Refondation de l'écolede la République (Suite)
M. le président. - L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, d'orientation et de programmation pour la refondation de l'école de la République. Dans la discussion des articles, nous sommes parvenus à l'article 5.
Discussion des articles (Suite)
ARTICLE 5
M. Roland Courteau . - Avec cet article, le Gouvernement entend donner à la petite enfance toute sa place à l'école en développant la scolarisation des moins de 3 ans, qui a marqué le pas ces dernières années faute de moyens et d'effectifs enseignants. La scolarisation précoce améliore la socialisation des enfants, favorise le processus d'acquisition du savoir et permet de détecter au plus tôt les difficultés. Comme le relève la commission, les enfants de moins de 3 ans ont des besoins spécifiques, ils doivent être sécurisés émotionnellement et stimulés cognitivement. Dans certains milieux, une scolarisation précoce leur permettrait d'entrer dans la vie avec les mêmes chances que les autres.
L'article 5 prouve notre engagement et notre volonté sans faille de lutter contre l'échec scolaire et de donner à tous les enfants les moyens de progresser.
M. Pierre Martin . - Cet article nécessite une attention particulière. Les enfants peuvent être accueillis dès 2 ans révolus, c'est déjà dans la loi...
M. Jacques-Bernard Magner. - Pas grâce à vous !
M. Pierre Martin. - ... de même que la priorité donnée aux zones défavorisées et à l'outre-mer. Assumez-vous votre ambition de généraliser la scolarisation des enfants de moins de 3 ans ? Cela ressemble fort à de l'affichage.
Au-delà de ces questions de forme, nous nous opposons à cet article pour des raisons de fond. Le taux de scolarisation des enfants de moins de 3 ans n'a pas progressé depuis son inscription dans la loi par M. Jospin en 1998 ; il est passé, ces dernières années, de 35 % à 13,6 %, avec de grandes différences d'une région à l'autre. La scolarisation précoce n'a pas contribué à un rééquilibrage en faveur des zones défavorisées. Surtout, cet article 5 est dangereux car il fait accroire que la lutte contre l'échec scolaire passe nécessairement par la scolarisation avant 3 ans.
M. Roland Courteau. - Eh oui !
M. Pierre Martin. - Certes ces enfants ont, à l'entrée au CP, un niveau supérieur aux autres, mais dès l'entrée en 6e, la différence s'estompe. Nous l'avions souligné avec Mme Papon dans notre rapport sur le sujet. Il s'agit donc d'un leurre...
M. Roland Courteau. - Incroyable !
M. Pierre Martin. - L'enfant de moins de 3 ans n'est pas capable d'une attention prolongée, il souffre à l'école de longues périodes d'attente auxquelles il n'est pas adapté, soulignent les spécialistes. Les tout-petits ont besoin d'une relation privilégiée avec un adulte pour apprendre ; le cadre scolaire n'est à leur âge pas favorable à l'acquisition du langage. À quoi s'ajoutent les difficultés matérielles. Il ne revient pas aux enseignants de rendre les enfants propres. L'acquisition de la propreté peut tourner à la pression psychologique.
Nous préconisons l'ouverture de structures intermédiaires, les jardins d'éveil. (Exclamations à gauche)
Mme Françoise Cartron, rapporteure. - Belle réussite !
M. Pierre Martin. - L'encadrement de ces enfants relève de la politique familiale, pas de l'éducation nationale. Notre rapport a montré qu'il faut laisser le temps aux petits individualistes que sont les enfants de 2 ans de mûrir avant d'être en capacité de devenir élève.
M. Georges Patient . - L'académie de Guyane est-elle vouée à être celle des plus mauvais résultats de France, demandait le recteur devant une commission sénatoriale. « Les pires profs pour les pires élèves », comme le clame la bande-annonce d'un film à l'affiche... Comme le dit un enseignant, une machine à fabriquer l'échec et l'exclusion...
Quid de la notion d'égalité des chances en Guyane quand plus de 6 000 enfants de 3 à 6 ans sont non scolarisés ? Pourquoi la situation est-elle si difficile ? Il n'y a pas de réponse simple, la Guyane n'est comparable à aucune autre région : la démographie, le multilinguisme - beaucoup d'enfants arrivent monolingues dans une langue autre que le français - les disparités territoriales, les difficultés sociales. Autant de défis à relever.
Refonder l'école, créer pour tous les conditions de la réussite en Guyane exige de mobiliser les collectivités locales, de former les enseignants au contexte particulier du multilinguisme et du multiculturalisme. Il faudra faire preuve de pragmatisme et de volontarisme. Je ne doute point de votre volonté, monsieur le ministre. (Applaudissements sur certains bancs socialistes)
M. Michel Le Scouarnec . - Nous sommes particulièrement attachés à la scolarisation des enfants dès l'âge de 2 ans pour les familles en exprimant la demande. Elle a des impacts positifs avérés sur l'acquisition du langage, la familiarisation avec les concepts d'espace et de temps, impacts qui le sont d'autant plus pour les enfants des milieux populaires. Le gouvernement précédent n'a cessé de se prévaloir du caractère facultatif de la scolarisation des enfants de moins de 3 ans pour réaliser un objectif économique : la diminution des postes d'enseignant, même en zone d'éducation prioritaire.
Cet article rompt avec une politique dévastatrice et lance un signal positif. Mais il n'opère pas de modification suffisante en limitant la scolarisation précoce aux zones défavorisées. Il faut permettre à tous les parents qui le souhaitent d'inscrire leur enfant dès 2 ans, quels que soient leur lieu d'habitation et leur milieu social. En outre, je regrette que le Gouvernement ne saisisse pas l'occasion de ce projet de loi pour rendre l'école obligatoire dès 3 ans au lieu de 6 ans.
Nous souhaitons protéger et reconnaître à sa juste valeur l'école maternelle, qui joue un rôle décisif dans la lutte contre l'échec scolaire et les inégalités. Son utilité n'est plus à démontrer. Reste ouverte la question des moyens. La Bretagne scolarise les petits à 50 % et les résultats au bac y sont parmi les meilleurs de France. (Mouvements divers)
M. Jean-Claude Carle. - C'est l'air marin !
Mme Catherine Morin-Desailly. - Nous sommes favorables à la scolarisation précoce, du moins à la priorité donnée aux zones défavorisées. Je m?interroge sur sa généralisation, au moment même où l'on engage une réflexion sur les rythmes scolaires. N'y a-t-il pas des formules plus adaptées, des cadres plus propices à ce temps particulier de la petite enfance ?
M. Michel Savin. - Très bien !
Mme Catherine Morin-Desailly. - Il y a enfin quelque paradoxe à vouloir une scolarisation précoce des enfants de milieux défavorisés et dans le même temps, pour d'autres âges, supprimer les internats d'excellence...
