Écologie, développement et aménagement durables Budget annexe « Contrôle et exploitation aériens » Compte spécial « Contrôle et sanction automatisés des infractions au code de la route » Compte spécial « Avances au fonds d'aide à l'acquisition de véhicules propres »
Interventions des rapporteurs
M. Alain Lambert, rapporteur spécial de la commission des finances. - Les crédits de la mission « Écologie, développement et aménagement durables » s'élèvent, pour 2010, à 10,29 milliards en autorisations d'engagement et 10,15 milliards en crédits de paiement, soit 0,7 % de plus qu'en 2009, évolution conforme à la loi de programmation. Le programme 203, majeur, couvre les infrastructures et services de transports. Il mobilise en 4,44 milliards en autorisations d'engagement et 4,35 milliards en crédits de paiement. Dans le cadre de la RGPP, les moyens en personnel seront réduits d'environ 300 emplois en 2010. Nous déplorons toujours que cette politique soit majoritairement financée par des crédits extérieurs ou extrabudgétaires -fonds de concours, crédits de I'Afitf (Agence de financement des infrastructures de transport de France) et des collectivités territoriales et dépenses fiscales pour 803 millions. Notre commission s'interroge sur le rôle de l'Afitf, dont les circuits de financement demeurent complexes. La Cour des comptes, dans son rapport public annuel, y voit un organisme aux ambitions limitées, privé de moyens, inutile, qui « voit circuler des crédits qui partent du budget général avant d'y retourner ». Elle n'est pas devenue l'instance d'évaluation et de décision qui aurait conforté sa légitimité. Son budget devrait être consacré aux transports non routiers pour près de 62 %, conformément au redéploiement modal prévu par le Grenelle. La subvention de l'État diminue de 6,7 % à périmètre constant mais demeure importante, avec 980 millions. Je redoute que cette subvention provisoire ne devienne durable, puisque la taxe poids lourds sera sans doute reportée à 2012 et ne prendra que partiellement le relais.
L'établissement public Réseau ferré de France (RFF) change de modèle économique, avec la réforme de la tarification qui affecte désormais les concours de l'État aux activités ferroviaires dont les péages ne couvrent pas le coût complet. Cette réforme permet de diminuer de 3,1 % la subvention, qui atteint malgré tout 2,37 milliards. La situation financière de RFF sort légèrement améliorée de la réforme mais demeure fragile puisque la dette a augmenté de 800 millions en 2008 pour atteindre 28,2 milliards, dette que la nécessaire rénovation du réseau ne pourra qu'alourdir. Est-on bien sûr, monsieur le ministre, que l'engagement national pour le fret ferroviaire sera autre chose qu'un énième et désespérant plan de relance ? Les priorités paraissent multiples et les financements peu clairs... Comment le Gouvernement accueille-t-il les propositions de la SNCF sur les trains d'aménagement du territoire, sachant qu'avec un déficit d'exploitation récurrent, les voies sont menacées d'obsolescence ? Doit-on, comme le souhaite la SNCF, mettre en place une société distincte pour les matériels roulants dédiés à ces dessertes et prévoir une compensation financière dans le cadre d'un contrat de service public ? Selon quelles modalités ? Enfin, le dernier rapport de la Cour des comptes sur les TER, sévère, suggère dans certains cas le remplacement des dessertes par un réseau d'autocars. Quelle est votre appréciation ?
La rationalisation de l'organisation de Voies navigables de France (VNF) se poursuit, avec un recentrage sur le réseau magistral. La subvention de l'État sera de 58,9 millions et inclura une dotation supplémentaire de 4 millions au titre du Grenelle de l'environnement, mais la situation financière de VNF demeure assez confortable.
Le soutien au transport combiné, qui est une priorité, devrait bénéficier d'une enveloppe supplémentaire de 8 millions au titre de l'engagement national pour le fret ferroviaire. Nous proposons d'augmenter ce montant d'environ 1,5 million par un amendement de transfert de crédits ; les crédits d'entretien et d'exploitation de grands ports maritimes seront augmentés de 5,85 millions ; le taux de renouvellement des couches de surface du réseau routier devrait redescendre à 6 % en 2010, ce qui demeure insuffisant pour garantir une durée de vie optimale des chaussées. La tendance générale à la dégradation du réseau routier national n'est donc pas encore enrayée.
Le programme 205 « Sécurité et affaires maritimes » est doté, en 2010, de 133 millions en autorisations d'engagement et 135,5 millions en crédits de paiement, soit une hausse de 0,7 %. Cette dotation est plus que doublée par la masse salariale des 3 228 équivalents temps pleins travaillés (ETPT). Les dépenses fiscales concourent également pour 244 millions. L'évaluation du système optionnel de taxe au tonnage reste approximative. La principale réforme, qui a trait à la réorganisation des services déconcentrés des affaires maritimes, vise des économies de gestion et une rationalisation des implantations. Je regrette que le ministère n'ait pas fourni une évaluation des bénéfices escomptés. Pourriez-vous nous en dire davantage, monsieur le ministre ? Les effectifs diminueront de 57 ETPT en 2010. Une réforme des écoles nationales de la marine marchande est en cours pour être confiée à un établissement public unique. J'approuve cette mesure de bonne gestion.
Trois priorités budgétaires seront mises en oeuvre : la poursuite de la modernisation des Cross (Centres régionaux opérationnels de surveillance et de sauvetage) et de leurs systèmes d'information ; la protection de l'emploi maritime, avec une augmentation des aides à la flotte de commerce sous pavillon français, qui comptait seulement 296 navires fin 2008 ; un dispositif de contrôle et de surveillance des pêches enfin revalorisé.
Le programme 113 « Urbanisme, paysages, eau et biodiversité » mobilise d'importantes ressources humaines -15 222 ETPT- et prend appui sur des opérateurs puissants aux ressources extrabudgétaires considérables. Ainsi des agences de l'eau, dont les ressources fiscales et propres atteignent 2,3 milliards, à comparer aux 350 millions du programme.
En 2010, celui-ci se résume en deux mots : Grenelle -61 millions y sont consacrés, soit 24 millions de plus qu'en 2009, dans le domaine de l'urbanisme, de l'eau et de la biodiversité- et RGPP, avec la cessation progressive des activités d'ingénierie publique concurrentielle exercées par les DDE et DDEA, réforme qui se traduit par un plan de suppression d'environ 3 300 ETP entre 2009 et 2011. L'économie en résultant peut être estimée à 48 millions en 2010. Se poursuit également la mutualisation des effectifs des polices de l'eau et de la nature. Enfin, pour 4 millions en 2010, des actions de formation des agents sont engagées pour la refonte de la fiscalité de l'urbanisme et du mode de traitement des actes d'urbanisme. Des gains de productivité équivalant à 1 000 ETPT en 2011 sont attendus ainsi qu'une économie budgétaire, à terme, de l'ordre de 40 millions par an.
Nous attendons à présent, monsieur le ministre, le vrai nirvana de ces débats : vos réponses. (Applaudissements à droite)
M. Yvon Collin, rapporteur spécial de la commission des finances. - Le programme 170 « Météorologie » n'appelle pas de longs développements. Sa dotation, de 190 millions, couvre la subvention pour frais d'exploitation. Les marges financières de l'opérateur se contractent, sous le double effet des contraintes financières imposées par l'État et de la crise économique, qui pèse sur ses recettes commerciales.
Météo France a donc conduit une série de réformes justifiées. La principale concerne la réduction du nombre de ses implantations territoriales qui a suscité, fin 2008, des tensions sociales aujourd'hui apaisées. Les fermetures de sites s'échelonneront de 2012 à 2017, pour aboutir, à l'horizon 2017, à un réseau de 55 implantations, soit un peu plus de la moitié des 108 implantations actuelles.
Nous souhaiterions en savoir plus sur cette réforme, monsieur le ministre.
J'en viens au programme 159 qui prévoit 73 millions pour l'Institut géographique national au titre de subventions pour charges de service public. Le budget 2009 de l'IGN s'exécute dans un contexte difficile : son chiffre d'affaires a diminué depuis l'automne 2008. Il en ira sans doute de même l'année prochaine. La situation de l'IGN est d'autant plus préoccupante que l'opérateur a fait l'objet, en 2009, d'observations particulièrement sévères de la Cour des comptes : stratégie de diversification « hasardeuse et mal maîtrisée », frontière mal définie entre les missions régaliennes et concurrentielles de l'IGN, gestion « dispendieuse » sont autant de griefs sur lesquels nous aimerions avoir votre avis, monsieur le ministre. Nous n'avons pas réduit les crédits de I'IGN car l'établissement fait face à une réduction de sa subvention et à une érosion sensible de ses recettes commerciales. Nous souhaitons néanmoins connaître la teneur et le calendrier des mesures que vous prendrez pour remédier aux graves insuffisances relevées par la Cour des comptes.
J'en viens au budget annexe « Contrôle et exploitation aériens » (Bacea) et aux nombreuses réformes au sein de la DGAC. Le secteur du transport aérien connaît actuellement d'importantes difficultés. L'Iata prévoit, sur l'année 2009, une baisse de 8 % du trafic aérien global et de 15 % du chiffre d'affaires. Pendant le premier semestre, Aéroports de Paris a connu une baisse de trafic de 6,4 %, et Air France-KLM a enregistré une baisse de son chiffre d'affaires de 20,5 %. Le Bacea doit donc répondre à de multiples défis en 2010, et son équilibre budgétaire repose sur une prévision d'augmentation du trafic de 1,5 %. Cet équilibre doit cependant être soutenable et ne pas reposer sur la hausse des redevances ni sur l'endettement.
La Direction générale de l'aviation civile (DGAC) est, quant à elle, engagée dans de nombreuses réformes, notamment la mutualisation et la modernisation des fonctions supports, qui devra se traduire dans le nouveau protocole négocié avec les organisations syndicales, la télédéclaration des recettes et la mutualisation des achats publics par site, le nouveau système d'information financière et de comptabilité analytique qui devrait être opérationnel en 2011.
En ce qui concerne le programme 612 relatif à la navigation aérienne, le projet « Espace 2011 » expérimentera les synergies entre les services d'approche d'Orly, de Roissy et d'Athis-Mons, qui devraient être regroupés dans un nouveau centre modernisé à partir de 2015. En outre, dans le cadre du renforcement de l'intégration de l'espace aérien européen, le projet européen Sesar devrait être mis en place et le traité Fabec avec cinq autres États européens serait finalisé l'année prochaine. Un nouveau système de régulation économique des services de navigation aérienne, fondé sur l'amélioration de la performance, devrait être finalisé et un deuxième contrat de régulation économique pour 2011-2016 avec Aéroports de Paris devrait être préparé. En ce qui concerne la formation aéronautique, un contrat d'objectifs, de moyens et de performances avec l'École nationale de l'aviation civile (Enac) est en cours d'élaboration. Le service d'exploitation de la formation aéronautique poursuivra son plan de modernisation et de réduction des coûts, l'objectif étant d'atteindre 350 équivalents temps pleins, contre 420 actuellement. Les synergies entre formations théorique et pratique devraient conduire à la fusion de ces deux écoles en 2011.
Au-delà de ces réformes, la DGAC pourrait devenir un établissement public. Il serait souhaitable que le ministre nous fasse part de sa position sur ce sujet sensible pour les personnels, qui intervient alors que le ciel unique européen se met en place.
Sur le plan financier, le budget annexe est dans une situation tendue. Le budget pour 2010 tient compte d'une baisse du trafic de 7 % en 2009. L'autorisation d'emprunt a été relevée de 100 millions par la loi de finances rectificative du 20 avril 2009 et 65 millions supplémentaires devraient être ouverts par un prochain décret d'avances. Cependant, la baisse des recettes de fonctionnement en 2009 pourrait être de 10 %, de sorte que les hypothèses de construction du budget 2010 me paraissent dépassées. Quoi qu'il en soit, l'équilibre prévisionnel du budget annexe en 2010 prévoit l'augmentation des recettes de fonctionnement. Le taux des redevances de navigation aérienne devrait être relevé de 4,9 %, tout comme les tarifs de la taxe d'aviation civile. De même, l'extension du périmètre des redevances de surveillance et de certification se poursuivra, même s'il est regrettable que le ministère ait renoncé à créer une redevance pour les manifestations aériennes. L'instauration d'une redevance de route océanique améliorera sensiblement le taux de couverture des coûts du contrôle aérien en outre-mer.
L'équilibre prévisionnel du budget prévoit également un plus grand recours à l'emprunt. Après une stabilisation entre 2006 et 2008, l'endettement net augmenterait ainsi de près d'un tiers par rapport à fin 2008 pour atteindre 1 174 millions. Cette évolution est inquiétante.
