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Table des matières
Service public de l'emploi (CMP)
Accord relatif à l'organisation internationale ITER
Rétention de sûreté (Urgence - Suite)
Discussion des articles (Suite)
Article 12 (appelé en priorité)
SÉANCE
du jeudi 31 janvier 2008
59e séance de la session ordinaire 2007-2008
présidence de M. Adrien Gouteyron,vice-président
La séance est ouverte à 9 h 45.
Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.
Service public de l'emploi (CMP)
M. le président. - L'ordre du jour appelle l'examen des conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi relatif à la réforme de l'organisation du service public de l'emploi.
Discussion générale
Mme Catherine Procaccia, rapporteur pour le Sénat de la CMP. - La commission mixte paritaire a adopté une trentaine d'amendements, la plupart à des fins de coordination. En effet, de nombreuses modifications apportées au code du travail en vigueur n'avaient pas été introduites dans le nouveau code, erreur à laquelle nous avons remédié.
Sur le fond, la CMP, à l'initiative de son rapporteur pour l'Assemblée nationale, a autorisé à titre expérimental que le préfet et le président du conseil régional coprésident dans deux régions les conseils régionaux de l'emploi, structure consultative instituée par ce texte, dans le but de renforcer la coordination entre les services de l'État et ceux des conseils régionaux, lesquels sont compétents en matière de formation professionnelle. La CMP a supprimé l'obligation, introduite par l'Assemblée nationale, de recueillir l'avis des maisons de l'emploi avant que ne soit conclue la convention annuelle entre le préfet de région et le directeur régional du nouvel opérateur qui pouvait, à terme, se révéler une contrainte excessive avec une dizaine ou une quinzaine de maisons de l'emploi par région. Enfin, la CMP a supprimé la date d'expiration que le Sénat avait assignée à la convention collective des Assedic, considérant, à l'instar du député Albarello, que celle-ci devait être déterminée par les partenaires sociaux. Je crains que cette disposition peu contraignante n'incite guère à conclure rapidement un nouvel accord applicable au personnel de l'opérateur, mais c'est le choix de mes collègues et de la démocratie. Je forme le voeu que le sens des responsabilités de chacun finisse par l'emporter. Enfin, la CMP a confirmé la suppression de l'article 8 ter, adopté au Sénat à l'initiative du président de notre commission, estimant que les fraudes aux Assedic constituaient un véritable problème mais devaient être traitées dans le cadre d'un prochain projet de loi sur la réforme du marché du travail.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. - Bref, j'ai été saqué !
Mme Catherine Procaccia, rapporteur. - Les autres apports du Sénat ont été préservés, notamment l'institution d'une motion de défiance contre le directeur général du nouvel opérateur, la création d'une quatrième section dans son budget ou le nom de baptême.
Ce texte, tel qu'il résulte de nos travaux, permettra de mettre en oeuvre la réforme de structure ambitieuse, souhaitée par le Président de la République et Mme la ministre pour mieux répondre aux besoins des demandeurs d'emploi. (Applaudissements à droite)
M. Nicolas About, président de la commission. - Très bien !
Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi. - Je veux d'abord remercier Mme Procaccia pour le travail considérable qu'elle a accompli sur ce projet de loi en une période de l'année où chacun préférerait consacrer davantage de temps aux siens. Elle a organisé les auditions, cru à ce projet de loi jusqu'à la dernière ligne droite et je lui en rends hommage.
Le nouvel opérateur sera la colonne vertébrale du service public de l'emploi, l'un des outils -il ne sera pas le seul- pour atteindre les objectifs d'un taux de chômage réduit à 5 % et d'un taux de l'emploi de 70 % en 2012. Pour autant, la fusion de l'ANPE et des Assedic n'est pas l'alpha et l'oméga de notre politique de l'emploi... En effet, elle s'inscrit dans un cadre plus général, constitué par la politique de création d'emploi, la politique de la croissance -je pense, notamment aux dispositions de l'été dernier sur les heures supplémentaires- et la réforme du marché du travail -plus de flexibilité pour l'entreprise, plus de sécurité pour le salarié. A cet égard, l'accord national interprofessionnel du 11 janvier représente une étape importante pour une profonde modification des relations au sein de l'entreprise. Autre pilier de notre politique de l'emploi, la réforme de la formation professionnelle qui sera l'occasion d'engager une réflexion sur l'apprentissage, la formation continue, l'employabilité des salariés. La réforme du service public de l'emploi, enfin, permettra une meilleure intermédiation entre l'offre et la demande. Grâce à la détermination de tous les acteurs, il s'agit d'améliorer le service aux entreprises en recherche de salariés pour des offres non pourvues et le service à tous les demandeurs d'emploi, qu'ils soient indemnisés ou non.
Je me félicite des améliorations que le Parlement a apportées à ce texte. Tous les amendements présentés n'ont pas été retenus (M. Nicolas About, président, le regrette) mais ils ont nourri un débat de fond, notamment sur la qualification des demandeurs d'emploi, qui alimentera nos prochains travaux.
Il reviendra au Gouvernement -mais surtout aux agents des Assedic et de l'ANPE pour lesquels j'ai une pensée- de mettre en oeuvre cette loi ambitieuse en préparant la convention tripartite entre l'État, l'Unedic et le nouvel opérateur, laquelle devra déterminer les objectifs assignés à l'opérateur, les publics prioritaires qui bénéficieront d'un accompagnement renforcé, les modes d'action de l'institution -intervention directe, co-traitance, sous-traitance, recours à des opérateurs privés- tout en gardant à l'esprit l'impératif d'un meilleur service pour les entreprises et les chômeurs. D'autre part, nous devrons préciser notre réflexion sur l'offre de service du nouvel opérateur, les relations de l'opérateur avec les maisons de l'emploi, l'Afpa, I'Apec ou encore les missions locales.
Cette étape législative, précédée par de larges concertations, inaugure le chantier de la réforme de notre politique de l'emploi et du travail. De nombreux amendements ont été adoptés, y compris venant des bancs de l'opposition, sur la qualification de l'institution ou l'enrichissement de ses missions. Les débats au Parlement ont été très riches et se sont inscrits dans l'esprit initial du projet : concertation, écoute et recherche d'un meilleur service. Je vous en remercie. (Applaudissements à droite)
Mme Christiane Demontès. - Au terme de cette discussion, je tiens à répéter que la procédure d'urgence ne se justifiait pas. Ainsi, la commission mixte paritaire a dû se prononcer hier sur des modifications apportées par des collègues députés, alors qu'elles auraient mérité un débat approfondi en deuxième lecture. Nous avons ainsi abordé certains points substantiels qui auraient eu toute leur place dans un texte sur les politiques de l'emploi et leur mise en oeuvre par un service public réformé. Vous avez envisagé le sujet par le petit bout de la lorgnette. J'espère, sans en être persuadée, que vous n'avez pas créé ainsi une nouvelle complexité organisationnelle. Au moins est-il acté que ce texte réforme non le service public de l'emploi, mais seulement son organisation.
Je tiens à dire aussi que cette réforme ne répondra pas aux difficultés rencontrées par trop de nos concitoyens, par les allocataires de minima sociaux, ni par les six cents salariés mosellans probablement contraints à chercher bientôt un nouvel emploi bien que leur entreprise ait dégagé des bénéfices avoisinant 6,5 milliards d'euros dont 640 millions seront versés à son directeur général et à sa famille. Confrontés à une situation économique et sociale inquiétante, les citoyens ne sont pas satisfaits de leur Président de la République ni de son Gouvernement. Pour nous, il est exclu de dire que les chômeurs et les professionnels qui les accompagnent soient responsables des difficultés du pays.
J'en viens à la fusion entre l'ANPE et les Assedic.
Nos débats en première lecture ont permis quelques avancées. Ainsi, l'intitulé du projet de loi reflète enfin son contenu. Nous avons également levé les ambiguïtés quant à la nature juridique du nouvel organisme : il s'agira d'une institution publique. Un établissement public à caractère administratif semble envisagé. De même, nous avons précisé le rôle du conseil d'administration en matière d'attribution annuelle des dépenses. Notre groupe a enregistré quelques sujets de satisfaction, comme l'introduction d'un représentant des collectivités territoriales dans le conseil d'administration ou l'amendement qui organise la participation de l'assurance-chômage au fonctionnement et à l'investissement de la nouvelle institution.
La première lecture à l'Assemblée nationale et la commission mixte paritaire ont également permis des avancées ou rectifications. Ainsi, la représentation des collectivités territoriales au conseil d'administration a été confirmée. En outre, la CMP a validé l'expérimentation dans deux régions tendant à mieux articuler l'action à l'échelon régional et à faire coprésider le conseil régional de l'emploi par le président du conseil régional et par le préfet de région. Je regrette seulement à ce propos que le dispositif soit insuffisamment ambitieux et peu cohérent avec les lois de décentralisation, notamment celle d'août 2004 qui a confié aux régions la formation professionnelle et la coordination du développement économique.
La CMP a également supprimé l'avis des maisons de l'emploi sur la convention annuelle régionale, puisque ces maisons couvrent moins de la moitié de la France métropolitaine. En outre, leur pérennisation n'est pas une certitude, alors que la commission d'habilitation présidée par notre collègue député M. Anciaux ne s'est plus réunie depuis mars 2007, pour des raisons mystérieuses...
Nous sommes satisfaits que les salariés des Assedic restent régis par leur convention collective jusqu'à l'entrée en vigueur de la nouvelle convention ou jusqu'à la date prévue par l'accord de méthode, au lieu d'un jour fixé arbitrairement par le législateur. Néanmoins, des inquiétudes subsistent, puisqu'aucune précision n'a été apportée aux salariés de l'Unedic et des Assedic quand à leur devenir professionnel. Près du quart des agents de l'ANPE ont un contrat à durée déterminée. Sachant que l'article 9 de la convention de l'Organisation internationale du travail (OIT) dispose qu'ils bénéficient de la stabilité de l'emploi « sous réserve des besoins du service » et que le nombre d'agences pourrait passer à mille deux cents au lieu de mille six cents existantes, on peut légitimement s'interroger sur la pérennité des emplois, surtout lorsqu'ils sont précaires.
Par ailleurs, la rédaction ne garantit en rien l'indépendance des agents. On nous dit que chaque agent devra « comprendre les attentes de tous les usagers, demandeurs d'emploi et entreprises, et connaître tous les métiers ». Mais selon quelles modalités parvenir à cette révolution ? Comment travailler aujourd'hui aux Assedic et devenir demain conseiller pour les entreprises ? Nous n'en savons rien, les salariés non plus. Ils s'interrogent également sur la mise en place et les finalités d'un outil informatique commun.
La négociation de la nouvelle convention collective s'inscrit déjà dans un cadre complexe, puisque les agents actuels de l'ANPE peuvent opter pour un statut de droit public fixé par décret. Le Gouvernement a choisi une convention collective dans le respect de la convention 88 de l'OIT, avec un agrément gouvernemental à l'issue des négociations. Bien sûr, le respect de la convention 88 est fondamental, mais la procédure de l'agrément ne peut apaiser les agents, car ils ne croient pas que les futures dispositions conjugueront les atouts de la convention collective actuelle de l'Unedic et ceux du statut des agents de l'ANPE.
Dernier motif de satisfaction : la CMP a confirmé la suppression par l'Assemblée nationale de l'article 8 ter relatif à la démission de fait du salarié ayant quitté son poste de travail. Il me semble qu'on devrait en reparler compte tenu de l'accord signé récemment par les partenaires sociaux pour organiser la rupture négociée du contrat de travail.
(Constatant un aparté entre Mme le ministre et M. le président de la commission des affaires sociales, l'oratrice craint d'avoir « déstabilisé » celui-ci, mais il répond que son amendement déposé en première lecture tendait à « combattre des associations de malfaiteurs »)
Enfin, je veux évoquer l'Afpa.
Devant l'indécision du Gouvernement, les salariés se mobilisent. Réunies il y a quarante-huit heures, les organisations syndicales ont créé un Comité de défense de l'Afpa et son personnel. Elles constatent que « le démantèlement de l'association est engagé : cession du patrimoine à la Sovafim, prévision de transfert des services d'orientation, dangers sur l'ingénierie, fermetures d'établissements, de sections de formation, augmentation de la précarité » et rappellent que l'enjeu est « l'effectivité du droit à la qualification pour les salariés -actifs ou demandeurs d'emploi- en premier lieu les moins qualifiés d'entre eux », dimension centrale par excellence pour sécuriser les parcours professionnels.
En première lecture, j'ai interrogé le Gouvernement sur l'éventuelle prorogation de la période transitoire autorisant les régions à subventionner l'Afpa. Vous vous étiez alors engagée à travailler dans ce sens avec l'Association des régions de France (ARF). Or, un courrier que vous avez adressé dès le lendemain au président de l'ARF précise : « les conseils régionaux pourront appliquer à compter de la date initialement prévue, le 1er janvier 2009, les règles de la commande publique ». Ai-je eu tort de vous faire confiance ?
Ainsi, les quelques avancées n'ont pas tout réglé. Nous voterons donc contre ce projet de loi. (Applaudissements à gauche)
M. Nicolas About, président de la commission. - J'ai failli applaudir.
Mme Annie David. - Nous sommes réunis ce matin pour adopter des textes qui symbolisent votre volonté d'accommoder notre société à la sauce libérale. Vous le savez : les élus de notre groupe ne veulent pas de cette société-là !
Nous allons donc commencer par l'organisation du service public de l'emploi, les hasards du calendrier faisant parfois bien les choses. En effet, nous allons adopter ce texte alors que la presse dévoile un scandale financier et boursier sans précédent : l'affaire de la Société générale. Cette banque, dont la réputation était pourtant excellente, a perdu presque 3 milliards d'euros dans la crise des subprimes et plus de 5 milliards dans une immense affaire de détournement de fonds. Un trader, comme il est convenu de dire, aurait, à lui seul, provoqué cette énorme perte après avoir contourné toutes les procédures de protection et manipulé jusqu'à 50 milliards d'euros. Comment un homme seul a-t-il pu jongler avec une somme équivalant au déficit cumulé de notre protection sociale ?
Vous ne voyez pas le lien avec le sujet d'aujourd'hui ? Il est pourtant réel ! En première lecture, M. Fischer et moi-même avons dénoncé la culpabilisation systématique des demandeurs d'emploi, considérés comme des clients -lorsqu'ils sont solvables- ou des sources de dépenses -quand il faut les indemniser- alors il s'agit simplement de salariés privés de travail. Nous avons dénoncé l'esprit de vos lois successives, celle dite « de cohésion sociale » en tête, dont le seul objectif est d'organiser une chasse méthodique aux fraudeurs.
Nous avions déjà fait ce constat lorsque le projet de loi de financement de la sécurité sociale tendait à privatiser la mission de contrôle en organisant une contre-visite par un médecin pratiquant pour l'employeur, afin d'évaluer la réintégration du salarié, donc le maintien ou non des indemnités journalières. Vous poursuivez toujours la même logique : la coercition envers les victimes de votre politique libérale, la tranquillité pour ceux qui en profitent.
Aujourd'hui encore, pour vous les fraudeurs sont toujours des salariés, jamais des employeurs ou des dirigeants.
Cette analyse est confirmée par les propos du Président de la République, qui veut substituer à la notion d'offre valable d'emploi celle, plus floue et libérale, d'offre acceptable d'emplois. Le chef de l'État veut ainsi revenir sur une définition issue de l'Organisation internationale du travail et strictement encadrée par la jurisprudence, au profit d'un concept sorti de la boîte à idées du Medef.
Je regrette que certains sénateurs aient cédé à ce glissement sémantique et que le Sénat n'ait pas résisté à la tentation de la culpabilisation ; heureusement, les députés ont obtenu la suppression de l'amendement About qui revenait, au mépris de la jurisprudence de la Cour de cassation -la démission ne se présume pas- sur un dispositif protecteur pour les salariés.
Le Président de la République veut parvenir en cinq ans au plein emploi ; comme il ne peut compter ni sur la conjoncture, ni sur les effets de sa politique, il en est réduit à des stratagèmes, dont la radiation massive des demandeurs d'emploi. Pour y parvenir, il fallait transformer l'organisme en charge de l'indemnisation des chômeurs et de leur conseil. C'est la raison d'être de ce projet de loi.
L'adoption d'un de nos amendements réaffirmant le caractère public et national de la future institution ne nous rassure pas ; nous voulions que celle-ci fût un établissement public administratif. Rien ne le garantit, et ce statut ne se déduit pas de l'absence de vente de services ou de produits. Nous redoutons la création d'une structure sui generis, mi-établissement public, mi-société privée ; l'article 2 entretient le doute, qui précise que la comptabilité de la future institution sera soumise aux règles applicables aux entreprises industrielles et commerciales, ce qui renvoie bien à la sphère privée. Il en va de même pour le statut des salariés. Si les agents de feue l'ANPE auront un droit d'option, ils relèveront du code du travail. La recodification de celui-ci vise, dit-on, à le simplifier ; on ne peut que s'étonner de l'opacité du statut de la future institution, qui dissimule la réalité de vos projets. Rien ne garantit qu'une partie, voire la totalité de ses missions ne sera pas privatisée. L'ANPE sous-traite déjà une grand part de son activité... Vous avez évoqué à l'Assemblée nationale non le « service public » de l'emploi mais le « marché public » de l'emploi ; parlera-t-on demain d'un « marché des services de l'emploi » ouvert à la concurrence ?
On peut également s'interroger sur le sort que le Gouvernement et sa majorité complice réservent à l'Afpa. La CMP a retenu un amendement de Mme Procaccia demandant un rapport sur les modalités du transfert éventuel à la future institution des personnels de l'association. Selon les cas vous prônez la fusion et la dissociation. C'est totalement illogique.