M. le président. - Amendement n°190, présenté par MM. Legendre, Carle, Bordier et Chauveau, Mme Duchêne, MM. Dufaut, A. Dupont et Duvernois, Mme Farreyrol, MM. B. Fournier, J.C. Gaudin, Grosdidier, Humbert, Leleux et Martin, Mme Mélot, M. Nachbar, Mme Primas et MM. Savin, Soilihi, Vendegou et Lenoir.
Alinéa 3
Rédiger ainsi cet alinéa :
« L'accueil des enfants de deux ans révolus est organisé en priorité dans les écoles situées dans un environnement social défavorisé, que ce soit dans les zones urbaines, rurales ou de montagne, et dans les collectivités et territoires ultramarins. Cet accueil donne lieu à un dialogue avec les familles. » ;
M. Jacques Legendre. - Cet amendement récrit et rend plus simple le texte de cet alinéa.
M. le président. - Amendement n°22 rectifié, présenté par M. Savin, Mme Primas, MM. Bordier, Carle et Chauveau, Mme Duchêne, MM. Dufaut, A. Dupont et Duvernois, Mme Farreyrol, MM. B. Fournier, Humbert, Leleux et Martin, Mme Mélot et MM. Nachbar, Soilihi et Vendegou.
Alinéa 3, dernière phrase
Supprimer les mots :
en priorité
M. Michel Savin. - Il s'agit d'éviter toute dérive de familles en recherche de structures de garde, tout en concentrant l'effort dans un premier temps sur les ZEP. Les 3 000 postes que vous souhaitez créer sur cinq ans ne suffiraient pas à répondre à la demande si vous scolarisez tous les enfants de 2 ans, ce qui risque de provoquer incompréhensions, frustrations et colère.
M. le président. - Amendement n°377, présenté par le Gouvernement.
Alinéa 3, dernière phrase
Remplacer les mots :
dans les départements, collectivités et territoires ultramarins
par les mots :
dans les régions d'outre-mer
M. Vincent Peillon, ministre. - Les termes à remplacer ne correspondent à aucune catégorie juridique existante. Et certaines collectivités d'outre-mer sont pleinement compétentes en matière d'enseignement.
Il y a des paradoxes qui viennent d'une accumulation de préjugés. Un peu de cohérence au sein du groupe UMP apporterait de la clarté à nos débats. En son sein il y a ceux qui sont pour l'accueil des moins de 3 ans ; il y a ceux qui contestent toute utilité à cet accueil, à l'instar de tel de mes prédécesseurs auquel ses propos sur la propreté des enfants et le rôle des enseignants ont causé beaucoup d'ennuis...
Nous travaillons avec les collectivités, la ministre de la famille. Votre amendement, monsieur Legendre, supprime les conditions d'accueil et pédagogiques spécifiques. Je crois la position du Gouvernement raisonnable : nous ciblons les zones qui en ont le plus besoin, nous prévoyons des conditions spécifiques ; en même temps, nous n'en faisons pas une obligation - nous ne disposons que de 3 000 postes. C'est quand même un signal très important. La priorité est de résoudre les difficultés scolaires dès les premières années de la vie. Si nous le faisons bien, cet accueil sera utile. (Applaudissements sur les bancs socialistes)
Mme Françoise Cartron, rapporteure. - Pour M. Legendre, tout est déjà dans le code ; mais la scolarisation des moins de 3 ans a été drastiquement diminuée ces dernières années. D'où l'importance du texte proposé, qui donne la priorité aux zones difficiles, où les parents n'ont pas accès aux structures d'accueil payantes. L'école publique est le seul lieu qui peut accueillir ces enfants et les mettre sur le même pied que les autres.
M. Roland Courteau. - Très bien !
Mme Françoise Cartron, rapporteure. - Agissons avec cette exigence d'une école maternelle de qualité, en fixant des règles. Avis défavorable à l'amendement de M. Legendre et défavorable à celui de M. Savin ; et favorable à l'amendement du Gouvernement.
M. Vincent Peillon, ministre. - Défavorable aux amendements n°s190 et 22 rectifié.
M. Jean-Claude Lenoir. - Monsieur le ministre, vous avez pris un risque en mettant le doigt sur des divergences au sein du groupe UMP ; nous verrons sur d'autres points où est la cohérence de la majorité sénatoriale...
Ici, contrairement à l'ordinaire, la loi suit la circulaire de décembre 2012, monsieur le ministre, que vous avez déjà prise sur la scolarisation des moins de 3 ans. Notre appréciation doit beaucoup à la situation de chacune de nos régions, comme l'a souligné M. Le Scouarnec. Comme le relève l'Unaf et le propose l'amendement de M. Legendre, la scolarisation précoce doit s'adresser en priorité aux zones défavorisées et à l'outre-mer ; il importe de procéder en accord avec les collectivités et avec les parents.
Quid de la scolarisation des très jeunes enfants dans le monde ? On accueille à moins de 3 ans des enfants dans seulement quatre pays : la Norvège, l'Islande, le Danemark et la Belgique. Dans la plupart des pays, c'est 4 ou 5 ans ; la France fait figure d'exception.
Ne nous berçons pas de l'idée que plus tôt on scolarise les enfants, mieux ils réussissent, les résultats ne sont pas probants.
M. Roland Courteau. - Si, si !
M. Jean-Claude Lenoir. - L'amendement Legendre que j'ai cosigné est de sagesse.
M. Jacques Legendre. - Savoir quelle est la manière la plus efficace d'utiliser nos moyens à l'égard des jeunes est une question qui devrait nous rassembler. Dans le Nord, nous scolarisons traditionnellement beaucoup d'enfants à 2 ans ; pour autant, nos résultats ont-ils progressé ? Je n'en suis pas sûr. Faut-il alors renoncer à la scolarisation à 2 ans ? Après tout, si elle ne fait pas de bien, elle ne peut pas faire de mal ... Il n'y a pas de contradiction, monsieur le ministre, dans nos propos. Nous nous interrogeons sur la meilleure forme de présence des enfants entre 2 et 3 ans.
Madame Cartron, je vois mal ce qui pourrait nous différencier. Nous disons que l'accueil des moins de 3 ans dans les zones défavorisées est une priorité, vous dites que ces enfants « peuvent être accueillis »...
Nous défendrons tout à l'heure un amendement qui demande qu'une étude sérieuse soit menée : oui ou non, faut-il faire porter l'effort national sur la maternelle dès 2 ans plutôt qu'en grande section ou au début du primaire ?
