Questions d'actualité

M. le président.  - L'ordre du jour appelle les réponses du Gouvernement aux questions d'actualité.

Relance économique et collectivités locales

M. Alain Milon .  - (Applaudissements à droite) Ma question s'adresse à M. Devedjian, ministre chargé de la mise en oeuvre du plan de relance.

La crise est là, et les Français en souffrent. Mais ils peuvent constater qu'au plus haut niveau de l'État, des réponses sont apportées pour y faire face. La maîtrise du temps et des moyens montre que le cap est tenu dans une période difficile de notre histoire économique, et cette réalité est perçue au-delà de nos frontières. Le plan annoncé le 4 décembre dernier, qui prévoit 26 milliards d'euros de dépenses, fait suite aux réformes engagées depuis plus d'un an et aux initiatives prises cet automne pour lutter contre la crise financière. La Commission européenne vient de donner son feu vert au plan de relance français, considérant que les moyens mis en oeuvre étaient « adéquats, nécessaires et proportionnés ». 

Ce plan de relance ambitieux soutient la comparaison avec ceux des pays voisins. On pourrait d'ailleurs souhaiter une solution européenne à la crise. Le plan français comporte des mesures en faveur de l'emploi, du pouvoir d'achat des plus modestes, du logement, des entreprises -notamment du secteur automobile- mais aussi de l'écologie. Priorité est donnée à l'investissement.

Or les collectivités locales sont les premiers investisseurs nationaux, et contribuent grandement au développement économique. Elles ont de nombreux projets en réserve pour améliorer les conditions de vie de la population. Comment le plan de relance les aidera-t-il à les mettre en oeuvre ? Contribuera-t-il au dynamisme économique des territoires grâce au financement d'équipements structurants, et dans quel délai ? (Applaudissements à droite)

M. Alain Gournac.  - Très bonne question !

M. le président.  - La parole est à M. Devedjian, à qui nous adressons nos meilleurs voeux de réussite dans cette fonction difficile, mais essentielle. (Applaudissements et acclamations à droite)

M. Patrick Devedjian, ministre chargé de la mise en oeuvre du plan de relance .  - Merci de votre confiance.

Les collectivités locales joueront en effet un rôle essentiel dans la mise en oeuvre d'un plan de relance essentiellement tourné vers l'investissement. Elles sont responsables de 70 % des investissements publics ; or nous avons pour objectif que 75 % des crédits prévus soient engagés dès 2009 : voilà pour le délai.

Nous comptons sur un effet multiplicateur d'un coefficient au moins égal à trois : le plan de relance doit donc produire des richesses supérieures aux sommes investies et avoir un effet contracyclique.

Les collectivités locales seront au coeur de ce mouvement. Nous les aiderons à mettre en oeuvre des projets parvenus à maturité, mais qui n'auraient pas pu voir le jour en 2009 faute de crédits suffisants. Par ailleurs nous solliciterons le Fonds de compensation de la TVA, et les projets nouveaux bénéficieront d'un remboursement anticipé de cette taxe.

En outre, les collectivités verront leur travail facilité par des simplifications administratives. La réforme du code des marchés publics et le rehaussement du seuil au-delà duquel une procédure d'appel d'offres est obligatoire faciliteront la passation des marchés ; ce seuil sera aligné sur la norme européenne. Le code de l'urbanisme sera également modifié pour permettre une prorogation des permis de construire. Les communes qui le souhaitent pourront augmenter de 20 % le coefficient de densité prévu par le plan local d'urbanisme ou le programme des zones d'aménagement concerté.

Je serai moi-même très présent auprès des collectivités, et je me rendrai dans tous les départements. Le Premier ministre réunira mardi prochain la Conférence nationale des exécutifs...

M. le président.  - Il faut conclure.

M. Patrick Devedjian, ministre.  - ...afin de réfléchir aux moyens d'aider efficacement les collectivités dans leur lutte contre la crise. (Applaudissements à droite)

Mode d'élection de l'Assemblée territoriale de Corse

M. Nicolas Alfonsi .  - Ma question, madame la ministre de l'intérieur, n'est peut-être pas d'une actualité brûlante, mais elle doit utilement être posée dès aujourd'hui, car dans quelques semaines il sera trop tard.

Les prochaines élections régionales devraient avoir lieu en mars 2010. Je sais de source officielle qu'il n'est pas prévu de modifier le mode de scrutin d'ici là. (Exclamations sur les bancs UMP) Il serait possible de modifier spécifiquement le mode de scrutin propre à la Corse, mais la déontologie républicaine interdit toute réforme dans l'année qui précède l'élection.

