Démocratie sociale et temps de travail (Urgence - Suite)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, portant rénovation de la démocratie sociale et réforme du temps de travail

Discussion des articles (Suite)

Article 18

I. - La section 1 du chapitre II du titre II du livre Ier de la troisième partie du code du travail est ainsi rédigée :

« Section 1

« Répartition des horaires sur une période supérieure à la semaine et au plus égale à l'année

« Art. L. 3122-1. - Sauf stipulations contraires d'un accord d'entreprise ou d'établissement, la semaine civile débute le lundi à 0 heure et se termine le dimanche à 24 heures.

« Art. L. 3122-2. - Un accord collectif d'entreprise ou d'établissement ou, à défaut, une convention ou un accord de branche peut définir les modalités d'aménagement du temps de travail et organiser la répartition de la durée du travail sur une période supérieure à la semaine et au plus égale à l'année. Il prévoit :

« 1° Les conditions et délais de prévenance des changements de durée ou d'horaire de travail ;

« 2° Les limites pour le décompte des heures supplémentaires ;

« 3° Les conditions de prise en compte, pour la rémunération des salariés, des absences ainsi que des arrivées et départs en cours de période.

« Sauf stipulations contraires d'un accord d'entreprise ou d'établissement ou, à défaut, d'une convention ou d'un accord de branche, le délai de prévenance en cas de changement de durée ou d'horaires est fixé à sept jours.

« A défaut d'accord collectif, un décret définit les modalités et l'organisation de la répartition de la durée du travail sur plus d'une semaine.

« Art. L. 3122-3. - Par dérogation aux dispositions de l'article L. 3122-2 dans les entreprises qui fonctionnent en continu, l'organisation du temps de travail peut être organisée sur plusieurs semaines par décision de l'employeur.

« Art. L. 3122-4. - Lorsqu'un accord collectif organise une variation de la durée de travail hebdomadaire sur tout ou partie de l'année ou lorsqu'il est fait application de la possibilité de calculer la durée du travail sur une période de plusieurs semaines prévue par le décret mentionné à l'article L. 3122-2, constituent des heures supplémentaires, selon le cadre retenu par l'accord ou le décret pour leur décompte :

« 1° Les heures effectuées au-delà de 1 607 heures annuelles ou de la limite annuelle inférieure fixée par l'accord, déduction faite, le cas échéant, des heures supplémentaires effectuées au-delà de la limite haute hebdomadaire éventuellement fixée par l'accord et déjà comptabilisées ;

« 2° Les heures effectuées au-delà de la moyenne de trente-cinq heures calculée sur la période de référence fixée par l'accord ou par le décret, déduction faite des heures supplémentaires effectuées au-delà de la limite haute hebdomadaire fixée, le cas échéant, par l'accord ou par le décret et déjà comptabilisées.

« Art. L. 3122-5. - Quand l'employeur examine la demande de modification d'horaire ou du rythme de travail émanant d'un salarié, il prend en compte les besoins respectifs de flexibilité du salarié et de l'entreprise. »

II. - La sous-section 8 de la section 1 du chapitre III du titre II du livre Ier de la troisième partie du même code est abrogée.

III. - Les accords conclus en application des articlesL. 3122-3, L. 3122-9, L. 3122-19 et L. 3123-25 du code du travail dans leur rédaction antérieure à la publication de la présente loi restent en vigueur.

M. Guy Fischer.  - Comme toute cette loi, cet article propose la dérégulation, la déréglementation et le détricotage du code du travail. Après avoir imposé le forfait aux salariés autonomes, vous généralisez l'annualisation, alors que celle-ci a des effets néfastes sur la vie privée des salariés et sur leur pouvoir d'achat. Avec cette disposition, l'employeur pourra demander à ses salariés de travailler en fonction de ses commandes, ce qui peut sembler acceptable mais qui va aboutir, comme toujours, à ce que l'économique prime sur le social.

Pour complaire au Medef et à la CGPME, il est proposé de supprimer la négociation obligatoire du plan incitatif. Une bonne nouvelle antisociale ne venant jamais seule, l'obligation d'invoquer des exigences économiques pour mettre en place l'annualisation est supprimée. Désormais, l'entreprise pourra imposer à ses salariés une annualisation ou des modulations de leurs horaires de travail alors que rien ne l'exige. Vous nous direz que l'entreprise qui n'en a pas besoin n'y aura pas recours. Mais pourquoi ne pas avoir laissé la réglementation actuelle en vigueur ? Comme pour les heures supplémentaires, l'UMP fait de l'annualisation un principe. Nombre d'entreprises n'utiliseront pas cette version allégée de l'annualisation mais l'important pour vous est de leur en donner la possibilité si elles le souhaitent.

En fait, vous voulez déréglementer dans tous les domaines pour favoriser l'initiative individuelle, quitte à ce que cela se fasse sur le dos des salariés les plus précaires.

Enfin, n'y a-t-il pas une incohérence à faciliter l'annualisation et à renforcer, dans le même temps, les sanctions contre les parents défaillants ? Comment espérer une vie de famille harmonieuse si l'un des deux parents, voire les deux, ont des horaires totalement variables et déconnectés du rythme de vie de leurs enfants ? Le Gouvernement peut-il nous donner son avis ?

M. Jean-Luc Mélenchon.  - Je suis parfaitement capable de comprendre que l'annualisation convient à certaines activités économiques, mais son application a été étendue à des secteurs où elle ne s'imposait pas du tout. L'annualisation rompt les cycles naturels auxquels je suis très attaché. Il faut en effet les respecter afin que les êtres humains puissent mener une vie commune. Quand, dans une famille, les parents ont des horaires de travail annualisés, le foyer est transformé en une sorte d'hôtel restaurant fréquenté par des gens qui se croisent plutôt qu'ils ne vivent ensemble. Par principe, je ne suis donc pas favorable à l'annualisation.

Le professeur Robert Sue, qui enseigne à proximité, à la Sorbonne, et qui a écrit un magnifique ouvrage sur le temps, estime que le temps est une propriété de l'univers social et non pas simplement un arrière-plan. Il répond donc aux rapports de force qui structurent cet univers : il y a un temps dominé et un temps dominant, un temps des dominés et un temps des dominants.

Il est vrai que, dans les lois Aubry, nous avions prévu l'annualisation, même si nous en avions critiqué le principe sur ces bancs, mais c'était en contrepartie des 35 heures. Il y avait eu une négociation dans laquelle on privilégiait le donnant-donnant et nous ne sommes plus du tout dans cette épure.

Le recours à l'annualisation ne se fera plus sous la protection de la loi, ni de la branche, mais « au plus près du terrain », comprenez : de la production, non de la vie sociale. Tout s'arrangera-t-il entre salariés et patrons dans le meilleur des mondes possible et sous le règne de la raison pure ? J'en doute. Face à un employeur qui n'aura à l'esprit que son carnet de commandes, comment négocier de gré à gré ?

L'annualisation par accord d'entreprise comprend des éléments qui envisagés de loin, dans les bureaux des hautes sphères, peuvent paraître insignifiants mais qui ont une grande importance concrète : les délais de prévenance, par exemple. Un salarié pourra travailler quatre heures un jour, huit heures le lendemain, dix heures le surlendemain, selon une négociation de gré à gré ! Vous abandonnez les gens à une logique de la production, qui n'est pas celle de la vie humaine. C'est dans l'entreprise que seront décidées les modalités de prise en compte des absences, des horaires... Bonjour à l'arbitraire ! M. le ministre ne manquera de m'apporter des réponses précises sur la manière dont il imagine la vie du quidam à l'échelle de l'entreprise -un échelon où celui-ci ne pourra jamais dire non. Comment pourra-t-il continuer à mener une vie normale ? (Applaudissements à gauche)

M. le président.  - Amendement n°95, présenté par M. Godefroy et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Supprimer cet article.

Mme Annie Jarraud-Vergnolle.  - Modulation, annualisation, temps partiel modulé sont « unifiés » par l'article 18. Pour organiser le temps de travail au-delà d'une semaine, l'accord d'entreprise prédominera. Or, 80 % des entreprises sont dépourvues de représentation syndicale et le contrat de travail répond à une logique de subordination... Jusqu'alors, les salariés bénéficiaient de garanties minimales : la protection disparaît. II en va de même pour les temps partiels modulés sur tout ou partie de l'année. Ne subsistera que le délai de prévenance, en cas de changement de durée ou d'horaires de travail.

Désormais l'employeur n'aura plus à justifier par des arguments économiques et sociaux le recours à la modulation. Qu'adviendra-t-il si l'employeur décide de passer des 3-8 aux 4-8, soit un week-end de travail sur deux en moyenne ? Votre détermination à réhabiliter la valeur travail n'est que prétexte pour ne pas rétribuer le travail à sa juste valeur et pour en faire une variable d'ajustement.

M. le président.  - Amendement identique n°268, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC.

Mme Annie David.  - L'article vise à déréglementer les horaires collectifs de travail. L'annualisation n'est pas en soi originale, elle figurait déjà dans les lois Aubry... mais avec comme contrepartie la réduction du temps de travail. Le présent projet oublie les 35 heures, mais n'oublie pas de généraliser l'annualisation, sans même prévoir un avis des services d'inspection du travail. Le travail de nuit, du week-end, des jours fériés, va devenir la norme : il sera déduit du volume annuel, sans compensation, sinon celle d'être mis en congé forcé lorsque le contingent d'heures aura été dépassé.

Que deviennent les heures supplémentaires, dont vous avez, deux articles plus haut, accru le contingent annuel utilisable, bien au-delà du nécessaire ? Selon vous, les entreprises n'auraient pas recouru au forfait jours, ni aux heures supplémentaires, ni à l'annualisation et seraient passés à côté de l'ensemble des réformes du temps de travail inscrites dans le code du travail... Cela est parfaitement inexact ! Dans la métallurgie, dans l'automobile -PSA annonce pour la rentrée une semaine chômée- on recourt régulièrement au travail le dimanche et au chômage technique.

Est-ce une avancée que de laisser les patrons de PME et les directeurs d'usine imposer leurs conditions de travail dans une négociation soumise à la pression des événements, au chantage à la délocalisation, à la suppression d'emplois, à la difficile survie de l'entreprise ?

Vous n'avez esquissé aucun bilan social et économique, car votre seul objectif est la rentabilité du capital. Quant à la santé des salariés, leurs retraites, l'emploi et la croissance, rien n'est sûr, sauf le pire.

M. Alain Gournac, rapporteur de la commission des affaires sociales.  - Défavorable, car nous voulons aménager le temps de travail dans l'entreprise. Je me félicite de la simplification juridique inscrite dans le projet de loi. Il faut libérer le travail.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité.  - Défavorable, nous avons fait le choix de la simplification ; le nombre des articles du code relatifs à ce sujet diminue de moitié ; de cinq modes d'aménagement du temps de travail, l'on passe à un seul, la négociation collective. Il faudra que 30 % des salariés soient d'accord et que 50 % ne s'opposent pas : c'est la meilleure garantie qu'on ne leur imposera pas n'importe quoi.

M. Guy Fischer.  - Oui, oui, comme chez Goodyear...

M. Jacques Muller.  - L'encadrement des heures supplémentaires se réduisant à rien, les revenus des personnes qui avaient la chance d'avoir une contrepartie à leurs heures supplémentaires diminueront aussi. Curieuse manière de défendre le pouvoir d'achat !

M. Xavier Bertrand, ministre.  - Pouvez-vous le prouver ?

M. Jacques Muller.  - La rédaction fait disparaître les compensations ! Les Verts refusaient déjà la mise en oeuvre des récentes dispositions : ce nouveau texte est pire, il est une régression de plus. La lutte des salariés contre le travail de nuit, le travail le dimanche et les 3-8 a été âpre ; aujourd'hui, vous défaites tout !

Il ne s'agit pas d'un débat technique, mais social : la santé, la façon de vivre ensemble, la possibilité même de mener une vie de famille sont menacées, au nom de la liberté du travail !

M. Xavier Bertrand, ministre.  - Affirmations gratuites, que vous ne pouvez démontrer. (Protestations à gauche) Il est fort savoureux de vous voir, sénateurs des bancs de gauche, en défenseurs des heures supplémentaires. (Applaudissements à droite)

M. Guy Fischer.  - Non !

M. Xavier Bertrand, ministre.  - Votre conversion est tardive mais salutaire.

M. Guy Fischer.  - Provocation !

M. Xavier Bertrand, ministre.  - Croyez-vous que les syndicats qui négocieront concluront des accords défavorables aux salariés ? Curieuse conception du dialogue social ! (Applaudissements à droite)

Mme Annie David.  - Vous nous dites que nos affirmations sont gratuites mais vous vous gardez de répondre à nos questions et vous ne présentez jamais de chiffres ou de données précises. Quant à prétendre que nous défendons les heures supplémentaires quand nous soulignons qu'on passe de 25 à 10 %, c'est de la caricature. (Applaudissements à gauche)

M. Guy Fischer.  - Oui, je me sens provoqué par les propos du ministre. J'ai dénoncé tout à l'heure une réalité : aujourd'hui, les heures supplémentaires annuelles ne dépassent pas les 55 heures...

M. Xavier Bertrand, ministre.  - En 2004 !

M. Guy Fischer.  - ... et vous voulez les faire exploser J'ai dénoncé le fait que, par accord d'entreprise, on en revienne à 10 %...

M. Xavier Bertrand, ministre.  - C'est faux !

M. Guy Fischer.  - ... au lieu de 25 %.

M. Xavier Bertrand, ministre.  - Que dit la loi ?

M. Guy Fischer.  - Il faut être bien fort pour se retrouver dans la soixantaine d'articles que vous voulez modifier !

M. Jean-Luc Mélenchon.  - J'invite mes collègues de gauche à la mansuétude envers le ministre, tout piteux du petit résultat d'hier...

M. Jean-Pierre Raffarin.  - 60 % contre 40 % !

M. Jean-Luc Mélenchon.  - Et encore, il a fallu débaucher quelques renégats ! (Applaudissements sur les bancs socialistes ; protestations à droite) On comprend que le ministre ne soit pas au mieux de sa forme ! Maîtrisez votre déception, mes chers collègues...

M. Jean-Pierre Raffarin.  - 60-40 !

M. Jean-Luc Mélenchon.  - Je l'éprouverais si j'étais à votre place : je défends toujours mes amendements au nom de considérations humaines et j'en éprouve aussi à l'égard du ministre.

Ne nous faites pas dire ce que nous n'avons pas dit. Personne ne discute que les heures supplémentaires puissent être utiles, mais nous ne voulons pas qu'on les décontingente en même temps qu'on annualise le temps de travail parce qu'elles deviennent alors la variable d'ajustement de la production au détriment des hommes. Vous libérez le travail quand nous, nous voulons libérer la personne humaine. Il faut respecter les salariés et ne pas leur demander de changer de rythme de travail sous 48 heures. Pourquoi renoncer à l'accord de branche ? Avec l'accord d'entreprise, il faudra travailler la nuit et le dimanche parce qu'il se trouvera toujours un patron pour expliquer qu'on ne peut faire autrement. Ce n'est pas à ce niveau que l'on assurera la protection des travailleurs, il faut établir une distance.