M. Jean-Claude Lenoir. - Très bien !
M. Jacques-Bernard Magner. - C'est un grand débat. Le rapport Papon-Martin était orienté, il s'agissait de justifier la privatisation de l'accueil des enfants de moins de 3 ans... Oui, la scolarisation précoce est un moyen efficace de lutte contre l'échec scolaire ; 4,3 % des enfants scolarisés à 2 ans redoublent le CP, contre 11,8 % de ceux scolarisés à 4 ans. Selon le Conseil d'analyse stratégique, de nombreuses études et travaux scientifiques montrent que les inégalités s'établissent dès la petite enfance. D'où l'importance des moyens dégagés pour réduire celles-ci.
Mme Françoise Cartron, rapporteure. - Ce qui nous différencie, monsieur Legendre, et ce qui m'étonne de votre part, vous sachant attaché à la qualité de l'enseignement, c'est ce que vous supprimez dans le texte de l'article : les conditions éducatives et pédagogiques adaptées à l'âge des enfants.
M. Jacques Legendre. - Cela va de soi !
Mme Françoise Cartron, rapporteure. - Nous n'avons jamais défendu la scolarisation précoce dans n'importe quelles conditions. Il faut bien sûr un dialogue avec les familles, l'école maternelle entre 2 et 3 ans n'est pas obligatoire.
Mme Annie David. - Bien sûr !
M. Vincent Peillon, ministre. - Pour la clarté des débats, votre amendement est un amendement de suppression des conditions éducatives et pédagogiques adaptées. Je respecte toutes les positions, Pierre Martin a défendu la sienne dans un rapport. De même, je suis favorable aux études. Votre amendement à venir interrompt notre projet en en attendant une nouvelle.
Mme Marie-Christine Blandin, présidente de la commission de la culture. - Les éléments que supprime M. Legendre comportent une précision importante, apportée par Mme Duchêne : « adaptés à leur âge ».
M. Vincent Peillon, ministre. - On n'y comprend plus rien !
L'amendement n°190 n'est pas adopté.
L'amendement n°22 rectifié n'est pas adopté.
L'amendement n°377 est adopté.
M. Claude Haut, rapporteur pour avis de la commission des finances. - L'amendement n°30 de la commission des finances à l'article premier devient caduc. Je le retire.
L'amendement n°30 est retiré.
M. le président. - Amendement n°85, présenté par Mme Gonthier-Maurin et les membres du groupe CRC.
Alinéa 4
Remplacer cet alinéa par deux alinéas ainsi rédigés :
2° Sont ajoutés deux alinéas ainsi rédigés :
« Des compléments spécifiques de formation sont dispensés aux enseignants qui prennent en charge les enfants accueillis dès deux ans.
M. Michel Le Scouarnec. - La spécificité des enfants de 2-3 ans par rapport à ceux de 3 ans et plus doit être prise en compte dans la formation des enseignants. Des modules spécifiques doivent ainsi être prévus, en plus de la formation initiale et continue qui a lieu au sein des Espe et qui concerne tous les enseignants de maternelle.
Françoise Dolto, dans La cause des enfants, ne disait pas autre chose. À 2 ans, de trois mois en trois mois, les enfants évoluent énormément. Les enseignants doivent disposer d'une formation spécifique de qualité.
Mme Françoise Cartron, rapporteure. - Retrait. Satisfait par un amendement à l'article 30. Le ministre a bien dit qu'il y aurait au sein des Espe des modules de formation spécifique.
M. Vincent Peillon, ministre. - Même position. Il est en effet déterminant qu'une formation spécifique soit dispensée aux enseignants. Je salue dans la tribune le maître formateur en maternelle qui m'a tout appris sur ce sujet.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. - Nous allons retirer notre amendement. Mais le débat est important : il s'agit bien de remettre les moyens nécessaires et s'interroger sur la nature des échecs que l'on rencontre. La formation des enseignants est sans doute la condition d'une valorisation des effets positifs de la scolarisation précoce.
M. Jacques Legendre. - C'est possible.
L'amendement n°85 est retiré.
M. le président. - Amendement n°340, présenté par le Gouvernement.
Alinéa 5
Remplacer les mots :
Dans les écoles qui les scolarisent
par les mots :
Dans ces écoles
M. Vincent Peillon, ministre. - La commission a précisé que les enfants de moins de 3 ans pouvaient être comptabilisés dans les prévisions d'effectifs de toutes les écoles qui les scolarisent. Cette rédaction crée des difficultés par rapport aux 3 000 postes et à la circulaire du 18 décembre 2012. Les études montrent que s'il y a une efficacité, c'est pour les enfants de milieux en difficulté sociale.
Mme Françoise Cartron, rapporteure. - Favorable.
L'amendement n°340 est adopté.
M. le président. - Amendement n°84, présenté par Mme Gonthier-Maurin et les membres du groupe CRC.
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
« Le maire établit une liste des demandes de scolarisation des enfants de moins de trois ans effectuées sur leur territoire qui n'ont pas abouti à une scolarisation effective. Cette liste est transmise à l'autorité académique. »
M. Michel Le Scouarnec. - L'alinéa 5 a été instauré à notre demande, pour rompre avec les pratiques du précédent gouvernement. Il faut cependant aller encore plus loin en prenant en compte les demandes de scolarisation des enfants de moins de 3 ans qui n'ont pu aboutir faute de places suffisantes. Il serait intéressant de disposer de statistiques précises.
M. Michel Savin. - Un fichier !
M. Michel Le Scouarnec. - Cela ne contrevient nullement au principe de libre administration des collectivités territoriales.
Mme Françoise Cartron, rapporteure. - La scolarisation précoce se fait après un dialogue constructif avec les parents qui les amène parfois à renoncer pour des motifs variés qui ne se réduisent pas au manque de places. Cette comptabilité ne permettra pas non plus de connaître les parents qui n'auront pas fait la démarche. Autant dire qu'elle ne me paraît pas significative. Avis défavorable.
M. Michel Le Scouarnec. - Bref, ce serait utile mais peut-être difficile à réaliser...
M. Vincent Peillon, ministre. - Défavorable.
L'amendement n°84 n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°181, présenté par M. Dantec et les membres du groupe écologiste.
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
« Si la famille souhaite inscrire l'enfant dans une classe qui propose un enseignement en langue régionale, il est accueilli dans l'établissement le plus proche proposant ce type d'enseignement. »
M. Joël Labbé. - L'enseignement en langue régionale, dès le plus jeune âge, mérite d'être inscrit dans la loi. Nous ne sommes plus en 1881 : la diversité linguistique n'est plus une crainte mais un atout. L'enseignement des langues régionales doit être généralisé là où elles sont en usage. Les demandes des familles doivent être entendues.
Mme Corinne Bouchoux. - Très bien.
Mme Françoise Cartron, rapporteure. - L'enseignement des langues régionales concerne les enfants en primaire, plutôt que des enfants de 2 à 3 ans, visés par cet article, qui devront acquérir les tout premiers apprentissages. L'inscription dans une commune voisine permettrait de déroger à la carte scolaire. C'est aller à l'encontre de nos principes et de l'intérêt tout simple des enfants : à l'âge de la maternelle, ils ont d'abord besoin de socialisation, avec les autres enfants qu'ils connaissent, pas d'être envoyés dans une autre commune. Avis défavorable.