Nous sommes, nous, favorables à un service public de l'emploi qui assure toutes les missions, qui soit un outil efficace au service des employeurs, des salariés et des demandeurs d'emploi. Les salariés de l'Afpa ont interrogé leur direction le 24 janvier dernier sur la présence dans leurs murs de la Sovafim ; comme elle ne leur a pas répondu, je me tourne vers le Gouvernement pour savoir si l'État, comme annoncé par M. Copé en son temps, entend amplifier la vente de son patrimoine.
Nous redoutons donc la privatisation de l'Afpa. Vous vendez ses biens, transférez son personnel ; il ne restera plus qu'à offrir au privé sa mission d'orientation. Qu'il en aille de même pour la mission de placement de la future institution, et le risque est grand, que demain, ses agents soient confinés au contrôle et à la lutte contre la fraude.
Comme le demande Le Figaro : qui va payer ? La réforme de la formation professionnelle aura des conséquences. Si les déclarations du Medef sur le financement par les employeurs de la part « formation professionnelle » ne nous rassurent pas totalement, son silence sur la part « orientation » nous inquiète. Je regrette que l'amendement qui traite de cette question ait été adopté par la CMP.
Selon Les Échos d'hier, plus d'un agent de l'ANPE sur cinq est en contrat précaire, situation confirmée par le rapport conjoint de l'Igas et de la direction des études du ministère de l'emploi : trois mille quatre cents CDD, deux mille contrats aidés et neuf cents contrats temporaires au sein du service public de l'emploi. Pour FO-ANPE, c'est une question structurante. Vous vous seriez engagée à requalifier tous les CDD de plus de dix-huit mois en CDI de droit privé ; mais certains salariés sont en CDD depuis neuf ans, alors que le maximum légal est de six. Au lieu de requalifier leurs contrats en contrats de droit public, vous leur proposez, non le statut de l'entreprise pour laquelle ils ont travaillé, mais celui d'une agence encore à naître. Il est profondément injuste de les renvoyer ainsi au privé, de bafouer leur histoire personnelle dans le service public. La reconnaissance n'est-elle pas un élément fondamental de la motivation ? Quel sort entendez-vous réserver aux contrats atypiques ou temporaires dans la future institution ? Voulez-vous faire des salariés en contrat précaire les leviers économiques de votre triste fusion ?
Le groupe CRC reste fermement opposé à ce projet de loi qui ne créera aucun droit nouveau pour les demandeurs d'emplois et privatisera plus encore ce qu'il reste du service public de l'emploi.
La discussion générale est close.
Mme Christine Lagarde, ministre. - Je veux d'abord rappeler certains chiffres, qui sont autant de bonnes nouvelles : trois cent douze mille emplois créés depuis le début 2007, trois cent vingt mille nouvelles entreprises, un chômage passé sous les 7,9 % de la population active et les un million neuf cent mille personnes.
Je redis que le Gouvernement est très attaché à l'existence d'un système de formation performant au service des salariés, notamment des plus fragiles et des moins qualifiés d'entre eux, dont l'Afpa est une composante essentielle. Les missions de l'association doivent s'exercer dans le cadre du droit communautaire, notamment celles relatives aux commandes publiques ; c'est pourquoi j'ai écrit à l'Association des régions de France pour que nous travaillions ensemble à la bonne organisation des commandes des collectivités territoriales. Si celle-ci était trop complexe, ce que je ne crois pas, nous examinerions la possibilité d'allonger la période transitoire. Nous ferons le point fin mars.
Je me félicite que le Sénat ait pris l'initiative d'un rapport sur l'organisation des services d'orientation de l'Afpa. J'affirme que le Gouvernement n'a aucune volonté de démantèlement. (Applaudissements à droite)
M. le président. - En application de l'article 42-12 de notre Règlement, lorsqu'il est saisi avant l'Assemblée nationale, le Sénat se prononce par un seul vote sur l'ensemble du texte. Je n'ai été saisi d'aucun amendement ni d'aucune prise de parole sur les articles restant en discussion.
Intervention sur l'ensemble
M. Robert del Picchia. - Ce texte est important et le groupe UMP se réjouit de voir enfin le chômeur placé au centre de la mobilisation pour l'emploi. Comme l'a dit le Président de la République, le devoir d'un chômeur c'est de rechercher un emploi et celui des autorités, c'est de tout faire pour l'aider à en trouver un, plutôt que de lui faire subir le fardeau de la complexité administrative ! Un guichet unique d'accueil, polyvalent, un meilleur rapprochement de l'offre et de la demande d'emploi, voilà des outils utiles à l'objectif fixé par le chef de l'État, d'atteindre le plein emploi en cinq ans, soit un taux de chômage sous la barre des 5 % et un taux d'emploi proche de 70 %. Il n'est pas normal qu'aujourd'hui encore, il y ait deux millions de chômeurs et quatre cent mille offres d'emplois non satisfaites !
Le Sénat a amélioré ce texte en première lecture, la CMP a confirmé la représentation des collectivités locales dans le nouvel organisme né de la fusion et les conventions que nous avons prévues avec les maisons de l'emploi ; nous avons créé des conseils régionaux de l'emploi, à l'instar du conseil national, coprésidés par le préfet de région et le président du conseil régional : une expérimentation sera lancée dans deux régions, nous la suivrons très attentivement. L'Assemblée nationale a complété le dispositif, en prévoyant la représentation des maisons de l'emploi au conseil national de l'emploi. Les élus locaux se réjouissent de ces améliorations, donc la plupart d'entre nous.
Nous appelons de nos voeux la réforme annoncée de la formation professionnelle. Notre commission souhaite que le Gouvernement propose au Parlement un rapport sur le transfert de l'Afpa à la nouvelle institution, les enjeux sont importants.
La politique gouvernementale pour l'emploi commence à porter ses fruits. La baisse du chômage, continue depuis deux ans, s'est accélérée au troisième trimestre 2007. Ce texte apporte de nouveaux outils, complémentaires à la réforme importante entreprise par les partenaires sociaux. L'UMP s'en félicite et votera pour ! (Applaudissements à droite)
Les conclusions de la CMP sont adoptées.
La séance est suspendue à 10 h 35.
La séance reprend à 11 h 5.
Pouvoir d'achat (CMP)
M. le président. - L'ordre du jour appelle l'examen des conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi pour le pouvoir d'achat.
Discussion générale
M. Nicolas About, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire. - La commission mixte paritaire, qui s'est réunie ce mardi, a décidé de retenir, dans son intégralité, le texte adopté par le Sénat et auquel nous avions apporté quatre modifications principales.
Nous avions d'abord prolongé jusqu'au 31 décembre 2009 la période de rachat des jours de RTT, allant sur ce point plus loin que l'Assemblée nationale qui avait fixé son terme au 30 juin 2008. Le Sénat avait ensuite adopté un article additionnel afin que les salariés puissent verser à un fonds de mutualisation, mis en place par leur entreprise, le gain retiré de la monétisation de jours de RTT, ce qui permettrait de financer le maintien de la rémunération d'un de leurs collègues parti accomplir une activité caritative ou humanitaire. Ce dispositif généreux et original, à l'élaboration duquel le Haut-commissariat aux solidarités actives a largement contribué, devrait permettre aux associations de bénéficier du concours de salariés expérimentés, qui hésitent aujourd'hui à s'engager dans la mesure où le maintien de leur rémunération n'est pas garanti. Nous avons eu un débat technique particulièrement complexe en commission mixte sur la question du régime fiscal applicable aux dons effectués dans ce cadre : le salarié pourra-t-il bénéficier de la réduction d'impôt habituellement prévue en cas de don à des oeuvres caritatives ? Selon l'administration fiscale, le bénéfice de cette réduction d'impôt est exclu dans la mesure où les sommes concernées sont déjà exonérées d'impôt sur le revenu : il y aurait donc un cumul d'avantages, contraire aux principes de notre législation fiscale. Je suis heureux de le savoir... (Sourires) Les explications qui nous ont été fournies, à notre demande, pour préparer la commission mixte paritaire n'étaient pourtant pas d'une limpidité convaincante. En effet, le rachat de jours de RTT donne déjà droit à une exonération d'impôt sur le revenu lorsqu'il entre dans le cadre défini par la loi Tepa du 21 août 2007. Dans ce cas, le fait pour le salarié d'effectuer un don ne lui procure aucun avantage fiscal supplémentaire par rapport à ce qu'il aurait obtenu de toute façon. Les salariés n'auront donc pas intérêt à utiliser ce dispositif puisqu'il sera plus avantageux pour eux de racheter des jours de RTT puis d'effectuer un don sans passer par le fonds créé dans leur entreprise. Dans cette hypothèse, ils cumuleront sans difficulté exonération d'impôts et réduction de 66 % au titre des dons aux oeuvres. Nous restons donc, sur ce point, dans une incertitude qui continue à aiguiser ma curiosité.
Mme Christine Boutin, ministre du logement et de la ville. - Ca ne m'étonne pas ! (Sourires)
M. Nicolas About, rapporteur. - En outre, le Sénat avait également obtenu que le Gouvernement remette au Parlement, avant la fin du premier semestre 2008, un rapport traitant de la politique d'intéressement dans le secteur public. Nos collègues députés ont réservé un très bon accueil à cette initiative, y voyant un levier utile pour la réforme de l'État.
La dernière mesure importante concerne le volet logement. Le Sénat avait donné aux bailleurs la possibilité de recevoir directement, à leur demande, les allocations logement perçues par leur locataire. La commission mixte a confirmé cette mesure, ce qui a permis de rééquilibrer un texte au départ centré sur les seules préoccupations des locataires.
Après ce rapide rappel des apports du Sénat, je tiens à saluer la qualité du travail de l'Assemblée nationale qui a abouti à plusieurs avancées significatives. A l'initiative du président Méhaignerie, il sera ainsi possible de convertir des repos compensateurs en majoration salariale et l'exonération de la redevance dont bénéficient les retraités à revenus modestes sera prorogée.
Je vous invite donc à adopter ce texte afin de répondre au plus vite aux attentes de nos concitoyens en matière de relance du pouvoir d'achat. (Applaudissements à droite et au centre)
Mme Raymonde Le Texier. - Nous avons déjà dit tout le mal que nous pensions de ce texte et les conclusions de la commission mixte paritaire ne nous ont pas fait changer d'avis. Cette loi est une supercherie qui, en guise d'amélioration du pouvoir d'achat, ne propose aux salariés que de vendre leurs jours de repos ou de puiser dans leur épargne. Mais vous êtes-vous demandé, ne serait--e qu'une fois, pourquoi un salarié ordinaire ne peut plus faire face à ses dépenses courantes ? II conviendrait pourtant de se poser la question puisque, malgré le triomphalisme du Gouvernement sur l'envolée des heures supplémentaires et le prétendu succès de la loi Tepa, jamais l'indicateur de l'Insee chargé de mesurer le moral des ménages n'est tombé aussi bas depuis sa création en 1987.
Ce gouvernement voulait un choc de confiance dans le pays : il a provoqué un traumatisme. Votre leitmotiv, c'est le respect du travail. Mais ne faut-il pas commencer par le payer ? Augmenter le pouvoir d'achat, n'est-ce pas d'abord relancer les négociations salariales ? Enfin, susciter la confiance ne passe certainement pas par la destruction des protections sociales... Vous vous félicitez de l'explosion du nombre d'heures supplémentaires et du succès annoncé du rachat des RTT, sans vous interroger sur ce qu'une telle évolution révèle sur l'état de notre société : quand les fins de mois arrivent de plus en plus tôt, quand les salaires stagnent et que les prix s'envolent, quel autre choix que de faire des heures supplémentaires et de sacrifier les récupérations puisqu'on ne propose rien d'autre au salarié ? Est-il décent de parler de « choix » et de « liberté » pour qualifier les rapports entre employeur et employé en période de chômage de masse, de précarisation du travail, d'augmentation de la pauvreté ? Est-on libre quand des centaines de personnes peuvent prétendre à occuper votre poste ? Est-on libre de prendre ou non ses RTT quand c'est le seul moyen de boucler ses fins de mois ?
En misant sur l'allongement de la durée du travail, votre politique pèse sur l'emploi et accentue encore la pression sur les salariés. Elle développe également les inégalités entre les salariés. Les femmes, qui prennent souvent leurs RTT le mercredi, seront pénalisées alors que ce sont elles qui ont les salaires les plus bas.
A cette aune, les modifications de cette commission mixte paritaire paraissent dérisoires. La prolongation de l'expérimentation jusqu'à la fin de 2009 prolonge l'effet d'aubaine pour les entreprises et accentue le manque à gagner pour la sécurité sociale. Mais ce déficit ne vous inquiète guère, tant l'habitude a été prise de faire assumer aux assurés sociaux les avantages accordés aux entreprises. A défaut de payer le travail, vous oubliez rarement de taxer les salariés les plus modestes. En prolongeant la durée de l'expérience, peut-être voulez-vous tout simplement gagner du temps pour revenir sur la durée légale du temps de travail et légiférer sur la représentativité des syndicats.
Le congé humanitaire n'a rien à voir avec le pouvoir d'achat et alourdit le texte alors qu'il ne concernera qu'une infime minorité de personnes. Cet article-là est purement démagogique...
M. Nicolas About, rapporteur. - Mais non !
Mme Raymonde Le Texier. - ...et permet de se donner bonne conscience à peu de frais. Dommage que vos bonnes intentions s'arrêtent à cet article de pure charité, quand vous ignorez le mal-être et les difficultés quotidiennes de nos concitoyens. Pourtant, quand le moral des ménages est aussi déprimé, n'est-il pas temps de sortir de l'idéologie libérale pour agir, enfin, sur la réalité ?
De ce moral en berne, on ne peut espérer une consommation en hausse. Alexander Law, économiste au cabinet Xerfi, a largement revu à la baisse les perspectives de croissance de l'économie française en les estimant à 1,4 %.
J'ai parlé de traumatisme. Le choc de croissance que nous promettait le Président de la République se transforme en commotion. Notre groupe n'a pas d'autres choix que de voter contre ce mauvais texte.
Mme Annie David. - Nous en arrivons donc au second texte de cette matinée, non moins symbolique que le précédant de votre mise en oeuvre d'une politique libérale.
M. Robert del Picchia. - C'est vrai.
Mme Annie David. - Votre majorité va sans doute adopter votre texte abusivement intitulé « Pour le pouvoir d'achat ». Bien sûr, certains salariés, ceux qui ont des RTT en trop ou des primes d'intéressement ou de participation, pourront les monétiser, mais ils sont loin d'être les plus nombreux.
Malheureusement, la commission mixte paritaire réunie mardi n'a pas modifié l'esprit de votre projet de loi, qui demeure inchangé après son passage au Sénat. Vous vous doutez donc quel sort lui accordera mon groupe !
L'augmentation du pouvoir d'achat passe, selon nous, par une augmentation mensuelle des revenus, car c'est chaque fin de mois que nombre de nos concitoyens sont en difficulté. Cela passe donc par une revalorisation de leur travail, c'est-à-dire une augmentation de leur salaire, seule source de revenus pour beaucoup d'entre eux. Nous avons eu, à ce propos, un échange intéressant lors de la CMP mais je voudrais dire à M. Dassault que je fais bien la différence entre salaires et primes. Je n'ai certes pas son expérience de manager, mais il n'a pas la mienne en tant que salariée. L'une vaut l'autre, elles forgent un point de vue fort différent sur la société à construire !
Vous parlez d'esprit d'entreprise, de motivation, mais quoi de plus motivant, de plus gratifiant, que la reconnaissance de son travail par un salaire à la hauteur de sa tâche et respectueux de chacun ? Le partage des richesses ne doit pas se faire entre quelques privilégiés, mais bien avec tous les salariés qui ont contribué, à hauteur de leur classification et donc rémunération, à la réalisation de ces richesses.
Lorsque je parle d'augmentation des salaires, j'entends aussi bien ceux du privé que du public, ce qui est beaucoup plus équitable que ce que vous proposez. Car la question des salaires est et demeure bien la vraie question : ils sont tellement bas et les prix tellement hauts que la fin du mois, pour beaucoup, est plus proche du 15, voire du 10, que du 30 !
Celles et ceux qui pourraient un peu épargner le feront à un taux très réduit puisque vous plafonnez l'augmentation du taux du livret A. Les banques ont alors tout loisir pour proposer des placements à risque, y compris aux retraités, leur promettant des bénéfices records, avec le résultat qu'on connaît... et je ne reparlerai pas de la Société générale.
Interrogez-les : la plupart des salariés vous diront avoir l'impression que leur travail n'est pas correctement rémunéré. De fait, la répartition capital/travail s'est inversée ces dernières décennies. Selon la Commission européenne, la part des salaires a diminué plus fortement en France qu'ailleurs en Europe, perdant 9,3 % de 1983 à 2006. Ce constat est renforcé par le « portail sociétal » réalisé par l'Insee en 2007 : la masse des salaires et des traitements bruts progresserait moins vite en 2005 et 2006 que les années précédentes tandis que les revenus patrimoniaux augmentent considérablement, à l'image des revenus locatifs qui progressent de 8,6 %.
Ainsi donc, pour relancer le pouvoir d'achat pour toutes et tous, il s'agit de relancer les salaires ! Les salariés ne s'y trompent pas. Si certains souhaitent monétiser leur RTT sous prétexte qu'ils n'arrivent pas à les consommer tous, ce ne sont pas les salariés dont le pouvoir d'achat est le plus bas. Ce sont les cadres, soumis à des conditions de travail telles qu'ils ne peuvent pas bénéficier des accords sur les 35 heures. Quant aux salariés dont le salaire est tellement bas que leur pouvoir d'achat a besoin d'un coup de pouce, ils seront forcément d'accord pour le rachat de leur RTT. Mais proposez-leur une augmentation de salaire, elle sera certainement acceptée : tout l'art est dans la question !
