Application des articles 34-1, 39 et 44 de la Constitution (Suite)
M. le président. - Nous poursuivons l'examen du projet de loi organique, adopté par l'Assemblée nationale, relatif à l'application des articles 34-1, 39 et 44 de la Constitution.
Discussion générale (Suite)
M. Hugues Portelli. - (Applaudissements au banc des commissions) La dernière révision de la Constitution a marqué un tournant dans l'histoire de nos institutions. Après un demi-siècle de subordination, le Parlement a reconquis une influence déterminante : les chambres ont retrouvé la maîtrise de leur ordre du jour ; les commissions ont été réhabilitées puisque c'est le texte qu'elles auront adopté qui sera débattu en séance ; le Règlement des assemblées a retrouvé son rôle dans l'organisation de leurs travaux. Le Sénat, à l'initiative de son président, a d'ores et déjà entamé sa réflexion sur la refonte de son Règlement et il est sur la voie d'un consensus.
C'est au Règlement qu'il incombe de mettre en oeuvre les nouvelles dispositions de la Constitution. La loi organique n'est qu'un lien entre ces deux textes et ne peut se substituer ni à l'un ni à l'autre. Elle doit pouvoir s'appliquer, quelle que soit la majorité, dans l'une ou l'autre des assemblées.
Le texte voté par l'Assemblée nationale comprend plusieurs dispositions qui relèvent davantage du Règlement que de la loi organique ; il est en outre très marqué par la logique majoritaire propre à l'Assemblée nationale, dont la majorité forme, avec le Gouvernement, un ensemble politique indissociable.
Les articles portant sur les résolutions n'appellent aucune réserve de notre part, surtout dans la version améliorée qu'en propose le rapporteur. Si le droit de résolution permet d'éviter le vote de lois dépourvues de toute portée normative, les résolutions ne doivent pas devenir un cheval de Troie permettant une mise en cause détournée et inconstitutionnelle du Gouvernement.
Quant aux conditions de dépôt des projets de loi, la présentation d'études d'impact répond à l'objectif louable d'une évaluation a priori. Mais ces études doivent se concentrer sur l'essentiel, c'est-à-dire situer le projet dans le contexte des lois en vigueur et non pas être des dossiers technocratiques que personne ne lirait et dont nul ne pourrait contrôler la véracité. La version allégée proposée par M. le rapporteur nous semble plus conforme à l'esprit de l'article 39 de la Constitution que celle, pléthorique, de l'Assemblée nationale.
Les dispositions relatives au droit d'amendement ont mobilisé l'énergie de nos collègues députés. Mais en laissant inchangé l'article 31 de la Constitution, qui prévoit que les membres du Gouvernement sont entendus lorsqu'ils le demandent, y compris en commission, les constituants de 2008 n'ont pas voulu changer les règles coutumières, consolidées par les Règlements des assemblées, selon lesquelles les membres du Gouvernement ne peuvent être présents lors du vote en commission, même si c'est désormais le texte de la commission qui sera examiné en séance. Le Gouvernement dispose, pour défendre son point de vue, de tout l'arsenal du parlementarisme rationalisé. Nous soutenons donc la position de M. le rapporteur qui renvoie au Règlement des assemblées le soin de fixer les modalités d'application du droit d'expression du Gouvernement.
Nous considérons également que le droit d'amendement, qui n'a pris en France, depuis 1958, une forme proliférante qu'en réaction à la suppression du droit d'initiative législative -heureusement partiellement rétabli en 2008-, n'implique pas le droit d'abuser du temps de parole accordé aux parlementaires pour présenter leurs amendements et expliquer leurs votes. L'Assemblée nationale a cru devoir adopter un dispositif empêchant ces abus, mais une lecture attentive révèle que les articles 13 bis et 13 ter contredisent l'article 13 et le vident de sa substance. (Mimiques dubitatives au banc des commissions et du Gouvernement)
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. - Pas tout à fait !
M. Hugues Portelli. - Dès lors que cet article ne s'appliquera pas au Sénat, nous ne voyons pas d'objection à ce qu'il demeure comme vestige d'une bataille inutile entre députés.
La révision de la Constitution et celle des Règlements des assemblées peuvent sonner le réveil de l'institution parlementaire. A nous d'en tirer parti sans nous attarder outre mesure sur cette loi organique, qui n'est qu'un point de passage obligé et que nous appliquerons dans l'esprit qui est et demeurera le nôtre. (Applaudissements à droite et au banc des commissions)
M. Louis Mermaz. - Le Président de la République avait fixé pour objectif à la révision constitutionnelle du 21 juillet dernier le rééquilibrage des pouvoirs entre l'exécutif et le législatif. Quelques mois plus tard, nous assistons à une entreprise de mise au pas du Parlement : je ne reviendrai pas sur le magistral exposé de M. Frimat. L'article 44 de la Constitution de 1958 dispose que « les membres du Parlement et le Gouvernement ont le droit d'amendement » : on écrivait jadis dans un style infiniment plus clair et plus sobre qu'aujourd'hui ! Mais la dernière révision y a ajouté le codicille suivant : « Ce droit s'exerce en séance ou en commission selon les conditions fixées par les Règlements des assemblées, dans le cadre déterminé par une loi organique ». Dès l'été, le piège était en place : l'exercice du droit d'amendement serait désormais encadré, et bien encadré, par une loi organique et de nouveaux Règlements dont la rédaction était laissée au bon vouloir de la majorité des deux chambres.
Il ne s'agit pas d'une simple question de technique parlementaire, éloignée des préoccupations du pays à l'heure où le chômage, la précarité et la pauvreté s'accroissent tragiquement. La politique forme un tout : lorsque les droits du Parlement sont remis en cause, les libertés et les droits sociaux sont aussi menacés.
Le Gouvernement s'attaque de deux façons aux droits du Parlement : il déclare l'urgence sur presque tous les projets de loi, nuisant ainsi à la qualité du travail législatif ; il soumet les assemblées à une avalanche de projets, ce qui réduit le contrôle de l'exécutif à presque rien. Parmi ces projets, il fait un tri : certains relèvent de l'effet d'annonce et sont destinés à n'entrer jamais en application ; d'autres en revanche, d'inspiration répressive ou rétrograde, sont bien appliqués. Les libertés sont mises à mal par le durcissement constant du code pénal et du code de procédure pénale, le recours de plus en plus fréquent à toutes les formes d'enfermement -prison, garde à vue, rétention des sans-papiers, hospitalisation sans consentement-, le fichage des citoyens, les pressions exercées sur la presse, la mise au pas des responsables des administrations et la réduction des moyens des services publics.
Alors que la situation économique et sociale empire, le Président de la République tourne le dos à la réalité et s'enferme dans un monologue incantatoire, décidant de tout sans tenir compte des corps intermédiaires et cherchant à confiner le Parlement dans un rôle d'enregistrement. Un jour, il annonce la suppression de la publicité sur les chaînes publiques de télévision et la nomination par lui-même du président de France Télévisions ; un autre jour, la suppression des juges d'instruction, celle de la taxe professionnelle ou le retour de la France dans le commandement militaire intégré de l'Otan... Que devient le prétendu rééquilibrage des pouvoirs ?
Sans vouloir me livrer à des comparaisons anachroniques et superficielles, Bonaparte disposait au sein d'un maquis d'institutions parlementaires d'un Corps législatif qui votait les lois sans pouvoir en discuter. Mutatis mutandis, la démarche de l'exécutif est aujourd'hui la même. L'article 13 du projet de loi organique invite les assemblées à se doter d'un Règlement qui permettrait de limiter la durée des débats et le temps de parole des parlementaires. Devant la colère légitime de l'opposition à l'Assemblée nationale, la majorité a adopté quelques modifications de pure forme à l'article incriminé. M. le rapporteur a proposé des amendements, qu'il maintiendra ou non, au gré du Gouvernement...
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. - C'est mal me connaître !
M. Louis Mermaz. - ...mais il s'est bien gardé de toucher à l'article 13, qui reste couvert des fioritures et des déguisements dont l'Assemblée l'a paré.
Vous avez d'ailleurs inventé une formule extraordinaire pour dire qu'il ne fallait surtout pas empêcher l'Assemblée nationale d'adopter un Règlement qui priverait l'opposition de la parole.
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. - Je n'ai pas dit ça !
M. Louis Mermaz. - Le Gouvernement -la bonne âme !- dit qu'il veut améliorer le fonctionnement et l'image du Parlement. Devant un tel aplomb, on est tenté de lui demander de quoi il se mêle !
M. Roger Karoutchi, secrétaire d'État. - C'est lui qui élabore les projets de loi.
M. Louis Mermaz. - L'obstruction n'a empêché aucun gouvernement sous la Ve République d'obtenir l'arsenal législatif qu'il souhaitait, sauf à y renoncer lui-même lorsque le prolongement des débats lui avait donné le temps de comprendre qu'il risquait de se fourvoyer, « de se planter » aurait dit le président Obama. On sait comment la loi sur le CPE a fini sa carrière.
Voix socialiste. - La loi Devaquet !
M. Roger Karoutchi, secrétaire d'État. - Il y en eut d'autres...
M. Louis Mermaz. - Tous les groupes de l'Assemblée nationale, sans exception, ont eu recours à de telles manoeuvres de retardement, comme cela se produit dans les grandes démocraties. Cela s'est passé à de rares moments, lorsque les sujets abordés avaient un écho important au moins dans une large fraction de la population. Je pense notamment au projet de loi Sécurité et liberté en 1980, aux nationalisations et à la décentralisation en 1981 et 1982, à la remise en cause de la loi Falloux, à l'avenir des retraites, à l'audiovisuel public, enfin au présent texte, qui aurait été voté dans l'indifférence n'était la réaction des députés d'opposition.
