amélioration de la qualité des soins, le développement de la chirurgie ambulatoire et l'expérimentation d'hôtels hospitaliers. Je les soutiens, tout en réaffirmant l'importance des hôpitaux à qui l'on a demandé beaucoup d'efforts ces dernières années. Les difficultés des urgences viennent pour l'essentiel des difficultés d'organisation de la permanence des soins.
Au sujet de la démographie médicale, je veux souligner l'intérêt du contrat de praticien territorial en médecine ambulatoire après le contrat de praticien territorial en médecine et l'extension du dispositif incitatif. Contrairement à ce qu'affirme le rapporteur général, ce ne sont pas des mesurettes mais des décisions fortes prises en concertation avec les médecins.
Concernant les médicaments, outre des dispositifs sur les génériques -un rapport parlementaire pour objectiver leurs atouts et évoquer leur fabrication en France serait bienvenu-, ce PLFSS propose un mécanisme de régulation des dépenses liées au traitement de l'hépatite C -le groupe socialiste le soutient.
Valoriser financièrement la rationalisation de la prescription dans la liste en sus est une bonne chose, mais à condition de l'expérimenter d'abord et de procéder à une évaluation.
Enfin, l'article 51 porte sur un point technique important : l'adaptation du régime des plasmas thérapeutiques à la qualification des plasmas industriels comme médicaments dérivés du sang. Quelles mesures pour compenser la baisse d'activité de l'Établissement français du sang ? Comment promouvoir en outre le modèle français du don en Europe ?
Madame la ministre, je vous assure de mon sincère soutien. (Applaudissements sur les bancs socialistes)
La discussion générale est close.
Prochaine séance mercredi 12 novembre 2014 à 14 h 30.
La séance est levée à 19 h 30.
Jean-Luc Dealberto
Directeur des comptes rendus analytiques