Ville et cohésion urbaine (Procédure accélérée)
M. le président. - L'ordre du jour appelle l'examen du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, de programmation pour la ville et la cohésion urbaine.
Discussion générale
M. François Lamy, ministre délégué auprès de la ministre de l'égalité des territoires et du logement, chargé de la ville . - Depuis trop longtemps, la France est traversée de multiples fractures territoriales, qui forment autant de fractures sociales intolérables pour notre pacte républicain. Aussi le ministère de la ville a-t-il été placé au coeur du ministère de l'égalité des territoires, créé il y a vingt mois presque jour pour jour. Je me réjouis de cette cohérence et de la volonté du président de la République qui, dans ses voeux aux corps constitués, rappelait que la pleine égalité passe non seulement par l'égalité entre les citoyens mais aussi par l'égalité entre les territoires ; c'est le socle même de l'unité nationale et le fondement de ce projet de loi. Nous devons apporter une réponse structurelle aux maux dont souffrent les quartiers défavorisés.
Merci à M. Dilain pour la qualité du travail accompli. Je sais combien le Sénat tient à ce qu'aucune parcelle du territoire, que ce soit en zone urbaine ou rurale, ne soit abandonnée et, si la concertation « Quartiers, engageons le changement ! » a réussi, c'est aussi grâce à son implication active. Je pense aussi particulièrement à celle de MM. Dilain et Germain ou de Mmes Létard et Cohen.
Le comité interministériel de la ville du 19 février 2013 organise le retour républicain de l'État dans les quartiers. Nous engageons une véritable refondation de la politique de la ville. Malgré le travail des élus et des associations, la situation des quartiers s'est profondément détériorée. Loin de nous satisfaire d'un énième « plan d'urgence », nous avons voulu frapper fort.
Il fallait tenir compte de l'inefficacité du saupoudrage ; rendre le zonage plus lisible ; mieux associer les politiques urbaine et sociale ; mettre pleinement en oeuvre les politiques de droit commun dans les quartiers ; lancer un nouveau Programme national de renouvellement urbain (PNRU) ; impliquer les habitants.
Ce projet de loi recentre la géographie prioritaire sur des territoires identifiés selon le critère clair et incontestable du niveau de revenu moyen des habitants. La politique de la ville retrouve ainsi son sens, une politique de cohésion et de solidarité. Effective en 2015, cette réforme de la géographie prioritaire concentrera les moyens sur les quartiers tout en mobilisant les crédits de droit commun. Des solutions spécifiques seront trouvées outre-mer, en concertation avec les élus.
Le Comité interministériel des villes (CIV) de juillet dernier, qui a mobilisé toutes les politiques de l'État au travers de onze conventions pour territorialiser l'action des ministères, a produit des premiers résultats : 15 000 emplois d'avenir pour les jeunes de moins de 25 ans des zones urbaines sensibles (ZUS) en 2013 alors que cette partie de la jeunesse représente 12 % de la jeunesse française ; créations de postes ciblées dans l'éducation nationale - 40 % des ouvertures de classes pour les 2-3 ans l'ont été dans les quartiers de la politique de la ville ; retour de la police au service de la population avec les zones de sécurité prioritaires (ZSP) ; progrès inédits de la péréquation, via l'augmentation de la dotation de solidarité urbaine (DSU), de la dotation de développement urbain (DDU), qui a doublé, et du Fonds national de péréquation des ressources intercommunales et communales(FPIC). La présence accrue des services publics dans les quartiers se traduira symboliquement dans quelques semaines par l'ouverture d'une antenne de Pôle emploi à Clichy-sous-Bois.
M. Claude Dilain, rapporteur de la commission des affaires économiques. - Merci.
M. François Lamy, ministre délégué. - La politique de la ville passe par une meilleure mobilisation des outils de droit commun. Le contrat de ville unique et global, élaboré entre l'État, les collectivités et tous les acteurs locaux, sera piloté et mis en oeuvre à l'échelon intercommunal, le plus pertinent. Au lieu de sanctionner les EPCI défaillants, comme le proposaient les députés, votre commission a choisi de leur faire confiance : je me range à son avis. Le maire restera au coeur de la politique de cohésion sociale de son territoire.
Le nouveau programme de renouvellement urbain (PNRU) représentera un effort de 5 milliards d'euros sur la période 2014-2024, tandis que nous mènerons à son terme le premier plan national de rénovation urbaine, qui n'est qu'à moitié achevé.
Mais tous les efforts de rénovation resteront vains si n'est pas menée en parallèle une politique de peuplement qui vise à la mixité sociale dans les agglomérations. La convention intercommunale relative à la politique d'attribution sera un outil de concertation efficace. Les nouvelles opérations de renouvellement urbain auront pour objectifs la mixité de l'habitat, la qualité de la gestion urbaine de proximité, la qualité de l'habitat et l'habitat durable.
La désespérance sociale s'accompagne souvent d'une désespérance politique. Il faut ainsi mieux associer les habitants aux décisions qui les concernent, face à la défiance et à la désespérance citoyennes dont une enquête du Cevipof parue hier a rappelé l'ampleur. Les habitants participeront pleinement à l'élaboration et au suivi des projets. Je souhaite revenir à l'appellation « conseil citoyen » (M. Jean-François Husson soupire) et garantir l'autonomie de ces conseils, tout en formant les habitants, les associations, les élus, les professionnels. Les financements des associations seront simplifiés et garantis sur trois ans, pour plus de visibilité. La concentration des moyens est une réponse à la désespérance sociale ; l'exigence démocratique de participation des citoyens en est une à la désespérance politique.
Ce texte entend donc restaurer l'égalité des territoires, par une action cohérente. Il s'accompagnera de la mise en place du Commissariat général à l'égalité des territoires (CGET), et de la refonte du Conseil national des villes. Cette réforme donnera tout son sens au plan « Entrepreneurs des quartiers », soutien sans précédent au développement économique des quartiers - 600 millions de crédits d'État et de la Caisse des dépôts, prêts de la BPI...
Les députés ont enfin introduit un nouveau critère de discrimination juridiquement opposable, celui du lieu de résidence.
Je proposerai par amendement une disposition dans le même esprit, visant à soutenir la réinsertion sociale et familiale des immigrés âgés, à qui nous devons beaucoup.
La mobilisation des habitants et acteurs des territoires est l'esprit et la source de ce projet de loi. Après d'autres, le contrat que je viens de signer avec l'AMF témoigne de l'engagement des élus et des impatiences qu'a suscitées la réforme. Car les valeurs de la République doivent vivre au quotidien dans les quartiers de la politique de la ville. (Applaudissements à gauche)
M. Claude Dilain, rapporteur de la commission des affaires économiques . - Cette loi était attendue. Après 30 ans de politique de la ville, le temps du bilan était venu.
De nombreux rapports ont été publiés. Les critiques formulées tiennent en trois mots : saupoudrage, empilement, insuffisance de droit commun. La politique de la ville n'est donc pas seule en cause. Tous les ministres de la ville, de gauche comme de droite, se sont battus, mais ils n'ont pas toujours été suivis par leurs collègues. Je rends hommage au premier d'entre eux, Michel Delebarre, qui a mis en oeuvre le fameux rapport Bonnemaison.
Les acteurs sont las des effets d'annonce et des plans d'urgence qui ne se traduisent pas sur le terrain. Ce projet de loi a été précédé - fait rare - d'une longue et authentique concertation. Et vous avez demandé un rapport à Marie-Hélène Bacqué et Mohamed Mechmache, sociologues à la légitimité incontestée, qui a traité de la participation des citoyens.
Cette loi, c'est la fin du saupoudrage. 2 500 territoires dits prioritaires en France, dix-sept en Italie... Entre les deux, il existe des marges... C'est la fin de l'empilement des contrats, conventions et autres schémas : il n'y en aura plus qu'un. C'est la fin de la dissociation entre l'urbain et l'humain. C'est la fin de la subjectivité dans la détermination des quartiers prioritaires : vous avez choisi le bon critère, un critère clair, qui permettra de dresser, non pas la carte de la pauvreté en France, mais celle de la ségrégation territoriale. Ce critère, parfois critiqué par les élus, est unanimement accepté par les universitaires. C'est la fin des zones, sémantique stigmatisante. C'est la fin de l'égoïsme territorial, grâce à l'articulation entre communes et intercommunalité.