M. Vincent Peillon, ministre. - Avis défavorable.
Mme Sophie Primas. - Je salue cet amendement de justice et d'équité. Le français est notre lien commun, mais si les parents souhaitent un enseignement dans une langue régionale, il faut le permettre. Sinon, ils enverront leurs enfants dans des écoles privées et on aura une sélection par l'argent.
L'amendement n°181 n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°191, présenté par MM. Legendre, Carle, Bordier et Chauveau, Mme Duchêne, MM. Dufaut, A. Dupont et Duvernois, Mme Farreyrol, MM. B. Fournier, J.C. Gaudin, Grosdidier, Humbert, Leleux et Martin, Mme Mélot, M. Nachbar, Mme Primas et MM. Savin, Soilihi, Vendegou et Lenoir.
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
« La scolarisation à partir de l'âge de deux ans révolus fait l'objet d'une étude nationale préalable soumise au Parlement pour débat. »
M. Jacques Legendre. - Je me suis déjà exprimé sur cet amendement qui demande une étude approfondie sur la scolarisation précoce. Chacun doit pouvoir juger en son âme et conscience.
Mme Françoise Cartron, rapporteure. - De nombreux chercheurs ont travaillé sur cette question et les résultats sont connus. Je vous transmettrai le rapport de Mme Forain dont nous disposons.
M. Vincent Peillon, ministre. - En parlant d'une étude « approfondie », vous n'avez pas défendu votre amendement où vous parlez d'une étude « préalable ». Mon avis défavorable porte sur le « préalable ».
M. le président. - Chaque auteur peut défendre son amendement comme il le souhaite.
M. Dominique de Legge. - Tous les éléments de débat doivent être sur la table. Quelles seront les conditions d'accueil des enfants en milieu scolaire ? Je suis étonné de ne pas avoir la même appréhension des cas dans lesquels les enfants vont être accueillis. Dans les structures de petite enfance, c'est un adulte pour huit enfants. Tel ne sera pas le cas dans les établissements scolaires. Regardons les choses au fond. Mais j'ai compris qu'on voulait seulement tenir une promesse électorale. (Exclamations à gauche)
M. Pierre Martin. - Nous voulons améliorer la situation des 2-3 ans. Cette étude « préalable » doit être « approfondie ». (Rires)
M. Vincent Peillon, ministre. - Un vrai Picard !
M. Pierre Martin. - À combien revient la scolarisation des enfants de 2-3 ans ?
M. Jacques Legendre. - Ne me faites pas la leçon à chaque fois que je présente un amendement, monsieur le ministre. Vous avez prononcé le mot « sectaire » tout à l'heure, mot que je n'ai jamais employé. Pour mes amendements, chacun les a entre les mains et en est juge. Les études existent, mais elles se contredisent. Si vous ne voulez pas de « préalable », je rectifie mon amendement en lui substituant « approfondie ». (Applaudissements à droite)
M. Vincent Peillon, ministre. - Dès lors que vous rectifiez ainsi votre amendement, j'y suis favorable. D'ailleurs, le conseil supérieur d'évaluation que crée cette loi - un conseil indépendant du ministre, dans lequel vous siégerez - pourra mener cette étude pour ajuster au mieux l'accueil des petits... que vous vouliez supprimer tout à l'heure.
Mme Françoise Cartron, rapporteure. - Avis favorable.
Mme Dominique Gillot. - Notre débat est plus clair désormais. Cette étude précisera les choses. Distinguons l'accueil de la petite enfance, tarifé aux familles, selon le quotient familial en général, qui passe par différentes structures, de la scolarisation à l'école maternelle. Nous souhaitons que les jeunes enfants qui ont acquis une maturité suffisante et qui éprouvent un besoin de communication puissent être accueillis à l'école, ce qui est un avantage.
M. Joël Guerriau. - Cette étude approfondie sera-t-elle faite au préalable, ou non ? (Rires)
L'amendement n°191 rectifié est adopté.
M. le président. - Amendement n°532, présenté par Mme Cartron, au nom de la commission de la culture.
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - À l'article L. 162-2-1 du même code, les mots : « Le dernier » sont remplacés par les mots : « L'avant-dernier ».
Mme Françoise Cartron, rapporteure. - Amendement de coordination pour régler le problème de Mayotte.
M. Vincent Peillon, ministre. - Favorable.
L'amendement n°532 est adopté.
L'article 5, modifié, est adopté.
ARTICLES ADDITIONNELS
M. le président. - Amendement n°266 rectifié, présenté par Mme Laborde et MM. Alfonsi, Barbier, Baylet, Bertrand, C. Bourquin, Collin, Collombat, Fortassin, Hue, Mazars, Mézard, Plancade, Requier, Tropeano, Vall et Vendasi.
Après l'article 5
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - L'article L. 121-2 du code de l'éducation est ainsi rédigé :
« La lutte contre l'illettrisme et l'innumérisme constituent une priorité nationale. Cette priorité est prise en compte par le service public de l'éducation ainsi que par les personnes publiques et privées qui assurent une mission de formation ou d'action sociale. Tous les services publics contribuent de manière coordonnée à la lutte contre l'illettrisme et l'innumérisme dans leurs domaines d'action respectifs. »
II. - La perte de recettes résultant pour l'État du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
Mme Françoise Laborde. - L'Académie des sciences s'est émue en 2012 de la difficulté d'approche des mathématiques. Cet « innumérisme » n'est pas moins grave que l'illettrisme.
M. le président. - Amendement n°454, présenté par M. Legendre et les membres du groupe UMP.
Après l'article 5
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l'article L. 121-2 du code de l'éducation, il est inséré un article L. 121-2-... ainsi rédigé :
« Art. L. 121-2-... - La lutte contre l'illettrisme à l'école est la priorité nationale. Tous les élèves doivent avoir la maîtrise de la lecture avant leur entrée au collège afin de réduire l'échec scolaire. »
M. Jacques Legendre. - Je suis très préoccupé par l'illettrisme : tous les élèvent doivent maîtriser la lecture à l'entrée au collège.
Mme Françoise Cartron, rapporteure. - Avis favorable sur l'amendement n°266 rectifié. La lutte contre l'illettrisme est déjà prévue dans le code de l'éducation et il ne faudrait pas que l'on instaure au CM2 un examen de lecture susceptible de bloquer l'entrée en sixième.
M. Vincent Peillon, ministre. - L'innumérisme n'est pas dans le code de l'éducation : avis favorable. En revanche, l'illettrisme est une cause nationale et elle est précisément inscrite dans le code de l'éducation : défavorable à l'amendement n°454.
