Conducteurs âgés de 70 ans et plus
M. le président. - L'ordre du jour appelle l'examen de la proposition de loi visant à instituer une évaluation médicale à la conduite pour les conducteurs de 70 ans et plus, à la demande du groupe UDI-UC.
Discussion générale
M. Yves Détraigne, auteur de la proposition de loi et rapporteur de la commission des lois . - La situation est inhabituelle. Outre le fait que je suis l'auteur et le rapporteur de cette proposition de loi, la commission des lois a refusé et mon texte et mes amendements. Si j'avais 70 ans, et cela viendra, on m'accuserait de conflit d'intérêts. (Rires à droite)
Le permis A et B, autrefois délivré à vie et sans visite médicale préalable, est délivré désormais pour quinze ans en application de la directive du 20 décembre 2006. Son renouvellement sera purement administratif. En revanche, les professionnels, chauffeurs routiers et conducteurs de taxis, subissent des contrôles réguliers. Le vieillissement de la population accroît le nombre de conducteurs âgés. L'Observatoire national interministériel de la sécurité routière parle de conducteurs du quatrième âge, dont la part de responsabilité augmente dans les accidents avec atteintes corporelles.
Ils sont aussi plus vulnérables et victimes en cas d'accident. Notre proposition de loi instaure un examen médical à partir de 70 ans. Certes, il ne s'agit pas de stigmatiser telle ou telle catégorie de population, d'autant que l'alcoolisation et la vitesse excessive expliquent la plupart des accidents.
Le but est d'exercer une vigilance particulière à l'égard d'une classe d'âge très exposée à certaines catégories d'accidents, notamment aux traversées de carrefour. Cette proposition de loi nous rapprochera de la situation de nombreux pays de l'Union européenne : 13 des 27 pays de l'Union imposent un examen médical avant délivrance du permis et 10 imposent un contrôle périodique.
La directive de 2006 prévoit une harmonisation dans la délivrance des permis.
Ce texte, qui soulève des difficultés importantes, a fait l'objet d'un débat vif en commission des lois. Il a été indiqué le risque d'isolement des personnes âgées, en cas de retrait du permis, surtout en milieu rural, le sentiment de stigmatisation qu'elles pourraient éprouver, dans la mesure où il y a des conduites à risque à tous les âges.
Se pose aussi un problème pratique : l'insuffisance du nombre de médecins agréés, le recours aux médecins-traitants paraissant peu efficace.
La commission des lois ne souhaite pas rejeter cette proposition de loi intéressante, au regard de l'harmonisation européenne qui va intervenir. Soulignant l'importance des actions de prévention à mener auprès des personnes âgées, elle a estimé que ce texte ne pouvait être adopté en l'état. Un groupe de travail examinera les mesures les plus pertinentes à adopter devant la hausse du nombre de conducteurs âgés. (Applaudissements au centre, à droite et sur les bancs de la commission)
Mme Michèle Delaunay, ministre déléguée auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes âgées et de l'autonomie . - Le sujet intéresse tous nos concitoyens car cette proposition de loi traite de la conduite de véhicules par les personnes âgées. Le nombre d'accidents de la route a encore diminué en mai. Sur les cinq premiers mois, on enregistre une baisse de 16 % par rapport à 2012. Pourtant, la sécurité routière se joue au quotidien et près de dix personnes décèdent chaque jour d'un accident de circulation. Les beaux jours, s'ils viennent, (sourires) y sont propices car ils sont traditionnellement l'occasion de sorties, en particulier pour les conducteurs de deux-roues. Je les invite à la plus grande prudence.
J'en reviens au texte : les personnes âgées ne connaissent pas plus d'accidents que les autres et elles sont même sous-représentés dans les statistiques. Elles privilégient des modes de déplacements alternatifs et font attention lorsqu'elles conduisent.