Lorsque la gauche a été majoritaire à l'Assemblée nationale, elle n'a porté aucune atteinte au droit d'amendement, qui offre à tous les parlementaires la possibilité de peser sur la confection des lois, quasiment toutes issues de projets gouvernementaux. De 1981 à 1986, l'opposition s'est manifestée à l'Assemblée nationale avec vigueur, voire avec acharnement. Face à ces rudes batailles parlementaires, la faiblesse eût consisté pour nous à brider cette opposition en modifiant le Règlement. Même si nous avions entrevu par impossible l'éventualité d'obtenir l'indispensable consensus des groupes, nous y aurions regardé à deux fois.
Le Sénat serait bien inspiré aujourd'hui de défendre les droits du Parlement dans son ensemble car la question n'est pas de savoir si l'on pourra continuer de s'exprimer à satiété dans l'atmosphère feutrée du palais du Luxembourg, à l'abri des grands emportements : la défense des prérogatives de tous les parlementaires est l'affaire de tous car les libertés dans le pays sont en jeu.
Sans recourir à des formules emphatiques et sans invoquer la postérité, j'appelle sans illusion nos collègues à ne pas être ceux qui se seront inclinés, même si d'autres majorités rendront un jour justice au Parlement. (Applaudissements à gauche et sur certains bancs au centre)
M. Jean-Pierre Sueur. - Sur un sujet aussi grave que l'exercice de la démocratie, je suis consterné par les arguments entendus aujourd'hui.
On nous dit que l'article 13 de la loi organique ne servirait à rien.
M. Roger Karoutchi, secrétaire d'État. - Je n'ai pas dit ça.
M. Jean-Pierre Sueur. - Dans ce cas, il faut voter contre.
On nous dit que l'article n'était pas grave, car on s'arrangerait au Sénat. Je suis en colère lorsqu'on préfère de petits arrangements alors qu'une loi de la République est en jeu. La question est : le texte est-il fondé ou non ?
L'article 13 menace la démocratie !
M. Roger Karoutchi, secrétaire d'État. - Mais non !
M. Jean-Pierre Sueur. - Avec cet article, les Règlements parlementaires pourront limiter le droit d'amendement.
M. Patrice Gélard, vice-président de la commission. - Pas le droit d'amendement !
M. Jean-Pierre Sueur. - C'est vrai, mais ils pourront limiter le droit à la parole !
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. - C'est autre chose.
M. Jean-Pierre Sueur. - Vous prétendez benoîtement qu'il n'est pas important de pouvoir expliquer son vote. La loi organique peut conduire à voter des amendements et des articles dans un silence total, car une fois la limite de temps franchi, on voterait sans débat dix, vingt, trente amendements et dix, vingt, trente articles !
Je vous en conjure, ne votez pas ce texte : c'est une atteinte à la discussion parlementaire !
L'important, c'est l'idée que l'on se fait du Parlement. Certains jugent les débats sans intérêt ; d'aucuns s'ennuient. Tel n'est pas mon cas.
Ce qui compte, c'est que la représentation nationale ne soit pas victime d'un couperet afin que la discussion aille jusqu'à son terme. Le Parlement de la République élabore des textes normatifs, dans un débat contradictoire où sont exprimés les arguments et les convictions que chacun de nous porte dans son coeur et son esprit.
Dire qu'il faut contrôler le débat en le mettant dans une boîte traduit une certaine idée de la représentation nationale, encadrée et aseptisée.
Monsieur Karoutchi, vous qui êtes un parlementaire, vous connaissez l'importance du débat !
M. Roger Karoutchi, secrétaire d'État. - Certes !
M. Jean-Pierre Sueur. - Si cet article avait été transcrit dans le Règlement de l'Assemblée nationale, aucun des grands débats des trente dernières années n'aurait eu lieu, qu'il s'agisse des nationalisations, des privatisations, de l'audiovisuel, de l'université, de l'école, de la laïcité ou de la loi Falloux. Il y a quantité d'exemples ! L'obstruction n'a jamais empêché une loi d'être votée dès lors que l'exécutif et la majorité la souhaitaient. Pourquoi, dès lors, agir ainsi ? Parce que vous êtes mal à l'aise.
M. Roger Karoutchi, secrétaire d'État, et M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. - Pas du tout !
M. Jean-Pierre Sueur. - Si : je le sens. Ne votons pas ce qui ne sert à rien ! On nous dit qu'on s'arrangera, que l'article ne s'appliquera pas au Sénat, mais nous ne pouvons accepter un couperet pour l'Assemblée nationale.
Vous voulez encadrer et contrôler le fonctionnement du Parlement. Pour nous, le débat parlementaire est intéressant par la passion qui fait écho aux conflits, aux luttes sociales, aux convictions des uns et des autres, aux souffrances et aux débats éthiques. Nous devons y consacrer le temps nécessaire.
Pour nous, la passion démocratique et républicaine est au coeur du débat.
Il serait intéressant d'étudier le vocabulaire des orateurs qui veulent limiter la durée des discussions : ils présentent le débat comme quelque chose de malsain, de maladif. Ils veulent enfermer les argumentations dans des cases, des boîtes, des canaux ! Victor Hugo était là il y a quelque temps.
M. Roger Karoutchi, secrétaire d'État. - A une autre époque...
M. Jean-Pierre Sueur. - Lorsqu'il s'est exprimé contre la peine de mort, contre l'esclavage, pour le vote des femmes ou sur l'Europe, les ricanements devant ses discours sont restés dans l'histoire parce qu'il y avait un débat !
Même rénovée, la Constitution donne au Gouvernement et à sa majorité les moyens de mettre en oeuvre leur politique.
L'expression « parlementarisme rationalisé » n'est qu'une formule creuse car l'essence de la démocratie tient aux lois issues d'un débat contradictoire, passionné, ardent !
Vous voulez brider, encadrer, limiter : c'est une faute contre la démocratie, contre la République, à laquelle nous nous opposons avec la dernière énergie ! (Applaudissements à gauche et sur certains bancs au centre)
Mme Alima Boumediene-Thiery. - Nous sommes réunis aujourd'hui pour discuter de ce qui constitue le coeur de la réforme constitutionnelle votée cet été, cette réforme que le Gouvernement vend comme un pas vers la valorisation des droits du Parlement. Au premier rang des évolutions présentées comme positives se trouve le droit de déposer des résolutions. L'idée paraissait séduisante, lorsque nous l'avons votée cet été. Les assemblées pourraient voter des résolutions dans les conditions fixées par la loi organique. On aurait pu penser que la loi organique ne concernerait que les conditions de vote, et pas le nombre, le champ ou la recevabilité de ces propositions de résolutions.
L'article 34-1 n'énonçait qu'une limite : ces résolutions ne peuvent mettre en cause la responsabilité du Gouvernement. Il en va tout autrement aujourd'hui : le projet de loi organique transforme méthodiquement ces résolutions en un outil insipide dont on peine à évaluer la pertinence. La belle intention a donné naissance à une chimère sous le contrôle étroit du Gouvernement. Regardez les conditions draconiennes qui sont imposées pour leur recevabilité ! L'autonomie des assemblées parlementaires justifie, dans le strict respect de la Constitution, une certaine latitude concernant le champ de ces résolutions. Elles devraient être cet outil dont nous avons tant besoin pour exprimer sans normativité des positions opposées à celles du Gouvernement. Elles ne sont pas l'outil de la seule majorité parlementaire mais celui de tous les parlementaires.
Au lieu de quoi, la loi organique les soumet à un contrôle opaque, en vertu duquel le Gouvernement pourra, d'un revers de main, déclarer une proposition de résolution irrecevable. Pour un oui ou pour un non, elle ne sera même pas inscrite à l'ordre du jour de notre assemblée.
Des propositions de résolution qui s'opposent à la politique du Gouvernement seront-elles déclarées irrecevables au prétexte qu'elles mettraient en jeu la responsabilité du Gouvernement ? Critiquer une politique inique qui criminalise les pauvres, les étrangers, les précaires, est-ce mettre en jeu la responsabilité du Gouvernement ? S'il en va ainsi, c'est tout le parlementarisme qu'il faut revoir puisque la raison d'être d'une opposition, c'est justement de critiquer. Quelles résolutions seront recevables ? Seulement celles qui chanteront les louanges du Gouvernement ? A ce compte, les propositions de résolution s'entasseront sans que leur utilité soit jamais prouvée.
Voilà donc ce qui nous attend avec la procédure que vous nous proposez : un filet aux mailles tellement serrées que seuls le suivisme et l'indigence pourront filtrer !
Je note d'ailleurs l'empressement du président Hyest à compléter le dispositif de manière à ce que, si une proposition de résolution venait à filtrer, elle ne soit pas votée à la majorité absolue. Le mode de votation de ces résolutions est aussi important que les conditions de leur recevabilité. Or on nous prépare des résolutions votées à la majorité qualifiées !
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. - Pas du tout ! A la majorité simple !
Mme Alima Boumediene-Thiery. - C'est l'objet d'un amendement du rapporteur, qui supprime le mode de scrutin. La raison est simple : l'Assemblée nationale s'est entendue sur ce mode de scrutin parce que le Gouvernement y dispose d'une majorité confortable, ce qui n'est pas le cas ici. Je crains donc que le mode de scrutin nous revienne un jour, dans le Règlement, sous la forme d'une majorité qualifiée. L'article 34-1 fait directement référence aux conditions de vote des résolutions ; supprimer le mode de scrutin revient à amputer la loi organique d'une de ses raisons d'être. Je doute que cette suppression échappe à la vigilance du Conseil constitutionnel.