Je reviens sur le référendum dans la société Continental, dont vous nous avez beaucoup parlé. Le nombre d'entreprises qui ferment augmente chaque jour. Gouvernants et patronat, à force de ressasser leurs discours sur le travail, la course à la flexibilité et à l'enrichissement des actionnaires, soumettent les salariés à un insidieux chantage à la délocalisation. Si l'employeur avait organisé un référendum dont la question aurait été : « Êtes-vous favorable à une meilleure répartition des bénéfices entre le capital et les revenus du travail ? », les salariés auraient massivement voté oui. En sacrifiant leur RTT et en revenant sur leur temps de travail, les salariés de Continental ont simplement demandé plus d'argent pour boucler les fins de mois difficiles, preuve, s'il en est, que les salaires ne suffisent plus. N'ont-ils pas, en outre, craint une délocalisation ?
Votre projet de loi n'a en vérité qu'une mission, faire écran de fumée à la vraie préoccupation des salariés. Je regrette d'ailleurs que vous ayez rejeté tous nos amendements et préféré élargir plus encore les conditions d'ouverture au droit de rachat en allongeant considérablement la durée de ce dispositif. Ainsi, vous prévoyez le rachat des heures restantes et, pire encore, vous incitez les salariés à ne plus prendre les journées de récupération en leur promettant une rémunération accessoire. Tant pis si cela pèse sur la santé du travailleur, tant pis si cela joue sur l'équilibre familial ; ce qui compte, c'est de faire fonctionner, même artificiellement, le slogan présidentiel du « Travailler plus pour gagner plus ».
Nous avons d'ailleurs eu, lors de la CMP, un débat fort intéressant quand il est apparu que les conventions de rachat des RTT se négocieraient au moment des négociations annuelles obligatoires. Ce détail m'avait échappé lors du débat mais un député de votre majorité l'a souligné mardi matin. S'il a vu juste, ce que je vous demande de préciser, madame la ministre, alors j'ai les plus grandes craintes quant à la bonne tenue de ces négociations annuelles obligatoires. Elles sont le seul moment pour les salariés de parler de leur rémunération ; y intégrer le rachat des RTT, c'est leur donner une valeur, au moins symbolique, égale aux salaires ; c'est faire croire aux salariés que le rachat des RTT organisé par votre dispositif est partie prenante de leur salaire, ce que nous ne pouvons que dénoncer. Les patrons vont proposer une augmentation du temps de travail des salariés, par le rachat des RTT, en guise de réponse aux demandes légitimes d'augmentation de salaires. La boucle est bouclée.
Quant aux autres dispositifs de votre texte, nous n'y sommes pas non plus favorables. Peut-être le salarié qui bénéficie d'une épargne salariale pourra-t-il en demander le déblocage. Sans doute l'obtiendra-t-il. Quel en sera l'impact sur le pouvoir d'achat ? Nul ne le sait. Ce qui est certain, c'est que les effets seront très limités. Lorsqu'un de vos précédents gouvernements avait eu recours à ce mécanisme, seul un tiers des sommes débloquées sont allées à la consommation, la plus grande masse allant en direction d'autres modes d'épargne, comme les PEA. Autant dire que ceux qui se frottent les mains aujourd'hui, ce sont, une nouvelle fois, les banquiers. Le Président voulait être, disait-il, celui des ruptures ; il est, en la matière, celui de la continuité.
Quant à la prime de 1 000 euros, autant dire que c'est le néant puisqu'elle repose sur la seule bonne volonté des employeurs. Rien de précis, rien de garanti, juste l'espoir que les employeurs participeront à la relance du pouvoir d'achat en faisant appel à leur bon coeur. On connaît le sort des mesures volontaires. Une fois ces mécanismes dénoncés, il ne reste plus que de l'affichage.
Ce que vous vous gardez de dire, c'est que votre projet de relance du pouvoir d'achat n'aura rien coûté à l'État. Vous avez exonéré les droits de succession, défiscalisé encore plus ce qui pouvait l'être, exonéré les patrons de cotisations sociales, tout cela pour 15 milliards. Mais pour les salariés, il n'y a plus d'argent, les caisses sont soudainement vides. Les Français apprécieront.
Que reste-t-il alors de votre loi ? Un curieux dispositif, longuement discuté sous le nom d'amendement Hirsch, selon lequel un salarié pourra faire don des journées de RTT à un fonds destiné à rémunérer d'autres salariés participant à une action désintéressée. Rares seront les salariés à le faire, comme l'ont d'ailleurs souligné les parlementaires de votre majorité lors de la CMP. Ce cavalier législatif est largement inspiré du domaine bancaire, où le client ayant acquis des points peut les offrir à une association caritative, qui en bénéficiera sous forme d'espèce. Il n'en reste pas moins que les sommes données sous forme de jours de RTT n'ouvriront pas droit à l'abattement fiscal qui est la règle en cas de dons. Les généreux salariés préféreront donc se faire payer leurs RTT et bénéficier des exonérations Tepa, pour ensuite faire un chèque à une association et bénéficier de l'abattement fiscal.
M. Nicolas About, rapporteur. - Eh oui...
Mme Annie David. - En commission mixte paritaire, le président About a présenté là-dessus un amendement, qu'il a finalement retiré... Décidément, ce n'est pas seulement le projet de loi qui a été construit dans l'urgence, ce sont aussi les amendements soutenus par le Gouvernement et habilement déposés par des sénateurs.
Les trois articles sur le logement ? Même s'ils sont bienvenus, ils ne modifieront pas considérablement la vie de nos concitoyens. Tel aurait cependant pu être le cas grâce aux amendements déposés par mon groupe, visant à exonérer les étudiants de la taxe d'habitation ou à geler les loyers. Je regrette également que votre Gouvernement ne se soit pas saisi de ce texte pour encadrer la vente des logements sociaux. Au nom du parcours résidentiel que vous vantez tant, certains maires vendent des logements sociaux alors même, dans certains cas, qu'ils ne respectent pas la loi SRU et ne prévoient pas de plan de construction dans les années à venir.
Pourtant, le nombre de demandeurs croît considérablement. Aux pauvres s'ajoutent désormais les catégories moyennes, pour qui le loyer est la première charge du couple, représentant parfois 45 % des revenus. Cette évolution est la conséquence d'un double phénomène, l'augmentation considérable des loyers et la stagnation des salaires. Là encore, la boucle est bouclée.
Nous serons très vigilants sur la question du logement insalubre. Vous avez pris des engagements, nous veillerons à ce qu'ils soient tenus au plus vite.
Entre des mesures partiellement efficaces et d'autres totalement inappropriées, le caractère précipité de ce texte ne fait plus doute. Mais la situation est grave. Nos concitoyens s'appauvrissent de jour en jour. La crainte dans l'avenir grandit, la précarisation de la société pèse lourd sur le moral des ménages et sur l'économie.
Pis, votre politique aggrave la situation. Lorsque l'on parle de politique de civilisation, on devrait s'interroger de quelle civilisation l'on parle... En fait, votre politique prépare une société à deux vitesses, comme aux Etats-Unis ! Le groupe CRC votera contre ce texte.
Mme Christine Boutin, ministre. - Je suis désolée d'avoir déçu Mme David à qui rien de ce que nous proposons ne convient : je ne suis pas M. Bertrand, mais comme je tiens à ce qu'elle reçoive une réponse précise, je transmettrai sa question à M. Bertrand qui lui répondra personnellement.
Ce texte est symbolique parce qu'il repose sur deux valeurs fortes qui permettent à tout homme d'être debout : la valeur travail et la nécessité d'avoir un logement. Depuis mai dernier, nous défendons la valorisation du travail et le retour au travail. Le Président de la République a porté cette valeur durant la campagne électorale et les Français y ont pleinement souscrit. Je veux remercier les parlementaires d'avoir contribué à répondre à une préoccupation majeure de nos concitoyens.
Valoriser le travail, c'était l'objet du dispositif heures supplémentaires cet été, c'est celui de la monétisation des journées de RTT aujourd'hui. C'est aussi redonner un travail à ceux qui n'en avaient plus : grâce à l'action de Mme Lagarde, le chômage recule à un niveau inconnu depuis des années ; or le retour au travail donne du pouvoir d'achat.
Augmenter le pouvoir d'achat grâce au travail, cela marche et 50 % des entreprises en décembre contre 40 % en novembre ont eu recours aux heures supplémentaires et bénéficié de la loi Tepa. Le projet que vous avez examiné et renforcé comporte cinq mesures de nature à insuffler un dynamisme supplémentaire.
Première mesure : offrir un choix aux salariés. Chacun d'entre eux, en effet, pourra se demander : « Que vais-je choisir, un repos supplémentaire ou une augmentation de pouvoir d'achat ? » Et pour tous les salariés qui ne peuvent ou ne veulent pas prendre leurs jours de RTT, cela se traduira par plus de rémunération. Nous demandons aux employeurs de jouer le jeu car cette mesure, nous ne l'avons pas inventée dans nos bureaux, elle nous a été demandée. Bon nombre d'entreprises provisionnent déjà les jours de RTT. Nous leur offrons donc un dispositif simple et chacun pourra s'y référer en approfondissant le dialogue social auquel M. Bertrand est très attaché.
Un ouvrier payé au Smic monétisant cinq jours de RTT verrait sa rémunération augmenter de 370 euros, et de 740 euros pour dix jours. Un cadre, rémunéré à 3 800 euros gagnerait 1 950 euros en monétisant dix jours...
Mme Annie David. - Sur quelle période ?
Mme Christine Boutin, ministre. - Les exonérations de cotisations sociales seront attractives pour l'employeur : la journée de RTT d'un salarié payé deux fois le Smic lui revient 170 euros, mais sa monétisation 148 euros.
Les RTT concernent sept millions de Français, les comptes épargne temps un million, et les forfaits jour deux millions : c'est dire combien ces mesures vont bénéficier aux salariés. L'Assemblée nationale a élargi de six mois les possibilités de rachat et supprimé le plafond de dix jours, puis le Sénat a consolidé cette approche en prolongeant la disposition jusqu'au 31 décembre 2009, ce qu'a confirmé la commission mixte paritaire.
La deuxième mesure permet de profiter plus rapidement des sommes issues de la participation. Un salarié pourra retirer jusqu'à 10 000 euros, qui ne seront pas soumis à cotisation sociale ni à l'impôt sur le revenu mais resteront assujettis à la CSG et au CRDS. Nous voulons préserver l'épargne salariale et ne permettre son déblocage qu'après négociation au niveau de l'entreprise. Les sommes investies dans les Perco sont exclues du dispositif afin de privilégier l'épargne longue.
Si la moitié des salariés vont profiter de cette mesure, n'oublions pas, car personne ne doit l'être, ces sept millions de personnes qui travaillent dans les entreprises de moins de cinquante salariés. Je connais l'attachement politique fort à la participation de M. Dassault, de Mme Debré, de M. Gournac et de Mme Proccacia, avec lesquels nous avons eu des échanges de qualité. Ces entreprises pourront verser - c'est la troisième mesure- une prime exceptionnelle de 1 000 euros. Je comprends d'autant moins les observations de Mme David que cette prime sera soumise au régime fiscal de l'intéressement et fera l'objet d'un accord collectif ou d'un référendum d'entreprise. Elle ne se substitue pas à une augmentation de salaire et a vocation à profiter aux salariés à temps partiel comme à ceux à temps plein.
Vous avez également fait le choix de prolonger l'exonération de redevance télé pour les personnes âgées exonérées de l'impôt sur le revenu. Voilà clairement une mesure pour le pouvoir d'achat.
J'en viens au logement, sujet qui me tient tout particulièrement à coeur. L'indexation des loyers sur les prix à la consommation -c'est la quatrième mesure- représente une économie de 600 millions d'euros l'an pour tous les locataires. Elle s'appliquera aux nouvelles locations en cours comme aux baux en cours, sans qu'un avenant soit nécessaire. Un amendement de votre rapporteur a utilement prévu une évaluation d'ici trois ans.
Cinquième et dernière mesure : la réduction du dépôt de garantie à un mois de loyer remettra en circulation 600 millions d'euros. Il faut la rapprocher de l'accord sur la généralisation du Locapass que j'ai signé le 21 décembre dernier. Le locataire pourra choisir de demander le versement du dépôt de garantie à un organisme 1 % logement, qu'il remboursera sans intérêt sur trois ans. Cela marque une volonté d'équilibre et de justice : le locataire n'aura pas à avancer le dépôt de garantie que le bailleur percevra néanmoins immédiatement. Cette extension de l'« avance Locapass »s'appliquera dès la promulgation de la loi grâce à l'amendement à l'article 5 de MM. Chartier et Lefebvre, sous-amendé par le Gouvernement pour permettre le versement direct du dépôt de garantie par un tiers.
Je salue l'initiative de M. About qui a proposé à l'article 6 un dispositif de nature à rassurer les bailleurs : la généralisation du tiers payant pour l'allocation logement et son caractère dédié au loyer réduiront les risques d'impayé.
Je souhaite que les propriétaires privés fassent usage de ces apports du Parlement qui répondent aux attentes de nos concitoyens.
D'autres dispositifs sont à l'étude ; le Gouvernement proposera un projet de loi fondateur sur le logement au cours du premier semestre 2008 qui instaurera une garantie généralisée des risques locatifs. Cette réforme devrait notamment permettre de trouver une alternative aux expulsions locatives.
Je vous remercie pour la qualité de nos débats. Ce projet répond à une très forte attente des Français, dont une grande majorité approuve les mesures proposées. Je sais que vous aurez à coeur d'être à ce rendez-vous, au seul bénéfice des Français, dans le respect des engagements pris devant et avec les Français. (Applaudissements à droite et au centre)
La discussion générale est close.
M. le président. - Je rappelle qu'en application de l'article 42 de notre Règlement, le Sénat se prononce par un seul vote sur l'ensemble du texte élaboré par la commission mixte paritaire.
Intervention sur l'ensemble
M. Robert del Picchia. - Le Président de la République a fait du pouvoir d'achat l'une de ses priorités, estimant que sa revalorisation ne peut passer que par la réhabilitation du travail. Poursuivant la logique de la loi Tepa, ce texte permet au salarié de racheter, s'il le souhaite, des jours de RTT. Le dispositif, attractif pour l'employeur et incitatif pour le salarié, respecte la liberté de choix de l'un et l'autre.
Le déblocage anticipé de la participation permettra aux ménages d'utiliser librement une partie de leur épargne. Les salariés qui ne sont pas concernés pourront bénéficier d'une prime de 1 000 euros, exonérée de cotisations sociales.
En attendant le projet de loi sur le logement, ce texte indexe les loyers sur le seul indice des prix à la consommation, ce qui ralentira le rythme d'augmentation des loyers, et réduit le dépôt de garantie de deux à un mois, ce qui aura des effets bénéfiques immédiats sur la trésorerie des ménages. Si, dans les années 70, le logement représentait 15 % des dépenses des ménages, les Français lui consacrent aujourd'hui un quart de leur budget !
La CMP a conservé l'ensemble des dispositions adoptées par nos deux assemblées. L'Assemblée nationale a ainsi maintenu le dégrèvement de redevance audiovisuelle pour les personnes âgées aux revenus modestes en 2008 et supprimé la limite de dix jours de RTT pouvant être rachetés. Il est heureux de prévoir un bilan de l'application du dispositif. Notons aussi l'évaluation du nouvel indice d'évolution des loyers. Enfin, le développement du Locapass a été encouragé.
Notre Haute assemblée a également amélioré le texte et je remercie nos rapporteurs pour la qualité de leurs propositions. La commission des affaires sociales a complété et précisé le dispositif de rachat des RTT, et un amendement de Mme Procaccia a étendu la période de rachat jusqu'au 31 décembre 2009.
Le texte était très favorable aux locataires ; la commission des affaires sociales a donc proposé une mesure en faveur des propriétaires, relevant que certains locataires refusent de payer leur loyer tout en percevant une allocation. (Mme Le Texier s'exclame) Nous avons noté la volonté du Gouvernement d'aboutir prochainement à un système de garantie des risques locatifs.
Je salue la détermination du Gouvernement en faveur du pouvoir d'achat des Français. Bien évidemment, notre groupe votera ce projet de loi. (Applaudissements au centre et à droite)
Les conclusions de la commission mixte paritaire sont adoptées
Accord relatif à l'organisation internationale ITER
M. le président. - L'ordre du jour appelle la discussion, selon la procédure simplifiée, du projet de loi autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et l'Organisation internationale ITER pour l'énergie de fusion relatif au siège de l'Organisation ITER et aux privilèges et immunités de l'Organisation ITER sur le territoire français.
L'article unique est adopté.
La séance est suspendue à 11 h 55.
présidence de M. Adrien Gouteyron,vice-président
La séance reprend à 15 heures.
Rétention de sûreté (Urgence - Suite)
M. le président. - Nous reprenons la discussion du projet de loi, après déclaration d'urgence, sur la rétention de sûreté et la déclaration d'irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental. Nous en étions à la discussion des articles.
CMP (Candidatures)
M. le président. - J'informe le Sénat que la commission des lois a procédé à la désignation des candidats qu'elle présentera si le Gouvernement demande la réunion d'une commission mixte paritaire en vue de proposer un texte sur les dispositions du présent projet de loi restant en discussion. Ces candidatures ont été affichées pour permettre le respect du délai réglementaire.
