Questions orales
M. le président. - L'ordre du jour appelle dix-sept questions orales.
Entretien des ouvrages d'art
M. Jean-Luc Fichet . - La politique de grands travaux, des routes et des ponts, a vu le jour après la Seconde Guerre mondiale pour désenclaver les territoires. Se pose désormais, avec le transfert des routes nationales aux collectivités territoriales, et l'évolution du statut de la SNCF et de VNF (Voies navigables de France), qui fonctionnent de plus en plus comme des sociétés privées, la question de l'entretien de ces ouvrages. D'après une jurisprudence ancienne, ceux-ci appartiennent à la voie qui les portent. Or beaucoup de collectivités ignorent les obligations qui leur incombent en conséquence : surveillance, entretien, rénovation et, éventuellement, renouvellement des ouvrages d'art. Plusieurs communes et départements en ont été récemment informés. Une polémique est née, notamment dans mon département. Les communes de Saint-Yvi et Rédené m'ont alerté. Les collectivités, sans avoir aucun pouvoir de décision, doivent payer la facture des travaux imposés par l'État.
Le Sénat, en adoptant la proposition de loi de Mme Didier en mars 2012, soutenue par l'Association des maires de France (AMF) et l'Assemblée des départements de France (ADF) s'est penchée sur cette lourde question. Malheureusement, l'Assemblée nationale ne s'est pas saisie de ce texte. Faute de moyens financiers mobilisables, certaines collectivités se voient contraintes de réduire le service rendu par leur voie, voire d'en interdire l'utilisation pour des raisons de sécurité.
Comptez-vous lancer un plan pour aider les plus petites communes ?
Mme Marie-Arlette Carlotti, ministre déléguée auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion . - Je vous prie d'excuser l'absence de M. Cuvillier, qui assiste à un Conseil européen à Bruxelles. Comme il vous l'a indiqué en réponse à votre question écrite, la jurisprudence est claire : « en matière d'ouvrage de franchissement, elle impose au propriétaire de la voie portée d'entretenir l'ouvrage, sauf convention contraire. Ce principe s'applique à toutes les catégories d'infrastructures de transport (routes, chemins de fer, canaux), quel que soit le schéma de superposition entre deux voies et quels que soient les maîtres d'ouvrage de l'infrastructure nouvelle : l'État et ses concessionnaires, les établissements publics et leurs concessionnaires, ou les collectivités territoriales ».
L'entretien des ouvrages d'art relève donc bien des collectivités territoriales. Après quoi, les communes du Finistère Rédené et Saint-Yvi, de moins de 3 000 habitants, ont saisi le ministre de leurs difficultés à gérer les ouvrages surplombant la RN65 et la voie ferrée. Il étudie, en s'inspirant de la proposition de loi adoptée par le Sénat en mars 2012, des solutions pour les accompagner financièrement.
M. Jean-Luc Fichet. - Merci car ces coûts, non programmés par les communes, sont faramineux. Les petites communes ont besoin d'être aidées, accompagnées, techniquement et financièrement.
Zones de captage
M. Hervé Maurey . - L'alimentation en eau potable de nos concitoyens est assurée par plus de 30 000 points de captage, autour desquels le code de la santé publique définit plusieurs périmètres de protection : immédiate, rapprochée et éloignée, assortis de restrictions. Celles qui pèsent sur l'urbanisme suscitent le plus de difficultés et d'incompréhension chez les élus.
Conscient de ces difficultés, le Sénat avait organisé, en janvier 2011, un débat sur l'indemnisation des communes au titre du périmètre de protection de l'eau, au cours duquel le Gouvernement s'était engagé à réfléchir à la mise en place d'une solidarité financière, en concertation avec les différents ministères concernés.
Depuis cette date, le Gouvernement a confié au Conseil général de l'environnement et du développement durable le soin d'examiner ce dossier. Dans sa réponse du 26 avril 2012, à la question du 15 septembre 2011, le Gouvernement avait indiqué que ses propositions seraient transmises avant l'été aux différents membres concernés. Or aucune initiative n'a été engagée, il semblerait, au contraire, qu'il soit urgent de ne rien faire. Une proposition de loi a été présentée en juillet 2013, qui prévoit de verser à ces communes, en contrepartie, le produit de la surtaxe sur les sources d'eau minérale. Qu'en pense le Gouvernement ? En outre, comment les services déconcentrés de l'État peuvent-ils aider ces communes à faire face aux multiples tracasseries liées à ces périmètres de protection des eaux ?
Mme Marie-Arlette Carlotti, ministre déléguée auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion . - Je vous prie d'excuser l'absence de M. Philippe Martin, en réunion à la présidence de la République pour préparer la conférence de 2015 sur le climat.
La qualité de l'eau est un bien commun, la protection des sources d'eau potable un enjeu majeur pour le Gouvernement. Le Conseil général de l'environnement et du développement durable (CGEDD) a rendu ses conclusions en août 2012 sur l'indemnisation des communes au titre des périmètres de protection de captage d'eau. Il a rappelé qu'au-delà des préjudices matériels, directs et certains qu'elles ont subis, les communes où se situe le prélèvement ne peuvent recevoir d'indemnisation spécifique.
Selon ce rapport, la réglementation en vigueur, la jurisprudence, et le pragmatisme des acteurs de terrain, permettent de résoudre de façon apparemment satisfaisante la plupart des problèmes. Seules demeurent des difficultés relationnelles entre les grandes agglomérations et certaines communes rurales périurbaines, inhérentes au morcellement communal propre à la France.
Le CGEDD suggère d'améliorer en priorité la collaboration et la compréhension mutuelle entre la commune sur laquelle a lieu le prélèvement et celles qui en bénéficient. De telles solidarités existent déjà au sein des syndicats d'eau.