Les rois de France ont réussi à imposer leur autorité et à se faire aimer parce que la justice royale était une justice d'appel et que les gens avaient peur de tomber sous le coup de la justice de proximité, de la basse justice qui était la justice des seigneurs : la réalité n'a pas changé. (Applaudissements à gauche)

M. Jean-Pierre Raffarin.  - Et la République ?

Les amendements identiques n°s95 et 268 ne sont pas adoptés.

M. le président.  - Amendement n°96, présenté par M. Godefroy et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Dans la première phrase du premier alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 3122-2 du code de travail, remplacer les mots :

Un accord collectif d'entreprise ou d'établissement ou, à défaut, une convention ou un accord de branche

par les mots :

Une convention ou un accord collectif de branche étendu ou un accord collectif d'entreprise ou d'établissement

Mme Christiane Demontès.  - L'article 18 revient sur l'aménagement du temps de travail qui avait été patiemment négocié et substitue aux principes de modulation et de travail par cycle un encadrement unique -il est vrai que toute cette deuxième partie a été élaborée sans aucun accord avec les syndicats. Comment désormais éviter le dumping au sein d'une branche ? Vous voulez coller à la réalité et à la diversité des situations mais il y a des contraintes communes : d'où l'utilité de l'accord de branche qui évitera la désorganisation et l'atomisation.

M. le président.  - Amendement n°168, présenté par MM. Desessard et Muller et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet.

Dans la première phrase du premier alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 3122-2 du code du travail, remplacer les mots :

collectif d'entreprise ou d'établissement ou, à défaut, une convention ou un accord de branche

par les mots :

de branche étendu ou, à défaut, un accord collectif d'entreprise ou d'établissement

M. Jacques Muller.  - La rédaction de l'article inverse la hiérarchie des normes. Le principe de faveur est abandonné : l'accord d'entreprise, même plus défavorable, s'appliquera. Cette inversion marque une première, l'une de ces « ruptures » chères au Président de la République et qui nous ramène un siècle en arrière.

M. le président.  - Amendement n°269, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC.

Dans la première phrase du texte proposé par cet article pour l'article L. 3122-2 du code du travail, après les mots :

un accord de branche

insérer le mot :

étendu

M. Guy Fischer.  - Il ne s'agit pas ici d'un simple ajustement, car nous voulons que les salariés d'une même branche restent sur un pied d'égalité. Or, aujourd'hui, 75 % des contrats d'embauche sont des emplois atypiques. Les accords d'entreprise ne peuvent donc déroger sans risque majeur aux règles en usage dans la branche. Les salariés sont les premières victimes du travail atypique. Je l'ai vécu à Vénissieux avec le conflit Bosch et le passage de 35 à 40 heures. La droite française est-elle encore attachée à l'éducation des enfants par leurs parents ? On peut sans exagérer se poser la question. Nous savons tous que l'on a besoin dans la vie d'une respiration et que dignité et sérénité vont de pair. Comment y parvenir dans la désorganisation du temps de travail ? En outre, la multiplication des accords d'entreprise ou d'établissement conduira à une concurrence déloyale entre entreprises. C'est cette tension que nous proposons d'éviter par notre amendement.

M. Alain Gournac, rapporteur.  - Que M. Mélenchon, qui aime à tourner les autres en dérision, fasse attention ! Quand on donne des leçons de respect, il faut d'abord les faire siennes ...

Nous donnons la priorité aux accords d'entreprise : avis défavorable aux amendements n°s96 et 168, ainsi qu'à l'amendement n°269.

M. Xavier Bertrand, ministre.  - Même avis.

M. Jean-Pierre Raffarin.  - Un mot pour soutenir M. Gournac et dire à M. Mélenchon que nous sommes très heureux en ce lendemain de grande réforme constitutionnelle largement votée : 60 % des voix ! Nous agissons par conviction en assouplissant les 35 heures. J'avais entendu vos arguments il y a quelques années et suivi votre conseil de placer la négociation au niveau des branches et non des entreprises. Il y a eu très peu de négociations au niveau des branches : on va donc vers l'entreprise. (Applaudissements à droite)

M. Jean-Luc Mélenchon.  - J'ai la plus grande estime pour le rapporteur. Je pensais avoir été civil, après toutes les leçons de maintien que m'a données le président Fourcade... Mais, monsieur le rapporteur, je suis de gauche -et donc un peu rustre ... En tout cas, vous ne m'avez pas convaincu. Selon M. Raffarin, il n'y a pas eu beaucoup d'accords de branche, et ce serait pourquoi il faudrait descendre au niveau de l'entreprise. Son argument ne tient pas. Et s'il n'y a pas non plus d'accord d'entreprise, que fait-on ? Nous estimons qu'il faut la loi : en l'absence d'accord de branche, il faut la loi, plutôt que le gré à gré.

M. Xavier Bertrand, ministre.  - Ce sera la loi !

L'amendement n°96 n'est pas adopté, non plus que les amendements n°s168 et 269.

M. le président.  - Amendement n°97, présenté par M. Godefroy et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Compléter le deuxième alinéa (1°) du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 3122-2 du code du travail par les mots :

, le programme indicatif de la modulation du temps de travail pour chacun des services ou ateliers, et le cas échéant, les calendriers individualisés d'activité des salariés

Mme Gisèle Printz.  - Il faut parvenir à concilier vie professionnelle et vie familiale et, pour ce faire, les salariés doivent pouvoir anticiper l'organisation de leur travail. Ils seront d'autant plus efficaces dans leur travail. Les accords de modulation doivent donc être les plus précis possible et mentionner le programme indicatif de la modulation du temps de travail pour chacun des services ou ateliers, et le cas échéant, les calendriers individualisés d'activité des salariés.

M. Alain Gournac, rapporteur.  - Nous nous efforçons d'alléger le code du travail et de le rendre plus synthétique. Nous sommes donc défavorables à cette précision qui n'enrichit en rien le texte.

L'amendement n°97, repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°270, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC.

Après le quatrième alinéa (3°) du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 3122-2 du code du travail, insérer cinq alinéas ainsi rédigés :

« 4° Le programme indicatif de la répartition de la durée du travail ;

« 5° Les modalités de recours au travail temporaire ;

« 6° Les conditions de recours au chômage partiel pour les heures qui ne sont pas prises en compte dans la modulation ;

« 7° Le droit à rémunération et à repos compensateur des salariés n'ayant pas travaillé pendant la totalité de la période de modulation et des salariés dont le contrat de travail a été rompu au cours de cette même période ;

« 8° Les données économiques et sociales justifiant le recours à la modulation

M. Robert Bret.  - L'article 18 tend à faciliter le recours au travail en continu et au travail annualisé. Cette extension est-elle demandée par le monde de l'entreprise, et singulièrement par les PME ? Dans les petites entreprises -qui sont encore aujourd'hui l'essentiel des entreprises immatriculées- ce recours est limité, voire inexistant. Les horaires atypiques sont essentiellement pratiqués dans certains secteurs et dans les plus grandes entreprises, notamment industrielles. La mesure proposée créera un nouvel avantage comparatif pour les entreprises les plus importantes, au détriment des PME.

Votre loi n'impose plus rien, elle sacrifie la santé des salariés sur l'autel de la seule rentabilité du capital. Notre amendement offre quelques garanties aux salariés quant aux conditions d'application de cette modulation.

M. Alain Gournac, rapporteur.  - Avis défavorable : nous souhaitons laisser toute leur liberté aux négociateurs.

L'amendement n°270, repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°45, présenté par M. Gournac, au nom de la commission.

Après le quatrième alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 3122-2 du code du travail, insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsque l'accord s'applique aux salariés à temps partiel, il prévoit les modalités de communication et de modification de la répartition de la durée et des horaires de travail.

M. Alain Gournac, rapporteur.  - Précision, s'agissant du temps partiel.

L'amendement n°45, accepté par le Gouvernement, est adopté.

M. le président.  - Amendement n°169, présenté par MM. Desessard et Muller et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet.

Dans l'avant-dernier alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 3122-2 du code du travail, remplacer les mots :

d'entreprise ou d'établissement ou, à défaut, d'une convention ou d'un accord de branche

par les mots :

de branche étendu ou, à défaut, d'un accord collectif d'entreprise ou d'établissement

M. Jacques Muller.  - Il a été défendu avec le n°168.

M. le président.  - Amendement n°98, présenté par M. Godefroy et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Dans l'avant-dernier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 3122-2 du code du travail, supprimer les mots :

, à défaut,

M. Jean-Pierre Godefroy.  - Nous redonnons leur place aux accords de branche, qui sont les régulateurs de la négociation sociale, d'autant plus importants en période de difficultés économiques. L'accord de branche, c'est une référence qui permet de régler les différends au sein des entreprises. En inversant la hiérarchie des normes, vous ouvrez la voie à la loi de la jungle, aux accords de gré à gré. Votre collègue de l'éducation nationale supprime l'école le samedi matin : comment concilier cette libération des enfants avec des rythmes de travail fluctuants et imprévisibles pour leurs parents ? Comment ces derniers pourront-ils programmer les activités de leurs enfants sur l'année ? Vous détruisez la vie familiale des gens ! Les accords de branche sont la meilleure solution et si, comme l'a dit M. Raffarin, ils ont été difficiles à conclure, il appartenait au Gouvernement de reprendre la main.

M. Alain Gournac, rapporteur.  - Avis défavorable au n°169 et au n°98 : nous souhaitons donner la priorité aux accords d'entreprise.

Les amendements n°s169 et 98, repoussés par le Gouvernement, ne sont pas adoptés.

M. le président.  - Amendement n°170, présenté par MM. Desessard et Muller et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet.

Compléter l'avant-dernier alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 3122-2 du code du travail par une phrase ainsi rédigée :

En cas de réduction de ce délai, des contreparties au bénéfice du salarié sont prévues dans la convention ou l'accord.

M. Jacques Muller.  - La contrepartie prévue en cas de réduction du délai de changement d'horaire a disparu. Nous la rétablissons en reprenant une disposition de l'actuel article L. 3122-14 du code du travail. Une modification d'horaire a toujours des conséquences sur la vie privée, surtout lorsqu'elle intervient à la dernière minute. Les salariés ont des enfants à faire garder ou à chercher à l'école. Une contrepartie est tout à fait justifiée. Les femmes avec enfants à charge seront encore une fois les plus pénalisées. Votre loi fait régresser les droits des femmes.

M. Alain Gournac, rapporteur.  - Il faut faire confiance aux partenaires sociaux.

Ces contreparties seront négociées.

M. Xavier Bertrand, ministre.  - Même avis.

M. Jean-Pierre Godefroy.  - Quelle sera la situation des femmes élevant seules leurs enfants lorsque des discussions de gré à gré seront engagées dans les entreprises ?

M. Xavier Bertrand, ministre.  - Il n'y aura pas de discussions de gré à gré !

M. Jean-Pierre Godefroy.  - Comment les salariés pourront-ils s'organiser ? Vous désarticulez leur vie privée au nom de la liberté du travail, qui s'inscrit dans les rapports de force entre salariés et employeurs. En fait, vous instituez la liberté de faire travailler ceux qui ne le veulent pas !

Nous parlons parfois de la famille, mais elle est absente de notre débat.

M. Guy Fischer.  - La réduction du délai de prévenance serait source de difficultés pour tous les salariés, mais surtout pour les femmes qui élèvent seules leurs enfants. Pour avoir représenté un canton où vivent nombre de familles monoparentales, je sais que la garde des enfants est source de grandes difficultés.

Ainsi, ne pas reprendre les contreparties qui existent dans les textes actuels revient à gêner le travail des femmes dans les entreprises. Notre collègue Martine Billard l'a dit et répété. La majorité a fait voter une loi sur l'égalité salariale, mais, comme pour l'emploi des jeunes et des seniors, cet objectif affiché par le Gouvernement est mis à mal par ce texte.

Mme Marie-Thérèse Hermange.  - Quel bonheur d'entendre M. Godefroy défendre activement la politique familiale ! Avec Mme Rozier, nous disions mezza voce notre joie de constater que son point de vue rejoignait le nôtre à ce sujet. J'y vois l'augure de convergences à venir lorsque nous examinerons les modes de garde ! (Applaudissements à droite ; protestations à gauche)

M. Jean-Pierre Godefroy.  - C'est aujourd'hui qu'il faut agir !

M. Jean-Luc Mélenchon.  - Madame, vous vous méprenez, car nous divergeons totalement : nous voulons protéger la famille, vous votez contre. Pourquoi attendre, alors que vous montez en ligne énergiquement sur nombre de sujets ? Il s'agit aujourd'hui de défendre de pauvres diables. (Mme Marie-Thérèse Hermange et Mme Janine Rozier rient.) Votre vote d'aujourd'hui vous éloignera de vos convictions !

L'amendement n°170 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°171, présenté par MM. Desessard et Muller et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet.

Supprimer le dernier alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 3122-2 du code du travail.

M. Jacques Muller.  - La rédaction de l'Assemblée nationale allège considérablement l'objet obligatoire de l'accord collectif, qui pourra donc ne pas répartir la durée du travail, alors qu'un programme indicatif annuel est actuellement exigé.

Un décret ne peut fixer ce qui relève du seul accord collectif, a fortiori lorsqu'aucune limite temporelle n'est imposée à la répartition des horaires de travail par voie réglementaire sur plus d'une semaine.

Le préambule de la Constitution de 1946 affirme que tout salarié participe, par l'intermédiaire de ses délégués, à la détermination collective des conditions de travail. En outre, l'article L. 131-1 du code du travail proclame le droit des salariés à la négociation collective de leurs conditions de travail et de leurs garanties sociales. L'État n'a donc pas le monopole dans l'élaboration de l'ordre public social.

Ne rayez pas d'un trait les nombreux acquis de la négociation collective, déjà malmenés par ce texte !

M. le président.  - Amendement identique n°271, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC.

Mme Annie David.  - Les modalités de la répartition de la durée du travail sur plus d'une semaine ne relèvent pas du domaine réglementaire.

Cet article du projet de loi favorise la modulation des horaires de travail, allant jusqu'à leur annualisation. L'article L. 3122-2 du code du travail dispose qu'à défaut d'accord collectif, un décret fixe les modalités présidant à la répartition du temps de travail sur plus d'une semaine. Mais qui tiendra la plume du ministre ? Les organisations syndicales représentatives des salariés -dont vous dites respecter la responsabilité et la légitimité- ou les cercles les plus fermés du patronat, qui inspirent depuis plus de quinze ans la législation du travail version UMP ?

A vrai dire, la proposition faite est contradictoire : elle affirme la nécessité du dialogue social, mais introduit le juge de paix réglementaire au détour d'un alinéa. Au demeurant, pourquoi la modulation relèverait-elle du domaine réglementaire ? Craindrait-on qu'une controverse législative ne vienne contrecarrer une flexibilité débridée ?

