Disponible au format PDF Acrobat


Vous pouvez également consulter le compte rendu intégral de cette séance.


Table des matières



Commission mixte paritaire

Missions d'information (Demandes)

Grenelle de l'environnement (Suite)

Discussion des articles (Suite)

Article 2

Article additionnel

Article 3

Article 4

Article 5

Articles additionnels

Article 6

Renvoi pour avis

Prolongation de cinq interventions des forces armées




SÉANCE

du mercredi 28 janvier 2009

59e séance de la session ordinaire 2008-2009

présidence de M. Roland du Luart,vice-président

Secrétaires : Mme Christiane Demontès, M. Jean-Noël Guérini.

La séance est ouverte à 15 heures.

Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.

Commission mixte paritaire

M. le président.  - La commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi pour l'accélération des programmes de construction et d'investissement publics et privés est parvenue à un texte commun.

Missions d'information (Demandes)

M. le président.  - M. le Président du Sénat a été saisi par les présidents des six commissions permanentes de demandes d'autorisations pour désigner des missions d'information dans le cadre de la mission de contrôle du Sénat. La liste en sera publiée au Journal officiel des débats.

Le Sénat sera appelé à statuer sur ces demandes dans les formes fixées par l'article 21 du Règlement.

Grenelle de l'environnement (Suite)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de programme relatif à la mise en oeuvre du Grenelle de l'environnement, adopté par l'Assemblée nationale.

Discussion des articles (Suite)

M. le président.  - Nous en étions parvenus à l'article 2.

Article 2

I. - La lutte contre le changement climatique est placée au premier rang des priorités. Dans cette perspective, est confirmé l'engagement pris par la France de diviser par quatre ses émissions de gaz à effet de serre entre 1990 et 2050 en réduisant de 3 % par an, en moyenne, les rejets de gaz à effet de serre dans l'atmosphère, afin de ramener à cette échéance ses émissions annuelles de gaz à effet de serre à un niveau inférieur à 140 millions de tonnes équivalent de dioxyde de carbone.

La France se fixe comme objectif de devenir l'économie la plus efficiente en équivalent carbone de la Communauté européenne d'ici à 2020. À cette fin, elle prendra toute sa part à la réalisation de l'objectif de réduction d'au moins 20 % des émissions de gaz à effet de serre de la Communauté européenne à cette échéance, cet objectif étant porté à 30 % pour autant que d'autres pays industrialisés hors de la Communauté européenne s'engagent sur des objectifs comparables et que les pays en développement les plus avancés apportent une contribution adaptée. Elle soutiendra également la conclusion d'engagements internationaux contraignants de réduction des émissions. Elle concourra, de la même manière, à la réalisation de l'objectif d'amélioration de 20 % de l'efficacité énergétique de la Communauté européenne et s'engage à porter la part des énergies renouvelables à au moins 23 %  de sa consommation d'énergie finale d'ici à 2020. Les objectifs d'efficacité et de sobriété énergétiques exigent la mise en place de mécanismes d'ajustement et d'effacement de consommation d'énergie de pointe. La mise en place de ces mécanismes passera notamment par la pose de compteurs intelligents pour les particuliers, d'abonnement avec effacement des heures de pointe pour les industriels. La maîtrise de la demande d'énergie constitue la solution durable au problème des coûts croissants de l'énergie pour les consommateurs, et notamment pour les ménages les plus démunis, particulièrement exposés au renchérissement des énergies fossiles. Le programme d'économies d'énergie dans le secteur du logement comprendra des actions ciblées de lutte contre la précarité énergétique.

II. - Les mesures nationales de lutte contre le changement climatique porteront en priorité sur la baisse de la consommation d'énergie des bâtiments et la réduction des émissions de gaz à effet de serre des secteurs des transports et de l'énergie et sur la plantation d'arbres et de végétaux pérennes.

Pour la mise en oeuvre des objectifs visés au I, les mesures nationales visent à intégrer le coût des émissions de gaz à effet de serre dans la détermination des prix des biens et des services, notamment en :

- améliorant l'information du consommateur sur le coût écologique de ces biens et services ;

- adoptant de nouvelles réglementations ;

- étendant le système européen d'échange des quotas d'émissions de gaz à effet de serre à de nouveaux secteurs, en tenant compte des mesures nationales prises par les autres États membres ;

- mettant aux enchères 100 % des quotas alloués aux entreprises concernées si le secteur le permet, en prenant en compte l'impact de cette mise aux enchères sur la concurrence internationale entre les secteurs concernés par le marché des quotas d'émission.

Dans les six mois suivant la publication de la présente loi, l'État étudiera la création d'une contribution dite « climat-énergie » en vue d'encourager les comportements sobres en carbone et en énergie. Cette contribution aura pour objet d'intégrer les effets des émissions de gaz à effet de serre dans les systèmes de prix par la taxation des consommations d'énergies fossiles. Elle sera strictement compensée par une baisse des prélèvements obligatoires de façon à préserver le pouvoir d'achat des ménages et la compétitivité des entreprises. Au terme de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le résultat de cette étude sera rendu public et transmis au Parlement.

La France soutiendra la mise en place d'un mécanisme d'ajustement aux frontières pour les importations en provenance des pays qui refuseraient de contribuer à raison de leurs responsabilités et capacités respectives à l'effort mondial de réduction des émissions de gaz à effet de serre après 2012.

Les dispositifs incitatifs économiques et les financements publics consacrés à des investissements de production ou de consommation d'énergie tiendront compte des économies d'énergie réalisées et du temps nécessaire à la rentabilisation des investissements concernés. L'efficience de ces mécanismes et dispositifs sera évaluée notamment au regard de leur coût par rapport au volume d'émissions de gaz à effet de serre évitées.

Les dispositifs incitatifs économiques et les financements publics qui auront pour objet la réduction des émissions de gaz à effet de serre devront être justifiés notamment par référence au coût de la tonne de dioxyde de carbone évitée ou définitivement stockée.

M. Marc Daunis.  - La volonté de lutter contre le changement climatique résulte des débats très positifs tenus dans le cadre du Grenelle de l'Environnement, qui ont permis aux acteurs de la société civile de se rencontrer et d'échanger. La traduction législative en est cependant décevante et le contenu du titre premier se distingue par l'absence de résolutions claires. Ces lacunes sont d'autant plus flagrantes que certains semblent estimer que la tourmente financière et économique mondiale ôte à cette loi sa pertinence -à tort, car le dérèglement climatique est inéluctable.

Selon nous, l'innovation doit tenir une place importante dans les réponses à la crise, et plus particulièrement dans les domaines liés au développement durable et à l'environnement. Il faut réinventer nos modes de vie, de consommation, de circulation, d'habitat... A ce titre, nous regrettons que les plans de relance en cours n'ouvrent pas la voie vers une véritable économie durable alors que, dans le même temps, on mobilise des milliards pour sauver le système financier. L'avenir de la planète n'est pas moins important !

Les signaux d'alarme n'ayant pas été entendus, la spéculation débridée et l'opacité du système financier ont mené celui-ci à l'emballement, puis à l'effondrement. Des signaux similaires affectent l'environnement, et il nous faut prendre au plus vite des mesures à la hauteur des enjeux. Malheureusement, les efforts budgétaires prévus pour atteindre les objectifs ambitieux définis par le Gouvernement ont été revus à la baisse. Une nouvelle fois, les collectivités territoriales devront en supporter le poids. Nous aurons l'occasion d'en reparler lors des débats du Grenelle II.

Notre position sur cet article est à la fois constructive et attentive. Je fais le voeu que les travaux de mes collègues socialistes et apparentés reçoivent l'écoute qu'ils méritent. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. le président.  - Amendement n°3, présenté par M. Sido, au nom de la commission.

Après le premier alinéa du I de cet article, insérer un alinéa ainsi rédigé :

Considérant que la région arctique joue un rôle central dans l'équilibre global du climat de la planète, la France soutiendra la création d'une commission scientifique internationale sur l'Arctique.

M. Bruno Sido, rapporteur de la commission des affaires économiques.  - Amendement de coordination lié au déplacement d'une disposition figurant à l'article premier.

M. le président.  - Sous-amendement n°495 à l'amendement n°3 de M. Sido, au nom de la commission, présenté par M. Christian Gaudin et les membres du groupe UC.

Dans le second alinéa de l'amendement n°3, remplacer les mots :

d'une commission scientifique internationale sur l'Arctique

par les mots :

d'un observatoire scientifique international de l'Arctique

M. Christian Gaudin.  - A l'Assemblée nationale, un amendement, repris par le rapporteur, a proposé de créer une commission scientifique internationale sur l'Arctique. Cela n'est pas nécessaire puisqu'une telle commission existe déjà, mais la coordination des travaux scientifiques en Arctique est perfectible.

Pour pallier les insuffisances scientifiques et opérationnelles des dispositifs existants, l'Académie des sciences des États-Unis a initié, en 2006, le projet d'un observatoire scientifique international et multidisciplinaire de l'Arctique. Le groupe de préfiguration mis en place au sein du Conseil arctique a rendu des recommandations favorables en octobre dernier.

Après une mission dans l'Arctique, j'ai été, en juillet dernier, chargé d'une mission auprès de Mme la ministre de la recherche pour travailler sur ce sujet avec la communauté scientifique française. Le CNRS a été récemment désigné comme chef de file dans ce cadre, conformément au rapport que j'ai présenté début novembre. Pour mobiliser nos partenaires dans le cadre de la présidence française de l'Union européenne, le Gouvernement a organisé à Monaco, les 9 et 10 novembre dernier, une conférence internationale présidée par M. le ministre d'État, que j'ai eu l'honneur d'accompagner. L'action de notre pays dans ce cadre, les engagements du Grenelle comme le droit international nous amènent à soutenir la création d'un « observatoire scientifique international » et non d'une « commission scientifique ».

M. le président.  - Amendement n°494, présenté par M. Christian Gaudin et les membres du groupe UC.

Après le premier alinéa du I de cet article, insérer un alinéa ainsi rédigé :

En outre, afin d'en protéger l'environnement, elle promouvra ou accompagnera, dans le cadre des instances internationales compétentes, l'adaptation de la réglementation internationale aux nouveaux usages de l'Océan arctique rendus possibles par son accessibilité croissante.

M. Christian Gaudin.  - L'engagement n°230 du Grenelle de l'environnement porte sur « l'initiation d'un traité de l'Arctique pendant la présidence française » de l'Union européenne. Cette formulation sibylline semble signifier que l'Arctique n'est régi par aucun texte international et qu'un traité général, similaire à celui de Washington en 1959, serait souhaitable.

Or l'Arctique, qui n'est pas un continent comme l'Antarctique, est régi par la convention sur le droit de la mer signée à Montego Bay en 1982, plus précisément par les dispositions relatives aux mers semi-fermées. Le Conseil de l'Arctique, auquel la France participe, est donc compétent en la matière. La convention Ospar -contraction d'Oslo et Paris- de 1992 protège déjà 25 % de l'océan arctique. Au regard du débat qui a eu lieu à l'Assemblée nationale en première lecture, je précise que les droits des États riverains sont régis par la convention de Montego Bay et reconnus, sans contestation possible, par la communauté internationale.

Cependant, la disparition progressive de la banquise et les progrès technologiques rendent possibles de nouvelles activités. L'exploitation de l'Arctique constitue une opportunité de développement -comme ce fut le cas au Groenland- mais aussi un danger pour l'environnement.

Il existe déjà une réglementation sur certains aspects, je songe à la navigation. Ce n'est donc pas un traité mais un faisceau d'accords internationaux de divers types qui sont nécessaires pour assurer une gouvernance protectrice de l'environnement.

La France se doit de promouvoir ou d'accompagner les adaptations indispensables de la réglementation. Au plan international, on ne comprendrait pas que notre pays n'inscrive pas cette exigence dans un texte fondateur comme celui que nous élaborons ici.

M. Bruno Sido, rapporteur.  - Favorable au sous-amendement n°495, de bon sens. Il vise à pallier les lacunes des dispositifs existants.

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État chargée de l'écologie.  - L'Arctique est le thermomètre du monde, aussi bien que son régulateur. M. Christian Gaudin a rappelé que la France a organisé une conférence internationale à Monaco durant la présidence française. Je suis, par cohérence, favorable à l'amendement de la commission comme au sous-amendement.

Le sous-amendement n°495 est adopté.

M. Daniel Raoul.  - Après avoir voté le sous-amendement, je soutiens l'amendement, d'autant plus volontiers que la même proposition a été faite à l'Assemblée nationale par M. Le Déaut, membre comme nous de l'Office parlementaire des choix scientifiques !

L'amendement n°3, sous-amendé, est adopté.

M. Bruno Sido, rapporteur.  - Ces nouvelles activités sont des opportunités de développement mais comportent aussi des dangers pour l'environnement. Je partage pleinement votre souci : tout à fait favorable à l'amendement n°494.

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État.  - Même avis.

L'amendement n°494 est adopté.

M. le président.  - Amendement n°4, présenté par M. Sido, au nom de la commission.

Supprimer les quatre dernières phrases du second alinéa du I de cet article.

M. Bruno Sido, rapporteur.  - Amendement rédactionnel : ces dispositions auront mieux leur place à l'article 16.

M. le président.  - Amendement n°636, présenté par MM. Muller, Desessard, Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet.

A la fin de l'avant-dernière phrase du second alinéa du I de cet article, supprimer le mot :

fossiles

M. Jacques Muller.  - Mon amendement vise à clarifier une réalité qui n'est pas ici appréhendée comme telle : l'énergie nucléaire est elle aussi fossile, puisque fondée sur l'uranium. Comme le pétrole, cette ressource est limitée, sa production a vocation à diminuer, tandis que le prix se renchérira, jusqu'à épuisement des gisements. L'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) se veut rassurante : elle estime que les réserves mondiales pourront alimenter les 435 réacteurs actuels pendant un siècle. Mais la demande actuelle n'est satisfaite qu'à 60 % par l'uranium récemment extrait, le reste provenant de stocks civils et militaires. Rappelons aussi que l'uranium naturel ne contient que 0,7 % d'uranium 235 source de la fission. Si bien qu'en France, sur les 58 réacteurs, 4 sont consacrés au seul enrichissement.

Enfin, si la production d'électricité nucléaire mondiale était multipliée par trois, la durée de vie des réserves ne serait plus que de 25 ans. Il convient donc d'intégrer dans la loi, compte tenu des caractéristiques des gisements d'uranium, qu'il s'agit là d'une ressource énergétique comme les autres ressources fossiles. Alors que nous nous préoccupons du renchérissement de la facture énergétique pour nos concitoyens les plus démunis, il n'y a pas lieu de traiter différemment le cas de l'énergie nucléaire.

M. Bruno Sido, rapporteur.  - Je regrette que M. Muller n'ait pas fait partie de la mission commune d'information sur l'électricité, il aurait vu que l'électricité, pour les ménages, coûtait deux fois plus cher en Grande-Bretagne qu'en France. Ce n'est pas l'origine nucléaire qui pèse dans le prix. De plus, si le prix du minerai augmente, les sites exploitables deviendront de plus en plus nombreux. Ce sont bien les énergies fossiles qui se renchérissent par raréfaction des gisements !

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État.  - Favorable au n°4, de cohérence. Quant au n°636, les énergies fossiles se renchérissent structurellement, contrairement aux autres dont les fluctuations sont conjoncturelles. En outre, ce sont les émissions de gaz à effet de serre qu'il importe de réduire, donc le pourcentage des énergies carbonées dans la consommation globale. Défavorable.

L'amendement n°4 est adopté.

M. Jacques Muller.  - Je ne vous comprends pas. Comme maire d'un village, j'ai encore reçu la semaine dernière des personnes victimes d'une coupure d'approvisionnement en électricité parce qu'elles n'ont pas les moyens de payer. Pourquoi traiter différemment l'électricité lorsque notre souci est de soutenir les plus démunis ? Fioul, charbon, bois ou électricité, le problème est le même !

L'amendement n°636 est déclaré sans objet.

M. le président.  - Amendement n°316 rectifié, présenté par M. Daniel Raoul et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Compléter le second alinéa du I de cet article par une phrase ainsi rédigée :

L'État veille à ce que les objectifs d'efficacité et de sobriété énergétique n'excluent personne de la garantie d'un accès de base pour répondre à des besoins vitaux, tels que le chauffage et l'éclairage, à un bien de première nécessité comme l'énergie.

M. Daniel Raoul.  - Cet amendement traite du droit d'accès de tous à l'énergie. Les « tarifs sociaux », indexés sur le revenu et donnant lieu éventuellement dans nos communes à la délivrance de tickets de différentes couleurs, engendrent la stigmatisation. Il convient d'y mettre fin et de réfléchir à d'autres dispositifs car ceux-ci, au vu des objectifs d'efficacité et de sobriété fixés par le Grenelle, ne sont pas de nature à répondre au problème du renchérissement du coût de l'énergie et à ses conséquences pour les foyers les plus modestes.

L'État doit mettre en oeuvre une politique énergétique qui permette à tout citoyen de bénéficier d'un accès minimum à l'énergie à un prix abordable. Comment concilier ce droit d'accès à ce qui est un bien de première nécessité et les impératifs de sobriété et d'efficacité énergétiques ? La France compte 4 millions de logements sociaux, dont 800 000 sont dégradés ; 5 millions de personnes connaissent des difficultés pour chauffer leur logement -je pense aux personnes âgées qui perçoivent une faible retraite, aux familles défavorisées, aux chômeurs hélas de plus en plus nombreux ou à cette bombe à retardement qu'est la masse croissante des travailleurs pauvres. N'oublions pas en outre que plus de la moitié des familles modestes habitent dans un logement du parc privé.

Les dépenses énergétiques pèsent plus fortement sur les familles les plus modestes alors que les inégalités de ressources ne cessent d'augmenter. La crise actuelle est d'ailleurs venue en partie de celle des subprimes. L'enquête quinquennale de l'Insee de 2006 montre que la part des dépenses énergétiques des 20 % des familles les plus modestes est deux fois et demie plus élevée, 15 %, que celles des 20 % les plus aisées, 6 %. La part des dépenses en combustibles fossiles des plus modestes est de 9 % contre 4 % et respectivement de 6 % et 2 % pour les dépenses d'électricité. Selon la même enquête, les dépenses de chauffage varient même d'un facteur de un à seize selon le décile de revenus et le lieu de résidence.

L'amendement du Gouvernement présenté à l'Assemblée nationale sur la pauvreté énergétique ne répond pas au problème. Les charges des ménages risquent d'augmenter avec les engagements que nous prenons dans le cadre de ce texte, qu'il s'agisse de la contribution « climat-énergie » ou des travaux d'isolation, dont on peut se demander comment les plus modestes pourront les financer. Le texte est insuffisant, surtout au regard de la dégradation de la situation économique et de la croissance régulière de la part des dépenses énergétiques dans le budget des plus modestes.

M. Roland Courteau.  - Très bien !

M. Bruno Sido, rapporteur.  - Tous les ménages en France peuvent bénéficier d'un service de base à un prix abordable. Je rappelle qu'en Grande-Bretagne, l'électricité est deux fois plus chère que chez nous. L'intention de l'amendement est louable mais il ne faut pas mettre en péril le dispositif protecteur des tarifs sociaux qui concerne 700 000 ménages et donne pleinement satisfaction. Les commissions départementales ne font pas la publicité de leurs travaux. L'argument de la stigmatisation ne me semble pas pertinent. Avis défavorable.

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État.  - L'intention est en effet louable. Le Gouvernement est sensible à ces questions et a étendu l'été dernier les dispositifs sociaux pour l'électricité et le gaz. La priorité est d'abord de réduire les besoins de consommation, c'est-à-dire d'accroître l'efficacité énergétique. Avis défavorable.

Mme Évelyne Didier.  - Nous soutenons l'amendement. Il faut certes parvenir à une plus grande maîtrise des dépenses d'énergie mais du temps passera avant que le parc social, pour ne citer que lui, soit à la hauteur. Un nombre croissant de ménages sont en difficulté à cause de l'augmentation de leurs factures énergétiques. Aujourd'hui, les tarifs sociaux ne répondent pas au problème, surtout dans la période de crise que nous connaissons.

M. Roland Courteau.  - C'est certain !

L'amendement n°316 rectifié n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°520, présenté par Mme Blandin et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Dans la première phrase du II de cet article, supprimer les mots :

et sur la plantation d'arbres et de végétaux pérennes.

Mme Marie-Christine Blandin.  - Économies et efficience sont les actions prioritaires ; elles concernent le bâti et les transports, dont les émissions de gaz à effet de serre ont encore augmenté respectivement de 13,5 % et de 20 % depuis les années 1990. La mention des plantations dans l'article 2 est contreproductive. Outre que les « arbres pérennes » ne répondent pas aux besoins de la filière forestière, l'intérêt des arbres en matière de lutte contre l'effet de serre dépend de leur capacité à fixer le carbone ; or cette capacité n'est élevée que pendant leur croissance. Une fois adultes, ce qui dure longtemps, leur bilan dioxyde de carbone-oxygène est nul ; la dégradation des feuilles et des fruits produira même du carbone. Aussi sympathiques que soient les végétaux, ce n'est pas ici mais aux articles 5 et 19 qu'il faut évoquer l'intérêt de leur plantation.

M. le président.  - Amendement n°5, présenté par M. Sido, au nom de la commission.

Après les mots :

des transports et de l'énergie

rédiger comme suit la fin du premier alinéa du II de cet article :

Ces mesures sont conçues selon une approche conjointe de protection de la qualité de l'air et d'atténuation du changement climatique. La maîtrise de la demande d'énergie constitue la solution durable au problème des coûts croissants de l'énergie pour les consommateurs, notamment pour les ménages les plus démunis particulièrement exposés au renchérissement des énergies fossiles. Le programme d'économies d'énergie dans le secteur du logement comprendra des actions ciblées de lutte contre la précarité énergétique.

M. Bruno Sido, rapporteur.  - Cet amendement supprime la référence aux plantations pour que les ressources aillent bien aux actions prioritaires. Il met ensuite en cohérence la politique de l'air et celle du climat : la lutte contre les émissions de gaz à effet de serre ne doit pas conduire à élever le niveau des pollutions locales, de même que la lutte contre les polluants locaux ne doit pas entraîner une augmentation de ces émissions. Ce qui répond notamment aux préoccupations exprimées hier par M. Fischer. L'amendement a enfin un objet rédactionnel.

L'amendement n°520 est satisfait ; j'en souhaite le retrait.

Mme Marie-Christine Blandin.  - L'important est que le texte soit bon. Je retire mon amendement.

L'amendement n°520 est retiré.

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État.  - Avis favorable à l'amendement n°5, qui respecte mieux la priorité des objectifs et des actions.

M. Didier Guillaume.  - Nous avions déposé un sous-amendement à l'amendement de la commission, qui est malheureusement tombé sous le coup de l'article 40. Son objet était de créer un fonds dédié à l'efficacité énergétique et à la lutte contre la pauvreté énergétique, qui aurait été financé par le produit de la mise aux enchères des quotas d'émission. Selon les règles communautaires, ce produit doit être reversé au budget des États. Sous la pression du Parlement européen, la présidence française et les États-membres ont pris un engagement moral.

Il s'agit d'engager la moitié de ces recettes pour les énergies économes en CO2, sûres et durables. Nous aurions souhaité améliorer cet amendement. Nous nous abstiendrons.

L'amendement n°5 est adopté.

M. le président.  - Amendement n°145 rectifié ter, présenté par MM. Revet, Laurent, Pointereau, Bécot, Mmes Rozier, Procaccia, MM. Bailly, Pierre, Juilhard, Detcheverry et Magras.

Compléter le septième alinéa de cet article par les mots :

et de l'impact de cette mesure sur la concurrence internationale

M. Charles Revet.  - La France se fixe des objectifs ambitieux, c'est une bonne chose ; elle veut montrer l'exemple, tout le monde souscrit à cette démarche. Mais on ne peut régler tout seul les problèmes de la planète et, quand on vit dans une économie mondialisée et qu'on connaît une concurrence difficile, il faut prendre en compte ce que font les autres. Le mieux est souvent l'ennemi du bien... (M. le rapporteur approuve) Il ne faudrait pas qu'à trop vouloir en faire, on impose des surcoûts à nos entrepreneurs et qu'ils perdent des marchés, d'où notre amendement.

M. Bruno Sido, rapporteur.  - La dernière directive fait partie intégrante du paquet « énergie durable » -je vous renvoie aussi au rapport de notre collègue Deneux. Les opérateurs français et européens ne doivent pas subir de distorsion de concurrence : votre amendement est déjà satisfait par le dixième alinéa de cet article qui prévoit un mécanisme d'ajustement aux frontières. Vous pouvez retirer l'amendement. A défaut, j'y serais défavorable.

M. Charles Revet.  - J'avais bien noté cet alinéa mais je m'interroge sur la mise en oeuvre de cette taxe aux frontières. Un tel mécanisme n'est-il pas contraire aux règles européennes ?

M. Jean-Louis Borloo, ministre d'État, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire.  - Il faut distinguer les distorsions internationales des mécanismes habituels contre les distorsions de concurrence au sein de l'Union, que nous avons la capacité d'enclencher en cas de distorsion manifestement excessive.

L'amendement n°145 rectifié ter est retiré.

M. le président.  - Amendement n°6, présenté par M. Sido, au nom de la commission.

Rédiger comme suit le sixième alinéa du II de cet article :

- mettant aux enchères une partie des quotas alloués aux entreprises en prenant en compte l'impact de cette mise aux enchères sur la concurrence internationale à laquelle sont exposés les secteurs concernés. La part des quotas alloués par la mise aux enchères pourra atteindre, à partir de 2013, 100 % si le secteur concerné est en capacité d'en supporter les conséquences sans subir une perte importante de ses parts de marché.

M. Bruno Sido, rapporteur.  - La mise en enchères des quotas d'émissions de gaz à effet de serre vise bien la période des PNAQ III, qui s'ouvre en 2013, et non les actuels plans nationaux d'allocation car ces quotas ont été attribués gratuitement. C'est conforme à la récente directive du Parlement et du Conseil qui prévoit un recours progressif aux enchères à partir de 2013. Après recensement, les secteurs fortement consommateurs d'énergie et incapables de répercuter le coût des quotas dans leur prix sans perdre des marchés au profit de concurrents étrangers non soumis à de telles normes bénéficieront de quotas gratuits.

M. le président.  - Sous-amendement n°774 à l'amendement n°6 de M. Sido, au nom de la commission, présenté par le Gouvernement.

Compléter la seconde phrase du second alinéa de l'amendement n°6 par les mots :

, conformément au calendrier fixé par la directive relative au système communautaire d'échange de quotas d'émission de gaz à effet de serre

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État.  - Nous partageons le souhait de la commission : nous avons soutenu la fin des attributions totalement gratuites de quotas. Cependant, notre sous-amendement est plus proche du texte européen.

M. Bruno Sido, rapporteur.  - La précision est bienvenue puisque la France devra se conformer au calendrier prévu par la directive, qu'elle a réussi à faire accepter à ses partenaires grâce à une présidence brillante.

Le sous-amendement n°774 est adopté.

M. Daniel Raoul.  - La dernière phrase de l'amendement n°6 est bien vague. Beaucoup d'entreprises seraient exclues de toute obligation. Nous avons des doutes sur la régulation par le marché : il faudrait des mesures plus volontaristes. Nous nous abstiendrons.

L'amendement n°6, sous-amendé, est adopté.

M. le président.  - Amendement n°7, présenté par M. Sido, au nom de la commission.

Au début de la première phrase du septième alinéa du II de cet article, supprimer les mots :

Dans les six mois suivant la publication de la présente loi,

M. Bruno Sido, rapporteur.  - Cet amendement rédactionnel évite une redondance.

M. Jean-Louis Borloo, ministre d'État.  - Avis favorable.

M. Philippe Richert.  - Ne conviendrait-il pas de préciser qu'il s'agit d'une contribution « climat air énergie » ? Cela ne remettrait pas en cause l'équilibre du texte.

M. Jean-Louis Borloo, ministre d'État.  - Permettez-moi une suggestion : il est pertinent d'introduire l'air de manière territoriale mais nous parlerons tout à l'heure de plans « climat air énergie »...

M. Bruno Sido, rapporteur.  - Le Sénat s'honore de travailler sérieusement, c'est-à-dire en amont. Nous avons déjà repris l'un des deux amendements de M. Richert mais je vois mal comment intégrer sa proposition dans notre amendement. Je m'en remets donc au Gouvernement pour expliquer le fond de l'affaire.