Pour illustrer le marché de dupes que vous nous proposez, je prendrai l'exemple d'une proposition de résolution qui serait déposée dans le cadre d'une niche parlementaire : le Gouvernement pourrait, sans même avoir à motiver sa décision, refuser à un groupe d'inscrire une proposition de résolution dans cette niche. Il compenserait ainsi ce qu'il aurait perdu du côté de la maîtrise de l'ordre du jour.
Dans le même esprit, nous refusons absolument que le Gouvernement puisse assister aux délibérations des commissions et y user de son influence. Je note, à cet égard, le courage de M. Mariani, conscient du danger que constitue une telle possibilité.
J'en viens au droit d'amendement pour vous dire que l'article 13 de ce projet de loi organique est scandaleux. Il est l'expression d'une défiance insupportable à l'égard du Parlement réputé incapable de se discipliner.
M. Patrice Gélard, vice-président de la commission. - C?est bien vrai !
Mme Alima Boumediene-Thiery. - L'article 40 de la Constitution n'y suffit pas, il faut aller encore plus loin et transformer le Parlement en classe d'école où l'on ne peut parler que si le maître l'a décidé. Ce tour de vis va contre les attentes des citoyens, qui nous demandent de porter dans cette enceinte des positions qui méritent un débat et un vote en séance publique. Les citoyens doivent savoir comment se fabriquent nos lois, quel est le poids de chacun dans son élaboration. En restreignant le droit d'amendement en séance publique, ce projet de loi organise ce qu'à Bruxelles, on nomme la comitologie : la loi se fera dans les couloirs plus que dans l'hémicycle et les citoyens n'auront plus droit de regard.
On nous dit que ce dispositif ne concerne pas le Sénat, où l'obstruction parlementaire n'existe pas. Mais alors pourquoi ne pas laisser chaque assemblée choisir sans loi organique la manière dont elle entend organiser ses débats ?
M. Patrice Gélard, vice-président de la commission. - Et la Constitution ?
Mme Alima Boumediene-Thiery. - Cet article 13 dégage des relents d'antiparlementarisme primaire. Qui vise-t-il ? Certainement pas les parlementaires de droite qui, bien sûr !, ne se sont jamais risqués à cet exercice. Le droit d'amendement ne concerne en fait que l'opposition ! Limiter notre droit d'amendement, c'est brimer notre indignation.
Comble d'une valorisation des droits du Parlement, cet épisode de l'article 13, est déjà derrière nous : avec le vote conforme de cet article, vous vous épargnez une nouvelle discussion en seconde lecture. Voilà votre conception des droits du Parlement : discuter d'une disposition déjà ficelée, qui ne souffrira d'aucune modification.
Pour toutes ces raisons, les sénatrices et sénateurs Verts ne voterons pas ce projet de loi organique. (Applaudissements à gauche)
M. François Rebsamen. - Même s'il faut prendre des précautions dans la présentation, même s'il faut faire preuve de pédagogie dans l'explication, personne ne contestera que notre pays, l'Europe et le monde sont confrontés à une crise financière et économique dont l'ampleur remet en cause les fondements du capitalisme. Des milliers d'emplois supprimés, des pans entiers du secteur industriel menacés, une sourde menace qui pèse sur des centaines de milliers de familles, l'inquiétude face à la montée du chômage, ce constat est tellement partagé que fleurit du côté de la majorité l'idée, certes tactique, qu'il faudrait une unité nationale à durée limitée pour faire face à la crise.
Nos concitoyens attendent en grand nombre que majorité et opposition unissent leurs efforts pour chercher des solutions concrètes face à la crise. On peut les comprendre : j'ai souhaité moi-même que s'élabore un vrai pacte de confiance et d'action entre l'État et les collectivités locales pour soutenir l'investissement. C'est le moment que choisit le Président de la République pour annoncer sans concertation la disparition de la taxe professionnelle, c'est-à-dire l'une des principales ressources des collectivités locales, qui réalisent à elles seules 75 % de l'investissement public.
Si l'on partage mon analyse, on en partagera les conclusions : seul un pays rassemblé peut surmonter une telle dépression. Il ne s'agit pas de minimiser l'erreur que constitue l'absence de mesures spécifiques pour soutenir le pouvoir d'achat et la consommation dans le plan gouvernemental, il s'agit de montrer quelles devraient être les voies d'une démocratie apaisée. La vraie, la seule question qui mérite d'être posée à propos de ce projet de loi est donc : pourquoi diviser, pourquoi provoquer l'opposition à un tel moment ?
Vous saviez très bien que l'opposition ne pouvait rester sans réagir face à des dispositions qui sont en contradiction avec un principe fondamental de la démocratie : l'existence de contre-pouvoirs.
Ces contre-pouvoirs sont aujourd'hui mis en cause dans l'audiovisuel public, la presse et les collectivités territoriales. Par parenthèse, c'est sans compter les révocations sans précédent dans la fonction publique, bien que celle-ci ne constitue pas, à proprement parler, un garde-fou.
Ah !, il est bien loin le temps où le Président de la République déclarait « je renforcerai les pouvoirs [du Parlement], notamment de l'opposition, parce que je ne veux pas gouverner seul et que je pense qu'une démocratie se protège des risques de dérive lorsqu'elle est capable d'organiser et d'accepter ses propres contre-pouvoirs. »
Prenons l'exemple des collectivités territoriales. Y en a-t-il trop ? Pour le Président de la République, il y a trop de collectivités... de gauche ! (M. Jean-Pierre Michel applaudit) Si l'association des maires des grandes villes de France, l'association des départements de France et l'association des régions de France étaient présidées par des élus de l'UMP, la question serait-elle même évoquée ? Certainement pas. A preuve, lorsque M. Sarkozy était ministre de l'intérieur avant 2004, il ne l'a jamais posée. Notre récente histoire électorale devrait pourtant vous inciter à plus de prudence, elle nous enseigne que les Français apprécient les contre-pouvoirs et les alternances.
Autre exemple : le Parlement. Si le droit d'amendement est effectivement encadré dans les autres démocraties européennes, monsieur Hyest, l'exécutif n'y dispose pas de prérogatives aussi étendues. (M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur, le conteste) Je pense d'abord au pouvoir de dissolution qui est conféré au Président de la République par l'article 16 de la Constitution, puis à la possibilité qui lui est donnée de s'exprimer devant le Parlement réuni en Congrès sans que celui-ci dispose d'un droit de réponse et, enfin, au 49-3 conservé au Gouvernement. Deux ans de mandat, et déjà Napoléon perce sous Bonaparte ! (Sourires) Le Président de la République et son Gouvernement font la sourde oreille aux revendications des grévistes comme à celles des députés de l'opposition, qui ont ouvertement dénoncé un texte bien en deçà de l'ambition affichée de rééquilibrer les pouvoirs au profit du Parlement. De fait, comble de l'ironie, ce texte revient même sur les principes parlementaires fondamentaux que sont le droit d'amendement et, comme l'a bien démontré notre rapporteur, le principe d'autonomie de chaque assemblée, voire la séparation des pouvoirs. Le Gouvernement marche sur un fil car, à dire vrai, une frontière ténue nous sépare d'un régime que l'on pourrait qualifier de césariste. Il y va de notre responsabilité de nous opposer à cette évolution. Pour rationaliser le débat parlementaire, pourquoi ne pas interdire, à l'article 11, au Gouvernement de déposer des amendements portant articles additionnels à ses propres textes ? (Murmures réprobateurs aux bancs de la commission et du Gouvernement) Si l'objectif du texte est d'imposer le silence au Parlement, que le Gouvernement le dise clairement ! De même, retirons au Gouvernement le droit d'assister aux réunions des commissions ; il y va de la liberté de débattre et de voter des parlementaires ! Battons-nous contre l'article 12 de ce texte, dont l'objectif est de priver les parlementaires du droit d'amendement en séance publique au prétexte de gagner du temps. Du reste, je rappelle qu'une mesure similaire avait été censurée par le Conseil constitutionnel en 1990 et que l'embouteillage du calendrier parlementaire est d'abord le fait du nombre et de l'ampleur des textes déposés par l'exécutif. Quant au temps global d'examen du texte, le point le plus débattu du projet de loi, puisque la majorité nous assure qu'il ne sera pas appliqué au Sénat, autant ne pas voter l'article 13 qui l'organise ! M. Frimat l'a fort bien démontré, ce sera la meilleure garantie !
M. Patrice Gélard, vice-président de la commission. - Certes !
M. François Rebsamen. - Animé par un désir frénétique de changement, notre Président de la République, césariste dans l'âme, pour ne pas dire en diable, s'attaque maintenant aux institutions. Mais le pouvoir parlementaire ne se négocie pas, non plus que la liberté de penser, devenue un crime de lèse-majesté. Je n'aurais pas la cruauté de rappeler les belles promesses de M. Sarkozy sur le statut des groupes minoritaires, le financement des partis politiques ou encore l'élargissement du droit d'enquête parlementaire. Il n'en reste rien ! Le dérèglement de notre système constitutionnel est à son comble. Il va falloir se battre parce que la démocratie, plus que des institutions et des procédures, consiste en des valeurs partagées, et notamment la libre expression des idées dans l'enceinte parlementaire dont le président du Conseil constitutionnel a rappelé toute l'importance... Le Sénat, qui a démontré sa capacité de résistance aux mesures contraires à notre tradition démocratique et républicaine, ne saurait souffrir que les droits des parlementaires soient balayés en un tournemain comme l'on révoque aujourd'hui les préfets. L'article 13 a pour seul but de scléroser la parole de l'opposition dans le débat parlementaire. Notre démocratie est le bien le plus précieux, continuons à la faire vivre en protégeant notre liberté d'expression !