M. Alain Gournac, rapporteur.  - Le décret mentionné à l'article 18 est indispensable pour pallier l'absence d'un accord.

M. le ministre pourrait peut-être nous éclairer sur son contenu.

M. Xavier Bertrand, ministre.  - Le décret proposera des modalités applicables à une durée de quelques semaines. L'accès direct à l'annualisation, sans négociation, est un fantasme, car la loi s'appliquera en l'absence d'accord collectif.

Les amendements identiques n°s171 et 271 ne sont pas adoptés.

M. le président.  - Amendement n°99, présenté par M. Godefroy et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Supprimer le texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 3122-3 du code du travail.

Mme Annie Jarraud-Vergnolle.  - La régression sociale imposée aux salariés et à leur famille est de nouveau à l'oeuvre, puisque l'employeur pourra imposer unilatéralement le temps de travail. C'est inacceptable !

La bonne marche de l'entreprise nécessite au demeurant que la subordination du salarié soit limitée. Comment s'investir dans son travail lorsque son rythme de vie, donc celui de sa famille, est sans cesse modifié ? L'explosion d'existences aux rythmes désynchronisés ne sera-t-elle pas source de conflits supplémentaires ? La concurrence entre salariés détériorera le climat au sein des entreprises et débouchera sur le moins-disant social, accompagné de moindres performances.

M. le président.  - Amendement identique n°272, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC.

Supprimer le texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 3122-3 du code du travail.

Mme Annie David.  - Cet intéressant article du projet de loi montre l'extrême confiance que ses auteurs éprouvent en réalité pour la négociation collective, puisque l'article L. 3122-3 du code permet de déroger à l'article L. 3122-2, si bien que l'employeur pourra répartir le temps de travail sur plusieurs semaines malgré l'absence d'accord collectif.

Ainsi, la régression sociale représentée par l'article L. 3122-2 à peine votée, tout encadrement au pouvoir du chef d'entreprise est levé par l'article L. 3122-3 !

M. Xavier Bertrand, ministre.  - Tout cela est faux ! Restez longtemps dans l'opposition !

Mme Annie David.  - Si nous n'avons rien compris, expliquez en quoi notre interprétation est inexacte.

M. Xavier Bertrand, ministre.  - Mais vous avez parfaitement compris !

Mme Annie David.  - En vertu de cet alinéa, l'employeur ne sera plus tenu de consulter le comité d'entreprise pour organiser du temps de travail sur plusieurs semaines !

M. Alain Gournac, rapporteur.  - C'est déjà prévu par le code du travail !

Mme Annie David.  - Dites-nous donc dans quel article du code il est prévu que l'employeur devra consulter le comité d'entreprise !

M. le président.  - Amendement n°273, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC.

Rédiger comme suit le texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 3122-3 du code du travail :

« Art. L. 3122-3. - Dans les entreprises qui fonctionnent en continu, l'organisation du temps de travail peut être organisée sur plusieurs semaines si la proposition formulée par l'employeur emporte l'approbation du comité d'entreprise.

M. Guy Fischer.  - Il s'agit d'un amendement de repli, qui vise à donner du sens à la démocratie sociale que vous appelez de vos voeux. Il est indispensable que l'organisation du temps de travail relève de la négociation collective. Toute la première partie du projet de loi a pour objectif affiché de légitimer l'action syndicale ; mais la seconde partie est un véritable coup de poignard dans le dos des syndicats, qui montre dans quel mépris vous les tenez. Rien ne justifie en 2008 que les salariés se voient imposer des conditions de travail d'un autre temps ! J'ai vu ce qu'il en était des 40 heures chez Bosch ! En déréglementant les relations du travail, vous démolissez tout l'édifice du droit social édifié au cours du siècle dernier.

J'ai rencontré dimanche, sur le marché de Vénissieux-centre, un délégué syndical de chez Bosch, qui devait participer cette semaine à une négociation sur les conventions de forfait-jours pour les cadres auprès des instances européennes de Bosch. Il m'a dit que, jusqu'à présent, les conventions prévoyaient 212 jours de travail. Mais vous tirez argument du fait que la limite actuelle est de 218 jours pour permettre aux chefs d'entreprise d'aller jusqu'à 235 jours ! Vous ouvrez ainsi la voie aux pires abus !

M. Alain Gournac, rapporteur.  - Avis défavorable aux amendements de suppression. Il n'y a pas de changement dans le code du travail : l'employeur peut déjà décider seul de mettre en place un travail par cycles dans les entreprises qui fonctionnent en continu.

Avis défavorable à l'amendement n°273 : cette disposition n'existe pas actuellement dans le code du travail. N'imposons pas de contraintes nouvelles aux entreprises !

M. Xavier Bertrand, ministre.  - Avis défavorable à tous les amendements. Si vous vouliez vraiment débattre, madame David, vous n'asséneriez pas autant de contrevérités ! (Protestations sur les bancs CRC) Vous connaissez bien le droit du travail, vous en êtes même une spécialiste.

M. Guy Fischer.  - Une excellente spécialiste !

M. Xavier Bertrand, ministre.  - Vous savez donc parfaitement qu'à l'heure actuelle, le chef d'entreprise n'a pas l'obligation de consulter le comité d'entreprise pour organiser le travail sur plusieurs semaines ! Où cette obligation est-elle prévue ? Dites-le nous !

M. Alain Gournac, rapporteur.  - Nulle part !

M. Xavier Bertrand, ministre.  - L'obligation générale d'informer le comité d'entreprise est maintenue, en vertu des articles L. 2323-6, L. 2323-27 et L. 2323-29.

L'amendement n°99 n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°272.

Mme Annie David.  - Il est possible que je sois dans l'erreur mais je pense que non. Vous dites que la rédaction nouvelle de l'alinéa ne change rien. Pourquoi alors le modifier ?

M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales.  - Elle ne change rien pour ce qui est du comité d'entreprise !

Mme Annie David.  - Ce projet de loi supprime une soixantaine d'articles du code du travail. Le rapporteur dit que l'objectif est de simplifier le droit du travail ; en réalité, vous souhaitez supprimer toutes les dispositions assurant une protection aux salariés.

M. Alain Gournac, rapporteur.  - Non : nous voulons supprimer celles qui empêchent le travail.

Mme Annie David.  - Vous permettez que les cadres en forfait-jours travaillent jusqu'à 235 jours...

M. Xavier Bertrand, ministre.  - Vous ne parlez plus de 282 jours !

M. Guy Fischer.  - Ne soyez pas de mauvaise foi, monsieur le ministre !

Mme Annie David.  - Mais aucun accord n'a été signé jusqu'à présent qui prévoie d'aller au-delà de 218 jours !

M. Xavier Bertrand, ministre.  - C'est la réalité que vous refusez de voir !

Mme Annie David.  - Chez Bosch, comme l'a dit M. Fischer, la limite est de 212 jours ; dans l'entreprise où je travaillais, elle était à peu près la même. Les syndicats se soucient de la santé des travailleurs ! Mais vous ne m'écoutez pas...

M. Xavier Bertrand, ministre.  - N'ajoutez pas les procès d'intention aux contrevérités ! (Plusieurs sénateurs UMP marquent leur soutien à M. le ministre)

M. Nicolas About, président de la commission.  - Vous voulez créer de nouvelles contraintes pour les entreprises !

L'amendement n°273 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°274, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC.

Compléter le texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 3122-4 du code du travail par un alinéa ainsi rédigé :

« En cas de rupture du contrat de travail pour motif économique intervenant après ou pendant une période de répartition des horaires, le salarié conserve le supplément de rémunération qu'il a, le cas échéant, perçu par rapport au nombre d'heures effectivement travaillées.

M. Robert Bret.  - Nous souhaitons attirer l'attention sur un nouveau recul du droit du travail prévu par le projet de loi. L'actuel article L. 3122-18 du code du travail prévoit qu'en cas de rupture du contrat de travail pour motif économique intervenant après ou pendant une période de modulation, le salarié conserve le supplément de rémunération qu'il a, le cas échéant, perçu par rapport au nombre d'heures effectivement travaillées. Il nous paraît indispensable que ces dispositions trouvent leur place dans la nouvelle rédaction du code, faute de quoi les salariés seraient confrontés à une forte baisse de leurs ressources et de leur pouvoir d'achat. Il serait paradoxal qu'un gouvernement qui se présente comme le défenseur du pouvoir d'achat rejette cet amendement !

M. Alain Gournac, rapporteur.  - Avis défavorable : si l'accord prévoit un lissage de la rémunération indépendant des cycles de travail, le salarié conservera la totalité de sa rémunération. Nous ne pensons pas qu'il y ait de doute à ce sujet. Qu'en dit M. le ministre ?

M. Xavier Bertrand, ministre.  - Cette disposition est déjà prévue par la jurisprudence. Avis défavorable.

L'amendement n°274 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°275, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC.

Supprimer le texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 3122-5 du code du travail.

Mme Annie David.  - Cet amendement vise à maintenir la rédaction actuelle de l'article L. 3122-5 du code du travail. D'après la nouvelle rédaction qui nous est proposée, les demandes des salariés au sujet des horaires et des rythmes de travail sont expressément soumises à l'approbation de l'employeur. Ce dernier devrait donc arbitrer entre la santé du salarié et la production de l'entreprise. Il est à craindre que le besoin de flexibilité de l'entreprise l'emporte sur celui du salarié. Cela conduirait à une augmentation du nombre des arrêts maladie et des accidents de travail et à une diminution de la productivité. Vous qui vous souciez de la productivité des entreprises, adoptez notre amendement !

M. Alain Gournac, rapporteur.  - Cet alinéa, qui résulte d'un amendement de l'Assemblée nationale, n'a pas de portée normative. Nous sommes réservés sur sa rédaction et nous nous en remettons donc, au sujet de l'amendement présenté par Mme David, à la sagesse du Sénat.

M. Xavier Bertrand, ministre.  - Sagesse. (Les sénateurs CRC manifestent leur surprise et leur satisfaction)

M. Jean-Pierre Fourcade.  - Je le voterai !

L'amendement n°275 est adopté.

M. le président.  - C'est l'unanimité ! (Applaudissements à gauche)

M. le président.  - Amendement n°46, présenté par M. Gournac, au nom de la commission.

Après le texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 3122-5 du code du travail, insérer un article ainsi rédigé :

« Art. L. 3122-6. - Un accord collectif d'entreprise ou d'établissement ou, à défaut, une convention ou un accord de branche peut prévoir que la rémunération mensuelle des salariés des entreprises organisant la variation de la durée de travail hebdomadaire sur tout ou partie de l'année est indépendante de l'horaire réel et est calculée dans les conditions prévues par l'accord.

« Toutefois, lorsque les heures supplémentaires sont accomplies au-delà des limites prévues par l'accord, les rémunérations correspondantes sont payées avec le salaire du mois considéré. »

M. Alain Gournac, rapporteur.  - Cet amendement autorise le lissage de la rémunération quand la durée du travail varie d'un mois sur l'autre. Ce lissage sera prévu par l'accord relatif au temps de travail.

L'amendement n°46, accepté par le Gouvernement, est adopté.

M. le président.  - Amendement n°173, présenté par MM. Desessard et Muller et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet.

Après le texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 3122-5 du code du travail, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

« Art. L. ... - Les absences rémunérées ou indemnisées, les congés et autorisations d'absence auxquels les salariés ont droit en application de stipulations conventionnelles, ainsi que les absences justifiées par l'incapacité résultant de maladie ou d'accident, ne peuvent faire l'objet d'une récupération par le salarié.

« Les absences donnant lieu à récupération sont décomptées en fonction de la durée de travail que le salarié devait accomplir. »

M. Jacques Muller.  - Cet amendement rétablit l'interdiction, supprimée par l'article 18, de faire récupérer au salarié des heures rémunérées d'absences autorisées, par exemple en cas de maladie, d'accident, ou d'exercice des droits syndicaux.

M. Alain Gournac, rapporteur.  - Encore et toujours de la réglementation... L'accord relatif au temps de travail précisera les garanties nécessaires. Avis défavorable.

M. Xavier Bertrand, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°173 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°174, présenté par MM. Desessard et Muller et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet.

Après le texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 3122-5 du code du travail, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

« Art. L. ... - En cas de rupture du contrat de travail pour motif économique intervenant après ou pendant une période de répartition des horaires, le salarié conserve le supplément de rémunération qu'il a, le cas échéant, perçu par rapport au nombre d'heures effectivement travaillées. »

M. Jacques Muller.  - Cet amendement rétablit une disposition du code du travail qu'abroge l'article 18.

M. Alain Gournac, rapporteur.  - Même chose : avis défavorable.

M. Xavier Bertrand, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°174 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°47, présenté par M. Gournac, au nom de la commission.

Après le I de cet article, insérer deux paragraphes ainsi rédigés :

I bis - Le premier alinéa de l'article L. 3123-17 du même code est ainsi modifié :

1° Après les mots : « un même mois » sont insérés les mots : « ou sur la période prévue par un accord collectif conclu sur le fondement de l'article L. 3122-2 » ;

2° Il est complété par les mots : « calculée, le cas échéant, sur la période prévue par un accord collectif conclu sur le fondement de l'article L. 3122-2. »

I ter - Dans l'article L. 3123-19 du même code, après les mots : « mensuelle fixée au contrat de travail » sont insérés les mots : « calculée, le cas échéant, sur la période prévue par un accord collectif conclu sur le fondement de l'article L. 3122-2 ».

M. Alain Gournac, rapporteur.  - Les salariés à temps partiel peuvent être intégrés dans un accord de modulation : si leur durée de travail varie d'une semaine ou d'un mois sur l'autre, le nombre d'heures complémentaires doit être apprécié par rapport à la durée moyenne sur la période considérée.

M. Xavier Bertrand, ministre.  - Excellent amendement, avis favorable.

L'amendement n°47 est adopté.

M. le président.  - Amendement n°286, présenté par M. Gournac, au nom de la commission.

Dans le III de cet article, après les mots :

L. 3123-25 du code du travail

insérer les mots :

ou des articles L. 713-8 et L. 713-14 du code rural

M. Alain Gournac, rapporteur.  - Coordination avec le code rural.

L'amendement n°286, accepté par le Gouvernement, est adopté.

L'article 18, modifié, est adopté.

Articles additionnels

M. le président.  - Amendement n°48 rectifié, présenté par M. Gournac, au nom de la commission.

Après l'article 18, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - L'article L. 713-19 du code rural est ainsi rédigé :

« Art. L. 713-19. - Les dispositions du code du travail s'appliquent aux salariés agricoles, à l'exception des dispositions pour lesquelles le présent livre a prévu des dispositions particulières."

II. - Les articles L. 713-6 à L. 713-12 et L. 713-14 à L. 713-18 du même code sont abrogés.

M. Alain Gournac, rapporteur.  - Coordination avec le code rural.

L'amendement n°48 rectifié, accepté par le Gouvernement, est adopté et devient un article additionnel.