M. Jean-Louis Borloo, ministre d'État.  - L'étude sur la contribution « climat-énergie » donne un signal prix aux énergies fossiles, afin que les décisions d'investissement ne soient pas prises en fonction des fluctuations des prix.

La question du prix de l'air pollué est pertinente mais doit être traitée à part : je m'engage à ce qu'elle fasse l'objet d'une seconde étude. En outre, les plans territoriaux prendront en compte l'air.

M. Philippe Richert.  - Merci.

Mme Nicole Bricq.  - Cela fait trois ans que le groupe socialiste propose, à chaque loi de finances, un mécanisme de taxation du carbone. Le 24 novembre dernier, Mme Lagarde nous a demandé de retirer notre amendement au motif que les travaux étaient en cours et suivaient un calendrier précis.

Nous sommes pour un mécanisme de marché, à condition qu'il soit régulé car on ne peut tout attendre du marché. La fiscalité est un élément souple et démocratique ; il faut combiner les deux. Or là, le marché aura une longueur d'avance !

Mme Lagarde nous a annoncé que l'Ademe achevait son rapport sur la contribution et que la conférence de consensus prévue au premier trimestre 2009 devrait aboutir à une analyse techniquement partagée, qui serait transmise au Parlement et aux parties prenantes au Grenelle pour servir de base à d'éventuelles propositions. Il faudra y revenir dans le Grenelle II.

Dans ce contexte, l'amendement de la commission n'est pas indifférent... La proposition du groupe socialiste, qui prend en compte la redistribution sociale et les transports collectifs, est à votre disposition si vous souhaitez gagner du temps, monsieur le ministre !

L'amendement n°7 est adopté.

M. le président.  - Amendement n°246, présenté par Mme Didier et les membres du groupe CRC-SPG.

I. - Dans l'avant-dernière phrase du septième alinéa du II de cet article, remplacer les mots :

prélèvements obligatoires

par les mots :

cotisations sociales salariales

II. - Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :

La perte de recettes pour les organismes de sécurité sociale est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575A du code général des impôts.

Mme Évelyne Didier.  - La compensation fiscale de la taxe carbone ne doit pas se faire aux dépens des ménages via une « TVA sociale carburant ». Une réduction des cotisations sociales patronales mettrait à la charge des ménages un coût préalablement supporté par les entreprises !

M. Bruno Sido, rapporteur.  - Rien ne justifie que seules les cotisations salariales soient concernées. L'objectif est de préserver à la fois le pouvoir d'achat des ménages et la compétitivité des entreprises. Avis défavorable.

M. Jean-Louis Borloo, ministre d'État.  - Même avis. Il faut laisser la porte ouverte au maximum pour éviter toute atteinte au pouvoir d'achat, quelle que soit la situation des personnes.

Madame Bricq, l'Assemblée nationale a adopté le principe de la conférence de consensus. L'Ademe a été saisie pour mener les travaux préparatoires, un rapport interministériel est en cours et les nominations d'experts sont à la signature.

La France n'a pas à rougir. Les chiffres pour 2007 viennent de tomber : nous avons réduit de 2 % nos émissions de gaz à effet de serre en équivalent CO2 par rapport à 2006. Peu de pays ont signé et, a fortiori, ratifié le protocole de Kyoto ; encore moins l'honorent. La France, pour sa part, est en avance de 5,6 % par rapport à ses engagements ! Nous sommes revenus au niveau de 1990. Preuve que la France a de vraies capacités en la matière !

M. Dominique Braye.  - Merci à l'énergie électrique !

L'amendement n°246 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°317 rectifié, présenté par M. Courteau et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Compléter le septième alinéa du II de cet article par une phrase ainsi rédigée :

En cas d'institution, cette contribution sera pour partie affectée au financement des transports collectifs.

M. Roland Courteau.  - Les besoins en matière de transports collectifs sont énormes. Dans certaines zones urbaines, l'indispensable rénovation des réseaux suppose de lourds investissements.

Je remercie le ministre d'État d'avoir en partie répondu au souci exprimé par Mme Bricq.

M. Bruno Sido, rapporteur.  - Il n'est pas opportun de prévoir le fléchage d'une contribution qui fait encore l'objet d'études, ni de privilégier d'ores et déjà un secteur plutôt qu'un autre. Laissons-nous le temps de la réflexion. Avis défavorable.

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État.  - Avis défavorable. On ne peut pas préjuger qu'il s'agira d'un prélèvement supplémentaire et bien d'autres secteurs, comme par exemple les économies d'énergie des ménages, pourraient y prétendre.

M. Roland Courteau.  - En effet, la contribution n'est pas encore créée. C'est pourquoi nous prenons la précaution de préciser qu'elle sera, pour partie seulement, affectée au financement des transports collectifs.

Tout le monde ici, du moins de ce côté-ci de l'hémicycle, s'accorde à dire qu'il faut développer et moderniser nos transports collectifs. Faisons preuve de volontarisme et prévoyons dès aujourd'hui qu'une partie du produit de cette contribution, si elle est un jour instaurée, sera affectée aux transports en commun.

Mme Nicole Bricq.  - Notre amendement a sa logique même si cette contribution n'existe pas encore. Si nous voulons créer une fiscalité écologique digne de ce nom, tout en maintenant le principe de la stabilité des prélèvements obligatoires, nous devrons répartir autrement l'argent dont nous disposons. Pour éviter que cette contribution soit ressentie comme une taxe additionnelle au profit des plus aisés, il faut prévoir d'ores et déjà des modes de redistribution. Quand nous défendons, à l'occasion des lois de finances, l'institution d'une taxe carbone, nous prévoyons la création d'un fonds de mutation énergétique dont le rôle serait notamment de développer les transports collectifs. Ces derniers ne constituent d'ailleurs pas le seul vecteur de redistribution : il faudrait également diminuer les charges pesant sur les locataires de logements sociaux. Mais les transports en commun sont un service public fortement redistributeur.

Peut-être est-ce mettre la charrue avant les boeufs que de prévoir l'affectation du produit de cette taxe avant qu'elle ne soit créée, mais il est important de poser dès à présent le principe d'une fiscalité écologique à visée sociale.

M. Jean-Louis Borloo, ministre d'État.  - Ne confondons pas deux choses. Les revenus tirés de la mise aux enchères des quotas d'émissions de gaz à effet de serre seront affectés pour une part significative -40 ou 50 %- à la transition énergétique, et notamment aux transports collectifs, conformément à la directive européenne. Quant à la contribution « climat énergie », elle doit avoir une visée redistributrice et créer un signal prix : les gens seront libres de choisir. Si nous prévoyons d'affecter le produit de cette contribution à telle ou telle politique de droit commun, il s'agirait d'une véritable taxe !

N'allons pas trop vite : nous souhaitons naturellement augmenter le pouvoir d'achat des ménages, par le biais des charges notamment. Mais cette contribution doit être, en matière de pouvoir d'achat, à la fois sociale et neutre.

Mme Nicole Bricq.  - Les transports collectifs ont une visée éminemment sociale, puisqu'ils sont un service public !

L'amendement n°317 rectifié n'est pas adopté.

L'article 2, modifié, est adopté.

Article additionnel

M. le président.  - Amendement n°613 rectifié, présenté par M. Pintat, Mme Des Esgaulx, MM. Doublet et Laurent.

Après l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article L. 515-12 du code de l'environnement, il est inséré un article L. 515-12-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 515-12-1.- L'autorisation d'implantation d'une installation visée à l'article L. 515-8 ne peut être accordée que si le demandeur établit que l'activité de cette installation est, directement ou indirectement, conforme à l'engagement national de réduction des émissions de gaz à effet de serre fixé par l'article 2 de la loi n°2005-781 du 13 juillet 2005 de programme fixant les orientations de la politique énergétique. »

M. Michel Doublet.  - La loi de programme du 13 juillet 2005 fixant les orientations de la politique énergétique prévoyait une réduction de 3 % par an des émissions de gaz à effet de serre en France et l'élaboration par l'État d'un plan « climat ».

Dans cette perspective, il serait souhaitable d'inscrire dans le code de l'environnement que les autorisations d'implantation des installations susceptibles de donner lieu à des servitudes d'utilité publique sont subordonnées au respect des principes de cette loi.

M. Bruno Sido, rapporteur.  - Nous partageons le souci de réduire les émissions de gaz à effet de serre mais nous considérons que cette disposition serait dommageable au plan économique et inefficace au plan écologique. Soumettre chaque installation au respect des principes de la loi empêcherait toute flexibilité entre les opérateurs. Il faut raisonner en termes globaux et nationaux. Retrait, sinon rejet.

M. Jean-Louis Borloo, ministre d'État.  - Même avis.

M. Michel Doublet.  - Les installations industrielles dangereuses suscitent légitimement l'inquiétude des habitants et des élus. La législation française encadre leur implantation mais il faudrait renforcer ces dispositions. Notre amendement vise à inscrire parmi les servitudes d'utilité publique pesant sur les installations classées « Seveo II AS », c'est-à-dire les plus dangereuses, l'obligation de respecter l'objectif de réduction des émissions de gaz à effet de serre. Chacun sait que l'industrie est à l'origine d'une grande partie de ces émissions. Cette mesure contribuerait à l'application effective de la loi.

Cependant, j'ai entendu l'avis de la commission et du Gouvernement et je retire l'amendement. J'espère que nous reviendrons sur ce sujet à l'occasion du Grenelle II.

L'amendement n°613 rectifié est retiré.

Article 3

Le secteur du bâtiment, qui consomme plus de 40 % de l'énergie finale et contribue pour près du quart aux émissions nationales de gaz à effet de serre, représente le principal gisement d'économies d'énergie exploitable immédiatement. Un plan de rénovation énergétique et thermique des constructions, réalisé à grande échelle, réduira durablement les dépenses énergétiques, améliorera le pouvoir d'achat des ménages et contribuera à la réduction des émissions de dioxyde de carbone. Cette amélioration implique le développement et la diffusion de nouvelles technologies dans la construction neuve et la mise en oeuvre d'un programme de rénovation accélérée du parc existant, en prenant systématiquement en compte l'objectif d'accessibilité aux personnes à mobilité réduite prévu par la législation nationale.

M. Jean Louis Masson.  - Il existe deux moyens de lutter contre les gaz à effet de serre : réduire la consommation d'énergie et développer des énergies nouvelles. Ces deux moyens sont complémentaires mais il faut comparer leur coût et leur efficacité.

Or, dans le secteur de l'existant, il revient moins cher de financer des équipements permettant de faire des économies d'énergie que de développer certaines énergies nouvelles. Je pense notamment aux éoliennes, dont le coût est très élevé. On dissimule la vérité à nos concitoyens : EDF rachète l'énergie éolienne plus cher que ce que lui coûte la production d'énergie dans ses propres centrales. Cela revient à faire payer le consommateur, sinon le contribuable ! (M. Roland Courteau le conteste)

Il convient donc de réorienter les dépenses publiques et, plutôt que de financer l'énergie éolienne à laquelle je crois peu, mieux vaut favoriser les économies d'énergie. Cela éviterait aussi les pics de consommation en hiver.

M. le président.  - Amendement n°8, présenté par M. Sido, au nom de la commission.

Dans la deuxième phrase de cet article, remplacer les mots :

des constructions

par les mots :

des bâtiments existants et de réduction des consommations énergétiques des constructions neuves

M. Bruno Sido, rapporteur.  - Amendement de clarification.

M. Jean-Louis Borloo, ministre d'État.  - Avis favorable.

L'amendement n°8 est adopté.

M. le président.  - Amendement n°153, présenté par M. Repentin et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Dans la dernière phrase de cet article, après le mot :

technologies

insérer les mots :

, en particulier les techniques favorisant l'utilisation des végétaux,

M. Thierry Repentin.  - Cet amendement a pour objet d'introduire la référence à l'utilisation de techniques utilisant des végétaux -toitures végétalisées, murs végétaux...- parmi les nouvelles technologies à développer dans la construction et la rénovation de bâtiment car elles améliorent l'isolation thermique et permettent des gains d'énergie.

Méconnue en France, la technique des toitures végétalisées est très répandue dans la plupart des pays d'Europe. En Allemagne, où le marché est estimé à 13 millions de mètres carrés par an, plus de 40 % des villes proposent des incitations financières pour leur développement. Une commune de Suisse prélève même une taxe de CHF 40 par mètre carré de surface bâtie sur les bâtiments sans végétalisation et sans infiltration de l'eau pluviale. Certaines études montrent que la végétalisation des toits a des effets sensibles sur la température ambiante. Elle améliore également le confort thermique et acoustique intérieur.

M. Bruno Sido, rapporteur.  - Je l'ai déjà dit : nous débattons d'une loi de programme et nous ne devons pas nous perdre dans les détails. L'article 3 énonce les objectifs généraux du plan de rénovation des bâtiments, et je crois qu'il faut en rester là. La commission a demandé le retrait de l'amendement mais, pour plus de sûreté, je sollicite l'avis du Gouvernement.

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État.  - Nous sommes tout à fait favorables aux toitures végétalisées mais d'autres techniques existent. L'article 3 mentionne en général les « nouvelles technologies » et si l'on citait les techniques végétales, il faudrait énumérer toutes les autres. Retrait.

M. Thierry Repentin.  - Je suis heureux que vous considériez que les techniques végétales font partie des « nouvelles technologies » ; cette expression laissait à penser que ne seraient pris en compte que les nouveaux matériaux. Il existe de nombreuses techniques nouvelles qui utilisent des végétaux : les toitures végétalisées, mais aussi les bâtiments dont l'ossature est en bois et qui intègrent de la paille au lieu de briques. Il ne faut pas les négliger. Mais compte tenu de ces précisions, je retire l'amendement.

L'amendement n°153 est retiré.

M. le président.  - Amendement n°152, présenté par M. Repentin et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Dans la dernière phrase de cet article, après les mots :

construction neuve

insérer les mots :

, l'adoption d'une démarche d'éco-construction

M. Thierry Repentin.  - Le secteur du logement, qui consomme plus de 40 % de l'énergie finale, est responsable d'un quart des émissions de gaz à effet de serre. Développer des techniques nouvelles dans les constructions nouvelles ne suffit pas. C'est une approche globale qu'il convient de retenir, celle de l'éco-construction. Elle suppose un contrôle de toute la chaîne, depuis l'identification de l'impact environnemental d'un projet de construction jusqu'à l'utilisation de matériaux écologiques et naturels peu consommateurs d'énergie pour leur fabrication, leur transport et leur mise en oeuvre, en passant par les techniques intelligentes de construction non polluante, d'éclairage naturel, d'isolation thermique.

L'éco-construction, c'est un réseau entier de PME qui attend des solutions pour relever le défi gigantesque qui est devant nous. Je sais bien que l'article 6 y fait référence, mais dans le cadre d'une plate-forme et non comme une filière à part entière.

M. Bruno Sido, rapporteur.  - Je suis en accord sur le fond, mais votre proposition est déjà satisfaite, en effet, par l'article 6 qui précise que l'État encourage la formation professionnelle dans le domaine de l'efficacité énergétique et que les programmes publics de recherche sont orientés vers les nouvelles générations de bâtiments répondant à des critères qui sont bien ceux de l'éco-construction. Retrait.

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État.  - Le Gouvernement est évidemment favorable au principe de l'éco-construction mais, comme l'a rappelé le rapporteur, il est intégré à l'article 6 qui fait bien référence, monsieur Repentin, à des filières.

L'amendement n°152 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°9, présenté par M. Sido, au nom de la commission.

A la fin de la dernière phrase de cet article, remplacer les mots :

à mobilité réduite prévu par la législation nationale

par les mots :

présentant un handicap au sens de l'article L. 114 du code de l'action sociale et des familles

M. Bruno Sido, rapporteur.  - Précision.

M. Jean-Louis Borloo, ministre d'État.  - Favorable.

M. Alain Vasselle.  - Je comprends mal. Nous avons voté, en 2005, la loi « handicap », qui prévoit déjà que les bâtiments doivent être adaptés. A quoi bon cette redite ? Ne risque-t-on pas, avec cette disposition, d'obliger tout constructeur individuel, c'est-à-dire tout particulier, à adapter son logement, que cela soit ou non nécessaire ? Je souhaite que l'on y réfléchisse dans le cadre de la navette et que l'on mesure l'impact économique que pourrait avoir cette disposition sur le pouvoir d'achat des constructeurs individuels.

M. Bruno Sido, rapporteur.  - Ce sont les députés qui ont cru devoir introduire cette disposition, en effet déjà votée dans un autre texte. A la suite de quoi, les associations de handicapés nous ont fait savoir que les personnes à mobilité réduite n'étaient pas les seules concernées par une disposition qui devait pouvoir bénéficier à tous les handicapés. La suppression pure et simple de cette disposition aurait déplu aux députés comme aux associations. Vous comprendrez mieux les raisons de cette position médiane.

L'amendement n°9 est adopté.

M. le président.  - Amendement n°259, présenté par Mme Didier et les membres du groupe CRC-SPG.

Compléter cet article par une phrase ainsi rédigée :

Dans ce cadre, l'État renforce son action et les financements publics afin de garantir le droit au logement opposable et l'éradication des logements insalubres.

Mme Odette Terrade.  - C'est à juste titre que ce texte accorde une part importante au secteur du bâtiment. Mais on a un peu l'impression que le seul problème tiendrait à l'isolation des logements. Peut-on oublier tous ceux qui dorment dans la rue, toutes les familles qui vivent dans des conditions insalubres mettant leur vie en péril ? Les accidents, y compris dans le parc privé, sont bien souvent mortels. Nous souhaitons voir l'État renforcer les financements publics pour garantir un vrai droit au logement opposable, auquel les rénovations de bâtiments ancien peuvent concourir.

M. Bruno Sido, rapporteur.  - Nous partageons tous votre préoccupation, mais je vous rappelle que nous sommes dans le cadre d'un texte sur l'environnement et non pas sur le logement. Le Sénat a largement débattu, en octobre, du projet de loi de mobilisation pour le logement.

J'ajoute que cet article porte sur la rénovation des bâtiments et l'amélioration des performances énergétiques des constructions nouvelles. Il est sans rapport avec la question du droit au logement opposable. Retrait ou rejet.

L'amendement n°259, repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.

L'article 3, modifié, est adopté.

Article 4

La réglementation thermique applicable aux constructions neuves sera renforcée afin de réduire les consommations d'énergie et les émissions de gaz à effet de serre. Elle s'attachera à susciter une évolution technologique et industrielle significative dans le domaine de la conception et de l'isolation des bâtiments et pour chacune des filières énergétiques, dans le cadre d'un bouquet énergétique équilibré, faiblement émetteur de gaz à effet de serre et contribuant à l'indépendance énergétique nationale.

L'État se fixe comme objectifs que :

a) Toutes les constructions neuves faisant l'objet d'une demande de permis de construire déposée à compter de la fin 2012 et, par anticipation à compter de la fin 2010, s'il s'agit de bâtiments publics et de bâtiments affectés au secteur tertiaire, présentent une consommation d'énergie primaire inférieure à un seuil de 50 kilowattheures par mètre carré et par an en moyenne ; pour les énergies qui présentent un bilan avantageux en termes d'émissions de gaz à effet de serre, ce seuil sera modulé afin d'encourager la diminution des émissions de gaz à effet de serre générées par l'énergie utilisée, conformément au premier alinéa ; ce seuil pourra également être modulé en fonction de la localisation, des caractéristiques et de l'usage des bâtiments ; chaque filière énergétique devra, en tout état de cause, réduire très fortement les exigences de consommation d'énergie définies par les réglementations auxquelles elle est assujettie à la date d'entrée en vigueur de la présente loi. Afin de garantir la qualité de conception énergétique du bâti, la réglementation thermique fixera en outre un seuil ambitieux de besoin maximal en énergie de chauffage des bâtiments ; ce seuil pourra être modulé en fonction de la localisation, des caractéristiques et de l'usage des bâtiments ;

b) Toutes les constructions neuves faisant l'objet d'une demande de permis de construire déposée à compter de la fin 2020 présentent, sauf exception, une consommation d'énergie primaire inférieure à la quantité d'énergie renouvelable produite dans ces constructions et notamment le bois-énergie ;

c) Les logements neufs construits dans le cadre du programme national de rénovation urbaine prévu par la loi n°2003-710 du 1er août 2003 d'orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine respectent par anticipation les exigences prévues au a.

Les normes susmentionnées seront adaptées à l'utilisation du bois comme matériau, en veillant à ce que soit privilégiée l'utilisation de bois certifié et d'une façon plus générale, des bio-matériaux sans conséquence négative pour la santé des habitants et des artisans.

Pour atteindre ces objectifs, les acquéreurs de logements dont la performance énergétique excèdera les seuils fixés par la réglementation applicable pourront bénéficier d'un avantage supplémentaire au titre de l'aide à l'accession à la propriété et du prêt à taux zéro.

M. Jean Louis Masson.  - C'est dans le domaine du logement neuf que l'on peut le plus aisément avancer, grâce aux contraintes réglementaires et aux incitations financières. On peut, fiscalement parlant, jouer en particulier sur le taux de TVA pour favoriser de façon très nette la qualité écologique et énergétique des bâtiments et, réglementairement parlant, imposer à terme aux constructeurs des installations énergétiquement vertueuses -photovoltaïque, pompe à chaleur, chauffage solaire.

Les amendements nos158 rectifié et 157 rectifié bis sont retirés.

M. le président.  - Amendement n°635, présenté par MM. Muller, Desessard, Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet.

Dans la première phrase du troisième alinéa (a) de cet article, après les mots :

par an en moyenne

insérer les mots :

, sans modulation

et supprimer les deux membres de phrase :

pour les énergies qui présentent un bilan avantageux en termes d'émissions de gaz à effet de serre, ce seuil sera modulé afin d'encourager la diminution des émissions de gaz à effet de serre générées par l'énergie utilisée, conformément au premier alinéa ; ce seuil pourra également être modulé en fonction de la localisation, des caractéristiques et de l'usage des bâtiments ;

M. Jacques Muller.  - Le Grenelle avait permis de parvenir à un compromis fort sur le seuil maximal d'émissions de gaz à effet de serre dans les bâtiments. Le chiffre de 50 kilowattheures par mètre carré, validé par les professionnels, avait été retenu. L'enjeu est essentiel. Or, j'ai le sentiment de voir se rejouer ce que nous avons vécu avec la loi OGM : les lobbies reviennent à la charge pour tirer le projet du Gouvernement vers le bas. Un principe de modulation a en effet été introduit à l'Assemblée nationale, qui limite les normes retenues en fonction de la source d'énergie primaire. C'est une véritable prime au chauffage électrique d'origine nucléaire ! On sait pourtant, de très sérieuses études allemandes l'ont montré, que le bilan d'émission de gaz à effet de serre par kilowattheure sorti des centrales nucléaires est loin d'être meilleur que les autres. Extraire l'uranium, le transporter, le traiter consomme beaucoup d'énergie.

Si on raisonne en termes de chauffage, le bilan n'est pas bon non plus puisque le nucléaire est incapable de faire face à des pointes de consommation lors desquelles, de ce fait, il faut faire appel à d'autres sources d'énergie. Madame la secrétaire d'État, permettez-moi de rappeler que, selon l'Ademe, pour un kWh de chauffage électrique, on rejette 500 à 600 grammes de CO2. Ce texte fondateur ne doit pas contenir ce genre d'hypocrisie.

En outre, l'énergie la moins polluante de toutes, c'est celle que l'on ne consomme pas. Revenir ainsi sur l'impératif d'économie d'énergie, c'est du sabotage.

M. le président.  - Amendement n°320 rectifié, présenté par M. Courteau et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Dans la première phrase du troisième alinéa (a) de cet article, après les mots :

en termes d'émissions de gaz à effet de serre

insérer les mots :

et pour les énergies renouvelables

M. Roland Courteau.  - L'Assemblée nationale a introduit une modulation du seuil de 50 kWh/m2 en fonction du niveau d'émission de gaz à effet de serre de l'énergie concernée. Cette modification reprend donc deux des trois objectifs du paquet « énergie climat » : l'efficacité énergétique et la réduction des émissions de CO2. Il manque le troisième pilier que sont les énergies renouvelables. Leur prise en compte facilitera leur intégration dès la conception des bâtiments neufs et confortera des filières industrielles très créatrices d'emplois.

Mais je m'aperçois que cet amendement est mal rédigé et j'y renonce.

L'amendement n°320 rectifié est retiré.

M. Bruno Sido, rapporteur.  - Le n°635 revient sur une modulation indispensable pour traiter de façon équivalente les différentes filières énergétiques. Il appartiendra à l'Office de faire le point et de favoriser au maximum la diminution des gaz à effet de serre. De plus, si l'on consomme de l'énergie pour extraire et transporter l'uranium, c'est exactement la même chose pour le gaz ou le pétrole. En réalité, nous avons un désaccord de fond sur le nucléaire et vous cherchez à tout prix à le disqualifier. Mais réfléchissez aux émissions de CO2 des autres sources d'énergie et aussi à leur coût pour le consommateur. Avis défavorable.

M. Jean-Louis Borloo, ministre d'État.  - L'objectif des partenaires -parmi lesquels les professionnels du bâtiment- n'était pas d'orienter l'énergie française mais d'améliorer notre performance énergétique parce que, en ce domaine, nous sommes les derniers de la classe. Nous faisons donc bouger tous les modes d'énergie sans en privilégier aucun. Lorsque les députés ont introduit cette modulation dans le texte, ils n'ont innové ni dans nos pratiques, ni dans notre droit.

M. Jacques Muller.  - Je suis tout à fait d'accord sur l'objectif de réduire les émissions de GES. Mais pourquoi une énergie serait-elle exonérée de l'effort ?

M. Jean-Louis Borloo, ministre d'État.  - Elle n'est pas exonérée.

M. Jacques Muller.  - C'est une prime au nucléaire ! Nous sommes inondés de publicités pour le chauffage électrique. Et ici on veut assouplir les normes pour le nucléaire ! C'est bien la preuve que la diminution des GES n'est pas la priorité.

L'amendement n°635 n'est pas adopté.

M. le président. - Amendement n°627 rectifié, présenté par MM. Vall, Collin, Barbier, Baylet, Fortassin, Mme Laborde, MM. Mézard, Milhau et Plancade.

A la fin du premier membre de phrase de la première phrase du troisième alinéa (a) de cet article, après les mots :

en moyenne ;

insérer un membre de phrase ainsi rédigé :

ce seuil sera corrigé pour prendre en compte la taille des logements ;

M. Jacques Mézard.  - Nous souhaitons introduire une modulation du seuil de 50 kWh/m2 par an selon la taille des logements. Afin de ne pas faire peser l'effort de façon injuste sur les petits logements. Plus petite est la taille du logement, plus forte, en règle générale, est la densité d'occupation et la part de consommation énergétique consacrée à l'eau chaude y est, en proportion, plus importante que dans les grands logements. Un seuil uniforme de consommation recouvrant tous les usages se traduirait, pour les petits logements, par une impossibilité, de fait, de se chauffer. En modulant l'effort selon la surface du logement, l'amendement répartit l'effort de manière équitable entre les différentes catégories de logement sans pénaliser les occupants les plus modestes.

M. Bruno Sido, rapporteur.  - L'article 4 prévoit que le seuil de 50 kWh/m2/an sera modulé selon des caractéristiques qui pourront être la taille du logement ou la latitude. Votre amendement est donc satisfait. Retrait ou rejet.

L'amendement n°627 rectifié est retiré.

M. le président.  - Amendement n°615, présenté par M. Gournac.

Dans la première phrase du troisième alinéa (a), après les mots :

l'usage des bâtiments ;

insérer un membre de phrase ainsi rédigé :

dans le cas des logements, la surface totale rapportée au nombre d'occupants fait partie des caractéristiques prises en compte dans le calcul de ce seuil ;

M. Alain Gournac.  - La consommation d'énergie, particulièrement pour l'eau chaude sanitaire, n'est pas liée à la surface de l'habitation mais au nombre d'occupants.

M. Bruno Sido, rapporteur.  - Le nombre d'habitants par mètre carré influe sur la consommation mais il serait difficile à prendre en compte car c'est au stade du permis de construire que le calcul sera fait. Votre amendement n'est pas opérationnel. Retrait.