Enfin, cette loi, c'est l'exigence du droit commun. Il est fini, le temps où la politique de la ville se substituait au droit commun. C'est vrai pour l'État comme pour les régions et les départements.
Pour la première fois, on parle de « co-construction » entre élus et habitants. (M. Philippe Dallier se montre sceptique) On parle aussi de renouvellement urbain et non plus de rénovation urbaine.
Le texte qui nous arrive est bon, grâce au travail des députés et de leur rapporteur François Pupponi, avec qui j'ai travaillé étroitement en amont - fait rare, encore une fois. Nous avons cependant pensé que des pénalités financières n'étaient pas la meilleure façon de convaincre les EPCI récalcitrants.
Je ne l'ignore pas cela fera également sourire, mais j'ai aussi voulu prévoir la « co-formation » car si les habitants ont à apprendre des techniciens et des élus, l'inverse est également vrai.
Mme Esther Benbassa. - Juste !
M. Claude Dilain, rapporteur. - Nous ne l'avons d'ailleurs pas inventée, regardez les travaux d'ATD Quart Monde.
Enfin, nous avons voulu clarifier la politique d'attribution des logements en nous attaquant, sans doute pour la première fois, aux causes et non aux conséquences. Il est fondamental de réfléchir de manière républicaine, sans passion, aux questions de peuplement.
Cette loi fera date dans l'histoire de la politique de la ville. Je souhaite, comme cela est souvent le cas sur ce sujet important, que nous soyons nombreux à la voter. (Applaudissements à gauche)
M. Jean Germain, rapporteur pour avis de la commission des finances . - Le Gouvernement veut donner un nouveau souffle à la politique de la ville. Ce texte est attendu, de nombreux rapports et le Sénat lui-même ayant souvent souligné la nécessité d'une réforme.
La commission des finances s'est saisie de neuf articles. Elle s'est félicitée de la nouvelle géographie prioritaire, qui rendra celle-ci plus lisible et plus efficace ; des nouveaux contrats de ville, conclus à l'échelle intercommunale, la plus appropriée, étant entendu que les maires conservent leur rôle essentiel dans la mise en oeuvre concrète.
Nous nous félicitons aussi de la réaffirmation du rôle des politiques des droits communs. Le lancement d'un nouveau PNRU est aussi une bonne chose, mais son financement sera tendu - j'y reviendrai. Le texte prévoit une dotation politique de la ville appelée à de substituer à la DDU, mais ses contours restent encore à définir. Je me félicite du report de la suppression de la seconde dans l'attente de la mise en place effective de la première, à l'automne.
Nous nous félicitons de la suppression par notre homologue des affaires économiques du malus, instauré par les députés à l'article 5, qui frappait les intercommunalités comptant un ou plusieurs quartiers prioritaires et ne signant pas de contrat de ville. Cela paraissait stigmatisant, peu utile et constitutionnellement fragile.
Les effets de transfert de certains dispositifs applicables dans les anciennes ZUS et les zones franches urbaines (ZFU) vers les nouveaux quartiers prioritaires restent mal connus : nous y serons attentifs, comme au contour de la future dotation ; la commission des finances souhaite être associée à la réflexion.
Elle a également appelé à la vigilance sur plusieurs points. D'abord, le financement du premier programme de rénovation urbaine et du nouveau plan national de renouvellement urbain risque d'être tendu et la trésorerie de l'Anru, entamée, ce qui pourrait retarder des opérations. Espérons que les hypothèses retenues par le Gouvernement dans l'étude d'impact se confirmeront ; il est indispensable que l'Anru dispose d'une trésorerie suffisante. Une stricte étanchéité devra être assurée entre la participation d'Action logement au financement de l'Anru et sa contribution à la garantie universelle des loyers (GUL). Si le coût de celle-ci dérapait, Action logement pourrait être appelée à contribuer davantage, et ne pourrait donc plus financer l'Anru autant que prévu.
Il est en outre prévu que l'Anru puisse agir comme co-investisseur, afin d'encourager les investissements privés, dans le cadre du Programme d'investissements d'avenir (PIA) 2. Il faudra y être attentif, car le coeur de l'activité de l'agence doit demeurer le financement du PNRU. Il n'appartient pas à l'Anru de prendre des risques économiques en tant qu'investisseur, même si, à ce stade, elle agit pour le compte de l'État. Du reste, la CDC et l'Epareca investissent déjà dans la rénovation urbaine des quartiers.
Le Gouvernement veut permettre à l'agence de faire bénéficier d'autres États de son expertise ; un accord a déjà été conclu avec l'agence tunisienne. De crainte que ces actions internationales ne s'avèrent coûteuses, la commission des finances souhaite qu'elles restent ponctuelles, ciblées et mesurées.
La commission des finances a adopté ce projet de loi à l'unanimité moins une abstention, sous réserve de l'adoption de ses deux amendements. (Applaudissements sur les bancs socialistes, du RDSE et écologistes)
M. Philippe Esnol . - Il est d'autant plus urgent de réformer la politique de la ville que les quartiers sensibles sont les plus durement frappés par la crise. Depuis la révolution industrielle, la ville est le reflet des inégalités sociales. À partir de la fin des années 1970, des actions spécifiques ont été entreprises pour les quartiers défavorisés, mais il fallut attendre 1991 pour qu'un ministère leur fût consacré, 2000 pour que fût adoptée la loi SRU et 2003 pour voir créée l'Anru. Mais les dispositifs se sont ajoutés aux dispositifs, sans coordination ; la déperdition des moyens et leur manque de lisibilité ont nui à leur efficacité.
Le Gouvernement propose à juste titre de mettre fin à l'éparpillement des crédits, grâce à une nouvelle géographie prioritaire fondée sur un critère objectif, le revenu par habitant. C'est l'assurance que les quartiers où se concentre la pauvreté bénéficieront d'une légitime solidarité.
Les nouveaux contrats de ville faciliteront la coordination entre politiques sociales et urbaines. Leur gouvernance sera assurée au niveau intercommunal, mais j'insiste sur le rôle du maire, interlocuteur naturel des habitants. Je relève aussi l'attention nouvelle portée au développement économique ; c'est fondamental. (M. Roland Courteau approuve)
Il est louable de mieux associer les citoyens à la politique de la ville, et de sanctionner les discriminations fondées sur le lieu de résidence.
Ce projet de loi constitue non pas une révolution, mais une évolution bienvenue. Nous proposerons quelques amendements pour garantir un niveau élevé de moyens budgétaires, l'évaluation des politiques menées, le maintien du rôle de proximité des communes et l'avenir des zones franches urbaines. Ce projet de loi ne remet-il pas le développement économique au centre des préoccupations ?
Le groupe RDSE, dans sa large majorité, soutiendra le texte. (Applaudissements sur les bancs du RDSE et socialistes)
M. Michel Bécot . - Depuis 1991, date de la création d'un ministère dédié, la politique de la ville est de tous les débats. D'où viennent nos difficultés chroniques ? De la politique menée des années 1950 au milieu des années 1970, c'est-à-dire de la construction des grands ensembles qui représentaient alors une nécessité et un progrès. Mais les quartiers, même récents, doivent s'inscrire dans une histoire à partager avec le reste de la ville.
Il existe dans nos villes et nos campagnes des problèmes d'accès aux services publics et des habitations dégradées, mais nulle part les difficultés ne sont aussi grandes que dans les grands ensembles. La prise de conscience n'est pas nouvelle. Les conventions de développement social des quartiers ont vu le jour en 1982, les ZUS ont été créées en 1995, les zones franches quelque temps plus tard. Mais l'acte fondateur de la politique de la ville, c'est la loi du 1er août 2003 et la création du programme national de rénovation urbaine.
Les précédents gouvernements se sont donné les moyens de leurs ambitions. La création de l'Anru en 2003 a donné lieu à 27 000 opérations de démolition, de production, de rénovation ou de construction, changeant la vie de 4 millions de personnes. Les majorités de droite et du centre n'ont pas à avoir honte de leur bilan.
De cette expérience de dix ans, nous retenons que la rénovation doit avoir lieu dans des quartiers suffisamment sécurisés ; que le dialogue entre tous les acteurs était la condition de la réussite ; que l'État, les collectivités, les associations, les habitants ont des intérêts communs ; que nous sommes arrivés à maturité dans les opérations de réhabilitation ; enfin, que les investisseurs appréhendent fort bien les enjeux sociaux.
