Moyens de contrôle du parlement

M. le président.  - L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, tendant à renforcer les moyens du Parlement en matière de contrôle de l'action du Gouvernement et d'évaluation des politiques publiques.

Discussion générale

M. Henri de Raincourt, ministre des relations avec le Parlement.  - Le contrôle des politiques publiques est, dans une démocratie moderne, une fonction de plus en plus importante du Parlement. Après la réforme constitutionnelle, il reste à trouver les moyens de rendre évaluateur le Parlement législateur. Tel est l'objet de cette proposition de loi de M. Accoyer.

Le Gouvernement approuve pleinement cette démarche. Toutefois, il rappelle qu'il est seul à pouvoir autoriser les responsables administratifs de l'État à se rendre devant le Parlement. Le Conseil constitutionnel, dans sa décision du 25 juin 2009, a marqué que tel était bien l'esprit de la Constitution. Il serait dangereux de banaliser le recours à de tels pouvoirs du Parlement. Les commissions permanentes n'ont pas, de droit, de telles prérogatives ; il leur faut l'accord de l'Assemblée elle-même.

Je salue avec chaleur le remarquable travail de M. Gélard, ainsi que la qualité des réflexions menées au sein de la commission que préside M. Hyest. La fonction du Parlement n'appelle pas à une multiplication des moyens de contrainte sur le Gouvernement, mais à l'établissement d'un dialogue constructif et confiant avec le pouvoir exécutif. La possibilité désormais offerte aux commissions permanentes de demander la saisine de la Cour des comptes est dans la logique du nouvel article 47-2 de la Constitution. Il importe toutefois de réguler voire de programmer les demandes qui sont faites à la Cour des comptes. La priorité reconnue aux demandes des commissions des finances et des affaires sociales garantira le contrôle de la bonne application des lois de finances et de financement.

Je le dis nettement : l'examen de cette proposition de loi n'est pas le cadre pour un débat approfondi sur l'organisation et les compétences de la Cour des comptes. Le Gouvernement, vous ne l'ignorez pas, prépare une réforme des juridictions financières, dans l'esprit du regretté Premier président Séguin. La proposition de loi tire les conséquences de la décision du Conseil constitutionnel du 25 juin 2009 : ces dispositions ont place non plus dans les règlements des assemblées, mais dans la loi. Cette initiative complète l'engagement du Gouvernement de mettre en oeuvre au plus tôt les nombreuses innovations de la révision constitutionnelle. Le Gouvernement est favorable à l'adoption de cette proposition de loi opportune et prometteuse pour le Parlement. (Applaudissements au centre et à droite)

M. Patrice Gélard, rapporteur de la commission des lois.  - Je remercie le ministre pour ses compliments. J'ajoute cependant qu'il ne faut pas trop charger le train. La Conférence des Présidents qui vient d'être lue fait craindre qu'il ne déraille.

Cette proposition de loi doit rendre possible l'adoption par l'Assemblée nationale des moyens de contrôle dont elle voulait bénéficier. Le Conseil constitutionnel considère que cela doit désormais relever de la loi et non plus du règlement des assemblées. Les articles 1, 2 et 3 concernaient beaucoup plus l'Assemblée nationale que le Sénat, mais puisque nous entretenons de bons rapports...

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois.  - Sauf sur l'article 13 !

M. Patrice Gélard, rapporteur.  - ...nous allons adopter son texte, après toutefois l'adoption de huit amendements à l'article premier. A l'article 3, nous réécrivons le nouvel article L.132-5, qui était un peu lourd.

Enfin, il faut rendre applicable l'article 47-2 de la Constitution. La réforme des juridictions financières , dont Jean Arthuis parlera à propos de son amendement,n'a pas sa place ici.

M. Jean-Pierre Sueur.  - Un gros cavalier ! (On rit)

M. Jean Arthuis, rapporteur pour avis de la commission des finances.  - Vous n'avez rien compris !

M. Patrice Gélard, rapporteur.  - Sur le texte, je n'ajouterai rien, après tout ce qu'a dit le ministre ! (Applaudissements au centre et à droite)

M. Jean Arthuis, rapporteur pour avis de la commission des finances.  - Le rapporteur vient de présenter le contexte de cette proposition de loi du président de l'Assemblée nationale. C'est évidemment l'article 3 qui a focalisé l'attention de la commission des finances : il attribue à certaines instances parlementaires l'évaluation des politiques publiques, le pouvoir de saisine de la Cour des comptes.

Cette extension risque d'aboutir à une augmentation du nombre de demandes, incompatible avec les moyens de la Cour. Celle-ci serait donc amenée à trier entre les demandes de l'Assemblée nationale et du Sénat. La commission des finances a souhaité écarter le risque d'une trop grande augmentation du nombre de saisines de la Cour. Depuis 2003, notre commission des finances demande à la Cour cinq enquêtes. Celles-ci , remises dans un délai de huit mois,font l'objet de publication. Nos amendements sur ce point ont été adoptés par la commission des lois, ce dont je la remercie.

Nous avons voulu aller plus loin et répondre à certaines dispositions du projet de loi de modernisation des juridictions financières déposé par le Gouvernement sur le bureau des assemblées. Il faut que la Cour ait les moyens de son action. Ce n'est pas un cavalier...