M. Alain Gournac.  - Je souhaiterais connaître l'avis du Gouvernement.

M. Dominique Braye.  - Bien qu'ayant retiré mes deux amendements, je tiens à m'exprimer sur ce sujet.

Le problème est certes compliqué, mais réel. Un jeune couple avec deux ou trois enfants, occupant un appartement de 45 mètres carrés dans un HLM, avec un chauffage électrique, ne pourrait-il installer un ballon d'eau chaude ? Je vous rappelle, monsieur le ministre, vous qui avez eu la responsabilité du logement, que sur les 425 000 appartements construits en 2007, 325 000 sont équipés de chauffage électrique, dont l'installation et le fonctionnement sont actuellement les moins chers. En portant ainsi atteinte aux projets des bailleurs sociaux et des accédants, le Grenelle se révèle totalement antisocial. Vous conseillez d'installer des pompes à chaleur et des panneaux photovoltaïques, mais en mesurez-vous bien le coût et les contraintes techniques ?

Monsieur le ministre, la représentation nationale comme les présidents d'associations de bailleurs sociaux souhaitent entendre votre position sur ce sujet. Que se passera-t-il pour les ménages avec enfants occupant un petit logement ou souhaitant acquérir une maison de 76 mètres carrés ? Voulez-vous aggraver la situation de tous ceux qui souhaitent devenir propriétaires mais ne le peuvent...

Vous allez pénaliser les populations les plus modestes alors que nous sommes les champions européens en ce qui concerne la réduction des émissions de gaz à effet de serre. Vous voulez laver plus blanc que blanc, sur leur dos ? Je ne peux soutenir ce dispositif.

M. Jean-Louis Borloo, ministre d'État.  - Le coût de l'éclairage et du chauffage pour les ménages français est le plus élevé d'Europe. La quote-part correspondante dans le budget des plus modestes est passée en sept ans de 10 à 15 % et le nombre d'impayés est très élevé. Dans les années à venir, le coût des différentes énergies ne peut qu'augmenter. La question du pouvoir d'achat est donc cruciale, et ne pourra se résoudre qu'en réduisant les besoins énergétiques grâce à l'isolation, à la mise en veille des appareils électriques, aux ampoules à incandescence, etc.

Le retard que connaît la France en la matière s'explique par notre climat, globalement tempéré, et par l'existence de services publics de qualité, tant dans le domaine de l'électricité que du gaz. Depuis une quinzaine d'années, nous fixons des normes avec les industriels et les fédérations du bâtiment, avec pour objectif de réduire de moitié la facture énergétique de nos concitoyens. Les ménages profiteront de ces économies d'énergie. Ils ne subiront pas les normes car celles-ci ne concernent que les permis de construire et ce, quel que soit le nombre de mètres carrés. Quant au nombre d'occupants, on ne saurait le retenir puisqu'il évolue au fil du temps.

Reste que l'avantage accordé à l'électricité n'est pas remis en cause. La mutation sera raisonnable, et même très modeste comparée à l'ensemble de l'Union européenne. Je demande donc à M. Gournac de retirer son amendement.

L'amendement n°615 est retiré.

M. le président. - Amendement n°10, présenté par M. Sido au nom de la commission.

Compléter le troisième alinéa (a) de cet article par un membre de phrase ainsi rédigé :

une étude de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques sera réalisée afin de proposer un niveau pertinent de modulation pour respecter les objectifs fixés au premier alinéa ;

M. Bruno Sido, rapporteur  - Nous souhaitons associer le Parlement à la définition des modulations du seuil de 50 kilowattheures afin de s'assurer que toutes les sources d'énergie seront traitées équitablement. Certaines modalités d'application de la loi de programme relèvent du pouvoir réglementaire. Cet office pourra éclairer ce dernier en faisant le point sur les émissions réelles de gaz à effet de serre des différentes filières, dont l'évaluation est sujette à des divergences liées aux méthodes de calcul.

M. le président.  - Sous-amendement n°361 à l'amendement n°10 de M. Sido au nom de la commission, présenté par M. Vasselle.

Compléter le deuxième alinéa de l'amendement n°10 par les mots :

, et de mesurer l'impact économique et fiscal de l'ensemble du dispositif prévu

M. Alain Vasselle.  - Étant membre de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques, je sais qu'il réalise des études essentiellement technologiques. Il serait bon, toutefois, qu'il étudie également l'impact économique de la modulation, ainsi que ses répercussions sur la fiscalité nationale par le biais du financement des logements sociaux.

Lors de la discussion générale, j'ai écouté la réponse de Mme le ministre à mes remarques et noté que le Gouvernement escompte de cette mesure des retombées économiques positives. Je souhaiterais également en connaître les conséquences sur le pouvoir d'achat des ménages et sur le budget des collectivités locales.

M. le ministre d'État nous a indiqué que cette disposition ne s'appliquerait qu'aux constructions neuves. Toutefois, les constructeurs répercutant les coûts de construction sur les loyers, il ne faudrait pas que ces charges fassent perdre aux ménages les avantages liés à la diminution de la consommation d'énergie !

M. le président.  - Sous-amendement n°773 à l'amendement n°10 de M. Sido au nom de la commission, présenté par M. Daniel Raoul et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Compléter le second alinéa de l'amendement n°10 par les mots :

cette étude révisera également les facteurs de conversion de l'énergie finale en énergie primaire ;

M. Daniel Raoul.  - La France est la deuxième puissance nucléaire du monde et le premier producteur d'électricité nucléaire. Le parc français assure donc notre indépendance énergétique. Toutefois, lors des pointes de consommation, il nous faut importer de l'électricité ou faire appel à des centrales thermiques, qui produisent davantage de gaz à effet de serre. Ainsi se fournissent de petits opérateurs qui, depuis l'ouverture du marché à la concurrence, profitent de ces périodes pour vendre de l'énergie plus cher. Si la concurrence y gagne, il n'en est pas de même pour le consommateur. L'électricité étant un bien de première nécessité, son prix devrait demeurer abordable. En outre, nous sommes également perdants du point de vue de la pollution.

Il faut parvenir à une gestion plus efficace des périodes de pointe. Nous y reviendrons au chapitre IV. Mais il faut aussi modifier le facteur de conversion. Pour l'électricité, il est le même, 2,58, quel que soit la source. Pour le gaz, il est de 1. Tenons compte des modes de production de l'énergie consommée. Incluons ce point dans l'étude. Et jouons la transparence.

M. le président.  - Sous-amendement n°778 à l'amendement n°10 de M. Sido, au nom de la commission, présenté par MM. Vall, Collin, Barbier, Baylet, Fortassin, Mme Laborde, MM. Mézard, Milhau et Plancade.

Compléter le second alinéa de l'amendement n°10 par les mots :

en outre, l'étude pourra examiner les questions liées aux coefficients de conversion d'énergie primaire et en énergie finale ;

M. François Fortassin.  - Les facteurs de conversion en vigueur pour définir l'énergie primaire à partir de l'énergie finale varient de 2,58 pour l'électricité à 0,6 pour le bois. Le calcul des coefficients date de 1973 -c'était l'époque du gaz de Lacq- et n'a pas été modifié depuis. Or l'approvisionnement en gaz de la France dépend d'importations de plus en plus lointaines et entraîne des déperditions énergétiques -transport, liquéfaction, traitement. Quelle validité conserve ce coefficient de 1 ?

La part des énergies fossiles dans la production d'énergie électrique est aujourd'hui inférieure à 10 %. La plupart des centrales sont à cycles combinés avec récupération de la chaleur produite. Il faut revoir les coefficients.

M. le président.  - Sous-amendement n°784 à l'amendement n°10 de M. Sido, au nom de la commission, présenté par M. Deneux et les membres du groupe UC.

Compléter le second alinéa de l'amendement n°10 par les mots :

en outre, l'étude devra examiner les questions liées aux coefficients de conversion d'énergie primaire et en énergie finale ;

M. Marcel Deneux.  - Nous dérivons du coeur de notre sujet lorsque nous ne parlons que de prix : ce projet, comme la loi de 2005, porte sur la consommation de l'énergie, non sur son prix.

Il existe un coefficient perturbateur, qui est ce coefficient de conversion entre énergie primaire et énergie finale. L'étude devra procéder à son évaluation, mais en masse et non en prix du kilowattheure. Tous ceux qui se sont exprimés ont parlé des coûts et des aspects sociaux. Ils ont raison de le faire mais ce n'est pas la question ici.

M. Bruno Sido, rapporteur.  - Je suis tout à fait favorable à votre proposition, monsieur Vasselle, mais l'aspect fiscal n'est pas le coeur de notre débat : je vous suggère de supprimer les mots « et fiscal ».

M. Alain Vasselle.  - D'accord pour rectifier mon sous-amendement.

M. Bruno Sido, rapporteur.  - Les autres sous-amendements n'ont pas été examinés par la commission mais ils rejoignent une proposition de M. Vall sur laquelle nous avons émis un avis de sagesse.

Il est vrai que le coefficient date d'avant 1973 et que la structure de notre parc de production d'électricité a évolué. Mais les spécialistes ne le remettent pas en cause. L'étude ne conduira-t-elle pas à creuser l'écart entre les filières ? La rédaction du sous-amendement n°773 est un peu trop directive : la révision n'est qu'éventuelle !

La rédaction des trois sous-amendements serait plus satisfaisante si les auteurs la formulaient ainsi : « cette étude examinera également les questions liées aux coefficients de conversion d'énergie finale en énergie primaire ; ».

M. Daniel Raoul.  - D'accord. Mais Légifrance mentionne des facteurs de conversion et non des coefficients !

M. Bruno Sido, rapporteur.  - Soit ! Remplaçons « coefficients » par « facteurs ».

M. François Fortassin.  - Va pour le facteur de conversion, à condition qu'il ne soit pas dans la région parisienne ! (Sourires)

M. Marcel Deneux.  - Je me rallie à la rédaction du rapporteur. Ne faudrait-il pas en outre prévoir un calendrier ? Je sais comment fonctionne l'Office...

M. Jean-Paul Emorine, président de la commission des affaires économiques.  - L'urgence n'a pas été déclarée sur ce texte. En accord avec M. Patrick Ollier à l'Assemblée nationale, nous pourrions saisir l'Office et lui demander de nous remettre ses conclusions avant la deuxième lecture. (Marques d'assentiment sur divers bancs)

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État.  - Favorable à l'amendement de la commission, comme au sous-amendement n°361, avec la restriction indiquée déjà par votre rapporteur. Monsieur Vasselle, le principe est que les économies d'énergie compensent l'investissement initial.

Favorable aussi aux trois sous-amendements, rectifiés et désormais identiques, relatifs au facteur de conversion.

Le sous-amendement n°361 rectifié est adopté.

Les sous-amendements identiques nos773 rectifié, 778 rectifié, 784 rectifié sont adoptés.

M. Dominique Braye.  - J'oserai ici reprendre à mon compte des slogans très en vogue, « I have a dream » et « yes we can ». (Murmures flatteurs) J'ai fait un rêve : celui d'un débat serein et libre au sein de la Haute assemblée, sur tous les sujets importants dont elle est saisie. Oui, nous le pouvons, dans le cadre actuel de notre Règlement, si nous avons le courage de mettre en oeuvre les dispositions qui le permettent et si nous savons résister aux pressions dont nous sommes l'objet. J'ai retiré deux excellents amendements, n°157 et n°158, qui avaient été adoptés à la quasi-unanimité de la commission et qui étaient signés par un grand nombre de collègues des groupes UMP et UC. Je remercie ces derniers d'avoir choisi le bon sens et le pragmatisme et d'avoir refusé de se laisser impressionner par les manoeuvres qui ont suivi le dépôt de ces amendements...

Je m'excuse aussi auprès des cosignataires pour les pressions, le harcèlement devrais-je dire, dont ils ont été victimes, jusqu'à quelques secondes de l'ouverture de la séance : certains ont reçu ce matin, et jusqu'à 14 heures 59, pas moins de sept appels téléphoniques.

Je croyais que le Parlement pouvait travailler dans la sérénité, hors de pressions qui sont proprement inacceptables au regard de la séparation des pouvoirs entre l'exécutif et le législatif. C'est cette séparation des pouvoirs qui seule garantit la démocratie.

Dans quelques semaines, nous travaillerons d'une autre façon. Avons-nous entendu le chant du cygne de méthodes désuètes ? Ou est-ce la prémonition de ce qui nous attend ? Comme le dit le premier d'entre nous, le Président de la République, il ne faut jamais avoir peur du débat. Monsieur le ministre, il ne faut jamais tronquer le débat, le Président de la République lui-même nous le demande.

On nous dit que nous privilégions une énergie sur une autre : non, nous en privilégions deux et en pénalisons une, car lorsque l'on consomme 1 kilowattheure d'électricité, le coefficient est de 2,58, alors qu'il est de 1 pour le gaz ou le fioul.

Ce qui nous est proposé peut avoir des conséquences environnementales, économiques et sociétales très importantes. Il eût fallu que le Gouvernement nous expliquât, nous prouvât la justesse de sa position car les spécialistes de la question sont en majorité inquiets. N'oublions jamais que les énergies qui émettent le moins de gaz à effet de serre sont le nucléaire et l'hydraulique. On pourrait d'ailleurs se demander s'il faut consommer un peu plus d'une énergie qui en émet peu ou un peu moins d'une autre qui en émet beaucoup... N'oublions pas non plus l'indépendance énergétique de notre pays. Souvenons-nous de la crise du gaz entre l'Ukraine et la Russie : nous nous en sommes sortis parce que nous ne dépendons du gaz russe qu'à hauteur de 16 %. Veut-on vraiment remettre en cause la politique d'indépendance du général de Gaulle ? N'oublions pas enfin que sur 425 000 logements construits, 300 000 sont équipés d'un chauffage électrique, ce qui permet à leurs occupants de se chauffer à moindre prix. Et comment ferait-on dans les campagnes où le gaz n'arrive pas ? Du photovoltaïque ? Qui le financera ?

M. le président.  - Veuillez conclure.

M. Dominique Braye.  - A l'heure où le pouvoir d'achat est la principale préoccupation de nos concitoyens, faut-il vraiment condamner une énergie dont le prix, aux dires du PDG d'EDF, n'augmentera pas plus que l'inflation dans les années qui viennent et n'a augmenté que de 5 % depuis 2000, alors que celui du gaz a cru avec le pétrole de 60 % ?

M. le président.  - S'il vous plait...

M. Dominique Braye.  - Pensons aux plus modestes, qui ont droit comme les autres à pouvoir se chauffer et se doucher à bonne température...

M. le président.  - C'est terminé !

L'amendement n°10, sous-amendé, est adopté.

M. le président.  - Amendement n°260, présenté par Mme Didier et les membres du groupe CRC-SPG.

Compléter la dernière phrase du troisième alinéa (a) de cet article par un membre de phrase ainsi rédigé :

toute modulation se fera en concertation avec les associations et organisations non-Gouvernementales de protection de l'environnement et de défense des consommateurs ;

Mme Odette Terrade.  - L'article 4 reprend les engagements 1 à 3 du Grenelle de l'environnement. Il a donné lieu à un intéressant débat à l'Assemblée nationale sur la possibilité de modulation de la consommation moyenne, modulation qui n'est pas sans danger. Notre amendement est dans la logique de celui de la commission, c'est un garde-fou : il ne faut pas que la modulation empêche la réalisation des objectifs de limitation des dépenses énergétiques.

Je souhaite en outre des précisions de la part du Gouvernement sur le financement de l'application anticipée des normes dans le cadre du plan national de rénovation urbaine ; dans son avis sur le texte, le CES avait noté que les mesures fiscales n'étaient pas suffisantes pour financer le surcoût et que l'État devait dégager des crédits supplémentaires. Il est en outre regrettable que les logements sociaux construits dans le cadre du plan de cohésion sociale échappent à la nouvelle réglementation.

M. Bruno Sido, rapporteur.  - Il est légitime que le Parlement soit associé à des décisions qui auront un impact non négligeable sur la vie de nos concitoyens ; donner les mêmes droits aux associations, c'est aller un peu loin, même si on doit reconnaître le rôle décisif qu'elles ont joué tout au long du Grenelle. Maintenant, comme on l'a dit, c'est au Parlement de reprendre la parole. Avis défavorable.

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État.  - Toutes les parties prenantes au Grenelle sont associées au comité de suivi et une étude sera confié à l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques. L'amendement me paraît satisfait.

L'amendement n°260 n'est pas adopté.

L'amendement n°636 rectifié est retiré.

L'article 4, modifié, est adopté.

Article 5

L'État se fixe comme objectif de réduire les consommations d'énergie du parc des bâtiments existants d'au moins 38 % d'ici à 2020. A cette fin, l'État se fixe comme objectif la rénovation complète de 400 000 logements chaque année à compter de 2013.

I. - Tous les bâtiments de l'État et de ses établissements publics seront soumis à un audit d'ici à 2010. L'objectif est, à partir du diagnostic ainsi établi, d'engager leur rénovation d'ici à 2012 avec traitement de leurs surfaces les moins économes en énergie. Cette rénovation aura pour objectif de réduire d'au moins 40 % les consommations d'énergie et d'au moins 50 % les émissions de gaz à effet de serre de ces bâtiments dans un délai de huit ans. Les gains d'énergie et le stockage de carbone réalisés grâce à la plantation d'arbres et de végétaux pérennes seront pris en compte dans la mesure de la consommation d'énergie et des émissions de gaz à effet de serre.

L'État incitera les collectivités territoriales, dans le respect de leur libre administration, à engager un programme de rénovation de leurs bâtiments en matière d'économie d'énergie dans les mêmes conditions et au même rythme qu'indiqués à l'alinéa précédent.

Lorsque les conditions définies par l'ordonnance n°2004-559 du 17 juin 2004 sur les contrats de partenariat sont satisfaites, il peut être fait appel de façon privilégiée à des contrats de partenariat public-privé pour réaliser les travaux de rénovation en matière d'économie d'énergie portant sur respectivement les 50 et 70 millions de mètres carrés de surface des bâtiments de l'État et de ses principaux établissements publics. Confrontées à la double contrainte de l'économie énergétique et des risques sismiques, les politiques engagées par les collectivités d'outre-mer en ce domaine feront l'objet d'un soutien spécifique.

Le droit de la commande publique devra prendre en compte l'objectif de réduction des consommations d'énergie visé au premier alinéa, en autorisant le pouvoir adjudicateur à recourir à un contrat de performance énergétique notamment sous la forme d'un marché global regroupant les prestations de conception, de réalisation et d'exploitation ou de maintenance, dès lors que les améliorations de l'efficacité énergétique sont garanties contractuellement.

II. - L'État se fixe comme objectif la rénovation de l'ensemble du parc de logements sociaux. Pour commencer, dès avant 2020, les travaux sur les 800 000 logements sociaux dont la consommation annuelle d'énergie est supérieure à 230 kilowattheures d'énergie primaire par mètre carré ramèneront leur consommation annuelle d'énergie à des valeurs inférieures à 150 kilowattheures d'énergie primaire par mètre carré. Ces travaux concernent en particulier 180 000 logements sociaux situés dans des zones définies par l'article 6 de la loi n°2003-710 du 1er août 2003 d'orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine.

Ce programme de rénovation est ainsi réparti :

Années

2009

2010

2011

2012 à 2020

Logements sociaux rénovés

40 000

60 000

70 000

70 000 par an

A cet effet, une enveloppe de prêts à taux privilégiés sera accordée aux organismes bailleurs de logements sociaux. Des conventions entre l'État et ces organismes définiront les conditions de réalisation du programme et prévoiront les modalités de financement des travaux de rénovation notamment à partir des économies réalisées grâce à ces travaux de rénovation. A l'appui de ces conventions, l'État pourra attribuer des subventions qui pourront s'élever jusqu'à 20 % du coût des travaux.

Les organismes bailleurs de logements sociaux seront encouragés à recourir aux énergies renouvelables.

III. - Afin de permettre une rénovation accélérée du parc résidentiel et tertiaire existant en matière d'économie d'énergie, l'État mettra en place des actions spécifiques incluant un ensemble d'incitations financières destinées à encourager la réalisation des travaux. Ainsi :

a) L'État favorisera la conclusion d'accords avec le secteur des banques et des assurances pour développer le financement des investissements d'économie d'énergie ; ces accords auront pour objet la mise en place de prêts aux particuliers dont les caractéristiques financières permettront le remboursement des annuités d'emprunt au moyen des économies d'énergie réalisées ; de même, l'État encouragera la simplification et l'aménagement des contrats de performance énergétique en vue de faciliter leur diffusion notamment dans les copropriétés ; il incitera le secteur des assurances à développer une offre de produits visant à faciliter et à garantir le bon résultat des travaux de rénovation des bâtiments résidentiels en matière d'économies d'énergie ;

b) Un crédit d'impôt sur le revenu sera prévu afin notamment d'inciter à des économies d'énergie par la rénovation des logements donnés en location et la réalisation des travaux ou l'acquisition des équipements les plus performants ;

c) Les propriétaires de surfaces importantes affectées aux activités tertiaires, notamment les sociétés foncières, pourront être assujettis au dispositif des certificats d'économie d'énergie.

L'État incitera les bailleurs et les associations de locataires à engager une concertation pour déterminer les modalités de partage des économies d'énergie réalisées par ces investissements. Dans un délai d'un an à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement rendra compte au Parlement de l'état de la concertation.

En complément des mesures précitées, l'État mettra à l'étude des dispositifs d'incitations financières visant à encourager les propriétaires et les syndicats de copropriétaires à réaliser des travaux de rénovation lourde destinés à accroître la performance énergétique de logements anciens aux caractéristiques thermiques et énergétiques très dégradées. Ces dispositifs privilégieront les financements qui tirent parti des gains réalisés par les économies d'énergie. L'étude analysera également les possibilités de mettre en oeuvre à terme des obligations de travaux de rénovation.

L'État encouragera la constitution d'un groupement de l'ensemble des acteurs du plan de rénovation des bâtiments pour suivre et adapter les chantiers de rénovation en matière d'économie d'énergie dans les secteurs résidentiel et tertiaire.

Les audits énergétiques, prévus au premier alinéa du I, doivent être réalisés par des professionnels ou des sociétés agréés.

M. Jacques Muller.  - Quelques mots pour répondre à M. Braye dont je partage le plaidoyer pour la séparation des pouvoirs, qui est le fondement de notre démocratie.

L'indépendance de la France dans le nucléaire est relative : une grande quantité de nos déchets est traitée en Allemagne et nous allons chercher notre uranium en Namibie... Le rapport Arthuis d'il y a quelques années avait en outre relevé des questions non résolues ; si l'électricité d'origine nucléaire est relativement bon marché aujourd'hui, c'est que son prix n'intègre ni le coût de la gestion des déchets, ni celui du démantèlement de centrales en fin de vie qu'on ne peut pas traiter comme des usines de chaussures... Et je ne parle pas des problèmes de sécurité que pose le nucléaire, ni de son caractère fossile.

Je suis maire d'un village rural et ingénieur du génie rural de formation ; à la campagne, l'électricité n'est pas la seule source de chauffage. L'Alsace a commencé à valoriser le bois-énergie, qui est une source d'énergie alternative au fuel en milieu rural. Je plaide pour un grand plan d'urgence forestier, qui aurait entre autres avantages celui de valoriser le bois qui pourrit dans les forêts et émet, ce faisant, du méthane, gaz à effet de serre plus dangereux encore que le dioxyde de carbone. Cela vaut mieux que les pompes à chaleur électriques.

M. le président.  - Amendement n°637, présenté par MM. Muller, Desessard, Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet.

Remplacer le premier alinéa de cet article par sept alinéas ainsi rédigés :

L'État se fixe comme objectif de réduire les consommations d'énergie du parc des bâtiments existants d'au moins 38 % d'ici à 2020.

A cette fin, il est inséré après l'article L. 111-10-2 du code de la construction et de l'habitation, un article L. 111-10-3 ainsi rédigé :

« Art. L. 111-10-3. - Des travaux d'amélioration de la performance énergétique doivent être réalisés dans les bâtiments existants dans un délai de 15 ans à compter du 1er janvier 2012, ramené à 8 ans pour les bâtiments à usage tertiaire.

« Un décret en Conseil d'État détermine :

« - la nature et les modalités de cette obligation de travaux ainsi que les caractéristiques thermiques ou la performance énergétique à respecter, en tenant compte de l'état initial du bâtiment, de contraintes techniques exceptionnelles, de l'accessibilité des personnes handicapées ou à mobilité réduite ou de nécessités liées à la conservation du patrimoine historique ;

« - les conditions dans lesquelles un label « Rénovation basse consommation » ouvrant droit à d'éventuels avantages financiers sera créé dans les six mois suivant la promulgation de la présente loi n° ... du ... de programme relative à la mise en oeuvre du Grenelle de l'environnement. »

L'État se fixe comme objectif la rénovation complète de 400 000 logements au moins chaque année à compter de 2013 avec pour objectif d'atteindre à l'issue des travaux une consommation moyenne d'énergie pour l'ensemble du parc de logements rénovés de 80 kilowattheures par mètres carrés par an pour les cinq usages réglementés, dont 50 au maximum pour le chauffage.

M. Jacques Muller.  - Notre empreinte environnementale n'est pas dépendante des seuls gaz à effet de serre, je milite pour une empreinte énergétique globale.

Se donner des objectifs de baisse de la consommation des bâtiments existants est une bonne chose ; mais on ne pourra les atteindre avec des mécanismes purement incitatifs. Il faut que les travaux soient obligatoires, quitte à fixer des délais raisonnables pour les réaliser. Je propose aussi la création de labels qui puissent apporter des garanties de performance.

M. le président.  - Amendement n°638, présenté par MM. Muller, Desessard, Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet.

Compléter la seconde phrase du premier alinéa de cet article par les mots :

avec pour objectif d'atteindre à l'issue des travaux une consommation moyenne d'énergie pour l'ensemble du parc de logements rénovés de 80 kilowattheures par mètres carrés par an pour les cinq usages réglementés, dont 50 au maximum pour le chauffage

M. Jacques Muller.  - Cet amendement de repli transforme l'obligation en objectif.

M. le président.  - Amendement n°639, présenté par MM. Muller, Desessard, Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet.

A la fin de la deuxième phrase du premier alinéa du I de cet article, remplacer les mots :

de leurs surfaces les moins économes en énergie

par les mots :

de l'ensemble de leurs surfaces de déperditions

M. Jacques Muller.  - Il faut que l'État soit exemplaire et qu'on prenne en compte la totalité des surfaces.

M. le président.  - Amendement n°11, présenté par M. Sido, au nom de la commission.

Supprimer la dernière phrase du premier alinéa du I de cet article.

M. Bruno Sido, rapporteur.  - Les gains d'énergie et le stockage de carbone réalisés grâce à la plantation d'arbres sont difficilement mesurables.

M. le président.  - Amendement n°640, présenté par MM. Muller, Desessard, Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet.

Rédiger comme suit la dernière phrase du premier alinéa du I de cet article :

Les gains d'énergie et le stockage de carbone réalisés grâce à la plantation d'arbres et de végétaux pérennes sur le bâtiment lui-même, à ces abords immédiats ou sur un terrain appartenant à l'État sur le territoire national seront pris en compte dans la limite de 10 % des économies d'énergie et de réduction des émissions de gaz à effet de serre réalisées.

M. Jacques Muller.  - Que l'État puisse compenser les émissions de gaz à effet de serre par des plantations introduit une souplesse acceptable, mais il faut l'encadrer pour qu'elle reste légitime : un gouvernement pourrait planter massivement à l'étranger. On ne peut pas se dédouaner complètement de ses obligations.

M. Bruno Sido, rapporteur.  - L'amendement n°637, qui introduirait dans le code de la construction des dispositions non codifiées, va au-delà de la loi-programme ; un tel volontarisme est impossible à atteindre. Avis défavorable. Même avis pour la même raison pour l'amendement n°638. L'amendement n°639 affiche une ambition irréaliste : retrait ou rejet. Quant au 640, il est incompatible avec le nôtre. Avis défavorable.

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État.  - Les dispositions que l'amendement n°637 intègrent dans le code de la construction n'ont pas leur place ici mais plutôt dans le Grenelle II. L'objectif peut d'ailleurs se révéler extrêmement compliqué à atteindre : dans certains cas, il est moins couteux de raser le bâtiment... Avis défavorable, ainsi qu'aux amendements nos638 et 639, étant précisé qu'il s'agit bien de rénover l'ensemble des bâtiments de l'État. Avis favorable à l'amendement n°11 qui fera tomber l'amendement n°640.