Discussion des articles (Suite)
Article premier (Suite)
M. le président. - Amendement n°16 rectifié, présenté par M. Lecerf au nom de la commission.
Après les mots :
traitement dans
rédiger comme suit la fin de la dernière phrase du deuxième alinéa du II de cet article :
l'un des établissements pénitentiaires spécialisés dont la liste est précisée par décret.
M. Jean-René Lecerf, rapporteur de la commission des lois. - Le projet de loi prévoit que, deux ans avant la libération, le juge de l'application des peines peut décider, au vu du suivi médical et psychologique du condamné, de lui proposer un traitement dans un établissement pénitentiaire spécialisé. L'amendement n°14 rectifié a avancé la date de cette décision, mais la nature de l'« établissement pénitentiaire spécialisé » demeure indécise.
Aux termes de l'article 717-1, les personnes condamnées pour une infraction pour laquelle le suivi socio-judiciaire est encouru doivent exécuter leur peine dans des « établissements pénitentiaires permettant d'assurer un suivi médical et psychologique adapté ». Ces derniers n'ont jamais été clairement définis et il semble que l'administration pénitentiaire considère que tous les établissements pénitentiaires peuvent dispenser ce suivi. Or de nombreuses visites dans les prisons laissent penser que tel n'est pas le cas. Nous proposons d'encourager l'administration à dresser une liste précise de ces établissements et ainsi d'inciter à une véritable spécialisation de certaines structures.
Un psychiatre m'a suggéré que, après évaluation de leur dangerosité dans l'année qui suit leur incarcération, les personnes considérées comme dangereuses soient regroupées dans un établissement adapté pour y être suivies. Selon lui, le traitement ferait disparaître leur « dangerosité » et rendrait la rétention de sûreté inutile.
Mme Rachida Dati, garde des sceaux, ministre de la justice. - Je comprends votre intention : cette liste permettrait de connaître les structures concernées et inciterait à en créer d'autres. Cependant, les établissements se sont spécialisés dans les faits. Ainsi, à Melun, la création d'une commission pluridisciplinaire est issue d'une initiative du secteur sanitaire local, avec du personnel volontaire et dans un cadre expérimental. Un décret ou un arrêté rigidifierait la situation en freinant les bonnes volontés, or il faut agir rapidement pour placer les détenus dans des structures adaptées. Cette expérimentation permet aussi d'établir des statistiques sur la récidive et sur les résultats en matière de réinsertion. Je m'en remets donc à la sagesse du Sénat
M. Jean-René Lecerf, rapporteur. - J'ai entendu les objections du ministre, mais le problème est réel. Ainsi, j'ai lu que Mauzac ou Casabianda étaient des établissements adaptés. Lors de mes visites, j'ai constaté que le régime de détention y est très souple et respecte la dignité des détenus, mais qu'il ne s'agit pas d'établissements spécialisé pouvant dispenser un traitement adapté. Les horaires des psychiatres, notamment, y sont homéopathiques.
Je comprends toutefois qu'un peu de temps soit nécessaire pour mettre en place ces structures. Puisque nous allons nous retrouver très vite pour examiner la loi pénitentiaire et traiter à nouveau de ce point, je prends la responsabilité de retirer l'amendement.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. - Attendre, toujours attendre la loi pénitentiaire...
M. Pierre-Yves Collombat. - Je suis étonné de l'argumentation de Mme la ministre. L'un des nombreux problèmes que pose ce texte est qu'il n'existe aucune structure pour évaluer la dangerosité criminologique, et encore moins pour la traiter. M. Lecerf rappelle qu'il faut se donner les moyens intellectuels et matériels pour appliquer les textes. Et la ministre nous dit qu'il faut attendre pour prendre un décret ? Je croyais que nous étions dans l'urgence.
M. Richard Yung. - Je partage le point de vue de Pierre-Yves Collombat. Il n'est pas possible, malheureusement, d'ouvrir un établissement spécialisé tous les mois. L'argument des délais pour fixer la liste des établissements n'est pas convaincant. Cela ne retarderait pas la prise en charge des personnes concernées.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. - Selon Mme le ministre, il n'est pas opportun d'établir cette liste car la création d'établissements spécialisés se fait dans la pratique. Et leur faire attendre une reconnaissance administrative constituerait une formalité bureaucratique qui découragerait les bonnes volontés. J'envisage le problème différemment, pour arriver à la même conclusion. A l'heure actuelle, les moyens manquent pour prendre en charge les personnes concernées. Sans approuver le reste du texte, nous pensons que le minimum serait de créer des établissements spécialisés et concentrer pour cela les moyens nécessaires.
Mme Rachida Dati, garde des sceaux. - Monsieur Collombat, l'évaluation de la dangerosité par une commission pluridisciplinaire existe déjà puisqu'elle est prévue par la loi de 2005. Il faut la distinguer du traitement, qui fait l'objet de l'amendement présenté par Jean-René Lecerf.
Madame Borvo Cohen-Seat, si je m'oppose à la fixation de la liste des établissements spécialisés par décret, ce n'est pas pour éviter une procédure bureaucratique, mais parce que je crains qu'ainsi on retarde le placement d'un détenu dangereux dans un autre établissement adapté, à défaut de place dans une structure prévue par le décret. D'où l'exemple de Melun, dont 80 à 90 % des détenus sont des délinquants sexuels lourdement condamnés, mais qui n'est jamais cité.
Nous donnons ici la possibilité aux établissements de développer des partenariats avec le secteur psychiatrique local, comme cela s'est fait du reste dans le passé sur la base des initiatives et de la bonne volonté des uns et des autres.
Sur le fond, je n'étais pas hostile à l'amendement, je le répète, mais il s'agit de deux types d'établissements distincts, les établissements pénitentiaires et les établissements de rétention, qui sont des hôpitaux.
L'amendement n°16 rectifié est retiré.
M. le président. - Amendement n°44, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin, Voynet, MM. Desessard et Muller.
Rédiger comme suit le dernier alinéa du II de cet article :
« Les agents et collaborateurs du service public pénitentiaire ne peuvent transmettre aux personnels de santé chargés de dispenser les soins aux détenus que les informations strictement nécessaires à la mise en oeuvre des mesures de protection des personnes. »
Amendement n°46, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin, Voynet, MM. Desessard et Muller.
Au début du dernier alinéa du II de cet article, ajouter les mots :
Après avoir dûment recueilli le consentement du détenu,
Amendement n°42, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin, Voynet, MM. Desessard et Muller.
Compléter le II de cet article par un alinéa ainsi rédigé :
« L'article 226-13 du code pénal est applicable aux informations mentionnées à l'alinéa précédent. »
Mme Alima Boumediene-Thiery. - Le secret médical s'impose non seulement au médecin mais aussi au personnel administratif, aux secrétaires médicales, aux agents pénitentiaires, à tous ceux qui ont connaissance du dossier médical. Le code pénal punit d'un an d'emprisonnement et d'une amende les personnes qui divulgueraient ces informations alors qu'elles en sont dépositaires dans le cadre de leur profession.
Il convient, c'est l'objet de l'amendement n°44, de limiter les informations circulant entre les établissements au strict nécessaire. Nous supprimons le terme « utile », juridiquement douteux.
Le respect du secret médical n'est pas absolu : il peut être levé si le malade donne son consentement. Les informations visées par cet article vont au-delà de la santé du détenu. Il y a là une violation du respect de la vie privée et une ingérence que seul l'accord du condamné peut justifier. Tel est l'objet de l'amendement n°46.
La rédaction ne comporte aucune articulation entre l'article 226-13 du code pénal et le type d'informations qui peuvent être transmises, médicales mais aussi personnelles. Le droit à la vie privée du détenu doit être respecté : tel est l'objet de la précision apportée par l'amendement n°42.
M. Jean-René Lecerf, rapporteur. - Le n°44 restreint excessivement la transmission des informations utiles à la sécurité des personnes. Cet article est complété par une mesure à l'article 8, qui fait obligation au directeur d'établissement de signaler tout risque pour la sécurité des personnes. Nous voulons un meilleur partage de l'information au sein des prisons : avis défavorable.
Même avis sur le n°46 : il n'est pas souhaitable de demander l'accord de l'intéressé pour informer d'un risque lié à son comportement. Allons-nous lui demander l'autorisation de signaler qu'il manifeste une attitude suicidaire ?
Retrait du n°42 : nous sommes d'accord sur le fond, mais l'article 226-13, précisément, s'applique sans référence expresse à un type d'informations. Une telle référence affaiblirait sa portée.
Mme Rachida Dati, garde des sceaux. - Même avis que la commission sur chacun des trois amendements. Je signale que l'Ordre des médecins, que nous avons interrogé, a approuvé la rédaction de l'article. La transmission des informations utiles n'empêche pas le respect du secret médical, mais évite la mise en cause de la responsabilité du personnel pénitentiaire pour non-assistance à personne en danger.
Certains détenus sont très fragiles. Un état représentant un risque peut être décelé au cours de conversations ou lors d'activités. Il faut pouvoir le signaler. Enfin, sur le n°42, je rappelle que l'administration pénitentiaire est soumise au secret professionnel.
L'amendement n°44 n'est pas adopté, non plus que les n°s46 et 42.
M. le président. - Amendement n°70, présenté par Mme Borvo Cohen-Seat et les membres du groupe CRC.
Supprimer le III de cet article.
Mme Josiane Mathon-Poinat. - La commission régionale de la rétention de sûreté pourra prolonger une décision déjà en oeuvre de placement sous surveillance judiciaire ou sous surveillance électronique mobile. Et ce, indéfiniment ! Jusqu'à présent, ces obligations ne pouvaient excéder la durée correspondant aux réductions de peine.
La commission des lois n'a pas manqué de souligner la difficulté à maintenir sans limitation de durée une personne sous surveillance électronique, ni les contradictions, ni le risque d'inconstitutionnalité, notamment au regard de la non rétroactivité des lois. Elle a tenté de contourner la difficulté par une nouvelle rédaction du III, mais on demeure dans la confusion. Certes, le Conseil constitutionnel, dans une décision du 8 décembre 2005, a indiqué que la surveillance judiciaire pouvait être rétroactive, mais parce que limitée à la durée de la réduction de peine, car elle constitue alors une modalité d'exécution de la peine. Ici, nous ne sommes plus dans ce cadre, puisque la commission régionale pourra prolonger la surveillance électronique au-delà de la durée de la peine. La commission des lois supprime la notion de « prolongation » et définit le dispositif comme une « surveillance de sûreté ». Mais accepter cette disposition, ce serait accepter que la juridiction d'origine -la cour d'assises- délègue une partie de son pouvoir à une commission -qualifiée de « juridiction »... Il est bien difficile pour une cour d'apprécier au moment du jugement la dangerosité et la nécessité de soins quinze années plus tard. Le « principe de précaution » prévaudra inévitablement.
L'intervention de la justice s'arrête quand prend fin la peine. Ici, aucune infraction n'est exigée et la peine est achevée. En conséquence, la commission régionale, même composée de trois magistrats, ne saurait être considérée comme une juridiction ; elle demeure du domaine administratif et ne peut remettre en cause une décision juridictionnelle. La qualifier de « juridiction » n'y change rien. En outre, les manquements à l'obligation de surveillance judiciaire pourront être sanctionnés par la rétention de sûreté. Seront concernées les personnes actuellement détenues. Une autre manière de faire revenir la rétroactivité par la petite porte !
M. le président. - Amendement n°17, présenté par M. Lecerf au nom de la commission.
Dans le premier alinéa du texte proposé par le III de cet article pour l'article 723-37 du code de procédure pénale, remplacer les mots :
faisant l'objet de l'une des condamnations
par les mots :
condamnée à une réclusion criminelle d'une durée égale ou supérieure à quinze ans pour l'une des infractions
M. Jean-René Lecerf, rapporteur. - Rédactionnel.
M. le président. - Amendement n°18, présenté par M. Lecerf au nom de la commission.
I. - Après le mot :
décider
rédiger comme suit la fin du premier alinéa du texte proposé par le III de cet article pour l'article 723-37 du code de procédure pénale :
de prolonger tout ou partie des obligations auxquelles est astreinte la personne, au-delà de la limite prévue à l'article 723-29, en la plaçant sous surveillance de sûreté pour une durée d'un an.
II. - Rédiger comme suit le début du troisième alinéa du même texte :
Le placement sous surveillance de sûreté ne peut être ordonné, ...
III. - Dans le cinquième alinéa (2°) du même texte, remplacer le mot :
prolongation
par le mot :
mesure
IV. Rédiger comme suit le début du sixième alinéa du même texte :
La surveillance de sûreté peut être prolongée selon ...
V. Supprimer le septième alinéa du même texte.
M. Jean-René Lecerf, rapporteur. - Ce texte autorise la commission régionale à prolonger la surveillance judiciaire dont peut faire l'objet un retenu d'un an renouvelable. La commission préfère que l'on qualifie ce dispositif de contrôle de surveillance de sûreté afin de le distinguer de la surveillance judiciaire ; laquelle, selon le législateur en 2005, constitue une modalité d'exécution de la peine. Ce dispositif relève, en effet, d'un autre régime juridique : il est décidé par une juridiction régionale et non par le juge d'application des peines ; il est renouvelable dans les conditions prévues à l'article 723-7 et non limité à la durée correspondant aux réductions de peine obtenues. Appartenant à la même catégorie que le dispositif s'appliquant après la levée d'une rétention de sûreté, il est logique de lui appliquer la même dénomination de surveillance de sûreté.
M. le président. - Amendement n°19, présenté par M. Lecerf au nom de la commission.
A la fin du dernier alinéa du texte proposé par le III de cet article pour l'article 723-37 du code de procédure pénale, supprimer les mots :
en cas de méconnaissance par la personne de ses obligations
M. Jean-René Lecerf, rapporteur. - Nous supprimons une mention inutile.
M. le président. - Amendement n°20, présenté par M. Lecerf au nom de la commission.
Dans le texte proposé par le III de cet article pour l'article 723-38 du code de procédure pénale, remplacer les mots :
faisant l'objet de l'une des condamnations
par les mots :
condamnée à une réclusion criminelle d'une durée égale ou supérieure à quinze ans pour l'une des infractions
M. Jean-René Lecerf, rapporteur. - Amendement de coordination.
La commission est défavorable à l'amendement n°70.
Mme Rachida Dati, garde des sceaux. - Avis défavorable à l'amendement n°70, favorable aux quatre amendements de la commission.
M. Pierre-Yves Collombat. - Je partage l'avis du rapporteur : mieux vaut appeler les choses par leur nom et préférer le terme de surveillance de sûreté. Toutefois, cela ne rend pas ce dispositif de contrôle plus conforme à notre ordre juridique. Il constitue une mesure de police, et non une peine, par laquelle une personne, qui n'est pas atteinte de troubles mentaux, est privée de sa liberté non pour un crime qu'elle a commis ou pourrait commettre, mais pour ce qu'elle est. Nous revenons là au coeur du problème posé par la création d'une mesure de rétention de sûreté.
L'amendement n°70 n'est pas adopté.
L'amendement n°17 est adopté, ainsi que les amendements nos18,19 et 20.
M. le président. - Amendement n°71, présenté par Mme Borvo Cohen-Seat et les membres du groupe CRC.
Supprimer le IV de cet article.
Mme Josiane Mathon-Poinat. - Même objet et même argument que pour l'amendement n°70. Madame la ministre, j'aimerais avoir quelques précisions sur les médecins coordinateurs, actuellement peu nombreux, dont nous aurons bientôt grand besoin.
M. le président. - Amendement n°21, présenté par M. Lecerf au nom de la commission.
Après le mot :
décider
rédiger comme suit la fin du premier alinéa du texte proposé par le IV de cet article pour l'article 763-8 du code de procédure pénale :
de prolonger tout ou partie des obligations auxquelles est astreinte la personne, au-delà de la durée prononcée par la juridiction de jugement et des limites prévues à l'article 131-36-1 du code pénal, en la plaçant sous surveillance de sûreté pour une durée d'un an.
M. Jean-René Lecerf, rapporteur. - Les dispositions relatives à la prolongation du suivi socio-judiciaire pour les personnes retenues, introduites à l'Assemblée nationale, soulèvent les mêmes difficultés que celles relevées pour la surveillance judiciaire, le suivi socio-judiciaire étant une peine complémentaire dont la durée est fixée par la juridiction de jugement.
S'agissant de l'amendement n°71, notons tout d'abord qu'il a moins lieu d'être puisque nous avons transformé hier la commission en une juridiction. (Marques de scepticisme sur les bancs communistes) Ensuite, la surveillance de sûreté ou suivi socio-judiciaire prolongé est plutôt une mesure favorable en ce qu'elle évite de prononcer une mesure de rétention de sûreté à l'encontre d'une personne et lui conserve sa liberté, à condition que celle-ci respecte ses obligations.
Mme Rachida Dati, garde des sceaux. - Défavorable à l'amendement n°71. Madame Mathon-Poinat, je vous précise que les médecins-coordinateurs sont aujourd'hui 203, contre moins de 150 il y a quelques mois. Notre objectif est d'atteindre le nombre de cinq cents à la fin de cette année, notamment par le biais d'une revalorisation de leur intervention de 470 à 760 euros intervenue par arrêté du 24 janvier dernier. Avis favorable à l'amendement n°21.
M. Pierre-Yves Collombat. - Monsieur le rapporteur, la commission a beau être désormais une « juridiction », elle continue de décider de mesures de police. Bref, comme l'a souligné le procureur général de Lyon, c'est la confusion des genres ! Vous ne sortez pas de la contradiction.