C'est surtout l'intégration économique de ces quartiers qui devrait mobiliser notre attention. La politique de la ville requiert donc des moyens. C'est pourquoi je regrette le caractère bavard, pour ne pas dire ronflant, de l'article premier.
M. Claude Dilain, rapporteur. - Oh !
M. Michel Bécot. - Tout ce verbiage nuit à la clarté.
Sans grande surprise mais avec satisfaction, nous constatons la reconduite du PNRU. Quid cependant des moyens ? Vous prévoyez 5 milliards sur dix ans, là où le plan précédent en apportait 12,3. Quel décalage entre vos déclarations sur les quartiers et la réalité de vos arbitrages budgétaires !
Un mot de l'article 4 qui remplace les ZFU, les ZUS et autres zonages par les quartiers prioritaires de la politique de la ville ; cette simplification est bienvenue. Il fallait effectivement instaurer un dispositif de veille active pour les quartiers sortis du dispositif. Mais comment admettre que le décret précisant la liste des quartiers prioritaires soit publié après la loi, et non avant ?
M. François Lamy, ministre délégué. - Vous parlez de la liste de 2009 ? (Rires)
M. Michel Bécot. - Nous nous orienterions vers 1 300 quartiers. Nous pourrions en discuter des heures ; je reconnais que cela paraît une base suffisamment large.
Nous regrettons la suppression de l'Agence nationale pour la cohésion sociale et l'égalité des chances. À la dotation de solidarité intercommunale, les députés ont préféré, à l'article 9, un pacte fiscal et social. Qu'est-ce à dire ? L'imprécision règne aussi quant à l'articulation des articles 5 et 8 sur la compétence des EPCI dans la gouvernance des contrats de ville.
Attention enfin à une implication trop active des habitants : car si ceux-ci manquent d'enthousiasme face aux projets de rénovation, ils s'en montrent satisfaits après-coup. Malgré les avancées, le groupe UMP s'abstiendra parce que le texte repose sur une inconnue...
M. Claude Dilain, rapporteur. - La liste !
M. Michel Bécot. - ... et qu'il est bavard. Cependant, nous voulons croire que cette abstention sera constructive. (Applaudissements à droite et au centre)
Mme Valérie Létard . - Nous récoltons les fruits de la concertation engagée en décembre 2012. Je veux saluer l'action de notre rapporteur Claude Dilain.
M. Claude Dilain, rapporteur. - Merci.
Mme Valérie Létard. - On comptait 751 ZUS, 2 493 quartiers ciblés par les Contrats urbains de cohésion sociale : il fallait revoir notre géographie prioritaire. À l'article 4, il a été choisi de recentrer la politique de la ville sur les seuls quartiers prioritaires selon un critère unique : le revenu des habitants. Si j'avais voulu le pondérer, je reconnais la nécessité de la simplicité.
Deuxième axe, le texte institue l'intercommunalité chef de file de la politique de la ville ; c'est particulièrement nécessaire dans les petites communes qui ne disposent pas de l'ingénierie suffisante.
Troisième axe, la reconduite du PNRU avec la mise en place d'un contrat unique. L'un ne va pas sans l'autre, c'est ce qui manquait dans le dispositif imaginé par M. Borloo.
Il faut donc se féliciter de ce nouveau programme, même si on peut regretter qu'il soit doté de 5 milliards d'euros seulement, contre 12 milliards de subventions dans le précédent pour 45 milliards d'investissements en tout.
Enfin, le débat a eu lieu à l'Assemblée nationale et rebondira au Sénat, on peut regretter que la nouvelle carte de la géographie prioritaire n'ait pas été connue à l'avance. En commission, nous avons introduit la notion de co-construction. Je suis plus dubitative sur la rédaction de l'article 5 bis.
L'article premier bis A prévoit un rapport sur une dotation politique de la ville remplaçant la DDU. Encore une fois, le Parlement est appelé à se prononcer sur une politique dont la base financière est floue. Monsieur le ministre, vous pourriez au moins nous garantir que les crédits seront maintenus, non ? (M. le ministre sourit)
Je veux mentionner plusieurs difficultés à l'article 5 sur les contrats de ville. Ils seront signés par l'intercommunalité ; comment les communes les mettront-elles en oeuvre ? La commission a été sensible à mes arguments sur la nécessité d'abolir les sanctions à l'encontre des EPCI récalcitrants ; vous vous êtes engagés à ne pas y revenir, tant mieux. Mieux vaut une démarche d'incitation et, du reste, il est indispensable que les régions et les départements soutiennent ces contrats de ville.
Je conclurai sur quelques souhaits. Tout d'abord, que votre volonté de simplification ne soit pas affaiblie par une concertation trop poussée. Ensuite, que les moyens de droit commun permettent une transition en douceur à ceux qui ne seront plus éligibles. Enfin, que la mixité sociale soit inscrite au coeur de la rénovation urbaine.
Le groupe UDI-UC aborde, sans surprise, ce débat de manière très ouverte. Son vote final dépendra du sort fait à nos amendements. (Applaudissements au centre, sur certains bancs de l'UMP et sur les bancs socialistes)
Mme Mireille Schurch . - Nous rompons enfin avec la politique du Kärcher et du couvre-feu prônée par le président Sarkozy (M. Philippe Dallier soupire), une politique stigmatisant les 6 millions de nos concitoyens qui vivent dans les quartiers.
Cependant, les crédits de droit commun, que ce projet de loi entend mobiliser prioritairement, baisseront de 4,5 milliards dans les prochaines années. Au fond, la politique de la ville est tributaire du cap gouvernemental, celui de l'austérité.
Face à la pénurie des moyens, on se contente de passer de quelque 2 500 Contrats urbains de cohésion sociale à 1 300 quartiers prioritaires. La question essentielle tient à la définition des territoires dits de « ville active », fort mal nommés puisqu'ils ne seront pas accompagnés.
M. François Lamy, ministre délégué. - Pas vrai !
Mme Mireille Schurch. - Monsieur le ministre, vous nous rassurerez certainement...
De même, les contrats de ville signés par les intercommunalités, remplaceront les anciens Contrats urbains de cohésion sociale. Cette démarche ne sera légitime que si elle est portée par les communes. Au fond, ce texte s'inscrit dans la suite des lois Alur et Métropoles qui dévitalisent les communes. Nous avons fait adopter des amendements en commission pour rappeler le rôle du maire - une de nos préoccupations constantes.
Si nous partageons les objectifs de ce projet de loi, il y manque l'essentiel : le financement. On ignore ce que sera la future dotation politique de la ville, la péréquation verticale est en panne. Le deuxième PNRU ne sera doté que de 5 milliards d'euros. D'ailleurs, il faudrait préalablement s'accorder sur le bilan du premier plan : 145 200 logements ont été détruits, 139 000 seulement construits. L'humain a été trop souvent oublié, d'où notre amendement à l'article premier. Enfin, ce programme doit être abondé prioritairement pas l'État et non par le 1 %.
Nous attendons beaucoup de ce débat ! (Applaudissements sur les bancs CRC ainsi que quelques bancs socialistes)
Mme Esther Benbassa . - Malgré quelques avancées, la réforme proposée par le Gouvernement reste bien timide. Le rapport de Mme Bacqué et M. Mechmache montre que ce projet de loi ne va pas assez loin. Le 19 décembre dernier, ils publiaient sur Mediapart un article intitulé Les élus de la République ont-ils peur d'entendre les quartiers populaires ?
M. Jean-Jacques Mirassou. - Oh !
Mme Esther Benbassa. - Il n'est pas trop tard pour entendre ces voix, pour passer des mots aux actes.
Ce rapport, face à des quartiers qui pourraient basculer vers une abstention de désespérance...
M. Jean-Jacques Mirassou. - Pas tous.
Mme Esther Benbassa. - Laissez-moi parler ! Nous ne sommes pas dans une cour de récréation !
M. Marc Daunis. - Ni au catéchisme.
Mme Esther Benbassa. - À nous, législateurs, de faire de nos mots des passerelles vers l'action. Il est temps que le bas s'exprime et que le haut l'entende. Parlons de l'initiative des citoyens ; parlons de codécision plutôt que de co-construction. Comment inciter ceux qui sont placés dans des situations d'urgence, à prendre l'initiative ? Là est la question.