Il vous reste dix semaines utiles pour nous informer de vos intentions. Le mode de scrutin surréaliste qui nous a été imposé, et qui a été maintenu par tous les gouvernements, de droite ou de gauche, ne prévoit aucun seuil de fusion : des listes qui ont obtenu des scores homéopathiques se livrent donc à des manoeuvres obscures pour négocier leur présence au second tour. II fallait permettre il y a vingt ou trente ans à des sensibilités ultra-minoritaires de s'exprimer démocratiquement. Cet argument n'a plus lieu d'être aujourd'hui, mais le maintien d'un dispositif aussi pervers interdit de dégager des majorités homogènes. L'absence de majorité réelle depuis six ans conduit à rechercher en permanence le consensus et le dialogue, autant de mots creux qui ne font pas une politique ! (M. Jean-Pierre Michel et M. Jean-Pierre Chevènement applaudissent)

Le Premier ministre, dont je ne mettrai pas en cause la sincérité, a appelé de ses voeux une opposition forte pour donner une vitalité démocratique à nos institutions.

M. le président.  - Votre question.

M. Nicolas Alfonsi.  - Je souhaiterais que vous partagiez la même sollicitude vis-à-vis de la Corse. Il vous reste deux mois pour agir : ou vous reprenez ma proposition de loi, adoptée par le Sénat, ou vous déposez votre propre projet, ou vous ferez semblant. J'attends votre réponse.

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales .  - (Applaudissements et « Bravo » sur les bancs UMP) Je connais votre proposition de loi, qui a pour légitime objectif d'assurer une majorité stable à l'Assemblée de Corse tout en permettant la représentation des oppositions. Comme pour tout texte relatif à nos institutions, la loi de 2002 prévoit toutefois que l'Assemblée de Corse rende au préalable son avis. Or cet avis n'a pas encore été rendu. (M. Nicolas Alfonsi s'exclame)

Par ailleurs, il serait utile d'attendre les conclusions de la commission Balladur qui travaille notamment sur le rapport entre départements et régions. La Corse s'inscrit tout naturellement dans ce cadre.

Si nous devons mener la sixième réforme électorale en 25 ans concernant la Corse, elle devra être issue du plus large consensus, comme je l'ai rappelé en Corse en juin dernier. Je ne suis pas sûre que nous en soyons à ce stade... (Applaudissements à droite, M. Jean-Pierre Chevènement s'exclame)

Appui de l'État aux projets des collectivités territoriales

M. Claude Biwer .  - Les collectivités territoriales sont les principaux moteurs de l'investissement en France : ils ne doivent pas se gripper ! Parmi les freins à l'investissement des collectivités, il y a la frilosité des banques, mais aussi le code des marchés publics, pourtant réformé et, paraît-il, simplifié... Les lenteurs administratives peuvent retarder de plusieurs mois les mises en chantier, qu'il s'agisse de l'archéologie préventive, des architectes des Bâtiments de France, ou de la propension de chaque fonctionnaire des administrations décentralisées à montrer qu'il détient une parcelle de pouvoir en prolongeant inutilement les délais d'instruction, entre visites de terrain et demandes de documents complémentaires...

Impossible d'obtenir un financement sans présenter un dossier, et de faire aboutir un dossier sans financements. Or, tandis que les délais d'instruction s'allongent, les intérêts des emprunts contractés par la collectivité commencent à courir, et les premiers remboursements interviennent parfois avant la fin des travaux, quand ce n'est pas avant le début ! Entre la conception d'un projet et sa réalisation effective, il peut s'écouler jusqu'à deux ans...

Que comptez-vous faire pour redonner aux élus locaux les possibilités d'investir et de contribuer au dynamisme économique de la France ? Pourriez-vous, par exemple, instaurer des dates butoir ? Pourrions-nous déclarer l'urgence dans les délibérations des conseils municipaux ou des communautés de communes quand il s'agit d'investissements importants ? Cet assouplissement contribuerait au plan de relance. (Applaudissements au centre et à droite)

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales .  - Les collectivités sont le premier investisseur du pays : nous avons besoin d'elles si nous voulons relancer l'activité et l'investissement. Toutefois, je sais d'expérience que les collectivités se heurtent à des lourdeurs ou difficultés.

Il faut tout d'abord alléger les contraintes règlementaires qui ralentissent les projets. En France, nous appliquons plus strictement les règlements européens que ce qu'exigent les textes ! Les choses vont changer, notamment en ce qui concerne le code des marchés publics. (Applaudissements à droite) Le seuil à partir duquel s'applique obligatoirement la procédure d'appel d'offres pour les marchés de travaux, qui est aujourd'hui de 206 000 euros, sera porté au niveau européen, soit 5,150 millions.