L'amendement n°71 n'est pas adopté.
L'amendement n°21 est adopté.
L'article premier, modifié, est adopté.
Article additionnel
M. le président. - Amendement n°36, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin, Voynet, MM. Desessard et Muller.
Après l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article 763-14 du code de procédure pénale est ainsi modifié :
1° - La deuxième phrase du premier alinéa est complétée par les mots :« et garantit le caractère pluridisciplinaire de cette commission » ;
2° - Après ladite phrase, il est inséré une phrase ainsi rédigée :
« Il précise notamment les différentes professions susceptibles de figurer dans cette commission, ainsi que les modalités de nomination de ses membres. »
Mme Alima Boumediene-Thiery. - La commission pluridisciplinaire des mesures de sûreté, qui sera chargée d'évaluer la dangerosité des retenus au moins un an avant leur libération, doit compter des spécialistes de toutes les disciplines, notamment un magistrat honoraire expérimenté en droit pénal relevant d'une juridiction différente de celle compétente pour statuer sur la rétention de sûreté, un diplômé en criminologie ou en psycho-criminologie et des intervenants n'exerçant pas des fonctions d'expertise -éducateurs, comportementalistes, etc. Les membres de ces commissions devront être nommés par décision conjointe des ministères de la justice et de la santé, après l'établissement d'une liste nationale des différentes catégories professionnelles représentées au sein des équipes.
Ce n'est qu'à ce prix que l'on parviendra à une évaluation objective et complète de la dangerosité. Confier cette mission au seul médecin psychiatre procède d'une confusion dangereuse entre maladie mentale et délinquance : tous les fous ne sont pas criminels et tous les criminels ne présentent pas des pathologies mentales. Tous les pays qui ont adopté un dispositif équivalent à la rétention de sûreté et que vous aimez, madame le garde des sceaux, citer en exemple tel le système du Pieter Baan Centrum aux Pays-Bas, ont d'ailleurs placé la pluridisciplinarité au centre de la démarche d'évaluation.
M. Jean-René Lecerf, rapporteur. - Renforcer la pluridisciplinarité de la commission pluridisciplinaire des mesures de sûreté procède d'une intention louable, mais cette commission est avant tout de nature administrative -elle comptera en son sein le préfet, le directeur des services pénitentiaires, le président de l'association des victimes, etc.- et son rôle sera assez formel puisque nous avons institué une évaluation de six semaines, laquelle sera réalisée par une équipe regroupant des représentants de toutes les disciplines, entre autres des psychiatres, des psychologues, des criminologues et des travailleurs sociaux. Par conséquent, retrait, sinon avis défavorable.
Mme Rachida Dati, garde des sceaux. - Même avis.
Mme Alima Boumediene-Thiery. - Je maintiens l'amendement : puisque la commission complétera le travail d'évaluation (M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission, le réfute), nous devons veiller à ce qu'elle soit aussi pluridisciplinaire que l'équipe chargée de l'évaluation.
L'amendement n°36 n'est pas adopté.
Article 12 (appelé en priorité)
I. - Le I de l'article 1er est immédiatement applicable aux personnes faisant l'objet d'une condamnation prononcée après la publication de la présente loi, y compris pour des faits commis avant cette publication.
II. - Le même I est également immédiatement applicable aux personnes condamnées avant la publication de la présente loi et exécutant une peine privative de liberté à la date du 1er septembre 2008, lorsque ces personnes ont fait l'objet soit de plusieurs condamnations pour les crimes mentionnés à l'article 706-53-13 du code de procédure pénale, dont la dernière à une peine privative de liberté d'une durée égale ou supérieure à quinze ans, soit d'une condamnation unique à une telle peine pour plusieurs de ces crimes commis sur des victimes différentes.
III. - Le III de l'article 1er est applicable à compter du 1er septembre 2008 aux personnes faisant l'objet d'une mesure de surveillance judiciaire.
L'article 2 est applicable aux personnes exécutant une peine privative de liberté à la date de publication de la présente loi.
M. le président. - Amendement n°77, présenté par Mme Borvo Cohen-Seat et les membres du groupe CRC.
Supprimer cet article.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. - Cet article a fait couler beaucoup d'encre, et ce n'est pas nécessairement fini.
Au demeurant, la rédaction initiale du texte ne comportait pas d'application rétroactive de la rétention de sûreté, sauf pour la surveillance judiciaire en cas de réduction de peine.
Mais les députés, à l'initiative de leur commission des lois, se sont empressés d'étendre le dispositif aux condamnations prononcées après l'entrée en vigueur de la loi même pour des faits antérieurs. À l'initiative du Gouvernement, un autre amendement a concerné les personnes ayant fait l'objet de plusieurs condamnations mentionnées à l'article premier. En réalité, vous vouliez donc dès l'origine introduire la rétroactivité.
Tous les arguments entendus ne rendent pas la rétention de sûreté comparable à l'hospitalisation d'office.
Notre rapporteur a tenté de gommer ce que l'article 12 avait d'inconstitutionnel. Il a donc proposé de subordonner certaines libérations conditionnelles à l'avis conforme de la commission des mesures de sûreté. Dans le même esprit, les personnes faisant l'objet de surveillance judiciaire pourraient être assignées à résidence avec surveillance électronique, toute sortie devant se faire sous le contrôle d'un agent de l'administration pénitentiaire. Un tel dispositif pourrait être d'application difficile, mais il respecterait le droit ; il a valu au rapporteur de passer pour le sauveur de la loi face au Conseil constitutionnel même si, sur le fond, il ne change pas le texte. Pourtant, la majorité a concocté un sous-amendement destiné à rétablir la rétroactivité. Le Gouvernement a fait de même. Franchement ! Vous voulez ainsi dire à l'opinion que les prédateurs sexuels seront désormais enfermés à vie. Mais comment concevons-nous notre devoir de législateurs ?
Vous dites que la rétention de sûreté n'enfreindrait pas le principe de non-rétroactivité de la loi pénale plus sévère, car elle ne serait pas une peine. Elle en a pourtant toutes les caractéristiques. Ainsi, votre loi d'affichage aura de graves conséquences, annonçant d'autres violations de principes constitutionnels.
Nous ne manquions pourtant pas de mesures récemment votées mais pas encore appliquées parce que trop récentes ou manquant de moyens. Commençons par revoir les conditions de détention, cette exception française négative en Europe. Nous aimons à vanter les mérites de l'Europe et son unité ; il a même été récemment question de son héritage religieux. Mais pourquoi n'arrivons-nous pas à mieux prendre en charge les détenus ? Au lieu de chercher une réponse à cette question, vous préférez violer le principe fondamental de non-rétroactivité de la loi pénale plus sévère.
M. le président. - Amendement n°41, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et MM. Desessard et Muller.
Supprimer les I, II et le premier alinéa du III de cet article.
Mme Alima Boumediene-Thiery. - Peut-être le plus dangereux de tous, cet article introduit la rétroactivité de la loi pénale, au mépris de l'article 8 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, puisque ce que vous proposez a toutes les caractéristiques d'une peine.
Le Conseil constitutionnel a considéré que le placement sous surveillance électronique mobile n'était pas contraire à la non-rétroactivité de la loi pénale en invoquant trois raisons : ce placement tend non à punir la culpabilité d'un individu, mais à se prémunir contre sa dangerosité ; la durée est limitée à celle des réductions de peine, ce qui en fait « une modalité d'exécution de la peine prononcée » ; la décision est prise par la juridiction de l'application des peines. Dans le cas présent, ces critères cumulatifs montrent que vous proposez une disposition anticonstitutionnelle, puisqu'elle s'ajoute au quantum de la peine prononcée lors du jugement.
En conclusion de son rapport intitulé Réponses à la dangerosité, le député UMP M. Jean-Paul Garraud a commenté l'éventuelle mise en place de « centres fermés de défense sociale (CFDS) », équivalents de ce que vous voulez créer : « Le placement en CFDS présente plusieurs caractéristiques qui sont de nature à le faire entrer dans la catégorie des sanctions ayant le caractère d'une punition au sens de la jurisprudence du Conseil constitutionnel, ce qui aurait pour effet de soumettre la loi nouvelle à l'exigence de non-rétroactivité des peines et des sanctions résultant de l'article 8 de la Déclaration universelle des droits de l'homme et du citoyen de 1789 ». C'est un député de votre majorité qui le dit !
Vous voulez ajouter une privation totale liberté après la fin de la peine initiale.
M. le président. - Amendement n°29, présenté par M. Lecerf au nom de la commission.
Rédiger comme suit le I et le II de cet article :
I. Le dernier alinéa de l'article 729 du code de procédure pénale est complété par une phrase ainsi rédigée :
« La personne condamnée à la réclusion criminelle à perpétuité ne peut bénéficier d'une libération conditionnelle qu'après avis favorable de la commission pluridisciplinaire des mesures de sûreté dans les conditions prévues par le deuxième alinéa de l'article 706-53-14. »
II. Après l'article 723-30 du code de procédure pénale, il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art....- Les personnes qui ont fait l'objet soit de plusieurs condamnations pour les crimes mentionnés à l'article 706-53-13, dont la dernière à une peine privative de liberté d'une durée égale ou supérieure à 15 ans, soit d'une condamnation unique à une telle peine pour plusieurs de ces crimes commis sur des victimes différentes, peuvent être soumises à l'obligation d'assignation à domicile sous le régime du placement sous surveillance électronique prévu par l'article 132-26-2 du code pénal et à l'obligation de déplacement surveillé sous le contrôle d'un agent de l'administration pénitentiaire.
« Un décret en Conseil d'État précise les conditions d'application du présent article. »
M. Jean-René Lecerf, rapporteur. - Cette rédaction tend à concilier l'application la plus rapide possible de la rétention de sûreté avec la non-rétroactivité de la loi pénale plus sévère.
Le projet de loi comporte une application immédiate du nouveau dispositif, dans des conditions inattaquables par le biais de certains manquements à la surveillance judiciaire.
La commission des lois propose d'ajouter deux autres cas.
Le premier concerne les cinq cents à six cents détenus condamnés à perpétuité, a priori les plus dangereux. Toute libération conditionnelle supposerait l'avis conforme de la commission pluridisciplinaire des mesures de sûreté.
Pour les autres condamnés à plus de quinze ans, la commission propose de muscler la surveillance judiciaire, rebaptisée surveillance de sûreté, avec une assignation à domicile, toute sortie devant avoir lieu sous la surveillance d'un agent de l'administration pénitentiaire.
Il nous semblait ainsi satisfaire à l'impératif de sûreté sans enfreindre la Constitution.
M. le président. - Sous-amendement n°78 rectifié ter à l'amendement n°29 de M. Lecerf au nom de la commission, présenté par MM. Portelli, Gélard, Garrec, Courtois, Saugey, Béteille, J. Gautier et Buffet, Mme Troendle et M. Othily.
Rédiger comme suit le II de l'amendement n° 29 :
II. Les personnes exécutant, à la date du 1er septembre 2008, une peine de réclusion criminelle d'une durée égale ou supérieure à 15 ans à la suite, soit de plusieurs condamnations, dont la dernière à une telle peine, pour les crimes mentionnés à l'article 706-53-13 du code de procédure pénale, soit d'une condamnation unique à une telle peine pour plusieurs de ces crimes commis sur des victimes différentes, peuvent être soumises à une assignation à domicile sous le régime du placement sous surveillance électronique mobile, selon la procédure prévue par l'article 723-37 de ce code.
A titre exceptionnel, si le placement sous surveillance électronique apparaît insuffisant pour prévenir la récidive, ils peuvent être soumis à un placement en rétention de sûreté.
La mise en oeuvre de cette procédure doit être précédée d'une décision de la chambre de l'instruction avertissant la personne condamnée qu'elle pourra faire l'objet d'un réexamen de sa situation dans les conditions ci-après indiquées.
Le procureur général saisit, après avis du juge de l'application des peines du lieu de détention de la personne condamnée, la chambre de l'instruction de la cour d'appel dans le ressort de laquelle se trouve la cour d'assises ayant prononcé la condamnation.
La chambre de l'instruction statue en chambre du conseil après avoir fait comparaître la personne condamnée assistée par un avocat choisi ou commis d'office.
Si elle constate qu'il résulte de la ou des condamnations prononcées une particulière dangerosité de l'intéressé en raison d'un trouble grave de sa personnalité susceptible de justifier à l'issue de sa peine un placement en rétention de sûreté, elle avertit la personne condamnée qu'elle pourra faire l'objet d'un examen de dangerosité pouvant entraîner son placement en rétention de sûreté.
La rétention de sûreté est ensuite décidée suivant la procédure indiquée aux articles 706-53-14 et 706-53-15 du même code nonobstant, le cas échéant, les délais prévus par ces dispositions.
M. Hugues Portelli. - Je commencerai par un peu d'histoire sur le débat au sein de la commission des lois et de notre groupe parlementaire.
À l'initiative du Gouvernement, l'Assemblée nationale a voté une disposition dont la constitutionnalité nous paraît discutable. Bien que nous soyons totalement d'accord avec sa finalité, nous voulons écarter tout risque d'inconstitutionnalité, non par dévotion envers le Conseil constitutionnel, mais par respect pour la Constitution, respect que nous manifestions même à l'époque où le Conseil ne s'était pas arrogé en 1971 les pouvoirs que l'on sait...
Mme Isabelle Debré. - Absolument !
M. Hugues Portelli. - De tous les principes constitutionnels, le premier est le devoir qu'a l'État de protéger ses ressortissants.
Il doit notamment protéger les plus faibles...
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. - Il n'y a qu'à voir la police administrative...
M. Hugues Portelli. - L'amendement de la commission donne l'occasion d'améliorer le texte. (Mme Borvo Cohen-Seat rit) Cependant, la mesure de sûreté ainsi proposée n'est pas adaptée aux criminels les plus dangereux. Le fait qu'ils soient très peu nombreux ne saurait dégager l'État de ses obligations d'en protéger les citoyens !
Nous ne doutons pas que la rétention de sûreté soit une mesure de sûreté (exclamations sur les bancs du CRC) mais la question se pose d'une éventuelle inconstitutionnalité, du fait de la rétroactivité. C'est ce risque d'inconstitutionnalité que l'amendement veut éviter. Il faut prévoir l'intervention d'une juridiction, l'évaluation par une commission d'experts, les garanties d'une procédure équitable mais encore l'avertissement au détenu, puisqu'il peut encore accepter les mesures de soins ou de suivi de sûreté. Le refus de telles mesures sera une preuve supplémentaire de dangerosité : dans ce cas, la rétention de sûreté doit s'appliquer de plein droit ! (Applaudissements à droite)
M. le président. - Sous-amendement n°92 à l'amendement n° 29 de M. Lecerf, au nom de la commission, présenté par le Gouvernement.
Compléter le texte proposé par l'amendement n° 29 par deux alinéas ainsi rédigés :
... - Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
IV. Le I et le I bis de l'article 1er sont applicables aux personnes faisant l'objet d'une condamnation prononcée après la publication de la présente loi pour des faits commis avant cette publication.
Mme Rachida Dati, garde des sceaux. - La rétention de sûreté doit pouvoir s'appliquer à ceux qui seront condamnés après la promulgation de la loi mais pour des crimes antérieurs à celle-ci. C'est nécessaire pour une application immédiate de la loi, seul moyen de ne pas laisser remettre en liberté des personnes encore très dangereuses ! (Applaudissements à droite)
M. le président. - Amendement n°89, présenté par M. Lecerf au nom de la commission.
I. - Rédiger comme suit le premier alinéa du III de cet article :
La surveillance de sûreté instaurée par le III de l'article 1er est immédiatement applicable après la publication de la présente loi. Si la méconnaissance par la personne des obligations qui lui sont imposées fait apparaître que celle-ci présente à nouveau une particulière dangerosité caractérisée par le risque particulièrement élevé de commission des infractions mentionnées à l'article 706-53-13, la personne peut être placée jusqu'au 1er septembre 2008, dans les conditions prévues par le dernier alinéa de l'article 706-53-20, dans un établissement mentionné au premier alinéa de l'article L. 6141-5 du code de la santé publique.
II. - Compléter cet article par un IV ainsi rédigé :
IV. - L'évaluation prévue par le I ter de l'article 1er est également applicable aux personnes condamnées avant la publication de la présente loi à une peine de réclusion criminelle d'une durée égale ou supérieure à quinze ans pour l'une des infractions visées à l'article 706-53-13.
M. Jean-René Lecerf, rapporteur. - L'ouverture du centre socio-médico-judiciaire de Fresnes est prévue pour le 1er septembre prochain ; or on ne peut exclure que d'ici là, des surveillances judiciaires de personnes dangereuses arrivent à terme : nous prévoyons donc une application immédiate de la surveillance de sûreté avec, en cas de manquement grave, un placement dans un établissement de santé spécifique.
Plus important, nous souhaitons l'évaluation de la dangerosité des détenus actuels dès lors qu'ils ont été condamnés à une peine d'au moins quinze ans de rétention, faute de quoi la loi ne sera pas d'application immédiate et égale pour toutes les personnes dangereuses.
Avis défavorable à l'amendement n°77, de même qu'à l'amendement n°41. Le sous-amendement n°78 rectifié ter a deux mérites incontestables ; il tient compte de la position de la commission sur l'assignation à domicile ; il s'efforce de maintenir un lien de causalité entre la condamnation et la rétention de sûreté en prévoyant d'avertir le détenu, ce qui est conforme à la Convention européenne des droits de l'homme. Mais il ne règle pas la question de la rétroactivité, sauf à considérer qu'elle ne se pose pas. Ses auteurs ont fait valoir l'impérieuse nécessité de protéger les personnes les plus vulnérables, aussi une majorité des membres de la commission s'y sont-ils ralliés et l'avis sera donc favorable.