Le CGEDD étudie les pistes de rapprochement et d'harmonisation des périmètres de captage, dont les difficultés de mise en oeuvre ont été évoquées lors de la table ronde sur l'eau de la Conférence environnementale de 2013.
M. Hervé Maurey. - L'eau étant un bien commun, il n'appartient pas aux collectivités territoriales concernées d'en supporter seules le coût. Je ne crois pas, contrairement à ce que vous dites, que la difficulté tienne à un défaut de solidarité entre collectivités territoriales. On ne peut pas se contenter de dire « Tout va très bien, madame la marquise » !
Gaz de schiste
M. Jean-Vincent Placé . - En décembre 2011, la société canadienne Vermilion Energy, spécialisée dans l'exploitation des gaz de schiste par fracture hydraulique, a acheté des concessions de mines d'hydrocarbures essonniennes situées sur les communes d'Itteville, de Vert-le-Grand, Vert-le-Petit et du Plessis-Pâté. Malgré la loi du 13 juillet 2011 et les multiples engagements du président de la République lors de la Conférence environnementale de 2012, lors du discours du 14 juillet 2013, des mouvements suspects ont été repérés dans ces concessions. Une tour très haute a été installée, en toute discrétion, dans la concession d'Itteville, pendant le mois d'août, nombre d'observateurs ont dès lors craint un repérage pour une future exploitation des gaz de schiste. La population s'est émue, la contestation s'est organisée, le conseil général de l'Essonne a voté à une très large majorité une motion le 4 novembre et le maire du Plessis-Pâté s'est battu avec opiniâtreté. Je lui en rends hommage.
Fort heureusement, le Conseil constitutionnel a entériné, par sa décision du 11 octobre 2013, la loi du 13 juillet 2011, interdisant l'exploration et l'exploitation des mines d'hydrocarbures liquides ou gazeux par fracturation hydraulique, ce qui a apaisé les craintes des riverains et confirmé la position forte du président de la République et du Gouvernement. Mais nous aimerions, avec la population essonnienne, être tout à fait rassurés.
Mme Marie-Arlette Carlotti, ministre déléguée auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion . - Votre question traduit la profonde crise de confiance qui touche les questions minières, sapant les relations entre les industriels, l'État, les élus et l'ensemble de nos concitoyens. Face à cette situation, il n'y a qu'une seule méthode, appliquée par le Gouvernement lorsqu'il a repris en main l'examen des demandes de mutation de plusieurs permis de recherches situés en Île-de-France, présentées par la société Hess Oil : la concertation, la transparence et le respect des expertises y compris celle des citoyens.
Le Gouvernement a confié à un conseiller d'État le soin de réfléchir, en toute autonomie, à une refonte du code minier pour concilier les impératifs économiques et écologiques. Il a rendu ses conclusions le 10 décembre dernier. Transparence et concertation doivent être les maîtres mots en ce domaine, comme dans d'autres.
En 2012, Vermilion Energy, qui emploie directement ou indirectement 600 personnes, a acquitté 65 millions d'euros d'impôts et 10 millions de redevances locales. C'est le premier producteur français de pétrole, et son ancienne concession d'Itteville n'est accordée que pour du pétrole conventionnel. La haute tour construite en août à Itteville est un rig, ouvrage typique pour procéder à des forages de pétrole traditionnel. Il est inconcevable qu'un exploitant minier rechercher en catimini du gaz de schiste par fracturation hydraulique. Les équipements nécessaires sont lourds et aisément repérables par les services compétents.
La décision du Conseil constitutionnel du 10 octobre dernier est claire : l'interdiction de l'exploitation des gaz de schiste est générale et absolue. Le 19 septembre 2012, les préfets ont reçu instruction de procéder régulièrement à des contrôles. Rien de suspect n'a été décelé à Itteville. Il n'y aura ni exploration ni exploitation de gaz de schiste en France, le Gouvernement se tiendra avec fermeté à cette ligne ! (Applaudissements sur les bancs socialistes et écologistes)
M. Jean-Vincent Placé. - Je salue la détermination du Gouvernement face aux lobbyistes pour interdire l'exploitation des gaz de schiste, dont les dangers pour les nappes phréatiques ne sont plus à démontrer. Votre réponse me satisfait pleinement.
Droit des sols
M. Martial Bourquin . - L'année 2013 a été une année de réformes importantes pour notre organisation territoriale. Le projet de loi de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles et le projet Alur (pour l'accès au logement et pour un urbanisme rénové) inquiètent les élus, qui craignent de se voir dépossédés de la compétence urbanisme par son transfert automatique à l'intercommunalité. Dans cette période, les maires et les citoyens ont plus que jamais besoin de savoir qui fait quoi.
Notre attachement à la commune ne ressort pas d'un réflexe passéiste, loin de là. L'intercommunalité, pour être efficace, doit être choisie, et non imposée. Nous croyons profondément ici à la logique de la complémentarité, qui repose sur le respect et le volontariat, plus qu'à celle de la subsidiarité, comme le déclarait ici même le ministre François Lamy, que j'interrogeais en commission mardi dernier.
M. Roland Courteau. - Très bien !
M. Martial Bourquin. - Je le dis d'autant plus librement que ma commune a d'ores et déjà transféré son PLU à l'intercommunalité et qu'elle bâtit et aménage des logements sociaux. Oui, la commune, socle de la République est aussi moderne. L'éloignement des pouvoirs locaux serait un coup dur porté à la démocratie de proximité. Comment rassurez-vous les maires ? Le droit des sols restera-t-il bien une compétence propre des communes ?
Mme Marie-Arlette Carlotti, ministre déléguée auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion . - Je vous prie d'excuser l'absence de Mme Duflot, elle aussi retenue.