L'autonomie des personnes âgées dépend de leur faculté de conduire. Si la visite médicale obligatoire a été mise en place dans plusieurs pays, elle n'a pas fait la preuve de son efficacité. En France, le dialogue avec le médecin a été privilégié. Une brochure a été réalisée par l'Ordre des médecins et par le Comité interministériel de la prévention routière, à destination des généralistes ; une autre, à destination des personnes âgées, rédigée avec l'Ordre des pharmaciens, sera distribuée au mois de juillet.
Cette stratégie fonctionne bien.
N'oublions pas le rôle de la famille, qui, dans les cas extrêmes, peut saisir le préfet qui pourra enjoindre aux personnes âgées de se soumettre à un contrôle médical.
Le champ du contrôle porte sur l'aptitude physique mais aussi cognitive et sensorielle de la personne âgée. Le préfet peut alors prononcer la restriction, voire la suspension du permis de conduire. En outre, des stages sont destinés aux conducteurs âgés. La prévention routière propose 30 000 stages par an à ces personnes. D'autres associations travaillent également en ce sens. Un partenariat exemplaire a été réalisé dans l'Amiénois entre la MSA et Générations Mouvement.
Enfin, la conduite est aussi une forme de prévention de la perte d'autonomie. Il faut favoriser l'accès aux technologies d'aide à la conduite. Un centre d'expertise de la CNSA y travaille pour garantir une conduite sécurisée et pallier les faiblesses de l'âge.
La recherche s'amplifie et son développement est prometteur. Chaque intervenant des transports devra s'en saisir pour offrir une mobilité sûre aux personnes âgées.
La concertation menée jusqu'à présent a démontré que l'inaptitude dépend davantage de l'état de santé que de l'âge.
Avec cette proposition de loi, qui instaure une discrimination injuste car infondée, on risquerait d'aboutir à une brutale perte d'autonomie en cas de suppression du permis. Le Gouvernement n'est donc pas favorable à ce texte. (Applaudissements sur les bancs socialistes)
M. Gilbert Barbier . - Je remercie M. Détraigne de nous permettre de débattre de ce sujet. En 1972, il y a eu18 000 morts sur les routes. Les pouvoirs publics se sont saisis de la question et le nombre de décès a depuis diminué. La prévention et la sécurité routière sont un enjeu majeur. Cette proposition de loi serait-elle efficace ? Je ne le crois pas.
Les conducteurs âgés n'ont pas plus d'accidents que les autres, même s'ils sont plus vulnérables. C'est pourquoi la prévention routière organise des stages de remise à niveau. Pourquoi stigmatiser ces conducteurs, alors que l'alcool et la vitesse expliquent la majeure partie des accidents !
À la campagne, la voiture est le seul moyen de faire ses courses et de maintenir le lien social. En outre, on risquerait de voir les voitures sans permis se multiplier, ce qui n'est pas toujours sécurisant.
Certains patients n'ont pas conscience des risques qu'ils courent avec certains médicaments. Les médecins doivent les informer des risques encourus, mais ils n'ont qu'une obligation de moyens. Ils ne peuvent contraindre leur patient à ne pas conduire. En outre, le secret médical leur interdit d'avertir le préfet alors qu'ils sont obligés de signaler les sportifs qui se dopent... J'ai déposé deux amendements à ce sujet.
Le groupe RDSE ne pourra voter cette proposition de loi.
Mme Esther Benbassa . - Cette proposition de loi semble utile, à première vue, le but étant de réduire la mortalité routière. Chacun a dans sa famille un parent âgé qui est un véritable danger public sur la route. Ce texte n'est pourtant pas anodin. Dans l'opposition, la gauche s'est toujours élevée contre les textes présentés sous le coup de l'émotion à la suite d'un événement médiatique. Continuons ainsi.