Pour conclure, laissez-moi citer cette phrase d'un auteur que vous reconnaitrez sans peine : « les conquêtes [démocratiques] sont faciles à faire parce qu'on les fait avec toutes ses forces ; elles sont difficiles à conserver parce qu'on ne les défend qu'avec une partie de ses forces » ! (Applaudissements à gauche)
La discussion générale est close.
M. Roger Karoutchi, secrétaire d'État. - Je me réjouis que chaque intervenant ait exprimé ses convictions avec fermeté, mais sans agressivité. Les exhortations du président Hyest à débattre du fond ont été entendues.
Je me contenterai de revenir sur quelques points. Concernant les propositions de résolution, je ne partage pas le scepticisme de Mme Boumediene-Thiery. Ce nouveau droit accordé au Parlement s'exercera dans les conditions fixées à l'article 34-1 de la Constitution. Rassurez-vous, la majorité qualifiée ne pourra être requise puisque la loi organique ne le prévoit pas. Pour reprendre la définition qu'en a donnée M. Mercier, ces résolutions seront des voeux non contraignants, ce qui ne signifie pas qu'ils n'auront pas de portée. Il conviendra donc d'en faire un usage raisonnable, M. Portelli l'a souligné. Au reste, nous verrons comment cette procédure, que le Parlement n'a pas utilisée depuis cinquante ans, évoluera dans la pratique.
Les études d'impact, dont MM. Hyest et Gélard ont légitimement rappelé la douloureuse gestation, présentent un intérêt incontestable, reconnu par Mme Borvo Cohen-Seat elle-même malgré son appréciation très critique à l'égard de ce texte. A l'instar de MM. Mercier et Gélard, je pense que ces études d'impact doivent rester des instruments simples d'utilisation, conformes à la répartition des pouvoirs définie aux articles 34, 37 et 38 concernant les ordonnances. M. Frimat a cité Montesquieu, je ferai de même : « Les lois inutiles affaiblissent les lois nécessaires. » (Exclamations à gauche) Puissent les études d'impact nous aider à respecter ce précepte ! Contrairement à ce que d'aucuns affirment, ce gouvernement ne présente pas ses lois dans la précipitation : en témoignent la loi Hôpital, le Grenelle de l'environnement ou encore la loi sur le logement.
J'en viens au temps programmé qui bafouerait, selon Mme Borvo et les orateurs socialistes, le droit d'amendement. Je m'inscris en faux contre cette interprétation de l'article 13 qui, M. Mercier l'a souligné, ne crée par le temps programmé mais se contente de rendre possible sa mise en oeuvre. En tout état de cause, les amendements non présentés seraient mis aux voix. Sans verser dans le paradoxe, cet article 13 garantit donc le droit d'amendement, contrairement aux systèmes de clôture ou de guillotine qui empêcheraient le vote des amendements.
Permettez-moi de vous dire, monsieur Sueur, que l'obstruction n'a rien à voir avec le droit d'amendement, dont elle n'est qu'un dévoiement. Ce n'est pas le droit, c'est un abus de droit. Certains projets divisent, monsieur Rebsamen, et l'obstruction permettrait de porter le débat au-delà ? Mais elle est elle-même source de division puisqu'elle entrave le débat démocratique.
Sur l'article 11, monsieur le président Hyest, nous aurons un large débat. Le Gouvernement ne partage pas votre point de vue. Il estime nécessaire de tirer les conséquences du nouveau mode de fonctionnement des assemblées, qui donne une importance accrue aux travaux des commissions. Le Gouvernement n'entend pas y imposer son point de vue, ni y exercer sa surveillance, mais expliquer sa position sur les amendements. Sa présence en commission lui permettra de sortir de l'ombre qu'évoquait le doyen Gélard, et à laquelle il préfère la transparence. En tout état de cause, l'Assemblée nationale souhaite, semble-t-il, maintenir cette faculté et je souhaite que la rédaction que vous adopterez ne porte pas atteinte au principe d'autonomie cher à M. Portelli.
Prenons la mesure du changement : c'est le texte de la commission qui sera débattu dans l'hémicycle. Comment conserver, dès lors, la même appréhension qu'auparavant de la position du Gouvernement ? Il faut bien qu'à un moment, il puisse s'exprimer, comme il le faisait auparavant dans l'hémicycle, sur les amendements de la commission.
A vous en croire, monsieur Frimat, monsieur Mermaz, ce texte n'ouvrirait pas de nouveaux droits au Parlement. Que faites-vous du droit de résolution, des études d'impact ? Ce n'est pas rien. Et l'ordre du jour partagé ? Déjà, lors de la dernière Conférence des Présidents, j'ai eu le sentiment de voir les pouvoirs répartis. Et la discussion, dans l'hémicycle, du texte de la commission ?
M. Collin a défendu avec éloquence le droit individuel des parlementaires, qu'avait soutenu, à l'Assemblée nationale, M. Mariani, ainsi que l'a rappelé Mme Boumediene-Thiery. Mais l'article 13 bis, adopté à l'initiative du Nouveau centre, fait prévaloir les droits des groupes minoritaires et l'article 13 ter préserve le droit d'expression individuel du parlementaire.
M. Jean-Pierre Sueur. - A cause de l'article 13.
M. Roger Karoutchi, secrétaire d'État. - Cette procédure nouvelle doit permettre à chacun de s'exprimer clairement, au cours de débats plus lisibles pour le citoyen.
M. Jean-Pierre Sueur. - Les citoyens comprennent très bien.
M. Roger Karoutchi, secrétaire d'État. - Et c'est aux assemblées qu'il reviendra de la mettre en place, via leur Règlement.
M. Mercier a une nouvelle fois cité un auteur qu'il affectionne, Marcel Prélot. Je tiens à sa disposition l'édition 1957-1958 de son cours de droit dans lequel il affirme que c'est autour du droit parlementaire que gravite l'activité politique. Telle est bien l'ambition de la révision constitutionnelle, de cette loi organique et de la réforme, demain, de votre Règlement. Il s'agit de redonner vie à la politique en créant une nouvelle dynamique parlementaire. (Applaudissements à droite et au banc de la commission)
Exception d'irrecevabilité
M. le président. - Motion n°45, présentée par M. Michel et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
En application de l'article 44, alinéa 2, du Règlement, le Sénat déclare irrecevable le projet de loi organique, adopté par l'Assemblée nationale, relatif à l'application des articles 34-1, 39 et 44 de la Constitution (n°183, 2008-2009).
M. Jean-Pierre Michel. - Ce texte, en certaines de ses dispositions, et notamment son article 13, est, à notre sens, contraire à la Constitution. Nous sommes face à une entreprise systématique d'abaissement du Parlement : des résolutions qui ne passent pas en commission, un gouvernement présent à tous moments en commission, y compris dans les CMP, le droit d'expression des parlementaires dans la défense de leurs amendements, largement contraint.
Le Président de la République avait annoncé la réforme de juillet 2008 comme le moyen de renforcer les droits du Parlement. On en est loin ! Elle a d'emblée été bornée par la défense faite à la commission Balladur de discuter des modes de scrutin, du cumul des mandats, de l'irresponsabilité du chef de l'État, de son droit de dissolution. Bien au contraire, on lui permet de s'adresser aux assemblées, sans que les parlementaires puissent lui répondre. Il est vrai qu'il n'a pas usé de cette faculté et que, dans les circonstances difficiles d'aujourd'hui, il a préféré la voie de la télévision. Comprenne qui pourra !
Quant au maintien du vote bloqué comme de l'article 49-3, il permet à l'exécutif de contenir la volonté du Parlement.
La réforme prévoyait pourtant certaines avancées comme la constitutionnalisation des groupes politiques ou le partage de l'ordre du jour. Curieusement, monsieur le ministre, le Gouvernement n'a pas souhaité commencer par là. Il a préféré nous soumettre en priorité deux lois organiques, l'une pour permettre aux ministres de récupérer leurs sièges de parlementaires, et qui profitera peut-être en primeur au secrétaire général de l'UMP, l'autre, celle qui nous occupe aujourd'hui. Le reste est reporté aux calendes.
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. - Il y a des délais à respecter.
M. Jean-Pierre Michel. - Le Règlement de nos assemblées a d'ailleurs déjà été modifié pour limiter la durée des motions de procédures, donc mon temps de parole en ce moment... Et que dire de la pratique de cette législature ! Les déclarations d'urgence systématiques, le fait majoritaire, qui multiplie les votes conformes et fait des CMP de simples chambres d'enregistrement. C'est la conception des institutions du Président de la République, très nettement exprimée le 12 juillet 2007 à Épinal : « Si l'État, en France, doit obéir à la séparation des pouvoirs, ils ne sauraient être divisés en pouvoirs rivaux, qui se combattent, qui s'affrontent, qui s'affaiblissent l'un l'autre ». Mais la collaboration des pouvoirs telle qu'il l'entend aboutit à une confusion des pouvoirs, sous la tutelle de l'exécutif, comme le sont, en son sein, celle du secrétaire général de l'Élysée, le Gouvernement et son Premier ministre.