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois.  - Le pâté d'alouette...

M. Jean Arthuis, rapporteur pour avis.  - ...que de donner à la Cour la possibilité d'accéder aux administrations territoriales. Il faut avoir une approche globale des comptes publics. Dois-je vous rappeler nos demandes d'enquêtes sur la politique de la ville, les chambres de métier ou le soutien scolaire ? A chaque fois, nous avons buté sur le partage des attributions entre la Cour des comptes et les chambres régionales.

Nos demandes figurent toutes dans le projet de loi élaboré par le Premier président Séguin et adopté par le conseil des ministres.

Mais il s'agit là du domaine privilégié de la commission des lois.

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. - L'organisation des juridictions est de notre compétence !

M. Jean Arthuis, rapporteur pour avis. - L'unification organique de la Cour des chambres régionales, avec la création des chambres régionales, cela relève des compétences de la Cour.

M. Jean-Pierre Sueur. - Et le législateur ?

M. Jean Arthuis, rapporteur pour avis. - Laissons au législateur les grands principes !

M. Jean-Pierre Sueur. - C'est le législateur qui a créé les chambres régionales !

M. Jean Arthuis, rapporteur pour avis. - On ne peut poser le principe que la Cour certifie les comptes de l'État et non ceux des collectivités territoriales. Il faut aussi que chaque chambre puisse atteindre une taille critique. Celle du Limousin n'a que cinq magistrats, celle de la Corse, quatre.

M. Pierre-Yves Collombat. - Augmentez les effectifs ! (Sourires)

M. Jean Arthuis, rapporteur pour avis. - Le projet de loi réformant les juridictions financières a été déposé sur le bureau de l'Assemblée nationale le 28 octobre et n'a toujours pas été inscrit à l'ordre du jour. Saisissons l'occasion de cette proposition de loi.

Pour être crédibles, les juridictions financières doivent accepter de se réformer et de s'interroger sur leur mode de fonctionnement. Il serait singulier qu'elles ne soient pas exemplaires de la modernité administrative !

Mme Muguette Dini, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales, en remplacement de M. Alain Vasselle.  - Cette proposition de loi, pour brève qu'elle soit, n'en est pas moins importante. Elle donne corps à cette nouvelle mission du Parlement voulue par le législateur constitutionnel.

Notre commission des affaires sociales s'est saisie pour avis de l'article 3 : l'article 47-2 de la Constitution consacre la mission d'assistance de la Cour des comptes au Parlement. L'article 58 de la Lolf prévoit que les deux commissions des finances peuvent solliciter la Cour. L'article L. 133-1 du code des affaires sociales prévoit l'équivalent pour la commission des affaires sociales. La proposition de loi complète ces dispositions.

Pour éviter un engorgement de la Cour, la proposition de loi prévoit un filtre des demandes par les présidents des deux Assemblées. Comme la commission des finances, nous souhaitons reprendre le principe posé par le Conseil constitutionnel selon lequel ce contrôle ne peut porter sur les lois de finances et de financement, pour lesquelles les commissions spécialisées des deux Assemblées sont seules compétentes. Les moyens de la Cour ne sont pas extensibles à l'infini.

Notre commission entretient des relations étroites et fructueuses avec la Cour, dont nous apprécions l'extension du champ de compétences. Elle a procédé à notre demande à une enquête sur la politique de lutte contre le Sida ; elle va le faire sur la pandémie grippale et sur la tarification des établissements médico-sociaux publics et privés, en écho à nos travaux sur la prise en charge de la dépendance.

La commission des affaires sociales est favorable à l'adoption de cette proposition de loi. (Applaudissements au centre et à droite)

Mme Josiane Mathon-Poinat. - Ce qui était mis en avant il y a deux ans comme une « révolution » démocratique apparaît bien mince. La limitation du droit d'amendement à l'Assemblée nationale, combinée avec une prolifération des textes qui lui sont soumis, restreignent de fait le pouvoir de contrôle du Parlement. On est loin de la réforme profonde qui serait nécessaire pour accroître vraiment les prérogatives parlementaires.

L'Assemblée nationale a créé un comité de contrôle alors que le Sénat a accordé ces pouvoirs à ses commissions permanentes. Je rends hommage à M. Arthuis, qui rappelle qu'à l'Assemblée nationale, au sein du CEC, tous les groupes peuvent rédiger un rapport de contrôle.

Au Sénat les commissions peuvent jouer ce rôle mais elles sont soumises sont soumises au bon vouloir de leur majorité... Il faudra y songer lors de la réforme du règlement. Les rapporteurs n'ont pas toujours les pouvoirs que peuvent avoir ceux des commissions d'enquête.

M. Arthuis tente de supprimer, en fait, les chambres régionales des comptes. C'est une restriction des moyens d'action de l'Etat et des collectivités territoriales. Nous voterons résolument contre cette proposition, mais ne ferons que nous abstenir sur l'ensemble de la proposition de loi.

M. Jean-Pierre Sueur.  - M. Accoyer est un homme avisé et prudent : il a proposé d'accroître la capacité de contrôle du Parlement. Je vais donc défendre sa proposition. (On s'amuse sur les bancs de la commission)

Mais l'Assemblée nationale - quelle surprise ! - n'a pas suivi son président. Le champ de l'article premier a été singulièrement réduit. Connaissant MM. Hyest et Gélard, je pensais que notre commission se porterait au secours de M. Accoyer.