Dès l'alinéa 1 de l'article premier, reconnaissons l'initiative des citoyens. Reconnaissons aussi le droit à un environnement sain, alors que ces quartiers, outre leurs difficultés, sociales, seront exposés aux pollutions liées aux voies rapides, aux aéroports, aux zones industrielles. Les objectifs environnementaux aussi bien que sociaux, parce qu'ils sont essentiels au bien-être, doivent être pris en compte.
Nous espérons donc un texte plus conforme à nos attentes.
M. Jean-Jacques Mirassou . - La semaine dernière, nous débattions de l'égalité territoriale... Ce texte s'inscrit dans la démarche volontariste du Gouvernement. N'en déplaise à certains, la concertation a singulièrement porté ses fruits et je veux saluer l'implication de notre rapporteur Dilain.
Monsieur le ministre, vous voulez réduire les écarts de richesse et, corollaire indispensable, améliorer le bien-être de nos concitoyens. Belle et bonne ambition à laquelle s'ajoute celle de redonner la parole aux habitants pour former une communauté d'histoire et de destin.
Le recentrage de la politique prioritaire à partir d'un critère scientifiquement incontestable, le contrat de veille nouvelle génération, piloté par l'intercommunalité, mis en oeuvre par les maires, tout cela témoigne du souci constant de solidarité - il fallait le dire !
M. Roland Courteau. - Oui !
M. Jean-Jacques Mirassou. - Donner la parole aux sans-voix est puissamment novateur. Faisons en sorte que cela dépasse le stade du slogan pour devenir une réalité citoyenne. La co-formation, que la commission a introduite dans le texte, permettra aux habitants et élus de mieux se comprendre, donc de mieux s'entendre.
Quelques regrets. Il aurait fallu hiérarchiser les objectifs assignés à la politique de la ville à l'article premier. S'agissant des commerces de proximité et des services, on s'est trop longtemps contenté d'une vision mercantile.
Je suis bien placé pour connaître l'importance d'une offre de soins pluridisciplinaire. Les besoins de l'éducation sanitaire sont tels que le paiement à l'acte n'est peut-être pas le plus approprié.
Enfin, il manque un dispositif, appuyé sur la veille active, pour réaliser des zooms sur les quartiers que je qualifierai de border line. Pourquoi attendre six ans si la situation se détériore ? Je rejoins Mme Létard sur ce point.
L'articulation entre l'intercommunalité et les maires est un point de vigilance partagé. Tout simplement parce que le maire est à l'interface de tout. Je me réjouis du rôle reconnu aux départements et au retour du droit commun.
Avec ce texte, nous ferons un saut qualitatif. Et c'est bien parce que, monsieur le ministre, nous avons comme vous en vue l'intérêt général que nous serons résolument à vos côtés ! (Applaudissements sur les bancs socialistes et du RDSE)
M. Philippe Dallier . - Voici un texte qui était effectivement attendu, y compris avant l'alternance, puisque je réclamais une réforme auparavant en tant que rapporteur spécial. Monsieur le ministre, vous avez pris la précaution de faire précéder ce texte d'une longue concertation. Très bien, mais je regrette que le recours à la procédure accélérée nous prive d'une deuxième lecture, et que vous n'avez pas publié la liste des quartiers prioritaires.
M. François Lamy, ministre délégué. - Je tiens à votre disposition celle de 2009.
M. Philippe Dallier. - Je comprends bien que c'est délicat avant les municipales ; je n'ose pas imaginer le débat ! Surtout, j'approuve, comme M. Dilain, le critère unique : celui du revenu des habitants par rapport à la double référence nationale et locale.
L'association des habitants ? Elle est naturelle. Franchement, les maires ont-ils l'habitude de rester dans leurs bureaux ? Je préfère l'intitulé de conseil à celui de coordinations citoyennes de quartier. Qui désignera les représentants des habitants ? Vraie question. Oui, la politique de ville, c'est de la dentelle. Comment cela se passera-t-il pour le Grand Paris, avec un EPCI de 7 millions d'habitants ? Je souhaite que la métropole gère les crédits et laisse les actions concrètes aux territoires.
Le rapporteur des finances nous alerte sur le financement de l'Anru. Si sa trésorerie est de 140 millions à la fin du PNRU 1, je tire la sonnette d'alarme. On ne pourra pas mettre Action logement à toutes les sauces - nous verrons ce qu'il en sera pour la GUL et le PNRU 2.
L'Anru est une structure légère qui porte des projets lourds. Ne faut-il pas en rester là ? Je suis sceptique sur son investissement dans des sociétés oeuvrant dans la rénovation urbaine à l'étranger. Que va-t-elle faire en Tunisie ?
M. François Lamy, ministre délégué. - Nous avons de grandes ambitions !
M. Philippe Dallier. - Les grandes ambitions d'accord, mais pas au prix du saupoudrage.
On a vu ce que ça a donné pour la politique de la ville : les ZUS, les ZFU et puis... L'agence ne pourra guère faire plus avec 80 personnes sans délaisser les missions qui sont les siennes.
Je suis très favorable à la simplification de l'évaluation et du suivi de l'Anru. J'avais moi-même proposé la suppression du comité, on m'avait pris à partie. Vous osez le faire, parfait.
M. François Lamy, ministre délégué. - J'ai aussi été pris à partie...
M. Philippe Dallier. - Certains plaidaient pour la fusion Anru-Acsé. Je n'étais pas de cet avis. Vous faites disparaître l'Acsé, qui semblait peut-être devenue un outil efficace.
Supprimer la DDU ne me fera pas beaucoup de peine. C'est un dispositif très lourd, qui a profité par effet d'aubaine aux communes qui avaient des projets prêts. J'attends de connaître les critères d'attribution de la nouvelle dotation.
Certes, les dotations progressent. Mais la baisse de DGF pourrait compenser cette hausse...
L'UMP se dirige vers l'abstention ; à titre personnel, en attendant vos réponses, et l'examen des amendements, j'irai peut-être au-delà de l'abstention constructive et bienveillante. (Applaudissements sur les bancs socialistes, RDSE, UDI-UC et UMP)
M. François Lamy, ministre délégué. - Décidément, je vais paraître suspect ! (Sourires)
M. Jean-Étienne Antoinette . - Le volet hexagonal a été largement évoqué. Qu'en est-il des outre-mer ? Concertation, simplification et adaptation sont les maîtres-mots de ce projet de loi. On pourrait croire que les mêmes réponses sont apportées à des problèmes identiques. Cependant l'habitat précaire, informel ou non, les quartiers durcis - anciennement en bois ou en tôle - qui ont conservé leurs disposition ancienne, tout cela justifie amplement la rénovation urbaine outre-mer. Toutefois, à Mayotte, par exemple, faute de ressources et de cadastre, on ne peut rien faire. Trente à quatre-vingt pour cent de la population est exposée aux risques naturels. Les Réunionnais connaissent les cyclones, les Antillais les tremblements de terre et glissements de terrain après les pluies...
Le taux de chômage est largement supérieur à la moyenne nationale, de 20 % aux Antilles et en Guyane, de 30 % à la Réunion. L'accès de tous à l'éducation reste là un enjeu. L'absence de données statistiques fiables rend le ciblage et la politique de la ville difficiles.
Ce projet de loi apporte à ces problèmes des réponses modestes et pragmatiques. Les communes sont souvent le niveau adéquat en outre-mer pour mener cette politique, vu la réalité géographique et les distances entre communes d'une même intercommunalité. Vous laissez, et c'est heureux, la porte ouverte : une gestion intercommunale est possible, par exemple à Cayenne.
En outre-mer, l'écart de revenu n'est pas le seul critère pertinent : il doit être associé à des critères sociaux, économiques, d'habitat.
L'actualisation trisannuelle est un signe de ce souci d'adaptation à condition de ne pas oublier la perspective à long terme pour mener une politique ambitieuse.
Dans les DOM, exposés au mal développement, l'adaptabilité, grâce à l'intelligence des citoyens, doit jouer tout son rôle.
La future dotation budgétaire « politique de la ville » tiendra compte, elle aussi, des réalités ultramarines. L'écart actuel de 30 euros par habitant avec la métropole est inacceptable. J'aurais souhaité aussi que l'on traitât le problème foncier et son prix. L'État, je le rappelle, possède la plupart des terrains...