M. Roland Courteau. - Très bien !
Mme Esther Benbassa. - Certaines personnes conduisent alors qu'elles ne devraient pas. Mais elles le font par nécessité, surtout à la campagne. Imposer un contrôle médical, pourquoi pas, mais il faudrait prendre en charge les déplacements quotidiens. Notre population vieillit, mais il faut l'accompagner. Or les crédits manquent...
De plus, les personnes âgées ne causent pas plus d'accidents que les autres. Les accidents graves ne sont pas toujours liés à l'âge du conducteur. Le drame de Loriol, qui a coûté la vie à des pompiers, n'était pas dû au malaise lié à l'âge du conducteur octogénaire, mais au grand excès de vitesse avec lequel il conduisait son puissant véhicule à l'approche d'un accident signalé. Cette question est légitime, mais elle doit se poser à tous les âges de la vie. L'entourage et le médecin-traitant sont les plus à même d'être des lanceurs d'alerte. Tout le monde n'habite pas dans les préfectures et il faudra s'y rendre... en voiture pour voir le médecin ! Il conviendrait donc que le médecin-traitant fasse le contrôle.
Pour éviter toute discrimination liée à l'âge, le groupe écologiste ne votera pas ce texte. (Mme Virginie Klès applaudit)
Mme Joëlle Garriaud-Maylam . - Ce texte, qui veut rapprocher notre législation de celle de l'Union européenne, imposerait un contrôle aux conducteurs âgés. Le comité interministériel de la sécurité routière avait déjà fait une telle proposition en décembre 2002.
Après un débat vif, la commission des lois n'a pas élaboré de texte. Le dispositif est mal calibré sur la réalité de la sécurité routière. Comment organiser le contrôle pour toutes ces personnes qui vivent souvent en milieu rural ?
En cas d'infraction, le préfet peut demander un examen médical à la préfecture. Mais comment la personne mise en cause peut-elle s'y rendre si son permis a été retiré ?
Qu'en serait-il de la responsabilité des médecins qui n'auraient pas suspendu un permis alors qu'un accident serait intervenu ultérieurement ? Est-il pertinent d'établir un lien entre l'âge et l'accident ? À partir de 45 ans, les réflexes diminuent... Ce qui est en cause, c'est l'état de santé et la prise de médicaments.
Chateaubriand disait qu'il n'y a pas d'âge légal pour le malheur... De nombreux accidents sont dus à des événements fortuits.
On ne peut pas tout anticiper, tout prévenir, sans porter atteinte aux libertés individuelles.
Pourquoi pas des contrôles d'alcoolémie à la sortie de toutes les boîtes de nuit de France ?
Mais le contrôle des uns est plus facile à opérer que celui des autres.
Suite à un accident de la route, il serait sans doute plus facile d'instaurer un contrôle systématique.
Ce texte risque de stigmatiser les personnes les plus âgées qui ne sont pas toutes inaptes à conduire. Ce qui est en cause, ce n'est pas l'âge, mais la santé des conducteurs.
L'essentiel des accidents sont le fait des 18-24 ans et non pas des personnes âgées qui conduisent peu et prudemment. Les statistiques ne sont pas exploitables en tant que telles.
Dès lors, l'examen médical, s'il faut en passer par là, doit être imposé à toutes les catégories de conducteurs.
Merci à M. Détraigne d'avoir soulevé une question essentielle. Nous lui apporterions une meilleure réponse en renforçant les campagnes de prévention routière et le rôle des médecins dits de famille. La France a fait d'immenses progrès en matière de sécurité routière. Poursuivons !