Enfin, ce budget prévoit un plan d'économies de 40 millions sur les dépenses qui est en partie lié à la révision générale des politiques publiques. Il se répartit de manière à peu près équivalente entre dépenses de fonctionnement et reports de projets d'investissement.
Le plafond d'emplois pour 2010 est également abaissé de 108 équivalents temps plein, ce qui correspond à la première tranche de mise en oeuvre de la RGPP. II n'est cependant pas évident que ce plan d'économies suffise à assurer l'équilibre du budget annexe. Il faudra sans doute tenir compte des observations formulées par la Cour des comptes, dans deux récents référés, sur la négociation d'un protocole social et sur le service d'exploitation de la formation aéronautique (Sefa). (Applaudissements au centre et sur les bancs de la commission)
Mme Fabienne Keller, rapporteur spécial de la commission des finances. - Je vais présenter les programmes « Prévention des risques », « Énergie et après-mines » et le fonds d'aide à l'acquisition de véhicules propres.
Le programme 181 connaît une incontestable montée en puissance puisque ses crédits augmentent de 30 %. Cette hausse intéresse tout particulièrement la prévention des risques technologiques et des pollutions, telle que le financement des plans de prévention des risques technologiques (PPRT). De plus, 60 millions supplémentaires seront consacrés à la mise en oeuvre des mesures du Grenelle de l'environnement, notamment dans les domaines du traitement des sites pollués, des déchets et de la santé-environnement. Nous voyons là les suites tangibles du Grenelle, qui se traduisent également dans les emplois : les crédits de personnel augmenteront de 11 % par rapport à 2009 afin de créer 144 postes « fléchés Grenelle » dans les régions.
Les sous-effectifs de l'inspection des installations classées seraient en voie de résorption : la commission aimerait vous entendre le confirmer, madame la ministre. Quand disposerons-nous enfin des effectifs nécessaires pour assurer l'établissement des PPRT et une bonne surveillance des sites, rendus d'autant plus nécessaires depuis la catastrophe d'AZF ?
Au-delà des crédits inscrits, ce programme mobilise des ressources extrabudgétaires. II en va ainsi des concours à l'Ademe, -20 millions pour les sites pollués, 30 millions pour la résorption des points noirs bruit et 83 millions pour les déchets- et des interventions du fonds de prévention des risques naturels majeurs, ou fonds Barnier, qui atteindront 153 millions en 2010. Après deux années d'augmentation des ressources du fonds, grâce aux initiatives prises par notre commission et le Gouvernement, les réponses au questionnaire budgétaire indiquent que les recettes pourraient être inférieures aux dépenses.
J'en viens au programme « Énergie et après-mines » qui, pour l'essentiel, garantit les droits des mineurs et de leurs ayants droit.
Je ne peux évoquer le programme 174 sans dire un mot d'une importante dépense fiscale qui lui est rattachée, à savoir le crédit d'impôt « développement durable ». Son coût est estimé à 2,8 milliards pour 2009 et il en ira sensiblement de même pour 2010, bien que ce montant risque de diminuer en raison de la crise. Ce crédit d'impôt est assez erratique d'une année sur l'autre : pourriez-vous nous donner les dernières estimations ?
Dans la mise en oeuvre du programme 174, l'Ademe occupe une place centrale. La commission des finances et la Cour des comptes feront une enquête sur cet organisme afin de suivre les ressources considérables qui lui sont affectées avec les 500 millions de TGAP.
J'en viens au fonds d'aide à l'acquisition de véhicules propres. La réussite du dispositif bonus-malus automobile, introduit en 2008, est tellement incontestable qu'il est déficitaire. Nous nous en réjouissons puisque la baisse des émissions moyennes du parc automobile a été, en vingt mois, équivalente aux dix dernières années. Le déficit s'est cependant élevé à 214 millions en 2008 et il devrait être bien plus élevé cette année. Pouvez-vous nous donner quelques indications, madame la ministre ? Vous souhaitez anticiper d'un an les exigences en termes d'émissions de CO2, pour tenir compte de l'amélioration du parc automobile.
J'en viens à deux dossiers d'une grande actualité : la taxe carbone, devenue au Sénat contribution carbone. Je forme le voeu qu'elle ne soit pas assortie de multiples exonérations en CMP. Ce dispositif doit fonder un nouvel équilibre fiscal et environnemental.
Lors du sommet de Copenhague, vous pourrez compter sur notre soutien, madame la ministre. Nous savons qu'avec M. Borloo, vous prenez cette mission à coeur. Le Sénat en débattra demain à l'initiative des commissions de l'économie et des affaires européennes afin de vous donner un mandat clair en ce domaine. (Applaudissements à droite)
M. Gérard Miquel, rapporteur spécial de la commission des finances. - L'enjeu humain, social et économique que représente la sécurité routière est tel que l'État est légitime à l'assumer. Elle mobilisera près de 2,6 milliards d'euros en 2010, soit une progression de 3,4 %. Les résultats de ces dernières années sont excellents et les comportements des automobilistes ont considérablement évolué. Si 4 443 personnes sont décédées sur les routes en 2008, les objectifs pour 2012 restent ambitieux : moins de 3 000 décès et une division de moitié des décès en deux-roues et dus à l'alcool. Sur les neuf premiers mois de 2009, le nombre de décès a toutefois augmenté de 2 %, et de 17,7 % pour le seul mois de septembre. Pouvez-vous faire le point, monsieur le ministre ? Comment comptez-vous limiter encore la mortalité des conducteurs de deux-roues ?
Le programme 207 « Sécurité et circulation routières » est modestement doté d'environ 62 millions d'euros, en hausse de 2,3 % ; il bénéficie essentiellement à l'éducation routière. Les personnels concourant à ce programme sont au nombre de 2 505 ETPT, soit 18 de plus qu'en 2009. La portée de la justification au premier euro de ce programme est fortement limitée par l'ampleur des coûts analytiques : la ventilation des crédits de soutien et de polyvalence conduit au quadruplement de ses crédits de paiement. La réforme du permis de conduire, dont les orientations ont été fixées en janvier 2009, est mise en oeuvre, avec pour objectifs la réduction des délais d'obtention, la simplification des démarches, la diminution du coût pour les candidats en difficulté et la rénovation des programmes de formation et de l'examen. Le dispositif du permis à un euro par jour sera étendu, l'État prenant à sa charge la caution de 20 000 prêts par an. Cette décision est opportune mais les hypothèses d'octroi de prêts et de taux de défaut semblent peu réalistes ; la commission proposera un amendement pour réduire le coût du dispositif, tout en conservant des hypothèses volontaristes.
J'en viens au compte d'affectation spéciale sur les radars. Les recettes des amendes forfaitaires y sont affectées dans la limite de 212 millions d'euros, puis aux collectivités territoriales dans la limite de 130 millions d'euros, enfin à l'Afitf. Elles sont, depuis deux ans, inférieures aux prévisions, celles-ci n'ayant pris que partiellement en considération l'amélioration du comportement des usagers. Elles devraient s'élever à environ 500 millions d'euros en 2009. Le comité interministériel de la sécurité routière du 13 février 2008 a annoncé le déploiement de 500 nouveaux radars chaque année à partir de 2008 ; mais l'objectif d'implanter 4 500 dispositifs d'environ d'ici fin 2012 sera difficile à atteindre. Le chiffre de 4 250 semble plus réaliste. Le même comité interministériel a confirmé la diversification des infractions relevées ; les dispositifs aux feux tricolores sont opérationnels depuis le 3 août 2009 et une expérimentation a été lancée fin août pour le contrôle des passages à niveaux ; des marchés sont à l'étude pour sécuriser certains tunnels. Aucun nouveau radar mobile ne devrait être installé en 2010. Le coût de maintenance des radars devrait être stable en 2010 et les dépenses liées au développement du Centre national de traitement baisseront de plus de 57 %, après les importants investissements de 2008 et 2009.
Deux tendances affectent le programme 752 « Fichier national du permis de conduire » : une hausse des crédits de 55 %, malgré l'utilisation de reports importants, due à la progression attendue du nombre de lettres envoyées aux contrevenants pour le retrait ou la restitution de points et pour les invalidations de permis, et le retard du projet Faeton, lancé en 2006 pour moderniser l'application informatique de gestion des permis de conduire. Un directeur de projet a été nommé le 10 juin dernier. Le dispositif sera-t-il achevé dans les délais ?
Le programme « Conduite et pilotage des politiques de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer » regroupe la quasi-totalité des moyens de personnel de la mission, ainsi que l'ensemble des crédits de support. Nous avons déjà souligné le caractère peu satisfaisant, au regard de la Lolf, de ce type de programme. Les services l'admettent mais font valoir que cette centralisation permet une gestion plus souple et plus efficace du plafond d'emploi et la mutualisation qu'encourage la RGPP. Nous prenons acte de ce choix et sommes impatients d'en constater les effets.
Le plafond d'emplois du programme est en diminution de 879 ETPT en 2010, sous l'effet conjugué de la décentralisation des personnels chargés de l'entretien et l'exploitation des infrastructures, de l'intégration de l'essentiel des effectifs du programme « Développement et amélioration de l'offre de logement » de la mission « Ville et logement » et des suppressions d'emplois nettes intervenues en 2009 ou en 2010. Je relève que la règle du non-remplacement d'un départ en retraite sur deux est appliquée dans le ministère. Il faut noter également la hausse des dépenses immobilières due à l'élargissement du périmètre des loyers budgétaires et la création du fonds « État exemplaire », qui n'est doté d'aucun crédit mais sera abondé en gestion par l'application d'un « sur-gel » au sein de chaque mission du budget de l'État. Ce fonds, dont les crédits seront redistribués aux ministères en fonction de leurs performances environnementales, a attisé la curiosité de la commission. Si cette initiative paraît de nature à encourager les comportements écologiquement vertueux, la complexité du dispositif retenu suscite notre perplexité. Une simple taxation interministérielle produirait probablement les mêmes effets pour des coûts de gestion moindres. Il vous appartiendra, monsieur le ministre, de nous convaincre du bien-fondé du mécanisme retenu. (Applaudissements sur les bancs socialistes)
M. Jean-Paul Émorine, en remplacement de M. Jean Bizet, rapporteur pour avis de la commission de l'économie. - Je supplée M. Jean Bizet, qui participe aujourd'hui à Genève à une réunion de l'OMC. Le rapporteur se félicite de l'augmentation des crédits consacrés à l'environnement, notamment ceux du programme « Prévention des risques » qui progressent de plus de 30 %. Cette évolution est conforme aux décisions du Grenelle de l'environnement que le Parlement a validées dans la loi de programme.
Je vous interrogerai, monsieur le ministre, sur trois points, et d'abord sur l'aide aux collectivités locales pour l'élaboration de leurs documents d'urbanisme. Notre commission avait, l'an dernier, déposé un amendement pour rétablir le dispositif spécifique d'aide à l'élaboration des Scot, le mécanisme « un euro par habitant » ayant pris fin en janvier 2008. Nous avons obtenu en partie satisfaction en 2009, puisque douze projets de Scot innovants sur le plan environnemental ont été aidés. Mais il n'y a pas de dispositif global, alors que 230 secteurs ont manifesté en 2009 l'intention de lancer un Scot. L'extension du dispositif de soutien est d'autant plus nécessaire que le Sénat a adopté, dans le Grenelle II, un amendement visant à la généralisation des Scot, outils essentiels de planification. Le budget 2010 prévoit par ailleurs une aide pour 20 PLU intercommunaux, alors que celui de l'an dernier avait prévu une enveloppe de 1,5 million d'euros pour en financer 30, aucun n'a été financé, semble-t-il faute de demande. Ne pourrait-on envisager d'augmenter le nombre de projets de Scot aidés ?
La deuxième interrogation concerne les subventions accordées par le ministère aux principales associations nationales de protection de l'environnement qui, entre 2007 et 2008, ont augmenté de plus de 30 %. Nous en prenons acte, en relevant que le ministère souhaite impliquer davantage ces associations dans les décisions, tant au niveau national que local. Mais le corollaire de l'aide publique doit être la responsabilisation ; or les associations sont trop souvent à l'origine, au niveau local, de recours systématiques et parfois abusifs contre des projets de développement. (M. Jean-Louis Carrère approuve) L'une d'elles affiche ainsi, sur sa page internet, le nombre de recours contentieux engagés en 2005, comme s'il s'agissait d'une fin en soi. Comment les fonds supplémentaires ont-ils été utilisés ? Et quelles mesures le ministère compte-t-il prendre pour limiter les recours abusifs ?