M. le président.  - Amendement n°49, présenté par M. Gournac, au nom de la commission.

Après l'article 18, insérer un article additionnel ainsi rédigé : 

Dans le premier alinéa de l'article L. 3141-3 du code du travail, les mots : « , au cours de l'année de référence, justifie avoir travaillé chez le même employeur pendant un temps équivalent à un minimum d'un mois de travail » sont remplacés par les mots : « justifie avoir travaillé chez le même employeur pendant un temps équivalent à un minimum de dix jours de travail ».

M. Alain Gournac, rapporteur.  - Nous réduisons de un mois à dix jours la durée minimale requise pour ouvrir droit au congé annuel, afin de nous conformer aux exigences européennes.

M. Xavier Bertrand, ministre.  - Cet amendement renforce le droit aux congés payés : avis très favorable.

L'amendement n°49 est adopté, et devient un article additionnel.

Article 19

I. - Les III et IV de l'article 1er de la loi n° 2008-111 du 8 février 2008 pour le pouvoir d'achat s'appliquent, jusqu'au 31 décembre 2009, à la rémunération des jours auxquels les salariés renoncent dans les conditions prévues à l'article L. 3121-42 du code du travail.

II. - Pour l'application des articles 1er, 2 et 4 de la loi n° 2008-111 du 8 février 2008 précitée, les articles L. 3121-45, L. 3121-46, L. 3121-51, L. 3122-6, L. 3122-19 et L. 3152-1 du code du travail s'appliquent, jusqu'au 31 décembre 2009, dans leur rédaction antérieure à la publication de la présente loi.

III. - L'article 81 quater du code général des impôts est ainsi modifié :

1° Le 1° du I est ainsi rédigé :

« 1° Les salaires versés aux salariés au titre des heures supplémentaires de travail définies à l'article L. 3121-11 du code du travail et au premier alinéa de l'article L. 713-6 du code rural, des heures choisies mentionnées à l'article L. 713-11-1 du même code, des heures considérées comme des heures supplémentaires en application du cinquième alinéa de l'article L. 713-8 du même code et, pour les salariés relevant de conventions de forfait annuel en heures prévues à l'article L. 3121-46 du code du travail, des heures effectuées au-delà de 1 607 heures, ainsi que des heures effectuées en application du troisième alinéa de l'article L. 3123-7 du même code. Pour les salariés relevant du dernier alinéa de l'article L. 713-15 du code rural, sont exonérés les salaires versés au titre des heures effectuées au-delà de la limite maximale hebdomadaire fixée par la convention ou l'accord collectif et, à l'exclusion de ces dernières, au titre des heures effectuées au-delà de 1 607 heures. Sont exonérés les salaires versés au titre des heures supplémentaires mentionnées à l'article L. 3122-4 du code du travail à l'exception des heures effectuées entre 1 607 heures et la durée annuelle fixée par l'accord lorsqu'elle lui est inférieure.

« L'exonération mentionnée au premier alinéa est également applicable à la majoration de salaire versée, dans le cadre des conventions de forfait annuel en jours, en contrepartie de la renonciation par les salariés, au-delà du plafond de deux cent dix-huit jours mentionné à l'article L. 3121-41 du code du travail, à des jours de repos dans les conditions prévues à l'article L. 3121-42 du même code ; »

2° Dans le dernier alinéa du b du II, la référence : « au premier alinéa de l'article L. 3121-42 » est remplacée par la référence : « à l'article L. 3121-46 » ;

3° Dans le dernier alinéa du III :

a) Les mots : « durée maximale hebdomadaire mentionnée au 1° du II de l'article L. 3122-10 » sont remplacés par les mots : « limite haute hebdomadaire mentionnée à l'article L. 3122-4 » ;

b) Les mots : « ou du plafond mentionné au 2° de l'article L. 3122-19 du code du travail » sont supprimés.

IV. - Pour les entreprises n'ayant pas conclu de nouvel accord sur les modalités d'organisation du temps de travail postérieurement à l'entrée en vigueur de la présente loi, l'article 81 quater du code général des impôts s'applique dans sa rédaction antérieure à la date de la publication de la présente loi.

Il en est de même jusqu'au 31 décembre 2009 pour les entreprises n'ayant pas conclu de nouvel accord sur le contingent annuel d'heures supplémentaires.

M. le président.  - Amendement n°100, présenté par M. Godefroy et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Supprimer cet article.

Mme Christiane Demontès.  - Pour la droite, point de salut hors de l'exonération de cotisations sociales et fiscales : cette année, ce sont près de 41 milliards qui feront défaut aux pouvoirs publics !

M. Guy Fischer.  - Au moins !

Mme Christiane Demontès.  - Bien que la Cour des comptes ait, à plusieurs reprises, mis en doute l'efficacité de cette politique, la droite reste fidèle à son idéologie : elle affaiblit sciemment la puissance publique et confie au privé des secteurs de plus en plus importants, notamment en matière de protection sociale.

L'article 19 reprend les exonérations fiscales et sociales prévues dans la loi Tepa et la loi relative au pouvoir d'achat : monétisation des repos compensateurs, renonciation aux jours de repos pour les salariés au forfait jour, inscription des heures supplémentaires dans le cadre de la modulation... Au reste, quelques mois après l'adoption enthousiaste de la loi Tepa, le Premier ministre déclarait que la France était en faillite, et le Président de la République que les caisses étaient vides !

La diminution incessante du taux de majoration des heures supplémentaires ne favorisera pas l'embauche, notamment des jeunes et des seniors. Votre politique généralise la précarité, anéantit des pans entiers de notre droit social, mais se caractérise également par son manque de cohérence ! Compte tenu de l'environnement économique, mieux vaudrait s'abstenir d'aggraver encore la situation des finances publiques.

M. le président.  - Amendement identique n°276, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC.

Mme Annie David.  - L'article 19 étend l'application de l'article premier de la loi du 8 février 2008, faussement intitulée « loi pour le pouvoir d'achat ». A l'époque, nous jugions inacceptable d'inciter les salariés à monnayer leurs repos compensateurs. Décidément, lorsqu'il s'agit de s'attaquer aux droits des salariés, le Gouvernement est constant !

Comment justifier que l'on exonère les revenus du travail de l'impôt sur le revenu, quand, aux dires de l'Élysée, les caisses sont vides ? Cette exonération ne répond pas aux attentes des salariés, quoi qu'en dise le ministre : les Français ne demandent pas la multiplication des heures supplémentaires, mais un salaire décent ! Avec cette disposition, vous fermez la porte à la tenue d'un « Grenelle des salaires », réclamée par de nombreuses organisations syndicales. Une meilleure prise en compte du travail passe pourtant par une hausse des salaires !

M. le président.  - Amendement n°50, présenté par M. Gournac, au nom de la commission.

I.- Dans le II de cet article, remplacer les mots :

articles 1er, 2 et 4

par les mots :

articles 1er et 4

II. - Compléter le même II par un alinéa ainsi rédigé :

Pour l'application de l'article 2 de la loi n° 2008-111 du 8 février 2008 précitée, les mêmes articles du code du travail s'appliquent jusqu'au 31 décembre 2010 dans leur rédaction antérieure à la publication de la présente loi.

M. Alain Gournac, rapporteur.  - Cet amendement permet l'application jusqu'au 31 décembre 2010 de l'article 2 de la loi pour le pouvoir d'achat, qui autorise le versement de jours de RTT dans une caisse commune afin de financer le départ d'un salarié pour une action humanitaire ou caritative.

M. le président.  - Amendement n°51, présenté par M. Gournac, au nom de la commission.

I. - Dans la première phrase du deuxième alinéa du 1° du III de cet article, supprimer les mots :

et au premier alinéa de l'article L. 713-6 du code rural, des heures choisies mentionnées à l'article L. 713-11-1 du même code, des heures considérées comme des heures supplémentaires en application du cinquième alinéa de l'article L. 713-8 du même code

II. - Supprimer la deuxième phrase du même alinéa.

III. - Rédiger ainsi le a) du 3° du III de cet article :

a) les mots : « durée maximale hebdomadaire mentionnée au 1° du II de l'article L. 3122-10 du code du travail et au dernier alinéa de l'article L. 713-15 du code rural » sont remplacés par les mots : « limite haute hebdomadaire mentionnée à l'article L. 3122-4 du code du travail ».

M. Alain Gournac, rapporteur.  - Coordination avec le code rural.

M. le président.  - Amendement n°52, présenté par M. Gournac, au nom de la commission.

I. - Dans la première phrase du deuxième alinéa du 1° du III de cet article, remplacer la référence :

L. 3121-46

par la référence :

L. 3121-42

II. - Dans le troisième alinéa du 1° du même III, remplacer la référence :

L. 3121-41

par la référence :

L. 3121-44

et remplacer la référence :

L. 3121-42

par la référence :

L. 3121-45

M. Alain Gournac, rapporteur.  - Coordination avec l'amendement réécrivant l'article 17.

M. le président.  - Amendement n°101, présenté par M. Godefroy et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Après le deuxième alinéa du 1° du III de cet article, insérer un alinéa ainsi rédigé :

« L'exonération mentionnée au premier alinéa n'est ouverte que si, dans l'entreprise ou l'établissement, aucun salarié à temps partiel n'a fait connaître le souhait d'effectuer des heures complémentaires ou d'obtenir un contrat de travail à temps complet.

Mme Christiane Demontès.  - Cet amendement vise à introduire un peu de cohérence dans la politique de l'emploi. Il ne faut pas confondre revalorisation du travail et précarisation. Plus de 14 % de la population active est composée de salariés à temps partiel. Féminin à 80 %, très souvent subi, le temps partiel est l'apanage des salariés les moins qualifiés, et explique l'explosion du nombre de travailleurs pauvres. Afin de lutter contre cette précarité, nous proposons de conditionner les exonérations au fait qu'aucun salarié à temps partiel n'ait fait connaître son désir d'effectuer des heures complémentaires ou d'obtenir un contrat de travail à temps complet. II s'agit là de renouer avec la justice et la solidarité, de tourner le dos à votre logique de régression sociale !

M. Alain Gournac, rapporteur.  - Défavorable aux amendements de suppression n°s100 et 276. L'amendement n°101 est très généreux, mais impossible à mettre en oeuvre. (Exclamations à gauche)

Il est impossible d'interroger tous les salariés travaillant à temps partiel avant de mettre en place des heures supplémentaires.

Mme Christiane Demontès.  - Pourquoi ? Et les accords d'entreprise ?

M. Alain Gournac, rapporteur.  - La décision serait trop longue à prendre. Avis défavorable. (Protestations à gauche)

M. Xavier Bertrand, ministre.  - Avis favorable aux amendements nos50, 51 et 52. Avis défavorable aux amendements nos100, 276 et 101.

Mme Christiane Demontès.  - Merci pour les explications !

M. Jacques Muller.  - La généralisation des exonérations d'impôts pour les heures supplémentaires est contraire à une politique efficace de lutte contre le chômage. Il est d'autant plus nécessaire d'enrichir la croissance que la hausse du prix du pétrole la freine durablement. Or, au lieu d'aménager et de réduire le temps de travail, vous préférez multiplier les emplois précaires. Au lieu de créer des emplois, vous encouragez les heures supplémentaires pour les salariés à temps plein. Le recours non encadré aux heures supplémentaires s'accompagnera d'une dégradation des conditions de travail, de la vie familiale et sociale. Et n'oublions pas que nous sommes les champions d'Europe de la consommation d'anxiolytiques...

Les conséquences sur les finances de l'État, menacées par le couperet du déficit budgétaire à 3 % du PIB, seront catastrophiques : après avoir soutenu le réaménagement et la réduction de la durée du travail, on finance aujourd'hui le dispositif inverse.

M. Guy Fischer.  - Monsieur le ministre, le recours massif aux heures supplémentaire va à l'encontre d'une politique créatrice d'emplois. La majoration de salaire de 10 % et les exonérations d'impôts feront que l'embauche d'un nouveau salarié sera plus coûteuse que le règlement d'heures supplémentaires.

Christiane Demontès nous a rappelé que les exonérations de cotisations coûtent 40 milliards d'euros. Selon un rapport de la commission des affaires sociales, en comptant les aides des collectivités territoriales ce montant serait plutôt de 70 milliards. Nous avons assisté récemment à la réunion de lancement du revenu de solidarité active (RSA), présenté par Martin Hirsch : les sommes auparavant affectées au RMI seront affectées à l'allocation de parent isolé (API) et une partie de la prime pour l'emploi sera consacrée au RSA. Le financement n'étant pas au rendez-vous, l'expérimentation sera sans doute reportée en 2010.

Et votre politique fera exploser l'emploi précaire.

M. Robert Bret.  - Votre principal objectif n'est pas d'augmenter le taux d'emploi mais d'accroître la durée du travail des salariés à temps plein. La prospérité est davantage due à une hausse de la productivité. Ainsi, en Turquie, en Roumanie, en Pologne, le temps de travail est supérieur au nôtre mais ces pays sont moins développés que la France, les travailleurs moins protégés et le taux d'emploi inférieur.

Ce dispositif satisfera les travailleurs à temps plein et les employeurs mais pénalisera les chômeurs et les salariés précaires. Ceux qui en ont vraiment besoin ne pourront travailler plus pour gagner plus. (Applaudissements à gauche)

Les amendements identiques nos100 et 276 ne sont pas adoptés.

Les amendements nos50, 51 et 52 sont successivement adoptés.

L'amendement n°101 n'est pas adopté.

L'article 19, modifié, est adopté.

Article 20

I. - Dans l'article L. 3121-25 du code du travail, les mots : « de remplacement » sont remplacés par le mot : « équivalent ».

II. - Dans le troisième alinéa de l'article L. 3123-7 du même code, les mots : « au repos compensateur obligatoire » sont remplacés par les mots : « à la contrepartie obligatoire en repos ».

III. - Dans le 1° de l'article L. 3123-14 du même code, les mots : « et les salariés relevant d'un accord collectif de travail conclu en application des articles L. 3123-25 et suivants » sont supprimés.

IV. - Dans le 2° de l'article L. 3133-8 du même code, les mots : « réduction du temps de travail tel que prévu aux articles L. 3122-6 et L. 3122-19 » sont remplacés par les mots : « repos accordé au titre de l'accord collectif conclu en application de l'article L. 3122-2 ».

V. - Dans le 2° de l'article L. 3133-10 du même code, la référence : « L. 3121-45 » est remplacée par la référence : « L. 3121-41 ».

VI. - Dans la dernière phrase de l'article L. 3133-11 et la dernière phrase du premier alinéa de l'article L. 3133-12 du même code, les mots : « repos compensateur obligatoire » sont remplacés par les mots : « contrepartie obligatoire en repos ».

VII. - L'article L. 3141-5 du même code est ainsi modifié :

1° Dans le 3°, les mots : « repos compensateurs obligatoires prévus par l'article L. 3121-26 » sont remplacés par les mots : « contreparties obligatoires en repos prévues par l'article L. 3121-11 » ;

2° Dans le 4°, les mots : « acquis au titre de la réduction du temps de travail » sont remplacés par les mots : « accordés au titre de l'accord collectif conclu en application de l'article L. 3122-2 ».