Le Gouvernement déposera très prochainement un projet de loi et un projet de décret pour simplifier la procédure des marchés publics négociés.

Il faut faciliter l'investissement des collectivités locales, notamment sur le plan financier. L'État accélérera le remboursement de la TVA, qui n'intervient actuellement qu'au bout de deux ans, pour les nouveaux investissements des collectivités en 2009. Cela représente jusqu'à 2,5 milliards, et intéresse les grandes collectivités comme les petites.

Enfin, les grands chantiers publics où l'État et les collectivités territoriales sont partenaires seront accélérés, notamment en matière d'infrastructures routières, fluviales ou ferroviaires.

Nous sommes conscients des contraintes qui pèsent sur les collectivités. Leur dynamisme ne doit pas être entravé ! (Applaudissements à droite et au centre)

Réforme de l'audiovisuel public

M. David Assouline .  - M. le Premier ministre, comme ça, vous vous attaquez à la liberté...

Voix à droite.  - Comme ça !

M. David Assouline.  - ...et voulez mettre la télévision publique à la botte du Président de la République. Comme ça, vous allez torpiller l'équilibre économique de la télévision publique et consacrer une gigantesque régression démocratique en replaçant sous la tutelle directe de l'État France Télévisions, dont le président sera nommé et révoqué selon le bon vouloir de Nicolas Sarkozy ! Cela n'existe dans aucun pays démocratique. Quel déshonneur pour la France qui jadis montrait l'exemple en matière de liberté. (Exclamations à droite)

Qui peut croire que le Président de la République veut libérer les Français de la dictature de la publicité, alors qu'il accorde une overdose de publicité à ses amis de la télévision privée, avec la deuxième coupure ou l'augmentation de la durée de diffusion, et qu'il leur offre les 450 millions venus du secteur public ? Et en plus, vous voulez qu'on se taise ?

M. Alain Gournac.  - Aucune chance !

M. David Assouline.  - Après avoir amusé la galerie pendant des mois avec la commission Copé sans beaucoup tenir compte de ses travaux, vous présentez en urgence, toujours en urgence, un projet de loi et quand l'Assemblée nationale décide de vraiment débattre et l'opposition de s'opposer, vous dites que vous agirez par décret, avant même la discussion au Sénat.

Et vous voulez qu'on se taise ? Ici, où sont nombreux, sur tous les bancs, des républicains et des démocrates capables de réagir comme au moment des tests ADN, ici, où nous avons fièrement, contre l'avis du Gouvernement, fait introduire dans la Constitution les principes de liberté, d'indépendance et de pluralisme des médias !

Méditez ces propos tenus en 1848 par Victor Hugo à propos de la liberté d'information (exclamations à droite) au milieu des mêmes quolibets : « Ne souffrez pas les empiètements du pouvoir, ne laissez pas se faire autour de vous cette espèce de calme faux qui n'est pas le calme, que vous prenez pour l'ordre et qui n'est pas l'ordre... Le silence autour des Assemblées, c'est bientôt le silence dans les Assemblées ».

M. le président.  - Votre question.

M. David Assouline.  - Irez-vous jusqu'au bout de votre dangereuse réforme et agirez-vous dans les heures qui viennent par décret, au mépris des principes de la Constitution ? Si oui, sachez qu'on ne se taira pas, ni ici, ni dehors ! (Applaudissements à gauche ; exclamations à droite)

Mme Christine Albanel, ministre de la culture et de la communication .  - (Applaudissements sur les bancs UMP) Je n'ai pas reconnu la réforme que je défends à l'Assemblée nationale et qui se heurte à un blocage absolu, revendiqué, théorisé, blocage que dénoncent des personnalités comme Marin Karmitz...

Voix socialiste.  - Vendu !

Mme Christine Albanel, ministre.  - ...ou Jacques Peskine, président du syndicat national des producteurs, parce qu'il met en danger la télévision publique.

Cette réforme claire et ambitieuse consiste à proposer de nouveaux horaires, avec plusieurs parties de soirée, une programmation encore plus service public, avec plus de fictions, plus de films, plus d'adaptations de grandes oeuvres, plus de courts métrages, plus d'Europe, plus d'information, nationale et régionale... (Approbations sur les bancs UMP) C'est un grand projet culturel...