La politique de la ville est un outil majeur pour le développement des outre-mer. La solidarité entre voisins reste présente outre-mer, mais elle est trop facilement mise à mal. (Applaudissements sur les bancs socialistes)
M. René Vandierendonck . - C'est à Roubaix, trois mois après la publication du rapport de la Cour des comptes, qu'a commencé cette formidable aventure : une concertation nationale et un texte de simplification. Il vous en fallut de la conviction pour faire passer l'idée que le périmètre du problème était le quartier mais que le périmètre de l'action était l'intercommunalité.
La simplification ? La Cour des comptes l'appelait de ses voeux, tant les dispositifs se superposaient. Le critère unique du revenu par habitant est simple et pertinent, et il ne limite pas le champ de la politique de la ville aux zones denses ; il garantit l'équité.
L'efficacité ? Ce texte articule les rôles respectifs de la commune et de l'intercommunalité. Nous devons beaucoup au travail de M. Dilain.
Cette réforme frappe enfin par sa cohérence. Je n'aurais pas cru que le ministère de la ville réussirait à conclure des conventions avec les autres ministères, car jusqu'ici, lorsqu'il y avait des crédits « politique de la ville », les crédits de droit commun disparaissaient... (On le confirme et on applaudit sur les bancs socialistes)
Je regrette qu'ait été déclaré irrecevable notre amendement qui autorisait des expérimentations au titre du droit commun, par exemple dans le domaine scolaire. Notre sort est désormais entre vos mains, monsieur le ministre !
Pourquoi l'hôpital public ne serait-il pas soumis aux contrats de la politique de la ville ? Parmi les services déconcentrés de l'État, nombreux sont ceux qui échappent largement à l'autorité des préfets.
Le développement économique passe bien souvent à l'as... Les ZFU n'ont jamais été pilotées. Elles peuvent fonctionner, cependant, lorsqu'elles sont intégrées à une politique économique.
La mobilité est indispensable. Ceux qui sont chargés d'encourager l'implantation d'entreprises doivent avoir une logique de croissance inclusive.
Le vrai problème est d'attirer des investisseurs privés, dans des secteurs où ils ne vont pas. Les banques exigent qu'ils disposent de 80 % de fonds propres. J'aimerais que vous précisiez votre pensée, monsieur le ministre, sur le rôle de l'Anru à cet égard.
Curieusement, le texte ne dit pas grand-chose de l'économie sociale et solidaire. En attendant des jours meilleurs, qu'il faut travailler à faire advenir, elle constitue pourtant un sas avant une formation ou un emploi.
M. Marc Daunis. - Très bien !
M. René Vandierendonck. - Quoi qu'il en soit, chapeau pour le travail accompli. (Applaudissements sur les bancs socialistes)
M. François Lamy, ministre délégué . - La question de la liste des nouveaux quartiers prioritaires a fait l'objet d'un running gag à l'Assemblée nationale. Sa publication n'était ni possible, ni souhaitable. Je m'explique : nous avons voulu un critère unique et englobant. Les simulations ont montré qu'il couvrait 85 % ou 90 % des cas. C'est un critère objectif, que l'on ne pourra pas infléchir en fonction de la couleur politique du maire...
Je ne pourrai publier de liste qu'une fois la loi votée par le Parlement. Il faudra redessiner la carte en fonction des réalités du terrain, en concertation avec les élus. La période électorale n'est pas propice à ce travail... qui suppose de nombreux aller-retour.
Le Gouvernement ne veut oublier aucun quartier, et c'est pourquoi il s'accordera la souplesse nécessaire : je ne veux pas qu'on écarte un quartier qui a besoin du soutien de la politique de la ville parce qu'il ne compte que 950 habitants...
Certains maires sont inquiets, c'est vrai. C'est qu'on a inclus dans la politique de la ville des quartiers qui n'avaient pas les mêmes difficultés que d'autres. La commune dont j'étais maire y a été intégrée parce que j'ai fait valoir devant le préfet que la commune voisine l'était ; mais aucune des deux n'est vraiment prioritaire...
Pour répondre aux inquiétudes des élus, tous ceux qui souhaitent connaître quel sera le sort de leur commune peuvent venir au ministère consulter les résultats des simulations.
Les exemptions et exonérations attachées aux ZUS seront transférées aux quartiers prioritaires, il n'y a là aucune ambiguïté.
Sur le rôle respectif de la commune et de l'intercommunalité, nous sommes parvenus à un équilibre. Les politiques structurantes - désenclavement par les transports, diagnostics et, bien sûr, développement économique - doivent être conduites à l'échelon intercommunal. Le maire sera chargé des actions de proximité, de la cohésion sociale. Après la loi, il y a la vie et je sais que sur le terrain on arrive à s'entendre. C'est bien pourquoi je ne tiens pas à sanctionner les EPCI récalcitrants, car je ne pense pas qu'il y en ait.
Reste le problème du Grand Paris et d'Aix-Marseille, pour lequel je vous proposerai un amendement. En Île-de-France l'intercommunalité s'est construite selon des motifs politiques ou, pour les communes riches, de manière à éviter l'alliance avec des communes pauvres. M. Dilain en sait quelque chose, avec Clichy et Montfermeil. La situation est en train de changer, mais en attendant les métropoles, je propose que le préfet de région délimite les périmètres concernés. À Marseille, je crois d'ailleurs que deux ou trois contrats de ville infra-métropolitains seraient préférables.
Contrairement à ce que j'ai entendu dire, les crédits de la politique de la ville ne sont pas en baisse. Ils ont été sanctuarisés en 2013 et en 2014 au niveau de 2012, alors qu'ils avaient baissé de 5 % entre 2009 et 2012. Je ferai tout pour qu'il en soit de même les prochaines années. Quoi qu'il en soit, la réforme proposée n'a rien à voir avec le montant des crédits, tant il était indispensable de reconcentrer notre action.
L'Anru, je l'ai dit, pourra entrer au capital des sociétés dédiées à la rénovation urbaine, afin d'accélérer le développement économique de certains quartiers.
Il n'est pas question pour l'agence de s'écarter de sa mission d'origine. Songez que la moitié des gares du Grand Paris se trouvent en ZUS, et que l'activité et la mixité sociale à leurs abords pourraient être renforcées.
Les compétences de l'Anru sont reconnues, et c'est pourquoi les autorités algériennes nous ont sollicités. Il ne s'agit pas d'apporter de l'argent, mais de fixer des normes de qualité. Et avec l'Anru, il y a des architectes, des entreprises du bâtiment... Nous pouvons donc, grâce à l'Anru, conquérir des marchés avec des moyens limités.
Nous reparlerons du financement du deuxième PNRU.
Celui du premier plan n'était pas sécurisé quand je suis arrivé au ministère... La liste des quartiers concernés sera publiée en septembre. Ce plan est appelé à monter en charge, afin d'assurer le tuilage entre les deux plans. Je n'ai pas d'inquiétude, car il faudra un peu de temps aux communes pour monter leur plan de financement.
Enfin, je rappelle que M. Borloo n'annonçait à l'origine que 2,5 milliards d'euros pour le PNRU 1 ; je propose déjà 5 milliards et l'on pourra, grâce au redressement de nos finances publiques, monter en puissance.
Madame Benbassa, vous considérez que nous n'allons pas assez loin. Le rapport Bacqué-Mechmache avait embrassé beaucoup de sujets, je le concentre sur la politique de la ville. C'est quand même une petite révolution culturelle que l'association des citoyens. Certes, tous les élus mènent des concertations. Mais il ne s'agira plus, désormais, de quelques réunions de quartiers à 21 heures, auxquelles ne peuvent pas se rendre ceux qui travaillent à 5 heures du matin... (M. Marc Daunis le confirme)
Tous les techniciens et fonctionnaires n'ont pas l'habitude du dialogue avec les habitants, d'où la nécessité de les former.
Les Français gardent confiance en leurs maires. Veillons à ce qu'ils ne se détournent pas complètement de la vie publique. Je souhaite que les représentants de la population au sein des conseils citoyens soient tirés au sort ; l'indépendance fonctionnelle de ces conseils, que ne présideront pas les élus, sera garantie. C'est une avancée considérable.
Le texte crée enfin une fondation pour l'innovation sociale et le développement économique dans les quartiers. Mme Bacqué et M. Mechmache souhaitaient qu'elle soit abondée par une fraction de la réserve parlementaire. La décision vous appartient...