VIII. - Dans le deuxième alinéa de l'article L. 3141-11 du même code, les mots : « des articles L. 3122-9, relatif à la modulation du temps de travail, ou L. 3122-19, relatif à l'attribution de jours de repos dans le cadre de l'année » sont remplacés par la référence : « de l'article L. 3122-2 ».

IX. - Dans la première phrase du 4° de l'article L. 3141-21 du même code, les références : « L. 3121-45, L. 3122-9, L. 3122-19, L. 3123-1 et L. 3123-25 » sont remplacées par les références : « L. 3121-41, L. 3122-2 et L. 3123-1 ».

X. - Dans le 2° du I de l'article L. 3141-22 du même code, les mots : « au repos compensateur obligatoire prévues à l'article L. 3121-28 » sont remplacés par les mots : « à la contrepartie obligatoire en repos prévues à l'article L. 3121-11 ».

XI. - L'article L. 3151-2 du même code est abrogé.

XI bis. - L'intitulé du chapitre II du titre V du livre Ier de la troisième partie du même code est ainsi rédigé : « Mise en place ».

XI ter. - L'article L. 3152-1 du même code est ainsi rédigé :

« Art. L. 3152-1. - Une convention ou un accord d'entreprise ou d'établissement ou, à défaut, une convention ou un accord de branche définit les modalités de fonctionnement du compte épargne-temps, notamment les conditions et limites dans lesquelles sont effectués, à l'initiative du salarié ou, pour les heures accomplies au-delà de la durée collective, à l'initiative de l'employeur :

« 1° L'alimentation, à l'exclusion du congé annuel de vingt-quatre jours ouvrables, et l'utilisation des droits ;

« 2° La gestion et la liquidation des droits ;

« 3° Le transfert des droits d'un employeur à un autre.»

XI quater. - L'article L. 3152-2 du même code est abrogé. 

XII. - Dans le deuxième alinéa de l'article L. 3171-1 du même code, les mots : « sous forme de cycles ou lorsque la modulation du temps de travail sur tout ou partie de l'année est mise en oeuvre, l'affichage comprend la répartition de la durée du travail dans le cycle ou le programme de modulation » sont remplacés par les mots : « dans les conditions fixées par l'article L. 3122-2, l'affichage comprend la répartition de la durée du travail dans le cadre de cette organisation ».

XIII. - Dans le 2° de l'article L. 6321-4 du même code, les mots : « repos compensateur obligatoire » sont remplacés par les mots : « contrepartie obligatoire en repos ».

M. le président.  - Amendement n°102, présenté par M. Godefroy et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Supprimer cet article.

M. Jean-Pierre Godefroy.  - Il est défendu.

M. le président.  - Amendement identique n°277, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC.

M. Guy Fischer.  - Cet article modifie treize paragraphes du code du travail afin de tirer les conséquences des dispositions adoptés à l'article 16, telle la transformation du repos compensateur équivalent, ou obligatoire, en « contrepartie obligatoire en repos ». Étant opposés à l'article 16, nous ne pouvons que souhaiter également la suppression cet article.

M. le président.  - Amendement n°53, présenté par M. Gournac, au nom de la commission.

Avant le I de cet article, insérer un paragraphe ainsi rédigé :

... - A la fin du second alinéa de l'article L. 2323-29 du code du travail, les mots : « L. 3123-25 relatif au temps partiel annualisé » sont remplacés par les mots : « L. 3122-2 lorsqu'ils s'appliquent à des salariés à temps partiel »

M. Alain Gournac, rapporteur.  - Amendement de coordination.

M. le président.  - Amendement n°54, présenté par M. Gournac, au nom de la commission.

Rédiger comme suit le III de cet article :

III. - Dans le 1° de l'article L. 3123-14 du même code, les mots : « des articles L. 3123-25 et suivants » sont remplacés par les mots : « de l'article L. 3122-2 ».

M. Alain Gournac, rapporteur.  - Amendement de coordination.

M. Xavier Bertrand, ministre.  - Très bon amendement !

M. le président.  - Amendement n°55, présenté par M. Gournac, au nom de la commission.

Après le III de cet article, insérer un paragraphe ainsi rédigé :

III bis. - Dans le premier alinéa de l'article L. 3123-15 du même code, après les mots : « quinze semaines » sont insérés les mots : « ou sur la période prévue par un accord collectif conclu sur le fondement de l'article L. 3122-2 si elle est supérieure ».

M. Alain Gournac, rapporteur.  - Amendement de coordination.

M. le président.  - Amendement n°56, présenté par M. Gournac, au nom de la commission.

Dans le IX de cet article, remplacer la référence :

L. 3121-41

par la référence :

L. 3121-44

M. Alain Gournac, rapporteur.  - Amendement de coordination.

M. le président.  - Amendement n°57, présenté par M. Gournac, au nom de la commission.

Supprimer les XI à XI quater de cet article.

M. Alain Gournac, rapporteur.  - Les dispositions concernant le compte épargne temps ont davantage leur place à l'article 21.

M. le président.  - Amendement n°278, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC.

Supprimer le XI ter de cet article.

Mme Annie David.  - Cet amendement est de cohérence avec l'amendement n°276 sur l'article 19. Nous souhaitons supprimer la disposition qui prévoit qu'un accord d'entreprise, d'établissement ou de branche définit les modalités d'abondement des comptes épargne temps. Ce mécanisme accessoire empêche la tenue d'un réel débat sur les salaires. Notre amendement n°279, sur l'article 21, relève de la même logique pour les comptes épargne retraites.

M. Alain Gournac, rapporteur.  - Avis défavorable aux amendements nos102 et 277. L'amendement n°278 est satisfait par l'amendement identique n°57 de la commission.

M. Xavier Bertrand, ministre.  - Avis favorable aux amendements nos53, 54, 55, 56 et 57 de la commission. Avis défavorable aux amendements nos102 et 277, l'amendement n°278 pouvant être retiré...

Les amendements identiques nos102 et 277 ne sont pas adoptés.

Les amendements nos53, 54, 55, 56 et 57 sont successivement adoptés.

Mme Annie David.  - Contrairement à la commission, nous ne souhaitons nullement, par l'amendement n°278, réintroduire ces dispositions dans une autre partie du texte.

M. Alain Gournac, rapporteur.  - Elles y ont mieux leur place !

L'amendement n°278 devient sans objet.

L'article 20, modifié, est adopté.

Article 21

I. - Dans l'intitulé du chapitre Ier du titre V du livre Ier de la troisième partie du code du travail, les mots : « et mise en place » sont supprimés.

II. - Dans l'article L. 3151-1 du même code, après les mots : «  à congé rémunéré », sont insérés les mots : « ou à formation professionnelle ».

III. - L'article L. 3153-1 du même code est ainsi rédigé :

« Art. L. 3153-1. - La convention ou l'accord collectif ne peut autoriser l'utilisation sous forme de complément de rémunération des droits versés sur le compte épargne-temps au titre du congé annuel que pour ceux de ces droits correspondant à des jours excédant la durée de trente jours fixée par l'article L. 3141-3.

« Nonobstant les stipulations de la convention ou de l'accord collectif, le salarié peut, sur sa demande et en accord avec l'employeur, utiliser les droits affectés sur le compte pour compléter sa rémunération. »

IV. - Les articles L. 3153-2 et L. 3153-4 du même code sont abrogés.

M. le président.  - Amendement n°103, présenté par M. Godefroy et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Supprimer cet article.

Mme Annie Jarraud-Vergnolle.  - Cet article tire les conséquences des mesures qui viennent d'être adoptées sur le temps de travail. Comme elles, elles n'ont fait l'objet d'aucune concertation ni négociation avec les partenaires sociaux. Vous supprimez l'accord de branche facultatif au profit du seul accord d'entreprise ou d'établissement pour la mise en place du compte épargne temps (CET). Les accords à la convenance des employeurs risquent donc de se multiplier.

Le texte prévoit également de supprimer la liste des éléments pouvant abonder le CET, seule subsistera la restriction relative aux jours de congé en deçà de 24 jours ouvrables. De même, la liste limitative des usages qui peuvent être faits des droits accumulés disparaît. Seule la cinquième semaine de congé payé ne pourra pas être monétisée.

Toutes les autres formes de congé sont donc, selon vos termes, « libérées », c'est-à-dire qu'elles peuvent être placées dans un CET monétisable.

Enfin, vous pérennisez l'article premier de la loi du 8 février 2008 qui prévoit que le salarié peut, même si l'accord instituant le CET ne prévoit pas cette faculté, utiliser les droits affectés sur son compte pour augmenter sa rémunération. Il pourra donc renoncer à ses droits accumulés sur un CET pour augmenter artificiellement son salaire.

C'est un renversement total de la logique du CET : à l'origine, il permettait d'augmenter le temps disponible du salarié. Désormais, il renforcera indirectement la trésorerie des entreprises en renvoyant à plus tard, par le biais de l'épargne retraite, le paiement des sommes dues par l'employeur. Il s'agit donc, ni plus ni moins, de bloquer les salaires : le chef d'entreprise pourra en effet dire au salarié qui mérite une augmentation qu'il peut utiliser les sommes acquises sur son CET.

Bien entendu, cet argent n'ira pas aux organismes financiers qui gèrent l'épargne retraite. Votre objectif est sans doute de faire croire aux salariés que leur pouvoir d'achat augmente alors qu'ils ne feront qu'avoir recours à leur CET. C'est un nouveau tour de passe-passe, la même méthode que lors du déblocage de la participation : le salarié, encore une fois, en fait seul les frais.

M. le président.  - Amendement n°58, présenté par M. Gournac, au nom de la commission.

Rédiger comme suit cet article :

I. - Dans l'intitulé du chapitre Ier du titre V du livre Ier de la troisième partie du code du travail, les mots : « et mise en place » sont supprimés.

II. - L'article L. 3151-1 du code du travail est complété par les mots : « ou des sommes qu'il y a affectées ».  

III. -  L'article L. 3151-2 du même code est abrogé.

IV. - Le chapitre II du titre V du livre Ier de la troisième partie du même code est ainsi rédigé :

« Chapitre II

« Mise en place 

« Art. L. 3152-1. - Le compte épargne-temps peut être institué par convention ou accord d'entreprise ou d'établissement ou, à défaut, par une convention ou un accord de branche.

« Art. L. 3152-2. - La convention ou l'accord collectif détermine dans quelles conditions et limites le compte épargne-temps peut être alimenté en temps ou en argent à l'initiative du salarié ou, pour les heures accomplies au-delà de la durée collective, à l'initiative de l'employeur. Le congé annuel ne peut être affecté au compte épargne-temps que pour sa durée excédant vingt-quatre jours ouvrables.

« Art. L. 3152-3. -  La convention ou l'accord collectif définit les modalités de gestion du compte épargne-temps et détermine les conditions d'utilisation, de liquidation et de transfert des droits d'un employeur à un autre. »

V. - Les articles L. 3153-1 et L. 3153-2 du même code sont ainsi rédigés :

« Art. L. 3153-1. - Nonobstant les stipulations de la convention ou de l'accord collectif, tout salarié peut, sur sa demande et en accord avec son employeur, utiliser les droits affectés sur le compte épargne-temps pour compléter sa rémunération.

« Art. L. 3153-2. - L'utilisation sous forme de complément de rémunération des droits versés sur le compte épargne-temps au titre du congé annuel n'est autorisée que pour ceux de ces droits correspondant à des jours excédant la durée de trente jours fixée par l'article L. 3141-3. »

VI. - L'article L. 3153-4 du même code est abrogé.

M. Alain Gournac, rapporteur.  - Nous proposons d'intégrer dans cet article les dispositions relatives au compte épargne temps qui ont été insérées dans l'article 20.

Ensuite, nous supprimons la possibilité d'abonder le CET avec des droits à formation et nous précisons, afin de lever toute ambiguïté, que le compte peut être alimenté par des éléments en temps ou en argent.

Notre amendement confirme également que le CET est mis en place par voie d'accord collectif mais en distinguant plus clairement les dispositions relatives à son alimentation et celles relatives à son utilisation et à sa gestion. Enfin, la cinquième semaine de congés payés ne pourra pas être utilisée par le salarié pour compléter sa rémunération.

M. le président.  - Amendement n°279, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC.

Supprimer le second alinéa du texte proposé par le III de cet article pour l'article L. 3153-1 du code du travail.

Mme Annie David.  - Il est défendu.

M. Alain Gournac, rapporteur  - Je suis défavorable aux amendements n°s103 et 279. (On feint de s'en étonner à gauche)

M. Xavier Bertrand, ministre.  - Avis favorable sur l'amendement n°58. (On ironise sur les mêmes bancs) Il ne change rien sur le fond mais il améliore la forme. Je tiens d'ailleurs à saluer le travail du député Pierre Morange sur cette question et je souhaite que le CET rencontre le succès qu'il mérite.

Je suis défavorable aux amendements n°s103 et 279

L'amendement n°103 n'est pas adopté.

L'amendement n°58 est adopté et l'article est ainsi rédigé.

L'amendement n°279 devient sans objet.

Article 22

I. - L'article L. 3153-3 du code du travail est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Les droits utilisés selon les modalités prévues aux alinéas précédents et qui ne sont pas issus d'un abondement en temps ou en argent bénéficient des régimes prévus au 2°-0 quater de l'article 83 du code général des impôts et à l'article L. 242-4-3 du code de la sécurité sociale et dans la limite d'un plafond de dix jours par an. »

II. - Après l'article L. 242-4-2 du code de la sécurité sociale, il est inséré un article L. 242-4-3 ainsi rédigé :

« Art. L. 242-4-3. - La rémunération due en contrepartie des droits constitués par un salarié sur son compte épargne-temps, à l'exception de ceux qui correspondent à un abondement en temps ou en argent de l'employeur, est exonérée des cotisations salariales de sécurité sociale et des cotisations à la charge de l'employeur au titre des assurances sociales et des allocations familiales dès lors qu'elle est utilisée à l'initiative de ce salarié pour alimenter un plan d'épargne pour la retraite collectif prévu aux articles L. 3334-1 à L. 3334-9 et L. 3334-11 à L. 3334-16 du code du travail. »

III. - Après le 2°-0 ter de l'article 83 du code général des impôts, il est inséré un 2°-0 quater ainsi rédigé :

« 2°-0 quater La rémunération due en contrepartie des droits constitués par un salarié sur son compte épargne-temps, à l'exception de ceux qui correspondent à un abondement en temps ou en argent de l'employeur, utilisée à l'initiative de ce dernier pour alimenter un plan d'épargne pour la retraite collectif prévu aux articles L. 3334-1 à L. 3334-9 et L. 3334-11 à L. 3334-16 du code du travail ; ».

M. le président.  - Amendement n°104, présenté par M. Godefroy et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Supprimer cet article.