M. Patrice Gélard, rapporteur.  - On n'a pas besoin de cela !

M. Jean-Pierre Sueur.  - Il n'en a rien été. Nous avons donc déposé un amendement pour revenir au texte initial. M. Gélard nous propose un nivellement par le bas, un alignement des régimes des instances de contrôle et des commissions permanentes.

En ce qui concerne les délégations parlementaires communes aux deux assemblées, nous proposons aussi d'en revenir au texte initial. Enfin, comment justifier le fait de limiter le pouvoir de convocation aux seules instances de contrôle transversales ?

M. Patrice Gélard, rapporteur.  - Autrement, c'est la commission !

M. Jean-Pierre Sueur.  - Il faut là aussi revenir à la rédaction de M. Accoyer. M. de Raincourt en est convaincu, j'en suis sûr. Nous avons pris connaissance avec intérêt des amendements de M. Arthuis, mais ils nous semblent hors sujet.

M. Jean Arthuis, rapporteur pour avis.  - Il y a un lien et c'est très important.

M. Jean-Pierre Sueur.  - La réforme des chambres des comptes est légitime, mais on ne peut en traiter par raccroc au détour de ce texte. Nous avons reçu les représentants de la Cour et des chambres régionales des comptes.

M. Jean Arthuis, rapporteur pour avis.  - C'était très intéressant.

M. Jean-Pierre Sueur.  - Sur le fond, il y a matière à discuter. Si certaines chambres de compte manquent de magistrats, ce n'est ni inéluctable, ni une raison de diviser par deux le nombre de chambres ! Si on ne crée qu'une seule chambre pour le Centre et le Limousin, nos magistrats devront passer beaucoup de temps dans les transports, entre Brive-la-Gaillarde et Dreux.

M. Jean Arthuis, rapporteur pour avis.  - Ils se font communiquer les pièces ! Ils se déplacent peu.

M. Jean-Pierre Sueur.  - Cela aura un effet évident sur leur travail. Ce sujet mérite réflexion ; s'il faut sans doute retravailler les liens entre la Cour et les chambres régionales, le sujet mérite un projet de loi spécifique. Il y en a un, d'ailleurs.

M. Jean Arthuis, rapporteur pour avis.  - Il n'est pas inscrit à l'ordre du jour !

M. Jean-Pierre Sueur.  - Cela dépend des instances compétentes pour cela...

M. Jean Arthuis, rapporteur pour avis.  - Mais il existe...

M. Jean-Pierre Sueur.  - Nous voterons donc contre ces amendements.

M. Jean Arthuis, rapporteur pour avis.  - Quel conservatisme !

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois.  - Respectons la qualité de la loi !

M. Jean-Pierre Sueur.  - Si ces amendements étaient adoptés par le Sénat, nous saisirions le Conseil constitutionnel, que nous savons sensible à la façon dont nous faisons la loi.

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois.  - Alors là, bing !

M. Jean-Pierre Sueur.  - Pour le reste, nous nous abstiendrons sur ce texte. (Applaudissements socialistes)

Mme Anne-Marie Escoffier.  - Cette proposition de loi est la conséquence directe de la révision de 2008 qui devait revaloriser le rôle du Parlement. L'Assemblée nationale a créé, en mai 2009, une nouvelle structure, le comité d'évaluation et de contrôle des politiques publiques.

Ce texte entend parachever le renforcement des pouvoirs du Parlement. Le passage d'une logique de moyens à une logique d'efficience impose de disposer d'outils d'analyse fiables. La loi de règlement a pris une importance nouvelle.

L'assistance à l'évaluation apportée par la Cour des comptes a été renforcée sur une base légale. Je me réjouis donc de la place que le Parlement entend tenir désormais au travers de ses missions de contrôle, trop souvent ignorées dans le passé.

Cette proposition de loi va dans le bon sens et a encore été améliorée par la commission. Les groupes minoritaires doivent néanmoins bénéficier de davantage de droits. Les membres du RDSE regrettent qu'il n'en soit rien.

Les amendements de M. Arthuis ont suscité notre perplexité ; ils proposent en effet une réforme d'ensemble de la Cour des comptes et des chambres régionales. Nous ne sommes pas opposés à une réforme, et nous sommes prêts à y travailler sur le fondement des travaux déjà entrepris au sein de la Cour et de ses chambres. Il n'est pas raisonnable de se passer d'un débat de fond, que le nouveau Premier président doit aussi s'approprier. Notre groupe s'opposera à ces amendements et plaide pour un débat serein. S'ils devaient être adoptés, nous nous abstiendrions sur l'ensemble du texte. Nous osons croire à la sagesse du Gouvernement... (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Yves Détraigne.  - Ce texte est très important pour le Parlement, qui met en oeuvre les dispositions issues de la révision de 2008 et les moyens nécessaires à l'exercice de ses missions de contrôle et d'évaluation des politiques publiques. Le Parlement serait d'ailleurs plus utile au Gouvernement et au pays en prenant le temps du contrôle et de l'évaluation des dispositions législatives existantes. Nous recourons de plus en plus à l'expertise de la Cour des comptes pour le contrôle, mais cette dernière mission n'est pas toujours considérée comme elle le devrait par les parlementaires eux-mêmes - ils ne sont pas encore très présents à Paris lors des semaines de contrôle. Il n'est pas très satisfaisant de dire aux électeurs que « c'est le Gouvernement qui l'a voulu ». Le Parlement se comporte trop souvent en chambre d'enregistrement : il n'est pas assez critique par rapport aux textes qui lui sont soumis et qui ne sont que rarement accompagnés d'études d'impact. Le service après-vote est aussi important que le vote. Les électeurs ne jugent pas le politique sur le nombre de lois votées mais sur la qualité des politiques qui sont menées.