Le PLU est un outil majeur d'aménagement du territoire. Le transfert à l'intercommunalité du PLU correspondra à une reconquête d'une compétence qui n'est pas exercée par 40 % des communes, telle est, en effet, la part des communes couvertes par le Règlement national d'urbanisme.
Pour rassurer les maires, le Sénat a laissé, en première lecture du projet Alur, un délai de trois ans aux maires et instauré une minorité de blocage. De plus, un débat sera organisé chaque année sur le PLUI.
Pour les communautés de communes ou les communautés d'agglomération, lorsqu'une commune émet un avis défavorable, la commission de conciliation sera saisie et formulera des propositions dans le délai d'un mois. Un renforcement des conditions de majorité requises, pour voter ensuite l'arrêt du projet ou l'approuver, est prévu. Les communes peuvent également demander à être couvertes par un plan de secteur. Je rappelle enfin que les maires conserveront la délivrance des permis de construire.
Afin d'accompagner les communes, Cécile Duflot a annoncé la création d'un club PLUI au sein duquel elles pourront échanger les bonnes pratiques.
L'ensemble de ces dispositions montre que les intérêts légitimes des communes sont pris en compte.
M. Martial Bourquin. - Encore faut-il que cette minorité de blocage (10 % de la population ou 20 % des communes membres de l'intercommunalité) soit confirmée par l'Assemblée nationale, car il existe un projet funeste, décrit par M. Lamassoure, dans Challenges. Pour lui, 36 000 communes, c'est trop ! 5 000 intercommunalités feraient faire des économies ! Face à la crise de confiance en la politique, à l'anomie croissante de notre société, ce serait une grave erreur !
M. Roland Courteau. - Très juste !
M. Martial Bourquin. - Le droit des sols, je le répète, doit rester de la compétence des communes. Les maires ne doivent pas être les simples signataires des permis de construire, ils doivent exercer pleinement leurs compétences. Nous attendons de l'Assemblée nationale qu'elle soit particulièrement vigilante sur ce point.
M. Roland Courteau. - Très bien !
Sécurité ferroviaire
M. Roland Courteau . - Le terrible accident survenu dans l'Essonne le 12 juillet a mis en lumière la détérioration de la sécurité ferroviaire sur les lignes dites « classiques ». Celle-ci serait due au recours accru à la sous-traitance et à la perte des savoir-faire avec la réduction des effectifs - 200 cheminots en moins sur le seul site de Narbonne. Les organisations syndicales ont alerté depuis longtemps la direction de la SNCF sur la dégradation du réseau, particulièrement en Languedoc-Roussillon, dans l'Aude et dans la région narbonnaise, où se trouvent des lignes qualifiées de « malades » par les dirigeants de l'entreprise publique, faute d'investissements, mais aussi d'entretien.
Après l'audit de l'École polytechnique de Lausanne en 2005, des efforts avaient été réalisés pour régénérer le réseau. RFF (Réseau ferré de France) les estime pourtant insuffisants. Quelles initiatives le Gouvernement compte-t-il prendre pour remédier à cette situation très préoccupante ? En somme, la France restera-t-elle, comme je le souhaite ardemment, une grande nation ferroviaire ? Il en va, comme l'a souligné le Conseil économique, social et environnemental, de l'équité entre les territoires.
Mme Marie-Arlette Carlotti, ministre déléguée auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion . - La sécurité ferroviaire est une priorité du Gouvernement et des acteurs ferroviaires ; elle n'est pas un acquis, il faut l'entretenir.
L'expression de « ligne malade » concerne la détérioration du service, et non pas la sécurité, toute ligne souffrant d'un problème de sécurité étant fermée.
L'audit réactualisé d'octobre 2012 de nos lignes dresse un bilan moins alarmant que l'état des lieux établi en 2005 par l'École polytechnique fédérale de Lausanne. Néanmoins, nous devons moderniser notre réseau. Le Premier ministre en a fait une priorité que M. Cuvillier a déclinée par territoire, en lien avec les collectivités.
Une somme de 2,5 milliards d'euros par an y sera allouée et concentrée sur les lignes les plus fréquentées et les noeuds ferroviaires les plus contraignants. Oui, la France doit rester une grande nation ferroviaire.
M. Roland Courteau. - Les Français veulent savoir dans quoi et sur quoi ils roulent. L'amélioration du réseau est une priorité pour réduire les inégalités sociales, le président de la République l'a dit, et pour réussir la transition énergétique. Ce mode de transport, qui utilise peu d'énergie, émet en effet peu de gaz à effet de serre.
La séance, suspendue à 10 h 25, reprend à 10 h 35.
Recrutement du personnel périscolaire par les communes
M. Antoine Lefèvre . - Les communes, pour faire face à la réforme des rythmes scolaires, doivent recruter des animateurs supplémentaires. Elles y ont consacré beaucoup de temps et d'énergie, tant le délai était court pour organiser les activités. Avec de nombreux ateliers proposés aux enfants, les maires sollicitent des enseignants exerçant dans leurs écoles, du personnel communal, mais aussi des bénévoles et des intervenants extérieurs, soit pour deux, soit pour trois heures par semaine. Par souci d'équité, certains de ces édiles souhaiteraient que tous les intervenants bénéficient de la même rémunération.
Alors que le décret du 14 octobre 1966 autorise la rémunération à l'heure du personnel enseignant du premier degré qui accepte d'effectuer des heures supplémentaires, il n'en est pas de même pour les animateurs qui doivent être rémunérés selon un cadre d'emploi bien défini et sur la base d'une grille indiciaire. Ces intervenants ne travaillant pas durant les vacances scolaires, quelles solutions adopter ? Annualisation du temps de travail ou établissement de contrats à durée déterminée renouvelables à chaque vacance scolaire ? Autre difficulté, celle relative au cadre d'emploi. La rémunération des assistants artistiques est calculée sur la base d'une durée hebdomadaire de vingt heures par semaine. Celle des éducateurs d'activités physiques et sportives sur la base d'une durée hebdomadaire de 35 heures par semaine. Dans les classes « patrimoine », les intervenants peuvent être rémunérés sur la base d'un taux horaire. Ne peut-on pas reprendre cette solution ?