Cerise sur le gâteau, on revient sur le droit des parlementaires d'exprimer leur position personnelle à travers la défense d'amendements. Après près de trente ans de vie parlementaire, jamais je ne l'aurais imaginé ! Jean-Louis Debré, qui en avait eu la tentation, avait dû abandonner sous la pression des présidents de groupes, et notamment de l'actuel président de l'Assemblée nationale qui n'en est pas à un reniement près. Je sais, pour avoir été président de séance, ce qu'est l'obstruction parlementaire, je sais ce que sont les amendements en cascade mais je sais aussi ce qu'est la richesse du débat et de la confrontation. L'article 13 est contraire à l'article 44 de la Constitution qui dispose que « le droit d'amendement est individuel et personnel » comme est personnel, aux termes de l'article 27, le droit de vote, principe d'ailleurs confirmé par l'article premier de ce texte.
Et que dire des problèmes pratiques quasiment insolubles que posera son application ? Comment comptabiliser les suspensions de séance ? Les rappels au Règlement ? Comment mesurer le temps restant à mesure de l'avancement des travaux ? Faudra-t-il donc pourvoir notre hémicycle de cadrans électroniques géants ? Comment anticiper sur le déroulement, imprévisible, de la séance, fait d'accélérations mais aussi de temps d'arrêt, sur telle ou telle disposition ? Quid des amendements déposés à titre personnel ? Le fait est que l'adoption de ce texte ne permettrait plus au droit d'amendement de s'exercer qu'au travers des groupes politiques, ce qui est totalement contraire à l'esprit de la Constitution. Et ceci alors que le droit d'amendement du Gouvernement n'est pas encadré.
La liberté de la discussion parlementaire est incompatible avec le concept de forfait temps. Cette procédure va assécher le débat, transformer les assemblées en théâtre d'ombres, en simples greffes. Le débat sera verrouillé à l'avance.
Lorsqu'un groupe aura épuisé son temps de parole, il ne pourra plus défendre d'amendements. Or, un amendement appelé qui n'est pas défendu n'a aucune chance d'être adopté, surtout s'il vient de l'opposition. L'exercice du droit d'amendement est essentiel au débat démocratique car il permet à l'opposition de présenter ses contre-propositions. M. le ministre et M. le rapporteur vont me dire que cela reste optionnel...
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. - Je n'ai encore rien dit !
M. Jean-Pierre Michel. - ...et que notre groupe de travail n'a pas l'intention d'introduire une telle disposition dans notre Règlement. Alors, me dira-t-on, pourquoi s'alarmer puisque cela n'existera qu'à l'Assemblée ? D'abord, nous ne légiférons pas que pour nous-mêmes, et ensuite, le titre IV de la Constitution s'intitule Le Parlement. L'alinéa 2 de l'article 24 précise qu'« il comprend l'Assemblée nationale et le Sénat ». Ces deux chambres forment donc une entité qui édicte des règles semblables pour le statut des parlementaires et pour l'organisation des débats. L'article 28 de la Constitution prévoit simplement que chaque chambre peut fixer ses semaines de séance et déterminer les jours et les horaires pendant lesquels elle siègera. Il s'agit donc de dispositions mineures au regard de la liberté d'expression des parlementaires.
Peut-on concevoir que, sur un sujet aussi fondamental que l'organisation de nos débats, les Règlements de nos deux assemblées diffèrent et que la liberté d'expression des parlementaires soit bridée au Palais Bourbon et plus libérée ici ? Le Conseil constitutionnel l'accepterait-il, lui qui tend à unifier les Règlements de nos deux assemblées sur des problèmes importants, comme l'application de l'article 40 où le Sénat a été sommé de suivre la procédure en vigueur à l'Assemblée nationale ? J'espère que le Conseil constitutionnel saura se faire entendre en n'acceptant pas un traitement différent entre les deux chambres.
Autre disposition non conforme à la Constitution : l'article 3 introduit une confusion entre les compétences du Gouvernement, c'est-à-dire les décisions prises en conseil des ministres et celles du Premier ministre.
M. Patrice Gélard, vice-président de la commission. - C'est corrigé !
M. Jean-Pierre Michel. - En fait, ce projet de loi organique vise à assurer la concordance des temps entre celui du Président de la République et celui du Parlement. En effet, l'horizon du chef de l'État ne dépasse pas une journée : c'est l'annonce, la carte postale, l'écran de télévision, le déplacement en province ou à l'étranger, c'est une réforme annoncée, qui ne sera peut-être pas réalisée, c'est une déclaration qui sera contredite par les dures réalités de la vie, ou de la crise. Le temps du Parlement, c'est l'analyse et l'évaluation des textes, ce sont les auditions qui permettent des contre-expertises, c'est la confrontation entre la majorité et l'opposition qui fait vivre la démocratie, c'est la délibération collective qui permet de corriger, d'amender et d'améliorer la copie forcément imparfaite du Gouvernement. C'est aussi le temps des commissions, sans la présence des ministres, puis des débats publics dans l'hémicycle en présence du Gouvernement, des motions de procédure, de la discussion générale, mais surtout des débats d'amendements qui permettent l'interpellation directe : Gouvernement, commissions, majorité, oppositions, chacun est placé devant ses responsabilités, parfois devant ses contradictions. Et c'est cela que vous voudriez supprimer !
Sans Parlement, que serait la vie politique ? Une suite de monologues. Où aurait lieu la confrontation ? Dans la rue ? Est-ce vraiment cela que souhaitent le Président de la République et le Gouvernement ? La seule question qui vaille, c'est bien celle de la revalorisation de nos travaux. Or, ce projet de loi n'y contribuera pas, bien au contraire. (Applaudissements à gauche)
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. - J'ai écouté avec la plus grande attention la défense de cette exception d'irrecevabilité.
M. Bernard Frimat. - Et je suis convaincu ! (Sourires)
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. - Pas vraiment ! Ce projet de loi organique sera soumis à l'examen du Conseil constitutionnel. Certains de vos arguments me paraissent faibles, en dehors des critiques sur le Président de la République.
M. Jean-Pierre Bel. - La parole est libre !
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. - Certes, mais je n'ai jugé intéressant que ce qui était dit sur la motion.
L'encadrement de la durée des débats ne soulève pas de difficultés constitutionnelles. L'article 49 du Règlement de l'Assemblée avait prévu un tel dispositif jusqu'en 1969 et le Conseil constitutionnel avait été appelé à se prononcer sur la conformité de ce Règlement à la Constitution au début de la Ve République. Votre argument ne tient donc pas.
M. François Rebsamen. - Le Président de la République n'était alors pas élu au suffrage universel.
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. - Peu importe !
Quant à l'exercice du droit d'amendement, il découle de l'article 44 de la Constitution.
Sur un seul point, monsieur Michel, je vous donne raison : sur la confusion entre le Gouvernement et le Premier ministre. Mais nous allons la corriger.
Pour le reste, je ne vois pas de raison de voter cette exception d'irrecevabilité. (Applaudissements à droite)
M. Roger Karoutchi, secrétaire d'État. - En répondant aux orateurs, j'ai déjà dit ce que je pensais de ces arguments. Au début de votre intervention, monsieur Michel, vous avez reproché au Gouvernement de ne pas traiter de la question de l'ordre du jour partagé. Le Sénat obtiendra ce pouvoir dans quinze jours et nous n'avons pas besoin d'un texte supplémentaire.
Pour le reste, je ne vois pas en quoi ce projet de loi organique serait inconstitutionnel. Comme l'a rappelé M. Hyest, le Conseil constitutionnel sera automatiquement saisi et nous disposerons donc de son analyse. Concernant la présence des membres du Gouvernement en commission, il accompagnera probablement sa décision d'une interprétation.
M. Michel Mercier. - La connaissez-vous ?
M. Roger Karoutchi, secrétaire d'État. - Pour le reste, avis défavorable.
Mme Josiane Mathon-Poinat. - Je profite du temps qui nous reste pour expliquer notre vote.
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. - Profitez-en !
Mme Josiane Mathon-Poinat. - Notre groupe votera cette exception d'irrecevabilité. L'article 13 de la loi organique est une utilisation de la Constitution et non pas son application. Rien n'obligeait à inscrire dans la loi organique des dispositions relatives au temps global de discussion, ce 49-3 parlementaire, cette autocensure du Parlement. Les groupes de travail de réforme du Règlement tant à l'Assemblée nationale qu'au Sénat n'ont jamais envisagé une telle disposition. C'est seulement avec la publication de l'avant-projet de loi organique que le débat s'est ouvert.
Depuis la révision de la Constitution, les amendements peuvent être adoptés en commission ou en séance publique. Cette modification favorise la discussion en commission mais respecte aussi le droit constitutionnel de présentation en séance publique de l'amendement, droit affirmé par la décision du Conseil constitutionnel du 7 novembre 1990. La question était alors de savoir si un amendement présenté en commission ne pouvait plus, comme le proposait une modification du Règlement du Sénat, être défendu en séance. Le Conseil constitutionnel avait alors estimé qu'une telle disposition ne respectait pas « l'exercice effectif du droit d'amendement ».