Je reviens sur la question des ZFU qui arrivent à échéance fin 2014. La mission que j'avais commandée au Cese rendra ses conclusions demain. Sans anticiper, le conseil devrait proposer leur reconduction, sans doute davantage encadrée. Constatons cependant qu'elles coûtent 420 millions d'euros par an pour 5 000 créations d'emplois seulement... Elles doivent donc être mieux ciblées sur les territoires où des entreprises sont effectivement susceptibles de s'installer. Il faudra certainement exclure certaines professions, sinon on encourage la concentration de notaires ou de cabinets de radiologie - et la désertification ailleurs. Le dispositif devra financer l'artisanat et le commerce de proximité, facteurs de lien social et créateurs d'emplois locaux. Voilà les pistes auxquelles je souhaite travailler avec les élus.
Madame Schurch, les crédits de la politique de la ville ont été sanctuarisés et, en plus, les autres ministères ont augmenté les moyens en faveur des quartiers défavorisés dans le cadre des politiques de droit commun ; je pense à l'éducation nationale ou aux transports. Je n'ai pas encore conventionné avec tous les ministères, mais cela se fera. La mobilisation des crédits de droit commun, compliquée et difficile, passera par les contrats de ville. J'en ai conscience, cela ne se fera pas du jour au lendemain, il faudra y insister à travers le Comité interministériel des villes, qui se réunira en juin, je l'ai demandé au Premier ministre, pour dresser un premier bilan des conventionnements. C'est également le rôle du Parlement que de contrôler l'action du Gouvernement.
Monsieur Antoinette, j'ai l'intention ferme de mettre en oeuvre une politique de la ville adaptée à chaque territoire outre-mer. La résorption de l'habitat indigne relève d'autres crédits et d'autres administrations, je proposerai à M. Lurel que nous travaillions ensemble. (Applaudissements à gauche)
La discussion générale est close.
La séance, suspendue à 17 h 40, reprend à 17 h 50.
Discussion des articles
ARTICLE ADDITIONNEL AVANT L'ARTICLE PREMIER
M. le président. - Amendement n°12, présenté par Mme Schurch et les membres du groupe CRC.
Avant l'article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur l'opportunité d'inscrire dans la loi de finances un objectif chiffré de réduction des inégalités territoriales, réévalué chaque année, en indiquant les moyens mis en oeuvre pour l'atteindre. Cet objectif se présente sous la forme d'un plancher de ressources défini par type de collectivités, plancher en deçà duquel une collectivité perçoit des dotations et des subventions pour combler son déficit de ressources ainsi défini.
Mme Mireille Schurch. - Le 12 mai 2011, une proposition de loi était déposée par le groupe socialiste de l'Assemblée que vous et M. Ayrault connaissez bien, monsieur le ministre... Malheureusement, déposée sous l'ancienne législature, elle n'a pas été adoptée. Nous reprenons son article 8, à savoir un rapport sur la fixation d'un objectif chiffré annuel de réduction des inégalités de ressources des collectivités. Il n'est pas acceptable que le pouvoir d'achat par habitant des 1 % des communes les plus riches soit 45 fois plus élevé que celui des 1 % les plus pauvres. Un plancher de ressources, sorte de smic communal, serait défini.
Cela donnerait corps à l'article 72-2 de la Constitution qui impose au législateur de prévoir des « dispositifs de péréquation destinés à favoriser l'égalité entre les collectivités territoriales ». Certes, monsieur le rapporteur, il existe d'autres moyens d'atteindre l'égalité que les dotations ; cela ne constitue pas, pour autant, une réponse suffisante, le niveau des dotations de droit commun sont un socle minimum.
M. Claude Dilain, rapporteur. - Je ne puis qu'être extrêmement favorable à l'esprit de cet amendement. Retrait, sinon rejet car il est satisfait avec le nouvel observatoire.
M. François Lamy, ministre délégué. - Même avis, sachant que nous avons entamé le travail sur les dotations, dont la DGF et la DSU, aujourd'hui déconnectées de la politique de la ville.
M. Philippe Dallier. - Les dispositifs de péréquation ? Nous en parlons à chaque projet de loi de finances et peut-être trop, au point que leur cohérence en souffre. Je regrette, monsieur le ministre, que vous ne parliez pas de la DSU, qui est en lien avec le FPIC, le Fonds de solidarité des communes de la région Île-de-France (FSRIF) ni de la baisse de la DGF, qui constitue une sorte de péréquation inversée. Je vous invite à prendre ce sujet à bras-le-corps et à mener une vraie politique de simplification.
L'amendement n°12 n'est pas adopté.
ARTICLE PREMIER
Mme Mireille Schurch . - Nous en venons au coeur de ce projet de loi. L'article premier définit la nature de la politique de la ville et en pose les principes, que nous partageons. Entre autres faits remarquables, la politique de la ville fera l'objet d'une co-construction. Tout cela témoigne d'un changement de langage et de méthode que nous approuvons.
Malgré votre engagement personnel, monsieur le ministre, nous doutons de la capacité du Gouvernement à mettre en oeuvre les ambitions et missions qu'il s'assigne. Les inégalités, loin de régresser, ont progressé ces dernières années, comme l'a montré la Cour des comptes. La poursuite d'une politique libérale a aggravé la précarité et conduit à toujours moins de professeurs, de policiers et de services de proximité.
Sincèrement, j'espère, monsieur le ministre, que vous saurez, à l'heure des coupes budgétaires, convaincre vos collègues de vous donner les moyens à hauteur de vos ambitions. Nous vous soutiendrons.
M. Roland Courteau . - Lors de la campagne présidentielle, François Hollande avait fait une priorité de l'égalité républicaine entre les territoires. Après une grande concertation, ce projet de loi répond à cette volonté. Égalité, solidarité et justice sociale ne sont pas de vieilles lunes. Si j'ai conscience de la difficulté de la tâche, je suis sûr que cet article premier refonde judicieusement notre politique de la ville. Non, il n'est jamais de cause perdue, il faut vouloir et se donner les moyens de son ambition.
Lutte contre les égoïsmes territoriaux, réduction des écarts de niveau et de qualité de vie, rénovation urbaine et lutte contre la précarité énergétique, amélioration des services publics, tout est lié et cela passera par la « co-construction » avec les citoyens. Mais il est également nécessaire d'inscrire l'emploi, la formation, le développement économique au coeur de la politique de la ville. Il faut franchir ce palier qualitatif, dont parlait M. Mirassou.
Albert Camus disait : « On ne cueille jamais les fruits du bonheur sur un arbre d'injustices » ; il ajoutait : « Il ne suffit pas de dénoncer les injustices, il faut les combattre ! ». C'est bien notre objectif commun. (Applaudissements sur les bancs socialistes)
M. le président. - Amendement n°13, présenté par Mme Schurch et les membres du groupe CRC.
Alinéa 1
Compléter cet alinéa par les mots :
et les habitants de ces quartiers
Mme Mireille Schurch. - Vous voulez surmonter la dichotomie entre le social et l'urbain, monsieur le ministre. C'est nécessaire, mais nous voulons aller plus loin, en affirmant d'emblée que les habitants des quartiers sont les destinataires de la politique de la ville.
M. le président. - Sous-amendement n°84 à l'amendement n°13 de Mme Schurch et les membres du groupe CRC, présenté par M. Dilain, au nom de la commission des affaires économiques.
Amendement n° 13
Alinéa 3
Remplacer les mots :
les habitants de ces quartiers
par les mots :
leurs habitants
M. Claude Dilain, rapporteur. - Citer la participation des habitants dès les premières lignes du projet de loi serait un signe fort. Je propose une amélioration rédactionnelle.
M. François Lamy, ministre délégué. - Favorable à l'amendement n°13, ainsi sous-amendé.
Le sous-amendement n°84 est adopté.
L'amendement n°13, sous-amendé, est adopté.
M. le président. - Amendement n°45, présenté par Mme Benbassa et les membres du groupe écologiste.
Alinéa 1
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
La place et le rôle des habitants dans la définition et la mise en oeuvre de cette politique sont déterminants.
Mme Esther Benbassa. - Mon amendement est satisfait par l'amendement n°13, modifié.
M. Claude Dilain, rapporteur. - Merci.
L'amendement n°45 est retiré.
M. le président. - Amendement n°75 rectifié, présenté par MM. Esnol, Baylet, C. Bourquin, Collin, Fortassin et Hue, Mme Laborde et MM. Mazars, Mézard, Requier, Tropeano et Vall.