M. Michel Savin. - Je veux revenir sur la question des enseignants qui accueillent les enfants dans les structures d'urgence. Il faudrait y renforcer le corps enseignant pour aider ces enfants, et ne pas pénaliser les autres. Je crains que certains enseignants et parents d'élèves n'aient quelque réticence à accueillir ces enfants qui ne maîtrisent pas le français. Certains des postes créés pourraient être destinés à cela. Je ne comprends pas que l'on ait opposé l'article 40 à mon amendement qui défendait cette proposition.
M. Jean-Claude Lenoir. - L'amendement de Mme Laborde est gagé. La coutume veut que le ministre lève le gage lorsqu'il se dit favorable à un amendement gagé. Est-ce votre intention ?
Mme Catherine Morin-Desailly. - L'amendement n°266 rectifié apporte une précision utile. L'amendement n°454 rappelle les objectifs à atteindre. Certes, la lutte contre l'illettrisme figure dans le code de l'éducation, mais pas dans l'annexe. C'est un oubli fâcheux. L'objectif de la lecture à l'entrée en sixième est fondamental, madame la rapporteure.
M. Vincent Peillon, ministre. - Je lève le gage, monsieur Lenoir ; merci de m'avoir conduit à le préciser. Dans le rapport annexe, il est bien question de l'illettrisme, au paragraphe 256, au paragraphe 257, aux suivants. Imaginez-vous que les députés l'aient oublié ?
Monsieur Savin, je sais que vous parlez avec votre coeur. Nous sommes d'accord sur le fait que l'éducation nationale doit mettre plus d'humanité et de moyens. C'est le sens de ma circulaire. Regardez la déclaration de M. Baudis, défenseur des droits : il rend hommage à notre action, considérant que mon administration est la mieux mobilisée en la matière. J'en suis fier.
J'ai bien connu Georges Charpak : arrivé en France, sans parler le français, il a été accueilli et a parlé très vite notre langue. Il faut que ces enfants soient intégrés dans les mêmes conditions que les autres dans les écoles de la République. Je sais bien que des familles et des enseignants vivent mal l'accueil de ces enfants dans les écoles ordinaires, mais il faut insister et les intégrer.
M. Jacques Legendre. - Il faut affirmer la nécessité de vaincre l'illettrisme, sur ce point, je suis volontiers Mme Laborde. Mais mon amendement comporte aussi un autre point : la maîtrise de la lecture avant l'entrée au collège. Bien évidemment, nous ne voulons pas recréer un examen d'entrée au collège mais un élève sur six entrant en sixième ne sait pas lire correctement : le risque d'échouer est alors réel. Si un enfant de 7 ans ne maîtrise pas la lecture, il aura du mal à rattraper son retard. Mais il aura encore le temps pour réussir au collège. (Applaudissements à droite)
Mme Annie David. - Je conçois que telle ne soit pas votre volonté ; toutefois, l'adoption de cet amendement aurait pour effet qu'un enfant ne sachant pas bien lire serait bloqué à l'entrée en sixième et exclu. Pensez aux enfants de parents expatriés. Certes, il faut que ces enfants sachent lire mais on ne peut les bloquer à leur entrée en sixième. Ne laissons pas des enfants sur le bord de la route.
L'amendement n°266 rectifié est adopté.
L'amendement n°454 n'a plus d'objet.
ARTICLE 6
Mme Catherine Morin-Desailly . - Cet article porte sur l'éducation artistique et culturelle à l'école. L'éducation nationale a longtemps privilégié les savoir-faire sur le savoir-être. L'éducation de la sensibilité, la fréquentation des oeuvres sont essentielles à l'enfant. La culture contribue à tisser du lien social. J'avais déposé un amendement en 2005 pour intégrer la culture au socle commun. Ainsi, je soutiens cet article qui complètera utilement l'enseignement aux arts.
Pour autant, je regrette le déficit d'ambition de ce texte. L'éducation artistique c'est la sensibilisation permanente, au-delà de l'enseignement artistique proprement dit. Elle est dispensée le plus souvent dans des écoles d'art ou des conservatoires.
Ces notions sont complémentaires et s'inscrivent dans un continuum des pratiques. C'est pourquoi j'ai déposé un amendement pour que chaque élève puisse accéder à cette formation. D'autres amendements clarifient l'éducation artistique et culturelle sur le temps scolaire et périscolaire. Il faudra prendre appui sur les expérimentations déjà menées par les collectivités territoriales.
M. Jean-Étienne Antoinette . - Cet article 6 illustre la refondation voulue par le Gouvernement, car il place le service public de l'enseignement dans une dynamique d'ouverture des élèves au monde de la culture. Les députés ont insisté, à juste raison, sur les partenariats locaux. Il ne faudra pas que les frontières du territoire local instituent un seuil, au-delà duquel le monde serait fermé. En Guyane, nous sommes sensibles au risque d'un tel blocage.
Je salue les travaux de la commission qui ont laissé la possibilité de l'accès à la culture autre qu'artistique. Cette ouverture concerne aussi la culture scientifique et technique. Le centre de Kourou accompagne chaque classe d'âge à la découverte de l'espace. L'éducation culturelle ne réside pas seulement dans un cours artistique mais dans l'ensemble des enseignements. Le service public de l'enseignement dépasse les apprentissages techniques.
Mme Annie David . - Cet article met en place une éducation artistique et culturelle plus large que le seul enseignement artistique actuellement prévu. Si Jack Ralite était encore parmi nous, nul doute qu'il serait intervenu brillamment.
Cette éducation artistique et culturelle semble être composée de l'enseignement artistique actuel, accompagné par les acteurs du champ artistique. On ne peut qu'y être favorable, pour remédier à l'inégalité d'accès des enfants à la culture.
Comment chaque école pourra-t-elle s'inscrire dans un parcours local ? Nous avons du mal à comprendre comment ces inégalités seront corrigées. Le numérique ? Mais il est inégalement réparti sur le territoire, une élue de l'Isère ne peut qu'y être sensible. Si la seule ambition est de fournir un parcours culturel, notre ambition n'est pas la même.
M. Jacques-Bernard Magner . - Cet article est une grande innovation. Il dessine un cadre qui donnera une plus grande place à l'imagination. Le parcours est un bel outil de lutte contre les inégalités.
M. le président. - Amendement n°306 rectifié, présenté par Mme Laborde et MM. Alfonsi, Baylet, Bertrand, C. Bourquin, Collin, Collombat, Fortassin, Hue, Mazars, Mézard, Plancade, Requier, Tropeano, Vall et Vendasi.
Alinéa 4
Après le mot :
contribue
insérer les mots :
sur le temps scolaire
Mme Françoise Laborde. - L'instauration du parcours artistique et culturel est une véritable avancée. Mais pour qu'il bénéficie au plus grand nombre, il faut qu'il se déroule pendant le temps scolaire.