Mme George Pau-Langevin, ministre déléguée auprès du ministre de l'éducation nationale, chargée de la réussite éducative . - Je salue l'engagement des communes qui ont fait le choix d'appliquer dès cette année la réforme des rythmes scolaires. Elles ont, je l'ai vu dans mon tour de France, mis en place de beaux ateliers. Ces collectivités peuvent faire appel à des enseignants, mais aussi à des jeunes ou encore à des agents territoriaux. Le temps de travail peut être annualisé, sauf pour les enseignants et les assistants artistiques.
Les collectivités territoriales ne sont pas seules pour organiser ces activités périscolaires, qui peuvent s'inscrire dans un projet éducatif territorial (PEDT). Elles peuvent faire appel à l'éducation nationale. Si elles ont recours à des associations locales ou à de grandes associations, leur tâche s'en trouve considérablement allégée.
M. Antoine Lefèvre. - Se posent tout de même certains problèmes de responsabilité en cas de recours à des associations. Il faudra clarifier le cadre juridique à cet égard. Je me réjouis, en revanche, de la possibilité d'annualiser le temps de travail, cela apportera de la souplesse.
Enseignement des langues régionales
M. Claude Bérit-Débat . - Je salue le renforcement de l'enseignement des langues régionales dans la loi de refondation de l'école ; elles sont notre patrimoine commun.
La demande de cours d'occitan croît dans le département de Dordogne, dans le primaire comme dans le secondaire.
Des solutions existent, à condition de faire preuve de volontarisme : une option occitan à raison de trois heures par semaine, et non plus deux, ainsi que son rétablissement dans les filières technologiques et professionnelles. L'éducation nationale est-elle prête à donner toute sa place à l'enseignement des langues régionales et à celui de l'occitan en particulier ?
Mme George Pau-Langevin, ministre déléguée auprès du ministre de l'éducation nationale, chargée de la réussite éducative . - Je salue votre engagement, ancien, pour les langues régionales, qui sont consacrées à l'article 75-1 de la Constitution depuis la révision de 2008. Depuis deux ans, le Gouvernement n'a pas ménagé ses efforts pour diffuser leur enseignement : le nombre d'élèves a crû de 24 % durant cette période. Il a manqué des professeurs, nous y avons remédié en ouvrant davantage de postes aux concours.
Les élèves peuvent aussi s'inscrire dans une autre commune. Et les enseignants peuvent avoir recours aux langues régionales dans leurs cours.
L'académie de Bordeaux, par exemple, compte, dans l'enseignement du premier degré, 100 établissements où l'occitan est enseigné - 37 sites bilingues, une école confessionnelle et 9 écoles associatives. Dans le second degré, 62 établissements publics et privés proposent de l'occitan. En tout, 9 192 élèves bénéficient de cet enseignement.
Dans le département de la Dordogne, 96 élèves étudient en classe bilingue français-occitan et 991 sont sensibilisés à cette langue régionale dans le premier degré. Six collèges sur 38 et 13 lycées proposent une option occitan à leurs élèves.
Mme Filippetti vient de recevoir un rapport à ce sujet. C'est le signe d'une République qui veille au respect des règles du vivre ensemble, tout en se montrant accueillante à la diversité.
M. Claude Bérit-Débat. - Les moyens restent insuffisants. Les collectivités doivent financer des classes. En Dordogne, on manque aussi de professeurs. Votre réponse laisse à désirer, madame la ministre.
Évacuation de campements de Roms
M. Michel Billout . - La circulaire interministérielle du 26 août 2012 relative à l'anticipation et à l'accompagnement des opérations d'évacuation des campements illicites pose des problèmes d'application. L'attitude des pouvoirs publics a conduit de nombreuses associations à saisir le Défenseur des droits pour refus d'inscription à l'école, scolarisation hors de l'école en milieu isolé, ou en raison des conditions d'évacuation ou d'interpellation et d'incarcération des enfants.
Les expulsions répétées, sans application de la circulaire, rompent la scolarité des enfants et le suivi sanitaire des familles, et elles empêchent toute insertion. Les collectivités territoriales et les services de l'État peinent à trouver des solutions d'hébergement et à accompagner ces personnes.
Ces difficultés, rapportées par de nombreux élus, ont été évoquées lors du sommet des maires sur les Roms. Le Congrès des pouvoirs locaux et régionaux du Conseil de l'Europe a constaté le manque de moyens des pouvoirs locaux pour appliquer les politiques gouvernementales sur les questions relatives aux Roms. Le Gouvernement entend-il en finir avec le « nomadisme forcé » ?
Mme George Pau-Langevin, ministre déléguée auprès du ministre de l'éducation nationale, chargée de la réussite éducative . - Fermeté dans l'application de la loi et humanité, tels sont les principes qui nous animent. La situation est difficile. Des solutions ont été trouvées dans certains départements - villages d'insertion ou encore construction de bungalows dans la région lyonnaise - et je salue le pragmatisme des autorités. Une mission d'appui a été confiée à l'établissement public Adoma, opérateur historique, que les préfets pourront soutenir. La dimension européenne de la situation des Roms ne doit pas être oubliée. Des crédits européens peuvent être débloqués, pour aider les collectivités territoriales. Une meilleure coopération s'impose aussi avec les pays d'origine, la Roumanie et la Bulgarie, pour que ces populations s'insèrent dans leurs pays d'origine.