Alinéa 4
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Les crédits de droit commun affectés aux quartiers prioritaires de la politique de la ville sont supérieurs à ceux qui sont mobilisés, en moyenne, sur l'ensemble du territoire.
M. François Fortassin. - Quelque 2 500 CUCS ont été conclus, si bien que les quartiers les plus en difficulté ne reçoivent pas les soutiens dont ils ont besoin. Une situation que de nombreux acteurs ont dénoncée, au premier chef la Cour des comptes. Au-delà du ciblage des crédits, prévoyons que ces quartiers bénéficient en priorité des crédits de droit commun.
M. Claude Dilain, rapporteur. - Tout à fait d'accord, mais je trouve un peu dangereux de l'écrire ainsi dans la loi, tous les contrats de ville seront différents. Retrait ou rejet.
M. François Lamy, ministre délégué. - Un exemple : l'éducation nationale concentre déjà ses moyens sur les établissements qui accueillent des élèves des quartiers populaires, mais qui ne sont pas nécessairement dans ces quartiers. C'est vrai aussi pour Pôle Emploi. Oui au fond de l'amendement, non à sa forme. Retrait ?
L'amendement n°75 rectifié est retiré.
M. le président. - Amendement n°74 rectifié, présenté par MM. Dallier, Bécot et Bizet, Mme Cayeux, MM. Chatillon, Couderc, Ferrand, B. Fournier, Grignon, Houel et Karoutchi, Mme Lamure, MM. Laufoaulu, Lefèvre, Leleux, P. Leroy et Milon, Mme Procaccia et M. Trillard.
I. - Alinéa 5
Remplacer les mots :
coordinations citoyennes de quartier
par les mots :
conseils de développement de quartier
II. - En conséquence, dans l'ensemble du projet de loi
Remplacer les mots :
coordinations citoyennes de quartier
par les mots :
conseils de développement de quartier
M. Philippe Dallier. - Comment nommer l'instance qui regroupera les habitants ? « Coordinations citoyennes de quartier » ? Je récuse cette expression, tout comme celle de « conseil citoyen ». Le mot « citoyen » est un des plus beaux de la langue française mais il a un sens précis en droit ; n'allons pas laisser croire aux étrangers qu'ils ne sont pas pris en considération. Je propose d'appeler ces instances des « conseils de développement de quartier ».
M. le président. - Amendement n°83, présenté par le Gouvernement.
I. - Alinéa 5
Remplacer les mots :
coordinations citoyennes de quartier
par les mots :
conseils citoyens
II. - En conséquence, dans l'ensemble du projet de loi
Remplacer les mots :
coordinations citoyennes de quartier
par les mots :
conseils citoyens
M. François Lamy, ministre délégué. - On peut débattre longtemps de l'appellation de ces conseils ; on l'a déjà fait à l'Assemblée nationale... (Sourires) Mme Bacqué proposait « tables de quartier », expression qui nous vient du Canada... Le mot « développement » introduit une confusion avec les comités de développement, et celui de « coordination » rappelle certains regroupements informels... Conseil de citoyens ? Conseil citoyen ? La seconde expression permet de dépasser la notion juridique, l'adjectif évoque les habitants qui exercent leur citoyenneté. J'y reviendrai à l'article 5 bis.
M. Claude Dilain, rapporteur. - Puisqu'il s'agit de co-construction, je m'étais rangé au terme de coordination que les acteurs et M. Mechmache préféraient. On peut se rallier aux « conseils citoyens »... Quant au terme de développement, il renvoie souvent au développement économique. D'où mon avis défavorable à l'amendement n°74 rectifié.
M. François Lamy, ministre délégué. - Même avis.
Mme Valérie Létard. - Ce qui est séduisant dans la proposition de M. Dallier est de renvoyer, par parallélisme des formes, aux instances de consultation que sont les conseils de développement dans les agglomérations. On inscrirait dans le marbre la participation de la société civile dans le droit fil de la loi Chevènement.
M. Daniel Raoul. - Je suis très favorable à l'amendement du Gouvernement. Il ne doit pas y avoir de confusion. Les conseils de développement dans les agglomérations représentent les forces vives, les associations, et non pas les habitants. Là, ce sera totalement différent, les conseils citoyens pourront s'occuper d'aménagement et de de développement économique, mais pas seulement.
M. Michel Bécot. - Je soutiendrai l'amendement de M. Dallier, j'y vois l'occasion de souligner l'importance et le rôle du développement économique dans le renouvellement urbain.
M. Philippe Dallier. - Le développement n'est pas seulement économique, il existe par exemple un indice de développement humain... Il est question de développement au sens large. Et dans ces conseils, puisque nous nous accordons sur le mot, il y aura aussi des associations - pourquoi pas des associations de chefs d'entreprise locaux ?
M. Dominique de Legge. - Les mots ont un sens et, que je sache, le terme de citoyen est ici l'adjectif qualifiant le conseil. Citoyen, républicain, on met ces mots à toutes les sauces... Le ministre de l'intérieur est venu récemment en Ille-et-Vilaine pour participer à un dîner républicain... Moi, je vais à un dîner... « Développement » est plus intéressant ; c'est afficher que l'objectif est le développement économique et social des quartiers. Le message est fort.
M. Jean-Jacques Mirassou. - Cet échange engage finalement un véritable débat de fond. « Citoyen » a une signification universelle, il est utilisé ici au sens littéral puisqu'il s'agit d'un conseil citoyen, et non de citoyens.
M. Jean-François Husson. - Sans surprise, je voterai l'amendement de M. Dallier. Dans mon agglomération, notre comité de développement est composé, pour un quart, d'habitants tirés au sort. Il fonctionne très bien. M. Mirassou sous-entend-il que les conseils de développement seraient moins « citoyens » ? Nous suivre ne vous demandera pas un effort surhumain, monsieur le ministre... Et songez que le président de la République vient d'appeler au rassemblement et à l'unité...
Mme Esther Benbassa. - Le « conseil de développement » fait un peu bureaucratique... Le terme de citoyen ne doit pas faire peur. (M. Philippe Dallier s'exclame) L'expression « conseil citoyen » a du sens, elle est très pédagogique et responsabilise ceux qui exercent leur citoyenneté sans avoir la nationalité française - et qu'on considère trop peu souvent comme des citoyens.
Mme Mireille Schurch. - Remettons l'humain et, donc, le citoyen au coeur de la politique de la ville. Je soutiendrai l'amendement n°83 du Gouvernement.
M. François Lamy, ministre délégué. - Je ne doute pas que M. Dallier ait été sensible à l'appel au rassemblement lancé par le président de la République lors de sa conférence de presse. Je ne doute pas non plus que M. Dallier ait déjà réussi à rassembler... l'opposition !
M. Philippe Dallier. - C'est plus facile que de rassembler la majorité ! (Rires à droite)
M. François Lamy, ministre délégué. - Les conseils ne seront pas seulement chargés du développement économique, mais aussi de cohésion sociale, de vie de quartier... Les citoyens, ce sont les acteurs de la cité. Quel plus beau nom ?
L'amendement n°74 rectifié n'est pas adopté.
L'amendement n°83 est adopté.
M. le président. - Amendement n°46, présenté par Mme Benbassa et les membres du groupe écologiste.
Alinéa 8
Après le mot :
culture
insérer les mots :
, à un environnement sain et de qualité
Mme Esther Benbassa. - Le droit à un environnement sain est reconnu par la Charte de l'environnement.
Les enjeux environnementaux sont grands dans les quartiers prioritaires : en plus des « handicaps » socio-économiques, ces populations sont exposées aux pollutions sonores et atmosphériques, souvent à proximité des voies rapides, des aéroports, des zones industrielles. La lutte contre les nuisances visuelles et sonores et autres pollutions doit faire partie d'une politique de la ville rénovée.
M. le président. - Amendement n°85, présenté par M. Dilain, au nom de la commission des affaires économiques.
Alinéa 14
Rédiger ainsi cet alinéa :
8° Promouvoir le développement équilibré des territoires, la ville durable, le droit à un environnement sain et de qualité et la lutte contre la précarité énergétique ;
M. Claude Dilain, rapporteur. - D'accord sur le fond, mais je préférerais que cette mention soit ajoutée à l'alinéa 14 plutôt qu'à cet alinéa n°8. D'où mon amendement n°85 auquel je souhaite que vous vous ralliiez.