M. David Assouline.  - Pas financé !

Mme Christine Albanel, ministre.  - ...qui touchera toute la France, et pas seulement des Parisiens, une réforme financée, avec 450 millions en loi de finances. Il faut la mettre en oeuvre, tout le monde y est prêt. Je serai donc présente le jour et la nuit à l'Assemblée nationale pour porter le débat. La réforme doit s'appliquer le 5 janvier, d'où l'idée d'un décret, puisque l'aménagement de la publicité relève du domaine réglementaire : toutes les dispositions publicitaires sont issues du décret du 27 mars 1992. L'enjeu en vaut la peine : les Français, les téléspectateurs apprécieront cette réforme ambitieuse. (Applaudissements à droite ; exclamations à gauche)

Crise et pouvoir d'achat

Mme Odette Terrade .  - (Applaudissements sur les bancs CRC-SPG) Ma question s'adressait à M. le Premier ministre. Jeunes, travailleurs ou retraités, nos concitoyens sont touchés de plein fouet par la crise. C'est l'échec de votre politique, vous qui avez défendu par vos politiques dévastatrices un capitalisme mondialisé. Licenciements et chômages techniques se multiplient, emportant des pans entiers de notre économie, comme en témoigne le terrible exemple du secteur automobile. Le Gouvernement ne sanctionne pas ces délinquants sociaux qui laissent des milliers de travailleurs sur le carreau pour mieux rémunérer les actionnaires.

Face à cette situation économiquement désastreuse et socialement insoutenable, le Président de la République annonce pompeusement un plan de relance, assorti d'un ministre d'affichage. En fait de relance, on s'occupe de la trésorerie des entreprises en incitant les ménages à s'endetter : 26 milliards aux unes, mais rien pour l'emploi et le pouvoir d'achat des autres. Ce plan n'est pas à la hauteur des besoins. Encore une fois, vous accordez aux employeurs des exonérations sans contrepartie, mais en guise de rattrapage du pouvoir d'achat, les salariés devront payer plus s'ils veulent maintenir leur protection sociale. Pas de revalorisation des salaires et des minima sociaux, à peine un rattrapage des retraites, des aides au logement en berne, des franchises médicales, un prix du gaz exorbitant et une prime de Noël insuffisante... La majorité sénatoriale n'est pas en reste quand elle vote la fiscalisation des indemnités journalières et la suppression de la demi-part des parents isolés. (Approbations à gauche) Vous avez même osé envisager la suppression de l'ISF et la déductibilité des pertes de bourse. Curieuse conception d'une relance au profit des seuls privilégiés...

M. le président.  - Votre question.

Mme Odette Terrade.  - La France et son peuple attendent une véritable politique de relance en faveur du pouvoir d'achat et de la consommation ; quand allez-vous enfin prendre des mesures en ce sens ? (Applaudissements à gauche)

M. Patrick Devedjian, ministre chargé de la mise en oeuvre du plan de relance   - . Décidément, les leçons de l'histoire ne servent à rien ! Le communisme s'est affaissé, pas le capitalisme. (Exclamations sur les bancs CRC-SPG) Il subit une crise comme il en a traversé de multiples depuis le XIIIe siècle. En rendre responsable le Gouvernement et le Président de la République montre que vous n'avez rien compris. Le plan de relance annoncé par le Président de la République est absolument comparable à ceux qui ont été lancés par la plupart des grands pays...

M. Guy Fischer.  - Et qui ont échoué !

M. Patrick Devedjian, ministre.  - Vous dites que la consommation est oubliée, mais lorsqu'on lance un plan d'investissement, c'est pour accroître la production, donc le travail et les salaires, et donc, in fine, la consommation.

Ensuite, ce plan a une dimension sociale que vous voulez ignorer. Ainsi 800 millions seront versés dès le premier trimestre 2009 en anticipation du RSA, soit 200 euros par personne pour les quatre millions de bénéficiaires du RMI, 500 millions seront consacrés aux contrats de transition professionnelle et 160 à la rénovation des centres d'hébergement, sans parler des mesures en faveur du logement, par exemple des 200 millions consacrés aux contrats Anru.

Ce plan est équilibré, coordonné avec ceux de l'ensemble des démocraties, à l'exception de la Grande-Bretagne -parce que la Grande-Bretagne n'a plus d'industrie, alors que nous, nous en avons encore une... (Applaudissements à droite ; protestations à gauche)

M. Jean-Pierre Sueur.  - M. Devedjian n'a pas changé...

Profanation du cimetière de Notre-Dame-de-Lorette

Mme Françoise Henneron .  - (Applaudissements à droite) Les tombes du carré musulman du cimetière militaire de Notre-Dame-de-Lorette dans la commune d'Ablain-Saint-Nazaire, dans mon département du Pas-de-Calais, ont à nouveau été profanées dans la nuit de dimanche à lundi. Plus de 500 sépultures musulmanes et une dizaine de stèles juives ont été souillées. La date n'a pas été choisie au hasard puisque les profanateurs ont agi le jour de l'Aïd el Kebir, fête la plus importante du calendrier musulman, ce qui aggrave l'horreur de cet acte.