La commission n'a pas pu examiner le sous-amendement n°92 et je donnerai un avis personnel. L'hypothèse est différente de celle retenue par M. Portelli ; il ne s'agit plus de détenus condamnés à la date d'entrée en vigueur de la loi mais de personnes poursuivies pour des faits commis avant cette entrée en vigueur. Il s'agit bien, dans les deux cas, d'une dérogation au principe de non-rétroactivité mais le sous-amendement du Gouvernement n'intègre pas les conditions précises mises par M. Portelli et il ne se limite pas au cas des récidivistes les plus dangereux, ce qui, à mon humble avis, paraît présenter un risque d'inconstitutionnalité.
Mme Rachida Dati, garde des sceaux. - Je me suis déjà largement exprimée sur l'application immédiate. En opportunité, à dangerosité égale, les détenus doivent être traités de la même façon et la règle de non-rétroactivité ne joue pas pour la rétention de sûreté, puisque c'est une mesure de sûreté et non une peine : avis défavorable à l'amendement n°77. Même avis à l'amendement n°41. Avis favorable à l'amendement n°29, sous réserve de l'adoption des deux sous-amendements. L'octroi de la liberté conditionnelle nécessite un examen approfondi de la dangerosité du détenu.
Il est utile de faire intervenir la commission pluridisciplinaire. En revanche, le Gouvernement est défavorable au deuxième volet de l'amendement de la commission car il faut que la rétention de sûreté entre en vigueur dès la promulgation de la loi. Le sous-amendement n°78 rectifié ter reprend l'idée d'assignation à résidence tout en permettant la rétention de sûreté : j'y suis donc favorable.
Enfin, je m'en remets à la sagesse de la Haute assemblée sur l'amendement n°89 car il s'agit d'une rectification formelle.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission. - A partir du moment où l'on estime que la rétention de sûreté est nécessaire pour les criminels particulièrement dangereux, la question de l'entrée en vigueur de cette mesure se pose. Pour les faits qui seront commis après la promulgation de la loi, la nature de cette mesure ne se pose pas. En revanche, le problème reste entier pour les personnes déjà condamnées.
S'il s'agit d'une mesure de sûreté, je suis plutôt d'accord avec M. Fauchon.
M. Pierre-Yves Collombat. - Cette mesure de sûreté est-elle légale ?
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission. - Vous êtes un insupportable interrupteur ! Respectez ceux qui parlent !
M. Pierre-Yves Collombat. - Quand vous nous respecterez autant qu'on vous respecte ! (Exclamations à droite) A preuve ce qui s'est passé hier en commission !
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission. - Je vais me tourner vers M. Raffarin qui lui, au moins, m'écoute ! (Sourires)
A l'origine, cet article ne figurait pas dans le projet de loi et il nous faut bien réfléchir à la nature de cette mesure qui concernera des personnes déjà condamnées ou dont les faits commis sont antérieurs à la loi, car je rappelle que la rétroactivité court à partir de la date des faits, et non de la condamnation.
Dans un premier temps, votre commission a estimé qu'il y avait doute sur la nature de la mesure. Il fallait donc trouver une autre formule pour éviter tout risque d'inconstitutionnalité. Nous avons eu en commission un débat approfondi et digne. Il y a ceux qui estiment qu'il s'agit d'une peine et que la question de la rétroactivité se pose. D'autres rappellent qu'il faut respecter la convention européenne des droits de l'homme qui veut qu'une privation de peine fasse impérativement l'objet d'une décision judicaire. Si une mesure de sûreté devait être prononcée à l'encontre d'une personne déjà condamnée, elle ne pourrait donc l'être que par des magistrats.
Ensuite, il est particulièrement difficile, au moment de la condamnation initiale, de prévoir la dangerosité du condamné dans vingt ou trente ans. S'il s'agit d'une mesure de sûreté, la décision judicaire pourrait être prise par le juge d'application des peines à n'importe quel moment.
Je suis en outre frappé par le fait que l'on n'ait jamais clairement défini les lieux où seront retenues ces personnes : plutôt que de prisons, il faut parler d'établissements de soin. La mission d'information de MM. Goujon et Gautier estimait d'ailleurs que de tels établissements spécialisés étaient nécessaires, non seulement à la sortie de prison mais dès que des condamnés manifestaient des troubles psychiques. Elle recommandait d'ailleurs de s'inspirer des exemples étrangers afin de ne pas attendre le dernier jour d'incarcération pour commencer à soigner les gens. Il s'agira donc d'établissements médico-sociaux judicaires car il est normal qu'ils soient surveillés. Je rappelle aussi qu'il ne s'agit ici que de traiter les cas extrêmes.
Même si l'on est attaché à la non-rétroactivité des lois, il est normal de prendre des mesures pour empêcher des personnes à haut risque de récidiver. (Mme Borvo Cohen-Seat s'exclame) Je sais bien que l'hospitalisation d'office est possible, à la sortie de prison, ce qui évacuerait le problème de l'application immédiate de la mesure. Mais, après avoir bien réfléchi, et avoir tenu compte des exemples étrangers, je pense qu'il y a une forte probabilité pour que les principes constitutionnels soient respectés. Si jamais tel n'était pas le cas, on pourrait toujours en revenir à l'assignation à résidence.
J'eusse quand même préféré, madame la ministre, que votre sous-amendement prenne en compte, comme celui de M. Portelli, la date des faits et non de la condamnation. Ce faisant, vous affaiblissez quelque peu ce que nous avons voulu faire pour les personnes qui ne sont pas encore condamnées. Il y a là un risque accru de rétroactivité.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. - Toutes vos contorsions pour nous convaincre que cette mesure n'est pas rétroactive nous confortent dans l'idée que la voie que vous nous proposez de suivre n'est pas la bonne. Je sais que je vous lasse avec mes arguments...
M. Robert del Picchia. - Vous les avez déjà exposés !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. - ...il n'empêche : pour quelles raisons la détention ne permet-elle pas de soigner les détenus malades et pourquoi ne nous penchons-nous pas sur cette question en priorité ?
Voilà donc une personne qui a été condamnée à vingt ans de prison pour un crime odieux et qui, ayant purgé sa peine, ne maîtrise toujours pas ses pulsions car rien n'a été fait durant sa détention pour l'y aider. A sa sortie, cette personne refuse de se soumettre à un traitement médical ou à un quelconque suivi socio-judiciaire. On lui dira alors : « si vous refusez notre aide, vous risquez de passer la fin de votre vie en rétention ». « Je m'en moque », répond-elle. Elle fera alors l'objet d'une évaluation psychiatrique qui devra déterminer son degré de dangerosité et ses risques de récidives. Ne pensez-vous pas que l'on est alors en présence d'une altération mentale grave ?
Je considère que si le cerveau est à ce point perturbé, l'hospitalisation d'office suffit pour protéger la société mais il faut avoir le courage de prendre ses responsabilités et de décider une hospitalisation psychiatrique. Mais, puisque pour des raisons qu'il faudrait expliciter, on ne veut pas utiliser ce qui existe, on viole le principe de non-rétroactivité de la loi pénale.
M. Pierre-Yves Collombat. - Je vais essayer de ne pas énerver le président de la commission des lois...
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission. - Uniquement quand vous m'interrompez...
M. Pierre-Yves Collombat. - Tout se complique parce qu'à la différence des Anglo-Saxons, nous avons des peines à durée déterminée et qu'à la différence des Hollandais, nous jugeons les malades, qu'ils s'astreignent à soigner. Alors on essaie depuis hier de nous faire croire que la privation de la liberté est compatible avec notre ordre républicain et on maquille le tout en demandant à des juridictions de rendre des décisions de police. C'est un peu fort ? On va pourtant encore plus loin : comme discuter en urgence de ce qui adviendra dans quinze ans, cela fait l'effet d'une gesticulation, on décide que la mesure s'applique immédiatement, d'où ces amendements et le débat sur la rétroactivité. Il convient donc de supprimer l'article mais, s'il faut choisir entre le plus ou moins pire, je préfère encore l'amendement de M. Lecerf, parce qu'il n'y a pas privation totale de liberté. Quant à l'invention d'un délit annexe pour justifier la rétention de sûreté, elle prouve qu'on peut être excellent juriste et grand acrobate.
M. Pierre Fauchon. - S'il est permis à un acrobate d'intervenir, j'observerai qu'on ne peut se tirer du débat sur la rétroactivité en affirmant qu'il s'agit d'une mesure de sûreté. Il faut en effet considérer la gravité de l'atteinte à la liberté, qui est à la source du principe de non-rétroactivité de la loi pénale. Attention donc !
Je crois pourtant que nous sommes en présence d'un concept nouveau, autonome et qu'en le découvrant, nous avons tendance à nous raccrocher à ce que nous connaissons déjà et à le rattacher à des notions éprouvées alors que l'essentiel -et ce pourquoi j'en suis le meilleur défenseur- est que la mesure de rétention joue comme l'hospitalisation d'office.
Dès lors, la rétroactivité s'apprécie par rapport au fait qui justifie la rétention, c'est-à-dire non pas la condamnation qui en est la condition mais le diagnostic des experts, qui apprécient hic et nunc la dangerosité de l'intéressé : il n'y a pas de problème de rétroactivité.
On se complique exagérément les choses parce qu'on s'est, à tort, cru obligé de préciser à l'article premier que, quinze ans plus tôt, le juge avait prévu cette éventualité. Ce second alinéa est farfelu et mal bâti mais le Conseil d'État avait demandé cette sécurité juridique par rapport à la Convention européenne des droits de l'homme. Mais, s'il l'avait lue jusqu'au bout, il aurait vu qu'après avoir visé la condamnation par un tribunal, elle prévoit un autre cas, la détention provisoire pour éviter la répétition des faits, avant de viser les personnes susceptibles de propager une maladie contagieuse et les aliénés. Votre vocabulaire doit tenir compte des avancées de la science : nous parlons aujourd'hui de personnes aliénées au sens profond du terme.
Je me suis d'ailleurs reporté au dictionnaire culturel Le Robert, lequel après avoir invoqué La Bruyère -« il se déconcerte, il s'étourdit... »-, définit l'aliénation comme un dérèglement passager ou permanent des facultés intellectuelles, un désordre mental qui met le sujet dans l'impossibilité de mener une vie sociale normale.
L'alinéa 2 de l'article premier est en trop, qui nous condamne à ce débat et oblige à des contorsions que je ne qualifierai pas par respect pour les auteurs des amendements. Cependant, pour ne pas mêler ma voix avec les opposants à la rétention, que je crois nécessaire et urgente, je ne participerai pas au vote.
M. Robert Badinter. - Je serai d'une concision exemplaire et constante car, comme l'écrivait Eluard, « Le tout est de tout dire, mais je manque de mots, mais je manque de temps et je manque d'audace. ». Je m'en tiendrai donc ici à la suppression, qui est liée à la non-rétroactivité. Principe constitutionnel, monsieur Portelli, ou bien simple objectif de valeur constitutionnelle ? En vérité, la liberté vient de la Déclaration des droits de l'homme et, ne l'oublions jamais, de la devise républicaine, même si elle s'y conjugue avec les autres objectifs. Elle est essentielle, et il me suffira de rappeler ce qui est advenu dans d'autres circonstances pour la honte perpétuelle de ceux qui avaient violé le principe de non-rétroactivité.
La seule question, bien posée par M. Fauchon, est la suivante : quelle est l'importance de l'atteinte portée aux libertés individuelles ? On aura beau nous dire qu'il ne s'agit « que » d'une mesure de sûreté, on aura beau parler de « rétention » plutôt que de détention, reste qu'il n'est pas d'atteinte qui puisse se comparer à l'enfermement dans un lieu clos, gardé par l'administration pénitentiaire et dont on ne sort que sous escorte. Quiconque se trouve dans cette situation perd sa liberté individuelle. L'atteinte étant majeure, le principe de non-rétroactivité trouve sa place. Et je suis convaincu que quelques-uns des excellents esprits de la commission partagent ce point de vue. Pourquoi, sinon, M. Lecerf aurait-il déposé les amendements qu'elle a adoptés ?
L'amendement n°77 n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°41.
M. le président. - Je vais mettre aux voix le sous-amendement n°78 rectifié ter.
M. Christian Cointat. - Deux questions se posent à nous. Peut-on laisser sortir de prison un criminel dont on sait pertinemment qu'il va recommencer ? La réponse est non. (Mme Borvo Cohen-Seat proteste) Pour atteindre cet objectif, peut-on s'exonérer des garanties qu'assurent notre Constitution et les Conventions internationales auxquelles la France est partie ? Nous ne le pouvons pas car, quels que soient les objectifs, nous devons respecter les engagements du droit.
La proposition de M. Portelli apporte une réponse à la première question, et je m'en félicite. Mais à mon sens, elle ne respecte pas, ce faisant, les contraintes du droit. Là est le problème. Son sous-amendement a été fort bien pensé : faisant intervenir la chambre de l'instruction, le procureur général, le juge d'application des peines, il place bien la décision de rétention dans un cadre judiciaire. Mais où je rejoins M. Fauchon, c'est à considérer qu'il s'écarte du principe fondamental de l'article premier. J'ai dit hier que je ne pourrai voter ce texte si cet article n'y restait pas entier. Car le but est bien de lier décision de condamnation et mesure de rétention. Ici, le lien s'efface. Dans dix ou quinze ans, l'application de ce texte ne posera plus de problème, mais se pose aujourd'hui celui de la période transitoire. Nous ne pouvons pas dire à nos concitoyens que nous votons une loi qui ne s'appliquera pas pleinement avant dix ans. Notre rapporteur, auquel je rends hommage, avait trouvé, à mon sens, la bonne solution. M. Portelli, en allant plus loin, ne va-t-il pas trop loin ? Au risque de nous mettre en délicatesse avec le Conseil constitutionnel et la Cour européenne des droits de l'homme.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. - Avec votre conscience, surtout.
M. Christian Cointat. - Nous ne serons pas à l'aise, sachant la période sensible qui nous attend dans quatre ans, si nous sommes alors condamnés.
La proposition du rapporteur règle 99 % des cas. Pourquoi prendre le risque d'une décision qui mettrait tout l'édifice à bas ? On aura beau jeu de nous objecter que quand on est enfermé pour quinze et que l'on vous dit, année après année, que vous pourrez être enfermé jusqu'à la fin de vos jours, la différence entre peine et rétention devient bien mince.
Bref, l'objectif est bien celui que je souhaite mais la méthode n'est pas celle que j'aurais retenue. Pour être logique avec moi-même, je ne participerai donc pas au vote même si, vous l'aurez compris, je voterai, au terme de nos débats, un texte sur lequel notre soutien doit rester entier et par lequel ce Gouvernement répond au principe de Clémenceau, qui disait que son devoir était de faire en sorte que les bon citoyens soient tranquilles et que les mauvais ne le soient pas. (M. Fauchon applaudit)
M. Robert Badinter. - Ce sous-amendement Portelli se distingue au moins par un point : il est la pire usine à gaz juridique de ces dernières années. Le principe de l'obligation de surveillance la met en route : le juge de l'application des peines saisit le procureur général, lequel va trouver la chambre de l'instruction, qui interroge -tenons-nous bien- une décision rendue sous l'empire d'une loi précédente, laquelle ne prévoyait pas de rétention de sûreté, et va y trouver le motif pour déclencher la procédure de rétention !
Quelle compétence a donc une chambre d'instruction pour interpréter une décision devenue définitive et au sujet de laquelle on ne peut invoquer de difficulté d'exécution puisqu'elle a été exécutée ?
Il n'y a là qu'un moyen détourné d'assurer une application immédiate de la rétention de sûreté. Il est pour moi hors de question de permettre que l'on joue ainsi avec les principes fondamentaux.
M. Robert del Picchia. - Je ne suis pas juriste...
M. Pierre Fauchon. - Quelle force !
M. Robert del Picchia. - ...mais j'ai attentivement écouté M. Cointat et je suis en désaccord avec lui. On nous dit qu'il existe un risque juridique ? Pour moi, je suis prêt à le prendre. Car le risque encouru par les victimes est plus grand que celui que nous prenons d'être condamnés par la Cour européenne des droits de l'homme. (Applaudissements sur les bancs UMP) C'est pourquoi je voterai le sous-amendement, sans arrière pensée. (M. Gournac renchérit)
Le sous-amendement n°78 rectifié ter est adopté.
Le sous-amendement n°92 est adopté.
L'amendement n°29, sous-amendé, est adopté.
L'amendement n°89 est adopté.
L'article 12, modifié, est adopté.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission. - Je demande la priorité pour le titre II, à savoir les articles 5, 6, 7, et 8.
La priorité, acceptée par le Gouvernement, est de droit.
L'article 5 est adopté.