Ma dernière question concerne les subventions accordées par l'Ademe. Nos concitoyens refusent de plus en plus l'implantation d'unités d'incinération, évolution dont s'inquiète l'Ademe dans son rapport sur les déchets en notant que, si aucune nouvelle unité n'est créée, 30 départements perdront leur autonomie à moyen terme dans le traitement de leurs déchets. Des aides financières sont-elles prévues pour ce type de projet, notamment pour soutenir la concertation ?
Sous réserve de ces observations et interrogations, la commission a émis un avis favorable à l'adoption des crédits des programmes consacrés à l'environnement. (Applaudissements à droite)
M. Jean-François Le Grand, rapporteur pour avis de la commission de l'économie. - Je salue d'abord la remise par le ministère de son rapport d'activité.
Je me réjouis que la DGAC prenne la forme d'un établissement public administratif et non d'une administration ; cela favorisera les partenariats.
Le budget annexe « Contrôle et exploitation aériens » retrace les activités de la DGAC, pour 2 milliards. Or la chute du trafic aérien fait exploser l'endettement du budget annexe qui va passer de 116 à 250 millions, malgré un effort d'économies de 40 millions. En 2009, on compte 180 millions de passagers en moins et une chute de 20 % du fret au niveau mondial ; en France, une baisse de 5 % du trafic passagers au cours des huit premiers mois de l'année. Les entreprises font des efforts, à l'instar de British Airways et Iberia, mais le compte n'y est pas.
En matière de desserte, je me réjouis que l'État envisage de faire profiter de nouvelles lignes du dispositif des liaisons d'aménagement du territoire.
Le produit de la taxe d'aviation civile, payée par les transporteurs aériens, revient pour 20 % au budget général et pour 80 % aux entreprises du secteur. Celles-ci n'ayant pas bénéficié du plan de relance, je forme le voeu -est-ce un voeu pieux ?- que la totalité de la recette de la taxe soit affectée au budget annexe.
En matière de contrôle aérien, il y a en Europe autant de systèmes que de pays. Dix-sept syndicats de six États membres, dont la France, proposent un système de navigation aérienne optimisé, qui, en réduisant les temps de parcours, économiserait 4,7 millions de tonnes de CO2 par an et 2,2 milliards d'euros. A nous d'accompagner cette démarche, le plus vite possible.
La commission de l'économie propose d'approuver les crédits du budget annexe « Contrôle et exploitation aériens » ainsi que ceux de la mission relatifs au secteur du transport aérien. (Applaudissements à droite)
M. Francis Grignon, rapporteur pour avis de la commission de l'économie. - L'avenir de l'Afitf, bras armé de l'État en matière d'investissements, est assuré. L'agence recevra une subvention d'équilibre d'environ 1,3 milliard si l'on cumule les crédits du programme « Infrastructures et services de transport » et ceux du plan de relance. Menacée de suppression l'an dernier, elle a vu ses missions renforcées et finance désormais 50 projets de transports urbains durables ; le rapport Gressier pourrait conduire à lui donner de nouvelles compétences. Toutefois, l'actuel circuit de financement ne pourra perdurer au-delà de 2012, lorsque la taxe poids lourds sera opérationnelle.
Malgré le Grenelle de la mer, le programme « Sécurité et affaires maritimes » stagne. Il faut pourtant réformer l'enseignement maritime, renforcer les contrôles des navires de pêche... Mme Herviaux suggère qu'un jaune budgétaire retrace l'effort de l'ensemble des ministères qui participent à la sécurité des marins. Pourquoi pas un document d'ensemble retraçant l'effort de la Nation en faveur de la mer ?
Pour 2010, 530 nouveaux radars sont prévus ; certains pourront contrôler, outre la vitesse, le respect des feux rouges ou des passages à niveau. Je ne doute pas qu'ils auront la sécurité pour unique objectif.
M. Jean-Louis Carrère. - Ce serait bien.
M. Francis Grignon, rapporteur pour avis. - Les réparations pour vandalisme sur les radars fixes devraient coûter 14,7 millions l'an prochain : lamentable ! Enfin, le ralentissement de la dynamique vertueuse en matière de mortalité sur les routes doit conduire le Gouvernement à redoubler d'efforts, sachant que plus on réduit le nombre de victimes, plus il est difficile de le réduire encore...
Le compte de concours financiers « Avances au fonds d'aide à l'acquisition de véhicules propres » retrace les crédits affectés au bonus-malus automobile. Ce remarquable outil écologique, qui a réellement modifié les comportements, pourrait toutefois coûter au contribuable la bagatelle d'un demi-milliard ! Il faudra à terme réduire ce déficit mais sans bouleverser le calendrier des constructeurs.
Enfin, notre commission envisage de se pencher, en 2010, sur la compétitivité de nos transporteurs routiers de marchandises, qui vont être soumis à ce que certains ont appelé une « véritable pandémie fiscale » -taxe poids lourds, contribution carbone, certificats d'énergie- et à l'ouverture du cabotage international.
Les transports demeurent une priorité. Certes, le plan fret comme le Grenelle de la mer n'ont pas encore eu de traduction budgétaire, mais on raisonne sur une longue période. L'ambition du Gouvernement pour développer les transports demeure intacte et les moyens sont au rendez-vous. La commission a donné un avis favorable à l'adoption de ces crédits, sous réserve de ces remarques. (Applaudissements à droite)
M. Roland Courteau, rapporteur pour avis de la commission de l'économie. - Le programme « Énergie et après-mines » s'élève, pour 2010, à 815,7 millions en crédits de paiement ; l'action 04, « Gestion économique et sociale de l'après-mines », consacrée aux prestations sociales servies aux anciens mineurs et à leurs ayants droit, représente 92 % du total. Vu l'évolution démographique de cette population, les crédits diminuent de près de 5 %.
Des moyens nouveaux ont ainsi pu être dégagés pour la mise en oeuvre du Grenelle de l'environnement, avec notamment la création du fonds de soutien au développement de la chaleur renouvelable, doté de 110 millions, et du fonds démonstrateur de recherche consacré aux technologies émergentes, doté de 41 millions.
De même, les moyens consacrés à la lutte contre l'effet de serre bondissent à plus de 4 millions en 2010, qui financeront des études et la mise en place des schémas régionaux du climat, de l'air et de l'énergie (SRCAE). Je vous proposerai d'abonder de 600 000 euros le programme « Prévention des risques » afin de financer les commissions locales d'information (CLI) à proximité des installations nucléaires, dont les dépenses n'ont pas à être à la charge des seules collectivités territoriales. C'est une solution transitoire, en attendant l'instauration du prélèvement sur le produit de la taxe sur les installations nucléaires de base.
La France s'est engagée à atteindre 23 % d'énergies renouvelables dans sa consommation totale en 2020. Sachant que le potentiel hydraulique est déjà pleinement exploité et que le photovoltaïque n'en est qu'à ses débuts, ce sont la biomasse et l'éolien qui permettront d'atteindre cet objectif. La France est déjà le premier producteur européen de bois énergie, qui représentait 5 % de la consommation finale énergétique en 2007, mais la biomasse est encore largement inexploitée.
La technologie de l'éolien est la plus mature et la moins chère, mais les éoliennes sont parfois contestées. Trop longtemps, le secteur a souffert d'un défaut d'encadrement par l'État, qui n'y croyait pas... J'espère que les choses rentreront dans l'ordre avec les SRCAE. On pourrait déroger à l'obligation de s'inscrire dans une zone de développement de l'éolien pour les petites éoliennes de moins de 36 kW : c'était le sens d'un amendement que j'avais fait adopter lors de la première lecture du Grenelle I, mais qui n'a pas survécu à la navette. Le passage des éoliennes sous le régime des installations classées pour la protection de l'environnement, prévu par le Gouvernement dans le cadre du Grenelle II, ne me paraît pas une bonne idée.
A titre personnel, je ne donne pas un avis favorable à l'adoption des crédits de cette mission. (Applaudissements à gauche)
M. Jean-Louis Carrère. - Pas trop d'éoliennes, tout de même !
M. Ambroise Dupont, rapporteur pour avis de la commission de la culture. - Je commencerai par quelques observations sur les crédits du programme 113, « Urbanisme, paysages, eau et biodiversité ». La présentation du budget offre une réelle traçabilité des objectifs du Grenelle de l'environnement et de la loi du 3 août 2009. Nous ne pouvons que nous féliciter de l'augmentation de près de 60 % des crédits qui y sont affectés : ils atteignent 61 millions d'euros. En ce qui concerne la gestion des milieux et de la biodiversité, je me réjouis que les actions en faveur des espaces protégées soient poursuivies et les moyens des parcs nationaux augmentés. Enfin, j'ai pris connaissance avec beaucoup d'intérêt des dotations prévues pour l'action « Urbanisme, aménagements et sites » au sein de laquelle des crédits sont destinés à favoriser les démarches expérimentales d'élaboration de documents d'urbanisme exemplaires ainsi que le financement de plans de formation des agents du ministère, dont les compétences doivent être adaptées aux modifications institutionnelles et réglementaires. Bon nombre de projets de PLU sont aujourd'hui en suspens, dans l'attente d'un financement provenant de la dotation générale de décentralisation pour les documents d'urbanisme.
J'aimerais voir dans ce budget l'amorce d'une dynamique qui amènera les pouvoirs publics à mieux prendre en compte le paysage et l'architecture dans leurs décisions. Ces deux dimensions ne me paraissent pas occuper la place qu'elles méritent. Aussi ai-je souhaité, en marge de cet avis budgétaire, mener une réflexion en auditionnant quelques professionnels.
Le paysage souffre en effet d'une image réductrice : on l'associe toujours à une organisation de la verdure qui vient en addition du reste. Le même constat vaut pour l'architecture : il suffit pour s'en convaincre de contempler les entrées de ville, les zones commerciales et industrielles, les lotissements, les banlieues ou le paysage rural.
Il m'a paru nécessaire de proposer des pistes de réflexion tenant compte des nouveaux enjeux du développement durable, dans la continuité du rapport d'information publié en 2004 par M. Yves Dauge. Il est nécessaire d'associer à nos projets des paysagistes et des architectes afin de définir des stratégies collectives et pluridisciplinaires de valorisation du paysage et de l'architecture. Cela implique la revalorisation du métier des professionnels du paysage et peut-être la révision de la réglementation relative à l'utilisation du titre de paysagiste et l'inscription des cursus dans le modèle européen « licence master doctorat ». Il convient également de consulter ces professionnels avant d'élaborer les documents d'urbanisme. Tout cela aurait une incidence financière, mais nous sommes face à un choix de société. Je souhaite donc, en vue de la prochaine discussion budgétaire, que l'on puisse évaluer les besoins de financements liés à la rémunération des paysagistes-conseils et architectes-conseils de l'État qui ne peuvent aujourd'hui intervenir que sporadiquement.
Il est urgent de diffuser une culture du paysage et de l'architecture. La formation continue des professionnels et des élus doit être enrichie dans ce domaine : on pourrait faire appel aux écoles de paysagistes et d'architecture et à leurs ministères de tutelle, à l'école de Chaillot, à l'ordre des architectes et aux conseils d'architecture, d'urbanisme et d'environnement (CAUE).
Mon souhait n'est pas d'imposer de nouvelles contraintes mais de donner aux pouvoirs publics les moyens de définir des projets collectifs redonnant au paysage et à l'architecture la place qu'ils méritent. Il faut des règles vivantes pour définir le cadre de vie. Le grand architecte Frank Lloyd Wright disait : « L'heure est venue pour l'architecture de reconnaître sa propre nature, de comprendre qu'elle dérive de la vie ».
La commission de la culture a donné un avis favorable à l'adoption des crédits. (Applaudissements à droite et au banc des commissions)
Interventions des orateurs des groupes
Mme Évelyne Didier. - Compte tenu du peu de temps qui m'est imparti, je ne ferai que quelques observations. Tout d'abord, je dois souligner la forte augmentation des crédits affectés à la protection de la biodiversité, un enjeu majeur jusqu'ici négligé. La France bénéficie d'une biodiversité exceptionnelle parmi les pays industrialisés du fait de la dispersion de ses territoires d'outre-mer et de la richesse de son territoire métropolitain. A l'heure des premières études sur la valeur économique des systèmes écologiques, cette prise de conscience était nécessaire. La France est en effet au quatrième rang mondial pour les espèces animales menacées et au neuvième rang pour les plantes, selon le Livre rouge de l'Union internationale pour la conservation de la nature. Le défi est de taille. Espérons que l'effort budgétaire sera poursuivi, notamment pour ce qui est de la recherche et de la formation, car l'expertise dans ce domaine est loin d'avoir atteint le niveau requis.
En tant que sénatrice de Meurthe-et-Moselle, je déplore en revanche la baisse tendancielle des dépenses de gestion économique et sociale de l'après-mines. La baisse du nombre d'ayants droit ne saurait justifier la diminution de l'offre, notamment dans le domaine de la santé.