Ces faits odieux sont unanimement condamnés et il n'y a pas de mots assez forts pour dénoncer ces actes ignobles qui font appel aux plus bas instincts humains, le racisme et la haine. Je n'en dirais pas plus, ce serait faire trop de cas de leurs auteurs. A ma connaissance, l'enquête qui a été immédiatement diligentée n'a pas encore permis de procéder à des interpellations.

M. Jean-Marie Bockel, secrétaire d'État à la défense et aux anciens combattants, s'est rendu sur place dès lundi après-midi.

Voix sur les bancs socialistes.  - Alors, on est sauvés !

Mme Françoise Henneron.  - En vingt mois, la nécropole a été profanée à trois reprises : en avril 2007, 52 tombes ont été souillées, puis 148 en avril 2008, avant la profanation toute récente de dimanche. Un plan d'action avait d'ailleurs été lancé au mois d'avril lors de la précédente profanation.

Alors que l'on encourage le devoir de mémoire auprès de nos plus jeunes afin qu'ils n'oublient jamais le sacrifice de leurs aînés, on ne peut être que révolté de voir de tels agissements se reproduire quelques semaines après le 90e anniversaire du 11 novembre 1918. C'est un outrage inconcevable commis par une poignée de voyous qui ne représentent heureusement qu'une minorité. L'image du département du Pas-de-Calais est à nouveau salie parce qu'associée à de tels faits, qui doivent cesser.

Madame la ministre de l'intérieur, quel est l'état d'avancement de l'enquête, quelles mesures ont été prises pour la sécurisation du site afin que l'on ne revoie plus jamais de tels agissements à Notre-Dame-de-Lorette, et que comptez-vous faire pour traiter le phénomène au plan national ? (Applaudissements à droite)

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales .  - Les profanations de tombes, quelle que soit la religion visée, sont intolérables. C'est une atteinte insupportable à la mémoire des morts, à leurs familles et, en l'occurrence, à des soldats qui ont combattu pour notre liberté et pour la France. Ce n'en est que plus scandaleux.

C'est la troisième fois que ce cimetière est profané. Mais je vous rassure : l'image du Pas-de-Calais n'en est pas pour autant atteinte, parce que les errements de quelques individus ne peuvent être généralisés. D'autant que dans ce département, la condamnation est unanime.

J'ai immédiatement envoyé sur place les équipes de la police scientifique et technique pour opérer des prélèvements, lesquels sont examinés en laboratoire. Parallèlement des interrogatoires sont en cours, une information judiciaire est ouverte et les auditions continuent sous la responsabilité d'un juge.

La surveillance de cette nécropole était assurée depuis la profanation précédente, mais elle est difficile à réaliser sur une surface de dix-sept hectares. Nous l'avons donc renforcée et avons pris des mesures supplémentaires : pose de barrières sur les voies d'accès, renforcement des portails, installation de caméras thermiques, la dernière profanation ayant été facilitée par un épais brouillard. Une consultation sera lancée pour la première tranche d'installation de ces caméras, de façon que les travaux commencent en avril prochain.

Tout sera mis en oeuvre pour protéger cette nécropole et, surtout, pour identifier, déférer devant la justice et sanctionner sévèrement les délinquants. (Applaudissements à droite et au centre)

Plan de relance

M. Pierre-Yves Collombat .  - Monsieur le ministre de la crise, il y a huit jours le Président de la République nous livrait le contenu de son plan de relance. La Marseillaise finale sonnait très bien mais je ne suis pas sûr d'avoir compris ce qui la précédait.

Diagnostic de Nicolas Sarkozy : « La crise que nous traversons n'est pas une crise passagère... une simple crise conjoncturelle » mais une crise « structurelle » qui « va transformer pour longtemps l'économie, la société, la politique ». A cet infarctus économique sévère, il répond pourtant, par les tisanes d'ordinaire administrées aux refroidissements passagers de la croissance.

Les investissements ? Pas un euro de plus ! « Il ne s'agit pas de dépenser plus dans la durée mais de dépenser plus vite ce qui aurait dû être étalé sur de nombreuses années. Ce qui signifie que les dépenses ne pèseront pas sur le déficit après 2010 et que nous n'abandonnons pas l'objectif d'assainir le plus vite possible nos finances publiques ».