Pour toutes ces raisons, le groupe UMP votera la motion de renvoi en commission. (Mme Virginie Klès applaudit)
Mme Muguette Dini . - J'ai cosigné spontanément la proposition de loi de M. Détraigne qui a eu le courage de soulever un problème important. Après les débats en commission, je veux expliquer ma position. L'exploitation des études détaillées d'accidents, la conduite des personnes âgées se caractérise par la prudence : elles réduisent leur vitesse, la distance parcourue, la prise de risques. Cependant, l'altération des perceptions due au vieillissement accroît le risque d'accident. En outre, hors agglomération, les besoins des conducteurs âgés diffèrent de ceux des autres, notamment pour ce qui concerne la perception transversale. De là les accidents au croisement des intersections. Le vieillissement affectent les perceptions sensorielles et cognitives, d'où des comportements surprenants, voire aberrants dans la conduite des véhicules. En outre, en raison des troubles liés au sommeil, la vigilance diminue. (Mme la ministre en convient)
Voilà l'objectif de cette proposition de loi : non pas discriminer, ni stigmatiser, mais tenir compte de cette réalité largement reconnue.
Le but est seulement de prévoir un examen par un médecin agréé par la préfecture, renouvelable tous les cinq ans, dans le cadre d'un dispositif souple et encadré. Beaucoup d'entre vous y sont hostiles,...
M. Roland Courteau. - Oui.
Mme Muguette Dini. - Je le sais, nous devrons pourtant, j'en suis convaincue, à l'instar de maints pays européens, y revenir. (Applaudissements sur les bancs socialistes et au centre ; Mme la ministre applaudit aussi)
M. Yves Détraigne, rapporteur. - Très bien !
Mme Laurence Cohen . - Le groupe CRC votera la motion de renvoi en commission, d'autant plus opportune que le calendrier parlementaire est encombré. Qui plus est, si la sécurité routière est une préoccupation importante et partagée, l'urgence pour les Français est d'abord de traiter la question du chômage, de revaloriser les salaires, de relever l'hôpital public et l'école.
Quelques données : les conducteurs âgés ne sont qu'un peu plus nombreux à mourir que les piétons de plus de 65 ans. Le principe de précaution devrait donc nous conduire à légiférer sur la circulation sur les trottoirs ? Surtout, pourquoi viser ceux qu'on appelle les seniors, les plus fragiles et non les jeunes qui sont responsables de davantage d'accidents ? Faut-il interdire aux 18-25 ans de conduire ? Pour ces derniers, le Gouvernement imagine un mélange subtil de prévention et de sanction. Ne faut-il pas appliquer la même méthode, au lieu de discriminer les personnes âgées ?
Il y a quelque paradoxe à soutenir ce texte quand on a voté le cumul du minimum vieillesse et du travail et qu'on défend le rapport Moreau. Ainsi donc, on pourrait travailler tard, mais non conduire...
Mme Gisèle Printz. - C'est vrai !
Mme Laurence Cohen. - ... En réalité, les personnes visées par cette proposition de loi font preuve de prudence et décident elles-mêmes de limiter leur conduite aux actes indispensables...
M. Roland Courteau. - Exact !
Mme Laurence Cohen. - La réflexion doit se poursuivre en commission. (Applaudissements à gauche ; M. Jean Boyer applaudit aussi)
Mme Virginie Klès . - Merci à M. Détraigne d'avoir soulevé cette question ô combien importante. Bien évidemment, chaque accident est un drame ; bien évidemment, chaque victime est de trop. Pour autant, ne votons pas ce texte en l'état. Contrairement à M. Détraigne, je suis en plein conflit d'intérêts : titulaire d'un permis E, je dois passer un examen médical tous les cinq ans qui n'apporte rien. Ma presbytie évolue rapidement ; à moi de veiller à la corriger. Pourquoi le critère de l'âge ? Parce qu'il est le seul auquel on ne peut rien ; la prise de médicament ou de drogue, l'alcool, la vitesse excessive sont de notre responsabilité. Sans doute aussi, voulions-nous protéger ce vieil oncle ou ce grand-père qui est un véritable danger sur la route, pour lui-même, pour nos enfants ou petits-enfants.