M. Michel Billout. - Je connais votre engagement personnel, madame la ministre, mais vos propos ne me rassurent pas. En ce début d'hiver, les expulsions se poursuivent, à Saint-Ouen, à Champs-sur-Marne. On retrouvera les populations expulsées, plus loin, encore plus précaires. L'Europe impose de donner des moyens aux acteurs locaux. Les finances des collectivités locales sont exsangues. Que l'État prenne ses responsabilités !
Exonération de taxe foncière
M. Philippe Leroy . - J'attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur les conséquences budgétaires de l'exonération de taxe foncière sur les propriétés non bâties (TFNB) pour les communes situées en zone « Natura 2000 », peu peuplées et boisées. La compensation prévue pour les collectivités territoriales a été intégrée au périmètre des variables d'ajustement de l'évolution de l'enveloppe normée... Bercy renie les engagements environnementaux de l'État. Les communes forestières concernées sont souvent pauvres. Elles subiront en 2014 un manque à gagner de 1 million d'euros. Je demande au Gouvernement d'exclure l'exonération « Natura 2000 » du périmètre.
Mme George Pau-Langevin, ministre déléguée auprès du ministre de l'éducation nationale, chargée de la réussite éducative . - Depuis la loi de finances pour 2009, le périmètre des variables d'ajustement utilisé pour réguler l'enveloppe normée a été élargi à la majorité des allocations compensatrices, dont celle ayant trait aux zones « Natura 2000 ».
Par le pacte de confiance et de responsabilité signé sous l'égide du Premier ministre, le 16 juillet dernier, les collectivités ont consenti un effort de 1,5 milliard d'euros et participent ainsi à l'effort de redressement budgétaire. Il n'est donc pas souhaitable d'exclure cette compensation des variables d'ajustement. Le périmètre large des variables d'ajustement est le gage d'un pilotage équilibré des concours de l'État.
M. Philippe Leroy. - Les collectivités territoriales n'ont nullement consenti à se voir enlever 1,5 milliard d'euros... Demander un tel sacrifice à des petites communes rurales, souvent pauvres et qui n'ont que la forêt pour ressource, pour gagner 1 million d'euros, est un signe de mépris ou de méconnaissance.
La séance, suspendue à 11 h 5, reprend à 11 h 15.
Adoption d'enfants haïtiens
M. Yannick Vaugrenard . - J'attire l'attention de Mme la garde des sceaux sur les obstacles opposés à l'adoption plénière d'enfants nés en Haïti et rapatriés en France au début de 2010, à la suite du séisme qui s'y est produit le 12 janvier 2010. Le traitement équitable des familles et de leurs enfants est compromis par l'application de la circulaire adressée aux procureurs et datée du 22 décembre 2010.
Prenant prétexte de ce que les autorités haïtiennes auraient décidé de ne plus légaliser la signature des notaires sur les consentements, cette circulaire demande d'opposer un avis défavorable aux requêtes des familles de conversion en adoption plénière. La loi haïtienne sur l'adoption prévoit que, dans sa nouvelle famille, l'adopté a les mêmes droits et les mêmes obligations que ceux résultant d'une filiation biologique légitime ou naturelle. Haïti fait, aujourd'hui, évoluer son dispositif législatif pour reconnaître l'adoption simple et l'adoption plénière. Jusqu'à présent, les adoptions étaient prononcées par les tribunaux d'Haïti, avec le consentement éclairé légalisé, document notarié par lequel les parents biologiques donnent leur accord irrévocable pour que l'adoption devienne plénière en France. Les parents adoptifs pouvaient ainsi obtenir, en France, un jugement d'adoption plénière auprès de leur tribunal de grande instance. La fin de la légalisation de la signature des notaires compromettant, aux yeux du précédent garde des sceaux, la validité du document par lequel l'adoption des enfants originaires d'Haïti devient plénière en France, il a émis ladite circulaire aux conséquences désastreuses et variablement appliquée d'un tribunal à l'autre. L'unicité de la République est en cause.
Je m'interroge aussi sur les conséquences de la nouvelle loi sur l'adoption, votée en Haïti en août 2013. Qu'entend faire le Gouvernement pour ces enfants qui ont commencé à prendre leurs racines dans leur famille française ?
Mme Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice . - Le dossier, comme tous les contentieux impliquant des enfants, est extrêmement sensible ; la charge émotionnelle est forte. Je n'ai pas d'éléments précis sur des divergences d'application de la circulaire : merci de m'en fournir car nous sommes, comme vous, attachés à l'unité des jugements.
L'accord conclu après le séisme entre l'ambassade de France et le Premier ministre haïtien portait sur l'adoption de 300 enfants, qui était déjà en cours. Mais aucune convention bilatérale n'avait été conclue entre la France et Haïti pour faciliter la reconnaissance du consentement. Depuis, Haïti a signé la convention de La Haye et voté une nouvelle législation en août 2013. L'adoption simple emporte déjà l'autorité parentale exclusive, l'attribution du nom et la possibilité d'engager des démarches en vue de l'acquisition de la nationalité française ; les enfants, à leur majorité, peuvent demander l'adoption plénière.
Néanmoins, vous avez raison, la situation est douloureuse pour les familles concernées, mais nous sommes obligés de respecter le droit haïtien ; la Cour de cassation et le Conseil d'État saisi pour abus de pouvoir, l'ont confirmé. Nous allons étudier plus avant la question avec les autorités haïtiennes et nous tenons prêts à informer les familles.
M. Yannick Vaugrenard. - Avec des dossiers comparables, des familles se sont vu reconnaître l'adoption plénière par les tribunaux de Bourges ou d'Angers, non par celui de Nantes.
La ratification de la convention de La Haye ne saurait-elle avoir d'effet rétroactif ? Merci de suivre ce dossier.