La révision de la Constitution du 23 juillet 2008 prévoyait qu'un amendement déposé et défendu en commission pouvait ne pas l'être en séance publique. Cette piste, qui a été envisagée par certains, s'est avérée impossible à mettre en oeuvre puisque si l'amendement n'a pas été déposé en commission, il ne pourra pas l'être en séance publique. L'article 13 du projet de loi est donc manifestement anticonstitutionnel puisqu'il ne respecte pas l'exercice effectif du droit d'amendement, droit imprescriptible, inaliénable dont chaque parlementaire est dépositaire : l'amendement doit être présenté, débattu, soumis au vote s'il n'est pas jugé irrecevable.
De plus, est-il envisageable que le Règlement de l'Assemblée nationale, assemblée élue au suffrage universel direct, remette en cause le droit d'amendement en séance publique alors que ce ne serait pas le cas au Sénat ? Le professeur Jean Gicquel l'a souligné à deux reprises lors de son audition en commission des lois : il ne peut y avoir de différences entre les Règlements des deux assemblées sur un point aussi crucial que celui du droit d'amendement. Qu'il y ait des différences sur les suspensions de séance, les procédures ou la demande de quorum, pourquoi pas, mais le droit d'amendement concerne le fondement même de l'exercice parlementaire. (Vifs applaudissements à gauche)
M. Bernard Frimat. - C'est gentil de nous rappeler que la loi organique sera transmise au Conseil constitutionnel mais cela n'avait pas échappé à notre vigilance. Nous savons que le Conseil lira nos débats : nous tenons à nous faire entendre.
On l'a dit sur la première loi organique. « Circulez, il n'y a rien à voir », nous expliquait alors la commission, mais le Conseil constitutionnel a censuré plusieurs dispositions et en a assorti d'autres de réserves importantes qui rendront notamment le découpage plus acceptable. Il y a intérêt à débattre et, comme nous avons le droit de parler, nous allons en user et exprimerons notre vote sur les deux premières motions, le Règlement nous rendant muets sur la troisième.
L'article 44 de la Constitution, qui affirme le droit d'amendement, est le texte le plus élevé dans la hiérarchie des normes. Si ce droit est individuel, l'appartenance à un groupe n'est pas obligatoire et certains parlementaires n'appartiennent à aucun groupe. Que devient leur droit de déposer et de défendre des amendements ? Les souffreteux articles 13 bis et 13 ter renvoient leurs explications à la fin du débat. C'est une plaisanterie ! Donner un délai, c'est limiter la capacité de défendre des amendements. Accordera-t-on généreusement un quart d'heure aux non-inscrits ? On limitera le nombre d'amendements qu'ils pourront défendre. Oh !, ils pourront bien en déposer, mais dans le formol, et ceux qu'ils pourront présenter, ils les expliqueront dans un silence sépulcral ou, plutôt, agité.
Si on n'est pas un clone, un robot qui a renoncé à penser, on veut pouvoir défendre ses amendements et convaincre. Combien de fois le débat a permis un accord ? Cela ne va pas être facile quand nous ne pourrons plus nous exprimer. Voilà pourquoi l'article 13 est attentatoire. Vous nous dites « je vous fais peur mais je ne tirerai pas et mon fusil est chargé à blanc ». Est-ce respecter le droit d'amendement que d'empêcher de les défendre ? Pour nous, c'est non. Le Conseil constitutionnel tranchera et nous lirons sa décision avec intérêt. (Applaudissements à gauche)
La motion n°45 est mise aux voix par scrutin public.
M. le président. - Voici les résultats du scrutin :
Nombre de votants | 337 |
Nombre de suffrages exprimés | 337 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 169 |
Pour l'adoption | 149 |
Contre | 188 |
Le Sénat n'a pas adopté.
Question préalable
M. le président. - Motion n°25, présentée par Mme Borvo Cohen-Seat et les membres du groupe CRC-SPG.
En application de l'article 44, alinéa 3, du Règlement, le Sénat décide qu'il n'y a pas lieu de poursuivre la délibération sur le projet de loi organique, adopté par l'Assemblée nationale, relatif à l'application des articles 34-1, 39 et 44 de la Constitution (n°183, 2008-2009).
Mme Éliane Assassi. - La réforme constitutionnelle votée d'une courte tête...
M. Jean-Pierre Bel. - Laquelle ?
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. - Les trois cinquièmes...
Mme Éliane Assassi. - ...a prévu nombre de lois organiques. L'ordre de leur présentation n'a rien d'anodin. Ce n'est pas par hasard si la première a traité du retour au Parlement des ministres ; si la deuxième met radicalement en cause le droit d'amendement ; si des trois dispositions qui nous sont proposées aujourd'hui, la réduction du droit d'amendement doit être la première à s'appliquer : les quelques modifications susceptibles de relever un tant soit peu le Parlement sont renvoyées à une date ultérieure. Il est singulier, enfin, que le Gouvernement n'ait pas attendu les conclusions des groupes de travail chargés de préparer la révision du Règlement des deux assemblées. Difficile dans ces conditions de croire qu'on a voulu revaloriser le rôle du Parlement. Quel manque de respect et de considération !
S'agit-il vraiment de brider l'exécutif ou n'est-ce pas plutôt l'inverse ? Les innovations sur les résolutions parlementaires et sur les études d'impact servent surtout d'alibi à la mise en cause frontale du droit d'amendement, que notre président décrit pourtant comme imprescriptible. L'article 44-1 offre aux parlementaires la possibilité de proposer une résolution mais cette avancée apparaît bien formelle, singulièrement pour l'opposition, tant ses conditions de mise en oeuvre en limitent la portée. Le Gouvernement ne sera entendu qu'à sa propre demande et pourra s'y opposer s'il estime que la demande constitue une injonction ou met en cause sa responsabilité. Avec ce pouvoir excessif de l'exécutif, le droit de résolution se limitera en pratique à celles que le Gouvernement aura acceptées et qui ne seront que de simples voeux... Aucune revalorisation du Parlement dans cette procédure dont l'opposition est écartée : la démocratie n'a rien à y gagner.
Nous avons quelques craintes sur l'article 39. On ne peut s'opposer à ce que les projets comportent un exposé des motifs ou soient accompagnés d'une étude d'impact mais on peut avoir des doutes sur les intentions du Gouvernement, plusieurs projets n'étant pas soumis à cette dernière obligation.
Le contenu de ces études doit être précisé et élargi. En tout état de cause, c'est une avancée marginale.
Pour justifier le temps global, la droite invoque l'obstruction. Le temps du débat en séance publique est pourtant un gage de qualité du travail législatif, mais ce temps n'est pas celui du Président de la République, qui confond action et agitation. A chaque jour son annonce, à chaque fait divers sa loi. Nous sommes en pleine inflation législative : seize textes sécuritaires ont été adoptés entre 2002 et 2008, et cinq autres sont annoncés ! Au cours de la session 2007-2008, 55 textes ont été adoptés définitivement, contre 46 en 2006-2007. Citez-moi un texte qui n'ait pas été définitivement adopté en raison de l'obstruction !
M. Jean-Pierre Bel. - Bonne question.
Mme Éliane Assassi. - Les seuls qui n'aboutissent pas sont les textes d'origine parlementaire dont le Gouvernement ne veut pas !
M. Roger Karoutchi, secrétaire d'État. - C'est faux.
Mme Éliane Assassi. - Nous légiférons trop, sans étude d'impact, souvent sous le coup de l'émotion et dans l'urgence. D'où un empilement de textes bâclés, inapplicables, voire inappliqués. En 2007-2008, un quart seulement des textes d'application des lois a été pris, 10 % pour les lois adoptées en urgence !
M. Roger Karoutchi, secrétaire d'État. - C'est faux.
Mme Éliane Assassi. - C'est vrai ! Où sont la sécurité juridique, dans ces conditions, la lisibilité pour les citoyens ?
Ce texte vise en réalité à museler l'opposition. Quand beaucoup d'amendements sont déposés, les débats se prolongent, et ce temps peut être mis à profit pour faire connaître les méfaits d'une réforme et mobiliser l'opinion ! Voilà ce qui vous gêne ! L'obstruction n'a pas empêché l'adoption du CPE mais l'opinion publique, alertée par les débats parlementaires, a fait reculer le Gouvernement. Les parlementaires de l'opposition auront joué pleinement leur rôle. Reconnaissez que la mobilisation de l'opposition vous a parfois rendu service, par exemple en obtenant le report sine die du texte sur le travail dominical, sur lequel l'UMP était divisée ! N'avez-vous pas vous-mêmes usé du droit d'amendement lorsque vous étiez dans l'opposition, que ce soit sur les nationalisations, l'école laïque ou le Pacs ?
Les moyens pour abréger nos débats ne manquent pas : ordonnances, irrecevabilités, vote bloqué, clôture de la discussion générale, article 49-3, question préalable positive, une originalité du Sénat. Sans parler de l'abus de la procédure d'urgence -près de la moitié des textes en 2007-2008- ou du vote conforme, comme sur la réforme constitutionnelle ! La discussion budgétaire de 2008 a été la plus brève depuis trente ans, la Lolf restreignant les possibilités d'amendement. Votre but n'est pas de lutter contre l'obstruction mais d'abréger encore les débats, en privilégiant le travail discret en commission, loin des citoyens et des journalistes, bref en s'asseyant sur la démocratie... La séance publique doit rester le lieu naturel du débat politique, de la confrontation des idées, de l'expression démocratique, dans la transparence. C'est ce qu'attendent les citoyens.
