Revenus du travail (Urgence - Suite)
Discussion des articles (Suite)
Article 5 (Suite)
Mme Isabelle Debré, rapporteur. - Défavorable aux amendements n°s89, 90 et 91 pour les mêmes raisons : la commission est hostile à toute police des salaires qui risquerait d'aboutir à des rémunérations sans rapport avec le marché du travail. Défavorable aussi à l'amendement n°59 qui durcit le dispositif de façon déraisonnable.
Les amendements n°s66 rectifié et 97, qui vont dans le même sens, pourraient être retirés au profit de notre amendement n°101. Ils rendraient en effet inopérant le dispositif de l'article 5.
Sur l'amendement n°31 rectifié...
Mme Catherine Procaccia. - ...nous voulons des explications.
Mme Isabelle Debré, rapporteur. - ...notre avis est le même que sur les précédents.
Quant au n°60, il durcit à l'excès un dispositif que ses auteurs disent aussi vouloir supprimer.
M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État. - Cela fait des années qu'on se bat pour qu'aucune branche ne détermine un salaire minimum inférieur au Smic. Michel Rocard, en 1987, avait pu faire bouger les lignes et M. Larcher, quand il était ministre du travail, avait réussi à ce qu'il n'y ait plus que sept branches dans ce cas. Tous nos efforts tendent à réduire ce nombre à zéro.
Défavorable bien sûr à l'amendement de suppression ainsi qu'à l'amendement n°88. Nous voulons tirer l'ensemble du système vers le haut grâce à un dispositif incitatif. L'amendement n°88 nous priverait de cette possibilité.
Je comprends bien les intentions des auteurs des amendements n°s89 et 60 mais les délais qu'ils proposent sont trop brefs pour être réalistes.
L'amendement n°90 revient à instaurer une police des salaires dont nous ne voulons pas. Avec l'amendement n°91, le groupe CRC nous répète son opposition de principe à l'ensemble du projet de loi. Défavorable, bien sûr, ainsi qu'à l'amendement n°59 qui aurait une conséquence sans doute inaperçue de ses auteurs : les branches qui ont déjà un minimum supérieur au Smic pourraient prétendre à de nouvelles exemptions de charges. On ne va pas en rajouter une louche !
M. Jean-Pierre Fourcade. - Certes !
M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État. - Je suis partisan des allégements de charge, mais point trop n'en faut ! (Exclamations à gauche)
Favorable à l'amendement n°18. Je souhaite le retrait des amendements n°s66 rectifié et 97 qui posent deux problèmes. Comment articuler branches et entreprises ? Quid du monde agricole où les branches, du fait de l'extension sur le territoire, ont souvent moins de 5 000 ressortissants ? Je suis issu d'un territoire rural et donc très attentif aux spécificités du droit du travail dans ce milieu. Ses responsables syndicaux m'ont assuré que le dispositif proposé ne leur posait aucun problème.
Les amendements identiques n°s99 et 101 seront utiles. On verra en 2010 si la moitié des branches ont déjà fait l'effort et s'il ne reste qu'à attendre le ralliement des autres. Ces amendements articulent très bien branches et entreprises.
M. Philippe Dominati. - Je ne reçois qu'une demi-satisfaction puisque les entreprises vertueuses seront désavantagées s'il n'y a pas accord dans la moitié des branches. Je retire néanmoins mes amendements.
Les amendements n°s66, 97 et 98 sont retirés.
L'amendement n°58 n'est pas adopté, non plus que les amendements n°s88, 89, 90, 91 et 59.
L'amendement n°18 est adopté.
M. Gérard César. - Je n'ai pas les mêmes informations que le ministre, mais je retire mon amendement.
L'amendement n°31 rectifié est retiré.
L'amendement n°99, identique à l'amendement n°101, est adopté.
L'amendement n°60 n'est pas adopté.
L'article 5, modifié, est adopté.
Explications de vote
Mme Annie David. - Ce projet de loi, qui vise à réduire la part des salaires dans les revenus du travail, sera facteur d'inégalités et de discrimination. Et ce n'est pas l'extension des stocks-options qui change la donne ! Les exonérations de cotisations sociales fragilisent la protection sociale et les retraites. C'est le troisième texte en seize mois en faveur du pouvoir d'achat et de l'emploi, or les suppressions d'emplois se multiplient, preuve de l'échec de votre politique sociale. Pas de coup de pouce au Smic, d'ailleurs remis en question, pas d'augmentation des salaires : le Gouvernement est impuissant, sauf quand il s'agit de sauver les banques !