Maison d'arrêt d'Aurillac
M. Jacques Mézard . - Madame la garde des sceaux, je vous exprime au nom du groupe RDSE notre amitié et notre solidarité, après les agressions dont vous avez été victime.
J'en viens à la question que j'ai été obligé de déposer, faute d'avoir obtenu une réponse précise à mes interpellations antérieures.
La maison d'arrêt d'Aurillac est située à deux heures quinze de route de la cour d'appel et de la maison d'arrêt de Riom, et à près de quatre heures de route de la direction régionale de l'administration pénitentiaire de Lyon dont elle relève. Si les conditions de détention y paraissent encore acceptables par rapport à ce qui existe dans de nombreux établissements similaires, entre deux et quatre détenus occupent néanmoins chaque cellule. Si elle disparaît, disparaîtront à coup sûr à terme le TGI et d'autres établissements de justice.
À la suite de sa visite de l'établissement en 2012, l'ancien garde des sceaux s'était engagé à faire conduire au plus vite des expertises afin, d'une part, de mener des travaux de mise en conformité avec les nouvelles obligations tirées de la loi pénitentiaire et, d'autre part, d'assurer la pérennité de l'établissement - en dépit de l'opposition de la direction régionale.
À ce jour, aucuns de ces travaux de mise aux normes n'ont été réalisés, tandis que les restrictions de financement entravent l'entretien normal du site. Il faut passer par Lyon pour changer une ampoule... Et il n'y a toujours ni sas d'entrée, ni vidéosurveillance.
J'attends une réponse précise.
Mme Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice . - Merci de vos paroles de soutien.
Malgré les demandes de certains, je me suis engagée à ne pas fermer la maison d'arrêt d'Aurillac. Des travaux y ont déjà été réalisés, de sauvegarde ou de rénovation ou encore pour améliorer les conditions de travail des agents.
J'entends vos observations sur le sas et la vidéosurveillance. Vous savez que j'ai engagé un plan triennal de sécurisation des établissements sur tout le territoire. J'ai demandé à l'administration pénitentiaire d'étudier minutieusement les conditions de sécurité des établissements.
La maison d'arrêt d'Aurillac n'est pas dans la première vague de travaux d'urgence. Vous avez certainement une appréciation plus fine que celle de l'administration, qui se fonde sur des critères tels que celui de la surpopulation carcérale, qui ne vaut pas pour Aurillac où le taux est de 62 %. Quant aux ampoules, je veillerai à ce que notre administration ne s'aligne pas sur le modèle soviétique... Je vous propose une réunion de travail à la Chancellerie pour faire le point.
M. Jacques Mézard. - La situation témoigne du poids de la technocratie. C'est l'administration qui a choisi de fermer la maison d'arrêt d'Aurillac.
Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. - Je viens de vous dire que j'ai décidé le contraire !
M. Jacques Mézard. - Mais l'administration finira par arriver à ses fins si on ne fait pas les travaux indispensables. Si l'on ferme tous les services publics sur un rayon de 150 kilomètres, autant dire que nous devrons déménager. Vous n'accepteriez pas cette situation en Guyane ! Je souhaite que le pouvoir politique prenne ses responsabilités et dise à l'administration : notre choix est fait, des travaux sont nécessaires, vous allez les réaliser !
Centre pénitentiaire de Bordeaux-Gradignan
M. Gérard César . - La maison d'arrêt de Bordeaux-Gradignan a plus de 45 ans. Construite pour accueillir 448 détenus, plus de 700 détenus y sont aujourd'hui incarcérés. La vétusté de ce bâtiment n'offre plus aux détenus des conditions dignes, ni au personnel pénitentiaire de bonnes conditions de travail. Votre prédécesseur avait prévu sa fermeture et la construction d'un nouvel établissement, qui aurait garanti l'encellulement individuel, des quartiers à taille humaine, des activités pour les détenus et un meilleur accueil des familles. Vous n'en avez pas fait une priorité de votre plan triennal, madame la ministre. Ce nouvel établissement est pourtant indispensable, dans les meilleurs délais, car le délabrement des bâtiments freine la réinsertion des détenus malgré le dévouement du personnel. Je souhaite son inscription au plan triennal du ministère.
Mme Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice . - Merci de souligner l'engagement du personnel. La surpopulation carcérale dans cet établissement est indéniable - 150 %. Des travaux de mise aux normes et de sécurisation ont été entrepris en 2013.
J'entends votre demande de construction d'un nouvel établissement, qui n'a pas été retenue en effet dans le cadre du plan triennal. Le quartier des peines aménagées, qui date de 2011, est en bon état, les deux autres sont très dégradés, il est vrai. Mais vous connaissez les contraintes budgétaires. Je m'engage - et ce n'est pas une promesse frivole, car je n'en fais jamais - à examiner le cas du centre pénitentiaire de Bordeaux-Gradignan, qui avait été retenu autrefois, mais dans le cadre d'un partenariat public-privé sans que toutes les études aient été réalisées. À preuve, des études d'emprise sont déjà en cours. Je vous tiendrai informé de l'évolution du dossier.
M. Gérard César. - Comme pour Aurillac, il me paraît nécessaire de mettre en place un groupe de travail ; il faut en finir avec la surpopulation.
Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. - Volontiers.
La séance, suspendue à 11 h 40, reprend à 11 h 45.
Frais de recouvrement de créance
M. Henri Tandonnet . - Lors de l'examen en première lecture au Sénat du projet de loi relatif à la consommation, j'ai défendu un amendement imposant plus de transparence aux établissements bancaires en cas de recouvrement de créance. Il avait pour but de faire apparaître dans le décompte de la somme à recouvrer le montant détaillé de la créance : le taux d'intérêt appliqué, la somme sur laquelle il s'applique, ainsi que la période sur laquelle ces intérêts sont décomptés. Ainsi, les consommateurs recevraient-ils enfin une information claire et compréhensible.