L'article 3 me pose, sur ce point, quelques problèmes. Chaque instance du Parlement pourra saisir la Cour des comptes au titre de sa mission d'assistance ; c'est légitime. Mais ne risque-t-on pas l'engorgement ? J'approuve le filtrage par le président de chaque assemblée.

Les chambres régionales des comptes ont été créées en 1982 pour contrôler les collectivités territoriales ; depuis lors, les pouvoirs de celles-ci ont considérablement augmenté. Il ne faudrait pas que la multiplication des interventions de la Cour des comptes et des chambres régionales demandées par le Parlement se fasse au détriment de leurs missions traditionnelles. Je me réjouis donc de la sage position de la commission. (Applaudissements à droite et au centre)

M. Patrice Gélard, rapporteur. - N'oubliez pas le filtre !

M. François Pillet. - Cette proposition de loi met en oeuvre la révision constitutionnelle afin que les organes parlementaires disposent des moyens nécessaires pour contrôler l'exécutif. Elle fait suite à la décision du Conseil constitutionnel du 25 juin 2009 sur la résolution de mai 2009 modifiant le Règlement de l'Assemblée nationale.

La commission des lois a amélioré ce texte de diverses manières. Ainsi en est-il des convocations et des comptes rendus des auditions en commission d'enquête. Les rapporteurs des instances permanentes de contrôle et d'évaluation bénéficieront des mêmes pouvoirs que les rapporteurs des commissions d'enquête. Il faudra néanmoins une autorisation de l'Assemblée concernée.

Un filtre a été instauré pour les demandes d'assistance à la Cour des comptes, celle-ci devant assurer en priorité le traitement de celles émanant des commissions des finances et des affaires sociales. Les membres de l'UMP voteront le texte tel que modifié par la commission. (Applaudissements à droite)

Mme Nicole Bricq - M. Frécon aurait voulu intervenir ce soir : il est rapporteur spécial pour la mission « Conseil et contrôle de l'État » et rapporte depuis cinq ans le budget de la Cour des comptes. Depuis la Lolf, de nouvelles formes de coopération entre la Cour et la commission des finances sont en vigueur. Chaque année, la Cour conduit à la demande de celle-ci cinq enquêtes, qui donnent lieu à des auditions pour suite ouvertes à la presse. Elles enrichissent la réflexion du Sénat. Les sujets traités renvoient tous à une exigence de transparence et d'efficacité des politiques publiques. La mission d'assistance au titre de l'article 58-1 de la Lolf est plus lente à se mettre en place.

Les rencontres entre les rapporteurs spéciaux et les magistrats de la Cour se multiplient. M. Frécon insiste sur les relations de confiance qu'il avait nouées avec Philippe Séguin et ses équipes et ne doute pas qu'il en ira de même avec M. Migaud, qui est le co-auteur avec M. Lambert de la Lolf. (M. Jean Arthuis approuve)

Personne ne peut douter des synergies instaurées entre le Sénat et la Cour des comptes. Nous sommes installés dans une relation de long terme chaque jour plus solide, ce qui contribue à renforcer encore l'efficacité du contrôle et de l'évaluation des politiques publiques - qui sont bien parmi les missions du Parlement. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

La discussion générale est close.

Discussion des articles

Article premier

M. le président.  - Amendement n°3, présenté par M. Sueur et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Rédiger ainsi cet article :

Après l'article 5 bis de l'ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires, il est inséré un article ainsi rédigé :

« Art. ... - Les instances créées au sein du Parlement ou de l'une de ses deux assemblées pour contrôler l'action du Gouvernement et évaluer les politiques publiques peuvent convoquer toute personne dont elles estiment l'audition nécessaire, sous les réserves prévues par l'article 5 bis.

« Les rapporteurs de ces instances exercent leur mission dans les conditions prévues au deuxième alinéa du II de l'article 6.

« Le fait de faire obstacle à l'exercice des prérogatives prévues par le présent article est puni de 7 500 € d'amende. »

M. Jean-Pierre Sueur.  - J'ai déjà présenté cet amendement lors de la discussion générale. Il faut redonner toute sa portée au dispositif voulu par M. Accoyer.

M. le président.  - Amendement n°4, présenté par M. Sueur et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Alinéa 2

Après les mots :

et les instances

supprimer le mot :

permanentes

M. Jean-Pierre Sueur. - Nous étendons le dispositif aux missions d'information et autres missions d'évaluation et de contrôle.