Nicolas Sarkozy a voulu pouvoir parler devant le Congrès et museler les parlementaires. Car il veut décider de tout et tout contrôler. Ne prend-il pas la place du Premier ministre, des ministres ou des secrétaires d'État ? Ne supportant pas les contre-pouvoirs, il étend son emprise sur l'audiovisuel public, menace la liberté de la presse, annonce la suppression du juge d'instruction pour éviter les enquêtes gênantes... La séparation des pouvoirs est entamée : outre la possibilité pour le Président de la République de s'exprimer devant le Congrès, le Gouvernement pourra être présent en commission. L'hyper-présidentialisation du régime, déjà renforcée par le quinquennat et l'inversion du calendrier électoral, s'accentue. Enfin, la réforme des territoires vise à supprimer certains échelons démocratiques gênants, majoritairement à gauche, contre-pouvoirs qu'il faut contrôler ! Bref, un super-président appuyé par une majorité dévouée, dans un pays sans contre-pouvoirs ni contestation sociale !
Nos craintes exprimées lors de la révision constitutionnelle étaient fondées, le scénario catastrophe se réalise ! Avec cette motion, vous pouvez encore mettre un coup d'arrêt à cette évolution dangereuse. Comment espérer rétablir le lien entre les institutions et les citoyens ? Quid de notre pacte républicain ? Une démocratie où la parole des parlementaires est contrainte, voire interdite, mérite-t-elle encore son nom ? (Applaudissements à gauche)
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. - L'un des enjeux de la révision constitutionnelle est de revaloriser la séance publique. Dans un rapport de 1990, MM. de Raincourt, Allouche et Gérard Larcher constataient que les parlementaires « se sentent trop souvent exclus d'une mission législative devenue trop foisonnante, de débats hermétiques de techniciens et de spécialistes, alors que la séance devrait être le lieu du choix des orientations politiques fondamentales ». Vingt ans plus tard, la situation n'a pas changé.
M. Jean-Pierre Bel. - C'est ça, le problème ?
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. - La commission des lois, sous la conduite de MM. Gélard et Peyronnet, a pu observer, à travers de nombreux déplacements, que le temps consacré à la procédure législative était souvent plus maîtrisé chez nos voisins.
La révision constitutionnelle prévoit que la discussion en séance s'engage sur le texte élaboré par la commission. Le débat pourra porter en séance sur les questions de fond, puisque les questions techniques auront été traitées.
Faut-il encadrer le temps de la discussion en séance ? La loi organique n'ouvre qu'une simple faculté. Je le répète : le Sénat ne s'orientera pas dans cette voie, comme l'a encore confirmé le président Larcher. Nous devons rechercher le plus grand accord entre les groupes et respecter l'autonomie de chaque assemblée, n'en déplaise à M. Michel.
Avis défavorable.
M. Roger Karoutchi, secrétaire d'État. - Avis défavorable. Je veux en finir avec une rumeur. Selon le site Legifrance.fr, au 31 décembre 2008, 75 % des décrets d'application étaient parus six mois après le vote du texte. Pour les textes adoptés en urgence, ce taux est de 95 % ! (Applaudissements à droite) Ce sont des chiffres incontestables !
M. Jean-Pierre Sueur. - Nous sommes ici pour débattre du temps de parole au Parlement.
Mais qu'entendons-nous du côté de l'exécutif ? Un flot ininterrompu de paroles. Pas un jour ne passe sans que nous entendions parler le Président de la République.
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. - Vous entendez des voix !
M. Pierre Fauchon. - Nul ne vous oblige à l'écouter !
M. Jean-Pierre Sueur. - Nous ne contestons pas le droit du Président de la République à s'exprimer mais nous demandons la possibilité de répondre à cette parole proliférante. Il y a quelques jours, M. Sarkozy s'entretenait à la télévision avec des journalistes. J'ai sursauté quand je l'ai entendu répondre à une question portant sur l'audiovisuel public que le président de France Télévisions serait nommé par le Gouvernement...
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. - En conseil des ministres.
M. Jean-Pierre Sueur. - ...que le CSA aurait son mot à dire et qu'il faudrait l'accord des trois cinquièmes des parlementaires. Nous savons bien que c'est faux : il faudra une majorité des trois cinquièmes des membres des commissions pour s'opposer à une nomination ! (M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur, le reconnaît) On attendait que M. Pujadas, journaliste de la télévision publique, fît une rectification : rien ne vînt. Le Président de la République peut aligner des contre-vérités, personne ne lui répond, sa parole se répand sans être jamais contredite... C'est une caricature de démocratie ! Rares sont les pays où l'on verrait une chose pareille !
Un jour, le Président parle de la TVA, le lendemain de l'automobile, le surlendemain de l'Irak : sitôt faites, les annonces sont oubliées et nul n'est là pour les lui rappeler. Plutôt que de passer leurs jours et leurs nuits à s'occuper du temps de parole des parlementaires, les membres de la majorité feraient mieux de réfléchir à cette disproportion choquante entre la parole de l'exécutif et celle du législatif ! (Marques d'impatience à droite et au banc des ministres)
Monsieur le ministre, j'entends votre agacement, mais le Parlement sert à argumenter ! Voici donc le deuxième argument sur lequel je souhaite insister : malgré nos questions répétées, nous n'avons eu aucune réponse de votre part. Voilà une excellente raison pour voter la question préalable : d'ailleurs, cela raccourcirait les débats ! (Sourires)
M. le président Larcher rappelle sans cesse que le droit d'amendement est consubstantiel à l'activité parlementaire. Mais on ne peut à la fois défendre le droit d'amendement et restreindre le temps de parole en assignant à chaque groupe un contingent horaire ! Il y a là une contradiction, vous le savez tous !
Il faut donc réécrire l'article 13. Refuser de le faire sans avancer d'autre justification que le désir d'éviter un deuxième débat sur ce sujet, comme fait la commission, est tout bonnement inacceptable.
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. - Pourquoi ? Nous sommes bien libres de faire ce que nous voulons !
M. Jean-Pierre Sueur. - C'est une question de démocratie. Tant que M. le ministre refusera de répondre à nos questions, le débat sera impossible. (Applaudissements à gauche)
M. Pierre Fauchon. - Je ne voterai pas cette motion parce que je souhaite que ce débat se poursuive. (Ironie à gauche) Mais cela ne signifie pas que je ne voie aucun problème dans le texte qui nous est présenté ! (On s'en réjouit sur les mêmes bancs) M. Sueur l'a dit tout à l'heure avec son talent habituel : les dispositions de l'article 13 sont embarrassantes. Je pensais, à l'origine, qu'elles permettaient au moins, à l'expiration du temps de parole imparti aux groupes, que les amendements fussent présentés sans être discutés. Mais ils ne pourront pas même être défendus !
M. Jean-Pierre Sueur. - Ce sera le silence...
M. Pierre Fauchon. - Ces amendements, en un sens, n'existeront plus. Le problème n'est donc pas tant de limiter le temps de parole : nous pratiquons tous cela lors des réunions de groupe, sans que nul ne trouve à y redire. Le problème est que les amendements non défendus tomberont dans une trappe !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. - Vous risquez vous-même d'en être victime !
M. Pierre Fauchon. - Certes, il existe la procédure du vote bloqué. Mais conformément à une décision du Conseil constitutionnel, les amendements qui tombent sous le coup de cette mesure sont examinés et discutés un par un, même si l'on procède à un vote unique sur l'ensemble. Il y a donc là une véritable difficulté, et je souhaite que nous y réfléchissions. (M. Jean-Pierre Sueur applaudit)
A la demande du groupe CRC-SPG, la motion n°25 est mise aux voix par scrutin public.
M. le président. - Voici les résultats du scrutin :
Nombre de votants | 338 |
Nombre de suffrages exprimés | 338 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 170 |
Pour l'adoption | 137 |
Contre | 201 |
Le Sénat n'a pas adopté.
Renvoi en commission
M. le président. - Motion n°46, présentée par Mme Bonnefoy et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
En application de l'article 44, alinéa 5, du Règlement, le Sénat décide qu'il y a lieu de renvoyer à la commission des Lois Constitutionnelles, de Législation, du Suffrage universel, du Règlement et d'Administration générale le projet de loi organique, adopté par l'Assemblée nationale, relatif à l'application des articles 34-1, 39 et 44 de la Constitution (n°183, 2008-2009).
Mme Nicole Bonnefoy. - Ce texte doit être renvoyé en commission car il est mal ficelé, dangereux et destiné à museler le Parlement et l'opposition. Nous souhaitons tous un rééquilibrage de nos institutions et un renforcement des pouvoirs du Parlement, afin que celui-ci remplisse de la meilleure façon possible ses missions naturelles : le contrôle du Gouvernement, l'amélioration de la loi et l'organisation du débat public.
Révisée en juillet, la Constitution n'est pas une loi comme les autres : n'appartenant ni à la droite, ni à la gauche, elle est la loi fondamentale qui régit le fonctionnement de notre République. Toute révision devrait donc se faire en réelle concertation avec l'opposition. Chacun sait que ce n'est pas ce qui s'est produit, il suffit de voir avec quel mépris et avec quelle arrogance nos collègues députés socialistes ont été traités.
Au début de l'été, le Gouvernement a présenté dans les médias son projet de loi comme une réforme destinée à rééquilibrer nos institutions au profit, surtout, de l'opposition. Le texte que nous examinons aujourd'hui devrait ouvrir les yeux des Français sur cette supercherie : ils verront que nous étions fondés à dénoncer la prétendue revalorisation du Parlement, dont il ne reste en définitive que quelques dispositions mineures favorables au parti majoritaire.
Ce projet de loi organique confirme que la réforme accentue encore le déséquilibre institutionnel au profit du Président de la République, qui pourra désormais dicter ses projets de loi.