Le Gouvernement a émis un avis défavorable en précisant qu'un tel décompte était déjà prévu par l'article R. 124-4 du code des procédures civiles d'exécution et que l'amendement était donc satisfait. Cette règle ne me semble pourtant pas appliquée. L'amendement avait été adopté par le Sénat en décembre 2011, lors de l'examen du projet de loi renforçant les droits, la protection et l'information des consommateurs. Ce texte n'a malheureusement pas pu aboutir. Qu'entend faire le Gouvernement pour garantir plus de transparence ?
M. Benoît Hamon, ministre délégué auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé de l'économie sociale et solidaire et de la consommation . - Le projet de loi « consommation » a été adopté cette nuit par l'Assemblée nationale, il contient des dispositions nouvelles dont vous aurez bientôt à débattre - notamment du prix des lunettes que nous voulons faire baisser. Mais là n'est pas le sujet...
L'article R. 124-4 du code des procédures civiles d'exécution, je vous l'avais dit en séance publique, satisfait votre demande. De plus, le débiteur reçoit une information régulière sur les frais bancaires, au titre de l'article L. 311-46 du code de la consommation. La loi de régulation et de séparation des activités bancaires ajoute que cette information doit être délivrée avant le prélèvement. À cela, il faut ajouter l'article L. 311-26 du code de la consommation qui impose de délivrer une information très détaillée aux bénéficiaires de crédits renouvelables. Cela n'enlève rien aux problèmes concrets des personnes prises dans la spirale du surendettement. La loi bancaire, avec le plafonnement des frais, la loi sur la consommation, avec l'encadrement des crédits, apportent des solutions - et votre groupe y a contribué. Le plan pluriannuel contre la pauvreté prévoit la mise en place de « points conseil budget » où les particuliers pourront se faire expliquer les documents de leur banque et recevoir l'aide d'un tiers de confiance. Le registre national des crédits aux particuliers protégera mieux les populations sensibles.
M. Henri Tandonnet. - Merci de votre détermination. Avançons sur ce qui peut paraître anecdotique : le calcul des intérêts. Il faudra préciser le capital, le taux d'intérêt appliqué et la durée à laquelle il s'applique. Mon expérience de quarante ans dans le domaine, croyez-moi, m'incite à penser que nous y gagnerions en transparence.
Taxe sur les transactions financières
M. Dominique Bailly . - Le projet de taxe européenne sur les transactions financières a trouvé un aboutissement lors du conseil « économie-finances » du 22 janvier 2013, avec le lancement d'une coopération renforcée sur le sujet entre onze États membres. La Commission européenne propose que le dispositif concerne le marché des actions et obligations, au sein duquel chaque transaction serait taxée à hauteur de 0,1 % ; les produits dérivés le seraient à hauteur de 0,01 %. Elle envisage une entrée en vigueur au cours de l'année 2014.
Au cours des derniers mois, les négociations entre les États membres ont fait apparaître des inquiétudes tant sur l'impact économique de la taxe que sur l'affectation des fonds récoltés. Le Gouvernement français, qui soutient le projet, a souligné qu'il convenait d'améliorer la proposition de la Commission européenne, afin de parvenir à une taxe qui ne nuise pas au financement de l'économie. Les fédérations et associations professionnelles estiment que le dispositif pourrait conduire à des délocalisations massives d'activités et donc à des suppressions d'emplois. Quelles sont les pistes envisagées pour améliorer la proposition de la Commission européenne ?
M. Benoît Hamon, ministre délégué auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé de l'économie sociale et solidaire et de la consommation . - Je vous prie d'excuser l'absence de M. le ministre de l'économie. La position de la France est constante : faire aboutir rapidement ce projet inédit - une première coopération renforcée en matière fiscale et une première taxe sur les transactions financières à grande échelle. Depuis l'élection de François Hollande, la France a pris l'initiative ; elle a su rallier dix États membres et demandé à la Commission de lancer une coopération renforcée. En raison des élections allemandes et de la constitution du gouvernement outre-Rhin, le dossier a été un peu retardé...
La France a demandé des aménagements à la Commission, notamment sur la question de la territorialité ; le Parlement européen en a demandé d'autres. Nous sommes à pied d'oeuvre aux côtés de l'Allemagne pour que ce formidable projet voie le jour dans onze pays et devienne un exemple pour toute l'Europe.
M. Dominique Bailly. - Je salue l'engagement du Gouvernement en espérant que le projet de taxe européenne sur les transactions financières aboutisse dès 2014. Ce sera un élément important pour la construction européenne.
La séance, suspendue à 11 h 55, reprend à midi.
Indemnités d'installation des fonctionnaires à Saint-Barthélemy
M. Michel Magras . - Le décret du 15 avril 2013, qui ramène de seize à six mois l'indemnité versée aux fonctionnaires affectés à Saint-Barthélemy, suscite l'inquiétude des enseignants et l'incompréhension des élus. L'indemnité a été fixée entre dix et seize mois en cas d'affectation à Saint-Martin, alors que le coût de la vie y est moins élevé et que ces deux collectivités sont voisines de seulement vingt kilomètres. La diminution de l'indemnité à Saint-Barthélemy accroîtra la pénurie d'enseignants et avivera la concurrence entre les deux collectivités voisines. Les enseignants, qui ne disposent pas de logements de fonction, sont les seuls fonctionnaires à en faire les frais.
Que Saint-Pierre-et-Miquelon se soit vu appliquer ce dispositif semble indiquer que le critère qui a présidé à cette décision est la démographie. J'ajoute que douze enseignants seulement sur 45 présents sur l'île ont bénéficié de l'indemnité d'installation dans ses anciennes formes. Le Gouvernement envisage-t-il de revenir sur cette décision en tenant compte de la cherté de la vie ?