Mme Gisèle Printz.  - Cet article n'a fait l'objet d'aucune négociation avec les partenaires sociaux mais il a visiblement donné lieu à une étroite concertation avec les organismes financiers gestionnaires de l'épargne retraite. II s'agit ici de réduire la rémunération perçue par le salarié sous prétexte d'une amélioration future, mais lointaine et aléatoire, de sa retraite. Il s'agit donc d'une nouvelle ponction sur les régimes par répartition au bénéfice des régimes par capitalisation.

Les exonérations sur les cotisations salariales et les réductions d'impôt sur le revenu ne seront applicables que si le salarié adhère à un régime à cotisations définies et non pas à prestations définies, ce qui ajoute à l'incertitude pour l'avenir. De plus, l'employeur peut unilatéralement opter pour le régime à cotisations définies. Ces exonérations ne concerneront également que les salariés qui effectuent leurs versements sur un Perco : les sommes devront donc demeurer indisponibles jusqu'à la retraite, sauf en cas d'acquisition d'une résidence principale. II semble d'ailleurs que ce dispositif comporte une faille : si le salarié veut acheter un bien, il a tout intérêt à utiliser son Perco en récupérant son argent défiscalisé. Le Perco, c'est mieux qu'un plan d'épargne logement et le salarié a en plus la satisfaction de ne pas laisser son argent aux mains des marchés financiers dont la capacité de nuisance est avérée.

Nous voterons donc contre cet article qui s'attaque à la retraite par répartition.

M. le président.  - Amendement identique n°280, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC.

Mme Annie David.  - Avec cet article, vous poursuivez l'appauvrissement des organismes sociaux puisque vous proposez d'exclure de l'assiette des cotisations sociales les sommes versées sur les CET. Durant nos débats, de nombreux sénateurs de gauche, mais aussi de droite, ont rappelé le montant astronomique des exonérations de cotisations sociales, mais cela ne vous a visiblement pas ému. Et pourtant, à en croire le Gouvernement, les comptes sociaux sont en rouge, ce dont nous ne doutons pas, et il faudrait demander aux salariés de se serrer la ceinture, soit en acceptant à une baisse considérable des remboursements, soit en allongeant la durée des cotisations pour obtenir une retraite complète. D'ailleurs, M. Van Roekeghem, directeur de l'assurance maladie, a récemment proposé un plan drastique d'économie, avec la suppression du remboursement intégral pour les affections de longue durée, dont nous avions pourtant cru que le Président de la République voulait faire une priorité. Et pourtant, vous poursuivez dans la même voie ! A croire que vous espérez privatiser tout notre système de protection.

M. le président.  - Amendement n°289, présenté par le Gouvernement.

I. - Rédiger comme suit le I de cet article :

I. - L'article L. 3153-3 du code du travail est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Les droits utilisés selon les modalités prévues aux précédents alinéas, qui ne sont pas issus d'un abondement en temps ou en argent de l'employeur, bénéficient dans la limite d'un plafond de dix jours par an de l'exonération prévue à l'article L. 242-4-3 du code de la sécurité sociale et, selon le cas, des régimes prévus au 2° ou au 2°-0 bis de l'article 83 du code général des impôts pour ceux utilisés selon les modalités prévues au premier alinéa ou de l'exonération prévue au b du 18° de l'article 81 du même code pour ceux utilisés selon les modalités prévues au second alinéa. »

II. - Rédiger comme suit le III de cet article :

III. - A. Le 18° de l'article 81 du code général des impôts est ainsi modifié :

1° Les dispositions actuelles constituent un a ;

2° Il est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« b - Les sommes versées par le salarié pour alimenter un plan d'épargne pour le retraite collectif dans les conditions du 3ème alinéa de l'article L. 3153-3 du code du travail. » ;

B. - Le 1° du IV de l'article 1417 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« e) des sommes correspondant aux droits visés au troisième alinéa de l'article L. 3153-3 du code du travail. »

M. Xavier Bertrand, ministre.  - Il convient de préciser le régime fiscal des droits affectés à un CET et utilisés pour alimenter un Perco. Il faut en effet respecter la cohérence du régime fiscal de ce dispositif qui prévoit l'exonération d'impôt des versements effectués par le salarié et non pas leur déduction du revenu imposable.

En outre, nous proposons la prise en compte dans le revenu fiscal de référence du montant des droits affectés à un CET et utilisés pour alimenter un Perco ou un régime de retraite supplémentaire collectif et obligatoire, à l'instar d'autres revenus exonérés ou d'autres cotisations d'épargne retraite déductibles

M. le président.  - Amendement n°59, présenté par M. Gournac, au nom de la commission.

I. - Dans le second alinéa du I de cet article, après les mots :

abondement en temps ou en argent

insérer les mots :

de l'employeur

II. - Dans le même alinéa, remplacer les mots :

et dans la limite

par les mots :

, dans la limite  

III. - Compléter le texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 242-4-3 du code de la sécurité sociale par les mots :

ou pour contribuer au financement de prestations de retraite qui revêtent un caractère collectif et obligatoire déterminé dans le cadre d'une des procédures mentionnées à l'article L. 911-1 du code de la sécurité sociale

IV. - Dans le texte proposé par le III de cet article pour le 2°-0 quater de l'article 83 du code général des impôts, remplacer les mots :

utilisée à l'initiative de ce dernier

par les mots :

dès lors qu'elle est utilisée à l'initiative de ce salarié

V. - Compléter le texte proposé par le III de cet article pour le 2°-0 quater de l'article 83 du code général des impôts par les mots :

ou pour contribuer au financement de prestations de retraite qui revêtent un caractère collectif et obligatoire déterminé dans le cadre d'une des procédures mentionnées à l'article L. 911-1 du code de la sécurité sociale

VI. - Compléter cet article par deux paragraphes ainsi rédigés :

... - La perte de recettes pour les organismes de sécurité sociale résultant de l'extension des exonérations sociales prévue à l'article L. 242-4-3 du code de la sécurité sociale est compensée à due concurrence par l'institution d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

... - La perte de recettes pour l'État résultant de l'extension des exonérations fiscales prévue à l'article 83 du code général des impôts est compensée à due concurrence par l'institution d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

M. Alain Gournac, rapporteur.  - Il convient de préciser que le régime fiscal et social avantageux prévu par cet article s'applique aux droits qui ne sont pas issus d'un abondement de l'employeur.

Ensuite, il faut viser, par cohérence, dans le code de la sécurité sociale et dans le code des impôts, non seulement le Perco mais également les régimes surcomplémentaires de retraite puisque ces deux dispositifs sont mentionnés dans le code du travail.

Enfin, l'avantage fiscal sera dû lorsque les droits accumulés sur le compte épargne temps seront utilisés, à l'initiative du salarié, pour abonder un Perco ou un régime surcomplémentaire.

M. le président.  - Amendement n°191 rectifié bis, présenté par Mmes Procaccia, Rozier, Henneron et M. Cambon.

I. - Compléter le texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 242-4-3 du code de la sécurité sociale par les mots :

ou un contrat mentionné au b du 1 du I de l'article 163 quatervicies du code général des impôts

II. - Compléter cet article par trois paragraphes ainsi rédigés :

... - Le I de l'article 163 quatervicies du code général des impôts est complété par un 3 ainsi rédigé :

« 3. La rémunération due en contrepartie des droits constitués par un salarié sur son compte épargne-temps, à l'exception de ceux qui correspondent à un abondement en temps ou en argent de l'employeur, utilisée à l'initiative de ce dernier pour alimenter un contrat mentionné au b) du 1 du I du présent article est déductible du revenu net global dans les mêmes conditions que les cotisations versées sur ces contrats. »

... - La perte de recettes pour les organismes de sécurité sociale résultant de l'extension des exonérations sociales prévue à l'article L. 242-4-3 du code de la sécurité sociale est compensée à due concurrence par l'institution d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

... - La perte de recettes pour l'État résultant de l'extension des exonérations fiscales prévue à l'article 83 du code général des impôts est compensée à due concurrence par l'institution d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

Mme Catherine Procaccia.  - Il serait préférable que je sous-amende l'amendement du Gouvernement car nous souhaitons que le plan d'épargne retraite entreprises (Pere) qui permet de préparer la retraite conformément à la loi Fillon du 21 août 2003 portant réforme des retraites relève du même dispositif que le Perco afin que les salariés bénéficient des avantages fiscaux identiques.

M. Alain Gournac, rapporteur.  - Avis défavorable sur les amendements n°s104 et 280. La commission n'a pas eu le temps d'examiner l'amendement du Gouvernement (exclamations à gauche) mais, à titre personnel, j'y suis favorable. (On s'en étonne sur les mêmes bancs) Son seul inconvénient serait de faire tomber l'amendement de la commission et c'est pourquoi je souhaite le rectifier pour conserver le III.

M. Xavier Bertrand, ministre.  - Accordé !

Et le Gouvernement lève le gage !

M. Alain Gournac, rapporteur.  - L'amendement n°191 rectifié bis encourage l'épargne retraite mais quel en est le coût ? Sagesse.

M. Xavier Bertrand, ministre.  - Défavorable aux amendements n°s104 et 280, favorable au n°59 rectifié du rapporteur. Je propose à Mme Procaccia de retirer son amendement car nous avons fait le choix de favoriser l'épargne collective et il s'agit ici de PERP et d'épargne individuelle.

L'amendement n°191 rectifié bis est retiré.

Les amendements n°s104 et 280 ne sont pas adoptés.

L'amendement n°289 est adopté.

L'amendement n°59 rectifié est adopté.

L'article 22, modifié, est adopté.

Article 23 

Le chapitre IV du titre V du livre Ier de la troisième partie du code du travail est ainsi rédigé :

« CHAPITRE IV

« Garantie et liquidation des droits

« Art. L. 3154-1. - Les droits acquis dans le cadre du compte épargne-temps sont garantis dans les conditions de l'article L. 3253-8.

« Art. L. 3154-2. - Pour les droits acquis, convertis en unités monétaires, qui excèdent le plus élevé des montants fixés par décret en application de l'article L. 3253-17, la convention ou l'accord d'entreprise ou d'établissement ou, à défaut, la convention ou l'accord de branche établit un dispositif d'assurance ou de garantie.

« A défaut d'accord collectif avant le 8 février 2009, un dispositif de garantie est mis en place par décret.

« Dans l'attente de la mise en place d'un dispositif de garantie, lorsque les droits acquis, convertis en unités monétaires, excèdent le plafond précité, une indemnité correspondant à la conversion monétaire de l'ensemble des droits est versée au salarié.

« Art. L. 3154-3. - A défaut de dispositions conventionnelles prévoyant les conditions de transfert des droits d'un employeur à un autre, le salarié peut :

« 1° Percevoir, en cas de rupture du contrat de travail, une indemnité correspondant à la conversion monétaire de l'ensemble des droits qu'il a acquis ;

« 2° Demander, en accord avec l'employeur, la consignation auprès d'un organisme tiers de l'ensemble des droits, convertis en unités monétaires, qu'il a acquis. Le déblocage des droits consignés se fait au profit du salarié bénéficiaire ou de ses ayants droit dans les conditions fixées par décret. »

M. le président.  - Amendement n°281, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC.

Supprimer cet article.

Mme Annie David.  - Défendu.

M. le président.  - Amendement n°282, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC.

Supprimer le deuxième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 3154-2 du code du travail.

Mme Annie David.  - Cohérence. Vous considérez déjà que la négociation échouera et que le sujet sera tranché par décret !

Les amendements n°s281 et 282, repoussés par la commission et le Gouvernement, ne sont pas adoptés.

L'article 23 est adopté.

Articles additionnels

M. le président.  - Amendement n°188 rectifié, présenté par MM. Dassault et Fourcade.

Après l'article 23, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 241-13 du code de la sécurité sociale est abrogé.

Amendement n°187 rectifié, présenté par MM. Dassault et Fourcade.

Après l'article 23, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :

Dans le troisième alinéa du III de l'article L. 241-13 du code de la sécurité sociale, le pourcentage : « 60 % » est remplacé par les mots : « 40 % à compter du 1er janvier 2009 ».

M. Serge Dassault.  - Les 35 heures sont le plus mauvais coup porté par un gouvernement socialiste à notre économie. Heureusement que l'on y met à présent bon ordre, car non seulement elles n'ont pas réduit le chômage, mais elles ont aggravé les coûts de production, diminué les ventes et les exportations. Ces 35 heures payées 39 ont imposé à l'État une subvention de compensation de plus en plus lourde. Et c'est finalement l'emprunt qui finance des charges de fonctionnement ! En outre, les allègements vont être transférés à la sécurité sociale. Ils augmentent sans cesse ! Pourquoi continuer à s'endetter sans préparer l'avenir mais au contraire en l'hypothéquant ? Mieux vaut supprimer à partir de 2009 la réduction générale des cotisations sociales afin de revenir d'ici 2012 à une situation saine. Mais M. Fourcade vous en dira plus.

M. Jean Desessard.  - Ah ! Le théoricien !

M. Jean-Pierre Fourcade.  - Il n'est pas possible de subir 30 milliards d'allégements par an, sans savoir la part due aux 35 heures et celle liée aux abattements généraux. Au lieu de les reconduire à l'infini, il conviendrait de savoir quels effets ils ont sur l'emploi ; puis d'envisager une décélération en pente douce. M. Dassault propose...

M. Nicolas About, président de la commission.  - Une pente rude ! (Sourires)

M. Jean-Pierre Fourcade.  - Je rappelle que les trois quarts des allègements environ vont au secteur tertiaire, alors qu'ils visaient à lutter contre les délocalisations et fortifier l'industrie.

M. Alain Gournac, rapporteur.  - Exact !

M. Jean-Pierre Fourcade.  - Il faut absolument pouvoir vérifier que les allègements consentis servent bien à atteindre les objectifs fixés par la loi Robien -financer l'investissement productif, embaucher du personnel non qualifié et maintenir les seniors dans l'emploi, améliorer la compétitivité des entreprises. Alors, la décélération pourra être sélective. Il nous faut un instrument de mesure !

M. Serge Dassault.  - Plutôt que de me voir opposer un refus, je retire les amendements. (Rires à gauche)

M. Jean Desessard.  - Déjà ?

Les amendements n°s188 rectifé et 187 rectifié sont retirés.

Interventions sur l'ensemble

M. le président.  - Je vais mettre aux voix l'ensemble du projet.

Mme Annie David.  - Je ne reviendrai pas sur la position commune à laquelle sont parvenus la CGT, la CFDT, le Medef et la CGPME, après une négociation de plusieurs mois. Peu de temps après, alors que le Président Sarkozy souhaitait qu'on en finisse avec l'idée d'un État seul à même de savoir ce qui est bon pour notre pays, vous imposez par la loi le désir du patronat : pouvoir livrer les salariés à des horaires de travail oubliés depuis plusieurs décennies.

La position commune fondait la représentativité des syndicats sur le vote des salariés de l'entreprise. Ce texte n'était pas parfait et résultait d'un compromis entre organisations syndicales. Manquaient, surtout, des dispositions concernant les quatre millions de salariés des TPE.