Mme Françoise Cartron, rapporteure. - Le parcours s'accomplit en partenariat. Il ne faut pas une étanchéité absolue entre le temps scolaire et le temps périscolaire. En primaire et au collège, les enseignants participent à cet enseignement. En outre, il y aura des temps complémentaires, en périscolaire. Retrait ?
M. Vincent Peillon, ministre. - Le parcours essaye de créer un grand mouvement pour que tous les élèves aient accès à la culture. Il faut à la fois tracer une exigence pour tous et laisser une autonomie réelle aux acteurs sur le terrain. Le temps scolaire et périscolaire doit permettre de mener à bien ce parcours. Le temps scolaire ne sera pas touché et nous travaillerons avec d'autres à l'extérieur. S'il faut rencontrer des créateurs, une heure n'est pas la bonne solution. Retrait ?
Le projet est très ambitieux car il traite du socle de connaissances, mais aussi de l'éducation libérale, c'est-à-dire des arts libéraux, chère à l'ancien président du Sénat Jules Ferry. Dans les milieux défavorisés, cette sensibilisation esthétique aide des enfants à se développer et réussir. Le mouvement se fera en marchant.
Mme Françoise Laborde. - Je maintiens mon amendement pour laisser mes collègues s'exprimer. En outre, je tiens à ce que le temps scolaire soit privilégié.
M. Jean-Claude Lenoir. - Je vous félicite pour cet amendement qui situe le débat au bon endroit. Les choses doivent être clarifiées : l'éducation artistique et culturelle doit être dispensée dans le temps scolaire. Or, M. le ministre nous explique que tout fait partie du même paquet pour que les jeunes aient une culture commune. Réveillez-vous mes chers collègues : une partie de cette tâche va relever des collectivités locales, qui ne sont pas chargées de l'éducation mais de l'animation culturelle. Ce qui est bien différent. La loi ne doit pas mettre à leur charge une tâche régalienne qui appartient à l'État.
Le 22 mai 1885, notre collègue Victor Hugo s'est éteint. Il avait tenu un long discours sur le sujet en 1848 ; relisez-le, c'est instructif !
Mme Catherine Morin-Desailly. - Il y a confusion entre temps scolaire et périscolaire. Nous craignons que l'éducation artistique et culturelle ne puisse se traduire dans la réalité. La conférence nationale sur les rythmes scolaires s'est tenue pendant un an : l'idée était de mieux équilibrer la journée, mais l'éducation artistique et culturelle était confiée aux enseignants, à personne d'autre.
L'ambiguïté vient de l'incertitude sur la responsabilité de cette fameuse heure. Nous n'avons pas eu le temps de mesurer les articulations nécessaires. Il faut organiser l'éducation artistique et culturelle, en lien avec l'enseignement artistique. C'est un vrai projet de territoire pour donner aux enfants un parcours de réussite.
M. Joël Guerriau. - L'éducation artistique et culturelle est importante. Elle doit être du ressort de l'État. Écoutons Victor Hugo : « les portes de la science sont grande ouvertes à l'intelligence ; partout où il y a un champ ou un esprit, qu'il y ait un livre... » Et de souligner la responsabilité éminente de l'État. Dire que chaque commune se débrouillera comme elle peut en fonction de ses équipements - un conservatoire ici, un centre d'initiation au théâtre chez moi, n'est pas satisfaisant. (Approbations à droite) On crée de fait un système inégalitaire. C'est inacceptable et cela trahit l'idéal du XIXe siècle. (Applaudissements à droite)
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. - Nous ne sommes pas hostiles à l'idée de parcours. Mais il y a une responsabilité de l'État à garantir un égal accès sur tout le territoire. le concept de culture commune, d'intelligence partagée que nous défendons n'exclut nullement l'articulation avec les territoires. Je soutiens l'amendement de Mme Laborde. (« Très bien ! » au centre et à droite)
Mme Marie-Christine Blandin, présidente de la commission de la culture. - Je vous mets en garde. En aucun cas, ai-je dit avec Marie Desplechin que nous avons entendue, le parcours n'évacue l'éducation artistique et culturelle vers le facultatif. Votre demande est dans le code et dans notre loi, à l'article 31. Vous n'avez pas besoin de répéter cette obligation. Nous vous accompagnerions si votre rédaction ne risquait de fermer les portes de l'école. Souvenez-vous des sorties d'environnement ! Comme il faut demander l'autorisation, vérifier les assurances, et je ne parle pas de la présence éventuelle d'enfants de témoins de Jéhovah ...on ne sort plus sur le terrain ! La fluidité entre les artistes et les intervenants serait menacée par un excès de sécurisation, qui cloisonnerait et rigidifierait l'école. (Applaudissements sur les bancs socialistes)
M. Vincent Peillon, ministre. - Les enseignements artistiques sont et demeurent, c'est un fait. Il ne s'agit pas d'enlever, mais d'ajouter et de coordonner. Le travail que nous avons mené avec les Directions régionales des affaires culturelles (Drac), avec le Patrimoine, le ministère de la culture, pour construire des synergies risquerait de s'arrêter. Le parcours du jeune intègre ce qui se fait dans l'école et en dehors d'elle. Nous ne remettons nullement en cause les enseignements artistiques. Avec votre amendement il n'y aura plus de parcours d'éducation artistique.
M. Jean-Claude Lenoir. - N'exagérons rien !
Mme Catherine Morin-Desailly. - Notre présidente fait référence aux textes qui ne visent que les arts plastiques et la musique. C'est restrictif ! Il y a bien d'autres disciplines. Mme Laborde propose une mesure de prudence : l'éducation artistique et culturelle relève du temps scolaire.
Après une épreuve à main levée déclarée douteuse, l'amendement n°306 rectifié, mis aux voix par assis et levé, n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°57, présenté par Mme Morin-Desailly et les membres du groupe UDI-UC.
Alinéa 6, première phrase
Remplacer le mot :
favorise
par les mots :
vise à
Mme Catherine Morin-Desailly. - Nous avons une ambition pour l'éducation artistique et culturelle
Mme Françoise Cartron, rapporteure. - Les mots « vise à » peuvent susciter une dérive. Notre objectif est une sensibilisation partagée, qui ne s'apparente pas à un apprentissage exhaustif. Défavorable.
M. Vincent Peillon, ministre. - Même avis.
L'amendement n°57 n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°86, présenté par Mme Gonthier-Maurin et les membres du groupe CRC.
Alinéa 6
1° Après la première phrase
Insérer une phrase ainsi rédigée :
L'éducation artistique et culturelle est principalement fondée sur les enseignements artistiques.