Il suffit d'examiner les trois chapitres pour voir les dangereuses dérives que ce texte met en place. Le chapitre premier précise le vote des résolutions parlementaires. Qu'apportera ce prétendu pouvoir supplémentaire ? L'examen d'une proposition de résolution honore la fonction tribunitienne des assemblées représentatives en régime démocratique. Néanmoins, les conditions de recevabilité posée à l'article premier rendent quasiment impossible tout débat sur une proposition de l'opposition puisque le Premier ministre dispose d'un droit arbitraire de veto, sans même devoir motiver sa décision. Par ailleurs, alors que la proposition de résolution déposée par un parlementaire doit être transmise immédiatement au Premier ministre par le président de l'assemblée parlementaire concernée, le chef du Gouvernement ne sera tenu par aucun délai.
Initialement, l'article 2 disposait que chaque proposition de résolution serait transmise à une commission permanente, ce que l'Assemblée nationale a supprimé. C'est inadmissible et incompatible avec la volonté de revaloriser le travail des commissions.
Enfin, l'article 3 conduit à s'interroger sur la portée des résolutions adoptées, sachant que le Gouvernement ne sera entendu qu'à sa demande et qu'il pourra empêcher à tout moment l'examen d'une proposition de résolution qui lui paraîtrait mettre en cause sa responsabilité ou contenir une injonction à son égard. Concrètement, seules seront débattues les propositions agréées par le Gouvernement ou celles parfaitement inoffensives.
Il faudrait être naïf pour voir dans cette procédure de nouveaux droits pour l'opposition !
Plusieurs points relatifs à l'article 3 mériteraient d'être approfondis en commission. Pourquoi l'avis du Premier ministre n'est-il enfermé dans aucun délai, contrairement à celui de l'assemblée saisie ? Pourquoi le Premier ministre ne doit-il pas motiver sa décision ? Pourquoi n'y a-t-il aucun recours ?
J'en viens au deuxième chapitre, qui porte sur les nouvelles règles régissant la présentation des projets de loi. Déposer une étude d'impact à l'appui de tout projet de loi est louable, mais nous restons sceptiques quant à la réalisation des objectifs car beaucoup de questions fondamentales mériteraient un examen attentif en commission. Qui procédera aux évaluations ? Avec quelle indépendance ? Toutes les évaluations seront-elles possibles ? L'Assemblée nationale a amélioré l'inventaire des catégories de textes dispensés de document d'évaluation, mais rien ne justifie d'exclure les projets de loi constitutionnelle.
Enfin, le chapitre 3, le plus controversé, porte sur l'exercice du droit d'amendement.
Qu'en dire, sinon qu'il prouve la volonté gouvernementale de museler l'opposition ? Aujourd'hui, l'amendement est la forme principale du droit d'initiative parlementaire. Il donne à l'opposition la chance de présenter ses propositions, sans retarder le programme de travail de la majorité. C'est un droit individuel, en principe libre et illimité. Chaque sénateur peut l'exercer en son nom propre. L'opposition peut l'utiliser pour informer et alerter l'opinion. Il est néanmoins encadré par le « parlementarisme rationalisé », qui en limite la recevabilité financière et législative.
Le projet de loi organique reprend l'article 44 de la Constitution, qui déclare irrecevables les amendements parlementaires déposés après le début de l'examen du texte. Mais les Règlements des assemblées parlementaires peuvent fixer une date antérieure... En revanche, le Gouvernement peut déposer des amendements à tout instant et demander une nouvelle délibération sur un article si un amendement est voté contre sa volonté. Le Gouvernement peut empêcher la discussion d'amendements qui n'ont pas été soumis préalablement à la commission. Généralement, cette arme de procédure n'est pas utilisée, mais tout cela témoigne du déséquilibre entre les droits consentis aux sénateurs et les prérogatives du pouvoir exécutif.
Or, au lieu de rééquilibrer les droits des parlementaires, ce projet de loi organique aggrave la situation avec l'article 11 et, de manière encore plus inadmissible, avec l'article 13. En effet, un amendement pourra dorénavant être mis aux voix sans discussion, au nom du délai préalablement fixé pour l'examen du texte. La procédure du crédit-temps transformera les assemblées en chambres d'enregistrement, puisqu'un groupe ne pourra plus défendre un amendement lorsqu'il aura épuisé son temps de parole. Or, un amendement qui n'est pas défendu n'aura aucune chance d'être adopté. La liberté de la discussion parlementaire est incompatible avec le forfait temps.
Le rythme du Président de la République, marqué par les annonces quotidiennes, ne peut être celui du Parlement qui examine, auditionne et amende.
Pour justifier vos dispositions, vous agitez l'épouvantail de l'obstruction, qui serait responsable de « la pagaille » parlementaire et « risquerait de bloquer le rythme des réformes ».
Le Président de la République regrette que les parlementaires socialistes « déposent des amendements à la brouette » ? Il ferait mieux de ne plus déposer à la vitesse supersonique des textes de loi mal rédigés et incomplets ! Les chiffres parlent d'eux-mêmes : le Gouvernement de M. Fillon a fait voter plus de 70 textes de loi, hormis les conventions internationales, contre 52 en moyenne par an de 1997 à 2002 et une moyenne de 47 entre 2002 et 2007. Où est l'obstruction que l'on nous reproche ? En revanche, on peut s'interroger sur cette frénésie législative, sachant qu'à peine une loi sur quatre est mise en oeuvre. De plus, sur les 1 518 textes de loi adoptés depuis 1981, seuls 30 ont suscité plus de 1 000 amendements.
Enfin, en proposant de voter conforme des articles 13, 13 bis et 13 ter, au motif qu'il ne faudrait pas empêcher l'Assemblée nationale, si elle le souhaite, d'utiliser ces dispositions, la commission des lois pose un postulat, préjuge de l'avenir sans apporter la moindre garantie et clôt définitivement la discussion.
En fermant le débat sur les dispositions essentielles qui portent gravement atteinte au droit d'amendement, la commission n'a pas permis d'éclairer suffisamment le Sénat sur ce sujet. Elle n'a pas été au bout de sa réflexion, ce que M. Fauchon a montré. (Applaudissements à gauche)
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. - Critiquer le texte est votre droit, mais cela ne signifie pas que la commission n'ait pas fait son travail.
J'ai auditionné tous les présidents de groupes et de commissions. La commission des lois, dans son ensemble, a auditionné cinq éminents constitutionnalistes.
M. Bernard Frimat. - Quatre !
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. - D'habitude, elle n'en auditionne que deux, toujours les mêmes. Cette fois, nous avons renouvelé le cheptel (rires), je veux dire l'offre.
M. Karoutchi a répondu à toutes nos questions pendant deux heures. La commission est donc parfaitement éclairée, d'autant plus que les députés ont utilisé le dispositif du temps de débat au cours de la Ve République, de la IVe et de la IIIe. Un nouvel examen par la commission ne serait donc pas susceptible de la faire changer d'avis.
M. Roger Karoutchi, secrétaire d'État. - Défavorable.
A la demande du groupe socialiste, la motion n°46 est mise aux voix par scrutin public.
M. le président. - Voici les résultats du scrutin :
Nombre de votants | 339 |
Nombre de suffrages exprimés | 322 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 162 |
Pour l'adoption | 138 |
Contre | 184 |
Le Sénat n'a pas adopté.
Prochaine séance aujourd'hui, mercredi 11 février 2009, à 10 h 30.
La séance est levée à minuit cinq.
Le Directeur du service du compte rendu analytique :
René-André Fabre
ORDRE DU JOUR
du mercredi 11 février 2009
A 10 heures 30
1. Déclaration du Gouvernement, suivie d'un débat, sur l'attribution de fréquences de réseaux mobiles, conformément à l'article 22 de la loi du 3 janvier 2008 pour le développement de la concurrence au service des consommateurs.
A 15 heures et, éventuellement, le soir
2. Suite de la proposition de loi relative à l'exécution des décisions de justice et aux conditions d'exercice de certaines professions réglementées, présentée par M. Laurent Béteille (n°31, 2008-2009).
Rapport de M. François Zocchetto, fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale (n°161, 2008-2009).
3. Proposition de loi visant à supprimer les conditions de nationalité qui restreignent l'accès des travailleurs étrangers à l'exercice de certaines professions libérales ou privées, présentée par Mme Bariza Khiari et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés (n°176, 2008-2009).
Rapport de M. Charles Gautier, fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale (n°197, 2008-2009).
4. Proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, portant création d'une première année commune aux études de santé et facilitant la réorientation des étudiants (n°146, 2008-2009).
Rapport de M. Jean-Claude Etienne, fait au nom de la commission des affaires culturelles (n°198, 2008-2009).
Avis de M. Gérard Dériot, fait au nom de la commission des affaires sociales (n°199, 2008-2009).
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DÉPÔTS
La Présidence a reçu de :
- M. le Premier ministre, un projet de loi, modifié par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, de mobilisation pour le logement et la lutte contre l'exclusion ;
- Mme Christiane Demontès et M. André Lardeux un rapport d'information fait au nom de la mission d'évaluation et de contrôle de la sécurité sociale (Mecss) de la commission des affaires sociales sur l'amélioration des dispositifs de contrôle et d'audit internes du réseau des caisses d'allocations familiales et la mise en place du répertoire national des bénéficiaires ;
- MM. Jean-Pierre Masseret et Jacques Gautier un rapport d'information fait au nom de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation et de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées sur les conditions financières et industrielles de mise en oeuvre du programme A400 M.