M. le président.  - Amendement n°5, présenté par M. Sueur et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Alinéa 2

Après les mots :

au sein

insérer les mots :

du Parlement ou

M. Jean-Pierre Sueur. - Je l'ai également déjà présenté : il faut en revenir au texte de M. Accoyer, et viser tant les structures propres à chaque assemblée que celles communes aux deux chambres.

M. le président. - On aura rarement autant entendu ici le nom de M. Accoyer ! (Sourires)

M. le président.  - Amendement n°6, présenté par M. Sueur et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Alinéa 2

Supprimer les mots :

dont le champ dépasse le domaine de compétence d'une seule commission permanente

M. Jean-Pierre Sueur. - Nous ne comprenons pas cette restriction.

M. le président.  - Amendement n°7, présenté par M. Sueur et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Alinéa 5

Rédiger ainsi cet alinéa :

« II. - Les rapporteurs désignés par les instances permanentes créées au sein de l'une des deux assemblées parlementaires pour contrôler l'action du Gouvernement ou évaluer des politiques publiques dont le champ dépasse le domaine de compétence d'une seule commission permanente disposent, dans les conditions définies à l'alinéa précédent, des prérogatives visées à l'article 6. »

M. Jean-Pierre Sueur.  - L'Assemblée nationale a précisé que les pouvoirs conférés aux rapporteurs des instances de contrôle et d'évaluation des politiques publiques devaient être exercés conjointement. Cette exigence, qui signifie qu'un contrôle ne pourra être exercé par l'un que si l'autre ne s'y oppose pas, est contestable. L'association d'un rapporteur de la majorité et d'un autre issu d'un groupe minoritaire est une avancée démocratique - je rends d'ailleurs hommage aux pratiques initiées par le président de notre commission des lois. Chacun des rapporteurs doit pouvoir agir à sa guise. La recherche du consensus peut être un frein.

M. Patrice Gélard, rapporteur.  - Je suis défavorable à tous ces amendements.

M. Jean-Pierre Sueur. - Sauvez-en quelques-uns !

M. Patrice Gélard, rapporteur.  - Non, car ils ont tous pour effet le déclin des commissions permanentes. Il faut respecter la hiérarchie : les commissions d'enquête, les commissions permanentes puis tout le reste. Or ce reste, nous le mettons au même niveau que les commissions permanentes s'agissant des pouvoirs d'enquête. C'est un progrès par rapport au texte de l'Assemblée nationale.

M. Jean-Pierre Sueur. - M. Accoyer est derrière moi !

M. Henri de Raincourt, ministre. - Je suis également défavorable à ces amendements. Les 3 à 6 ne sont pas nécessaires, tandis que l'intérêt du 7 m'échappe. L'association de membres de la majorité et de l'opposition a fait la preuve de son efficacité et de son utilité démocratique. Les parlementaires sont gens intelligents et dévoués à l'intérêt général : il ne saurait y avoir risque de blocage.

L'amendement n°3 n'est pas adopté, non plus que les amendements n°s4, 5, 6 et 7.

L'article premier est adopté.

Article additionnel

M. le président. - Amendement n°10, présenté par M. Sueur et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Après l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le troisième alinéa du I de l'article 6 de l'ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires est supprimé.

M. Pierre-Yves Collombat. - Il convient de supprimer l'interdiction de la création d'une commission d'enquête lorsque les faits donnent lieu à des poursuites judiciaires. Les commissions d'enquête sont tout en haut de la hiérarchie, dit M. Gélard ; donnons-leur le maximum de pouvoirs.

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois - Le principe de séparation des pouvoirs est encore au-dessus !

M. Patrice Gélard, rapporteur. - C'est vrai !

M. Pierre-Yves Collombat. - Je viens en renfort de la commission Balladur. De grâce, ne nous dites pas qu'il s'agit de la séparation des pouvoirs !

M. Patrice Gélard, rapporteur. - Si, justement. C'est une règle constitutionnelle incontournable. Je suis défavorable. Il faudrait une loi constitutionnelle.

M. Henri de Raincourt, ministre. - En 2008, lors de la révision, de tels amendements avaient été déposés, et rejetés ! Même avis.

M. Jean-Pierre Sueur. - Dans l'affaire d'Outreau, l'Assemblée nationale a dû se livrer à des grands efforts d'interprétation pour mettre en place la commission d'enquête dont chacun mesure aujourd'hui l'importance, mais dont les préconisations sont encore devant nous.

Ensuite le dispositif actuel peut donner lieu à des manipulations : pour échapper à une commission d'enquête, il suffit de saisir la justice. C'est très facile. Quant à la séparation des pouvoirs, j'ai l'impression que la vérité d'hier n'est pas celle d'aujourd'hui, M Gélard est moins sourcilleux sur l'indépendance du parquet.

Enfin, comment M. Balladur aurait-il pu faire une proposition contraire au principe de séparation des pouvoirs ?

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. - La proposition 40 du comité Balladur n'est pas vraiment celle-là. Pour Outreau, il n'y avait plus d'instances judiciaires en cours. Si une commission d'enquête intervenait sur des faits soumis à une juridiction, l'État de droit n'existerait plus. Il s'agit quand même d'un principe général de toutes les démocraties ! Si vous n'y croyez plus, je suis inquiet... pour vous !