Des dépenses fiscales très importantes sont engagées pour encourager l'équipement des habitations et les économies d'énergie. Mais ces dispositions profitent surtout aux ménages les plus aisés qui ont les moyens de s'engager dans des travaux coûteux. A l'heure de la contribution carbone, il serait bon d'adapter ces mesures en faveur des ménages moins favorisés. Je voudrais vous alerter plus particulièrement sur la situation des locataires, qui n'ont aucune maîtrise de leur consommation d'énergie fossile. Si leur logement est mal isolé, ils n'auront d'autre choix que d'avoir froid s'ils ne veulent pas acquitter une contribution carbone démesurée par rapport à leurs revenus. Lorsque ma collègue députée Martine Billard l'a interrogé à ce sujet à l'Assemblée nationale, M. le ministre du budget a eu cette réponse laconique : « Le dialogue entre le propriétaire et le locataire doit exister ». Une telle méconnaissance des rapports de force entre locataires et propriétaires laisse pantois ; elle est symptomatique de la difficulté, pour certains, de comprendre les réalités sociales.
La commission de l'économie a adopté, dans le cadre de la loi Grenelle II, un amendement du président Emorine qui généralisait les Scot, ces importants outils de planification. En 2009, 12 projets de Scot innovants au plan environnemental ont été financés à raison de 100 000 euros par projet. Mais aucune aide globale n'est prévue pour les autres projets, alors que 230 secteurs ont manifesté en 2009 l'intention d'élaborer un Scot. Il faudrait sans doute mieux répartir les crédits disponibles. Dans un contexte tendu et incertain pour les ressources des collectivités territoriales, il est indispensable que celles-ci reçoivent une aide de l'État pour pouvoir produire des documents de qualité.
En ce qui concerne la gestion des déchets, l'Ademe constate une perte d'autonomie des départements faute de nouvelles unités de traitement. La responsabilité de cette situation incombe d'abord aux industriels, dont les pratiques ont longtemps manqué de transparence. Un effort s'impose pour que chaque département dispose de ses propres centres de traitement et qu'aucun n'accueille des déchets venus de l'autre bout de la France, ce qui est une aberration du point de vue écologique.
J'aurais voulu aborder d'autres sujets, mais M. le Président et le chronomètre étant intraitables, je laisse à Mme Schurch le soin de vous parler des transports. (Sourires et applaudissements à gauche)
M. le président. - Le Président n'est pas intraitable mais il souhaite que notre débat se tienne dans les délais prévus.
M. Roland Ries. - Nous examinons aujourd'hui le volet « Transport urbain » du projet de loi de finances dans un contexte assez favorable, comme l'ont constaté les participants des rencontres nationales du transport public à Nice la semaine dernière. Ce secteur résiste mieux que d'autres à la crise économique. Les importants investissements réalisés par les collectivités territoriales sont un parfait exemple de cette « croissante verte » que nous appelons de nos voeux : ils ont rempli les carnets de commande des industriels, créé des emplois non délocalisables, accru la qualité du service rendu aux usagers et encouragé les particuliers à délaisser leur voiture pour prendre les transports collectifs.
Ce budget accompagnera-t-il le changement des comportements ? Les pouvoirs publics doivent faire preuve de courage et de volontarisme. Les besoins de financement des autorités organisatrices de transports ont été évalués à plus de 43 milliards d'euros à l'horizon 2020 pour les seuls transports en commun en site propre (TCSP), sans parler de la régénération du réseau ferroviaire, des travaux d'accessibilité des véhicules et des infrastructures terrestres ou de l'aménagement des gares. De ce point de vue, le programme 203 « Infrastructures et services de transports » appelle deux remarques. Je me suis réjoui, monsieur le ministre, en vous entendant annoncer pour le printemps prochain un nouvel appel à projets de TCSP doté d'une enveloppe à peu près égale à la précédente, soit environ 800 millions d'euros. Mais si « le financement des appels à projets lancés dans le cadre du Grenelle de l'environnement pour les projets de TCSP des grandes agglomérations » entre dans les missions de l'Aftif, le bleu budgétaire ne fait pas mention de cette somme. A y regarder de près, on se demande comment l'agence pourra remplir ses missions avec des ressources moindres, la totalité du produit de la vente des sociétés d'autoroutes ayant été consommée.
Doit-on considérer que la subvention d'équilibre de 980 millions lui servira à financer les missions de l'Aftif en 2010 ? En clair, monsieur le ministre, avez-vous prévu un financement budgétaire de l'appel à projet que vous avez lancé ?
J'en viens à la question du financement du matériel roulant. Après vingt ans de développement des transports en commun en site propre, nombre de réseaux arrivent à saturation. Pour augmenter l'offre, il faut augmenter les fréquences. Or, pour l'heure, l'État s'est toujours refusé à apporter son aide à l'achat de matériel roulant supplémentaire, se limitant aux infrastructures. Revenir sur cette position serait le signe d'un encouragement à la politique de report modal, promue par le Grenelle et mise en oeuvre par les collectivités territoriales, et du soutien de l'État à une filière fortement créatrice d'emplois, point qui devrait intéresser le ministre de l'industrie qui nous accueillait en temps que maire à Nice.
Mais il y a plus à dire en matière de transports collectifs que simplement déplorer la stagnation budgétaire des crédits dans ce budget. La part des transports dans le budget des agglomérations et intercommunalités, aujourd'hui de 40 %, voire plus, ne saurait augmenter indéfiniment sans compromettre les autres actions des collectivités. En outre, les autorités organisatrices s'inquiètent de la réduction des recettes locales, notamment du versement transport, qui résulte mécaniquement de la crise et de l'augmentation du chômage, et de la suppression de la taxe professionnelle, principale ressource des intercommunalités. Comment les intercommunalités, privées de visibilité budgétaire à moyen et long termes avec cette réforme, pourront-elles décider des investissements lourds ? La suppression de la taxe professionnelle pèsera indirectement sur l'activité économique de notre pays, les collectivités réalisant l'essentiel des investissements publics.
En conclusion, monsieur le ministre, l'incertaine pérennité des ressources des autorités organisatrices de transport risque d'entraver les politiques de mobilité durable que mènent, avec volontarisme, les collectivités. Je crains que les garanties apportées par le Premier ministre à l'occasion du Congrès des maires, essentiellement de court terme, ne rassurent pas les responsables locaux des autorités organisatrices ! (Applaudissements sur les bancs socialistes)
M. François Fortassin. - (M. Jacques Mézard applaudit) Deux mois après l'examen du Grenelle II, quelques jours avant le sommet de Copenhague et quelques jours après nos débats sur la contribution carbone, toute la question est de savoir si ce budget est à la hauteur des enjeux. Depuis deux ans, l'environnement s'est imposé dans les médias, le discours politique, les stratégies d'entreprise, les cours des universités, les conversations en famille et entre amis ; un élan qu'il serait dangereux de briser. Nous souhaiterions un budget de rupture. Or nous ne le trouvons pas ! Il s'agit seulement d'une confirmation des politiques décidées en ce domaine. Plus qu'un processus, le Grenelle de l'environnement est un phénomène de société. Nous avons un devoir d'enthousiasme envers le Grenelle de l'environnement ! Sans naïveté, nous avons le devoir de poursuivre encore et encore cet effort en faveur d'une écologie humaniste. Je vous sais gré, madame la ministre, d'avoir donné à l'écologie cette tonalité humaniste de bon aloi sans laquelle il n'y pas de véritable écologie. Vous avez contribué à sortir l'écologie de sa gangue de tristesse, à déchirer les vieux oripeaux du sectarisme de l'écologie (vives marques d'intérêt) pour la revêtir des habits neufs de l'espérance et de la joie de vivre ! (Exclamations admiratives sur de nombreux bancs ; M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État, apprécie également)
M. Daniel Raoul. - C'est notre poète des Pyrénées ! (Sourires)
M. Jean Desessard. - La couleur de l'espérance, c'est le vert !
M. François Fortassin. - Cher ami, nous n'avons pas le même vert quelquefois...
M. le président. - Verre ? (Sourires) Poursuivons...
M. François Fortassin. - Dans le domaine des transports, l'enjeu est de favoriser les transports alternatifs. On peut se féliciter que les crédits atteignent 4 800 millions, mais comment occulter que seule l'augmentation des péages permettra de faire face aux indispensables dépenses ? Peut-être faut-il également se tourner vers le grand emprunt...
M. Jean Desessard. - Oh !
M. François Fortassin. - Pas moins d'un milliard serait alloué aux transports. Cela suffira-t-il ?
Ce débat doit être également l'occasion d'en revenir au bon sens, à l'intelligence du coeur. Permettez-moi de prendre quelques exemples des ruptures qu'il faudrait introduire. Le billet d'avion entre Aurillac et Paris (exclamations stimulantes à gauche) coûte 500 euros, contre 60 pour aller à Londres et 400 pour se rendre aux États-Unis !
M. Pierre Bernard-Reymond. - Très bien !
M. François Fortassin. - Pourquoi ne pas taxer les compagnies low cost au titre de la réduction des gaz à effet de serre ? Soit, cela déplairait peut-être à quelques touristes en mal d'Asie du sud-est mais notre pays y gagnerait ! Comment penser que nous progressons quand le train reliait Aurillac à Paris en 5 heures et demie, contre 6 heures aujourd'hui ! (Rires)
M. Jacques Mézard. - Il est formidable !
M. François Fortassin. - Quand les salades cultivées dans le Roussillon sont envoyées à Rungis pour être vendues à Béziers, Montpellier et Perpignan !
M. Jean Desessard. - La faute à qui !
M. François Fortassin. - En France, la France veut faire figure de bon élève de l'Europe lors du prochain sommet, mais je me demande parfois si elle n'a pas fait beaucoup d'impasses avant de se présenter à l'examen de Copenhague ! (Applaudissements sur les bancs RDSE et sur les bancs socialistes)
présidence de M. Jean-Claude Gaudin,vice-président
M. Louis Nègre. - Avec le Grenelle de l'environnement, le Gouvernement a su, dès 2007, mobiliser la nation et faire de la France une référence incontestable en matière de développement durable. Qu'on en juge : 268 engagements ont été pris, 800 actions ont été définies et déjà plus d'une centaine ont été réalisées ! Ajoutons-y 44 dispositions fiscales dans le collectif pour 2008 et la loi de finances pour 2099, sans compter les nouvelles dispositions pour 2010, l'adoption du Grenelle I à l'unanimité, l'adoption du Grenelle II au Sénat. Ce dernier texte a permis de grandes avancées environnementales : son titre II sur les transports, que j'avais l'honneur de rapporter, prévoit la taxation des plus-values immobilières ou l'expérimentation des péages urbains, mesures fiscales propres à développer les transports collectifs urbains et périurbains.
L'augmentation forte et pérenne des crédits alloués à la biodiversité -+ 25% en 2007, + 30% en 2008, + 10% en 2009 et 2010- s'accompagne de décisions et programmes stratégiques tels que la taxe carbone, le programme en faveur des véhicules décarbonés ou l'engagement national pour le fret ferroviaire qui place la France dans une position exceptionnelle pour fêter l'année de la biodiversité dans le monde en 2010. A cette occasion, madame le ministre, je salue votre volonté de créer un réseau international d'aires marines protégées et de créer de nouveaux parcs marins d'ici 2011. J'ai, d'ailleurs, avec l'aide du président du conseil général des Alpes-Maritimes, contribué modestement à cette action en créant, ces derniers jours, une réserve sous-marine de 9 ha dans ma commune de Cagnes-sur-mer.
Enfin, dernière remarque générale, le plan national pour le développement des véhicules électriques et hybrides rechargeables, lancé récemment par MM. Borloo et Estrosi, bénéficie d'un financement de 100 millions dans ce budget, auquel s'ajoute une participation de l'État via le fonds stratégique d'investissement -125 millions sur 625 millions au total- pour la création d'une filière française de batteries lithium-ion et 900 millions via le grand emprunt pour financer le déploiement des bornes de recharge pour les infrastructures publiques, qui nous faisaient jusqu'alors défaut. Enfin, il faut maintenir le super bonus de 5 000 euros pour tout achat de véhicule décarboné, qui constitue un signal fort de soutien à une filière hautement stratégique pour la France, exposée à une féroce compétition internationale.
L'ensemble de ces orientations politiques répondent aux enjeux majeurs auxquels notre pays doit faire face, à commencer par l'impérieuse nécessité de préserver son environnement et de renforcer sa compétitivité internationale.