Néanmoins, l'âge n'entraîne pas plus de baisse de vigilance que la prise de neuroleptiques ou de psychotropes. Soit, un avertissement figure sur la boîte, mais qui y prête attention ? Si nous devions dresser la liste de toutes les causes d'insécurité routière, nous obtiendrions un inventaire à la Prévert, et nous serions loin de la loi.
Après tout, n'est-ce pas une question de responsabilité individuelle ? Prend-on la route après plus de deux verres de vin ?
M. Philippe Bas. - Jamais !
Mme Virginie Klès. - Cela relève de la responsabilité individuelle de chacun, passible, éventuellement, de sanction...
Les personnes âgées s'endorment au volant ? Elles ne sont pas les seules. Elles prennent l'autoroute en sens inverse ? Les autres aussi. Et cætera...
Les personnes âgées, parce qu'elles sont plus fragiles, sont souvent victimes d'accidents. (Mme la ministre approuve) Elles le savent, et se protègent.
Alors, oui, il faut se préoccuper de sécurité routière publique. Oui, il faut renvoyer ce texte en commission. (Applaudissements)
Mme Gisèle Printz . - Je profite qu'il n'existe pas de loi interdisant aux personnes de plus de 70 ans de s'exprimer à cette tribune pour intervenir dans ce débat...
Mme Michèle Delaunay, ministre déléguée. - Heureusement !
Mme Gisèle Printz. - Ces dernières années, on a monté les Français les uns contre les autres. Et comme l'automne, invariablement, revient après l'été, on n'a cessé d'agiter la division entre les générations. Voici un nouveau coup porté aux seniors et à l'unité nationale.
En s'appuyant sur une mythologie de l'accidentologie des conducteurs âgés, soupçonnés d'être des dangers publics, on veut restreindre l'autonomie des seniors, tout en leur demandant - quel paradoxe ! - de travailler plus longtemps.
Nous sommes réputés constituer la chambre des sages de la République. Cette proposition de loi n'est pas bonne. Elle amènerait à violer le secret médical, comme le relevait le Conseil national de l'Ordre des médecins en mai 2011, en s'opposant à ce que le médecin soit rendu responsable de la validation de l'aptitude à conduire. L'Automobile club médical de France a souligné que l'examen médical n'a pas fait ses preuves dans les pays nordiques. Ne l'imposons pas aux personnes âgées, qui apportent leur expérience à la vie politique, s'investissent dans les associations pour une société plus juste et plus fraternelle, aident leurs familles en allant chercher leurs petits-enfants à la crèche, à l'école ou au centre aéré. Elles sont responsables, faisons-leur confiance ; elles sauront laisser leur voiture au garage si cela est nécessaire.
Ne stigmatisons pas, ne pénalisons pas une catégorie de population pour quelques cas isolés ! Je voterai la motion de renvoi en commission (Mme Virginie Klès applaudit)
Mme Michèle Delaunay, ministre déléguée . - Madame Benbassa et monsieur Barbier, le médecin a deux rôles : il peut prescrire un examen visuel, l'opération d'une cataracte, mais aussi prescrire de ne pas conduire la nuit.
M. Gilbert Barbier. - Il conseille !
Mme Michèle Delaunay, ministre déléguée. - Écrire cela sur une ordonnance a un poids. Que voulais-je ajouter ? (Mme Michèle Delaunay met ses lunettes) Ah oui, et vous voyez que ma vue baisse aussi. (Sourires) Mme Garriaud-Maylam a raison : ne pénalisons pas les personnes âgées, surtout en milieu rural. Au reste, si nous suivions cette voie, nous serions certainement condamnés par la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH). Je conseillerais aux âgés de la saisir en l'occurrence !
Le temps presse, mais je veux dire à Mme Printz une chose : heureusement que les personnes âgées prennent la parole. J'aimerais les entendre davantage...