Les amendements nos637 et 639 sont retirés.

L'amendement n°638 n'est pas adopté.

L'amendement n°11 est adopté.

L'amendement n°640 devient sans objet.

M. le président.  - Amendement n°12, présenté par M. Sido, au nom de la commission.

I. - Compléter le deuxième alinéa du I de cet article par une phrase ainsi rédigée :

Les politiques engagées par les collectivités territoriales d'outre-mer feront l'objet d'un soutien spécifique afin de tenir compte des risques sismiques.

II. - En conséquence, supprimer la seconde phrase du troisième alinéa du même I.

L'amendement de clarification n°12, accepté par le Gouvernement, est adopté.

M. le président.  - Amendement n°261, présenté par Mme Didier et les membres du groupe CRC-SPG.

Supprimer la première phrase du troisième alinéa du I de cet article.

Mme Odette Terrade.  - Vous connaissez notre opposition aux partenariats publics-privés, vous comprenez notre refus qu'on y recoure de manière privilégiée. Le Conseil économique et social a émis des réserves et observé que les contrats de performance énergétique ne conviennent pas à toutes les situations. La jurisprudence du Conseil constitutionnel rend cette rédaction encore plus inopportune : on ne peut recourir à ces contrats qu'après une évaluation préalable. Pourquoi, enfin, réserver ces marchés à de grands groupes ?

M. le président.  - Amendement n°13, présenté par M. Sido, au nom de la commission.

Rédiger comme suit le début de la première phrase du troisième alinéa du I de cet article :

Si les conditions définies par l'ordonnance n°2004-559 du 17 juin 2004 sur les contrats de partenariat sont satisfaites, il pourra être fait appel à des contrats de partenariat pour réaliser les travaux de rénovation en matière d'économie d'énergie portant respectivement sur les 50 et 70 millions...

M. Bruno Sido, rapporteur.  - Le mot « privilégiée » est superfétatoire puisqu'il ne peut y avoir de contrats de partenariat public-privé que si les conditions de l'ordonnance du 17 juin 2004 sont remplies. L'Assemblée nationale ayant déjà adouci le texte, la suppression de toute référence aux contrats PPP n'est pas opportune car les partenariats permettent d'aller plus vite.

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État.  - Ces contrats ont prouvé leur efficacité en Allemagne depuis vingt ans et se révèlent performants en France. Nous souhaitons donc que le principe soit inscrit dans la loi. Avis défavorable à l'amendement n°261 et favorable à la rédaction proposée par l'amendement n°13.

L'amendement n°261 est retiré.

L'amendement n°13 est adopté.

M. le président.  - Amendement n°14, présenté par M. Sido, au nom de la commission.

Après les mots :

contrat de performance énergétique

supprimer la fin du dernier alinéa du I de cet article.

M. Bruno Sido, rapporteur.  - Amendement de simplification.

M. le président.  - Amendement n°15, présenté par M. Sido, au nom de la commission.

Rédiger comme suit la deuxième phrase du premier alinéa du II de cet article :

A cet effet, 800 000 logements sociaux dont la consommation d'énergie est supérieure à 230 kilowattheures d'énergie primaire par mètre carré et par an feront l'objet de travaux avant 2020 afin de ramener leur consommation annuelle à des valeurs inférieures à 150 kilowattheures d'énergie primaire par mètre carré.

M. Bruno Sido, rapporteur.  - Amendement rédactionnel.

M. le président.  - Amendement n°16, présenté par M. Sido, au nom de la commission.

Dans la dernière phrase du premier alinéa du II de cet article, remplacer le mot :

concernent

par le mot :

concerneront

M. Bruno Sido, rapporteur.  - Un autre amendement rédactionnel.

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État.  - Même si nous souhaitons que les contrats de performance énergétique figurent dans le texte, nous nous en remettrons à la sagesse sur l'amendement n°14. Avis favorable aux amendements rédactionnels nos15 et 16.

L'amendement n°14 est adopté, ainsi que les amendements nos15 et 16.

M. le président.  - Amendement n°713, présenté par M. Repentin.

Après le premier alinéa du II de cet article, insérer un alinéa ainsi rédigé :

Une étude sera réalisée pour évaluer l'avantage d'un basculement des crédits d'impôts en faveur des accédants à la propriété contenus dans la loi n°2007-1223 du 21 août 2007 en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat au bénéfice des propriétaires bailleurs ou accédants à la propriété et des locataires qui entreprendraient des travaux qui permettraient de se conformer dès 2009 aux objectifs contenus ci-dessus.

M. Thierry Repentin.  - Selon une étude d'impact, certains projets de réhabilitation ne seraient pas déclenchés faute de capacité financière des agents.

Le crédit d'impôt instauré par la loi Tepa représente une perte de recettes de 210 millions pour l'État mais se réduit à un effet d'aubaine pour les plus aisés. Or l'urgence, c'est le pouvoir d'achat des plus modestes. Une aide à la mise en place anticipée des nouvelles normes thermiques permettrait à la filière de s'organiser et de monter en puissance progressivement. La redistribution des aides fiscales est un des leviers à envisager.

M. Bruno Sido, rapporteur.  - Le crédit d'impôt Tepa relève de la politique en faveur de l'accession, notamment sociale, à la propriété. La loi de finances pour 2009 a instauré l'éco-prêt à taux zéro et « verdi » les dispositifs fiscaux en faveur du logement. Évitons de mettre ces deux politiques en concurrence. Avis défavorable.

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État.  - Avis défavorable. Le crédit d'impôt Tepa est un outil essentiel de la politique d'accession sociale à la propriété. Il a déjà été éco-conditionné dans la loi de finances.

L'amendement n°713 n'est pas adopté.

M. le président. - Amendement n°17, présenté par M. Sido au nom de la commission.

I. - Supprimer la quatrième colonne du tableau constituant le troisième alinéa du II de cet article.

II. - En conséquence, dans la dernière colonne de la première ligne du même tableau, remplacer l'année :

2012

par l'année :

2011

L'amendement rédactionnel n°17, accepté par le Gouvernement, est adopté.

M. le président.  - Amendement n°712, présenté par M. Repentin.

I. - Après le troisième alinéa du II de cet article, insérer un alinéa ainsi rédigé :

L'État élargira également la portée du dégrèvement de taxe foncière sur les propriétés bâties accordé aux organismes bailleurs de logements sociaux par l'article 1391 E du code général des impôts à raison des travaux d'économie d'énergie qu'ils réalisent, notamment en élargissant les possibilités d'imputation de ce dégrèvement.

II. - Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... - Les pertes de recettes résultant pour les collectivités locales de l'élargissement de la portée du dégrèvement de taxe foncière prévu par l'article 1391 E du code général des impôts au profit des bailleurs sociaux réalisant des travaux d'économie d'énergie sont compensées, à due concurrence, par le relèvement de la dotation globale de fonctionnement.

La perte de recettes résultant pour l'État de l'alinéa ci-dessus est compensée à due concurrence par l'institution d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

M. Thierry Repentin.  - Cet amendement élargit la portée du dégrèvement de taxe foncière au profit des bailleurs qui réalisent des travaux d'économie d'énergie. Il faut prévoir des aides fiscales additionnelles, d'autant que les travaux dans le parc social ne bénéficient ni du prêt à taux zéro, ni du crédit d'impôt.

Aujourd'hui, ce dégrèvement, en principe égal au quart des dépenses, ne peut s'imputer que sur la cotisation de taxe foncière due au titre de l'immeuble où sont réalisés les travaux, ce qui conduit en pratique à le plafonner à moins de 5 % de la valeur des travaux. Cette mesure un peu technique est un levier essentiel pour donner aux bailleurs les moyens de participer à la rénovation des 800 000 logements les plus énergivores.

M. Bruno Sido, rapporteur.  - Cet amendement a déjà été rejeté par le Sénat à l'occasion du projet de loi de mobilisation pour le logement et du projet de loi de finances. De plus, il n'a pas sa place dans une loi de programme : les dispositifs fiscaux seront éventuellement modifiés dans le Grenelle II.

M. Jean-Louis Borloo, ministre d'État.  - Le financement des travaux d'économie d'énergie dans le parc social est une priorité. Les performances énergétiques y sont d'ailleurs globalement meilleures que dans le parc privé !

M. Daniel Raoul.  - C'est vrai.

M. Jean-Louis Borloo, ministre d'État.  - Nous sommes convenus avec l'Union qu'une aide complémentaire de 15 à 20 % était nécessaire. Nous avions tout d'abord proposé un Palulos thermique mais, avant le credit crunch, les organismes ont préféré percevoir l'équivalent du différentiel de taux d'intérêt du prêt bonifié, soit, à l'époque, 1,9 %. Le taux de rémunération étant entretemps passé de 3,7 ou 3,9 à 2,5 %, il n'est pas inutile de rouvrir le dossier, voire d'envisager un autre système. Je vais proposer un rendez-vous au président de l'Union pour avancer sur cette question.

M. Thierry Repentin.  - L'amendement n°712, comme l'amendement n°171 que je m'apprêtais à défendre, étaient des amendements d'appel. Avec la baisse de la rémunération de l'épargne populaire, le taux de 1,9 % ne veut en effet plus rien dire. Il faut revoir le mode de financement des travaux thermiques dans le parc social car les organismes ne peuvent plus rien aujourd'hui, sauf à bénéficier de la manne des collectivités locales.

Lors de la loi de mobilisation pour le logement et de la loi de finances, les ministres concernés m'avaient alors renvoyé vers vous, monsieur le ministre ! Je retire mes deux amendements, en vous remerciant de proposer un rendez-vous afin de trouver un financement à hauteur de 20 %.

M. Jean-Louis Borloo, ministre d'État.  - La question de déplafonnement peut aussi se poser. Le Gouvernement a passé des accords avec l'Union, qui s'était engagée à un saut spectaculaire ; tous les engagements ont été tenus. Sur le chantier thermique, nous sommes tout aussi capables de passer un nouvel accord en béton !

M. Daniel Raoul.  - Joli !

L'amendement n°712 est retiré, ainsi que l'amendement n°171.

M. le président.  - Amendement n°176, présenté par M. Repentin et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

I. - Compléter la première phrase du quatrième alinéa du II de cet article par les mots :

ainsi qu'un prêt à taux zéro

II. - Pour compenser les pertes de recettes résultant pour l'État du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... - La perte de recettes résultant pour l'État de l'extension aux organismes bailleurs de logements sociaux du dispositif du prêt à taux zéro est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

M. Thierry Repentin.  - Cet amendement aligne les aides destinées à la réhabilitation dans le logement social sur les aides destinées aux particuliers.

Nous souhaitons que les bailleurs sociaux aient accès au prêt à taux zéro pour les travaux de rénovation thermique, comme c'est le cas pour l'éco-prêt. Rappelons que ce prêt équivaut à une subvention de 2 900 euros par logement, hors fluctuations monétaires ou tensions inflationnistes, étant donné le niveau actuel du livret A !

Cette mesure permettrait de compenser la suppression des financements initialement prévus. Les débats en commission m'ont laissé penser qu'elle pourrait constituer l'une des avancées importantes de cette discussion.

M. Bruno Sido, rapporteur.  - Il nous semble que le Gouvernement a plutôt choisi d'offrir aux bailleurs des prêts à taux bonifié. Quel est son avis ?

M. Jean-Louis Borloo, ministre d'État.  - Divers modes de financement sont envisageables. Le Gouvernement penche plutôt pour des prêts à long terme à taux bonifié, mais peut encore changer son fusil d'épaule. L'important est que les organismes puissent réaliser ces travaux le plus rapidement possible, en puisant dans leurs fonds propres mais en bénéficiant aussi de l'aide de l'État. Les formes que prendra celle-ci seront définies au cours des discussions avec les bailleurs ; n'anticipons pas. Retrait.

L'amendement n°176 est retiré.

L'amendement n°126 n'est pas défendu.

M. le président.  - Amendement n°262, présenté par Mme Didier et les membres du groupe CRC-SPG.

Dans la deuxième phrase de l'avant-dernier alinéa du II de cet article, supprimer les mots :

notamment à partir des économies réalisées grâce à ces travaux de rénovation

Mme Odette Terrade.  - Le mode de financement des travaux de rénovation doit encore faire l'objet de négociations entre l'État, la Caisse des dépôts et les organismes bailleurs. Mais le projet de loi prévoit de tirer parti des économies d'énergie résultant de ces travaux. Il est probable que l'on parviendra à réduire sensiblement la consommation d'énergie dans les immeubles de logements sociaux très dégradés, dont les locataires paient de lourdes charges. Si les économies réalisées servent à financer de futurs travaux, les locataires n'en profiteront pas. Si l'aide de l'État diminue, le prix du loyer risque même d'augmenter.

Dans un contexte de hausse des prix de l'énergie au profit des actionnaires, il est illusoire de penser que les économies d'énergie augmenteront le pouvoir d'achat des Français.

Il faut donc supprimer cette disposition qui revient à soutenir le désengagement financier de l'État du parc social, qui accueille pourtant les familles les plus modestes.

M. Bruno Sido, rapporteur.  - Les travaux de rénovation bénéficiant aux locataires, il n'est pas aberrant de leur demander de contribuer à leur financement selon des modalités qui restent à définir. Avis défavorable.

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État.  - Ce dispositif doit être un jeu gagnant-gagnant entre les propriétaires et les locataires. Dans un pays où le nombre de locataires est supérieur à la moyenne européenne, ceux-ci ne doivent pas être les derniers bénéficiaires des travaux de rénovation. Il faut donc veiller à ce que ces travaux n'aboutissent pas à une hausse du loyer ou des charges locatives. A cette fin, la disposition que vous voulez supprimer est essentielle. Avis défavorable.

L'amendement n°262 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°174, présenté par M. Repentin et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

I. - Compléter le dernier alinéa du II de cet article par les mots :

notamment pour leur permettre des adaptations marginales à la norme fixée au premier alinéa dans le cas d'un patrimoine manifestement difficile à rénover

II. - Compléter le même II par un alinéa ainsi rédigé :

Un décret fixe les conditions techniques pouvant justifier de telles adaptations et les modalités de compensation applicables aux organismes concernés.

M. Thierry Repentin.  - Cet amendement tend à ajouter au dernier alinéa du II de cet article une phrase qui précise que les organismes bailleurs de logements sociaux sont encouragés à recourir aux énergies renouvelables « notamment pour leur permettre des adaptations marginales à la norme fixée au premier alinéa dans le cas d'un patrimoine manifestement difficile à rénover. »

La réalité du parc de logements sociaux est très diverse. Un euro dépensé peut produire des résultats très inégaux selon la date de construction du bâtiment. Dans les cas où les sommes nécessaires à la poursuite de l'objectif s'écarteraient trop de la moyenne établie par l'Union des HLM, les organismes doivent pouvoir contribuer d'une autre manière à la réduction des émissions de gaz à effet de serre.

Nous proposons qu'un décret fixe les conditions techniques pouvant justifier de telles adaptations et les modalités de compensation applicables aux organismes concernés. Il est souhaitable que l'Union sociale pour l'habitat soit consultée et adresse les éléments techniques dont elle dispose.

M. Bruno Sido, rapporteur.  - La commission est sensible à vos arguments : la réalité du parc social est très diverse et il pourrait être difficile, dans certains immeubles, de porter la consommation d'énergie à moins de 150 kilowattheures par mètre carré. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État.  - Vous pointez un réel problème, mais le recours aux énergies renouvelables est déjà pris en compte et déduit de la consommation globale d'énergie des bâtiments. L'amendement est donc largement satisfait.

M. Bruno Sido, rapporteur.  - Avis de sagesse.

L'amendement n°174 est adopté.

M. le président.  - Amendement n°177, présenté par M. Repentin et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Compléter le dernier alinéa du II de cet article par les mots :

, et feront l'objet de la même attention que le logement privé en matière d'objectifs et de moyens dans la mise en oeuvre des dispositifs d'économie d'énergie

Mme Odette Herviaux.  - Nous proposons d'inscrire dans la loi que les logements sociaux feront l'objet de la même attention que les logement privés en matière d'objectifs et de moyens dans la mise en oeuvre des dispositifs d'économie d'énergie.

J'ai bien entendu la réponse de M. le ministre d'État à M. Repentin. Mais ici, il ne s'agit pas d'une mesure technique mais d'un principe général. Le projet de loi prend acte du fait que le secteur du bâtiment consomme près de 40 % de l'énergie finale et contribue pour près d'un quart aux émissions de gaz à effet de serre. Il encourage donc les économies d'énergie et l'usage d'énergies renouvelables. Mais la donne est déséquilibrée : les dispositifs d'incitation aux bailleurs privés et aux propriétaires occupants sont plus aboutis que ceux destinés aux logements sociaux. L'éco-prêt à taux zéro et le crédit d'impôt seront mêmes cumulables pour les particuliers, alors qu'il est seulement prévu pour le logement social un prêt à 1,9 % dont les effets seront dérisoires.

Au congrès de Lyon de septembre 2007, l'Union sociale pour l'habitat s'était engagée à réhabiliter les 800 000 logements consommant le plus d'énergie. Le programme visait à réduire de 25 % en moyenne la consommation énergétique des logements, pour un coût moyen de 6 000 euros par logement. Dans le cadre du Grenelle de l'environnement, le Gouvernement a souhaité aller plus loin, et il faut s'en réjouir ; mais cela porte le coût des travaux par logement pour les organismes HLM à 15 000 euros. Les objectifs sont ambitieux mais les crédits prévus sont très insuffisants.

M. Bruno Sido, rapporteur.  - Avis défavorable : tous les secteurs du logement font l'objet d'une égale attention, mais les moyens diffèrent en fonction des caractéristiques propres du parc privé et du parc social. Ne faisons pas au Gouvernement le procès d'intention de délaisser le secteur social au profit du secteur privé : s'agissant de M. le ministre d'État, ce serait pour le moins bizarre...

M. Jean-Louis Borloo, ministre d'État.  - Je crois avoir répondu tout à l'heure à vos inquiétudes.

Mme Odette Herviaux.  - Je m'étonne de l'avis défavorable de la commission mais, compte tenu des précisions apportées tout à l'heure par M. Borloo, je retire l'amendement.

L'amendement n°177 est retiré.

M. le président. - Amendement n°130 rectifié, présenté par MM. Pointereau, Pillet, Revet, Bizet, Pierre et Mme Procaccia.

Compléter le II de cet article par un alinéa ainsi rédigé :

Les gains d'énergie réalisés grâce à la plantation d'arbres et de végétaux pérennes seront pris en compte dans la mesure de la consommation d'énergie.

M. Rémy Pointereau.  - Il convient de tenir compte des gains réalisés grâce à l'implantation des haies végétales et d'arbres aux alentours des logements sociaux. Les végétaux permettent de réguler la température intérieure des bâtiments situés à proximité et de réduire ainsi la consommation d'énergie liée au chauffage ou à la climatisation. Ils peuvent également diminuer de moitié l'infiltration d'air froid, ce qui correspond à des économies potentielles de chauffage de l'ordre de 10 à 12 % par an.

Certes, les économies d'énergie liées aux végétaux sont difficilement quantifiables. Mais je souhaite que soit lancée une expérimentation comparative.

Il convient donc que les bailleurs qui procèdent à des opérations de végétalisation aient droit au prêt à taux préférentiel et à l'aide de 20 % de l'État pour le financement du programme de rénovation.

Cette mesure répondrait à trois objectifs : embellir le paysage, réduire les émissions de gaz à effet de serre et réaliser des économies d'énergie.

M. Bruno Sido, rapporteur.  - La commission était favorable à la suppression de la disposition que vous voulez réintroduire. Avis défavorable, par cohérence.

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État.  - Certes, la végétalisation est un procédé très intéressant mais les gains qui y sont liés sont difficiles à mesurer : cela supposerait un bilan carbone de chaque bâtiment, c'est-à-dire une opération lourde et complexe. Retrait ?

M. Rémy Pointereau.  - Je retire l'amendement, mais je souhaiterais qu'une expérience comparative puisse être menée pour faire apparaître les économies possibles.

L'amendement n°130 rectifié est retiré.

M. le président. - Amendement n°178, présenté par M. Repentin et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Dans le deuxième alinéa (a) du III de cet article, après les mots :

le remboursement

insérer le mot :

intégral

M. Jean-Pierre Caffet.  - Pour les ménages dont le pouvoir d'achat est grevé par leur facture énergétique, la réalisation de travaux d'isolation n'est financièrement supportable que si les économies d'énergies qu'elle suscite compensent intégralement le coût d'amortissement de ces travaux. Il parait essentiel de poser ce principe pour assurer le succès du dispositif. A fortiori si ces travaux deviennent, à terme, obligatoires. Les banques n'ont pas été si mal traitées. On peut attendre d'elles un minimum de citoyenneté.

M. Bruno Sido, rapporteur.  - Le dispositif, en l'état, est déjà suffisamment compliqué. Prévoir une couverture intégrale ? Mission impossible. Défavorable.

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État.  - Prévoir un remboursement intégral serait en effet très complexe. Défavorable.

L'amendement n°178 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°694 rectifié, présenté par MM. Bizet et Deneux.

Dans le deuxième alinéa (a) du III de cet article, après les mots :

dans les copropriétés

insérer les mots :

et s'assurera de l'élaboration d'un modèle type de contrat de performance énergétique

M. Jean Bizet.  - Cet amendement vise à définir le contenu des contrats de performance énergétique pour renforcer la protection des consommateurs qui s'engagent sur une longue durée avec un opérateur, en leur donnant les moyens de comparer les offres en toute connaissance de cause.

M. Bruno Sido, rapporteur.  - Favorable à cet amendement, heureusement rectifié conformément aux recommandations de la commission.

M. Jean-Louis Borloo, ministre d'État.  - Ce dispositif est en effet en cours d'expérimentation pour les grands projets engageant de grands opérateurs. Favorable.

L'amendement n°694 rectifié est adopté.

M. le président.  - Amendement n°18, présenté par M. Sido, au nom de la commission.

Dans le dernier membre de phrase du deuxième alinéa (a) du III de cet article, supprimer les mots :

à faciliter et

L'amendement de précision n°18, accepté par le Gouvernement, est adopté.

M. le président.  - Amendement n°19, présenté par M. Sido au nom de la commission.

Rédiger comme suit le troisième alinéa (b) du III de cet article :

b) Les modalités d'application du crédit d'impôt sur le revenu en faveur des économies d'énergie et de l'utilisation des énergies renouvelables seront réformées afin de favoriser la rénovation des logements donnés en location et la réalisation de travaux ou l'acquisition des équipements les plus performants ;

M. Bruno Sido, rapporteur.  - Précision : un dispositif de crédit d'impôt sur le revenu en faveur de l'amélioration de la qualité environnementale des logements est déjà prévu par la législation en vigueur et a fait l'objet d'une réforme avec l'article 109 de la loi de finances pour 2009.

M. le président.  - Amendement n°695, présenté par MM. Bizet et Deneux.

I. - Rédiger comme suit le troisième alinéa (b) du III de cet article :

b) Les modalités d'application du crédit d'impôt sur le revenu en faveur des économies d'énergie et de l'utilisation des énergies renouvelables, basées tant sur l'acquisition que sur la pose, seront réformées afin de favoriser la rénovation des logements donnés en location et la réalisation de travaux par les propriétaires occupants ou l'acquisition des équipements les plus performants.

II. - Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... - La perte de recettes pour l'État résultant de la modification du crédit d'impôt en faveur des économies d'énergie est compensée par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux article 575 et 575 A du code général des impôts.

M. Jean Bizet.  - Cet amendement vise à clarifier le champ d'application du crédit d'impôt afin de permettre aux pouvoirs publics d'en définir précisément l'assiette, notamment les types de logements concernés, la nature des travaux réalisés et les matériaux, équipements et appareils concernés, pris en compte dans ce crédit d'impôt. Il précise en outre que les modalités du crédit d'impôt s'appliqueront également aux propriétaires occupant leur logement.

M. le président.  - Amendement n°714, présenté par M. Repentin.

I. - Compléter le troisième alinéa (b) du III de cet article par un membre de phrase ainsi rédigé :

ce crédit d'impôt pourra bénéficier aux propriétaires ainsi qu'aux locataires lorsqu'une quote-part de la dépense est mise à leur charge par les propriétaires, y compris si cette quote-part est payée de manière échelonnée sur plusieurs années ;

II. - Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... - La perte de recettes résultant pour l'État de l'extension aux locataires du crédit d'impôt pour travaux d'économies d'énergie est compensée à due concurrence par l'institution d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

M. Thierry Repentin.  - Quand un bailleur effectue ces travaux, il en impute une part sur la quittance de son locataire, mais le crédit d'impôt ne peut s'appliquer. Cet amendement vise à rétablir l'équité.

M. Bruno Sido, rapporteur.  - L'amendement n°695 entre en concurrence avec celui de la commission. La réforme du crédit d'impôt, ainsi que je l'ai rappelé, a déjà eu lieu dans la loi de finances pour 2009. Retrait ? La modification proposée par l'amendement n°714 est intéressante et mérite expertise. La rédaction proposée par l'amendement de la commission n'interdirait pas un tel étalement. Je suggère à M. Repentin, qui a raison sur le fond, de retirer son amendement qui relève d'un texte fiscal.

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État.  - L'amendement n°19 de la commission, auquel le Gouvernement est favorable, satisfait celui de M. Bizet, dont nous préfèrerions le retrait. Défavorable à l'amendement n°714, qui relève plutôt d'une loi de finances que d'une loi de programme.

M. Thierry Repentin.  - Le rapporteur me donne raison sur le fond. De fait, il existe une distorsion fiscale entre propriétaire et locataire. Il me dit que son amendement n°19 pourrait répondre à ma préoccupation. S'il accepte un sous-amendement qui précise, à la fin, « tout en préservant le pouvoir d'achat des locataires », afin d'inciter l'administration fiscale à travailler en ce sens, je serais prêt à retirer mon amendement.

M. Bruno Sido, rapporteur.  - J'ai compris le sens de votre amendement et vous propose d'y revenir dans trois mois lors de l'examen du Grenelle II.

M. Thierry Repentin.  - La proposition me paraît bonne.

L'amendement n°19 est adopté.

Les amendements nos695 et 714 deviennent sans objet.

M. le président.  - Amendement n°681, présenté par MM. Bizet et Deneux.

Rédiger comme suit le cinquième alinéa du III de cet article :

L'État permettra aux bailleurs sociaux et privés qui investissent dans des travaux d'amélioration de la performance énergétique et de réduction des émissions de dioxyde de carbone des logements loués de pouvoir compenser leurs investissements pour travaux par une hausse de loyer. Cette hausse de loyer tiendrait compte d'un engagement de baisse des charges énergétiques résultant des travaux ; la somme du loyer et des charges énergétiques après travaux serait légèrement inférieure à celle de la situation initiale. Cette disposition serait limitée à la durée d'amortissement des travaux par le propriétaire. Un décret modifiera les conditions d'affectation des charges entre propriétaires et locataires pour les opérations dédiées aux travaux d'efficacité énergétique.

M. Jean Bizet.  - Sachant que les bâtiments existants contribuent pour la plus grosse part à la consommation énergétique et aux émissions de CO2 du secteur, cet amendement vise à inciter les propriétaires bailleurs, grâce à un mécanisme de compensation, à réaliser des travaux de performance énergétique.

L'augmentation consécutive des loyers devra être intégralement compensée par la baisse des charges liée aux gains d'énergie.

M. Bruno Sido, rapporteur.  - Sur le fond, le dispositif que vous proposez est loin d'être inintéressant. Toutefois, je ne suis pas persuadé qu'il soit très adroit de supprimer la référence à une concertation entre représentants des bailleurs et des locataires sur un sujet aussi sensible que le partage des gains liés aux économies d'énergie et sur la répartition des charges entre bailleurs et locataires. Retrait ou rejet.

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État.  - Mieux vaut renvoyer cette question à la concertation. On peut en effet imaginer que, dans les charges, une ligne distingue la part affectée aux travaux.

M. Dominique Braye.  - Ne jetez pas le bébé avec l'eau du bain : cet amendement ne mérite pas d'être ainsi rejeté au bénéfice d'une concertation sine die. Il est certes imparfait mais ce qu'il propose est intéressant. Il faut lui réserver un meilleur sort.