Au-delà de cette vision globale, très favorable à la protection de l'environnement, je voudrais évoquer le programme concernant les infrastructures et services de transports. Ce secteur représente 26,5 % des émissions nationales de gaz à effet de serre, pour l'essentiel à cause du mode routier. Le transfert modal ou l'utilisation de véhicules moins polluants est donc un enjeu de première importance.
La stratégie du Gouvernement repose sur plusieurs orientations : développement d'une offre plurimodale basée sur la complémentarité des modes de la chaine de transports ; optimisation des infrastructures existantes ; priorité aux transports autres que routiers. Cette orientation vertueuse ne peut que recueillir notre soutien ; elle confirme que le discours politique se traduit par des actes concrets et des moyens budgétaires significatifs.
Le Gouvernement confirme en 2010 l'augmentation déjà hors norme de 2009. Le programme 203, qui regroupe l'ensemble des moyens dévolus aux infrastructures et services de transports, est doté, hors fonds de concours, de 4,4 milliards en autorisations d'engagement et 4,35 milliards en crédits de paiement, dont 83,6 % sont imputés à l'action 10 « Infrastructures de transports collectifs et ferroviaires ». Les fonds de concours, d'un montant de 1 855 millions en autorisations d'engagement et 1 904 millions en crédits de paiement, complètent les crédits budgétaires ; ils proviennent en grande partie de l'agence de financement des infrastructures de transport de France.
On pourra ainsi concrétiser l'article 13 de la loi Grenelle I qui prévoit de développer les transports collectifs en site propre afin de les porter en quinze ans de 329 à 1 800 kilomètres, hors Ile-de-France. Grâce aux 800 millions portés par l'Afift, le premier appel à projets pour les transports collectifs qui a été bouclé en 2009 générera près de 6 milliards de travaux qui seront engagés pour la réalisation de 365 kilomètres de nouvelles lignes. On va ainsi réaliser en trois ans l'équivalent de ce qui auparavant aurait demandé près d'une génération. RFF recevra les crédits nécessaires pour renouveler 900 kilomètres de voies.
Suite à l'évaluation du réseau ferré national par l'école polytechnique de Lausanne, le Gouvernement a fait passer les crédits de 900 millions en 2005 à 1,7 milliard en 2010. En vertu du contrat de performance signé le 3 novembre 2008 entre l'État et RFF, ces crédits devraient être portés à 2,1 milliards en 2012 afin que soient renouvelés d'ici là 3 900 kilomètres de voies et 1 430 appareils de voies. Ce renouvellement concernera en priorité le réseau principal tandis que les volets ferroviaires des contrats de projet État-région serviront à la rénovation des petites lignes.
Ce programme finance également la réforme des grands ports maritimes. L'action « Infrastructures fluviales portuaires et aéroportuaires » voit ses moyens augmenter de plus de 50 %, ce qui confirme la priorité accordée au report modal. Ce soutien financier accompagnera le développement de la compétitivité de nos ports qui ont représenté, en 2006, 38,5 % en tonnage de l'acheminement de notre commerce extérieur. Nous apprécions aussi le soutien apporté au transport fluvial, dont le bilan énergétique est particulièrement favorable. Même si la part modale est encore faible, le trafic de marchandises conteneurisées a doublé en cinq ans. Selon le calendrier prévu, les travaux canal à grand gabarit Seine-Nord-Europe doivent débuter en 2011 pour une mise en service en 2015.
Tout serait donc pour le mieux dans le meilleur des mondes, si je n'avais quelques interrogations.
Après les critiques de la Cour des comptes, l'Afift risque de souffrir d'un effet de ciseau entre le besoin de financement et les recettes effectives, notamment au vu de l'écotaxe appliquée aux poids lourds qui n'entrera pas en vigueur, au mieux, avant 2012 et de l'absence d'augmentation de la redevance domaniale sur les autoroutes. Le rapport Gressier m'a convaincu qu'une réforme de la mission de l'agence s'imposait.
Le schéma national des infrastructures de transports n'a pas encore été publié.
Le deuxième appel à projet sera-t-il bien lancé en 2010 avec un montant de crédits au moins équivalent au premier appel ?
Il ne faut pas avoir peur de la concurrence dans le domaine ferroviaire car elle est à la base d'une diminution des coûts, et donc d'une moindre dépense des deniers publics avec un meilleur service rendu à l'usager.
Malgré ces interrogations, le budget qui nous est présenté est tout à fait positif et je souhaite qu'il soit approuvé sur tous ces bancs. (Applaudissements à droite)
M. Michel Teston. - Tout particulièrement depuis quelques mois, nous subissons un grand battage médiatique sur les investissements pour développer le transport ferroviaire. Citons le plan de renouvellement des voies mis en place après l'audit de l'école polytechnique de Lausanne ou le contrat de performance, signé par l'État et RFF, pour un montant de 13 milliards en cinq ans. Le Gouvernement a insisté sur le développement du transport ferroviaire dans la loi Grenelle I ainsi que sur la place consacrée au mode ferroviaire dans le plan de relance. Comment ne pas citer encore l'engagement national pour le fret annoncé en septembre 2009 ou le plan d'actions et d'investissements de 7 milliards ?
Au-delà de ces annonces, qu'en est-il réellement de l'engagement en faveur du ferroviaire ? Et en particulier en matière de régénération du réseau ?
Les enveloppes financières supplémentaires votées lors des précédentes lois de finances ne respectaient pas totalement les objectifs du plan, qui se situaient déjà en deçà du scénario préconisé par le rapport Rivier. Si les crédits correspondants ont ainsi progressé pour atteindre 1 464 millions en 2008, il est, depuis 2009, très difficile de les chiffrer avec précision en raison de la réforme de la tarification de l'usage des infrastructures. En effet, les concours de l'État à RFF ne sont plus désormais attachés à l'utilisation qui en est faite mais à l'équilibre économique pour le gestionnaire d'infrastructures de l'utilisation du réseau par les différents types de services ferroviaires.
Si les concours pour les TER progressent, ceux pour les trains classiques nationaux baissent de 76,5 millions, ce qui est en contradiction avec les orientations du Grenelle, qui prévoyait un système de péréquation. Même constat pour l'activité fret. Si le nombre de kilomètres de voies renouvelées a sensiblement augmenté, cela est certes dû à un effort plus important de l'État mais aussi à un effort sans précédent des régions, contraintes pour des raisons de sécurité de financer la régénération des lignes utilisées par leur matériel roulant. Elles l'ont fait dans le cadre des contrats de projet État-régions mais aussi parfois de plans rail spécifiques, pour accélérer la rénovation de petites lignes.
Outre que les concours de l'État à RFF sont en baisse pour le fret, le soutien au transport combiné se situe très en dessous de son niveau budgétaire de la période 1999-2002. Le transport combiné est pourtant présenté comme une priorité dans l'engagement national pour le fret ferroviaire ! La seule véritable concrétisation de cet engagement en faveur du fret émane de la SNCF, qui a décidé de répartir sur cinq ans un milliard d'euros pour développer son activité fret.
Le plan de relance s'est traduit par quelques accélérations de projets ferroviaires engagés mais pas par une réelle augmentation du volume des investissements ferroviaires. La subvention d'équilibre de l'État à l'Afitf est ramenée de 1,2 milliard en 2009 à 980 millions. L'État déduit ainsi de sa subvention les avances consenties en 2009 au titre du plan de relance mais aussi la partie des dépenses de régénération de voies prises en charge par les régions dans le cadre des contrats de projet et des plans rail spécifiques.
Où en est la rédaction du rapport proposant des solutions pour le remboursement de la dette de RFF ? Le projet de loi relatif aux transports ferroviaires adopté il y a quelques semaines prévoit le dépôt de ce document avant la fin 2009...
Comment ne pas regretter le décalage entre les annonces du Gouvernement et le manque d'ambition de ce programme, qui n'est pas à la hauteur du Grenelle ni de l'engagement national pour le fret ferroviaire ? Le groupe socialiste votera contre ces crédits. (Applaudissements à gauche)
Mme Anne-Marie Escoffier. - Cette loi de finances intervient dans une période cruciale pour le développement durable, avec le Grenelle de l'environnement et le prochain sommet de Copenhague. Malgré la volonté de traçabilité affichée par le Gouvernement, certains secteurs restent extrêmement obscurs, comme celui des circuits de financement des transports. Je demeure sceptique lorsque le Gouvernement affirme que les objectifs dudit Grenelle seront atteints en 2011 et ce, en raison même de ce budget qui nous est présenté. Les 10,5 milliards de crédits de paiement seront-ils suffisants pour remplir les objectifs prévus, si vastes et si variés ? Mieux vaut évaluer exactement les mesures qu'on entend mettre en oeuvre avant de les faire voter, sous peine de limiter son action à des effets d'annonce.
Les rapporteurs spéciaux -je rends hommage à leur pertinence- ont émis des réserves sur certains points, parmi lesquels l'insuffisante qualité du service ferroviaire ou le taux de contrôle des transports routiers des matières dangereuses, exemples choisis parmi d'autres, ce qui laisse douter de la « soutenabilité budgétaire » de cette mission, pour reprendre l'expression d'un de nos collègues ; d'où aussi les modifications apportés par notre commission des finances. Certes, les crédits mobilisés pour l'application du Grenelle en matière de biodiversité augmentent de 60 % et offrent l'aspect le plus novateur de ce budget, avec sa volonté d'aménagement équilibré des territoires, sa gestion de la ressource en eau et sa préservation du littoral. Mais d'autres secteurs ne sont pas aussi bien aidés et sur un budget aussi considérable, les crédits liés au Grenelle ne passent que de 30 à 60 millions, ce qui est modeste, en particulier dans le domaine ferroviaire.
Plus inquiétant encore me semble l'illisibilité de ce budget, son aspect obscur et peu fléché, dans lequel on se perd et dont la logique, de ce fait, nous échappe. Que veut-on exactement ? Où va-t-on ? Et pour quoi faire ? Est-ce parce que le nombre de missions est trop grand ? Ou parce qu'on les cerne mal ? Est-ce parce qu'il est difficile de trancher entre ce qui appartient à l'aménagement du territoire et ce qui relève de l'écologie ? Je ne sais. Toujours est-il que, si le Réseau ferré de France semble s'améliorer et les voies navigables offrir une situation satisfaisante, la dégradation du réseau routier n'est pas enrayée, de même que celle des affaires maritimes, de Météo France, de l'IGN ou du contrôle aérien, exemples parmi d'autres choisis dans les domaines d'un grand ministère qui paraît parfois dépassé par la taille et le nombre de ses missions. Une bonne politique écologique, comme une bonne politique budgétaire, ne consiste pas à déshabiller Jean pour habiller Pierre. Certains objectifs, de ce fait, semblent d'ores et déjà impossibles à être atteints, comme ceux relatifs au contrôle et à la sanction automatisés des infractions au code de la route ou l'autofinancement pour l'acquisition des véhicules propres. Tout cela manque de cohérence et je le regrette puisque, si nous sommes attachés à une véritable politique écologique, nous sommes aussi soucieux d'une bonne politique d'aménagement du territoire, conforme à la tradition républicaine. Il y a un équilibre à trouver entre l'économie et l'écologie. Cet équilibre, je ne l'ai pas trouvé dans ce budget et, après tant d'heures passées à étudier, ici, le Grenelle I et le Grenelle II, je n'en ai retrouvé ni le souffle, ni l'audace, ni l'ambition.
Avec mon groupe, j'aurais voulu apporter mon soutien à ce budget mais, vu nos réticences, nous nous abstiendrons. (Applaudissements à gauche)
Mme Mireille Schurch. - Du fait des engagements pris lors du Grenelle de l'environnement et des annonces dans les médias sur les milliards octroyés au réseau ferroviaire, au plan de relance et au plan fret d'avenir, nous nous attendions à une mission « Transport » aux crédits renforcés. Quelle déception ! Ces crédits sont en baisse de 3 % alors même qu'ils recourent plus que jamais aux ressources extrabudgétaires telles que les taxes, les redevances, et les péages. La subvention budgétaire à l'Afitf diminue et nous nous inquiétons pour la pérennité des financements de cette agence. Nous continuons de déplorer le choix fait par votre majorité de céder aux investisseurs privés les très rentables concessions d'autoroutes dont les recettes devaient financer initialement cette agence et donc, la régénération du réseau. D'autre part, la taxe poids lourd, qui ne rentrera en vigueur qu'en 2012 mais qu'on présente comme la solution miracle pour le financement de cette agence, ne garantira pas un niveau de recette suffisante.