M. Jean-Pierre Sueur. - Que de sollicitude !

M. Pierre-Yves Collombat. - Vous seriez plus crédible si vous défendiez la séparation des pouvoirs de l'exécutif et du judiciaire ! Tant que cette hypothèque ne sera pas levée nous rappellerons que quelque chose ne va pas. La séparation des pouvoirs ne doit pas fonctionner dans un seul sens.

M. Patrice Gélard, rapporteur. - Là-dessus, nous sommes d'accord.

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. - Mais ce n'est pas une raison pour la supprimer dans l'autre sens !

L'amendement n°10 n'est pas adopté.

L'article 2 est adopté.

Article 3

M. le président. - Amendement n°8, présenté par M. Sueur et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Alinéa 2

Après les mots :

Président du Sénat

rédiger ainsi la fin de cet alinéa :

ou par une commission permanente dans son domaine de compétence ou par toute instance créée au sein du Parlement ou de l'une de ses deux assemblées pour procéder à l'évaluation des politiques publiques.

M. Jean-Pierre Sueur. - Cet amendement se justifie par son texte même.

M. Patrice Gélard, rapporteur. - Avis défavorable : s'il n'y a plus de filtre, la Cour des comptes connaîtra immanquablement des embouteillages.

M. Henri de Raincourt, ministre. - Le filtre doit être maintenu. Il faut faire confiance aux présidents des Assemblées. A quelque sensibilité qu'ils appartiennent, ce sont des personnalités éminentes qui sont les présidents de tous les députés et de tous les sénateurs. En outre, il faut éviter l'engorgement.

Avis défavorable.

L'amendement n°8 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°9, présenté par M. Sueur et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Alinéa 4

Supprimer cet alinéa.

M. Pierre-Yves Collombat. - Il faut supprimer l'alinéa qui donne la priorité à la commission des finances. Ou alors, il serait plus simple de dire que, compte tenu de la charge de travail de la Cour des comptes, seules les demandes de la commission des finances seront traitées.

M. le président. - N'oubliez pas la commission des affaires sociales.

M. Jean Arthuis, rapporteur pour avis. - Merci.

M. Patrice Gélard, rapporteur.  - Je dois encore donner un avis défavorable : cette priorité relève de la loi organique !

M. Henri de Raincourt, ministre. - Même avis.

M. Pierre-Yves Collombat. - Pourquoi alors délibérer si on ne change rien du tout ?

L'amendement n°9 n'est pas adopté.

L'article 3 est adopté.

Article additionnel

M. le président.  - Amendement n°1 rectifié, présenté par M. Arthuis, au nom de la commission des finances.

Après l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - Le code des juridictions financières est ainsi modifié :

1° L'article L. 111-3 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« En outre, la Cour des comptes exerce, selon la procédure définie par le présent code, le contrôle de la gestion des collectivités territoriales et de leurs groupements, ainsi que des établissements publics locaux à caractère administratif. » ;

2° Après l'article L. 111-3, sont insérés trois articles ainsi rédigés :

« Art. L. 111-3-1. - La Cour des comptes contribue à l'évaluation des politiques publiques dans les conditions prévues par le présent code.

« Art. L. 111-3-2. - La Cour des comptes s'assure que les comptes des administrations publiques sont réguliers, sincères et donnent une image fidèle du résultat de leur gestion, de leur patrimoine et de leur situation financière, soit en certifiant elle-même les comptes, soit en rendant compte au Parlement de la qualité des comptes des administrations publiques dont elle n'assure pas la certification.

« Art. L. 111-3-3. - La Cour des comptes concourt au contrôle des actes budgétaires et de l'exécution du budget des collectivités territoriales, de leurs établissements publics et des établissements publics de santé. » ;

3° Après l'article L. 112-1, il est inséré un article ainsi rédigé :

« Art. L. 112-1-1. - La Cour des comptes est composée de chambres.

« Les chambres en région, dénommées chambres des comptes, ont un ressort interrégional, sauf si des particularités géographiques justifient un ressort différent. Leur ressort et leur siège sont fixés par décret.

« Sans préjudice des autres missions qui peuvent leur être confiées au sein de la Cour des comptes, et dans le respect du pouvoir d'organisation des travaux exercé par son premier président, elles exercent seules dans leur ressort la compétence de jugement des comptes des comptables publics des collectivités territoriales et de leurs établissements publics et la mission de contrôle budgétaire de ces collectivités et établissements définie au chapitre II du titre Ier du livre VI de la première partie du code général des collectivités territoriales et celle de contrôle de la gestion des collectivités territoriales régie par le second alinéa de l'article L. 111-3 du présent code.

« Leur président est un conseiller-maître qui ne peut simultanément présider une autre chambre de la Cour des comptes. »

4° L'intitulé du livre II est ainsi rédigé : « Les chambres territoriales des comptes » ;

5° La première partie du livre II est abrogée ;

6° L'article L. 120-1 est ainsi rédigé :

« Art. L. 120-1. - Les membres de la Cour des comptes ont la qualité de magistrats.

« Ils ont vocation à être affectés dans une des chambres de la Cour des comptes définies à l'article L. 112-1-1.