M. Thierry Repentin.  - Je rejoins l'avis de la secrétaire d'État, étant donné que des négociations sont en cours avec les associations de locataires et qu'un accord n'est pas exclu sur la répartition du montant des travaux. Il ne serait pas bon qu'une loi vienne imposer ce qui est actuellement en discussion.

M. Jean Bizet.  - Il s'agit d'une loi de programmation et le Grenelle II sera plus précis. Si le Gouvernement s'engage à ce qu'il y ait une concertation (Mme la secrétaire d'État le confirme), je retire cet amendement.

L'amendement n°681 est retiré.

M. le président. - Amendement n°20, présenté par M. Sido au nom de la commission.

Dans la première phrase du sixième alinéa du III de cet article, remplacer les mots :

mettra à l'étude

par le mot :

prévoira

M. Bruno Sido, rapporteur.  - Amendement de cohérence : l'article 5 vise l'éco-prêt à taux zéro, dont la création a été prévue dans la loi de finances pour 2009. Dès lors, il faut actualiser la rédaction de cet article.

L'amendement n°20, accepté par le Gouvernement, est adopté.

M. le président.  - Amendement n°173 rectifié, présenté par M. Repentin et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Compléter l'avant-dernière phrase du sixième alinéa du III de cet article par les mots :

notamment pour limiter l'effort demandé aux locataires

M. Roland Courteau.  - Cet amendement vise à ne pas trop faire peser le coût des travaux de rénovation sur les quittances des locataires. Plus de 60 % des logements ont été construits avant 1975 et ne sont donc soumis à aucune norme d'isolation. Nous n'en savons toujours pas plus sur les obligations de travaux que vous choisirez. Imposerez-vous une obligation générale de travaux, une obligation à la mutation du bien, une application par bouquets de travaux ou encore une obligation de travaux pour tous avec délais variables selon le diagnostic de performance énergétique ? Dans l'attente, nous nous préoccupons du sort des locataires dont, finalement, il n'est pas souvent question.

Le rapport de Philippe Pelletier, président du comité opérationnel n°3 et président de l'Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat, envisageait cette obligation de travaux comme l'ultime étape, complémentaire des mesures d'incitations fiscales et financières et, déjà, les conséquences pour les locataires étaient sous-estimées. Nous avions émis de sérieuses craintes sur le sort qui pourrait être réservé aux locataires par des propriétaires s'engageant dans de lourdes rénovations, dans un contexte tendu où la mobilité résidentielle est contrainte et les augmentations de loyers en cas de travaux soumises à la seule négociation entre locataire et bailleur. Nous proposerons tout à l'heure des articles additionnels pour sécuriser les locataires mais, pour nous assurer que c'est bien un objectif partagé, nous proposons de rajouter cette mention dès maintenant dans le texte.

M. Bruno Sido, rapporteur.  - J'avoue ma perplexité. Les locataires ont tout à gagner à la mobilisation de leur propriétaire en faveur de la rénovation thermique de leur logement et ils seront au final les grands gagnants de cette opération. Au contraire, il appartiendra à l'État d'élaborer des mécanismes qui permettront aux locataires de participer aux dépenses d'investissements -ce qui est aujourd'hui impossible- pour inciter les propriétaires à entamer la rénovation. Sinon, les propriétaires, qui n'y trouveront sinon aucun intérêt, ne feront rien. En conséquence, je trouve un peu curieux que cet amendement demande à ce que ces rénovations ne pèsent pas trop lourdement sur le budget des locataires dans la mesure où, en l'état actuel des choses, rien ne peut leur être demandé. Retrait ou rejet.

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État.  - Pour encourager les propriétaires à réaliser des travaux, il faut une juste répartition des économies qui en résulteront. Cet amendement, qui n'apporte aucune précision, paraît supposer que ce pourrait ne pas être le cas. Retrait ou rejet.

M. Alain Vasselle.  - En tant que président d'un organisme HLM, je sais que nous voulons éviter que les surcoûts dus aux travaux soient compensés par des hausses excessives de loyer au titre de l'amortissement qui rendraient sans effet le gain dû aux économies sur la consommation d'énergie. Il faut un juste équilibre. Le Gouvernement a, à plusieurs reprises, dit sa volonté de satisfaire nos espérances lors du Grenelle II. Ce sera le moment de vérité.

Mme Évelyne Didier.  - Nous sommes dans une loi de programmation et nous devons respecter deux impératifs : aménager un habitat qui maîtrise la consommation d'énergie et veiller à ce que les loyers n'explosent pas.

Un bien qu'on entretient garde sa valeur et tout le bénéfice en revient au propriétaire. Vous confondez le rôle du propriétaire et celui du locataire ! Le premier utilise ses loyers pour entretenir son bien et ces travaux d'entretien relèvent de sa responsabilité et sont dans son intérêt. Or, vous êtes en train de dire que l'entretien relève aussi du locataire ! (M. le rapporteur le conteste) Non ! Il faut réaffirmer que l'investissement relève du propriétaire et que c'est par son loyer que le locataire contribue à l'entretien. Le propriétaire ne peut pas gagner sur les deux tableaux et avoir le double avantage des loyers et des avantages fiscaux ! Surtout en un moment où ces loyers explosent ! Il y a là une grave dérive qu'il faut éliminer de cette loi de programmation.

L'amendement n°173 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°21, présenté par M. Sido au nom de la commission.

Rédiger comme suit le début de la dernière phrase du sixième alinéa du III de cet article :

Une étude analysera par ailleurs les possibilités...

L'amendement de coordination n°21, accepté par le Gouvernement, est adopté.

M. le président.  - Amendement n°22, présenté par M. Sido au nom de la commission.

Avant l'avant-dernier alinéa de cet article, insérer un alinéa ainsi rédigé :

Le diagnostic de performance énergétique sera adapté à l'outre-mer afin de tenir compte des caractéristiques propres à ces territoires.

M. Bruno Sido, rapporteur.  - Nous proposons d'insérer à l'article 5 les dispositions de l'article 6 relatives à l'adaptation du diagnostic de performance énergétique à la situation particulière de l'outre-mer.

M. le président.  - Amendement identique n°175, présenté par M. Repentin et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Mme Odette Herviaux.  - Le diagnostic de performance énergétique serait difficilement compréhensible si ne sont pas prises en compte les spécificités liées au climat et au territoire, comme nous l'ont rappelé hier nos collègues d'outre-mer.

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État.  - Avis très favorable. Le diagnostic de performance énergétique est un outil pédagogique important. Il doit s'appliquer à l'outre-mer, avec les adaptations nécessaires.

L'amendement n°22, identique à l'amendement n°175, est adopté.

M. le président.  - Amendement n°23, présenté par M. Sido au nom de la commission.

Supprimer le dernier alinéa du III de cet article.

M. Bruno Sido.  - Cet alinéa rend obligatoire le recours à des professionnels ou sociétés agréés pour la réalisation des audits énergétiques des bâtiments de l'État et de ses établissements publics. Avec pareille contrainte, l'objectif de réalisation de ces audits avant 2010 ne pourrait être atteint. Nous reparlerons de ce sujet lors de l'examen du Grenelle II.

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État.  - Avis favorable. Cet agrément n'existant pas encore, cette disposition retarderait la réalisation des audits.

L'amendement n°23 est adopté.

L'article 5, modifié, est adopté.

Articles additionnels

M. le président. - Amendement n°179, présenté par M. Repentin et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Après l'article 5, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

La charge nette pour le locataire, cumulant le loyer et toutes les charges liées à l'occupation du logement, fait l'objet d'une évaluation contradictoire qui sert de base à l'élaboration d'un programme d'investissements productifs d'économie d'énergie.

Le financement résiduel de cet investissement et l'économie de charges qu'il génère font l'objet de la réactualisation du bail de manière à ce que le financement de l'investissement par le propriétaire et l'économie de charges pour le locataire soient l'un et l'autre sécurisés.

M. Daniel Raoul.  - Afin de sécuriser le locataire lors de la réalisation de travaux d'économie d'énergie, une discussion doit s'engager avec le propriétaire pour que chacun puisse prévoir les charges nouvelles ainsi créées. Nous avons déjà évoqué ce problème lors de l'examen de la loi Boutin ou en loi de finances : le propriétaire investit pour que les charges du locataire diminuent. Un équilibre « gagnant-gagnant » est à trouver en modifiant le bail ou le contrat.

M. Bruno Sido, rapporteur.  - Pourquoi revenir sur la question du partage des gains découlant des travaux d'économie d'énergie, dont nous avons largement débattu à l'article 5 ? Des négociations sur ce sujet se tiendront entre bailleurs et locataires. Retrait ou avis défavorable.

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État.  - Même avis : un accord est imminent. Dans le cas contraire, nous en rediscuterons lors de l'examen du Grenelle II.

M. Daniel Raoul.  - Mme le ministre est certainement mieux informée que nous ! (Sourires) Je le retire.

L'amendement n°179 est retiré.

M. le président.  - Amendement n°180, présenté par M. Repentin et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Après l'article 5, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le e) de l'article 17 de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Cette hausse ne peut excéder 15 % du coût réel des travaux d'amélioration portant sur les parties privatives ou communes quand ces travaux sont d'un montant au moins égal à la dernière année de loyer, toutes taxes comprises. »

Mme Bariza Khiari.  - Cet amendement vise à limiter les hausses de loyers qui pourraient résulter des travaux d'une certaine importance effectués par les propriétaires, notamment dans le cadre des obligations qui pourraient leur être imposées dans les mois à venir. Il ne prend pas en considération la possibilité qu'auront peut-être ces derniers de récupérer une partie de l'investissement par l'intermédiaire des charges. Un débat sur les charges récupérables devra avoir lieu, et nous y participerons activement.

Aujourd'hui, en cas de travaux, les propriétaires peuvent imposer des hausses de loyer à leurs locataires, souvent contraints de les accepter du fait des difficultés rencontrées pour trouver un nouveau logement. La rédaction de cet amendement et le choix des 15 % s'inspirent d'un décret pris pour l'Ile-de-France, applicable depuis juillet 2007.

Il faut préserver les locataires d'une nouvelle vague de hausses brutales de loyers qui serait due à une anticipation des acteurs sur les décisions du Grenelle. Cet amendement permettrait de sécuriser leur pouvoir d'achat à venir.

M. Bruno Sido, rapporteur.  - Même avis que pour l'amendement précédent.

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État.  - Même avis. Une loi de programmation ne peut fixer une telle limitation.

Après une épreuve à main levée déclarée douteuse, l'amendement n°180, mis aux voix par assis et levé, n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°181, présenté par M. Repentin et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Après l'article 5, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le e) de l'article 17 de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n°86-1290 du 23 décembre 1986 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsque les travaux d'amélioration engendrent une réduction des charges locatives, le propriétaire peut bénéficier d'une majoration de loyer à hauteur de 50 % de cette réduction de charges mensuelles. L'estimation de la réduction des charges locatives consécutive aux travaux sera effectuée un an après la mise en oeuvre des travaux par un expert. »

M. Roland Courteau.  - Ce mécanisme permettrait aux propriétaires-bailleurs les plus modestes d'amortir partiellement leur investissement. S'ils effectuent des travaux d'isolation, par exemple, ce sont les locataires qui en bénéficient car leurs charges diminuent.

Un an après la réalisation des travaux, leur impact sur les charges serait mesuré. La moitié du bénéfice ainsi perçu par le locataire serait reportée sur le propriétaire par une augmentation du loyer.

M. Bruno Sido, rapporteur.  - Mêmes arguments, même avis... (Sourires)

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État.  - Cette idée est très intéressante. Nous la transmettrons à Mme Boutin pour les négociations à venir. Dans cette attente, je préfère que l'amendement soit retiré. A défaut, avis défavorable.

L'amendement n°181 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°715, présenté par M. Repentin.

Après l'article 5, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - Au deuxième alinéa de l'article L. 221-4 du code monétaire et financier, les mots : « au-delà d'un plafond » sont remplacés par les mots : « à plus d'une fois et demi un plafond ».

II. - Le deuxième alinéa de l'article L. 221-5 du même code est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Les sommes déposées sur livret A qui excèdent le plafond prévu à l'article L. 221-4 sont intégralement centralisées par la Caisse des dépôts et consignations dans le fonds prévu à l'article L. 221-7. »

M. Thierry Repentin.  - Je reviens régulièrement à la charge sur ce sujet, et je regrette que M. le ministre d'État ne soit plus là pour que je le lui rappelle... Nous souhaitons sauvegarder l'épargne populaire et donner au Gouvernement les moyens qui lui manquent aujourd'hui pour agir. Dans cet esprit, nous proposons de relever le plafond des dépôts sur le livret A, qui stagne à 15 300 euros depuis le dernier siècle... Si ce montant avait suivi l'inflation, il s'élèverait actuellement à 22 000 euros. Cette somme conviendrait à l'épargnant comme à la Caisse des Dépôts, qui disposerait ainsi de 8 milliards supplémentaires. Les sommes excédentaires seraient centralisées par les fonds d'épargne qu'elle gère. Elles bénéficieraient aux opérations menées par les HLM et accompagneraient par des subventions les prêts à taux bonifié au service d'une politique ambitieuse de remise aux normes thermiques. Au lieu de cela, chaque année, Mme Lagarde ponctionne les bénéfices de la Caisse des dépôts pour alimenter le budget de la nation. Les établissements bancaires y gagneraient aussi, qui proposent tous le livret A depuis le 1er janvier.

Nous en reparlerons dans les semaines et les mois à venir, mais j'espère que nous n'aurons pas à le faire durant des années... Et, si une solution n'est pas trouvée, nous en reparlerons lors de l'examen du Grenelle II.

M. Bruno Sido, rapporteur.  - Une revalorisation fonction de l'inflation porterait effectivement le plafond à 22 900 euros. Je ne conteste pas les conséquences positives qui en résulteraient, ni le bien-fondé de votre proposition. Mais Bercy veille et l'article 40 nous guette. Je ne peux donc vous donner un avis favorable...

M. Thierry Repentin.  - Mais vous êtes favorable sur le fond...

M. Bruno Sido, rapporteur.  - Nous avons toutefois demandé que le Grenelle II comporte des mesures d'impact. Le Gouvernement pourrait sans doute nous préciser également le montant de la dépense fiscale induite par un tel relèvement du plafond.

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État.  - Le financement du logement social a fait l'objet de dispositions dans la loi de modernisation de l'économie, ce n'est pas le lieu d'y revenir ici. Mais nous évaluerons le coût de votre proposition.

M. Thierry Repentin.  - Merci. Le coût fiscal pour l'État tend à diminuer de mois en mois, puisque la rémunération du livret A vient d'être abaissée. Et certaines niches fiscales sont autrement onéreuses.

L'amendement n°715 est retiré.

Article 6

L'État incitera les acteurs de la formation professionnelle initiale et continue à engager un programme pluriannuel de qualification et de formation des professionnels du bâtiment et de l'efficacité énergétique dans le but d'encourager l'activité de rénovation du bâtiment, dans ses dimensions de performance thermique et énergétique, acoustique et de qualité de l'air intérieur.

Les programmes publics de recherche dans le domaine du bâtiment seront orientés vers les nouvelles générations de bâtiments faiblement consommateurs d'énergie, ceux producteurs d'énergie à partir de sources renouvelables et les techniques de rénovation performantes en matière d'économie d'énergie.

Le diagnostic de performance énergétique tel que prévu au titre de la réglementation thermique et des réglementations européennes sera adapté à l'outre-mer afin de tenir compte des critères propres à ces territoires.

La France concourt à la création d'une plate-forme européenne sur l'éco-construction, pour développer les recherches et promouvoir les différentes filières de bâtiments faiblement consommateurs d'énergie.

M. le président.  - Amendement n°321 rectifié, présenté par M. Daniel Raoul et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Dans le premier alinéa de cet article, après les mots :

à engager

insérer les mots :

, en concertation avec les régions,

Mme Odette Herviaux.  - Les programmes pluriannuels de formation et de qualification des professionnels du bâtiment doivent être mis en place en concertation avec les régions, auxquelles le gouvernement Raffarin a transféré la compétence formation professionnelle en 2004.

Les régions ont consenti des efforts considérables, elles ont anticipé les évolutions. Le Conseil économique, social et environnemental estime que « l'amélioration des qualifications, le développement de métiers nouveaux » doivent intervenir au plus vite ; et que « ces efforts seraient vains » sans l'accent mis par les régions « sur la formation continue aux techniques en lien avec le changement climatique ». Il faut préciser, pour ne pas faire peser de nouvelles contraintes sur leurs budgets, que les régions seront associées aux programmes de formation professionnelle bénéficiant des moyens incitatifs de l'État.

Gardez-vous de décréter d'en haut, de faire descendre les consignes. Prenez plutôt connaissance de ce qui se pratique localement, depuis un certain temps déjà...

M. Bruno Sido.  - Amendement de pur bon sens : avis tout à fait favorable.

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État.  - La rédaction, mentionnant « les acteurs de la formation professionnelle », comprend bien sûr les régions, comme les fédérations, très engagées, ou les entreprises. Mais je m'en remets à la sagesse du Sénat.

L'amendement n°321 rectifié est adopté.

M. le président.  - Amendement n°322, présenté par M. Courteau et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Compléter le premier alinéa de cet article par une phrase ainsi rédigée :

Ce programme insistera avant tout sur la formation aux techniques de diagnostic préalable, la connaissance des énergies renouvelables et de leurs modalités d'utilisation, l'adaptation des contenus de formations pour privilégier l'isolation et les réseaux de chauffage.

Mme Marie-Christine Blandin.  - La formation des professionnels du bâtiment est un préalable indispensable pour adapter le secteur aux nouvelles exigences. Précisons ce que doit contenir en priorité la formation, dans le sens suggéré par le Conseil économique et social : isolation et réseaux de chauffage. Les habitants sont pleins de bonne volonté, prêts à dépenser pour mieux isoler et recourir aux énergies renouvelables. Mais ils sont inquiets, ils ne savent pas s'ils trouveront le bon prestataire, s'ils obtiendront le bon diagnostic. Certains vont s'endetter ; des aides publiques leur seront consenties. Alors attention, car chaque diagnostic erroné, chaque pompe à chaleur enrayée, chaque panneau solaire défectueux sera une contre-publicité !

M. Bruno Sido, rapporteur.  - La précision est utile : favorable.

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État.  - C'est une approche systémique qu'il faut développer dans les formations. Mais cette précision est tout de même utile. Sagesse.

M. Roland Courteau.  - De nouvelles formations s'imposent. L'absence de personnel qualifié serait un obstacle à l'utilisation de nouveaux matériaux et de nouvelles techniques, comme à la réduction des émissions de gaz à effet de serre. Des formations adéquates créeront un gisement d'emplois énorme.

L'amendement n°322 est adopté.

M. le président.  - Amendement n°24, présenté par M. Sido au nom de la commission.

Supprimer l'avant-dernier alinéa de cet article.

M. Bruno Sido, rapporteur.  - Coordination.

M. le président.  - Amendement n°339 rectifié, présenté par M. Antoinette et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Compléter l'avant-dernier alinéa de cet article par une phrase ainsi rédigée :

De même, en outre-mer, en matière d'éco-construction, les études et recherches devront favoriser la prise en compte des techniques, savoir-faire et matériaux locaux - notamment le bois -, afin d'examiner et promouvoir les conditions de leur labellisation, certification, agrément ou mise aux normes.

M. Jean-Etienne Antoinette.  - Les matériaux locaux, les techniques traditionnelles de construction, les usages de l'espace de certaines populations présentent un grand intérêt pour l'environnement et le développement durable. Pourtant, ces matériaux et techniques ne sont pas reconnus, ces savoir-faire ne sont pas sanctionnés par des diplômes.

L'amendement vise à faire évoluer les pratiques et les normes, à mieux valoriser les compétences locales, à favoriser l'insertion. Les études font apparaître l'intérêt de telle essence de la forêt guyanaise pour la construction, de telle technique traditionnelle pour une architecture adaptée au climat. Tous ces savoir-faire transmis de génération en génération sont précieux.

Or ils ne franchissent pas la barrière des normes « NF » ou « NE », faute d'inventaire, faute d'information, de mise à jour des nomenclatures, de reconnaissance des acquis... ou faute de bon sens ! Du coup, la charpente de l'hôtel Novotel à Cayenne a été construite avec du bois provenant du Massif Central. La médiathèque de Kourou a dû, avant d'ouvrir ses portes, obtenir deux dérogations car le bois qui avait servi à la construction n'avait jamais été répertorié. Dans les stages de l'Afpa, on apprend à des Amérindiens à fabriquer des carbets d'écotourisme ! Ces plaisanteries sont coûteuses, mais également méprisantes pour les populations. Il serait juste de prévoir, pour les matériaux locaux, pour les savoir-faire et les techniques éprouvés, une reconnaissance, une certification, un cadre réglementaire. Cela favoriserait l'insertion de beaucoup et contribuerait au développement local durable.

M. Bruno Sido, rapporteur.  - Cet amendement met en évidence la nécessité de renforcer la filière bois, et pas seulement outre-mer. Du bois du Massif Central en Guyane ? Il y a effectivement de quoi s'étonner. Mais cet amendement est-il nécessaire ?

Des mesures de soutien à la filière bois figurent en outre dans la loi de finances pour 2009 et le texte portant engagement national pour le logement. Retrait, sinon rejet.

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État.  - L'idée de lancer études et recherches est intéressante. Je m'engage à ce que le sujet soit abordé dans le processus de définition des normes qui doivent être adaptées à l'outre-mer. Je souhaite le retrait.

L'amendement n°24 est adopté.

L'amendement n°339 rectifié devient sans objet.

M. le président.  - Amendement n°323 rectifié, présenté par M. Daniel Raoul et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :

L'État veillera à soutenir les actions collectives de type clusters et pôle de compétitivité en lien avec les conseils régionaux et les collectivités territoriales.

M. Didier Guillaume.  - Il s'agit de dynamiser les dispositions de cet article. L'article 3 rappelle que le secteur du bâtiment est le principal gisement d'économies d'énergie exploitable immédiatement. Le développement de l'éco-construction et des nouvelles technologies dans la construction neuve et la rénovation imposent une plus grande professionnalisation dans le cadre d'actions collectives : nous voulons faire travailler en réseau les acteurs privés et publics qui souhaitent contribuer au développement des filières de la maîtrise de l'énergie et des énergies renouvelables. Notre retard sur d'autres pays, en particulier l'Allemagne, est patent.

Il ne suffit pas d'innover, encore faut-il que l'innovation se diffuse. Les pôles de compétitivité créés par le gouvernement précédent sont dynamiques, il faut s'appuyer sur eux car ils regroupent les différentes forces des territoires, industriels innovants qui recherchent la taille critique, laboratoires, acteurs publics locaux. Nous devons prendre un temps d'avance dans la compétition européenne et mondiale, relever les défis de la compétitivité autour de projets fédérateurs et innovants. D'où notre amendement.

M. Bruno Sido, rapporteur.  - Je renvoie M. Guillaume à l'article 19, qui dispose que « le soutien aux innovations éco-responsables se traduira notamment par la mobilisation et la coordination des pôles de compétitivité travaillant dans le domaine de l'environnement et par la mise en place de mécanismes favorisant le développement des entreprises éco-innovantes. » Retrait.

M. Didier Guillaume.  - Je retire l'amendement, en souhaitant qu'on n'oublie pas les clusters, qui sont dynamiques et efficaces.

M. le président.  - Le mot est-il au dictionnaire ? (Sourires)

M. Didier Guillaume.  - Les chefs d'entreprise le connaissent bien, croyez-moi !

L'amendement n°323 rectifié est retiré.

L'article 6, modifié, est adopté.

M. le président.  - Nous avons examiné dans l'après-midi 75 amendements ; il nous en reste 647...

Renvoi pour avis

M. le président.  - J'informe le Sénat que la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, portant création d'une première année commune aux études de santé et facilitant la réorientation des étudiants, dont la commission des affaires culturelles est saisie au fond, est renvoyée pour avis, à sa demande, à celle des affaires sociales.

La séance est suspendue à 19 h 35.

présidence de M. Gérard Larcher

La séance reprend à 21 h 50.

Prolongation de cinq interventions des forces armées

M. le président.  - L'ordre du jour appelle, en application de l'article 35, alinéa 3, de la Constitution, un débat et un vote sur les demandes du Gouvernement d'autorisation de prolongation de l'intervention des forces armées en République de Côte d'Ivoire, au Kosovo, au Liban, et en République du Tchad et en République centrafricaine -opération Eufor d'une part et opérations Boali et Épervier d'autre part.

M. Bernard Kouchner, ministre des affaires étrangères et européennes.  - Monsieur le président, monsieur le président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, mesdames et messieurs les sénateurs, je m'exprime ce soir au nom du Premier ministre.

Avec ce débat, suivi de votre vote, nous voici au coeur du rééquilibrage des pouvoirs opéré par la réforme constitutionnelle du 21 juillet 2008. Au coeur puisque du « domaine réservé », apanage historique de l'exécutif, nous allons passer à un domaine partagé avec le Parlement, incarnation de la souveraineté nationale.

Nous avons voulu cette révision historique pour conférer plus de pouvoir au Parlement. Nous avons voulu ouvrir le fonctionnement de notre démocratie à plus de débats. Nous avons voulu que s'exerce avec plus de transparence la prérogative régalienne que constitue l'emploi de la force armée, comme cela se fait dans la plupart des grandes démocraties.

Conformément à la nouvelle rédaction de l'article 35 de la Constitution, le Gouvernement informe désormais le Parlement de sa décision de faire intervenir les forces armées françaises à l'étranger dans les trois jours suivant le début de l'opération. II soumet sa prolongation à l'autorisation du Parlement lorsque celle-ci dépasse les quatre mois.

Certaines activités militaires à l'étranger ne sont pas visées par cette procédure, notamment les échanges de militaires, les exercices, les troupes pré-positionnées en vertu des accords de défense, l'envoi d'observateurs non armés, les déplacements des navires et aéronefs dans les espaces internationaux et les escales dans les ports étrangers, ainsi que les opérations des services de renseignement ou des forces spéciales.

Cette procédure s'appliquera à l'envoi à des fins opérationnelles de forces militaires en corps constitués, c'est-à-dire des unités militaires d'un volume important, engagées en situation de crise et sur un territoire étranger. Elle concernera l'immense majorité des effectifs déployés en opérations.

Dés le 22 septembre, nous avons abordé un premier théâtre, le plus difficile, l'Afghanistan. Nous avons débattu de la stratégie de la France et de ses partenaires pour le retour de la sécurité et de la stabilité dans ce pays. Aujourd'hui, nous voulons vous informer des autres opérations extérieures en cours et vous demander d'approuver leur prolongation. Comme vous le savez, l'Assemblée nationale a voté ce soir en faveur de leur prolongation.

Cinq théâtres principaux regroupent aujourd'hui 95 % des soldats français déployés en opérations. L'Afghanistan mis à part, restent quatre zones où cinq engagements distincts prennent place : la zone regroupant le Tchad et la République centrafricaine, la Côte d'Ivoire, le Liban, le Kosovo.

Pourquoi la France y est-elle présente ? Parce que sa stratégie de sécurité a pour objectif premier de parer aux risques qui menacent tous les Français et qu'un nombre croissant de ces risques trouve aujourd'hui leur origine bien au-delà de nos frontières. Parce que la France entend jouer son rôle en faveur de la sécurité internationale et qu'elle assume pleinement ses devoirs, dans le cadre des Nations Unies. Mais aussi parce que les valeurs humanitaires ne cessent de guider son action.

Cette triple ambition nous commande de participer aux efforts de maintien de la paix, partout où notre implication peut se révéler décisive, par les moyens qu'elle engage ou par l'effet d'entraînement qu'elle suscite.

La responsabilité d'envoyer nos soldats, là où se nouent et se dénouent les crises, est immense. Le 19 août 2008, dix soldats français tombaient au combat, au cours d'une reconnaissance conjointe avec l'armée afghane. Le 22 novembre, j'apprenais le décès, à Kaboul, d'un sous-officier du 3e régiment du Génie de Charleville-Mézières. Ce 17 janvier encore, huit de nos hommes mouraient au Gabon. Avec Hervé Morin, nous plaçons dans l'ombre de leur mémoire les choix graves qui nous incombent ici.