Nous déplorons également votre volonté inébranlable d'affaiblir les opérateurs publics, que ce soit la SNCF ou RFF. Cette année encore, la subvention à RFF est en baisse alors même que l'audit de l'École de Lausanne préconisait un engagement de la puissance publique sans précédant. C'est donc plus de la moitié de notre réseau qui sera obsolète d'ici peu. Vous continuez donc de contraindre RFF à augmenter les péages ferroviaires ainsi que le niveau de la convention de gestion que la lie à la SNCF. Par là même, vous contraignez cette dernière à reporter sur les usagers ces hausses de tarifs. Ce sont donc bien toujours les mêmes qui payent les conséquences du désengagement de l'État.
RFF est également censée se financer grâce à la cession de son patrimoine : une nouvelle fois, on cède un patrimoine public d'une richesse inestimable. La loi relative à l'organisation et à la régulation des transports ferroviaires prévoit la remise d'un rapport fin 2009 sur les perspectives de désendettement de RFF. Sa dette a encore augmenté cette année, et se monte à 28 milliards... Nous serons attentifs à ce rapport...
Sur le fond, vous affaiblissez les opérateurs publics afin de faire de la place pour les nouveaux entrants sur les tronçons rentables, abandonnant toute ambition d'aménagement du territoire. Les conséquences du plan fret sur les territoires sont donc désastreuses. Une telle option est contradictoire avec un développement durable et la réduction des émissions de gaz à effet de serre.
Même chose pour la faiblesse de votre engagement pour le fret. Suite à un long déclin, la part modale du transport ferroviaire atteint péniblement 10,7 % en 2009. Votre objectif pour 2010, 10,9 %, est bien peu ambitieux ! Au rythme de 0,2 % par an, il nous faudra soixante dix ans pour atteindre l'objectif fixé par le Grenelle.
Le secteur routier est une nouvelle fois privilégié, notamment grâce aux 330 millions d'exonérations fiscales, contre 30 millions pour le transport combiné. Est-ce cela votre rééquilibrage modal ?
Pour toutes ces raisons, le groupe CRC-SPG ne votera pas ces crédits grâce auxquels, comme le fait la droite au pouvoir depuis 2002, on privatise les profits et on socialise les pertes. Le développement durable est incompatible avec une vision qui fait de la rentabilité économique le seul critère d'intervention et de la mise en concurrence le seul mode d'organisation possible des services publics. Il faut au contraire renforcer la maîtrise publique dans le secteur des transports, par une action déterminée et des investissements massifs en faveur du rail, levier stratégique pour le respect de l'environnement. (Applaudissements à gauche)
M. Paul Raoult. - Ce budget est marqué par la volonté de soutenir les objectifs du Grenelle en faveur de la biodiversité. Dans le contexte de crise actuel, j'y suis sensible, d'autant qu'il y va de la vie même de l'homme sur notre planète. Personnellement, j'apprécie les efforts faits pour les parcs nationaux et régionaux, pour les aires des espèces protégées ainsi que les dispositions financières au profit de la trame bleue et de la trame verte.
Je m'inquiète cependant sur l'insuffisance des moyens humains. L'étape préalable des inventaires scientifiques nécessitera un énorme travail parce qu'il y a beaucoup de retard à rattraper et que la qualité environnementale des PLU et des SCOT dépend de cette mise à jour de nos connaissances scientifiques.
Notre objectif va aussi à assurer les continuités écologiques. L'État doit être au rendez-vous, aux côtés des collectivités. La mise en place des bandes enherbées le long des rivières et bassins progresse lentement. Quelles plantes doivent être autorisées ? Quelle compensation pour les agriculteurs quand il n'y a pas de DPU ? Même chose pour les petits barrages de moins de 5 mètres.
Des logiques transversales doivent se mettre en place entre ministères et, à l'intérieur de votre ministère, entre les services. Car ce ne sont pas deux trames distinctes qu'il s'agit de tisser, mais bien une seule : la trame verte et bleue. Cela suppose que les directions régionales et les agences de l'eau travaillent main dans la main, dans un dialogue permanent avec les régions, les départements et les intercommunalités. Seule une véritable révolution culturelle produira des résultats.
Autre préoccupation, la gestion de l'eau. L'assiette des nouvelles redevances acquittées par les usagers domestiques se réduit chaque année -puisque la consommation baisse de 1 à 1,5 %- avec des répercussions sur les recettes des agences et des distributeurs qui les conduisent à augmenter les taux pour compenser. Il faut sortir de ce cercle vicieux : il reste des investissements très importants à réaliser en matière d'eau potable et de traitement des eaux usées. La presse nationale s'est fait l'écho des problèmes de fuites sur les réseaux : certes, la situation est sérieuse mais les chiffres sont parfois biaisés du fait que l'on y inclut ce qui sert à éteindre les incendies ! Reste qu'il faut se soucier de l'eutrophisation de nombreux plans d'eau.
Il y a aussi urgence pour les 500 captages les plus menacés : délimitation précise des zones de protection, diagnostic sur les pressions agricoles, définition de programmes d'action (Maet, agriculture biologique), bien des efforts restent à faire. La lutte contre les pollutions diffuses est en panne. Le plan de développement rural hexagonal et le plan végétal souffrent de difficultés de mise en oeuvre : il serait bon, monsieur le ministre, que les mesures agro-environnementales territorialisées, qui restent souvent très limitées, gagnent en dynamisme.
Je vous sais très attachée, madame la ministre, à la protection des zones humides, mais les résistances sont rudes. La défense de ces zones conditionne pourtant le ravitaillement en eau potable de bien des territoires entiers.
Nombreux sont les élus qui veulent aller plus vite sur l'assainissement non collectif. Les décrets de septembre 2009 constituent une avancée dont il faut se féliciter : c'est un enjeu majeur dans les zones d'habitat dispersé.
L'enjeu écologique est désormais fondamental dans nos sociétés. Les choses, je le reconnais, avancent mais au-delà de la réglementation et des moyens, seul l'assentiment changera les comportements individuels. Il ne saurait se fortifier que dans une société plus juste et je crains que les mesures fiscales prises depuis deux ans n'y contribuent pas.
Pour parvenir à une gestion plus économe de nos ressources naturelles, il faut avoir le courage politique de bousculer les situations acquises. Sauf à s'en tenir à des incantations, il faut un système de contrôle et de sanction, qui sera, au-delà de l'objectif de réduction des gaz à effet de serre, l'enjeu majeur du sommet de Copenhague. Il subsiste beaucoup d'interrogations sur votre budget. Si nous avons un regard positif, nous demeurons critiques tant sont grandes les incertitudes sur les résultats de la nouvelle politique environnementale.
M. Jean Desessard. - La situation, gravissime, du fret ferroviaire, justifie que je centre sur lui mon intervention.
Depuis plusieurs semaines, nous assistons à un grand plan de communication de la direction de la SNCF sur le thème « Et si les marchandises prenaient le train ? » M. Borloo a présenté il y a quelques semaines le plan « Fret d'avenir », qui nous promet une nouvelle politique environnementale des transports, favorisant le report modal sur le rail. Le texte que nous examinons prévoit une augmentation de 25 % de la part modale du fret non routier d'ici à 2012.
Qu'en est-il réellement, au-delà de ces déclarations d'intention ? La réalité, c'est bien que la SNCF a fait le choix de l'abandon du wagon isolé. Elle veut des trains complets du départ à l'arrivée
M. Louis Nègre. - Et c'est très bien.
M. Jean Desessard. - Très bien ? Cela signifie concrètement qu'elle ne veut plus aller chercher deux ou trois wagons dans une zone industrielle, les regrouper avec d'autres wagons pour faire un train complet qu'elle acheminera à destination. Comment cela se traduira-t-il ? Par le report sur la route de un à deux millions de camions par an ; par la suppression de 5 000 emplois de cheminots ; par la détérioration des conditions de travail donc de la sécurité ferroviaire. C'est donc cela le fret d'avenir ?
Cela signifie aussi la disparition d'un outil industriel, sans possibilité de revenir en arrière : on aura fermé trop de gares de triages, abandonné trop de lignes secondaires -qui n'est pas désolé au spectacle de ces rails gagnés par la rouille ?-, gâché sans retour les compétences des cheminots. Pour favoriser l'ouverture à la concurrence, on a déjà sectorisé les métiers : certains ne conduisent plus que des TER, d'autres que des trains de grandes lignes. C'est comme cela que l'on détruit la polyvalence et les savoir-faire. C'est comme cela que des lignes de fret ont été supprimées faute de personnel alors que certains conducteurs de TER étaient dans le même temps sous-employés. C'est comme cela que l'on détruit le maillage du territoire, irrémédiablement, car que fera Réseau ferré de France de ses gares de triage abandonnées ? Elle vendra le foncier...
Que fera-t-on, dans quinze ou vingt ans, quand les carburants seront devenus trop coûteux ? Le tout routier a ses limites. Gouverner, monsieur le ministre, c'est prévoir. (Mme Évelyne Didier approuve) Gardons-nous de transformer en déserts les territoires jugés peu rentables.
Les Verts ont une alternative à proposer : la baisse des tarifs des péages ferroviaires pour le fret, qui lui fera gagner en compétitivité sur la route. Pour compenser la perte de revenus, l'État devra abonder le budget de RFF de 150 millions par an. Nous aurions aimé les voir, dès cette année, apparaître dans le budget.
Alors que le sommet de Copenhague doit s'ouvrir dans quelques jours, on ne peut pas laisser tomber le rail : l'intérêt général et environnemental doit nous guider. Le transport ferroviaire est un bien public indispensable à une politique des transports sobre en carbone. Il aurait mérité un coup de pouce : ce budget le lui refuse, nous ne pourrons pas le voter. (Applaudissements à gauche)
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État chargé des transports. - Le budget 2010 est marqué par l'accélération sans précédent des investissements : jamais on n'aura construit en France autant de grandes infrastructures alternatives à la route : 2009 avait déjà été une année importante ; nous avions signé avec Jean-Louis Borloo le protocole d'intentions pour le canal Seine-Nord-Europe et lancé la deuxième phase de la LGV est : je remercie d'ailleurs les collectivités qui ont signé avec nous la convention de financement. Nous avons également lancé le dernier tour de l'appel d'offres pour Bretagne-Pays de Loire, Le Mans-Rennes, avec une petite antenne vers Angers, et Tours-Bordeaux : il s'agit d'un grand chantier de près de 7,5 milliards et qui créera 40 000 emplois.
MM. Ries et Nègre ont évoqué les transports en commun en site propre (TCSP). Nous étions ensemble à Nice la semaine dernière avec M. Estrosi : 365 kms sont prévus au terme du premier appel à projet lancé en 2009, soit plus en trois ans que ce qui avait été fait par les collectivités en trente ans ! Nous lancerons, dès 2010, un deuxième appel à projet.
L'année prochaine, les grands travaux débuteront. Ainsi, les premiers coups de pioche, si j'ose dire, seront donnés pour la deuxième phase de la LGV est. De plus, des travaux préparatoires seront conduits pour les autres grands projets qui débuteront en 2011. Le Rhin-Rhône poursuit sa construction entre Mulhouse et Besançon.
MM. Grignon, Lambert, Ries et Nègre ont évoqué le budget de l'Afitf qui s'établira à 2,7 milliards en 2010, dont 331 millions au titre du plan de relance. Nous aurons ainsi les moyens de notre politique. A la suite du rapport Gressier, nous allons renforcer les moyens de l'Afitf en attendant que la redevance poids lourds et que les autres recettes complémentaires prennent le relais.
Nous faisons d'importants efforts pour réorienter le fret vers les transports durables. La réforme portuaire se poursuit, avec 34 millions d'investissements nouveaux.
MM. Lambert et Desessard ont évoqué l'engagement national pour le fret ferroviaire, qui prévoit une montée en puissance du transport combiné, l'augmentation des cadences des autoroutes ferroviaires et la création d'opérateurs de proximité.
Nous allons également supprimer les goulets d'étranglement du réseau, notamment Nîmes-Montpellier et l'agglomération lyonnaise. Ce plan aura un impact majeur. J'aurai auprès de moi un comité de suivi : nous ne voulons pas faire une énième réforme du fret mais disposer d'un tableau de bord trimestriel pour voir comment les choses se déroulent. Nous y consacrerons, durant toute cette période, 7 milliards pour les infrastructures et pour le transport combiné.
L'équilibre financier des lignes d'aménagement du territoire a été évoqué. Il est tout à fait exact que les liaisons Corail connaissent des difficultés : il faudra trouver une compensation spécifique.
Chacun a entendu parler du rapport de la Cour des comptes sur les TER : il est sévère mais pas forcément injuste. J'ai confié à M. Grignon la direction d'une « commission des parties prenantes » chargée de réfléchir d'ici le printemps aux conditions dans lesquelles les régions pourraient, après appel d'offres, confier les TER à d'autres opérateurs que la SNCF. Je dis souvent aux présidents de région qu'il vaut mieux, à certaines heures, un autocar plein qu'un TER aux trois quarts vide qui consomme des sillons fret.