M. Gilbert Barbier. - Cela viendra !
Mme Michèle Delaunay, ministre déléguée. - ... non seulement sur le niveau des retraites, comme je le dis aux associations de retraités que je reçois, mais aussi sur les questions de société, car elles forment la colonne vertébrale de notre cohésion sociale. Imaginer une grève des plus de 65 ans : les élus ne pourraient plus faire campagne, les parents ne pourraient plus aller travailler et même les stages de sécurité routière s'arrêteraient, faute de bénévoles !
Un point sur lequel nous devons travailler : l'examen de la vue. Des lunettes adaptées - elles ne le sont pas pour la moitié des âgés ! - ou une opération de la cataracte sont un gage d'autonomie.
Oui, madame Klès, il y a matière à travailler pour améliorer les choses.
La discussion générale est close.
Renvoi en commission
M. le président. - Motion n°12, présentée par Mme Klès et les membres du groupe socialiste et apparentés.
En application de l'article 44, alinéa 5, du Règlement, le Sénat décide qu'il y a lieu de renvoyer à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale, la proposition de loi visant à instituer une évaluation médicale à la conduite pour les conducteurs de 70 ans et plus (n° 605, 2011-2012).
Mme Virginie Klès . - Merci, monsieur le rapporteur, de nous avoir convaincus de ne pas voter ce texte. Merci également de nous donner l'occasion de le retravailler. Nous devrons traiter la question de la santé, et non pas seulement celle de l'âge ; remettre le médecin traitant au coeur du dispositif - qui doit avoir un rôle de conseil, de recommandation et d'injonction - en lien avec la commission médicale préfectorale. Ce lien devra aussi inclure la famille, l'entourage de proximité et éventuellement être facilité par les institutions.
Garantir la meilleure information - comme on le fait pour l'alcool au volant - et sanctionner si l'injonction du médecin n'est pas suivie. Quelle fréquence pour ces contrôles ? Nous devons répondre à toutes ces questions avec les médecins, la famille, mais aussi les syndicats, les associations. De fait, toute sanction limitera l'autonomie de la personne, ce qui suppose une prise de relais par la famille, les amis, une exploration des possibilités offertes par les transports en commun. Sans quoi, attention, nous assisterons à un report massif sur les voiturettes sans permis, qui ne sont pas, non plus, exemptes de risques. Ce n'est pas si facile de prendre le métro ou le bus quand on n'en a pas l'habitude ! Bref, il faut un accompagnement et une formation continue. Voyez, mes enfants, qui ont passé récemment leur permis de conduire, ne parlent plus de clignotants, mais « d'indicateurs de changement de direction » !
Des stages, donc, qui incluraient une formation aux gestes de premiers secours pour avoir les bons réflexes lorsqu'on intervient en premier sur le lieu d'un accident. Hélas, ces formations, censées être obligatoires dans les établissements scolaires, ne sont pas délivrées.
Renvoyons le texte en commission et mettons-nous au travail d'arrache-pied ! (Applaudissements à gauche)
M. Yves Détraigne, rapporteur. - Après un débat musclé, la commission a donné un avis favorable à cette motion, que j'approuve d'ailleurs.
Mme Gisèle Printz. - Très bien !
M. Yves Détraigne, rapporteur. - Mon but n'a jamais été de stigmatiser les personnes âgées. Je remarque qu'aucun intervenant, si ce n'est Mme Klès, n'a proposé de pistes. C'est donc qu'il n'y aurait aucun problème !
Madame la ministre, croyez-vous que les citoyens du Danemark, d'Espagne, d'Italie, d'Estonie, de Lettonie, qui ont instauré des examens médicaux pour les personnes âgées ignorent l'existence de la CEDH ? J'en doute...
Mme Michèle Delaunay, ministre déléguée. - L'avis est favorable.
La motion n°12 est adoptée.
Mme Virginie Klès. - Au nom de la commission des lois, je dois vous dire que nous nous retrousserons les manches sans tarder pour avancer sur ce sujet. Un groupe de travail sera mis en route prochainement.