2° Deuxième phrase
a) Remplacer les mots :
L'éducation artistique et culturelle
par le mot :
Elle
b) Après le mot :
comprend
insérer le mot :
également
Mme Annie David. - Nous souhaitons réaffirmer la responsabilité de l'État, pour lutter contre les inégalités, pointées par Marie Desplechin dans son audition : « C'est l'État qui est attendu pour assurer une action de rééquilibrage ».
La notion de parcours est inégalitaire. Nous la maintenons toutefois mais nous réaffirmons que les enseignements artistiques font partie de l'éducation artistique et culturelle, qui vient en complément. Cette éducation ne doit pas être renvoyée au temps extra - ou périscolaire, de manière inégalitaire, en fonction de la situation de chaque territoire.
Mme Françoise Cartron, rapporteure. - Je me retrouve davantage dans votre formulation. Comme l'a dit le ministre, il n'est pas question d'enlever du temps scolaire aux enseignements artistiques. Vous retenez la notion de parcours, en complément et nous nous y retrouvons. Sagesse.
M. Vincent Peillon, ministre. - Cet amendement ne me pose pas de problème : sagesse aussi. L'égalité pour les élèves a lieu dans l'école. Les inégalités résident dans l'extrascolaire et le périscolaire. Notre ambition est de regagner du temps public sur le temps privé. Il n'y a qu'en France que l'on considère qu'une fois hors de l'école, c'est « chacun chez soi ». C'est pourquoi nous déclinons dans les classements internationaux. C'est une erreur fondamentale de ne pas faire confiance aux acteurs locaux. L'égalité est dans l'école, l'inégalité à l'extérieur. Il faut articuler les deux pour faire reculer l'inégalité.
Mme Catherine Morin-Desailly. - Il y a une confusion sémantique permanente entre éducation et enseignement artistiques. L'éducation est transversale. Elle sensibilise aux arts et à la culture. Je comprends qu'elle ait lieu sur le temps scolaire. L'enseignement artistique, c'est l'apprentissage approfondi d'une discipline, d'un instrument. On n'enseignera pas tous les instruments de l'orchestre à l'école. Je comprends l'ambition des auteurs de l'amendement, mais elle n'est pas réaliste. Il faut s'assurer que la décentralisation des enseignements artistiques lancée en 2004 se traduise enfin dans les faits. Je ne peux voter en l'état cet amendement.
M. Jacques-Bernard Magner. - Le groupe socialiste votera cet amendement.
Mme Annie David. - Monsieur le ministre, je partage ce que vous avez dit sur les inégalités.
Nous voulons que l'enseignement de la culture à l'école soit de qualité. Il ne doit pas être « au rabais », en majorité hors temps scolaire. J'entends que vous souhaitez regagner du temps public. Mais à quel prix ? Qui prend en charge financièrement ?
M. Jean-Claude Lenoir. - Voilà la question !
M. Michel Savin. - C'est tout le débat !
Mme Annie David. - C'est ce que souhaite exprimer cet amendement. Chaque territoire est différent.
M. Vincent Peillon, ministre. - Ah !
Mme Annie David. - Mais tous les territoires sont concernés.
Mme Sophie Primas. - Parfois, madame Cartron, vous changez d'avis par rapport à ce qu'a décidé la commission. Sans doute la réflexion peut-elle évoluer mais pour la forme, il serait bon que vous fassiez connaître la décision de la commission.
Mme Marie-Christine Blandin, présidente de la commission de la culture. - Vous avez raison. Nous avions un avis défavorable sur l'amendement de Mme Laborde dont les explications nous ont amenées à préciser les raisons de notre opposition. L'amendement suivant, qui n'avait pas reçu un avis favorable, est devenu comme un amendement de repli. La commission a décidé, puis l'évolution du débat a amené la rapporteure à proposer la sagesse.
M. Jacques Legendre. - C'est tout de même important de connaître l'avis de la commission, même si la rapporteure évolue à titre personnel. C'est la bonne pratique parlementaire.
Mme Marie-Christine Blandin, présidente de la commission de la culture. - Tout à fait !
Mme Françoise Cartron, rapporteure. - J'accepte ce « mauvais point » que vous m'attribuez, après que vous ayez relevé que M. le ministre vous donnait des leçons... Je distinguerai dorénavant l'avis de la commission du mien propre lorsqu'il évolue en fonction des débats.
À la demande du groupe CRC, l'amendement n°86 est mis aux voix par scrutin public.
M. le président. - Voici les résultats du scrutin :
Nombre de votants | 345 |
Nombre de suffrages exprimés | 345 |
Pour l'adoption | 176 |
Contre | 169 |
Le Sénat a adopté.
M. le président. - Amendement n°59, présenté par Mme Morin-Desailly et les membres du groupe UDI-UC.
Alinéa 6, dernière phrase
Après le mot :
localement
insérer les mots :
et s'appuie sur les expérimentations menées par les contrats locaux d'éducation artistique
Mme Catherine Morin-Desailly. - Les contrats locaux d'éducation artistiques font leur preuve. Ils associent les collectivités territoriales, l'école, les services déconcentrés de l'éducation nationale et du ministère de la culture et de la communication, et aident ainsi à construire une culture commune.
Mme Françoise Cartron, rapporteure. - Défavorable.
M. Vincent Peillon, ministre. - Défavorable.
L'amendement n°59 n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°58, présenté par Mme Morin-Desailly et les membres du groupe UDI-UC.
Alinéa 6
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Les collectivités territoriales concernées doivent être associées à la mise en oeuvre de ce parcours.
Mme Catherine Morin-Desailly. - Cet amendement se justifie par son texte même.
Mme Françoise Cartron, rapporteure. - C'est une évidence. Défavorable.
M. Vincent Peillon, ministre. - C'est dans le texte. Défavorable.
L'amendement n°58 n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°395, présenté par Mme Morin-Desailly et les membres du groupe UDI-UC.
Alinéa 6
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Il est mis en place dans les différents temps éducatifs, scolaire, périscolaire et extrascolaire.
Mme Catherine Morin-Desailly. - Il serait convenable d'avoir plus d'explications...
Cet amendement d'appel rappelle qu'il est difficile, en pleine réforme des rythmes scolaires, d'imposer aux collectivités territoriales la façon dont elles s'empareront de ce « supplément d'âme » culturel.
M. Jean-Claude Carle. - Très bien !
Mme Françoise Cartron, rapporteure. - Cet amendement est en contradiction avec l'amendement de Mme Laborde. Il revient à la rédaction actuelle et est satisfait. Retrait ?
M. Vincent Peillon, ministre. - Sagesse.
Mme Catherine Morin-Desailly. - L'amendement de Mme Laborde ne visait pas exclusivement le temps scolaire.
Mme Françoise Cartron, rapporteure. - Si !
Mme Catherine Morin-Desailly. - Surtout, il n'a pas été adopté ! Revenons à l'ambition de la réforme de l'éducation artistique et culturelle.