M. Victorin Lurel, ministre des outre-mer . - L'ancienne indemnité, créée en 2001 à titre provisoire, a été réformée en octobre 2013 et continue d'être versée à toutes les collectivités mais en répondant à leurs situations spécifiques. Dès lors, la concurrence entre territoires ne peut être invoquée. La Guyane s'est vu attribuer un régime très souple, vu l'étendue de son territoire et l'importance des effectifs. Saint-Martin peine à recruter des enseignants d'où la modulation prévue, même si le régime est moins favorable qu'en Guyane. À Saint-Barthélemy comme à Saint-Pierre-et-Miquelon, aucun problème d'attractivité n'a été soulevé ; en revanche, la cherté de la vie est prise en compte. Les effets de la réforme seront étudiés attentivement et, s'il se pose un problème d'attractivité dans ce territoire, je suis prêt à l'étudier avec vous.
M. Michel Magras. - Merci de cette réponse qui me satisfait en ce que vous vous dites prêt à réévaluer la situation. Je n'hésiterai pas à vous solliciter.
Délai de présentation à l'examen du permis de conduire
Mme Catherine Procaccia . - En France, le délai moyen entre la fin de la formation pratique et l'examen du permis de conduire varie de quelques semaines d'attente à deux mois ; il atteignait jusqu'à six mois dans le Val-de-Marne en juillet, huit mois aujourd'hui. Cette situation embarrasse les élèves qui doivent faire face à des coûts qui ne sont pas intégrés dans les forfaits. Entre la dernière heure de formation et le passage à l'examen, nombreux sont ceux qui doivent reprendre des leçons pour conserver leurs acquis. Ce surcoût est source de relations conflictuelles avec les auto-écoles, d'autant plus quand l'élève a échoué une première fois. L'obtention du permis de conduire est importante pour trouver un travail, vous le savez.
Le préfet a décidé, à titre exceptionnel, de faire appel à des inspecteurs pour débloquer la situation. Le Val-de-Marne compte moins d'inspecteurs par habitant que la Bretagne, une seule personne en préfecture s'occupe de l'enregistrement des dossiers ; il faut quatre mois pour renouveler l'agrément des auto-écoles, dont certaines sont au bord du dépôt de bilan. Quelles mesures de court et long termes allez-vous prendre ?
M. Victorin Lurel, ministre des outre-mer . - Le permis de conduire est une condition indispensable de la mobilité et de l'autonomie des jeunes. Le nombre de personnes qu'une école est autorisée à présenter est fixé nationalement et fonction du taux de réussite. En cas de saturation, des renforts sont possibles ainsi que l'organisation des examens le samedi. Le délai moyen d'attente a ainsi été ramené à 86 jours au niveau national. Il est encore de 120 jours dans le Val-de-Marne. D'où l'organisation, durant les neuf premiers mois de 2013 de 100 examens supplémentaires par mois, ce qui correspond à un poste d'inspecteur à temps plein. Les difficultés en Val-de-Marne s'expliquent aussi par un taux de réussite des élèves inférieur à la moyenne nationale.
Le ministre de l'intérieur, conscient des difficultés persistantes, a ouvert une réflexion et demandé au Conseil national de la sécurité routière de lui proposer un plan d'action.
Couverture mobile
M. Jean Boyer . - La couverture en téléphonie mobile, je le dis avec solennité, pose des difficultés persistantes, surtout dans nos territoires de montagne. Des actions significatives de mutualisation en partenariat avec les collectivités locales, départements et régions, et les opérateurs, ont été engagées depuis plusieurs années, pour couvrir une partie des zones blanches. Grâce à cette solidarité, la France dite profonde bénéficie du progrès. Mais il faut aller plus loin.
Oui, ces actions collectives doivent perdurer, être encore améliorées par une mutualisation des opérateurs. Il est anormal que les relais de deux, voire trois opérateurs, se chevauchent sur nos territoires, ce qui augmente les coûts d'investissement, dénature le paysage et provoque des incohérences de réception.
Nos territoires ruraux et de montagne ont droit à la parité ; les habitants ne comprennent pas le « gâchis » d'équipement. Les zones grises sont devenues bien souvent des zones blanches. Quelles évolutions techniques ou réglementaires le Gouvernement envisage-t-il ?
M. Victorin Lurel, ministre des outre-mer . - Je vous prie d'excuser Mme Duflot. L'amélioration de la couverture est le résultat des règles de mutualisation, des efforts de l'État et de l'implication des collectivités territoriales et des opérateurs. Plus de 3 200 communes ont ainsi pu être desservies.
Dans les zones de faible densité, c'est à la puissance publique d'agir pour assurer l'égalité entre les territoires. Ailleurs, la présence simultanée d'installations de plusieurs opérateurs sur le territoire d'une même commune procède du droit européen de la concurrence.
Vous craignez que les zones grises ne deviennent blanches, ce qui voudrait dire que des opérateurs ont cessé leurs services. Mme Duflot vous invite à lui communiquer toutes les informations que vous pourriez détenir sur une détérioration de la couverture.
M. Jean Boyer. - Merci de cette réponse complète. Dans cet hémicycle, pour être tous des hommes de bon sens,...
Mme Catherine Procaccia. - Et des femmes !
M. Jean Boyer. - ... nous savons que les opérateurs s'implantent là où est la population. Quand un canton compte moins de cinq habitants au kilomètre carré, comment voulez-vous qu'il attire un opérateur ? Nous avons pris une initiative dans mon département qui devrait être suivie par d'autres. À savoir, plutôt que deux ou trois pylônes dans une même commune, un seul et tous les opérateurs s'y branchent.
La séance est suspendue à midi vingt-cinq.
présidence de M. Charles Guené,vice-président
La séance reprend à 14 h 30.