Article 6
Le livre VII de la troisième partie du code de la santé publique est ainsi modifié :
1° L'article L. 3711-1 est ainsi modifié :
a) Le premier alinéa est ainsi rédigé :
« Pour la mise en oeuvre de l'injonction de soins prévue par les articles 131-36-4 et 132-45-1 du code pénal et les articles 723-30 et 731-1 du code de procédure pénale, le juge de l'application des peines désigne, sur une liste de psychiatres établie par le procureur de la République, un médecin coordonnateur qui est chargé : » ;
a bis) Dans le 4°, les mots : « est arrivé à son terme, » sont remplacés par les mots : «, le sursis avec mise à l'épreuve ou la surveillance judiciaire est arrivé à son terme, ou le condamné qui a bénéficié d'une libération conditionnelle, » ;
b) Il est ajouté un 5° ainsi rédigé :
« 5° De coopérer à la réalisation d'évaluations périodiques du dispositif de l'injonction de soins ainsi qu'à des actions de formation et d'étude. » ;
c) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Les médecins ayant suivi une formation appropriée et qui ont exercé pendant au moins deux ans la fonction de médecin coordonnateur à la date de publication de la loi n° du relative à la rétention de sûreté et à la déclaration d'irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental peuvent être inscrits sur la liste mentionnée au premier alinéa. » ;
2° Après le premier alinéa de l'article L. 3711-2, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Sans que leur soient opposables les dispositions de l'article 226-13 du code pénal, les praticiens chargés de dispenser des soins en milieu pénitentiaire communiquent les informations médicales qu'ils détiennent sur le condamné au médecin coordonnateur afin qu'il les transmette au médecin traitant. » ;
3° Le dernier alinéa de l'article L. 3711-3 est ainsi rédigé :
« Le médecin traitant est habilité à prescrire au condamné, avec le consentement écrit et renouvelé, au moins une fois par an, de ce dernier, un traitement utilisant des médicaments qui entraînent une diminution de la libido. » ;
4° Le premier alinéa de l'article L. 3711-4-1 est ainsi rédigé :
« Si la personnalité du condamné le justifie, le médecin coordonnateur peut inviter celui-ci à choisir, en plus du médecin traitant, un psychologue titulaire des diplômes précisés par arrêté du ministre chargé de la santé. »
M. le président. - Amendement n°27, présenté par M. Lecerf au nom de la commission.
I. - Dans le second alinéa du a du 1° de cet article, après le mot :
psychiatres
insérer les mots :
ou de médecins ayant suivi une formation appropriée,
II. - Supprimer les huitième et neuvième alinéas (c du 1°) de cet article.
M. Jean-René Lecerf, rapporteur. - Le droit en vigueur prévoit que les médecins coordonnateurs peuvent être choisis parmi les psychiatres ou des médecins ayant suivi une formation appropriée. Le ministre de la santé a souhaité réserver cette possibilité aux seuls psychiatres. L'Assemblée nationale a jugé opportun de permettre aux neuf médecins coordonnateurs non psychiatres d'être maintenus dans leur fonction dès lors qu'ils justifient d'une ancienneté d'au moins deux ans -condition qu'ils remplissent tous.
Pourquoi se priver de la faculté de faire appel à des non psychiatres dès lors qu'ils ont reçu une formation appropriée ? Ces médecins n'ont pas démérité. Le vivier des médecins psychiatres n'est pas tel que l'on puisse se passer d'autres sources de recrutement.
M. le président. - Amendement n°28, présenté par M. Lecerf au nom de la commission.
Supprimer les deux derniers alinéas (4°) de cet article.
M. Jean-René Lecerf, rapporteur. - Le projet de loi autorise les psychologues à participer à la prise en charge des personnes soumises à une injonction de soins mais leur interdit de se substituer au médecin traitant, ce que permet pourtant la loi du 12 décembre 2005 -mais le décret d'application n'a jamais été publié, la direction générale de la santé arguant de la difficulté de déterminer les formations qualifiant un psychologue pour la prise en charge d'un auteur d'infractions sexuelles.
Compte tenu de la pénurie de psychiatres, il est regrettable que cette faculté soit supprimée. Au Canada, les programmes destinés aux délinquants sexuels sont mis en oeuvre principalement par des psychologues ! Enfin, l'injonction de soins peut s'appliquer par exemple aux auteurs de violences au sein du couple qui peuvent tout à fait être suivis par des psychologues.
Nous souhaitons donc en rester au droit en vigueur.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse et des sports. - J'entends vos arguments, mais je dois vous demander le retrait de vos amendements. La faculté pour des médecins non psychiatres de devenir médecins coordinateurs n'est plus adaptée à la gravité des infractions en cause. La population à laquelle nous nous adressons présente des troubles hétérogènes qui nécessitent une compétence très large. Le médecin coordinateur doit être capable de suivre l'évolution du patient et d'évaluer l'impact des soins : dresser ce bilan requiert des connaissances spécifiques. L'implication du médecin coordinateur dans le choix du médecin traitant, son rôle de conseil à l'égard de ses confrères plaident en faveur d'une professionnalisation accrue de la fonction. L'accroissement de ses missions -évaluation périodique du dispositif, formation, études, etc.- justifie que cette fonction soit réservée aux seuls psychiatres. Toutefois, il n'est pas question de se priver des médecins qui ont déjà acquis une expérience ; c'est pourquoi j'ai accepté l'amendement de l'Assemblée nationale.
Le même souci de rigueur dans la prise en charge thérapeutique implique d'exiger au minimum un suivi médical des condamnés. Le projet de loi garantit à tous les patients une prise en charge médicale. Il n'est pas question d'écarter les psychologues, mais ceux-ci interviendront dans un cadre pluridisciplinaire, après le diagnostic et le protocole de soins établis par un médecin. C'est au médecin coordinateur de recommander la prise en charge par un psychologue.
M. Jean-René Lecerf, rapporteur. - Sur le fond, nous sommes d'accord, mais il faut tenir compte de la réalité ! Je passe beaucoup de temps dans les établissements pénitentiaires : à Caen, il faut plus d'un an pour qu'un détenu obtienne un rendez-vous avec un psychiatre ! Notre but n'est pas d'obliger à nommer des médecins non psychiatres, mais, à défaut, mieux vaut un médecin agréé formé ou un psychologue que rien du tout ! Le suivi socio-judiciaire a été largement étendu, et un psychologue est à même de prendre en charge un auteur de violences sexuelles.
Le président About a apporté son soutien à nos deux amendements. J'ai débattu sur Public Sénat avec un psychiatre de haute renommée qui estimait lui aussi que ce « mieux » est finalement l'ennemi du bien. Le ministre aurait raison si nous avions un vivier de psychiatres suffisant, mais tel n'est pas le cas. Je salue les efforts du Gouvernement pour augmenter le nombre de psychiatres dans le secteur public, mais encore faut-il le temps de les former !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - Le frein au recrutement des médecins coordinateurs n'est pas la démographie mais le faible attrait financier de la fonction. C'est pourquoi j'ai augmenté de 65 % leur rémunération, qui passera de 426 à 700 euros. Cette fonction est extrêmement difficile à assumer : il faut attirer des praticiens compétents !
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission. - Je comprends votre position, mais on a beau dire, nous manquons de médecins ! Les UMD ont marqué un progrès considérable : le résultat est globalement satisfaisant pour les soins somatiques, mais il en va tout autrement pour la psychiatrie. S'il n'y a pas suffisamment de psychiatres, on ne fait rien ! La mesure que nous proposons est temporaire. S'il n'y a pas de psychiatres, cela veut-il dire qu'il n'y a pas de coordinateur ?
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - On fait référence à un médecin coordinateur qui sera psychiatre ou médecin agréé.
M. Jean-René Lecerf, rapporteur. - Ce ne sera plus possible dorénavant.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission. - Je m'en tiens à ce que nous a dit le président de la commission des affaires sociales. Pour les psychologues, c'est la loi du 12 décembre 2005. Pour toutes ces raisons, j'incite le Sénat à suivre la commission des lois.
M. Richard Yung. - Je ne suis ni juriste, ni psychologue, mais cela relève du bon sens. Tout d'abord, la démographie psychiatrique est mauvaise. Même en accroissant aujourd'hui le nombre de psychiatres en formation, il faudrait attendre dix ans avant qu'elle ne s'améliore. Ensuite, les psychiatres sont mal répartis sur le territoire : ils sont essentiellement concentrés en région parisienne et sur la Côte d'Azur. Si, dans quelques années, le nombre de psychiatres disponibles était suffisant, nous pourrions revoir ce dispositif.
J'ai visité Clairvaux : il y a un jour de vacation psychiatrique par semaine pour cent soixante détenus. C'est la réalité des soins psychiatriques en maison centrale. La réponse du ministre n'est pas adaptée au problème. L'appel à des psychologues extérieurs ne doit pas être écarté. Ils bénéficient d'une expérience non négligeable. Dans beaucoup de pays européens, des psychiatres vacataires ayant reçu une formation appropriée remplissent déjà ces fonctions.
Pour ces raisons, je soutiens cet amendement.
M. Pierre-Yves Collombat. - Je n'y comprends plus grand-chose. Jusqu'ici, le mot d'ordre était que la fin justifie les moyens. On prévoit de détenir des personnes ad vitam aeternam, ce qui nous mettra en délicatesse avec le droit, sans disposer des moyens correspondants en personnel psychiatrique et soignants. Et là, on nous dit que l'on ne peut transiger avec le droit ?
Je me suis rendu avec Jean-René Lecerf au Canada, où a été mis en place un réseau de soutien composé de psychiatres et de psychologues formés à la criminologie. La proposition de la commission des lois relève du bon sens et nous permet de passer d'une conception stratosphérique de la loi à la réalité. Je ne comprends pas les réticences du ministre.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - Je voudrais tordre le cou à certains canards. On ne peut parler de désert psychiatrique français : avec quatorze mille psychiatres, nous avons le réseau le plus dense du monde, suffisant pour assumer la fonction de médecin coordonnateur. Je me suis attachée à la rendre plus attractive et pour que ces médecins coordonnateurs se sentent moins isolés, j'ai créé des centres ressources où ils sont entourés d'une équipe pluridisciplinaire.
Je suis le garant de la santé publique et je tiens à ce que des psychiatres exercent cette fonction. Je veille à améliorer la rémunération et les conditions d'exercice pour faire face à cette crise qualitative.
L'amendement n°27 est adopté, ainsi que l'amendement n°28.
L'article 6, modifié, est adopté.
L'article 7 est adopté.
Article 8
M. le président. - Amendement n°76, présenté par Mme Borvo Cohen-Seat et les membres du groupe CRC.
Supprimer cet article.
Mme Josiane Mathon-Poinat. - L'article 8 juxtapose deux exigences contradictoires : il oblige les personnels soignants intervenant au sein des établissements pénitentiaires à signaler au directeur de l'établissement tout risque sérieux pour la sécurité des personnes, tout en les soumettant au respect du secret médical. Comment pourront-ils transmettre l'information sans rompre le lien de confiance établi avec le patient ? La logique d'ordre public l'emporte sur la logique de soin, le bon fonctionnement du service public pénitentiaire sur l'intérêt du patient.
Cette disposition place les personnes détenues ou placées dans un centre de rétention en dehors du champ d'application des dispositions des articles L. 1110-4 et R. 4127-4 du code de la santé, qui garantissent le secret médical. Pourquoi ces règles de déontologie ne s'appliqueraient-elles pas dans les établissements pénitentiaires et les centres de rétention ? Les conditions de détention dans notre pays sont trop souvent qualifiées de traitements dégradants et inhumains par le comité de prévention de la torture et les commissaires européens aux droits de l'homme. Les prisons françaises sont placées hors du droit commun, au mépris des règles élémentaires européennes. Déjà, dans la loi relative à la prévention de la délinquance, le secret professionnel auquel sont tenus les travailleurs sociaux était remis en cause, au profit d'un « secret partagé ».
Ce que l'on propose aujourd'hui est inadmissible.
M. Jean-René Lecerf, rapporteur. - Certains faits divers dramatiques nous ont mis en garde contre une conception trop stricte du secret médical. L'absence de communication entre les médecins et l'administration pénitentiaire conduit parfois à la mort de certains détenus. L'article 8 oblige les médecins à signaler un risque, créant un devoir d'alerte. Il ne les contraint pas pour autant à détecter ce risque et n'engage pas leur responsabilité s'il n'ont su ou pu le faire.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. - L'explication du rapporteur est excellente. L'article 8 est simple : les personnels de santé opérant dans des établissements où se trouvent des personnes incarcérées ou placées en rétention de sûreté doivent signaler un risque sérieux. Cette information permettra de prendre des mesures de protection.
Rappelez-vous, madame Mathon-Poinat, à quel point la chaîne de l'information avait été défaillante dans l'affaire Evrard. Certains drames auraient pu être évités. Il faut pouvoir concilier l'assistance aux personnes en danger et le secret médical. Nous ne remettons pas en cause ce dernier, mais prévoyons un transfert d'informations opérationnelles pour assurer la sécurité des personnes. Imaginez que vous êtes médecin et vous rendez compte que la vie de codétenus ou du personnel est en danger. Il serait insoutenable de ne pas transmettre une information capitale. (Mme Hermange approuve)
L'amendement n°76 n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°54, présenté par M. Badinter et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Supprimer cet article.
M. Richard Yung. - Le Parlement a déjà légiféré à plusieurs reprises sur la réduction de peine : loi Perben II en 2004, loi du 10 août 2007. A chaque fois, il a aggravé les conditions posées pour en bénéficier. Au cas présent, le refus de soins diminue la possibilité de réduction de la peine au point de presque la supprimer ! La réforme qui avait aboli la corrélation entre ampleur de la réduction de peine et gravité du crime a pourtant été bien vécue dans les prisons.
Des réductions supplémentaires étaient octroyées à ceux qui manifestaient des efforts de réadaptation, par le travail ou les études. Il s'agissait d'un encouragement. Vous le restreignez, voire le supprimez. Je comprends en partie votre philosophie, obliger le condamné à accepter des soins ; mais interpréter le refus de traitement comme un refus de s'amender est choquant. On ne peut contraindre quelqu'un à se soigner.
M. Robert del Picchia. - Le refus est une forme de suicide.
M. Richard Yung. - Certains détenus feront semblant de se soigner pour éviter de perdre une réduction de peine. Les médecins le disent tous : on ne peut guérir ou progresser dans un traitement que si l'on s'engage de tout son coeur et de toute son âme dans cette démarche. Autre conséquence des dispositions de l'article : les relations dans les prisons seront plus tendues, plus violentes, plus désespérées. Voilà pourquoi nous sommes hostiles à l'article 2.
M. le président. - Amendement identique n°72, présenté par Mme Borvo Cohen-Seat et les membres du groupe CRC.
Mme Josiane Mathon-Poinat. - L'article 721 du code de procédure pénale a été modifié par la loi du 12 décembre 2005 ; l'article 721-1, par celle du 10 août 2007, d'application trop récente pour un quelconque bilan...
Vous persistez dans votre logique d'enfermement. L'article 2 étend les exceptions et procède à des assimilations douteuses : le refus de se soumettre à des soins serait l'équivalent d'une « mauvaise conduite » ou d'une récidive.
La limitation des réductions de peine toucherait ici des personnes soupçonnées d'être des récidivistes potentiels. C'est une spirale sans fin. Les médecins disent toute l'importance d'un consentement non contraint. Il y a aussi l'exigence d'effectivité des soins, et l'on sait les moyens insuffisants. Surtout, les réductions de peine ont une influence positive sur la réinsertion des détenus. La commission consultative nationale des droits de l'homme considère que ces nouvelles limites « sont autant d'obstacles aux possibilités de réinsertion durable et réelle ». Elles sont donc contreproductives.
M. le président. - Amendement n°38, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin, Voynet, MM. Desessard et Muller.
Supprimer le II de cet article.
Amendement n°88, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin, Voynet, MM. Desessard et Muller.
Compléter cet article par deux paragraphes ainsi rédigés :
... - L'article 721 du code de procédure pénale est ainsi modifié :
1° Après le troisième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque, en raison de sa particulière dangerosité, le condamné est susceptible de faire l'objet d'une rétention de sûreté dans les conditions mentionnées à l'article 706-3-14, la juridiction régionale de la rétention de sûreté visée à l'article 706-53-15 peut décider du retrait de la réduction de peine dont a bénéficié le condamné aux fins de son placement en rétention de sûreté ».
2° Dans le dernier alinéa, après les mots : « en cas », sont insérés les mots : « de décision de placement en rétention de sûreté, ».
... - Dans le quatrième alinéa de l'article 721-1 du même code, après les mots : « de l'application des peines », sont insérés les mots : « ou de la juridiction régionale de la rétention de sûreté, ».
Mme Alima Boumediene-Thiery. - Même raisonnement qu'à notre amendement n°49. Le I de cet article va dans notre sens mais reste insuffisant à nos yeux. Le retrait de crédit de peine doit être prononcé par la commission régionale des mesures de sûreté, dans le cadre de la décision de placement en rétention de sûreté. Il ne faudrait pas créer une confusion entre la rétention de sûreté et cette nouvelle procédure de retrait confiée au juge d'application des peines. La commission régionale pourra du reste s'appuyer sur la décision du juge d'application des peines pour confirmer le retrait des réductions de peine afin d'étayer sa décision de placement en rétention de sûreté.
La durée de la rétention de sûreté étant égale à la durée du crédit de peine, le II de l'article a pour effet de réduire la durée théorique de la rétention de sûreté. Il faut au contraire favoriser, pour ce type de condamnés, les crédits et réductions de peine supplémentaires, plus adaptés pour une prise en charge médicale et sociale qu'un simple emprisonnement.
M. Jean-René Lecerf, rapporteur. - Défavorable aux amendements n°s54 et 72. Les réductions de peine ne sont pas un droit mais la reconnaissance des efforts d'un détenu. Le refus des soins est une attitude contre laquelle le retrait de réduction de peine peut être utilisé. La rétention de sûreté concerne ceux qui ont fait le choix d'aller au bout de leur peine et ont refusé tout traitement.
Quant aux amendements de Mme Boumediene-Thiery, ils sont contraires à la logique du projet de loi. Défavorable également.