M. Jean Desessard. - Ce n'est pas sûr !
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. - En ce qui concerne le transport routier de marchandises, il est vrai que la fiscalité augmente, mais c'est la traduction de notre politique de report modal.
M. Jean-Paul Emorine. - Très bien !
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. - En outre, nous nous sommes engagés à alléger cette fiscalité en prévoyant un abattement de 36 % de la taxe carbone en 2010, un allégement des charges de personnels dans le cadre de l'harmonisation européenne des conditions de travail et la suppression de la taxe professionnelle qui bénéficiera également au secteur. Les syndicats de salariés des transports routiers et les organisations professionnelles doivent se rencontrer pour ne pas engager une grève qui, en plein milieu des fêtes, grèverait notre économie et le bien-être de nos concitoyens.
Nous poursuivons nos efforts pour la sécurité en mer, dans les airs et sur rail. En ce qui concerne la sécurité routière, nous installerons 530 nouveaux radars sur les routes, en visant particulièrement les feux rouges et les passages à niveau.
MM. Miquel et Grigon ont évoqué les résultats exceptionnels en matière de réduction de la mortalité. Hélas, nous redoutons pour 2009 de mauvais chiffres par rapport à 2008. Les problèmes restent les mêmes : vitesse, alcool et surmortalité des deux-roues motorisés. J'ai proposé au Premier ministre de réunir le comité interministériel de la sécurité routière (CISR) afin de prévoir de nouvelles sanctions pour les grands délinquants et de mieux communiquer sur les limitations de vitesse. Quant aux deux-roues, nous avons engagé une concertation depuis plusieurs mois et nous allons proposer des mesures très importantes pour améliorer leur sécurité.
S'agissant du projet Faeton, la mise en place s'effectuera selon un calendrier conforme à celui de la directive européenne, monsieur Miquel. Malgré des investissements très importants, nous maîtrisons le budget transports puisque même si la dotation du programme « Infrastructures et services de transports » baisse de 3 %, cette diminution est compensée par les recettes de RFF et de l'Afitf, ce qui permet de réduire les subventions à ces deux organismes, sans toucher à notre marge de manoeuvre.
S'agissant du budget annexe de l'aviation civile, la baisse des trafics, liée à la crise économique, a eu des conséquences sensibles sur les recettes. Un plan d'économies a été engagé et il sera poursuivi en 2010. Les tarifs des taxes et des redevances doivent augmenter de façon raisonnable pour conjuguer équilibre budgétaire et soutien à un secteur en difficulté. M. Le Grand a eu raison de rappeler que le secteur aérien n'a pas bénéficié du plan de relance mais d'avances au budget annexe afin de poursuivre les investissements stratégiques sans conduire à une hausse excessive des taxes et redevances.
En ce qui concerne la quote-part de la taxe de l'aviation civile au budget annexe, les conditions d'équilibre du budget général ne permettront pas de la faire évoluer mais nous en reparlerons dans les prochaines années. Nous travaillons à la création d'une entité unique de contrôleurs aériens européens. La France n'est pas opposée, dans le cadre du ciel unique européen, à prévoir des alliances poussées avec ses partenaires européens, pouvant aller jusqu'à l'intégration de certains services et la création d'entités internationales. Mais nous devrons négocier avec nos partenaires européens et avec les personnels qui sont inquiets.
Nous venons de remettre au Parlement un rapport sur les évolutions statutaires de la DGAC afin de tenir compte du ciel unique européen et des projets Fabec, Sesar. La création d'un établissement public administratif (EPA) fait l'objet de discussions avec les personnels, monsieur Collin.
S'agissant des lignes aériennes d'aménagement du territoire, monsieur Fortassin, la taxation du transport aérien n'est pas le meilleur moyen de faire baisser son coût. L'État finance en revanche à plus de 50 % de nombreuses lignes d'aménagement du territoire.
S'agissant de l'IGN, nous préparons un nouveau contrat d'objectifs.
Enfin, le nouveau régulateur du secteur ferroviaire, dont vous avez voté la création, sera financé par le secteur via un droit spécifique.
Nous poursuivons nos investissements, nous maîtrisons les dépenses courantes et les effectifs de notre ministère et nous redéployons nos agents vers des missions liées à la mise en oeuvre du Grenelle.
Notre budget traduit bien les ambitions élevées que le Gouvernement s'est fixé en matière de développement des infrastructures de transport. En 2010, quatre grands projets de LGV devraient être menés de front : c'est un moment unique dans notre histoire des transports et il symbolise bien les orientations du Grenelle en faveur du développement durable. (Applaudissements à droite)
Mme Fabienne Keller, rapporteur spécial. - Bravo !
Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État chargée de l'écologie. - Nous sommes tous comptables des engagements du Grenelle. Il nous faut donc réunir les conditions d'une future croissance verte : 2009 a été l'année du lancement de différents programmes.
Grâce à l'éco-prêt à taux zéro, nous sommes déjà à plus de 50 000 chantiers de rénovation alors que, d'habitude, nous en comptons à peine 40 000.
Le fonds de soutien à la chaleur d'origine renouvelable a été mis en place l'année dernière et il a été doté d'un milliard : or, nous avons dépassé nos objectifs de plus de 50 %.
En six mois, nous avons plus que doublé le nombre d'installations solaires. M. Courteau a eu raison d'évoquer les difficultés du troisième régime ICPE. Ce sont les recours qui ralentissent le déploiement des éoliennes. Nous devons donc sécuriser les conditions juridiques en ce domaine.
Nous avons également mis en place un plan pour la rénovation des friches industrielles, plan extrêmement rentable tant sur au niveau écologique qu'économique. Mme Keller m'a interrogé sur le fonds Barnier. Les moyens sont désormais suffisants par rapport à la demande. A l'avenir, la programmation du fonds s'adaptera aux besoins.
En 2010, notre action va encore s'accélérer grâce au Grenelle. Le rapport Stiglitz a été remis le 14 septembre : il démontre que nous devons compléter l'indicateur du PIB afin de prendre en considération l'état de notre patrimoine naturel et humain. Le Président de la République a saisi l'Insee de cette question.
Nous devrons également modifier nos comportements : Mme Keller a rappelé que le bonus-malus avait largement dépassé nos espoirs. Le rythme de baisse des émissions des véhicules neufs vendus est bien supérieur à ce que nous attendions. C'est pourquoi nous confirmons la baisse prévue en 2010 de 5 grammes et nous anticipons la future diminution de 5 grammes prévue en 2012 pour l'appliquer dès 2011.
Dès le 1er janvier, la contribution carbone entrera en application. Ce sera une véritable révolution et, comme l'a dit Mme Keller, il faut éviter les exonérations. Mme Didier a évoqué la question des plus démunis : le mécanisme de redistribution permet de garantir à la majorité de nos concitoyens une redistribution supérieure au coût de la taxe carbone. Le Président de la République souhaite également mettre en place une avance sur le crédit d'impôt pour les ménages les plus défavorisés. M. Borloo a demandé à Mme Létard de prévoir un plan contre la précarité énergétique pour répondre à vos préoccupations.
L'année 2010 verra le verdissement de notre fiscalité, notamment dans le domaine de la construction dont vous allez bientôt débattre.
Différents plans seront mis en oeuvre dès l'année prochaine : le fonds chaleur verra sa dotation multipliée par deux. Une centrale solaire par région sera sélectionnée afin de multiplier par trois notre production en énergie solaire.
On compte aujourd'hui 50 000 éco-prêts à taux zéro, l'objectif pour 2010 est de 200 000 et le rythme de croisière de 400 000. Le crédit d'impôt « développement durable », madame Keller, devrait coûter 2 milliards d'euros l'année prochaine.
Les crédits alloués à la prévention des risques augmenteront de 35 %, afin notamment d'accélérer la mise en oeuvre des plans de prévention des risques technologiques ; la moitié d'entre eux ont été prescrits, notre objectif est de 95 % de plans prescrits et 40 % de plans approuvés. Les fonds gérés par l'Ademe augmentent en moyenne de 20 %. Le nombre d'inspecteurs des installations classées, madame Keller, augmentera de 300 unités entre 2008 et 2012 ; les difficultés de recrutement sont en passe d'être résorbées. L'objectif de 1 700 inspecteurs en 2015 est confirmé.
L'enveloppe allouée à la protection de la biodiversité augmente de 12 %, après une hausse de 8 % en 2009. L'année 2010, comme l'a relevé M. Nègre, sera celle de la biodiversité ; je compte sur vous pour mener dans ce cadre des opérations sur tout le territoire. La mise en oeuvre du programme du Grenelle de l'environnement sera amplifiée, je pense aux trames chères à M. Raoult ; l'idée d'une agence dédiée n'a pas été abandonnée. Je pense aussi aux aires protégées et aux trois parcs, dont un en zone humide et à la contractualisation Natura 2000.
Il est exact, monsieur Emorine, qu'une aide a été apportée à l'élaboration d'une quinzaine de Scot ; je suis prête à doubler l'enveloppe si nécessaire, notamment en direction des territoires ruraux. Je sais l'engagement de M. Ambroise Dupont pour la préservation de nos entrées de ville ; nous devrons revivifier les métiers du paysage. L'année 2010 sera aussi celle du Grenelle de la mer ; nous tiendrons nos engagements et je suis prête, monsieur Nègre, à défendre votre parc.
Enfin, le fonds démonstrateur de l'Ademe, qui a déjà sélectionné 13 projets, voit ses crédits progresser fortement. Il financera de nouveaux projets de recherche et d'innovation dans les domaines des véhicules électriques, de l'énergie solaire ou de la mobilité urbaine.
Je vous remercie encore de votre engagement à tous. (Applaudissements au centre et à droite)
Questions et réponses
M. Daniel Soulage. - A l'initiative du groupe de l'Union centriste, le Sénat a créé une mission commune d'information sur le traitement des déchets, présidée par M. Braye et que j'ai l'honneur de rapporter. Elle doit examiner l'efficacité des différents modes de traitement et la pertinence des aides de l'Ademe.
Le rapport que le Gouvernement devait remettre le 10 octobre au Parlement sur la TGAP n'a pas été transmis ; il semble cependant qu'il soit finalisé. Pouvez-vous nous en donner les principales conclusions, qui éclaireraient utilement le travail de notre mission ? Pouvez-vous également m'indiquer quels modes de traitement l'Ademe compte subventionner, et sur quels critères ? L'attribution des subventions doit être l'occasion d'informer sur les conséquences des différentes méthodes afin d'éviter des catastrophes financières dont les contribuables feraient les frais. Le choix n'est-il pas conditionné par le milieu, rural ou urbain ?
Je vous remercie de vos réponses et du concours que vous voudrez bien apporter aux travaux de notre mission.
Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État. - Nous avons décidé de rendre plus chers l'incinération et le stockage. Le rapport est finalisé et est en cours de validation interministérielle ; il vous sera transmis dans les meilleurs délais. Le produit de la TGAP sur le stockage est évalué entre 40 et 45 millions d'euros ; celui de la nouvelle TGAP, qui abondera le fonds de l'Ademe, est de l'ordre de 570 millions sur trois ans. J'ai pris l'engagement que la hausse de la TGAP serait redistribuée via ce fonds aux collectivités, pas un euro ne sera perdu. Le rapport conclut que la modulation actuelle, qui favorise la valorisation du biogaz, est justifiée.
M. Daniel Soulage. - Je vous remercie. J'aurais aimé avoir une réponse sur le deuxième point que j'ai abordé...
M. Martial Bourquin. - Près de 10 % de la population active vit de l'industrie automobile, une industrie en pleine mutation. En octobre, M. Borloo a annoncé un plan « véhicules propres» en quatorze points. Le Gouvernement fait le pari de la production et de l'achat de 2 millions de véhicules électriques ou hybrides d'ici 2012 ; il a mis en place des dispositifs de prime à la casse et de bonus-malus.
Mais les habitudes de consommation ne se décrètent pas ; je crains un décalage entre les intentions et la réalité. Réalité sociale d'abord : super bonus ou pas, nombre de nos concitoyens devront conserver leur voiture, même polluante, faute de pouvoir d'achat et d'accès au crédit. Réalité du marché ensuite : super bonus et prime à la casse disparaîtront en 2012, tandis que le lancement de la première voiture électrique est prévu fin 2010 et celui du véhicule hybride rechargeable en 2012... Réalité économique enfin : le secteur de la construction et les communes seront sollicités pour l'installation des prises de recharge, et cela risque de leur coûter cher. Le Gouvernement a annoncé une concertation d'ici la fin de l'année : où en est-on ? La standardisation des prises -on sait ce qu'il en est pour les téléphones mobiles- est-elle prévue dès leur conception ?