Fort bien, mais très franchement, croyez-vous que les collectivités qui boucleront difficilement leur budget 2009 dans l'incertitude totale de leur avenir financier vont multiplier leurs investissements parce qu'elles pourront percevoir par avance ce qui leur est dû ? Payer ce que doit l'État, c'est une curieuse relance ! Maigrelette relance de 4 milliards par an, puisqu'il faudra bien quatre ans pour mobiliser la totalité des crédits des grands projets en cours.

La consommation ? En théorie 4 milliards, ce qui fait seulement un milliard par an sur quatre ans. En réalité 800 millions d'augmentation du pouvoir d'achat des ménages, et pas au nom de la relance, mais de la solidarité.

M. le président.  - Posez votre question !

M. Pierre-Yves Collombat.  - Une solidarité de misère d'ailleurs, qui attristerait même George Bush. C'est pourtant le revenu des ménages la clef de la relance. Pourquoi en effet, les entreprises investiraient-elles si elles savent que, faute de pouvoir d'achat, leur production ne trouvera pas acquéreur ?

A quoi bon refinancer le crédit si les ménages restent insolvables ? Où sont les mesures structurelles pour répondre à la crise structurelle diagnostiquée par le Président de la République ? Comme vous ne manquerez pas de les prendre, quand leurs effets se traduiront-ils sur la courbe descendante de la croissance et la courbe ascendante du chômage ? (Applaudissements à gauche)

M. Patrick Devedjian, ministre chargé de la mise en oeuvre du plan de relance .  - La crise mondiale est si profonde que nous devrions tous ensemble, quelles que soient nos opinions, travailler à aider la France à la surmonter. (Applaudissements à droite) Nous avons mieux à faire que nous quereller. (Exclamations sur les bancs socialistes) Quand le Gouvernement prend des mesures pour aider les collectivités territoriales, il le fait indépendamment de la couleur de leurs exécutifs.

Le plan de relance comporte 26 milliards d'euros de dépenses...

M. Pierre-Yves Collombat.  - Ce sont des avances !

M. Patrick Devedjian, ministre.  - ...dont 75 % doivent être dépensés en 2009 pour avoir un effet contracyclique. Seront recherchés en priorité les projets ayant un effet multiplicateur de trois, pour un financement de 100 millions en deux ans.

M. Pierre-Yves Collombat.  - Où sont les mesures structurelles ?

M. Patrick Devedjian, ministre.  - Ce plan est coordonné avec ceux des autres pays européens, ce qui en renforcera l'impact.

Les investissements, ce sont 4 milliards dégagés par l'État pour des investissements stratégiques, autant par les entreprises nationales et 2,5 milliards au titre du FCTVA.

M. Pierre-Yves Collombat.  - Ce n'est pas structurel !

M. Patrick Devedjian, ministre.  - Mais si ! Ces sommes faciliteront le démarrage en 2009 de projets qui n'auraient pas vu le jour faute de financements. Des mesures de simplification administrative en feront sortir d'autres plus rapidement. Tout cela aura des effets structurels, essayez de le comprendre et d'apporter votre concours, c'est l'intérêt du pays ! (Applaudissements à droite)

Plan de relance et lutte contre la pauvreté

M. Bernard Fournier .  - Aujourd'hui, en France, des gens souffrent de la faim et du froid, d'autres s'inquiètent pour leur avenir. A Compiègne, chez notre collègue M. Marini, puis à Douai, le Président de la République a annoncé un plan de relance et des mesures à destination des plus démunis et des salariés modestes. Beaucoup a déjà été fait en direction de nos compatriotes les plus fragiles, notamment des retraités et des bénéficiaires de l'aide au logement. Le Président de la République a tenu dans ses interventions à consacrer un temps particulier à la lutte contre la pauvreté et la précarité, et souhaité que des mesures soient prises pour améliorer le sort des salariés modestes. C'est une question de pure justice.

Pouvez-vous, monsieur le ministre, nous détailler les mesures qui aideront nos concitoyens modestes à traverser la grave crise que nous connaissons ? (Applaudissements à droite)

M. Patrick Devedjian, ministre chargé de la mise en oeuvre du plan de relance .  - Au grand nombre de questions posées aujourd'hui sur le sujet, je mesure la conscience qu'a le Sénat, sur tous ses bancs, de la gravité de la situation et de son souhait de voir la solidarité nationale s'exercer.

La crise aura des répercussions sociales importantes. Le plan de relance a donc deux dimensions, l'investissement et le social, la première ayant évidemment des effets positifs sur la seconde. Les travaux d'infrastructures créeront des emplois qui procureront des salaires et ainsi favoriseront la consommation. Le plan comporte aussi des volets logement, emploi et solidarité, dont, pour ce dernier, la prime de 200 euros versée aux allocataires du RSA.