« Les magistrats du siège sont inamovibles. Ils ne peuvent, sans leur consentement, même en avancement, recevoir une affectation les faisant passer d'une chambre des comptes à une autre chambre ou inversement, non plus qu'une affectation entraînant un changement de résidence administrative. » ;

7° Après l'article L. 120-1, il est inséré un article ainsi rédigé :

« Art. L. 120-1-1. - Les grades des magistrats de la Cour des comptes sont : premier président, président de chambre, conseiller maître, conseiller référendaire et auditeur et, pendant la période de transition prévue à l'article .. de la loi n°        du          tendant à renforcer les moyens du Parlement en matière de contrôle de l'action du Gouvernement et d'évaluation des politiques publiques, président de section, premier conseiller et conseiller.

« Le grade de président de chambre est un grade fonctionnel. Ce grade peut comprendre plusieurs catégories dépendant des fonctions exercées, définies par décret en Conseil d'État. » ;

8° L'article L. 121-1 est complété par deux alinéas ainsi rédigés :

« Les présidents de chambre sont nommés parmi les conseillers maîtres ayant au moins trois ans de services effectifs dans ce grade. Pour ces nominations, une liste comprenant plusieurs noms est transmise, après avis des présidents de chambres et du procureur général près la Cour des comptes, par le premier président de la Cour des comptes.

« Le premier président affecte à la présidence d'une chambre de la Cour des comptes un président de chambre pour une durée de six ans, ou pour la durée restant à courir jusqu'à la limite d'âge qui lui est applicable si elle est inférieure. Au terme de la durée de six ans, ce magistrat a vocation à occuper un emploi de président d'une autre chambre de la Cour des comptes. A défaut, il peut, après avis des présidents de chambres et du procureur général près la Cour des comptes, se voir confier par le premier président toute autre fonction d'encadrement ou de responsabilité ou les fonctions correspondant au grade de conseiller maître. »

II. - La Cour des comptes coordonne une expérimentation de dispositifs destinés à assurer la régularité, la sincérité et la fidélité des comptes des collectivités et établissements territoriaux dont les produits de fonctionnement excèdent 200 millions d'euros pour l'exercice 2008. Cette expérimentation est ouverte pour une durée de cinq ans commençant trois ans après la publication de la présente loi.

Les collectivités territoriales peuvent se porter candidates à cette expérimentation auprès du ministre chargé des collectivités territoriales, dans un délai d'un an à compter de l'entrée en vigueur de la présente loi. Le ministre chargé des collectivités territoriales se prononce sur les candidatures, après avoir pris l'avis du ministre chargé des comptes publics et du premier président de la Cour des comptes, dans le délai de quatre mois suivant leur dépôt.

Une convention est conclue entre le premier président de la Cour des comptes et l'exécutif de la collectivité territoriale participant à l'expérimentation, après avis du ministre chargé des collectivités territoriales et de celui chargé des comptes publics. Elle en définit les modalités de mise en oeuvre et précise les moyens en crédits, ou en personnels, ou à ce double titre, qui l'accompagnent. Elle précise également les normes comptables applicables.

L'expérimentation fait l'objet d'un bilan intermédiaire au terme des trois ans mentionnés ci-dessus, puis d'un bilan définitif au terme de huit ans. Ces bilans font l'objet d'un rapport du Gouvernement qui le transmet au Parlement, avec les observations des collectivités territoriales concernées et de la Cour des comptes.

III. - A l'issue d'un délai de quinze ans à compter de la publication de la présente loi, les présidents de section et premiers conseillers sont nommés dans un autre grade de la Cour des comptes dans des conditions fixées par décret en Conseil d'État.

Chaque année, à compter de l'entrée en vigueur du décret pris pour l'application de l'article L. 112-1-1 du code des juridictions financières issu de la présente loi, sont nommés conseillers référendaires cinq présidents de section ou premiers conseillers, âgés de trente-cinq ans au moins et justifiant, à la date de nomination, de dix ans au moins de services publics effectifs. Ces nominations sont prononcées sur proposition du premier président de la Cour des comptes, après avis du conseil supérieur de la Cour des comptes. La nomination dans le grade de conseiller référendaire ne peut intervenir dans la chambre des comptes dans laquelle le magistrat est affecté au moment de sa promotion.

Les conditions d'application des deux alinéas qui précèdent sont définies par décret en Conseil d'État.

Les procédures juridictionnelles engagées devant les chambres régionales des comptes à la date d'entrée en vigueur de la présente loi et qui n'ont pas été inscrites au rôle de ces chambres, sont, à cette date, transmises à la Cour des comptes.

Les procédures administratives engagées devant les chambres régionales des comptes à la date d'entrée en vigueur de la présente loi, et sur lesquelles une délibération n'est pas encore intervenue, sont, à cette date, transmises à la Cour des comptes.

Il est délibéré sur les affaires qui ne sont pas transmises à la Cour des comptes en application des alinéas précédents selon les dispositions du code des juridictions financières applicables aux chambres régionales des comptes avant la date d'entrée en vigueur de la présente loi.

Les procédures relatives aux appels formés avant l'entrée en vigueur de la présente loi devant la Cour des comptes contre les décisions juridictionnelles des chambres régionales des comptes sont poursuivies jusqu'à leur terme selon les dispositions du code des juridictions financières applicables avant la date d'entrée en vigueur de la présente loi.