L'article 17 stipulait qu'à titre expérimental, le contingent des heures supplémentaires pouvait être déterminé par un accord signé par des syndicats représentant une majorité absolue de salariés, dès lors qu'étaient respectés le code du travail et la convention collective. On sait ce qui est advenu de cet article 17, malgré tous vos discours sur les mérites du dialogue social !

Vous en avez profité pour imposer en catimini une réforme en profondeur de la durée du travail -quelle trahison ! Vous avez en outre donné votre accord au Sénat pour revoir le financement de la formation professionnelle. Je peux concevoir que ce soit le souhait de l'UMP mais ne deviez-vous pas porter la position commune ? Vous nous dites vouloir étendre prochainement l'accord UPA. Nous y serons vigilants. Cependant, les promesses n'engagent que ceux qui y croient : j'espère que vous y croyez...

La deuxième partie accroît la précarité et allonge la durée du travail, remet en cause les RTT, incite au dumping social généralisé et inverse les normes -quelle régression ! Après un débat en urgence et avec un gouvernement laconique, on voit le clivage qui nous oppose sur le travail, sa place dans la société et le sens de la vie des travailleurs. Vous voulez que tous puissent travailler plus et vous vous présentez abusivement en défenseurs de la liberté de chacun comme si on pouvait encore croire en Adam Smith. Vous vous cachez derrière des arguments fallacieux mais M. Mélenchon a montré ce qu'il en était des 200 heures dont M. Fourcade regrette la perte : nos capacités de production ont augmenté. Alors vous maintenez la durée légale du travail à 35 heures tout en faisant en sorte qu'on puisse travailler 60 à 65 heures ? Vous mentez au peuple de France pour pérenniser un système qui joue contre l'emploi. Nous voterons résolument et unanimement contre ! (Applaudissements à gauche)

M. Jean-Pierre Fourcade.  - Grâce à l'excellent travail de la commission des affaires sociales, nous avons pu mener sur ce texte un débat serein, malgré quelques envolées oratoires. Nous avons d'abord revu les règles de représentativité des syndicats, qui n'avaient pas évolué depuis des décennies. En tenant mieux compte des résultats électoraux, cette représentativité sera renforcée. Le groupe UMP, qui constatait leur faiblesse actuelle, en espère des accords de meilleure facture, protégeant mieux les travailleurs grâce à des organisations moins nombreuses mais plus efficaces et représentant des franges plus importantes de salariés. Nous voterons donc la première partie.

Parfois moins serein, le débat sur la deuxième partie n'a pas été moins intéressant. Il fallait, pour modifier les règles de négociation, lutter contre deux idées fausses. L'une est que l'on pourrait répondre à la mondialisation en partageant le travail ; nous avons été les seuls à l'expérimenter et nos exportations ont bientôt reculé, de même que notre part dans le commerce mondial. L'autre tient aux fameuses normes descendantes : accords nationaux, puis de branches et enfin d'entreprises. Mais qui investit, qui exporte, qui embauche ? L'entreprise. Si nous voulons être compétitifs et défendre les personnes fragiles, femmes seules, familles monoparentales, jeunes, il faut partir de la réalité de l'entreprise. Notre groupe soutient donc de texte qui apporte quelques éléments de flexibilité...

M. Guy Fischer.  - Le moins qu'on puisse dire !

M. Jean Desessard.  - Trop modeste !

M. Jean-Pierre Fourcade.  - ... et ouvre des possibilités de faire des heures supplémentaires. Nous avions voté la loi Tepa, qui produit des effets, ne nous demandez pas de renier notre vote !

Je veux enfin me féliciter du climat serein et tranquille dans lequel nous avons débattu de ce texte important. Que le président et le rapporteur de la commission en soient remerciés. Le groupe UMP unanime votera le projet. (Applaudissements à droite)

M. Jacques Muller.  - Personne ne pourrait s'opposer à la modernisation de la démocratie sociale de notre pays. Une nouvelle fois, les pays de l'Europe du Nord nous indiquaient le chemin : pour que le dialogue social fonctionne correctement, il faut des syndicats capables de contribuer à la négociation de compromis équilibrés, et de les faire respecter -par conséquent, des syndicats à la légitimité incontestable. Le titre I de ce projet apporte des éléments de réponse mais, avec mes collègues Verts, je dénonce avec la plus grande fermeté la manoeuvre consistant à lier cette légitime recherche à une attaque historique contre le droit portant sur le temps de travail.

Personne n'est dupe car les Français, qui se rappellent M. Devedjian annonçant le démantèlement définitif des 35 heures, constateront une régression sans précédent depuis 1936. Ce mauvais coup porté contre les salariés marque une rupture historique : avec l'inversion des normes, les accords d'entreprise pourront être plus pénalisants pour eux que les accords de branche.

A l'exact opposé des pays nordiques au capitalisme rhénan pacifié et performant, vous dérèglementez et ouvrez la voie au dumping social. Belle rupture ! Des décennies de progrès arrachés de haute lutte sont remises en cause au nom d'une idéologie ultralibérale qui ne dit pas son nom, mais permet une dégradation irréversible des conditions de travail, de vie et de santé des Français.

Dans ce monde nouveau où le pétrole pas cher, c'est fini, et où la croissance est structurellement ralentie, il faut faire émerger des compromis sociaux nouveaux et complexes ; vous nous en proposez un qui est productiviste, inégalitaire, qui donne la priorité à ceux qui ont déjà un travail sur les chômeurs mais laisse les profits de la production au patronat, les autres étant censés s'enrichir grâce aux heures supplémentaires qui leur seront imposées. A ce compromis anachronique, j'oppose un compromis nouveau, solidaire et écologique, axé sur la réduction du temps de travail et un partage plus équitable de la richesse. En conscience, je ne peux que voter contre le pire texte que ce gouvernement nous ait présenté en matière sociale. En plein été, tout semble permis, même le pire ! Nous ne l'acceptons pas. (Applaudissements à gauche)

Mme Christiane Demontès.  - Avec la deuxième partie de ce projet, nous franchissons une nouvelle étape dans la dérèglementation à l'américaine et la destruction du modèle français et européen. Nous nous éloignons encore plus du modèle de l'Europe du Nord.

Nous avions déjà connu une année chargée en la matière et voilà que ce sont au mieux des accords d'entreprise qui régiront le droit du travail, et, au pire des accords de gré à gré, exprimant la volonté de l'employeur. Les forfaits connaîtront une croissance exponentielle et la réglementation européenne fera disparaître les heures supplémentaires promises par M. Sarkozy. On fait croire aux Français qu'ils augmenteront leur pouvoir d'achat grâce au rachat de RTT ou de leur compte épargne-temps, alors qu'on ne fait que leur donner ce qui leur appartient déjà.

« Travailler plus pour gagner plus ? » L'expression est déjà vide de sens, et demain les Français comprendront que vous les condamnez à travailler plus pour gagner moins.

Cette formidable arnaque se passe dans un contexte de baisse des bas salaires, avec une hausse de 2,30 % du Smic pour une inflation officielle de 3,20 %.

M. Xavier Bertrand, ministre.  - N'oubliez pas les 0,9 % !

Mme Christiane Demontès.  - Cette baisse des bas salaires se conjugue avec une hausse spectaculaire de la précarité et des temps partiels subis pour ces catégories de salariés qui subissent la double peine : un tiers des emplois sont aujourd'hui « atypiques » comme on dit pour ne pas dire précaires. C'est comme cela que l'on obtient temporairement une baisse du chômage, qui d'ailleurs s'arrête aujourd'hui.

La précarisation s'accentue aussi avec la loi de modernisation qui crée les contrats à objet défini, légalise le portage et allonge les périodes d'essai des CDI. La rupture conventionnelle contredit la législation sur le licenciement, qu'elle permettra de contourner. C'est pourquoi aussi la pression sur les chômeurs s'accentue, avec une loi qui les oblige à accepter un emploi précaire et mal rémunéré, sans tenir compte de leurs conditions de vie ni des coûts de transport.

La pression s'accentue aussi sur les commerçants, qui se voient imposer à leur porte une libéralisation incontrôlée des grandes surfaces au motif que la concurrence fera baisser les prix. Personne parmi eux n'y croit. Le Gouvernement semble compter les seules personnes qui, en France, n'aient jamais entendu parler des ententes. Et ce ne sont pas les hypermarchés qui créent des emplois pérennes et à temps plein. Les artisans sont aussi frappés avec l'auto-entreprise qui n'est jamais que la légalisation du travail au noir sans garantie pour le client et avec des avantages fiscaux et sociaux pour le bénéficiaire.

Tout cela dans un contexte de hausse des prix de l'énergie à cause de la spéculation, laquelle fait rage aussi sur les denrées alimentaires de base, frappant les plus modestes. La consommation, seul soutien de la croissance, est maintenant en baisse faute de demande solvable. La demande existe mais les revenus ne suivent pas et l'économie s'enfonce dans le trou noir de la stagflation. Les indicateurs de la croissance sont au rouge pour tout 2009.

La réduction de la dette est une priorité. Soit. Mais si elle se résume à augmenter les franchises médicales, à diminuer les retraites en valeur absolue et à supprimer des dizaines de milliers de postes de fonctionnaires, cela ne fera qu'accentuer la récession. Combien de nos concitoyens seront matériellement et moralement détruits par cette politique ? Le Gouvernement a choisi de privilégier la réduction des dépenses aux dépens des services publics, qu'il considère comme inutiles. Mais aucune politique d'investissement, de recherche et de développement volontariste ne vient la compenser. Les seuls investissements du Gouvernement sont de nature fiscale, en faveur d'une infime fraction de son électorat : 87 % du coût pour la collectivité nationale des mesures sur la fiscalité du patrimoine concerneront 16 000 contribuables. L'injustice explose et surtout la conscience de cette injustice. On ne peut imposer de tels sacrifices en exposant tous les jours sur papier glacé le luxe effréné d'une petite caste ultra privilégiée. La mondialisation apparaît pour ce qu'elle est : un prétexte parce que si notre condition s'aggrave, celle de ceux qui sont exploités dans les pays émergents ne s'améliore pas. Cette politique injuste génère une situation instable. Vous en avez conscience ; d'où votre précipitation à faire voter tous ces textes par votre majorité. Celui-ci n'en est qu'un parmi d'autres, auquel nous nous opposons avec la même détermination. (Applaudissements à gauche)

Mme Annie Jarraud-Vergnolle.  - Défaire les 35 heures, c'était votre marotte. Vu les majorités étriquées avec lesquelles vous venez de passer...

M. Xavier Bertrand, ministre.  - Soixante pour cent !

Mme Annie Jarraud-Vergnolle.  - On comprend que vous vous fassiez plaisir en détruisant l'ouvrage de vos prédécesseurs. Avec le recul, les 35 heures -comme le firent en leur temps les congés payés- révèlent leur caractère progressiste. La réduction du temps de travail, l'amélioration de la vie de chacun, amélioration égalitaire puisque tous étaient concernés, la libération d'un temps pour vivre, s'occuper de ses enfants, de ses parents, avoir des loisirs, consommer... c'est cela que permirent les 35 heures. Il n'y a pas que l'argent, toujours l'argent et l'important n'est pas de gagner plus mais d'être heureux.

D'après un sondage des Échos, 79 % des salariés ne sont pas intéressés par le rachat de leur RTT. En mai, un autre sondage de la Cegos indiquait que 80 % des salariés étaient favorables aux 35 heures. La majorité des Français y reste donc attachée car, même si elles ont intensifié leur travail, elles ont grandement amélioré leur qualité de vie.

Si au moins, l'autre promesse du candidat Sarkozy -celle du pouvoir d'achat- s'était substituée à ce leurre du « travailler plus pour gagner plus » ! Même pas ! Votre projet va à l'encontre de l'intérêt des salariés. En généralisant la négociation de gré à gré entre l'employeur et le salarié, sans reconnaître les liens de subordination qui les unit, vous entamez la plus grave régression sociale qu'a connue notre pays. Depuis la fin du XIXsiècle, les avancées sociales ont accru notre productivité, aujourd'hui l'une des plus élevée du monde. Alors que les principaux syndicats et le Medef étaient parvenus à un accord, votre projet de loi le remet en cause, au motif qu'il ne correspondait pas à votre « travailler plus pour gagner plus ».

Quant aux cadres payés au forfait, qui avaient renoncé au paiement de leurs heures supplémentaires effectuées au-delà des 35 heures en échange d'un travail maximum de 13 heures par jour n'allant pas au-delà de 218 jours par an, ils sont les premiers touchés. De 218, la limite du forfait est portée à 235 et pourra même atteindre 282 jours dans les entreprises qui auront négocié ce point. En contrepartie, les cadres percevront 10 % de majoration salariale à partir du 219ème jour. De qui se moque-t-on ?

Le « travailler plus pour gagner plus » est devenu le nouvel adage de la politique économique, vous voulez inscrire ce slogan dans le marbre et en faire la devise d'une nation entière. Pourtant, la richesse créée dans un pays dépend de la quantité, mais surtout de la qualité du travail, de la productivité horaire. La richesse d'un pays se mesure à un taux d'emploi élevé et à la productivité horaire, non au nombre d'heures travaillées. D'ailleurs, les pays où l'on travaille le plus sont aux derniers rangs pour la richesse par habitant et les pays qui ont choisi de « travailler tous » plutôt que de « travailler plus » ont un PIB/habitant nettement supérieur. Le bon slogan pour la France devrait être « travailler tous et mieux, pour gagner plus ».

En favorisant le « travailler plus », ce projet de loi produira de nouveaux exclus du marché du travail. Qui paiera pour ceux-là, sinon ceux qui auront travaillé plus pour gagner plus, eux-mêmes ! Les mêmes qui devront travailler davantage, non plus en heures mais en années, pour gagner encore plus, pour payer encore plus et plus longtemps...

Contrairement à ce que vous avez réussi à faire croire aux Français, nous ne sommes pas tous rivés sur le quantitatif ; quelques-uns d'entre nous savent penser autrement ; nous ne rêvons pas tous de partir en vacances sur le yacht d'un copain. Avec Brieuc Bougnoux, nous croyons que la richesse d'un pays tient davantage à la productivité qu'au nombre d'heures travaillées. Pour paraphraser un auteur célèbre, « il faut travailler pour vivre et non pas vivre pour travailler ».

Vous vous entêtez à abîmer une belle vision qui n'était pas la vôtre, celle d'aimer son travail, d'être heureux au travail, de trouver un équilibre entre vies professionnelle et personnelle, vision partagée par 80 % des Français. Vous la détruisez au profit d'un « toujours plus » encourageant des modes de rémunérations indexés sur les résultats de l'entreprise et déconnectés du régime fiscal et social des salaires. Nous ne pouvons pas voter pour cette régression sociale. Et nous ne le ferons pas. (Applaudissements à gauche)

M. Jean Desessard.  - D'abord quelques questions sur la méthode.

Pourquoi avoir débattu en urgence d'un sujet aussi important que la représentativité syndicale ? Et pourquoi avoir voulu nous faire travailler plus tard vendredi soir, alors qu'il était si simple de programmer le débat pour aujourd'hui, où nous sommes bien plus nombreux ?