La France n'engage pas d'opérations militaires sans nécessité impérieuse, sans stratégie, sans objectif. Elle ne les engage que là où elles sont strictement nécessaires, et dans les conditions les plus sécurisées possibles. Elle ne les engage que là où les enjeux humanitaires et stratégiques sont décisifs.

Dans tous les cas, notre engagement militaire doit être la contrepartie d'un engagement politique actif, susceptible de tirer de l'impasse les pays concernés. Dans tous les cas, nous veillons à définir dès le départ les objectifs que nous assignons à nos troupes et qui détermineront, une fois atteints, les termes de leur retrait. Exemple : engagée pour une durée limitée, dans un but précis, l'opération européenne au Tchad prendra ainsi fin dans les prochaines semaines pour laisser place à une force des Nations Unies.

Nous intervenons de plus en plus dans un cadre multilatéral : Otan, Union européenne... La présidence française a élargi le rôle de cette dernière dans le maintien de la paix et dans la gestion civile des crises en lançant trois nouvelles opérations : deux à caractère civil, au Kosovo et en Géorgie ; une à caractère militaire, contre la piraterie dans le Golfe d'Aden. A chaque fois, que ce soit dans le cadre de l'Otan ou de l'Union européenne, la France a conservé la maîtrise opérationnelle de ses forces. Elle a fait en sorte que ses troupes déployées à l'étranger soient le reflet de sa solidarité mais aussi de son indépendance.

Le Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale le confirme : en toute situation, « la France s'engage avec une qualité et un volume de forces suffisants pour disposer d'une représentation adéquate dans les organes de planification et de commandement de l'opération, et garantir ainsi sa liberté d'appréciation et de décision ».

Depuis une dizaine d'années, une trentaine d'opérations mobilisent en moyenne 12 000 de nos soldats à travers le monde -sans jamais remettre en cause la participation de nos moyens militaires à la sécurisation du territoire national.

Le paysage stratégique bouge. Les menaces évoluent. En 2008, la France a réexaminé sa politique de sécurité, dans le cadre d'un Livre blanc présenté par le Président de la République le 17 juin. Présidente de l'Union européenne, elle a réactualisé et complété la stratégie de sécurité de l'Union. En avril prochain, le sommet de l'Otan, à Strasbourg et à Kehl, lancera les travaux de redéfinition du concept stratégique de l'Alliance atlantique.

Nos priorités changent et nos moyens s'adaptent. Dans certaines régions du monde, où notre présence se révèle moins déterminante, il convient de réduire notre contribution ; ailleurs, de quitter des zones déjà stabilisées pour retrouver la mobilité nécessaire à d'autres participations. Les moyens de la France ne sont pas infinis.

Mesdames et messieurs les sénateurs, nous sommes intervenus en Côte d'Ivoire après la crise de septembre 2002. Au plus fort de l'épreuve, en 2004, plus de 4 000 soldats français y ont été déployés. En bloquant l'avancée des rebelles du nord et de l'ouest du pays, leur but était d'éviter que le pays ne sombre dans la guerre civile, comme l'avaient fait ses voisins, le Libéria et la Sierra Leone. En 2004, ces soldats ont défendu la sécurité immédiate de nos ressortissants. Lors du bombardement de Bouaké, le 6 novembre 2004, neuf d'entre eux ont payé ce dévouement de leur vie.

Depuis, nous avons privilégié la gestion multilatérale de la crise et contribué à un processus politique de réconciliation ouvert sur la tenue d'élections régulières. L'accord de Ouagadougou, signé le 4 mars 2007, a consacré la stabilisation politique du pays. Ayant obtenu un fort engagement des Nations Unies, nous n'intervenons plus aujourd'hui en première ligne mais en soutien de leur mission, l'Onuci.

En Côte d'Ivoire, les enjeux sécuritaires ont perdu de leur intensité ; et l'attente d'échéances électorales toujours incertaines ne justifie plus le maintien de notre dispositif militaire en l'état. D'ores et déjà, l'ONU a entamé son désengagement par une diminution de ses effectifs et par un réexamen des mandats de l'Onuci, où la France compte 200 soldats -principalement des troupes du Génie dont la mission peut être considérée comme achevée et qui, je vous l'annonce, rentreront en France cette année.

A son tour, notre pays devrait réduire de moitié le contingent de 1 800 hommes qui constitue la force Licorne, d'ici l'été 2009. Regroupées à Abidjan, nos troupes resteront en mesure d'assurer la protection et l'évacuation éventuelle de nos ressortissants ou d'accueillir des transports stratégiques destinés à l'Onuci, en cas de reprise des conflits.

Mesdames et messieurs les sénateurs, au Kosovo, où notre engagement ancien fait de nous le troisième contributeur de la KFOR, avec 1 850 hommes, la situation politique s'est, elle aussi, profondément transformée.

L'indépendance du Kosovo et sa reconnaissance comme État souverain ouvrent, depuis décembre, la voie à une mission civile de consolidation de l'État de droit menée par l'Union européenne. Cette mission Eulex est une mission ambitieuse de police et de justice dont un Français assure en outre le commandement.

La France est aujourd'hui favorable à une évolution de l'action de l'Otan au Kosovo. Elle souhaite la transformation progressive de la KFOR en force de présence dissuasive, qui permettra une réduction de son volume global et, dans ce cadre, de la participation française. Ce changement de posture demandera l'accord du Conseil de l'Atlantique Nord, après évaluation de la situation diplomatique et sécuritaire régionale.

Au Liban, depuis trente ans, la France ne poursuit qu'un objectif : renforcer l'indépendance et la sécurité du pays.

Notre travail diplomatique, intense, porte ses fruits. Le Liban a passé l'an dernier l'épreuve délicate du choix d'un nouveau président. II se prépare, en mai prochain, à des élections législatives qui doivent signer son apaisement.

Pour cette paix retrouvée, la France a versé le prix du sang. L'attentat contre le poste Drakkar en octobre 1983 ; l'assassinat odieux de notre ambassadeur, Louis Delamarre, en septembre 1981, ont été des tests de notre résolution.

La République n'a pas renoncé, elle n'a pas lâché le Liban. En 2006, lorsqu'il a fallu s'engager dans le cadre de la Finul II, elle a fourni 1 500 hommes à l'opération. Elle les a pourvus d'équipements à la fois robustes et dissuasifs, comme les chars Leclerc. Mais surtout, elle a joué, en s'engageant, un rôle moteur auprès de ses partenaires européens, dont l'engagement conditionnait à son tour l'arrêt des hostilités entre Israël et le Hezbollah.

Aujourd'hui, grâce à la Finul, la souveraineté du Liban est restaurée. Grâce à la présence française, l'armée libanaise a repris position au Sud-Liban, où elle n'intervenait plus depuis des décennies. Ce rôle stabilisateur ne se dément pas, et il mérite le maintien des soldats français au sein de la Finul renforcée, en particulier dans sa composante terrestre. S'agissant de la Finul maritime, dont nous assurons le commandement, son dispositif très dense ne se justifie plus vraiment. Les deux bâtiments de la marine nationale qui y participent seront bientôt dirigés vers d'autres missions.

Au Tchad et en République centrafricaine, enfin, deux opérations différentes appellent de notre part deux réflexions distinctes. La première opération, l'Eufor, procède de l'initiative française face au drame humanitaire du Darfour. Déployée le 28 janvier 2008, avec le concours de nos partenaires européens, elle a permis de réduire les attaques contre les ONG et de sécuriser la zone frontalière entre Tchad et Soudan, où se concentraient les incursions rebelles. A ce titre, elle constitue à ce jour la plus importante opération militaire de l'Union européenne et une preuve de sa crédibilité opérationnelle grandissante.

Nous avons lancé l'Eufor comme une opération transitoire, en prévision de sa relève par une force des Nations Unies : cette promesse sera tenue puisque le 15 mars prochain, la Minurcat 2 remplacera la mission européenne. Le calendrier du retrait français prévoit ainsi que d'ici l'été, 1 000 de nos 1 650 hommes quittent le pays. Jusqu'à la fin de l'année, la France continuera cependant de fournir à l'ONU l'aide technique utile à son installation ; en particulier, un certain nombre de capacités logistiques critiques qui lui permettront d'assurer progressivement son autonomie.

La logique des opérations Épervier, au Tchad, et de Boali, en RCA, est différente.

Au Tchad, notre engagement des années 1980 destiné à protéger la zone frontalière des agressions libyennes a vu son principe évoluer avec la normalisation des rapports entre les deux pays. Son but est désormais d'offrir, au centre de l'Afrique, un point d'appui militaire aux missions multilatérales de maintien de la paix et une capacité d'évacuation de nos ressortissants. Le dispositif, pourvu d'environ 1 100 hommes, a aidé à déployer l'Eufor : il continuera pour la Minurcat.

Quant à notre opération à Boali, en République centrafricaine, elle illustre parfaitement l'ambition que nous fixons à nos forces pré-positionnées sur le continent. Il s'agit avant tout d'aider les Africains à prendre en charge leur propre sécurité -c'est difficile- ; d'abord, en renforçant le potentiel des forces centrafricaines ; et ensuite, en soutenant la mission régionale de consolidation de la paix engagée par une organisation africaine, la Communauté Économique des États d'Afrique Centrale. Notre contingent sur place ne dépasse pas 200 hommes et son rôle-clé justifie entièrement son maintien.

Vous le voyez, mesdames et messieurs les sénateurs, les opérations extérieures de la France ont un sens et une nécessité, à l'instant où elles sont lancées : elles ont aussi une dynamique, un pilotage et un calendrier.

Votre assurerez désormais une part de leur contrôle -je m'en réjouis personnellement et au nom du Gouvernement- et vous garantirez que leur déroulement se poursuit avec l'appui explicite de la nation. Votre débat et votre vote ne seront pas seulement un gage de cohérence et de vigilance démocratique : ils diront aussi à nos partenaires que la France, quand elle s'engage, le fait d'une seule et forte volonté.

Ils diront à nos soldats qu'aussi loin que cet engagement les porte, notre regard et notre soutien les suivent. Vous connaissez leur compétence, leur dévouement et leur bravoure : ils doivent pouvoir compter aujourd'hui sur votre responsabilité. Ils doivent savoir qu'ils ont, par votre voix exigeante, l'appui de la Nation. (Applaudissements à droite et au centre)

M. Josselin de Rohan, président de la commission des affaires étrangères.  - En application de l'article 35 de la Constitution, le Gouvernement a souhaité tenir un second débat au Parlement, depuis la modification constitutionnelle, sur l'intervention de nos forces armées sur les théâtres extérieurs. Notre débat intervient après celui qui s'était tenu le 22 septembre dernier à propos de notre engagement en Afghanistan.

Je me félicite de cette volonté de transparence du Gouvernement à la fois dans l'information de nos deux assemblées et dans le fait de demander leur autorisation pour la poursuite des quatre opérations dont nous avons à discuter ce soir. C'est dans le même esprit de transparence et le contrôle que la commission des affaires étrangères s'est rendue en 2008 en Côte d'Ivoire, en Afghanistan, au Liban, au Kosovo, en Bosnie-Herzégovine et, en 2009, au Tchad.

Le premier but de ces déplacements était d'informer la commission et le Sénat sur la pertinence politique et stratégique de nos engagements extérieurs et de contrôler l'adéquation des moyens mis en oeuvre pour atteindre les objectifs fixés. Il s'agissait aussi de manifester l'intérêt, l'attention et la considération du Sénat pour l'action menée par les soldats français au service de la paix internationale et de notre sécurité.

Les 13 000 militaires français déployés hors du territoire national font honneur à la France dont ils défendent, au péril de leur vie, les intérêts et les valeurs. Notre devoir est de veiller à ce que les moyens dont ils disposent pour leur mission et les conditions dans lesquelles se situent leur intervention soient optimaux tant du point de vue matériel que juridique et politique.

Chacune de ces missions a engagé deux sénateurs sur une base paritaire majorité-opposition. Elles ont été préparées en étroite coordination avec le ministère des affaires étrangères et avec le ministère de la défense. Des briefings ont été organisés avec le Centre de planification et de conduite des opérations de l'état-major. Dans chaque pays visité, des entretiens ont été ménagés avec les autorités politiques avant de se rendre sur le terrain. Nos ambassades ont été efficaces et sont parfaitement coordonnées avec les militaires. Dans la mesure du possible, ces missions ont eu lieu à l'occasion de relèves en accompagnant les unités en vol aérien militaire et en partageant les conditions de vie des militaires sur le terrain. Notre rapport d'information présente les analyses politiques et militaires réalisées à l'occasion de ces missions. Ces informations sont complétées par le dossier que nous a transmis le Premier ministre.

Je m'interroge sur les critères retenus par le Gouvernement pour demander au Parlement l'autorisation de poursuivre des opérations extérieures en cours, sachant que l'article 35 n'a pas de caractère rétroactif.

S'il est parfaitement clair que pour l'avenir, le Parlement doit être consulté pour toute opération nouvelle, il nous faut nous interroger sur la jurisprudence qui est en train de se mettre en place pour celles qui sont déjà engagées. Le Livre blanc pour la défense et la sécurité nationale a défini sept critères majeurs, mais ils valent plus pour les opérations à venir. S'exprimant devant la Finul le 6 janvier, le Président de la République a précisé ces critères en souhaitant que l'on puisse s'assurer que nos engagements correspondent bien à nos intérêts stratégiques et que la nature comme le volume de nos interventions nous procurent bien l'effet de levier escompté pour la solution rapide des crises dans lesquelles nous nous impliquons. Et nous retrouvons ces éléments dans les fiches transmises par le Premier ministre.

Tout cela crée une jurisprudence sur les opérations en cours, dont l'élément déterminant tient à la modification du contexte géopolitique d'emploi de nos forces. Des modifications sont bien intervenues sur les cinq territoires où sont regroupés l'essentiel des 13 000 hommes engagés dans une trentaine d'Opex : en Afghanistan, le renforcement du contingent français justifiait la consultation du Parlement ; en Cote d'Ivoire, la poursuite du processus de Ouagadougou et le report de l'élection présidentielle incitent à réfléchir sur le bon niveau des effectifs français, déjà sensiblement déflatés ; au Liban, le rôle puissamment stabilisateur de la Finul n'exclut pas une réflexion sur le niveau de nos forces ; la stabilisation du Kosovo et le déploiement de la mission Elex permettent de s'interroger sur le maintien du format et de la participation française à la KFOR ; la fin programmée de l'opération Eufor Tchad RCA pourrait se traduire par un renforcement du dispositif Épervier. Ces opérations s'inscrivent dans les quatre zones critiques que sont l'arc de crise Mauritanie-Pakistan, l'Afrique subsaharienne, le continent européen et l'Asie, avec un impact possible sur l'Europe.

Nous devons nous interroger sur la sélectivité de nos engagements extérieurs. Sur 270 000 hommes, nous en déployons 36 623, dont 9 796 pour les opérations multinationales, 3 503 pour les Opex bilatérales, 6 293 pour les forces de présence et 17 031 pour les forces de souveraineté. Hors forces de souveraineté dans les DOM-COM, notre présence s'équilibre en 10 000 hommes pour les opérations multinationales et 10 000 pour les opérations bilatérales et les forces de présence. Compte tenu de la loi de programmation, c'est parfaitement à la hauteur d'un pays comme la France : le Royaume-Uni déploie 15 000 hommes.

Membre permanent du conseil de sécurité, membre fondateur de l'Union européenne, comptant parmi les premiers contributeurs de l'Otan, la France a une responsabilité mondiale qui l'engage et justifie sa participation aux Opex, notre histoire et nos intérêts légitimant nos engagements bilatéraux.

Nous pouvons déployer 12 000 hommes sans problème majeur mais nous avons constaté en Afghanistan des faiblesses en équipement individuel et en matière de sécurité. Si le programme que vous avez lancé a très sensiblement amélioré ces équipements, avec les surblindages, les tourelleaux téléopérés et le brouillage contre les engins explosifs improvisés, on a également relevé des faiblesses dans le renseignement et dans l'usage des drones et, outre un déficit en matériel de mobilité pour les hélicoptères et les avions de transport, une usure accélérée du matériel.

Grâce à un effort considérable de maintien en condition opérationnelle, la situation est satisfaisante, sauf au Tchad où le taux de disponibilité des matériels est anormalement bas. Des mesures significatives ont été prises en 2008 mais les moyens affectés aux Opex pèsent sur la situation des unités stationnées sur le territoire national. Il est donc impératif de respecter la loi de programmation militaire en matière d'équipement.

Les demandes d'intervention des organisations internationales demeureront très importantes, ainsi en République démocratique du Congo, dans l'attente d'un contingent de l'ONU. Dans ce contexte, nous devons travailler sur des options d'allégement des opérations existantes en gardant comme hypothèse le déploiement de 12 000 hommes. L'option politique doit être privilégiée, comme le montre l'exemple des Kivus. Nos diplomates s'y emploient et leurs succès permettent d'éviter le déploiement de renforts.

Les pistes de travail me paraissent assez évidentes. Le Tchad présente un intérêt stratégique majeur pour la France : au coeur de l'arc de crise et au contact d'États en grande difficulté, sa stabilisation constitue un enjeu majeur. Le maintien des opérations Épervier et Boali paraît s'imposer. L'Eufor sera remplacée par un contingent de l'ONU mais le maintien d'un millier d'hommes assurera la soudure.

Le Livre blanc a prévu le retrait de Cote d'Ivoire à la fin de l'opération Licorne. La récente annonce du retrait de 1 100 hommes va dans le bon sens.

Avec le retour du reste du pays à la stabilité, on peut imaginer un rééquilibrage dans la zone nord du Kosovo et l'intervention d'autres pays.

Notre importante participation à la Finul ne doit pas faire l'objet d'une réflexion car elle est pleinement utile : sans elle, un deuxième front aurait été ouvert pendant le conflit de Gaza et des éléments incontrôlés auraient pu déclencher une réaction en chaîne. La prolongation de notre participation me semble donc une évidence. Le Gouvernement a néanmoins annoncé le retrait de deux bâtiments.

Nous ne statuons pas aujourd'hui sur notre présence résiduelle en Bosnie-Herzégovine, où l'on n'assure plus aucune opération sécuritaire. Une clôture de l'opération s'impose à court terme.

Les surcoûts des opérations extérieures qui correspondaient initialement surtout à des dépenses de personnel comprennent désormais d'importants crédits de fonctionnement et des contributions à des organisations internationales. Il s'agit de chiffres bruts, qui ne comptabilisent pas d'éventuels remboursements partiels -38 millions sur 833 en 2007. Le fardeau doit être mieux partagé : le dispositif Athéna de l'Union européenne n'est pas toujours satisfaisant. L'inscription en loi de finances de crédits complétés en collectif a marqué un progrès et la loi de programmation militaire a prévu de porter ce budget à 630 millions en 2011 -un montant à rapprocher de celui de 2007, qui n'est pas si exceptionnel que le prétend le ministère du budget. Les crédits mis en réserve par les différents ministères pourront être utilisés pour couvrir les surcoûts et la commission y sera très vigilante.

Je salue l'engagement exceptionnel de nos soldats et de nos diplomates, leur professionnalisme, leur ardeur et leur enthousiasme nous ont frappés, de même que le soutien des populations qu'ils protègent. Pour ces raisons, la prolongation de ces opérations militaires est totalement justifiée. (Applaudissements à droite et sur plusieurs bancs au centre)

M. Yves Pozzo di Borgo.  - En application de l'article 35 de la Constitution, notre Haute assemblée est appelée à autoriser le maintien de nos forces armées sur cinq théâtres d'opérations extérieures. Le groupe de l'Union centriste, qui a voté à une large majorité la dernière révision constitutionnelle, exprime une nouvelle fois sa satisfaction de voir un tel débat se tenir au Parlement.

Ces opérations, par ailleurs bien différentes, illustrent les responsabilités d'un pays membre permanent du Conseil de sécurité de l'Organisation des Nations Unies. Chaque intervention de nos forces armées correspond désormais à un mandat précis ou à une orientation décisive du Conseil de sécurité : on ne peut que se féliciter de ce progrès du droit. Le temps du « machin » brocardé par le Général de Gaulle est bien révolu, et la France a cessé de se singulariser dans le concert des nations pour mieux apporter son génie propre aux décisions collectives.

J'ai fait part, lors du débat budgétaire du 5 décembre dernier, de mes interrogations sur notre politique au Proche-Orient. Notre pays joue au Liban un rôle essentiel. Depuis l'orientation prise en mai 1978 par le Président Giscard d'Estaing, la France a apporté une contribution importante à la Finul. Elle a évité les pires tragédies sans empêcher, hélas, les conflits. Depuis la résolution 1 701 du Conseil de sécurité, datée du 12 août 2006, la Finul II a maintenu la paix : la ligne bleue est respectée et l'armée libanaise peut désormais se déployer au sud du pays. L'élection, le 25 mai 2008, du général Sleimane à la Présidence de la République, puis la formation d'un gouvernement de coalition autour de Fouad Siniora ont permis une détente intérieure. Souhaitons que ce fait soit confirmé par les élections législatives du printemps prochain.

A la frontière israélo-libanaise, hormis un incident mineur, aucune violation du cessez-le-feu n'a été constatée pendant la crise de Gaza. La présence militaire de la France -1 430 soldats et 430 marins sur deux bâtiments- lui permet de se faire entendre des parties en présence. Depuis 1860, notre pays s'honore de veiller sur le Liban, de garantir sa sécurité et d'apporter sa pierre à sa stabilité. Mon groupe autorisera le Gouvernement à y maintenir nos forces armées.

Plus près de nous, en Europe, l'approche est bien différente. Depuis juin 1991, l'ex-Yougoslavie vit dans l'incertitude politique la plus grande. La Slovénie, membre de l'Union européenne, de la zone euro et de l'Otan, est tirée d'affaire ; mais souvenons-nous qu'elle fut le premier pays agressé par l'armée fédérale yougoslave.

Le Kosovo aspire à la paix : c'est loin d'être acquis dans un pays qui n'est pas reconnu par l'ensemble de la communauté internationale et qui peine à faire cohabiter sa majorité albanaise et sa minorité serbe, sans compter le poids des mafias. Notre engagement s'effectue dans le cadre d'un mandat délivré par la résolution 1 244 du Conseil de sécurité, datée de 1999. Au fil du temps, les progrès de la construction européenne devraient stabiliser la région. La Croatie frappe à la porte de l'Union européenne et la Serbie aurait le plus grand intérêt à suivre son exemple. Un apaisement en Bosnie-Herzégovine permettrait d'envisager un indispensable compromis au Kosovo. Avec 1 850 hommes sur un total de 14 600, la France fait son devoir au sein de la force de l'Otan, la KFOR. Le travail de la mission civile de police et de justice de l'Union européenne, Eulex Kosovo, permettra à terme de réduire progressivement la présence militaire internationale dans cette région : ce serait le signe du retour de la paix. Le groupe de l'Union centriste autorisera le Gouvernement à y maintenir nos troupes.

La France est également présente en Afrique ; loin de moi l'idée de le remettre en cause. Cependant, je souhaite interroger le Gouvernement sur plusieurs points. En République centrafricaine, la situation demeure préoccupante ; les observateurs espèrent que le Président Bozizé mènera à son terme le « dialogue national inclusif » engagé par son Premier ministre Faustin-Archange Touadéra en vue de préparer l'élection présidentielle de 2010. Le Gouvernement peut-il nous donner des précisions à ce sujet ?

L'ancien président Ange Félix Patassé a fait part de sa volonté d'être candidat à la magistrature suprême en 2010. Or il est toujours menacé de poursuites par la Cour pénale internationale dans le cadre de la procédure ouverte contre Jean-Pierre Bemba, chef du Mouvement de libération du Congo, pour des exactions commises à Bangui entre octobre 2002 et mars 2003. Si le procureur général de la CPI délivrait un mandat d'amener à l'encontre du Président Patassé, quelles seraient les instructions du Gouvernement à nos soldats ?

En Côte d'Ivoire, où en est le recensement des électeurs, étape cruciale avant le scrutin présidentiel ? Seuls deux millions d'électeurs ont été recensés dans le district d'Abidjan au lieu des trois millions attendus, 2,5 millions au lieu de cinq dans l'ensemble du pays. Le compte n'y est pas. Nous sommes encore bien loin d'élections législatives « ouvertes à tous, libres, justes et transparentes » pour reprendre les termes du mandat politique et civil de juin 2005 de l'Organisation des Nations Unies en Côte d'Ivoire.

Au Tchad, notre engagement remonte à 1968. Notre pays a pris l'initiative d'envoyer une force Eufor pour éviter l'extension de la crise humanitaire du Darfour aux pays voisins. Mais il est temps de redéfinir clairement nos objectifs. Le Président Idriss Déby était paraît-il à Paris voici deux semaines et aurait eu des conversations diplomatiques au plus haut niveau. Je souhaite que vous éclairiez à ce propos la représentation nationale, à moins que ces entretiens soient confidentiels.

Je me réjouis qu'on ait mis un terme à la pratique qui consistait à ne pas inscrire de crédits budgétaires suffisants pour les opérations extérieures. La différence entre la provision budgétaire et le coût réel des opérations extérieures était alors comblée par l'ouverture de crédits nouveaux compensée par l'annulation de crédits d'investissements. Fort heureusement, depuis 2002, on s'efforce de faire correspondre la ligne budgétaire au coût réel. Si l'écart s'est creusé en 2008, à cause des opérations en Afghanistan et au Tchad, il devrait continuer à se réduire dans les années à venir. C'est un réel progrès de la sincérité budgétaire.

Je terminerai par une question stratégique. Pour des raisons historiques, l'Afrique est le terrain privilégié des opérations extérieures françaises. Mais l'Europe a montré sous la présidence française, à l'occasion des crises géorgienne et proche-orientale, qu'elle pouvait redevenir la puissance qu'elle a été. N'est-il pas temps qu'elle se préoccupe de ses frontières euro-asiatiques ? L'Otan et la Russie doivent-elles continuer à être les seuls acteurs militaires en Europe de l'Est ? Nous pourrions réorienter nos opérations extérieures en direction des frontières de l'Europe si nous passions des accords de coopération militaire avec les pays frontaliers, soit dans le cadre multilatéral de la politique européenne de sécurité et de défense, soit dans un cadre bilatéral.

Le groupe de l'Union centriste souhaiterait avoir des réponses à ces questions, mais il n'en votera pas moins la prolongation de l'intervention des forces armées en Côte d'Ivoire, au Tchad, en Centrafrique, au Liban et au Kosovo. (Applaudissements au centre et à droite)

Mme Michelle Demessine.  - Je tiens tout d'abord à rendre hommage à nos huit soldats morts au Gabon il y a quinze jours, lors d'une mission d'entraînement. Ils ont consenti le sacrifice suprême, conformément à leur engagement.

Lors de la présentation de ses voeux aux forces armées au Liban, le Président de la République a lancé un débat sur la conformité de nos opérations militaires extérieures aux intérêts de notre pays et sur la nature et le volume de la présence militaire française à l'étranger.

Je déplore les conditions dans lesquelles est organisé ce débat. Si notre commission des affaires étrangères a dépêché des missions sur chacun des théâtres d'opération en question, en revanche, pour préparer ce débat, à aucun moment, messieurs les ministres, nous n'avons pu vous auditionner en commission. (M. Bernard Kouchner s'étonne)

Ce débat était pourtant très attendu à l'heure où jamais, depuis bien longtemps, nous n'avions eu autant de soldats français en opérations extérieures : 13 000 hommes engagés sur treize théâtres d'opérations différents. Sur ce total, 71 % sont déployés dans un cadre multilatéral avec 4 800 hommes engagés dans des opérations de l'Otan, 2 100 sous les couleurs de l'ONU et autant sous celles de l'Union européenne. Le reste, soit 3 500 hommes, est engagé dans des opérations nationales, essentiellement en Côte d'Ivoire et au Tchad.

Suivant les souhaits du Président de la République, vous nous présentez donc, monsieur le ministre, les grandes orientations d'un plan de révision, de redéploiement et de réduction de certains de nos effectifs à l'étranger. Outre ce débat général, vous nous demandez, en vertu d'une disposition de la récente révision constitutionnelle, d'autoriser votre Gouvernement à prolonger, ou non, nos interventions militaires dans cinq pays : la Côte d'Ivoire, l'ancienne province serbe du Kosovo, le Liban, le Tchad et la République centrafricaine. Bien que n'ayant pas voté l'ensemble de la révision constitutionnelle, nous reconnaissons qu'il est important que le Parlement se prononce sur l'opportunité de prolonger telle ou telle opération, d'autant que jusqu'à cette révision constitutionnelle, nous étions la seule grande démocratie parlementaire dans laquelle le Parlement n'était ni informé, ni consulté lorsque son armée étaient engagée à l'extérieur. Vous n'avez pourtant fait que la moitié du chemin puisque nous ne pouvons nous prononcer que quatre mois après la mise en place d'une opération et non pas, comme nous l'avions demandé, au moment de la prise de décision.