La question de l'emploi est centrale ; les embauches dans les très petites entreprises seront exonérées de charges sociales en 2009, et 500 millions seront affectés notamment aux contrats aidés, dont les contrats de transition professionnelle. Un effort de 3 milliards est en outre consenti pour le logement : un programme de 100 000 logements, 160 millions pour les centres d'hébergement et 200 millions pour les contrats Anru. (Applaudissements à droite)

Crise économique et aide au développement

Mme Christiane Kammermann .  - Alors que les pays en développement ne sont en rien responsables de la crise que connaissent les économies occidentales, ils risquent, particulièrement l'Afrique, d'en payer les conséquences ; la Banque mondiale et le FMI ont d'ailleurs formulé des mises en garde à ce sujet. Je pense à la raréfaction du crédit, au ralentissement des investissements directs étrangers ou à la baisse des cours des matières premières. Si la croissance en Afrique devrait se situer l'an prochain entre 4 et 5 %, elle connaîtra une baisse de deux points par rapport à 2008. Or chaque point perdu fait reculer dramatiquement la lutte contre la pauvreté ; c'est une catastrophe pour les pays du Sud.

A court terme, ils auront besoin, eux aussi, de plans de relance. Mais contrairement à nous, ils ont peu de marges budgétaires. Si les pays du Sud doivent assumer leur part de responsabilité dans le développement, à commencer par la bonne gouvernance et la transparence dans la gestion de leurs fonds publics, les pays développés ne peuvent se dérober aux leurs en matière d'aide publique au développement.

Nous devons donc soutenir une croissance durable, réduire la pauvreté et réaliser les objectifs du Millénaire pour le développement. Les pays donateurs, notamment la France, changeront-ils d'attitude sous prétexte que la priorité doit être donnée au sauvetage de leur économie ? Quelles mesures la France compte-t-elle prendre pour aider les pays du Sud et, en particulier, l'Afrique ? (Applaudissements à droite)

M. Alain Joyandet, secrétaire d'État chargé de la coopération et de la francophonie .  - L'Afrique est effectivement inquiète car elle a peur que la crise ne la mette encore plus en difficulté.

La France a agi à trois niveaux, grâce à l'action et au rayonnement du Président de la République et du Gouvernement. Au niveau mondial, la réunion du G20 à Washington s'est penchée, pour la première fois, sur la question de l'aide au développement. Comme cela est écrit à l'article 14, les pays développés vont rééquilibrer les relations entre le Nord et le Sud.

L'Europe unanime a décidé d'aider l'agriculture vivrière dans les années à venir. A l'initiative de la France, un milliard supplémentaire financera tous les projets publics et privés, notamment en Afrique subsaharienne, afin de relancer durablement cette agriculture.

Au niveau national, le Gouvernement a beaucoup travaillé avec les commissions sénatoriales des affaires étrangères et des finances afin que l'aide publique de la France progresse. La mission « Aide publique » augmentera l'année prochaine de 2,46 %, soit un total de plus de 3 milliards de crédits de paiement.

Pour soutenir le développement économique, nous allons mettre en place deux fonds, dotés chacun de 250 millions, pour financer les créations d'entreprises en Afrique, notamment celles portées par les jeunes Africains diplômés qui manquent de moyens. Enfin, nous encourageons tous les financements innovants : la taxe sur les billets d'avion contribue ainsi efficacement à la lutte contre le sida.

La France a été au centre de toutes ces actions : le rééquilibrage entre le Nord et le Sud est de l'intérêt de l'Afrique, mais aussi du nôtre. Je vous propose aussi de venir en aide à ces pays, pour la raison, mais aussi avec le coeur, ce qui sera plus enthousiasmant. (Applaudissements à droite et au centre)

Enfance en danger

Mme Claire-Lise Campion .  - A l'occasion de l'examen de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances », j'ai interrogé le Gouvernement sur la mise en oeuvre de la loi du 5 mars 2007 relative à la protection de l'enfance en danger. Il nous a annoncé la publication d'un décret relatif à la création des observatoires départementaux de la protection de l'enfance, suivi d'un autre concernant la formation des intervenants.