La filière automobile connaît une mutation indispensable. Les grands constructeurs feront face mais beaucoup de PME risquent de se trouver en grande difficulté. Il faut les accompagner et les aider à innover ; on risque, sinon, des drames économiques et sociaux. Or ce qui est aujourd'hui prévu est insuffisant. Comptez-vous faire plus ? Nous devons faire de la voiture décarbonée une excellence française et européenne.
Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État. - L'objectif du plan, c'est 2 millions de véhicules propres en 2020 et 4 millions en 2025. Nous entendons jouer de tous les leviers, notamment la recherche avec le fonds démonstrateur qui a alloué 57 millions d'euros l'an dernier et lancera un nouvel appel à projets en 2010. Le fonds stratégique d'investissement a été mobilisé au secours de la filière, 350 000 batteries seront produites à Flins. La demande sera stimulée grâce aux bonus et surtout au super bonus de 5 000 euros pour les premiers véhicules électriques ; nous avons mobilisé un certain nombre d'opérateurs, qui achèteront 50 000 de ces véhicules pour faire baisser les prix. Le Gouvernement est contraint par la programmation triennale et ne peut s'engager au-delà de 2012. Les infrastructures de recharge ont manqué dans les plans des années 1980.
Nous avons signé un accord avec l'Allemagne sur la standardisation des prises et nous oeuvrerons ensemble pour une standardisation européenne.
Les immeubles neufs devront être systématiquement pourvus de prises. Il en sera également installé au fur et à mesure sur la voie publique, mais l'essentiel reste de pouvoir recharger sa voiture à son domicile ou sur son lieu de travail.
Les premières mesures d'accompagnement des communes seront présentées dès 2010, et les assises nationales se tiendront mi-2010.
Nous étudions avec Électricité réseau distribution France (ERDF) la création d'une filiale dédiée aux infrastructures de recharge. Enfin, d'éventuels arbitrages pourront être rendus dans le cadre du grand emprunt.
M. Martial Bourquin. - Attention à ne pas passer du tout pétrole au tout électrique. (Mme la secrétaire d'État approuve) Il faut préserver le spectre des possibilités. Le lobby électrique est très actif...
Il y a aujourd'hui une inégalité au sein de la filière entre, d'une part, les grands constructeurs, et de l'autre, les PME artisanales, familiales, qui peinent à intégrer l'innovation et être présentes au grand rendez-vous de la voiture décarbonée. La filière doit être préservée : l'excellence est gage de notre avenir.
M. François Fortassin. - Les pompes à chaleur de nouvelle génération ont un rendement énergétique attractif qui explique leur succès, d'autant que leur installation ne nécessite ni autorisation ni déclaration. Toutefois, leur mise en route provoque un pic d'intensité de 15 à 20 secondes, avec un appel de puissance énergétique quinze à vingt fois supérieur à la normale. Résultat, des quartiers entiers sont plongés dans le noir, sans chauffage ! Maires et présidents de syndicats départementaux d'électricité sont en première ligne. Comment comptez-vous régler ce problème ?
Par ailleurs, ne pourrait-on équiper les bâtiments agricoles, souvent vastes et peu esthétiques, de panneaux photovoltaïques ?
Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État. - Le Grenelle prévoit d'équiper deux millions de foyers en pompes à chaleur de nouvelle génération d'ici 2020. J'ai saisi ERDF de la question du pic de consommation. Un boîtier intelligent suffirait-il à régler le problème ? Ces pompes à chaleur se développeront avec les normes de construction basse consommation.
Nous avons en effet un plan énergétique pour utiliser les toits des bâtiments agricoles.
M. François Fortassin. - Vos réponses me satisfont. Mais comprenez l'incompréhension de nos concitoyens qui se retrouvent dans le noir quand les pompes sont mises en route vers 19 ou 20 heures, alors que vers 15 heures, tout se passe bien...
M. Gérard Bailly. - La « croissance verte » n'est pas sans causer quelques soucis à certains... L'étiquetage obligatoire du coût carbone des produits et de leur emballage à compter du 1er janvier 2011 est de nature à orienter le choix des consommateurs, mais les PME auront-elles les moyens humains et financiers pour l'appliquer ? Un petit producteur de fromages ou de fruits pourra-t-il faire face, sans coût supplémentaire, à ces contraintes ? La compétition économique ne sera-t-elle pas faussée, sachant que tous les pays n'imposent pas les mêmes exigences à leurs producteurs, loin s'en faut ? Les fruits espagnols, l'agneau néo-zélandais sur nos étals afficheront-ils un prix carbone ?
Par ailleurs, dans des collectivités qui font depuis longtemps des efforts importants en matière de tri, l'augmentation de la TGAP risque de décourager nos concitoyens qui voient augmenter sans cesse le prix de leur poubelle, alors qu'ils trient de plus en plus !
Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État. - Vous avez adopté, dans la loi Grenelle II, un amendement précisant que l'étiquetage carbone devait tenir compte des spécificités des très petites entreprises. Nous installons, dans le cadre d'une plate-forme Ademe-Afnor, des outils « clés en main », notamment une base de données carbone accessible à tous. Les expériences sont concluantes. Les produits importés seront bien entendu soumis aux mêmes exigences. Nous ne sommes pas seuls à nous lancer dans le prix écologique : le Royaume-Uni, l'Allemagne et la Hongrie en font autant. Nous travaillons au niveau européen à une normalisation du prix écologique.
Sur la TGAP, le fonds Ademe favorisera les collectivités locales qui se sont dotées d'objectifs volontaires car la redistribution sera fonction du niveau de réduction des déchets et de recyclage.
M. Gérard Bailly. - Je reste dubitatif : quid des produits venant de Chine ou d'ailleurs ? N'allons pas encore fâcher les producteurs français !
Vous n'avez répondu que partiellement à ma deuxième question : le prix de la poubelle s'envole, et je crains que nos concitoyens ne se découragent.
Mme Évelyne Didier. - Les politiques de gestion des déchets ne s'attachent pas assez à réduire le problème à la source, par l'éco-conception. La récente campagne de communication de l'Ademe préconise de réduire les emballages en préférant les produits grand format aux portions individualisées. Or l'offre en la matière est très limitée, voire inexistante, alors que les portions individualisées, entourées de moult emballages, foisonnent dans les rayons. Elles offrent une marge bien supérieure, d'autant que les suremballages incitent le client à acheter trois tablettes de chocolat plutôt qu'une...
On ne peut se contenter de ces injonctions culpabilisantes, alors qu'aucune alternative sérieuse n'est proposée, car la grande distribution n'a pas intérêt à réduire les emballages ! Quelles mesures, fiscales ou autres, envisagez-vous pour développer l'éco-conception et limiter les emballages ?
Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État. - Le prix carbone des produits tient compte de l'emballage, très discriminant, et favorise les produits français.
Nous sommes en train de revoir la convention signée avec la Fédération du commerce et de la distribution pour inciter au développement des emballages familiaux. Les produits les moins suremballés seraient moins attractifs ; il faut donc un accord entre l'ensemble des producteurs pour que cela fonctionne.
La réflexion sur un dispositif de type bonus-malus est en cours, mais il ne faudrait pas se retrouver avec un bonus pour un public aisé et un malus pour un public plus défavorisé !
Mme Évelyne Didier. - Merci des ces précisions intéressantes. Le « prix carbone » sera-t-il suffisamment incitatif pour modifier la conception même des produits ? C'est tout l'enjeu du travail qui nous reste à accomplir.
M. Marcel Deneux. - Compte tenu des objectifs du Grenelle de l'environnement et l'engagement de la France à réduire ses émissions de gaz à effet de serre, il faut prêter une attention toute particulière au secteur automobile. Les fluctuations du cours du pétrole ont amené depuis plusieurs années les constructeurs, principalement étrangers, à développer des modèles hybrides. Les mesures de soutien à l'innovation ont conduit les industriels français à investir eux aussi dans les véhicules propres, notamment électriques : La Poste utilise depuis plusieurs années 500 automobiles de ce type.
Mais l'État n'a jamais encouragé la commercialisation de ces véhicules auprès du grand public. On estime aujourd'hui à 5 ou 10 % la part des véhicules électriques en France en 2020. Certes M. Bailly, le président de La Poste, a reçu une lettre de mission facilitant l'achat par les administrations et services publics de 50 000 véhicules de ce genre. Un appel d'offres devrait être lancé au début de l'année prochaine. Aujourd'hui, tous les constructeurs installés en France commencent à développer des prototypes. Une politique active de bonus-malus et de subventions bien relayée par les constructeurs a montré que l'on peut faire baisser le niveau moyen de CO2 des véhicules vendus.
Mais tout cela ne suffira pas, car la plupart des véhicules continueront longtemps encore à consommer des énergies fossiles. Pour gagner la bataille du véhicule propre, il faut agir sur tout le parc automobile et pas seulement sur les engins les plus en pointe. Comment le Gouvernement entend-il favoriser le développement des véhicules propres et des hybrides, atteindre les objectifs d'incorporation de biocarburants, parvenir comme promis à réduire les émissions moyennes à hauteur de 95 grammes de CO2 par kilomètre et lutter plus généralement contre l'ensemble des gaz à effets de serre ?
Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État. - Notre politique n'est plus orientée spécifiquement vers certaines filières, comme c'était le cas auparavant : nous nous sommes fixés un objectif en terme d'émissions de gaz à effet de serres et nous tentons de l'atteindre par tous les moyens, c'est-à-dire à la fois en encourageant la recherche pour améliorer les moteurs thermiques grâce au fonds démonstrateur, en instituant un bonus-malus fondé sur le grammage de CO2 et non sur les technologies utilisées, en favorisant le renouvellement du parc existant et en appliquant les nouvelles normes européennes qui fixent un niveau maximal de gaz à effet de serre émis.
M. Marcel Deneux. - Merci de cette réponse. Je souhaitais mettre en valeur cet aspect de la politique gouvernementale. (Rires sur les bancs socialistes)
M. Daniel Raoul. - On parlait depuis longtemps de la fusion de l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments (Afssa) et de l'Agence française de sécurité sanitaire de l'environnement et du travail (Afsset). La décision a été prise lors de l'adoption de la loi Hôpital, santé, patients et territoires : la nouvelle Agence de sécurité sanitaire (A2S) verra le jour le 1er juillet 2010.
Les inquiétudes sont vives au sein des agences : c'est bien naturel à l'annonce d'une réorganisation, d'autant plus que la logique de la RGPP devrait conduire à des réductions d'effectifs.
En outre, les syndicats, ainsi que les associations de protection de l'environnement et de défense des victimes de l'amiante et des accidentés du travail, s'interrogent sur l'indépendance de la future entité, qui sera soumise à la tutelle de cinq ministères : pensez au nombre de représentants de l'État au conseil d'administration ! Le budget de l'A2S sera-t-il l'addition de ceux des deux agences précédentes ? L'expertise de l'Afsset est précieuse, notamment dans le domaine des champs électromagnétiques ; la nouvelle agence aura-t-elle les moyens de remplir des missions de plus en plus vastes, qui concernent par exemple la sécurité au travail ? Pouvez-vous, madame la ministre, rassurer le personnel des agences et les acteurs du monde socio-économique ?
Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État. - M. Marc Mortureux, directeur général de l'Afssa, a préfiguré ce projet. Les missions des deux agences seront préservées et garderont leur spécificité ; nous tenons tout particulièrement à l'autonomie et à la visibilité de la mission environnementale. En revanche, les deux conseils d'administration seront agrégés, de manière à ce que chacune des deux entités soit convenablement représentée. M. Thierry Thuot, conseiller d'État, prépare un projet d'ordonnance qui garantira la visibilité des missions et des moyens de la nouvelle agence ainsi que son indépendance. L'indépendance d'une agence de sécurité sanitaire repose d'abord sur son organisation et sur sa capacité à faire entendre une expertise pluraliste.
M. Daniel Raoul. - J'attends de voir ce qu'il en sera. L'indépendance des autorités que nous créons presque dans chaque loi n'est pas toujours bien assurée. J'aimerais d'ailleurs que les compétences de l'Afsset, ou de l'organisme qui la remplacera, soient étendues aux questions socio-économiques. Nous avons pu constater, lors du Grenelle des ondes, que les problèmes scientifiques et techniques n'occupaient pas toute la place : il fallait également prendre en compte les problèmes liés aux rapports entre science et société.
Hommage à une personnalité étrangère
M. le président. - Notre collègue M. Michel Bécot a reçu aujourd'hui, en notre nom, M. l'ambassadeur du Pakistan, qui se trouve actuellement dans la tribune officielle. Nous saluons M. l'ambassadeur et lui témoignons notre haute considération. (Mmes et MM. les sénateurs et les ministres se lèvent)