Nous voulions également, mais vous l'avez refusé, que le Parlement soit pleinement informé des accords de défense et de coopération militaire signés avec des pays étrangers. En effet, en dehors des mandats internationaux en vertu desquels nos troupes opèrent à l'étranger, ce sont ces accords qui fondent nos interventions et déterminent leurs formes et leurs missions. Puisque vous nous présentez une adaptation de notre dispositif en Afrique et que le Président de la République s'était engagé en février dernier, dans son discours du Cap, à remettre à plat et à rendre publics ces accords de défense avec les pays africains, je souhaite que la représentation nationale ait enfin la possibilité de les examiner pour se prononcer en toute connaissance de cause.

Enfin, l'un des moyens les plus efficaces d'éviter les crises reste encore de lutter contre l'armement des belligérants. Notre pays devrait avoir une politique plus offensive en matière d'embargo et de lutte contre les trafics d'armes. Certes, il est particulièrement engagé dans l'adoption du traité International sur le commerce des armes mais notre quatrième rang dans ce domaine devrait nous inciter à davantage montrer l'exemple.

Nous sommes très sceptiques vis-à-vis du nouveau dispositif que vous nous présentez. Il ne procède pas d'une véritable réflexion sur la légitimité de nos interventions militaires extérieures. Les grandes orientations que vous nous exposez découlent des analyses géostratégiques du Livre blanc de la défense et de la sécurité nationale. Face aux nouvelles menaces contre notre pays, ce Livre blanc recommandait de réadapter le format et la mission de notre outil de défense et appelait à être plus sélectifs dans les engagements extérieurs de nos armées dont le coût ne cesse d'augmenter. Il avait ainsi retenu sept principes directeurs pour ces opérations, parmi lesquels « une définition de l'engagement dans l'espace et dans le temps, avec une évaluation précise du coût ». La première motivation du dispositif que vous nous proposez, c'est de faire des économies.

La remise à plat de nos engagements sur le continent africain, la révision de nos accords de défense et de coopération militaire, qu'avait annoncées le Président de la République au Cap, peuvent sembler positives. Mais je crains au contraire que cela n'ouvre pas sur de nouvelles relations avec les pays africains. Cette décision, avec la réduction de nos forces pré-positionnées s'accompagne aussi, malheureusement, d'une diminution de notre aide publique au développement, ce qui masque mal un désengagement de la France dans cette partie du monde. La baisse de l'aide publique et les promesses non tenues qui étranglent l'Afrique augurent mal de la nouvelle politique avec ces pays annoncée par le Président de la République. Le décalage est flagrant entre ses paroles et ses actes qui ne vont pas dans le sens du développement, de la coopération, du partage des richesses ni, pour tout dire, du nouvel ordre mondial qu'attend l'Afrique.

Vous nous demandez aussi de nous prononcer sur le maintien ou non de certaines opérations extérieures. Pour nous, l'envoi de troupes à l'étranger est uniquement justifié par la recherche de la paix dans un cadre multilatéral. Les interventions de nos troupes à l'étranger ne sont donc légitimes que quand elles s'effectuent dans le cadre d'un mandat donné par la seule institution internationale qui privilégie le multilatéralisme et la recherche de la paix : l'Organisation des Nations Unies. Nous sommes évidemment conscients des insuffisances et, parfois, de l'inefficacité de cette grande institution et c'est pourquoi nous pensons qu'il faut absolument modifier le fonctionnement et la composition du Conseil de sécurité.

Nos interventions militaires à l'étranger ne sont justifiées que lorsqu'il s'agit de maintenir ou de rétablir la paix, de s'interposer entre des belligérants ou, bien entendu, de protéger nos ressortissants. En revanche, nous sommes totalement hostiles à la participation à des opérations de l'Otan qui résultent, comme en Afghanistan, d'un alignement pur et simple sur les intérêts de l'administration américaine. C'est pourquoi nous soutenons les opérations auxquelles participent nos forces lorsqu'elles procèdent d'un mandat s'appuyant sur une résolution du Conseil de sécurité.

Quant aux accords bilatéraux de défense ou de coopération militaire, nous voulons que le Parlement les examine lors de leur renégociation.

Face aux drames récents du conflit palestino-israélien, nous pensons que la création d'une force internationale d'interposition s'impose de toute urgence. Mais je voudrais aussi que votre Gouvernement, monsieur le ministre, prenne rapidement position en faveur des demandes de commission d'enquête sur les horreurs de cette guerre, qui ont été déposées par plus d'une trentaine d'associations de tous pays auprès de la Cour pénale internationale. De même que nous devrions soutenir les demandes d'enquête de M. Ban Ki Moon, secrétaire général des Nations Unies, après le bombardement d'écoles et de bâtiment de l'ONU dans la bande de Gaza.

En République de Côte d'Ivoire, avec la force Licorne et le soutien aux troupes de l'Onuci, nous avons 2 000 hommes sur place. La mission de la force Licorne, qui repose sur plusieurs résolutions de l'Onu dont la dernière consiste principalement à assurer la tenue d'une élection présidentielle plusieurs fois reportée, n'est pas achevée. Dernièrement, M. Choi Young Jin, représentant de l'Onu sur place, a à nouveau réclamé des autorités ivoiriennes un calendrier électoral, seul à même de sortir le pays d'une crise politique qui dure depuis cinq ans. A l'évidence, les conditions prévues par la résolution 1 721 du Conseil de sécurité ne sont toujours pas remplies. Ni le désarmement et le démantèlement des milices, ni l'identification du corps électoral, le redéploiement de l'administration et la préparation technique de l'élection ne sont assurés. Dans ces conditions, il nous semble nécessaire de prolonger la mission de la force Licorne mais en en réduisant les effectifs comme vous le proposez puisque la situation s'est en partie stabilisée. Nous souhaitons toutefois que cette décision soit prise en concertation avec les autorités ivoiriennes et qu'elle débouche à terme sur un calendrier de retrait de nos troupes.

Pour le Kosovo, où nous avons 2 000 hommes au sein de la KFOR sous un commandement Otan, nous sommes contre la prolongation de notre intervention. La présence de nos soldats, souvent engagés en raison de l'inefficacité de la police kosovare et de la Minuk, cautionne la déclaration unilatérale d'indépendance du parti kosovar au pouvoir. Cette déclaration d'indépendance de la province albanophone, qui n'a pas été reconnue par tous les pays composant la KFOR, bafoue la résolution 1 244 du Conseil de sécurité qui définissait les missions de la force de l'Otan. Le contexte ayant changé, avec le déploiement de l'opération européenne Eulex et d'une nouvelle force de sécurité kosovare, la FSK, qui se met progressivement en place, il ne faut pas maintenir notre présence militaire au Kosovo.

Avec 1 900 hommes, le maintien de notre participation à la Finul renforcée au Liban paraît nécessaire au regard des derniers événements du conflit palestino-israélien. Les missions de la Finul, qui là aussi se fondent sur plusieurs résolutions de l'ONU, sont l'exemple même de missions d'interposition et de rétablissement de la paix. Pourtant, la mise en oeuvre des résolutions de l'ONU est inachevée. Elle consistait d'une part à surveiller la bonne application du cessez-le-feu entre l'armée libanaise, le Hezbollah et l'armée israélienne, et d'autre part à appuyer l'armée libanaise pour empêcher le réarmement du Hezbollah. L'heure n'est pas au désengagement tant que la situation n'est pas stabilisée.

Au Tchad, il faut distinguer l'opération Eufor-Tchad-RCA d'une part, et les opérations Épervier et Boali d'autre part. L'opération Eufor, à vocation humanitaire, visant à protéger les réfugiés et déplacés du Darfour, doit de toute façon prendre fin le 15 mars et être relayée par une mission des Nations Unies pour la République de Centrafrique et le Tchad, la Minurcat. Le problème est que cette force ne sera pas opérationnelle avant la fin 2009. Nous proposons donc qu'une partie des effectifs d'Épervier rejoignent la Minurcat pour assurer un soutien logistique. En revanche, nous sommes contre la prolongation de la l'opération Épervier qui, malgré son objectif affiché d'aide à la stabilité du Tchad et de la sous-région, apporte avant tout un soutien contestable à un régime issu d'un coup d'État. En cela, elle est un obstacle à un règlement durable de la crise tchadienne, qui ne peut se faire que dans le cadre d'un processus de paix soutenu par la communauté internationale.

Enfin, en République centrafricaine, avec l'opération Boali, nous intervenons directement, sans mandat international, pour tenter de régler les affaires intérieures de ce pays. Derrière les objectifs affichés de maintien de la paix, notre rôle est équivoque et nous prenons parti, dans un pays souverain, pour maintenir en place un régime menacé par son opposition. Nous sommes donc également opposés à la prolongation de l'opération Boali.

Vous n'avez pas précisé l'utilisation ultérieure qui serait faite des réductions d'effectifs. Ces décisions n'ont à aucun moment été présentées devant nos commissions parlementaires. Cette absence de concertation, alors même que le Gouvernement prétend renforcer les droits du Parlement, nous fait craindre que, malgré les démentis de M. Morin, vous nous annonciez dans quelques mois que vous cédez aux demandes pressantes de l'Otan et des États-Unis de renforcer les troupes en Afghanistan.

M. Hervé Morin, ministre de la défense.  - Je n'ai jamais dit ça !

Mme Michelle Demessine.  - J'ai bien dit « malgré les démentis de M. Morin »...

Lors du scrutin public, le groupe CRC-SPG votera donc pour le prolongement des interventions en Côte d'Ivoire et au Liban, mais contre le maintien de nos troupes au Kosovo, au Tchad et en République centrafricaine. (Applaudissements sur les bancs CRC-SPG et sur certains bancs socialistes)

M. Jacques Gautier.  - Les votes qui suivront ce débat constituent une application directe de la réforme constitutionnelle adoptée en juillet dernier. En vertu de l'article 35, l'envoi et le maintien de nos troupes et matériels sur des théâtres d'opérations extérieures sont désormais soumis au Parlement.

La France, membre fondateur de l'Union européenne, symbole de la liberté et membre permanent du Conseil de sécurité, a une responsabilité particulière dans le maintien de la paix et de la sécurité internationale. Notre histoire, notre tradition démocratique et nos capacités militaires nous désignent comme l'un des premiers États vers lesquels se portent les sollicitations. Nos opérations extérieures s'appuient sur des hommes et des femmes qui ont choisi de servir notre pays et ses valeurs, parfois au prix du sacrifice ultime comme au Gabon, en Afghanistan ou en Côte d'Ivoire. Au nom du groupe UMP, je rends hommage au courage et au professionnalisme de nos soldats qui, à des milliers de kilomètres de leur famille, défendent une certaine idée de la France et de sa mission. (Applaudissements à droite)

Je rappelle à chacun d'entre nous que les votes auxquels nous allons procéder nous engagent sur la scène internationale, mais aussi vis-à-vis de nos soldats. Cette responsabilité partagée nous amènera à être plus vigilants, plus fermes, plus pressants pour les demandes de matériels et de moyens dont nos armées ont besoin. Plusieurs de nos collègues peuvent, dans le cadre de missions, témoigner du dévouement, de l'excellence de nos troupes et de leur respect des populations. J'en remercie le président de Rohan : ces déplacements nous ont permis de recueillir des informations sur la pertinence de nos engagements et expriment l'intérêt sénatorial envers nos personnels militaires.

Face à une situation géopolitique de plus en plus complexe, avec des conflits asymétriques et des acteurs non étatiques -tels les pirates au large des côtes somaliennes-, notre stratégie de défense doit s'adapter en permanence. Les opérations extérieures n'ont plus rien d'exceptionnel et font désormais partie intégrante de l'activité de notre armée. Elles se caractérisent par leur durée, leur durcissement et leur dispersion géographique. Elles doivent répondre aux critères fixés par le Président de la République dans le Livre blanc de la défense et s'inscrire dans le cadre de la réforme des armées.

Tout d'abord, le choix d'envoyer des contingents dans telle ou telle région du globe découle de l'évaluation des menaces, de plus en plus diffuses et difficiles à identifier. Il faut apprécier leur gravité pour la sécurité internationale et pour nos intérêts nationaux et examiner les alternatives au recours à la force armée. Les relais de notre diplomatie doivent alors opérer afin d'impliquer les autorités et les responsables politiques des zones concernées et de les appeler à engager le dialogue.

L'« appréhension réaliste » de notre participation à la résolution des conflits constitue un autre principe directeur défini par le Président de la République en juillet 2007. Avant d'engager nos forces, il nous faut être en mesure d'assumer le niveau d'engagement nécessaire et disposer de moyens humains et matériels suffisants. Il nous faut également disposer d'une visibilité dans le temps afin d'évaluer correctement les coûts, même si nous sommes capables, comme nous l'a rappelé M. de Rohan, de mettre en place une politique de « Crash programme » et d'acheter les matériels « sur étagère ». A ce titre, je remercie le ministre pour sa réactivité vis-à-vis de l'Afghanistan.

Enfin et surtout, il faut toujours envisager les perspectives de règlement du conflit, et si possible la fin de notre intervention. Dans de nombreux cas, tel l'Afghanistan, l'action militaire est indispensable mais ne suffit pas. Il faut, comme le dit Paul Haéri, « gagner la paix de sortie de guerre » en rétablissant la sécurité afin de reconstruire une vie durable, avec une administration et des services, l'éducation, l'accès aux soins, le développement agricole et la mise en place d'une armée autochtone crédible. Cette action globale, qui nécessite de la volonté, des moyens importants, de la patience et du temps, doit être conduite avec et pour les populations locales. Cela signifie que certaines opérations extérieures vont durer et perdurer.

Mener des opérations dans un cadre multinational présuppose que notre armée dispose d'effectifs suffisants ainsi que des moyens terrestres, aériens et navals correspondants. Les efforts réalisés en 2008 et 2009 comme la loi de programmation militaire à laquelle nous travaillons vont dans le bon sens. Actuellement, plus de 13 000 hommes participent à trente opérations. La France est, avec le Royaume-Uni, l'une des puissances les plus engagées dans le maintien de la paix. Les interventions auxquelles elle participe sous le drapeau onusien -principalement l'opération Finul-Daman au Liban, avec 1 853 hommes- représentent 16 % des opérations en cours.

Au Liban, les événements de l'été 2006 et le renforcement du contingent dans le cadre de la Finul II, suivant la résolution 1 701 du Conseil de sécurité, ont été une des conditions essentielles à l'arrêt des hostilités entre Israël et le Hezbollah. Les objectifs de l'opération ont donc été atteints. Grâce à l'assistance à l'armée libanaise et au rétablissement de l'autorité effective, les négociations ont abouti à un cessez-le-feu quasi permanent. De plus, la France a bénéficié d'un levier diplomatique pour la stabilisation de la situation et pour notre action au Proche-Orient, ce qui a facilité l'action du Président de la République ces dernières semaines, lors des tristes événements dans la bande de Gaza. Dans le cadre de la résolution 1 832, nos troupes devraient stationner au Liban jusqu'en août 2009. Notre pays participe également à la force navale déployée dans ce secteur. Sur les 20 000 vérifications effectuées depuis septembre 2006, aucune n'a donné lieu à des découvertes suspectes. Il est donc judicieux d'alléger très rapidement cette partie du dispositif et je félicite M. le ministre de la défense d'avoir pris cette décision.

L'action et l'implantation de nos forces au Tchad et en République centrafricaine doivent être abordées sous le prisme d'une politique globale dans la région. Nous y menons plusieurs opérations dans un cadre national ainsi que sous mandats onusien et européen. Je tiens à rendre hommage au général irlandais Nash, à la tête des opérations Eufor au Tchad et en République centrafricaine, et à souligner l'effort consenti par la Pologne et l'Irlande. En revanche, nous regrettons de n'avoir pu mobiliser nos partenaires européens traditionnels : c'est une victoire en demi-teinte de l'Europe de la défense. Un relais a été mis en place à destination des organisations et forces de sécurité régionales, et nous avons contribué à la protection des civils, des personnels et des biens des Nations Unies et des ONG, et facilité l'aide humanitaire. Lors des violents combats à N'Djamena au début de février 2008, la France a procédé à l'extraction des personnels diplomatiques allemands et américains avec une grande efficacité.

En Côte d'Ivoire, depuis 2002, les soldats de l'opération Licorne ont participé à la sécurisation du pays et à l'accompagnement vers une sortie de crise. Le soutien de nos troupes à l'Opération des Nations Unies en Côte d'Ivoire (Onuci), depuis 2004, a permis une normalisation de la vie politique du pays. Le retrait des troupes nous paraît raisonnable puisque, parallèlement, des pays tels que le Burkina Faso ont engagé des médiations en liaison avec l'Union africaine. Lorsque les élections présidentielles auront enfin lieu, il serait souhaitable d'y envoyer des observateurs internationaux. L'attachement naturel de la France au continent africain et sa tradition d'intervention en cas de conflits ne doivent pas nous faire perdre de vue la nécessité pour l'Union africaine d'assurer le relais lorsqu'un conflit éclate.

Au Kosovo, la superposition des mandats des organisations internationales nous empêche de disposer d'une vision globale de notre action. Les soldats français déployés au nord-ouest sont intégrés dans plusieurs missions et dépendent pour les uns de la KFOR, pour les autres de la Minuk, quand d'autres attendent d'être relayés par la mission Eulex. Comprenne qui pourra !

A cela s'ajoute la déclaration unilatérale d'indépendance du Kosovo ; à ce jour, pas plus de 51 États ont reconnu le Kosovo, dont seulement 22 membres de l'Union européenne. Situation surprenante car comment les instances onusiennes ou européennes peuvent-elles engager des missions alors qu'une partie de leurs membres n'ont pas reconnu officiellement ce pays ? Monsieur le ministre, pourriez-vous nous donner des précisions sur l'action de nos troupes dans cette zone ? Le maintien de soldats français est-il nécessaire, sachant que d'autres contingents sont présents ? Le maintien de la stabilité dans les Balkans est fondamental : c'est à l'Union européenne qu'incombe prioritairement cette tâche. Il s'agit donc de définir le rôle de la France au sein de la mission Eulex.

Le caractère des Opex a changé et se traduit par une augmentation croissante des coûts. Entre 2006 et 2008, à effectifs constants, les surcoûts ont augmenté de 40 %. La budgétisation est indispensable et nous nous félicitons que la loi de programmation militaire porte les financements en loi de finances initiale à 630 millions d'euros en 2011, 510 millions d'euros dès 2009.

L'augmentation constante du coût des opérations extérieures résulte d'une surenchère en soutiens logistiques : « plus loin », « plus violent », « plus longtemps », « plus exigeant en équipement ». Nos contributions financières à l'Otan et à l'Union européenne ne sont pas près de diminuer... D'autant que la définition du « coût commun » est très restrictive, le mécanisme Athéna laissant à la charge des principaux contributeurs l'essentiel du financement. Les remboursements en 2008 représentent 37 millions d'euros, pour un surcoût total de 833 millions !

Dans une conjoncture extrêmement difficile et alors que nous procédons à une rationalisation des coûts au sein de notre propre armée, il n'est pas acceptable que les pays fournissant les moyens humains et matériels assument aussi des coûts en constante augmentation. Tous les membres de l'Union, même s'ils n'ont pas la volonté ou les moyens de participer physiquement ou matériellement, devraient contribuer à l'effort financier. Une meilleure répartition des charges conditionne la construction d'une politique européenne de défense. L'appartenance à l'Union européenne ne peut se résumer au seul volet économique, elle implique un partage de valeurs pour lesquelles chacun doit s'investir.

Le groupe UMP votera bien sûr la prolongation de nos différentes Opex et l'allégement de nos troupes chaque fois que cela est possible et nécessaire. (Applaudissements à droite et sur certains bancs au centre)

M. Jean-Pierre Chevènement.  - Nos engagements extérieurs correspondent-ils bien aux intérêts majeurs de la France ? Voilà, me semble-t-il, la principale question. Le mérite des hommes n'est pas en cause et je m'associe à l'hommage qui leur a été ici rendu.

Le Gouvernement vient d'annoncer une légère réduction du nombre de nos soldats sur les théâtres d'opérations extérieures. N'est-elle pas le préalable à un redéploiement ?

Mme Michelle Demessine.  - Le ministre a démenti !

M. Bernard Kouchner, ministre.  - Je le répète : non !

M. Jean-Pierre Chevènement.  - Nous en acceptons l'augure... La France est membre permanent du Conseil de sécurité de l'ONU et elle accomplit à ce titre un devoir supérieur au service de la communauté internationale. Je ne conteste pas le rôle que joue la France au profit de pays encore fragiles, en Afrique tout particulièrement, où les États ne se tiennent pas toujours très fermement sur leurs jambes. Je ne conteste pas le renforcement de notre présence au Proche-Orient, afin de faire respecter les résolutions de l'ONU. Mais je m'inquiète de la dérive qui correspond à l'évolution du monde. Nous intervenons de plus en plus dans le sillage de la diplomatie américaine.

Il y aurait beaucoup à dire sur le coût des opérations de l'ONU, 7 milliards de dollars aujourd'hui contre 840 millions en 1998-1999, sur la montée exponentielle des effectifs engagés, sur les conditions de déroulement des opérations de maintien de la paix. Le sous-continent indien fournit 40 % des troupes, certains pays francophones apportent aussi une contribution élevée : je pense au Maroc, au Sénégal et au Bénin.

Je n'évoquerai pas le coût de ces opérations pour la France. La dotation budgétaire ne couvre que la moitié environ des dépenses réelles. En euros constants, les surcoûts de ces opérations ont représenté, depuis 1996, 20 milliards d'euros, soit six porte-avions nucléaires. Tout cela pèse sur les dépenses d'équipement et de maintien des matériels en condition opérationnelle.

Cette évolution est le fruit d'orientations diplomatiques auxquelles, monsieur le ministre des affaires étrangères, vous avez contribué en inventant le « devoir d'ingérence ». A-t-on jamais vu le faible s'ingérer dans les affaires du fort ? Ce concept a trop souvent servi à justifier un droit à deux vitesses. L'Assemblée générale de l'ONU a, pour sa part, plus raisonnablement affirmé le « devoir de protéger » les populations.

M. Bernard Kouchner, ministre.  - La responsabilité, c'est capital.

M. Jean-Pierre Chevènement.  - La France a entrepris un rapprochement avec l'Otan depuis 1996 : il accroît le risque d'une guerre des civilisations. Le monde est menacé par l'anomie ; l'état de droit est, dans de nombreuses régions, évanescent. Autre facteur de guerre, le renversement de l'équilibre des puissances : l'unipolarité a laissé place depuis cinq ans à la multipolarité. L'intérêt de la France est-il de suivre les États-Unis ou de préserver sa capacité de médiation ? Dans un monde devenu multipolaire, l'Europe, donc la France, sera-t-elle elle-même un pôle ? Certes, l'élection de Barack Obama a marqué une rupture avec la période récente, où les États-Unis ont semblé hésiter entre trois ennemis potentiels, le monde arabo-musulman, la Russie et la Chine.

Où est l'intérêt de la France ? D'abord dans la paix avec ses grands voisins. La priorité est la solution du conflit israélo-palestinien, y compris par l'envoi de troupes. En Irak, la prudence s'impose. En Iran, nous n'avons pas à jouer les imprécateurs. Quant à l'Afghanistan, nous savons bien que les racines du mal sont ailleurs.

Avec la Russie, nous n'avons aucune raison de nous laisser entraîner dans les conflits du Caucase. La gestion de la crise géorgienne par le Président Sarkozy l'été dernier a été pragmatique, elle a sauvegardé l'essentiel, le partenariat stratégique entre l'Union européenne et la Russie.

Dans ce déplacement des équilibres du monde, j'ai le sentiment que nous sommes de plus en plus aspirés par la politique américaine. La réintégration de l'organisation intégrée de l'Otan serait un mauvais signal adressé au monde -en particulier aux grands pays du sud et à la Russie- comme aux responsables militaires et politiques. Quand la France adhère à une organisation internationale, ce n'est pas pour assurer des fins de carrière prestigieuses à ses hauts serviteurs, militaires ou civils. Et rien ne prouve que les États-Unis aient renoncé à élargir l'Otan à l'Ukraine et la Géorgie, ce qui entraînerait de graves problèmes avec la Russie. La première guerre mondiale a éclaté en raison d'alliances trop rigides ; il serait sage de garder nos distances à l'égard de plans de défense douteux. A Williamsburg, les États-Unis avaient déjà voulu intégrer le Japon à l'Otan. L'institut John Hopkins a été chargé de réfléchir au nouveau concept stratégique de l'Otan. Qu'en est-il ? Les Européens se sont-ils concertés sur ce sujet majeur pour sa sécurité ?

Notre priorité doit aller au recentrage sur l'Afrique et le Proche-Orient, la première parce qu'elle est une zone traditionnelle de nos intérêts et une région francophone, le second parce que s'y déroule la crise matricielle des relations internationales. Il faudra en revanche savoir se désengager des Balkans, Kosovo mais aussi Bosnie-Herzégovine ; et conclure les opérations Licorne en Côte d'Ivoire, Eufor au Tchad. Je m'interroge enfin sur certaines économies de bouts de chandelle...

M. le Président.  - Il faut conclure.

M. Jean-Pierre Chevènement.  - Des coupes claires sont indispensables, d'autant plus que le Livre blanc programme une baisse des effectifs pouvant être projetés, ce qui impliquerait en toute logique un renforcement des capacités matérielles et de transport.

Le contrôle du Parlement, renforcé par la récente révision constitutionnelle, sera bienvenu, s'il est exercé sans faiblesse, afin de forger un outil militaire efficace. Nous en reparlerons à l'occasion du projet de loi de programmation militaire. (Applaudissements sur les bancs des groupes RDSE et CRC-SPG)

M. Aymeri de Montesquiou.  - Le Conseil de sécurité a mené vendredi dernier, à l'initiative de la France et du Royaume-Uni, une réflexion sur la façon d'améliorer les opérations de maintien de la paix. Pour M. Le Roy, secrétaire général adjoint en charge de ces opérations, « 2009 sera une année pivot ». Leur nombre, leur complexité, leurs difficultés de financement posent des problèmes qu'il faut résoudre rapidement. Les interventions de nos forces armées soulèvent les mêmes questions.

Désormais, le Parlement est appelé à voter sur la prolongation du maintien des forces armées sur les théâtres extérieurs. Le Sénat a fait à nouveau la preuve de sa vocation internationale grâce au président de la commission des affaires étrangères, qui a décidé de missionner une délégation dans les pays où se déroulent les Opex. L'objectif militaire de celles-ci est la cessation ou le contrôle des hostilités ; mais, étant de plus en plus imbriquées avec les opérations civiles, elles tendent désormais à s'organiser de telle sorte que les militaires sont en charge de la sécurisation de l'environnement, les forces de police et de justice, de la consolidation de l'État de droit et les techniciens, des missions d'expertise.

Si nous ne pouvons nous soustraire à des missions visant à consolider la paix et la sécurité, nous devons mieux définir leur champ d'action et leur coût. Lors du débat sur l'envoi de troupes supplémentaires en Afghanistan, j'avais plaidé pour que la charge soit partagée entre effort de paix et effort de guerre. La France est profondément attachée au multilatéralisme ; elle se doit, comme le dit M. Védrine dans son rapport au Président de la République, de « contribuer de la meilleure façon possible à la résolution des problèmes du monde. La France a une expérience, une créativité et un savoir-faire tout à fait particuliers. ». Il est vrai que nous connaissons bien les régions de l'arc de crise Mauritanie-Pakistan, que le Livre blanc définit comme axe d'intervention prioritaire. C'est le cas aussi de certains pays d'Afrique ou du Liban, pays que le Président de la République a choisi pour présenter ses voeux aux forces armées et avec lequel nous avons des liens anciens. Notre action pour le maintien de la paix dans cette zone conflictuelle du Moyen-Orient reste prioritaire.