L'amendement n°395 n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°169, présenté par Mme Bouchoux et les membres du groupe écologiste.
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
...° Au deuxième alinéa, après le mot : « plastiques », sont insérés les mots : « et visuels, ».
Mme Corinne Bouchoux. - L'éducation artistique et culturelle comporte plusieurs composantes, afin de développer l'imagination et la créativité. Ainsi, il convient d'ajouter les arts visuels, en complément des arts plastiques.
Mme Françoise Cartron, rapporteure. - Favorable.
M. Vincent Peillon, ministre. - Favorable.
L'amendement n°169 est adopté.
L'article 6, modifié, est adopté.
ARTICLE 6 BIS
M. le président. - Amendement n°192, présenté par MM. Legendre, Carle, Bordier et Chauveau, Mme Duchêne, MM. Dufaut, A. Dupont et Duvernois, Mme Farreyrol, MM. B. Fournier, J.C. Gaudin, Grosdidier, Humbert, Leleux et Martin, Mme Mélot, M. Nachbar, Mme Primas et MM. Savin, Soilihi, Vendegou et Lenoir.
Rédiger ainsi cet article :
L'article L. 121-5 du code de l'éducation est ainsi rédigé :
« Art. L. 121-5. -L'éducation physique et sportive et le sport scolaire et universitaire contribuent à la rénovation du système éducatif, à la lutte contre l'échec scolaire, à la réduction des inégalités sociales et culturelles, et à l'éducation et à la santé. »
M. Michel Savin. - Amendement rédactionnel.
M. le président. - Amendement n°356 rectifié, présenté par M. Lozach et les membres du groupe socialiste et apparentés.
Rédiger ainsi cet article :
L'article L. 121-5 du code de l'éducation est ainsi modifié :
1° Les mots : « et le sport scolaire et universitaire » sont remplacés par les mots : « le sport scolaire et universitaire, et la contribution apportée par le sport aux apprentissages » ;
2° Après les mots : « l'échec scolaire », sont insérés les mots : « , à l'éducation à la santé et à la citoyenneté » ;
3° Il est ajouté une phrase ainsi rédigée :
« Leur mise en oeuvre vise la complémentarité entre les pratiques sportives scolaires, périscolaires et extrascolaires, dans le cadre des projets éducatifs territoriaux et de partenariats avec le mouvement sportif associatif. »
M. Jacques-Bernard Magner. - Cet amendement intègre la dimension de l'éducation par le sport, lequel peut être utilisé comme vecteur d'apprentissage pour les autres matières. Il reconnaît le rôle du sport - respect de l'autre, esprit d'équipe - dans l'apprentissage de la vie en société et dans la construction de la citoyenneté. On dit que c'est sur un terrain de sport que peut se révéler un enfant.
Il fixe un objectif de cohérence des pratiques sportives dans les différents temps de l'enfant : scolaire, périscolaire et extrascolaire.
On propose ainsi aux enfants un parcours cohérent, avant, pendant et après l'école. Les activités de chacun de ces temps sont complémentaires et doivent être articulées ensemble. Le rôle du sport est à cet égard fondamental.
M. le président. - Amendement n°60 rectifié, présenté par Mme Morin-Desailly et les membres du groupe UDI-UC.
I. - Rédiger ainsi cet article :
L'article L. 121-5 du code de l'éducation est ainsi modifié :
1° Après les mots : « l'échec scolaire », sont insérés les mots : « , à l'éducation à la santé » ;
2° Il est complété par deux alinéas ainsi rédigés :
« Le sport scolaire joue un rôle fondamental dans l'accès des jeunes aux sports et à la vie associative, créant une dynamique et une cohésion au sein des communautés éducatives et entre les écoles et les établissements. Il contribue à l'éducation à la citoyenneté.
« L'éducation physique et sportive contribue également à promouvoir le respect de l'éthique et des valeurs éducatives et humanistes du sport. Elle favorise l'égalité des chances des jeunes. »
II. - En conséquence, faire précéder cet article d'une division additionnelle et son intitulé ainsi rédigés :
Section 2 bis A
L'éducation physique et sportive
Mme Catherine Morin-Desailly. - Les amendements ont fleuri pour réparer l'oubli du sport, que nous avions tant regretté en commission.
Cet amendement crée un nouvel article visant à compléter l'article L. 121-5 du code de l'éducation. Il crée également une nouvelle section spécifique, par analogie avec l'éducation artistique et culturelle.
Mme Françoise Cartron, rapporteure. - Défavorable à l'amendement n°192, qui supprime la notion d'éducation à la santé, favorable à l'amendement n°356 rectifié, mieux rédigé que l'amendement n°60 rectifié.
M. Vincent Peillon, ministre. - Même avis.
M. Michel Savin. - Mon amendement renvoie bien à l'éducation et à la santé !
Mme Catherine Morin-Desailly. - Nouvelle différence entre la commission et la séance ! L'amendement de M. Lozach est peut-être mieux écrit, mais j'aurais aimé réaffirmer le rôle fondamental du sport scolaire dans les termes de notre amendement.
Mme Françoise Cartron, rapporteure. - Dans l'amendement n°192, il est écrit : « à l'éducation et à la santé » ; nous parlons de « l'éducation à la santé ». En commission, j'ai dit que votre amendement, madame Morin-Desailly, n'était pas suffisamment normatif.
M. Jacques Legendre. - Nous allons rectifier notre amendement, pour tenir compte de la rédaction que vous souhaitez.
Mme Françoise Cartron, rapporteure. - Vous revenez au texte du Gouvernement. (M. le ministre sourit) L'avis reste donc défavorable puisque l'amendement est satisfait.
L'amendement n°192 rectifié n'est pas adopté.
L'amendement n°356 rectifié est adopté.
L'amendement n°60 rectifié devient sans objet.
L'article 6 bis, modifié, est adopté.
Prochaine séance aujourd'hui, jeudi 23 mai 2013, à 9 h 30.
La séance est levée à minuit vingt-cinq.
Jean-Luc Dealberto
Directeur des comptes rendus analytiques
ORDRE DU JOUR
du jeudi 23 mai 2013
Séance publique
À 9 HEURES 30
1.Suite du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, d'orientation et de programmation pour la refondation de l'école de la République (n° 441, 2012-2013).
Rapport de Mme Françoise Cartron, fait au nom de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication (n° 568, 2012-2013).
Texte de la commission (n° 569, 2012-2013).
Avis de Mme Claire-Lise Campion, fait au nom de la commission des affaires sociales (n° 570, 2012-2013).
Avis de M. Claude Haut, fait au nom de la commission des finances (n° 537, 2012-2013).
À 15 HEURES
2.Questions d'actualité au Gouvernement.
À 16 HEURES 15 ET LE SOIR
3.Suite de l'ordre du jour du matin.