M. Jean Arthuis, rapporteur pour avis. - C'est un amendement de conséquence (Sourires au banc des commissions) qui répond à l'interrogation de M. Collombat : faire en sorte que cette proposition de loi change vraiment les choses pour satisfaire l'attente du Parlement. La tâche du ministre ne doit pas être commode mais quelque plein que soit l'agenda parlementaire, la situation financière de l'Union européenne appelle à agir vite. Nous pouvons être contraints de hâter le pas. La Grèce aujourd'hui, demain peut-être un problème de dettes souveraines.

Nous avons besoin d'un corps d'experts indépendants. La concertation a duré deux ans ; le Premier président Séguin a peaufiné le travail ; le conseil des ministres a approuvé ce projet de loi le 28 octobre ; j'ai reçu les organisations professionnelles ; je me suis assuré que M. Migaud était là-dessus en phase avec son prédécesseur. J'ai entendu des critiques mal fondées : les juridictions financières ne sont pas pour ou contre telle ou telle instance, elles certifient les comptes. C'est pour venir à votre secours, monsieur le ministre, que la commission des finances a pris cette initiative.

Les magistrats financiers sont préoccupés par l'échéance. Faites nous connaître votre calendrier. Il n'est pas de bonne administration de faire savoir qu'un texte est prêt sans dire quand il sera discuté. Mon amendement n'a rien d'un cavalier : le lien est clair avec ce texte.

M. Patrice Gélard, rapporteur.  - Ce n'est pas un cavalier, c'est une écurie ! (Sourires)

Il nous est difficile de prendre un train en marche et de court-circuiter l'Assemblée nationale sur le projet de loi dont celle-ci est saisie. Il nous est arrivé de renvoyer en commission des propositions de loi pour ce motif.

La réforme des juridictions financières incombe à la commission des lois et non à celle des finances. J'ai rencontré le Premier président Migaud qui était favorable à ce texte. Nombre de magistrats le trouvent cependant prématuré ; la concertation n'est pas achevée. La fusion de la Cour des comptes et des chambres régionales est vraiment un très gros morceau. Nous ne sommes pas défavorables à l'idée d'adopter un tel texte, mais l'amendement d'aujourd'hui est à la fois prématuré et partiel. Retrait.

M. Henri de Raincourt, ministre. - Le président Arthuis a retracé la genèse de cette réforme : le fait est que tout un processus est engagé. Son amendement reprend une partie de ce travail, non sa totalité. S'il était adopté, il faudrait réécrire le texte dont est aujourd'hui saisie la commission des lois de l'Assemblée nationale !

Je mesure bien l'urgence soulignée par M. Arthuis. Mais les magistrats se sont émus que le problème soit ainsi abordé par le petit bout de la lorgnette.

Le Gouvernement partage l'esprit des dispositions proposées par le président Arthuis. Je suis ému de sa sollicitude à mon endroit mais j'éprouve un réel bonheur à cette tâche, au contact quotidien des parlementaires.

Il est clair que, depuis la réforme constitutionnelle, le Gouvernement ne peut faire entrer dans deux semaines de travail parlementaire ce qui en prenait quatre. Il faut changer les habitudes de travail pour accourcir le délai entre l'adoption en Conseil des ministres et le débat au parlement.

En début de séance M. Gélard a craint que le train de l'ordre du jour sénatorial ne déraille ; le président Arthuis me demande d'ajouter la charge d'un wagon supplémentaire... La franchise m'impose de dire qu'aucune date n'est arrêtée pour ce projet de loi avant fin juin, ni même avant fin juillet s'il devait y avoir une session extraordinaire.

M. Jean Arthuis, rapporteur pour avis de la commission des finances. - C'est bien triste !

M. Henri de Raincourt, ministre. - A mon tour, je demande le retrait de cet amendement.

M. Jean Arthuis, rapporteur pour avis de la commission des finances. - La procédure n'est pas nouvelle. A l'Assemblée M.Warjsman y a eu recours

Mme Nicole Bricq. - Très bien.

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. - Il n'est pas utile de faire aussi mal...

M. Jean Arthuis, rapporteur pour avis de la commission des finances. - Ce n'est donc pas une novation absolue. On pourrait commencer la concertation, dès l'adoption en Conseil des ministres, avant l'inscription d'un projet de loi à l'ordre du jour du Parlement.

Mon amendement est partiel, certes, pour ne pas empiéter sur les compétences de la commission des lois. J'ai entendu l'appel et je mesure l'embarras du Gouvernement. Je n'ai d'autre désir que servir la France et aider le Gouvernement. Pourquoi ne pas transformer cet amendement en proposition de loi ? J'y suis prêt, et à partager cette initiative avec le président Hyest....

Mais il y a urgence. Il n'est pas de bonne administration de laisser les magistrats dans l'incertitude. Ils savent que se prépare la réforme la plus importante depuis 1807, aux dires de M. Séguin lui-même ! En tout cas, grâce à mon initiative, la concertation est peut-être lancée. Vous recherchez un véhicule, Monsieur le Ministre : je vous proposais d'utiliser ce train-ci, qui passait fort opportunément.

L'amendement n°1 rectifié est retiré, ainsi que l'amendement n°2.

L'article 4 est adopté.

La proposition de loi est adoptée.