Mme Esther Benbassa. - Soit.
L'amendement n°46 est retiré.
L'amendement n°85, accepté par le Gouvernement, est adopté.
M. le président. - Amendement n°72 rectifié, présenté par MM. Vandierendonck et Delebarre.
Alinéa 11
Compléter cet alinéa par les mots :
ainsi que l'adéquation des moyens du service public hospitalier aux enjeux et besoins du territoire
M. René Vandierendonck. - Mobilisons le droit commun en matière hospitalière.
M. Claude Dilain, rapporteur. - L'amendement est satisfait. Retrait.
M. François Lamy, ministre délégué. - Même avis.
M. René Vandierendonck. - Soit, mais quand on demande des postes en chirurgie dentaire parce que la PMI a lancé une alerte sur les caries, l'hôpital nous oppose la T2A !
M. François Lamy, ministre délégué. - Les directeurs des ARS devront signer les contrats de ville, ce qui devrait supprimer ce genre de problèmes. Une réflexion est en cours sur le volet économique des maisons de santé. Il faut être en mesure de répondre aux besoins de tous ceux qui souhaitent conduire des projets.
L'amendement n°72 rectifié est retiré.
M. le président. - Amendement n°34, présenté par Mme Létard et les membres du groupe UDI-UC.
I. - Alinéa 17, première phrase
Supprimer les mots :
et contribue, de manière indépendante, à l'évaluation de la mise en oeuvre des politiques en faveur de ces quartiers prioritaires. Il élabore une méthodologie nationale et apporte son concours aux structures locales d'évaluation.
II. - Après l'alinéa 19
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
Pour apprécier la pertinence des politiques publiques mises en oeuvre en faveur des quartiers prioritaires de la politique de la ville, une instance d'évaluation indépendante est mise en place par extension, à budget constant, des missions du comité d'évaluation et de suivi de l'Agence nationale pour la rénovation urbaine. Elle s'appuie sur les données fournies par l'observatoire national et elle élabore chaque année, à l'attention du Gouvernement, un rapport d'évaluation qui sera remis au Parlement.
Mme Valérie Létard. - Clarifions les missions d'observation et d'évaluation, qui relèvent de deux logiques différentes et sont difficilement assimilables. En ce qui concerne la politique de la ville, l'actuel observatoire décrit les évolutions sociodémographiques des quartiers, tandis que l'Anru apprécie la pertinence et les effets de la politique publique. En outre, une véritable évaluation doit être indépendante.
Une instance d'évaluation indépendante, cela représente un coût, mais le jeu en vaut la chandelle, vu l'importance de la politique de la ville. Quelque 5 milliards d'euros sont en jeu, et même plus, promet M. le ministre.
L'amendement n°10 n'est pas défendu.
M. le président. - Amendement n°47, présenté par Mme Benbassa et les membres du groupe écologiste.
Alinéa 17, première phrase
Remplacer les mots :
contribue, de manière indépendante, à l'évaluation de la mise en oeuvre des politiques en faveur de ces quartiers prioritaires
par les mots et une phrase ainsi rédigée :
évalue les progrès en matière de participation des habitants aux instances décisionnelles de la politique de la ville. Il contribue, de manière indépendante et en association avec d'autres organismes tels que le comité d'évaluation et de suivi de l'Agence nationale pour la rénovation urbaine, à l'évaluation de la mise en oeuvre des politiques en faveur de ces quartiers prioritaires.
Mme Esther Benbassa. - Mon amendement complète les missions de l'Observatoire national de la politique de la ville. Le comité d'évaluation et de suivi de l'Anru, fort d'une expérience de dix années consacrées au PNRU 1, apportera au futur observatoire sa contribution.
M. Claude Dilain, rapporteur. - Nul ne conteste la qualité du travail du comité d'évaluation et de suivi de l'Anru. Mais pourquoi deux instances pour évaluer la même politique ?
Reste le problème de l'indépendance de l'évaluation. Le projet de loi dispose que l'Observatoire « contribue » à l'évaluation. Cela signifie que d'autres le feront aussi.
M. Philippe Dallier. - Les parlementaires, par exemple.
M. Claude Dilain, rapporteur. - Oui, ou la Cour des comptes. En outre, le comité d'évaluation et de suivi n'est pas supprimé mais intégré au nouvel observatoire.
Avis défavorable.
M. François Lamy, ministre délégué. - Même avis. Nous avons voulu faire une réforme ambitieuse de la politique de la ville, sans rejeter ce qu'avaient fait nos prédécesseurs mais en l'intégrant. Je ne méconnais pas le travail du comité d'évaluation et de suivi de l'Anru mais on peut améliorer les choses. Est-il sain que les rapports sur l'Anru soient rédigés par deux agents de l'Anru ? Je souhaite accroître l'indépendance de l'évaluation, ce qui ne signifie pas que je méconnaîtrais l'indépendance d'esprit des uns et des autres. On aurait certes pu imaginer deux observatoires chargés, l'un de la question urbaine, l'autre de la question sociale.
L'indépendance de l'évaluation est garantie par le fait que ce ne sera plus l'Anru qui financera l'Observatoire...
Mme Valérie Létard. - Ce sera l'État.
M. François Lamy, ministre délégué. - ... et par la réforme du CNV. Un observatoire unique évaluera donc l'ensemble de la politique de la ville. La personnalité de son président garantira l'indépendance de l'institution.
Mme Valérie Létard. - J'entends le Gouvernement et perçois son cheminement intellectuel. Reste qu'observer, ce n'est pas évaluer. Jusqu'ici, il n'y avait pas d'évaluation à proprement parler des politiques humaines et sociales. Le président ? Aucun président n'est nommé à vie...
Une politique d'une telle ambition mérite une évaluation régulière, menée par un acteur identifié. Cela dit, j'ai entendu vos annonces sur le CNV.
Mme Esther Benbassa. - Je rectifie mon amendement pour n'en garder que la première phrase.
L'amendement n°34 n'est pas adopté.
M. François Lamy, ministre délégué. - Madame Létard, je n'ai pas évoqué la personnalité du président du comité d'évaluation et de suivi. (Mme Valérie Létard manifeste son scepticisme).
Je puis accepter l'amendement rectifié de Mme Benbassa s'il est bien clair que la phrase conservée s'ajoute à la précédente et ne s'y substitue pas.
Mme Esther Benbassa. - Tout à fait d'accord.
M. le président. - L'amendement n°47 rectifié sera ainsi rédigé :
Alinéa 17, première phrase
Remplacer les mots :
et contribue, de manière indépendante, à l'évaluation de la mise en oeuvre des politiques en faveur de ces quartiers prioritaires
par les mots :
, contribue, de manière indépendante, à l'évaluation de la mise en oeuvre des politiques en faveur de ces quartiers prioritaires et évalue les progrès en matière de participation des habitants aux instances décisionnelles de la politique de la ville
L'amendement n°47 rectifié est adopté.
M. le président. - Amendement n°48, présenté par Mme Benbassa et les membres du groupe écologiste.
Alinéa 18, seconde phrase
Remplacer le mot :
sexe
par le mot :
genre
Mme Esther Benbassa. - Les statistiques genrées sont indispensables à l'analyse des inégalités entre les hommes et les femmes. Il convient d'utiliser un vocabulaire adéquat, pour une compréhension véritable de la réalité de ces discriminations. Le terme « sexe » renvoie à une identité « sexuelle » qui, ainsi affirmée, tend à considérer comme naturelles, parce que biologiques, les différences entre les hommes et les femmes au sein de l'organisation sociale. L'emploi du terme « genre », non discriminant, fait avancer l'égalité. La France est l'un des derniers pays occidentaux à employer le mot « sexe ».
M. Claude Dilain, rapporteur. - Le projet de loi de Mme Vallaud-Belkacem contient le mot « sexe ». Peut-être ne sommes-nous pas mûrs pour le genre... Retrait.
M. François Lamy, ministre délégué. - Par cohérence avec les choix de Mme Vallaud-Belkacem, avis défavorable.
L'amendement n°48 n'est pas adopté.
M. Daniel Raoul, président de la commission des affaires économiques. - La commission des affaires économiques se réunit à l'instant pour examiner la suite des amendements.
La séance est suspendue à 18 h 55.
présidence de M. Charles Guené,vice-président
La séance reprend à 21 h 30.