En tant que vice-président de la commission des finances, j'attache une importance particulière au financement des Opex. Au sein de la mission « Action extérieure de l'État », les contributions internationales obligatoires sont en forte augmentation en 2009 : 692 millions d'euros, dont la moitié consacrée aux opérations de maintien de la paix, soit 340 millions contre 271 millions en 2006. Quant aux dépenses supplémentaires engagées sur les théâtres d'opérations par les ministères de la défense et de l'intérieur, elles seront à peine remboursées -37 millions sur 833 en 2008-, ce qui est tout à fait anormal. Et je ne parle pas des surcoûts des opérations de l'Otan et de l'Union européenne, qui ont triplé depuis 2006.

Il est certes souhaitable de budgétiser ces opérations en loi de finances initiale, ce qui est fait depuis 2005, mais il faut renoncer à les compléter en collectif, par un décret d'avances ou des annulations de crédits d'équipement des armées. Il faut savoir que s'agissant des Opex, l'exécution des dépenses est en moyenne le double de la provision en loi de finances ! Le contrôle de la prolongation du maintien de nos troupes nous fait l'obligation de demander des comptes. Lorsque les opérations de maintien de la paix sont décidées par la communauté internationale ou l'Union européenne, elles doivent en supporter la charge financière, au contraire de ce que prévoit aujourd'hui le mécanisme « Athéna ». Vous devez demander, monsieur le ministre, une mutualisation des coûts.

La politique étrangère européenne est devenue une réalité sous l'impulsion de la présidence française. Son corollaire est une défense européenne : il faut pérenniser les Opex dans la perspective d'une force européenne ; la participation à la résolution des conflits doit être un catalyseur. Il faut aussi renouveler l'articulation entre l'Otan et l'Union. Je partage le constat de Bronislaw Geremek qui, auditionné dans le cadre du Livre blanc fin 2007, déclarait : « lorsqu'on regarde les dépenses militaires et qu'on les compare à d'autres modèles, on voit quelle puissance pourrait avoir l'Europe pour mener sa politique. Mais elle ne l'utilise pas car l'unité européenne, dans ce domaine, n'est qu'à son début. (...) Si, dans le domaine de la douceur, l'Europe est un géant, dans celui de la dureté, elle reste un nain. Cela peut être changé. ».

La majorité des membres de mon groupe votera le maintien de nos forces. Les armes françaises servent au nom de la paix avec un professionnalisme, une efficacité et un sens de l'honneur reconnus par tous. (Applaudissements à droite et sur les bancs du groupe du RDSE)

M. André Vantomme.  - A côté de la loi, le contrôle est la deuxième grande fonction du Sénat. Dans une publication de notre assemblée disponible sur son site internet, on peut lire que ce contrôle s'exerce sur le Gouvernement en séance publique et de façon permanente par le travail des commissions et des délégations du Sénat ; pour être efficace, cette mission de contrôle exige une information permanente, riche, diversifiée et proche de l'actualité. C'est dire que son efficacité dépend de la qualité de l'information et des conditions dans lesquelles elle est fournie.

Le Premier ministre a fait part à M. Bel de son souci d'un débat digne et responsable. Le président du groupe socialiste avait évoqué l'article 35 de la Constitution, exprimé ses craintes que le débat sur un sujet aussi lourd de conséquences fût escamoté et demandé, le 15 janvier, que le Gouvernement apportât rapidement tous les éléments d'information utiles. Je regrette que cette démarche n'ait pas retenu l'attention du Gouvernement. Heureusement, le président de la commission des affaires étrangères a veillé à ce qu'une délégation paritaire de deux sénateurs pût s'informer, par des déplacements conduits entre avril 2008 et janvier 2009, de la pertinence politique et stratégique de nos engagements et manifester à cette occasion la considération que le Parlement porte à l'action de nos soldats. Qu'en sera-t-il cependant à l'avenir ? Pourquoi, monsieur le ministre de la défense, n'avez-vous pas fourni à la commission les informations nécessaires ? Vous auriez peut-être obtenu le consensus si souvent nécessaire en ces matières. Pourquoi ce mutisme jusqu'au dernier moment ? Nous n'avons pas eu cette information « permanente, riche, diversifiée et proche de l'actualité » dont parle le site du Sénat. Le Gouvernement a avancé masqué. Malgré ses efforts, la commission n'a pu mener les auditions qu'elle aurait souhaitées ; le rapport qu'elle a rédigé a été diffusé le 23 janvier au soir...

Nous aurions eu besoin d'une analyse détaillée et argumentée de chacune des Opex, et la réponse à des questions simples : quelle pertinence politique et stratégique ? Comment contrôler l'adéquation des moyens mis en oeuvre ? Quels sont les objectifs politiques ultimes de chaque opération ? Le rapport d'information de la commission est éclairant ; de là à pouvoir juger la pertinence de la prolongation ou de la réduction des Opex, il y a un grand pas. Plus grave : la presse nous a appris que la France allait réduire la voilure ; et le Président de la République comme le Premier ministre annoncent un resserrement de nos dispositifs. Le sentiment est que notre débat est sans enjeu, les décisions étant prises par l'exécutif et déjà mises en application.

M. Hervé Morin, ministre.  - Sauf si vous en décidez autrement !

M. André Vantomme.  - Ce n'est pas notre conception de la mission de contrôle du Parlement. Nous assistons à un dévoiement de l'article 35-3, la clarté n'est pas au rendez-vous. On peut s'étonner que le Parlement, pour des décisions aussi importantes, qui engagent la vie de nos soldats, ne dispose pas d'une évaluation de ce qui est fait en Côte d'Ivoire, au Liban ou au Kosovo ni d'éléments sur l'évolution des crises en cours.

Je m'en étonne d'autant plus que le travail d'analyse aurait déjà été accompli. « Le ministère de la défense passe actuellement en revue la totalité des opérations extérieures (...) afin de réduire la voilure de certaines Opex dont le coût ne cesse d'augmenter -on devrait atteindre le milliard d'euros cette année. La participation française à la Finul II, au Liban, pourrait ainsi décroître progressivement, à l'instar du retrait déjà amorcé en Côte d'Ivoire », pouvait-on lire dans L'Express du 6 décembre 2008. Pour nous, aborder tous les thèmes relatifs à la défense, débattre de tous les aspects des missions confiées à nos soldats est une exigence démocratique.

Compte tenu de l'état de nos finances et de l'incapacité de ce Gouvernement à relancer une économie mal en point avant même la crise financière (marques d'ironie à droite), la tentation est forte de réaliser des économies en réduisant le nombre des opérations extérieures. Mais la contrainte économique, si forte et pressante soit-elle, ne peut pas être le seul critère ! Ces dernières années, les armées ont donné à plusieurs reprises des signes de surchauffe, notamment l'armée de terre, en raison de la multiplication des opérations. Celles-ci ne sont pas des promenades de santé : nos soldats s'engagent dans des conditions de plus en plus difficiles, notamment en Afghanistan, ce qui implique un investissement différent en termes d'entraînement des hommes, de capacité des matériels... Bref, l'heure est à la remilitarisation des interventions pour préparer des guerres qui, demain, seront peut-être plus cruelles. Alors que les Opex sont désormais plus longues, plus dures et plus dispersées, nous devons veiller à ne pas laisser nos soldats s'engluer dans des opérations incertaines. Plus que le coût, considérons le sens, les objectifs et les conditions de l'engagement pour évaluer la pertinence de ces opérations, tout en nous préoccupant de conserver des moyens suffisants aux forces non mobilisées à l'extérieur. Or le sens de ces opérations, quand elles s'éternisent, tend à se diluer quand la question de la sortie de crise devrait être abordée dès le début, de même que les « caveatisations » excessives, voire des mandats inadéquats, empêchent de remplir les objectifs fixés. Les militaires réclament légitimement des règles d'engagement plus claires.

Nos armées, le Livre blanc l'a confirmé, sont sollicitées au maximum de leurs possibilités.

M. Hervé Morin, ministre. - C'est faux !

M. André Vantomme.  - Tout nouvel engagement entraînera donc un désengagement effectif ailleurs. La RGPP est aussi passée par là ! Si l'on ne peut plus multiplier les opérations, nous aimerions disposer des analyses, sans doute fines et détaillées, qui justifient que l'on enlève des forces ici ou là, de même que nous souhaiterions en savoir plus sur la façon dont le Gouvernement appréhende leur cadre multilatéral. Car, si nous avons en mémoire les déclarations du Président de la République sur l'appréciation souveraine de la France et ses corollaires que sont la liberté d'action et de capacité d'évaluation permanente, plus de 60 % de nos Opex sont engagées conjointement avec l'Otan, l'ONU ou encore l'Union européenne pour 36 623 militaires français engagés. (M. Hervé Morin, ministre, conteste ce chiffre)

Enfin, le problème du financement : le cadre budgétaire de ces opérations graves, qui engagent la vie de militaires et l'image de la France, est traité avec une rigueur toute élastique... (Marques d'ironie au banc du Gouvernement). Dans un passé récent, le Gouvernement a pris l'engagement de ne plus financer les Opex par prélèvement sur les crédits d'équipement des armées. Néanmoins, impossible de lui délivrer un brevet d'orthodoxie financière quand les Opex ont coûté 852 millions en 2008, ce qui a nécessité de compléter les 510 millions de crédits en loi de finances initiale par des financements adéquats lors du collectif. Cette situation alimente nos incertitudes. Comment le Parlement peut-il exercer sa mission de contrôle s'il ne connaît pas les intentions du Gouvernement ?

Avant de conclure, je veux rappeler solennellement toute la considération que nous portons à l'action de nos soldats, toute notre compassion et notre émotion à l'endroit de ceux qui ont perdu la vie en servant la France et de leurs familles. Nos militaires remplissent leurs missions dans des conditions difficiles aux côtés des troupes des pays alliés : la comparaison des équipements est souvent peu flatteuse... (Mme Nicole Borvo Cohen-Seat le confirme) Au-delà des divergences légitimes et républicaines qui peuvent surgir dans nos débats, le groupe socialiste a le souci de s'associer à tous les groupes politiques du Sénat pour envoyer un message de reconnaissance et de soutien aux forces armées engagées à l'extérieur. Mais, parce que le Premier ministre n'a pas créé les conditions d'un véritable débat sur l'évolution des Opex, nous ne prendrons pas part au vote. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

Mme Dominique Voynet.  - En trois petites heures à l'Assemblée nationale, puis au Sénat, sera expédiée la formalité consistant pour le Gouvernement à obtenir du Parlement l'autorisation de prolonger l'intervention de nos forces armées. (Exclamations à droite et au centre)

M. Yves Pozzo di Borgo.  - Vous n'avez même pas pris la peine d'assister au début du débat !

M. Hervé Morin, ministre.  - Quel culot !

Mme Dominique Voynet.  - Cette procédure, issue de la dernière réforme constitutionnelle, consiste-t-elle vraiment en un renforcement des pouvoirs du Parlement ? Au vrai, la décision appartient au seul Gouvernement ; l'autorisation du Parlement n'est requise que quatre mois après l'engagement de l'opération. Ce dernier peut-il la refuser lorsque la crédibilité internationale de l'exécutif, la sécurité des troupes fraîchement déployées sont en jeu ? Non, sans doute, car, malgré de vifs questionnements, ce serait manquer à notre devoir de solidarité et de respect envers les morts au combat. Faut-il, pour autant, accepter de nous prononcer sans être véritablement informés ? Pas davantage. Certes, le ministre de la défense a été auditionné par la commission il y a quelques jours, mais c'était de la loi de programmation militaire et du fardeau que représentent les opérations extérieures pour le budget de la défense dont il était question. Nous avons dû nous fâcher pour que des fiches techniques nous soient fournies, dont le caractère succinct laisse de nombreuses questions sans réponse. De toute façon, si l'on en croit la presse, les décisions sont déjà prises. Le ministre de la défense a pris soin, dans les colonnes d'un quotidien ce matin, de rappeler clairement que du Gouvernement et du Parlement, « chacun est dans son rôle, on n'est pas dans la codécision ».

M. Hervé Morin, ministre.  - C'est le principe de la séparation des pouvoirs !

Mme Dominique Voynet.  - On ne saurait mieux dire combien l'avis du Parlement n'est sollicité que pour la forme... J'attendais tout de même, monsieur le ministre, que vous nous en disiez davantage lors de votre intervention.

M. Christian Cambon.  - Si vous aviez assisté à ce débat, vous auriez su que M. Morin n'est pas encore intervenu !

Mme Dominique Voynet.  - J'ai écouté le discours de M. Kouchner dans mon bureau !

Il est donc question de prolonger l'intervention des forces armées sur cinq « théâtres » d'opérations, terme militaire, d'état-major, que je n'apprécie guère. Monsieur le ministre, pour l'heure, ma religion n'est pas faite. Quelles sont les motivations du Gouvernement ? S'agit-il, au regard du coût croissant des opérations extérieures, d'anticiper les décisions qu'imposera une armée réduite à 50 000 hommes ? S'agit-il de dégager davantage de troupes pour l'Afghanistan, comme le souhaiterait le Président des États-Unis ? On nous affirme que cela ne sera pas le cas, mais la situation peut évoluer... S'agit-il de procéder à un ajustement des effectifs et des moyens, voire à une redéfinition des mandats ? Quels sont les éléments qui permettent de réduire notre présence au Kosovo qui était, jusqu'à peu, présentée comme indispensable ? Josselin de Rohan a rappelé combien la situation reste tendue à Mitrovitsa et dans un pays dont l'indépendance reste contestée par de puissants voisins.

Chacun mesure l'intérêt de l'engagement français au Liban, y compris dans sa composante navale, pour restaurer l'autorité de l'armée libanaise au sud du pays et éviter la reprise des affrontements entre Israël et le Hezbollah.

Nous restons perplexes sur ses modalités. A quoi servent, au plan militaire, les très coûteux chars Leclerc ? Je veux croire qu'il y a une sorte de rationalité dans leur emploi...

A propos du Tchad, je partage le souci exprimé par Mme Demessine lorsqu'elle a souligné l'absence de mandat international fondant les opérations Épervier et Boali, auxquelles il convient de mettre un terme, et l'intérêt de prévoir un bon dispositif de tuilage entre l'Eufor et la relève qu'opérera l'ONU, avec la Minurcat. Je partage aussi son souhait d'un retrait rapide de Côte d'Ivoire, dès lors que l'élection présidentielle et les législatives se seront déroulées de façon acceptable.

Au-delà, je veux insister sur les conditions dans lesquelles la France peut intervenir en Afrique. Sont-ce les efforts déployés dans l'indifférence générale par des militants longtemps caricaturés -je salue la mémoire de François-Xavier Verschave, décédé récemment- ou est-ce l'écho donné à quelques procès retentissants mettant en cause d'éminents responsables politiques ? Il semblait que les leçons avaient été tirées de l'impact désastreux pour l'image de notre pays de sa politique africaine, et qu'une véritable rupture avait été opérée avec une politique qui a si longtemps consisté à soutenir des oligarchies avides et des dictateurs brutaux, à vendre des armes et, via des accords de coopération militaire aux secrets jalousement gardés, les moyens de s'en servir, à défendre des « intérêts français » trop souvent limités à la mise en coupe réglée des ressources naturelles et minières, à l'exportation de déchets dangereux, à la vente d'éléphants blancs : véhicules de prestige, flottes aériennes, armes sophistiquées, usines clés en main et aussi, ce n'est pas du folklore, à la circulation de valises de billets alimentant les caisses noires des partis politiques.

Je ne veux faire aucun procès d'intention, même si, comme beaucoup, je pressens que, si rupture il y eut, elle n'est pas achevée, comme en témoigne le sort réservé à Jean-Marie Bockel qui prétendait signer l'acte de décès de la Françafrique. Le serait-elle qu'il faudrait à la France, pour ne pas être suspectée de vouloir garder une ombre portée sur ce qui fut si longtemps son pré carré, qu'elle se garde d'intervenir militairement, sur la base de sa connaissance ancienne du continent africain, dans des pays où elle serait suspectée d'en revenir à des pratiques anciennes.

Nous sommes tout à fait hostiles à des interventions qui ne seraient pas fondées sur la base d'un mandat international clair, si je mets de côté des opérations à l'objet précis, bien limitées dans le temps, destinées par exemple à évacuer des ressortissants dans une zone de conflit. C'est encore plus vrai en Afrique, où la France ne saurait intervenir sur des bases ambiguës. Son passé colonial, ses intérêts nourrissent une méfiance qu'on peut juger excessive mais qui existe et dont nous devons tenir compte si nous voulons la dépasser.

Je suis évidemment satisfaite que ce débat au Parlement puisse avoir lieu et apporte enfin un peu de transparence dans le processus de décision visant à l'engagement de troupes françaises en dehors du territoire national. C'est un tout premier pas, loin, très loin de cette codécision qui vous révulse et que la Constitution ne prévoit en effet pas. Comme mes collègues du groupe socialiste auquel je suis apparentée, je ne prendrai pas part aux votes. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Hervé Morin, ministre de la défense.  - On était dans une bizarrerie politique, une curieuse spécificité française : notre Parlement était le seul de l'Union européenne à n'avoir pas son mot à dire sur l'envoi ou le maintien de forces en opérations extérieures. Dans les autres pays, les ministres de la défense devaient se rendre devant le Parlement chaque fois que l'exécutif voulait prendre une telle décision. Cette exception française était d'autant plus bizarre que le parlementarisme est né du vote de deux impôts, celui que versent les contribuables et l'impôt du sang.

Je comprends donc mal qu'on vienne aujourd'hui la bouche pincée dans un tel débat. Je suis venu devant votre commission trois fois ces quatre derniers mois ! Le rôle du Parlement n'est pas davantage la codécision que cette « coproduction législative » chère à certain président de groupe de l'Assemblée nationale. (Sourires sur les bancs UMP) L'exécutif a des fonctions, le législatif en a d'autres. Il revient à ce dernier de délibérer, de voter des lois et de contrôler la manière dont l'exécutif les applique.

Notre débat de ce soir est sain car il oblige l'exécutif à mener un travail de réflexion. Chaque fois que l'on envoie des militaires, certains trouvent des raisons pour les y maintenir. La situation n'est jamais assez stabilisée. Je l'ai vu à propos de la Bosnie-Herzégovine. Les militaires en place sur le terrain jugeaient leur action terminée ; j'avais donc obtenu la fin des opérations européennes. Il n'a pas fallu quinze jours pour que fleurissent les rapports émanant des services de tel ou tel pays et démontrant que non, décidément, la situation n'était pas assez mûre. Voilà pourquoi j'apprécie ce débat parlementaire : il nous oblige à nous interroger sur la pertinence qu'il y a à maintenir nos forces en opérations extérieures.

Vous m'interrogez, monsieur de Rohan, sur les crash programmes : en fait, la décision remontait au mois d'août. Vous avez pu voir l'efficacité de nos drones en Afghanistan et des autres équipements nouveaux. L'hélicoptère Tigre va se substituer aux Gazelle ; un hélicoptère Caracal va venir en sus.

M. Vantomme juge que les opérations extérieures ne sont pas assez financées. Sans doute a-t-il oublié ses votes entre 1997 et 2002, quand les opérations extérieures ne recevaient pas le moindre centime ! Nous en sommes aujourd'hui à 510 millions, nous passerons à 570 en 2010 et à 630 en 2011. Nous avons en outre inscrit dans la loi de programmation de quoi financer le complément sans être obligé d'annuler aucun programme d'équipement.

Il est vrai que le financement commun d'Athéna est inapproprié ; je n'ai cessé de me battre sur ce thème pendant la présidence française. Je ne cesse de répéter que les règles de l'Union européenne et celles de l'Otan doivent être identiques. Comment voulez-vous qu'on s'y retrouve si l'une finance les évacuations sanitaires ou le fret stratégique, par exemple, et l'autre pas ? Que nos forces soient sous drapeau Otan ou sous drapeau de l'Union européenne, les règles doivent être les mêmes. Sur les Vingt-sept, vingt-et-un États sont membres de l'Otan !

La France restera engagée au Kosovo quoique la situation s'y soit équilibrée. C'est aujourd'hui pour la police et la justice que notre mission est la plus pertinente mais nous maintenons une force de dissuasion pour éviter le pire.

Que ferait la France en République centrafricaine ? Elle y est pour maintenir la paix et les institutions, pour donner à cet État les moyens de sa souveraineté, pas pour régler des problèmes politiques internes. M. Idriss Déby est venu à Paris en visite privée, sans que ni M. Kouchner ni moi-même ne l'ayons reçu.

Mme Demessine se dit hostile par principe aux opérations de l'Otan. Puis-je lui rappeler que celle-ci n'agit pas d'elle-même, par une décision du Conseil de l'Atlantique Nord, mais sur mandat des Nations Unies ? Vous avez l'Afghanistan en tête, mais le Kosovo ? Vous voulez à toute force voir, comme M. Chevènement et Mme Voynet, des cartes cachées sous la table dans la perspective d'un renforcement en Afghanistan. Comment le dire ? Nous ne cessons de le répéter, le Président, le Premier ministre, M. Kouchner et moi-même, il n'en est pas question...

Mme Michelle Demessine.  - Pour l'instant !

M. Hervé Morin, ministre.  - Nous avons consenti un effort important en 2007 et pris des responsabilités dans la région Est en 2008. J'aurai sans doute à y revenir, puisqu'on me pose la question tous les trois jours, mais je répète qu'il n'est pas question d'un renforcement en Afghanistan.

M. Chevènement a brossé une vaste fresque qui dépassait le cadre de ce débat -il a même pris des chemins de traverse. Oui, les équilibres traditionnels ont changé ; oui, l'hyperpuissance américaine a évolué ; oui, il y a des transferts de puissance ; oui, le monde du XXIe siècle est plus multipolaire. Nous avons en conséquence revu notre stratégie avec le Livre blanc sur la défense et la sûreté nationale auquel le Parlement a été associé, de même que nous aurons des débats sur les forces pré-positionnées et les accords de défense, d'ailleurs tous publiés au Journal officiel. L'engagement pris au Cap par le Président de la République est clair : les accords de défense seront revus. Les discussions sont en cours et nous reconsidérerons nos dispositifs pré-positionnés : un sur la côte Atlantique, un, stratégique, à Djibouti, un autre à Abou Dhabi, la nouvelle base négociée alors que François Mitterrand était Président de la République et Édouard Balladur Premier ministre, et maintien d'éléments au Gabon dont on a vu l'importance en février. Les accords renégociés seront présentés au Parlement.

Je crois avoir fait le point mais, bien entendu, la loi de programmation militaire nous fournira l'occasion de revenir sur les équipements et les engagements. Jamais le budget d'équipement n'avait autant augmenté depuis 1958 : aux 10 % de la loi de finances initiale sont venus s'ajouter le 1,5 milliard d'euros du plan de relance, soit une hausse de 20 % en 2009. Nous n'avions jamais obtenu un pareil effort : je serai en mesure de vous rassurer. (Applaudissements à droite et au centre)

L'autorisation de la prolongation de l'intervention des forces armées en République de Côte-d'Ivoire est mise aux voix par scrutin public.

M. le président.  - Voici les résultats du scrutin :

Nombre de votants 225
Nombre de suffrages exprimés 225
Majorité absolue des suffrages exprimés 113
Pour l'adoption 225
Contre 0

Le Sénat a autorisé la prolongation de l'intervention des forces armées en République de Côte d'Ivoire.

En application de l'article 35, alinéa 3, de la Constitution, le Parlement a donc autorisé la prolongation de l'intervention des forces armées en République de Côte-d'Ivoire.

L'autorisation de la prolongation de l'intervention des forces armées au Kosovo est mise aux voix par scrutin public.

M. le président.  - Voici les résultats du scrutin :

Nombre de votants 226
Nombre de suffrages exprimés 223
Majorité absolue des suffrages exprimés 112
Pour l'adoption 198
Contre 25

Le Sénat a autorisé la prolongation de l'intervention des forces armées au Kosovo.

En application de l'article 35, alinéa 3, de la Constitution, le Parlement a donc autorisé la prolongation de l'intervention des forces armées au Kosovo.

L'autorisation de prolongation de l'intervention des forces armées au Liban est mise aux voix par scrutin public.

M. le président.  - Voici les résultats du scrutin :

Nombre de votants 226
Nombre de suffrages exprimés 226
Majorité absolue des suffrages exprimés 114
Pour l'adoption 226
Contre 0

Le Sénat a autorisé la prolongation de l'intervention des forces armées au Liban.

En application de l'article 35, alinéa 3, de la Constitution, le Parlement a donc autorisé la prolongation de l'intervention des forces armées au Liban.

L'autorisation de prolongation de l'intervention des forces armées en République du Tchad et en République centrafricaine dans le cadre de l'opération Eufor est mise aux voix par scrutin public.

M. le président.  - Voici les résultats du scrutin :

Nombre de votants 224
Nombre de suffrages exprimés 224
Majorité absolue des suffrages exprimés 113
Pour l'adoption 200
Contre ...24

Le Sénat a autorisé la prolongation de l'intervention des forces armées en République du Tchad et en République centrafricaine dans le cadre de l'opération Eufor.

En application de l'article 35, alinéa 3 de la Constitution, le Parlement a donc autorisé la prolongation de l'intervention des forces armées en République du Tchad et en République centrafricaine dans le cadre de l'opération Eufor.

L'autorisation de prolongation de l'intervention des forces armées en République du Tchad et en République centrafricaine dans le cadre des opérations Boali et Épervier est mise aux voix par scrutin public.

M. le président.  - Voici les résultats du scrutin :

Nombre de votants 225
Nombre de suffrages exprimés 225
Majorité absolue des suffrages exprimés 113
Pour l'adoption 201
Contre ..24

Le Sénat a autorisé la prolongation de l'intervention des forces armées en République du Tchad et en République centrafricaine dans le cadre des opérations Boali et Épervier.

En application de l'article 35, alinéa 3, de la Constitution, le Parlement a donc autorisé la prolongation de l'intervention des forces armées en République du Tchad et en République centrafricaine dans le cadre des opérations Boali et Épervier.

Prochaine séance aujourd'hui, jeudi 29 janvier 2009, à 9 h 45.

La séance est levée à minuit quarante.

Le Directeur du service du compte rendu analytique :

René-André Fabre

ORDRE DU JOUR

du jeudi 29 janvier 2009

Séance publique

A NEUF HEURES QUARANTE-CINQ ET QUINZE HEURES

1. Suite du projet de loi (n°42, 2008-2009), adopté par l'Assemblée nationale, de programme relatif à la mise en oeuvre du Grenelle de l'environnement.

Rapport (n°165, 2008-2009) de M. Bruno Sido, fait au nom de la commission des affaires économiques.

LE SOIR

2. Conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi de finances rectificative pour 2009.

Rapport (n°180, 2008-2009) de M. Yann Gaillard, rapporteur pour le Sénat.

3. Conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2009 à 2012.

Rapport (n°181, 2008-2009) de M. Yann Gaillard, rapporteur pour le Sénat.

4. Conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi pour l'accélération des programmes de construction et d'investissement publics et privés.

Rapport (n°187, 2008-2009) de Mme Élisabeth Lamure, rapporteur pour le Sénat.

_____________________________

DÉPÔTS

La Présidence a reçu de :

- Mme Élisabeth Lamure, rapporteur pour le Sénat, un rapport fait au nom de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi pour l'accélération des programmes de construction et d'investissement publics et privés ;

- M. Jean-Pierre Vial un rapport fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale sur le projet de loi relatif au transfert aux départements des parcs de l'équipement et à l'évolution de la situation des ouvriers des parcs et ateliers (Urgence déclarée - n°14, 2008-2009) ;

- M. Francis Grignon un rapport fait au nom de la commission des affaires économiques sur le projet de loi relatif à l'organisation et à la régulation des transports ferroviaires et guidés et portant diverses dispositions relatives aux transports (Urgence déclarée - n°501, 2007-2008) ;

- Mme Joëlle Garriaud-Maylam un rapport fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées sur le projet de loi autorisant l'approbation de l'accord entre le gouvernement de la République française et le Conseil fédéral suisse relatif à la coopération transfrontalière en matière judiciaire, policière et douanière (n°142, 2008-2009) ;

- de M. André Dulait un rapport fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées sur le projet de loi autorisant l'approbation de l'accord entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de l'Australie concernant la coopération en matière de défense et le statut des forces (n°422, 2007-2008).