Nouveau pôle de l'emploi, droits et devoirs des demandeurs d'emploi, RSA : ces mesures augmentent la précarité, réduisent le pouvoir d'achat et entretiennent la confusion entre salaire et revenu. Les articles 4 et 5, loin de relancer la négociation dans l'entreprise, légitiment les grilles en deçà du Smic et encouragent les entreprises à ne pas mener à terme les négociations. Vous parlez volontiers de dialogue social mais vous ne passez pas à l'acte ! Nous sommes farouchement contre ce texte. (Applaudissements à gauche)
M. François Zocchetto. - Ce texte peut paraître décalé dans le contexte conjoncturel : avec la crise, les résultats à partager sont en baisse. Mais au-delà de son intérêt à moyen terme, il sera aussi utile en temps de crise. L'intéressement et la libération des sommes affectées à la participation favorisent le pouvoir d'achat. L'exonération de certaines charges sociales est conditionnée à l'engagement d'une négociation. Ce texte encourage le dialogue social dans l'entreprise et introduit de la souplesse. C'est un bon texte : l'Union centriste le votera.
Mme Annie Jarraud-Vergnolle. - Vos trois premiers textes censés augmenter le pouvoir d'achat n'ont en rien amélioré la situation des Français, sinon celle des 13 000 bénéficiaires du bouclier fiscal. La loi Tepa, au coût abyssal pour les finances publiques, n'a eu aucun effet : selon la commission des finances de l'Assemblée nationale, le pouvoir d'achat des salariés à baissé de 0,4 point ! Nous n'avons pas vu davantage d'amélioration au plan macroéconomique.
Ce texte, présenté en urgence, va encore grever les finances publiques. Il entretient la confusion entre salaire minimum et RSA, et annonce le démantèlement du Smic, jugé trop élevé ! Vous prétendez moraliser le capitalisme mais vous brouillez les cartes avec ces mesurettes qui ne sont qu'effets d'annonce. Quel dommage d'avoir mobilisé tant d'énergie pour n'accoucher que d'une souris !
Mme Catherine Procaccia. - Je salue les ministres, le président et nos deux rapporteurs, grâce auxquels nous avons pu engager le débat. M. Zocchetto a rappelé les apports du texte : je n'y reviens pas. Le groupe UMP se félicite de l'esprit de ses dispositions.
Ce texte s'adresse aux PME, pour qui l'incitation est plus efficace que la contrainte. Les salariés attendaient cette liberté. Il faudra bien informer les entreprises et les salariés, car il s'agit de mécanismes complexes : le service après-vote sera indispensable, notamment dans les PME.
Enfin, le texte réaffirme l'importance du dialogue social. Je me réjouis que certains de mes amendements aient été adoptés. Le groupe UMP votera bien entendu ce projet de loi. (Applaudissements à droite)
Mme Isabelle Debré, rapporteur. - Je remercie les ministres Xavier Bertrand et Laurent Wauquiez, le président About, M. Dassault, la présidence ainsi que tous nos collègues pour la qualité de nos débats qui ont été fermes mais sereins et constructifs. (Applaudissements à droite)
M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État. - Je salue le travail remarquable de Mme Debré dont la précision, le professionnalisme et l'énergie ont permis d'améliorer le texte, notamment sur l'article 5 et la question de l'intérim. Merci à M. Dassault et à la commission des finances. Merci à Mme Procaccia pour ses interventions pertinentes. Je salue également l'opposition, Mme David et M. Fischer, toujours clairs et constructifs, même si nous n'avons pas la même vision (sourires), tout comme Mme Jarraud-Vergnolle.
Je ne puis passer sous silence les prises de parole du groupe RDSE, notamment celle de M. de Montesquiou, durant la discussion générale, qui a insisté sur la question des PME. Enfin, je tiens à remercier les présidents de Raincourt et Mercier qui ont su peser de tout leurs poids aux moments déterminants de l'examen de ce projet de loi.
Ce texte va permettre de valoriser les revenus du travail en améliorant la participation et l'intéressement. Pour une fois, il n'a pas été seulement question de Smic mais de tous les salaires, et pas seulement des grands groupes mais de toutes les entreprises, PME et TPE comprises. Je souhaite que les négociations à venir respectent le calendrier prévu afin d'aboutir rapidement à des avancées concrètes. (Applaudissements à droite et au centre)
Le projet de loi est adopté