Mais le Gouvernement est resté silencieux sur le financement de cette réforme ! Or, l'article 17 de la loi prévoit la création d'un Fonds national de financement de la protection de l'enfance : ni le décret de création de ce dispositif, ni les fonds permettant de l'abonder n'ont été mis en place. Or, le montant des seules mesures nouvelles était évalué à 150 millions. Aujourd'hui, le soutien apporté par l'État à la protection de l'enfance en danger reste marginal, puisqu'il ne se monte qu'à 6 millions. Certes, la prévention et la lutte contre la maltraitance des enfants relèvent essentiellement des départements, qui assument l'essentiel de la dépense. Mais le fonds doit compenser toutes les nouvelles mesures mises à leur charge. Il ne suffit donc pas de légiférer : encore faut-il publier les décrets et débloquer les fonds ! Sinon, la loi ne s'applique pas, ce qui concourt à discréditer l'action publique aux yeux de nos concitoyens.

Nous en venons à nous demander si le Gouvernement souhaite vraiment avancer. Ainsi, un projet de décret a été soumis au comité des finances locales qui a rendu un avis le 8 février : cela fait maintenant dix mois ! Pourquoi tant de retard ?

De plus 30 millions de la Caisse nationale des allocations familiales devaient être affectés au Fonds de protection de l'enfance en danger en 2007.

M. le président.  - Votre question !

Mme Claire-Lise Campion.  - Comme le Gouvernement n'a pas publié le décret, ces 30 millions ont servi à d'autres actions en 2008. (Exclamations à droite)

M. Alain Gournac.  - La question !

Mme Claire-Lise Campion.  - Perte de temps, perte d'argent. Derrière ces chiffres et ces textes, il y a des enfants en danger, des enfants en souffrance ! L'État n'a pas été au rendez-vous en 2007 ni en 2008. Il ne le sera pas non plus l'année prochaine. Le sera-t-il en 2010 ? (Applaudissements à gauche)

M. Xavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité .  - Je vous rappelle que la loi du 5 mars 2007 a été adoptée à l'unanimité. Nous avons su tous nous retrouver sur la question de la protection de l'enfance.

Sur tous les bancs, vous souhaitez savoir comment ce texte va être appliqué. Il y a effectivement encore deux décrets qui n'ont pas été publiés : ils font l'objet d'arbitrages interministériels (exclamations sur les bancs socialistes) et ils concernent le Fonds de protection de l'enfance et la médecine scolaire.

Deux autres décrets sont en cours de publication : celui relatif à la transmission de données entre les cellules, les observatoires et l'Observatoire national de l'enfance en danger (Oned), et celui relatif à la formation de tous les professionnels qui travaillent avec des enfants.

M. Bernard Frimat.  - Cela a été dit !

M. Xavier Bertrand, ministre.  - Ce dernier décret a fait l'objet de travaux conjoints entre six ministères.

Avant de les publier, nous vérifions si les décrets d'application correspondent bien aux réalités du terrain. (Nouvelles exclamations à gauche) A chaque fois, il y a eu un travail de concertation important entre les services de l'État, les conseils généraux, mais aussi les associations. Mme Morano vous a confirmé que le Gouvernement était fermement décidé à appliquer ces textes.

Même si deux décrets restent à publier, la loi du 5 mars 2007 est globalement d'application immédiate.

L'État, quant à lui, tient ses engagements : il finance les réseaux d'aide et d'appui à la parentalité et le GIP Enfance en danger, qui traite les appels du numéro 119. Le ministère de l'éducation nationale est, lui aussi, totalement mobilisé sur le sujet. (On en doute à gauche)

Je puis vous assurer que cette loi sera appliquée, car il y a certainement peu de choses aussi importantes que la protection de nos enfants. (Applaudissements à droite)

M. le président.  - Nous en avons terminé avec la séance de questions d'actualité. Mais avant de suspendre je donne la parole à M. Arthuis, président de la commission des finances, qui la demande pour un fait personnel.

M. Jean Arthuis.  - Je souhaite en effet réagir aux propos tenus par Mme Terrade.

M. Henri de Raincourt.  - Ignobles...

M. Jean Arthuis.  - Notre collègue affirme que lundi après-midi, lors de l'examen des articles non rattachés à la seconde partie de la loi de finances, j'ai voulu « supprimer l'ISF ». Elle omet de mentionner que notre première préoccupation était de mettre un terme au bouclier fiscal, injuste dans son application ; et que nous voulions supprimer l'ISF tout en créant, en contrepartie, une cinquième tranche de l'impôt sur le revenu, pour compenser la perte de recettes. (M. Dominique Braye approuve) Il s'agit bien d'une trilogie, dont chaque élément est indissociable des deux autres. (Applaudissements à droite et exclamations à gauche)

La séance, suspendue à 16 heures, reprend à 16 h 20.

présidence de Mme Catherine Tasca,vice-présidente