Le rapporteur a déposé un amendement n°43 qui réécrivait l'article 17, sur lequel 43 autres amendements avaient été déposés. Cela a donné un long monologue. Ne pouvait-il le diviser en cinq ou six parties ? Ces discussions d'amendements sont mal organisées.

M. Alain Gournac, rapporteur.  - Grâce au Congrès, cela va changer !

M. Nicolas About, président de la commission.  - Heureusement ! On a eu chaud hier ! (Rires)

M. Jean Desessard.  - Voir un représentant de l'UMP s'amener avec tout un paquet de bulletins, lors d'un scrutin public, franchement, ça peut nous enlever l'envie de venir ici. Comparez avec le suspense d'hier ! Il faudrait trouver un autre mode de scrutin, que chacun vote individuellement.

Sur le fond, le débat a été intéressant, il a été politique plus que technique et sa retransmission télévisée a été suivie puisque j'ai reçu de nombreux SMS le commentant. « Bravo, la gauche est bonne ! », m'écrivait-on... (Exclamations à droite)

Vous vous étiez bien réparti les rôles entre rapporteur et ministre, pour mieux détricoter le code du travail.

Revenons sur le fond. La première partie, consacrée à la représentativité syndicale : il fallait le faire, mais autrement, pas par entreprise, comme vous le faites dans un souci d'individualisation des rapports sociaux, mais par des élections nationales, de type prud'hommes.

M. Nicolas About, président de la commission.  - Cela ne marche pas.

M. Jean Desessard.  - Dans la deuxième partie, au nom de la compétitivité avec les pays émergents, vous voulez baisser les salaires et allonger le temps de travail, alors que nous voudrions faire de la France et de l'Europe un modèle social et écologique. C'est la différence entre la droite et la gauche, celle du projet de société.

Pour la gauche, l'homme doit être au centre des préoccupations. Nous voulons améliorer ses conditions de vie en tenant compte de l'environnement. Pour vous, la recherche du profit prime sur tout ! (On se récrie à droite) Tel est le sens de ce projet de loi, contre lequel voteront les Verts. (Applaudissements à gauche)

M. Guy Fischer.  - Cette cession s'achève sur un texte emblématique, voulu par le Président de la République.

M. Dominique Braye.  - Il tient ses promesses !

M. Guy Fischer.  - Ses conséquences réelles apparaîtront bientôt, avec les réactions que nous attendons tous.

A propos de la représentativité syndicale, l'esprit de la négociation a été préservé pour l'essentiel.

En revanche, la seconde partie a fait l'objet d'un débat très fouillé, qui a modifié ou supprimé une soixantaine d'articles du code du travail. La discussion débouche sur un détricotage de la législation sur le temps de travail, bien que la durée légale de référence reste fixée à 1 607 heures par an. Ainsi, 30 % des salariés qui font aujourd'hui des heures supplémentaires en accomplissent 55, mais le contingent est porté à 220 ! On voit la marge énorme laissée à la déréglementation. Parallèlement, le forfait annuel en jours pourrait être étendu à l'ensemble des salariés, qui devront alors travailler 218 jours par an ou 235, voire 280 ! Et ils pourront effectuer plus de 400 heures supplémentaires.

Pour la septième fois en six ans, une loi augmente encore la flexibilité du travail. Celle du 27 janvier 2003 a porté le contingent d'heures supplémentaires de 130 à 180. Celui-ci est passé à 220 heures avec le décret du 21 décembre 2004, comme quoi il faut toujours se méfier de la période des fêtes... Un an plus tard, la loi du 31 décembre 2005 permet d'aller au-delà, en accord avec les salariés ; on approche ainsi la négociation de gré à gré. La loi du 21 août 2007, dite loi Tepa, exonère de cotisations les entreprises et d'impôts les salariés pour la rémunération des heures supplémentaires. C'est une attaque en règle contre la création d'emplois. Enfin, la loi du 8 février 2008 permet aux salariés de racheter les jours de RTT.

Les dispositions inscrites dans le texte dont nous venons de débattre sont autant de coups de poignard dans le dos des salariés, conduisant à la semaine de 48 heures, à la suppression des jours fériés autres que le 1er mai. Vous avez ajouté 17 jours de travail supplémentaires par an, soit un samedi sur trois. Mme Debré prépare un texte sur le travail dominical. Alors que les jours de RTT s'évaporent, vous mettez le dumping social à la disposition des employeurs. Avis du comité d'entreprise ou des délégués du personnel, intervention de l'inspection du travail : tout cela disparaît. L'article 16 inverse la hiérarchie des normes, la Charte européenne est à nouveau bafouée, tout comme la Constitution. Les 35 heures, votre bouc émissaire, subsistent mais vous instituez un système qui pèsera sur les salaires et les retraites. Nous voterons contre et nous demanderons un scrutin public. (Applaudissements à gauche)

M. Alain Gournac, rapporteur.  - La CMP se réunit demain et nous voterons définitivement ce texte dans la soirée.

A l'issue du débat, je remercie les présidents de séance qui se sont succédé, sans oublier Jean-Frédéric Poisson, pour son oeuvre formidable à l'Assemblée nationale. Contrairement à ce que d'aucuns prétendent, nos collègues de la majorité ont été assidus. (Rires à gauche) Regardez donc  ils sont là ! J'ai été encouragé par leur soutien. Mais je remercie également les collègues de l'opposition. Certes, nos conceptions divergent, puisque vous voulez encadrer le travail avec des inspecteurs du travail à tous les carrefours. Ce n'est pas ce que les Français demandent ! D'ailleurs, nous exportons nos avions, le savoir-faire de nos entreprises de travaux publics, mais pas les 35 heures. Personne n'en veut !

Aujourd'hui, après un débat démocratique, ce texte libère les entreprises.

Mme Christiane Demontès.  - Pas les travailleurs !

M. Alain Gournac, rapporteur.  - Arrêtez avec les travailleurs ! Je me demande qui les défend ici... Enfin, je remercie M. le ministre pour son écoute.

Je partirai heureux en vacances.

M. Bernard Frimat.  - Comme après le CPE !

M. Alain Gournac, rapporteur.  - Notre pays a besoin d'évoluer. Il lui faut des organisations syndicales plus transparentes.

M. Jean Desessard.  - Nous verrons bien.

M. Alain Gournac, rapporteur.  - Nous verrons comment elles sont positionnées dans nos entreprises, où nos compatriotes veulent être libres de travailler.

La discussion débouche sur un résultat sensationnel : le code du travail est simplifié ! (Marques d'ironie à gauche)

Enfin, je n'oublie pas de remercier les fonctionnaires du Sénat, qui sont remarquables. Je leur dis bravo ! (Applaudissements à droite)

M. Xavier Bertrand, ministre.  - Je m'associe à ces remerciements, avec une pensée particulière pour les membres de la commission, son président et son rapporteur. Leur travail préparatoire a permis d'élaborer de nombreux amendements qui ont amélioré le texte.

Je tiens aussi à remercier tous les sénateurs pour ce débat intéressant qui nous a permis d'aborder des problèmes de fond -je pense en particulier à notre débat de vendredi matin. Chacun a pu exprimer ses positions ; les différences d'opinions ont été pleinement assumées. Je m'en réjouis car je suis, comme vous, un adversaire du politiquement correct et de la pensée unique.

Vous allez voter sur un texte majeur, historique, qui refonde la démocratie sociale. Pour la première fois depuis l'après-guerre, ce projet modifie les règles de représentativité des syndicats. C'est l'élection, au niveau de l'entreprise, qui fondera désormais la légitimité des représentants des salariés ; le délégué syndical devra s'être présenté aux élections et avoir obtenu plus de 10 % des suffrages.

M. Alain Gournac, rapporteur.  - Il ne sera plus nommé !

M. Dominique Braye.  - C'est ça, la démocratie !

M. Xavier Bertrand, ministre.  - Ce texte revoit également le système de financement des syndicats selon un principe de transparence.

Quant au temps de travail, nous sortons enfin du carcan des 35 heures. (M. Alain Gournac, rapporteur, acquiesce) Plusieurs lois ont déjà été votées en ce sens, mais elles n'étaient pas parvenues à une formulation aussi claire qu'aujourd'hui : les salariés qui souhaitent rester aux 35 heures le pourront mais ceux qui souhaitent travailler davantage en auront la liberté. Je visitais hier trois entreprises de Bretagne ; chaque fois, les salariés se sont plaints d'être bloqués par les contingents d'heures supplémentaires. Car dans de nombreuses entreprises, le contingent est inférieur à 220 heures par an : il est souvent de 130 heures seulement ! Quand vient le mois d'octobre, les salariés ne peuvent plus faire d'heures supplémentaires, même s'ils le souhaitent !

Vous évoquez, mesdames et messieurs les sénateurs de l'opposition, le nombre moyen d'heures supplémentaires par entreprise. Mais aucune entreprise ne ressemble à une autre ! Ce fut même la grande erreur conceptuelle des 35 heures que d'imposer le même uniforme à toutes les entreprises, quels que soient leur taille et leur secteur d'activité. (Protestations à gauche)

M. Dominique Braye.  - Ils se moquent des travailleurs !

M. Bernard Frimat.  - Caricature !

M. Xavier Bertrand, ministre.  - Les 35 heures ont diminué la compétitivité des entreprises et freiné l'augmentation des salaires. Il a fallu beaucoup d'intelligence aux partenaires sociaux pour éviter que cette mesure ne produise des conséquences encore pires ; malgré tout, elle a fait beaucoup de mal à l'économie française.

Heureusement que ce débat a eu lieu : il a permis à la gauche de parler à nouveau de la valeur travail. Cela faisait bien longtemps qu'on ne l'entendait pas sur ce sujet ! (Vives protestations à gauche) Mais vous n'avez pas mis à jour vos notes et votre discours reste toujours aussi archaïque ! (Applaudissements à droite)

Mme Raymonde Le Texier.  - C'est honteux !

M. Bernard Frimat.  - Quel discours lamentable !

M. Xavier Bertrand, ministre.  - Vous restez prisonniers d'une idéologie d'un autre siècle.

M. Dominique Braye.  - Du dix-neuvième siècle !

M. Bernard Frimat.  - C'est vous qui proposez un retour au Moyen Age !

Mme Christiane Demontès.  - Vous remettez à l'honneur le servage !

M. Xavier Bertrand, ministre.  - Ce débat a été bien commode pour vous car il vous a évité de vous prononcer sur l'évolution du monde du travail et de faire des choix : souhaitez-vous en rester au statu quo sur les 35 heures ou les généraliser, comme certains l'ont proposé pendant la campagne présidentielle ? (Le tumulte se poursuit sur les bancs socialistes)

M. Dominique Braye.  - Nous vous sauvons !

Mme Christiane Demontès.  - Vous proposez de travailler plus pour gagner moins !

M. Xavier Bertrand, ministre.  - Pendant ce débat, vous avez essayé de faire peur. Vous avez présenté comme des innovations plusieurs dispositions qui existent déjà dans le code du travail. On ne vous avait guère entendu sur ces sujets ; pourquoi vous en inquiétez-vous maintenant ? (Nouvelles protestations à gauche)

Vous avez beau parler de la valeur travail, vous n'avez pas travaillé. Les Français s'en rendent compte et c'est pourquoi vous êtes dans l'opposition ! (Vives protestations à gauche ; applaudissements à droite)

A la demande du groupe CRC, l'ensemble du projet de loi est mis aux voix par scrutin public.

M. le président. - Voici les résultats du scrutin :

Nombre de votants 323
Nombre de suffrages exprimés 323
Majorité absolue des suffrages exprimés 162
Pour l'adoption 198
Contre 125

Le Sénat a adopté.

(Applaudissements à droite)

M. le président.  - J'ai reçu de M. le Premier ministre la demande de constitution d'une commission mixte paritaire sur le projet de loi que nous venons d'adopter. Conformément à l'article 12 du Règlement, les nominations de membres de cette commission mixte paritaire effectuées lors de notre séance du 18 juillet ont donc pris effet.

Prochaine séance, mercredi 23 juillet 2008 à 15 heures.

La séance est levée à 19 h 25.

Le Directeur du service du compte rendu analytique :

René-André Fabre

ORDRE DU JOUR

du mercredi 23 juillet 2008

Séance publique

A QUINZE HEURES

Examen des conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi de modernisation de l'économie.

Rapport (n° 476, 2007-2008) de Mme Elisabeth Lamure, rapporteur pour le Sénat.

Examen des conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi instituant un droit d'accueil pour les élèves des écoles maternelles et élémentaires publiques pendant le temps scolaire.

Rapport (n° 480, 2007-2008) de M. Philippe Richert, rapporteur pour le Sénat.

A VINGT-ET-UNE HEURES TRENTE

Examen des conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi relatif aux droits et aux devoirs des demandeurs d'emploi.

Rapport de M. Dominique Leclerc, rapporteur pour le Sénat.

Examen des conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi de règlement des comptes et rapport de gestion pour l'année 2007.

Rapport (n° 481, 2007-2008) de M. Philippe Marini, rapporteur pour le Sénat.

Examen des conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi portant rénovation de la démocratie sociale et réforme du temps de travail.

Rapport de M. Alain Gournac, rapporteur pour le Sénat.

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DÉPÔTS

La Présidence a reçu de :

- Mme Josette Durrieu un rapport d'information fait au nom des délégués élus par le Sénat à l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe sur les travaux de la délégation française à cette Assemblée, au cours de la troisième partie de la session ordinaire de 2008, adressé à M. le Président du Sénat en application de l'article 108 du Règlement.

- Mme Josette Durrieu un rapport d'information fait au nom des délégués élus par le Sénat sur les travaux de la délégation française à l'Assemblée de l'Union de l'Europe occidentale au cours de la première partie de la 54ème session ordinaire - 2008 - de cette assemblée, adressé à M. le Président du Sénat, en application de l'article 108 du Règlement.

- M. Philippe Marini, rapporteur pour le Sénat, un rapport fait au nom de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de règlement des comptes et rapport de gestion pour l'année 2007.

- M. Philippe Richert, rapporteur pour le Sénat, un rapport fait au nom de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi instituant un droit d'accueil pour les élèves des écoles maternelles et élémentaires publiques pendant le temps scolaire.

- M. Claude Haut un rapport d'information fait au nom de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation sur l'école nationale supérieure des officiers de sapeurs-pompiers (Ensosp).

- M. Charles Guené un rapport d'information fait au nom de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation sur les directions interdépartementales des anciens combattants (Diac).

- MM. Jean Arthuis, Philippe Marini, Aymeri de Montesquiou, Yann Gaillard, Philippe Adnot, Bernard Angels, Philippe Dallier, Jean-Claude Frécon, Charles Guené et Jean-Jacques Jégou un rapport d'information fait au nom de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation sur le déplacement d'une délégation du bureau de la commission au Brésil du 20 au 27 avril 2008.