Mme Rachida Dati, garde des sceaux. - Les réductions de peine ne sont pas un droit automatique et il est important qu'elles aient vraiment tout leur sens pour de tels délinquants, qu'elles soient donc la contrepartie de soins ou d'autres mesures de réinsertion. Défavorable aux quatre amendements.
Les amendements n°s54 et 72 ne sont pas adoptés, non plus que les amendements n°s38 et 88.
L'article 2 est adopté.
Article 3
Mme Josiane Mathon-Poinat. - Nous abordons la déclaration d'irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental, régie par la distinction entre abolition et altération du discernement. La personne poursuivie fait l'objet d'une expertise psychiatrique au moment de l'instruction -obligatoire en cas de crime. Mais l'irresponsabilité mentale est de moins en moins fréquemment retenue par les juges d'instruction : 444 cas en 1987, 233 en 2003. Les psychiatres, s'appuyant sur le deuxième alinéa de l'article 122-1 du nouveau code pénal, ont interprété la loi dans un sens univoque.
En conséquence, le nombre d'accusés jugés irresponsables est passé de 17 % au début des années 1980 à 0,17 % en 1997.
Dans ces conditions, rien d'étonnant à ce que 30 % environ de la population carcérale souffre aujourd'hui de graves troubles mentaux et que le nombre de détenus hospitalisés d'office dans des établissements psychiatriques augmente.
En fait, ce projet de loi se fonde sur l'instrumentalisation de la souffrance des victimes à l'occasion de faits divers. Ainsi, le 20 août 2007, après qu'un jeune homme a bénéficié d'un non-lieu pour le meurtre de deux infirmières de l'hôpital psychiatrique de Pau, le Président de la République déclarait : « le premier des droits de l'homme à défendre, c'est celui des victimes ». (On approuve à droite) Pourtant, la loi n'est pas muette s'agissant des droits des victimes. Depuis 1995, l'ordonnance de non-lieu est notifiée oralement dans le cabinet du juge d'instruction et la contre-expertise est de droit depuis 1995 et doit préciser, depuis la loi du 9 mars 2004, s'il existe des charges suffisantes pour établir que l'intéressé a commis les faits qui lui sont reprochés.
Cette loi est donc clairement d'affichage. Elle n'a pas pour but d'améliorer le traitement des personnes irresponsables pénalement, non plus que de renforcer le secteur de la psychiatrie dans les hôpitaux et prisons. C'est pourtant en renforçant la prévention et le suivi des malades qu'on favorise la lutte contre les actes violents et la réinsertion et, partant, que l'on diminue le nombre de victimes.
M. le président. - Amendement n°55, présenté par M. Badinter et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Supprimer cet article.
M. Richard Yung. - La participation du malade mental à une forme de procès public qui constitue une atteinte sérieuse aux règles de procédure introduit une confusion entre juridiction d'instruction et juridiction de jugement -confusion que j'ai longuement développée en défendant la motion d'irrecevabilité et sur laquelle le Conseil constitutionnel devra se prononcer- ainsi qu'une confusion entre l'audience de jugement et l'instruction où l'individu demeure présumé innocent. A cet égard, ce dispositif, dans lequel la personne est obligatoirement représentée par un avocat, est également contraire à l'article 6 de la convention européenne des droits de l'homme selon lequel « tout accusé a droit (...) de se défendre lui-même ».
Plus grave, cette nouvelle procédure complexe n'apportera pas de réconfort à la victime : la confrontation physique avec l'auteur de l'infraction sera un drame ajouté au drame. Si l'auteur de l'infraction est dans un état normal - état cyclique pour certaines maladies mentales-, elle jugera que le non-lieu est un artifice de procédure lui permettant d'échapper à une véritable condamnation ; s'il semble malade, le dialogue ne sera pas possible. Le plus souvent, cette procédure se réduira à une mauvaise scène de théâtre, douloureuse pour tous. Une autre solution serait que le malade soit représenté par son avocat. Certaines cours d'assises, nous l'avons appris durant les auditions, organisent de telles réunions (M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission, le confirme) qui semblent donner satisfaction à tous.
Pour toutes ces raisons, nous préconisons de supprimer ce dispositif.
M. le président. - Amendement identique n°73, présenté par Mme Borvo Cohen-Seat et les membres du groupe CRC.
Mme Josiane Mathon-Poinat. - Défendu.
M. le président. - Amendement n°22, présenté par M. Lecerf au nom de la commission.
Dans le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 706-119 du code de procédure pénale, remplacer les mots :
il en informe les parties lorsqu'il les avise ainsi que le procureur de la République lorsqu'il lui communique le dossier
par les mots :
il en informe le procureur de la République lorsqu'il lui communique le dossier ainsi que les parties lorsqu'il les avise
M. Jean-René Lecerf, rapporteur. - Amendement de cohérence rédactionnelle.
M. le président. - Amendement n°23, présenté par M. Lecerf au nom de la commission.
Après les mots :
il ordonne,
rédiger comme suit la fin du premier alinéa et le début du second alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 706-120 du code de procédure pénale :
si le procureur de la République ou une partie en a formulé la demande, que le dossier de la procédure soit transmis par le procureur de la République au procureur général aux fins de saisine de la chambre de l'instruction. Il peut aussi ordonner d'office cette transmission.
« Dans les autres cas, il rend ordonnance...
M. Jean-René Lecerf, rapporteur. - Amendement de clarification rédactionnelle : il s'agit de distinguer le cas où le juge d'instruction renvoie un dossier devant une chambre d'instruction en vue d'une déclaration d'irresponsabilité pénale des autres cas où il conserve sa liberté d'appréciation. Par cohérence, il faudrait supprimer les termes « il rend ordonnance » à la fin de l'amendement.
M. le président. - L'amendement est ainsi rectifié.
M. le président. - Amendement n°24, présenté par M. Lecerf au nom de la commission.
Dans le cinquième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 706-122 du code de procédure pénale, après les mots :
qui lui sont reprochés
remplacer le mot :
ou
par le mot :
et
M. Jean-René Lecerf, rapporteur. - Amendement de clarification rédactionnelle.
M. le président. - Amendement n°57, présenté par M. Badinter et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Dans le 3° du texte proposé par cet article pour l'article 706-125 du code de procédure pénale, remplacer le mot :
correctionnel
par le mot :
civil
M. Robert Badinter. - Nous proposons d'améliorer la procédure en confiant à un tribunal civil, plutôt que correctionnel, le soin de statuer sur les dommages et intérêts. Cette tâche qui relève du droit civil, tâche que d'aucuns auraient considéré logique de confier à la cour d'assises appelée à statuer sur la responsabilité pénale, sera mieux assumée par une juridiction civile qui se montre d'ailleurs souvent plus cohérente et plus généreuse envers les victimes.
M. le président. - Amendement n°25, présenté par M. Lecerf au nom de la commission.
Dans le cinquième alinéa (4°) du texte proposé par cet article pour l'article 706-135 du code de procédure pénale, remplacer le mot :
sociale
par le mot :
bénévole
M. Jean-René Lecerf, rapporteur. - Harmonisation rédactionnelle avec l'article 131-36-2 du code pénal.
M. le président. - Amendement n°26, présenté par M. Lecerf au nom de la commission.
Dans le cinquième alinéa (4°) du texte proposé par cet article pour l'article 706-135 du code de procédure pénale, après les mots :
a été commise
insérer les mots :
ou impliquant un contact habituel avec les mineurs,
M. Jean-René Lecerf, rapporteur. - L'amendement précise, sur le modèle de l'article 131-36-2 du code pénal concernant le suivi socio-judiciaire, que l'interdiction d'exercer une activité professionnelle au cours de laquelle l'infraction a été commise imposée à une personne reconnue irresponsable comprend les activités en rapport avec des mineurs.
M. le président. - Amendement n°74, présenté par Mme Borvo Cohen-Seat et les membres du groupe CRC.
Supprimer le texte proposé par cet article pour l'article 706-138 du code de procédure pénale.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. - Une fois de plus, il est incohérent de prévoir des sanctions pénales à l'encontre de personnes reconnues irresponsables d'autant que l'on entretient déjà la confusion en prévoyant qu'il peut leur être imposé une mesure de rétention de sûreté. C'est renforcer l'assimilation, sur laquelle se fonde ce projet de loi, entre maladie mentale et délinquance alors que le traitement de l'une dépend de la santé publique et la prévention de l'autre constitue un problème d'ordre public.
M. Jean-René Lecerf, rapporteur. - Défavorable aux amendements de suppression n°s55 et 73 : ce dispositif, nous l'avons constaté durant les auditions, est approuvé par les associations de victimes, de familles et de patients atteints de maladies psychiatriques.
La commission est très partagée sur l'amendement n°57. Donner compétence au tribunal correctionnel de statuer sur les dommages et intérêts simplifie la procédure dans l'intérêt des victimes. Par ailleurs, le caractère inédit de cette disposition doit être relativisé : aux termes de l'article 470-1 du code de procédure pénale, le tribunal correctionnel statue déjà, malgré une relaxe, sur les dommages et intérêts au titre des infractions non intentionnelles. Pourquoi lui interdire ce qui, en vertu de l'article 371 du code de procédure pénale, est autorisé à une cours d'assises, laquelle statue sur les dommages et intérêts d'une infraction commise par une personne déclarée irresponsable pénalement ? Pour autant, de nombreux membres de la commission, se ralliant à l'avis de M. Badinter, estiment qu'une juridiction civile est plus habilitée à se prononcer sur la responsabilité civile. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Il serait paradoxal de condamner une personne déclarée pénalement irresponsable, mais le projet de loi mentionne explicitement le premier alinéa de l'article 122-1 du code pénal, si bien qu'un éventuel manquement à ses obligations ne serait pas sanctionné s'il était commis alors que le discernement de la personne concernée était aboli. Ainsi, le paradoxe disparaît. D'où l'avis défavorable à l'amendement n°74.
Mme Rachida Dati, garde des sceaux. - Cet article explicite la signification d'une décision de non-lieu, souvent source de confusion pour les victimes. (M. Badinter manifeste son désaccord) Monsieur Badinter, les Français ne sont pas tous aussi fin juristes que vous ! Certains pensent que le non-lieu à poursuivre revient à dire que les faits n'ont pas eu lieu. Avis défavorable aux amendements n°s55 et 73.
Le Gouvernement accepte les amendements 22, 23 et 24 qui améliorent la rédaction du texte.
L'amendement n°57 tend à supprimer une disposition qui simplifie les démarches des victimes. Je rappelle qu'en vertu de l'article 498-2 du code civil, une personne pénalement irresponsable doit réparer civilement les conséquences de ses actes. Désormais, la chambre de l'instruction pourra saisir le tribunal correctionnel à la demande des victimes. D'ailleurs, le tribunal correctionnel se prononce déjà aujourd'hui sur d'éventuels dommages et intérêts dus par une personne qu'il estime pénalement irresponsable. M. Badinter veut qu'une juridiction civile soit nécessairement saisie, alors qu'il sait parfaitement que la juridiction pénale compétente est à même de se prononcer.
M. Robert Badinter. - Mais il n'y a pas de juridiction pénale compétente !
Mme Rachida Dati, garde des sceaux. - Bien sûr que si ! D'ailleurs, la cour d'assises statuant en formation réduite à trois magistrats professionnels peut accorder des dommages et intérêts malgré un acquittement.
M. Robert Badinter. - Mon amendement concerne le cas où il n'y a pas de juridiction pénale compétente. La chambre de l'instruction ne peut donc pas la saisir !
Mme Rachida Dati, garde des sceaux. - Nous reprenons une disposition que vous aviez proposée lorsque vous étiez garde des sceaux, dans le cadre de votre texte sur la protection des victimes. Et quelques années plus tard, vous dites le contraire ! Vos objectifs légitimes de 1983 sont les nôtres aujourd'hui. Nous reprenons exactement le même dispositif. (M. Badinter ne partage pas cet avis)
Nous avons eu hier une discussion analogue au sujet de l'hospitalisation psychiatrique d'office. Je vous ai transmis certains documents, que vous n'avez pas commentés. Acceptez que d'autres aient parfois raison !
M. Robert Badinter. - N'étant plus garde des sceaux, je ne peux m'exprimer à volonté. Vous trouverez donc dans votre courrier une consultation du 8 janvier qui vous éclairera sur la distinction que vous semblez omettre entre la dangerosité psychiatrique, dont le traitement relève des juridictions administratives, et la dangerosité criminologique, examinée par la justice pénale.
Sur le fond, mon amendement concernait bien sûr le cas où la cour d'assises n'est pas saisie. La chambre d'instruction ayant constaté l'irresponsabilité pénale doit alors saisir un tribunal civil qui a pleine compétence.
Par ailleurs, dès lors que le rappel de certains principes juridiques suscite le renvoi aux victimes virtuelles, il faut dire ce que l'on a fait pour elles. Le malheur des victimes, je l'ai vu toute ma vie, non dans les journaux ou à la télévision, mais dans mon bureau, dans le cabinet du juge d'instruction et devant la cour d'assises !
Quand j'exerçais vos responsabilités, j'ai porté les droits des victimes au niveau le plus élevé en Europe, avec la Suède. D'ailleurs, la seule loi qui porte mon nom dans les revues juridiques protège les victimes.
Mme Rachida Dati, garde des sceaux. - Je n'ai jamais mis en cause votre action. Hier, vous avez soutenu que l'hospitalisation d'office était limitée au quantum de la peine. Or, elle dépend exclusivement de la dangerosité psychiatrique de l'intéressé. Acceptez d'avoir parfois tort !
Le Gouvernement est défavorable à l'amendement n°74.
Les amendements identiques n°s55 et 73 ne sont pas adoptés.
Les amendements n°s22, 23 rectifié et 24 sont adoptés.
L'amendement n°57 n'est pas adopté.
Les amendements n°s25 et 26 sont adoptés.
L'amendement n°74 n'est pas adopté.
L'article 3, modifié, est adopté.
Article 4
I. - La première phrase de l'article 167-1 du code de procédure pénale est remplacée par deux phrases ainsi rédigées :
« Lorsque les conclusions de l'expertise sont de nature à conduire à l'application des dispositions du premier alinéa de l'article 122-1 du code pénal prévoyant l'irresponsabilité pénale de la personne en raison d'un trouble mental, leur notification à la partie civile est effectuée dans les conditions prévues par le premier alinéa de l'article 167, le cas échéant en présence de l'expert ou des experts. En matière criminelle, cette présence est obligatoire si l'avocat de la partie civile le demande. »
II. - Dans le deuxième alinéa de l'article 177 du même code, les mots : « le premier alinéa de l'article 122-1, » sont supprimés.
III. - L'article 199-1 du même code est abrogé.
IV. - L'article 361-1 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Si elle a répondu positivement à la première question et positivement à la seconde question portant sur l'application des dispositions du premier alinéa de l'article 122-1 du code pénal, il est fait application des articles 706-129 et suivants relatifs à la déclaration d'irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental. »
V. - Après l'article 470-1 du même code, il est inséré un article 470-2 ainsi rédigé :
« Art. 470-2. - Le tribunal correctionnel ne peut relaxer le prévenu en raison d'une des causes d'irresponsabilité pénale prévues par les articles 122-2, 122-3, 122-4, 122-5 et 122-7 du code pénal qu'après avoir constaté que celui-ci avait commis les faits qui lui étaient reprochés.
« Dans le cas où il estime qu'est applicable le premier alinéa de l'article 122-1 du code pénal, il statue conformément à l'article 706-133 relatif à la déclaration d'irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental. »
V bis. - Le 4° de l'article 706-53-2 du même code est ainsi rédigé :
« 4° D'une décision d'irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental ; ».
V ter. - Dans l'avant-dernier alinéa de l'article 706-113 du même code, après les mots : « d'acquittement », sont insérés les mots : «, d'irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental, ».
VI. - L'article 768 du même code est complété par un 10 ainsi rédigé :
« 10° Les décisions d'irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental. »
VII. - Dans la deuxième phrase du deuxième alinéa de l'article 769 du même code, après les mots : « des condamnations », sont insérés les mots : « ou des décisions d'irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental ».
VIII. - Après le 15° de l'article 775 du même code, il est inséré un 16° ainsi rédigé :
« 16° Les décisions de déclaration d'irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental, sauf si ont été prononcées des interdictions prévues par l'article 706-135 du présent code tant que ces interdictions n'ont pas cessé leurs effets. »
M. le président. - Amendement n°55, présenté par M. Badinter et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Supprimer cet article.
M. Richard Yung. - Cette suppression est proposée par coordination avec celle que nous avions proposée à l'article 3.
M. le président. - Amendement identique n°75, présenté par Mme Borvo Cohen-Seat et les membres du groupe CRC.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. - Nous voulons supprimer l'article 4 en premier lieu parce qu'il complète la nouvelle procédure de déclaration d'irresponsabilité, à laquelle nous nous opposons.
D'autre part, la déclaration d'irresponsabilité serait inscrite au casier judiciaire bien qu'elle ne constitue pas une condamnation. Outre l'atteinte à la vie privée, l'insertion dans le casier judiciaire des données à caractère personnel mentionnées dans la déclaration d'irresponsabilité revient à détourner la fonction initiale de ce casier, qui doit contenir exclusivement les condamnations pénales ou commerciales.
Cette volonté de ficher les irresponsables pénaux n'est pas nouvelle : lorsqu'il avait examiné en décembre 2005 la proposition de loi relative au traitement de la récidive des infractions pénales, le Sénat avait supprimé un article introduit par les députés qui tendait à inscrire les irresponsables pénaux dans le fichier judiciaire des auteurs d'infractions sexuelles.
Aujourd'hui, la nouvelle tentative de fichage utilise le casier judiciaire, alors que la procédure de déclaration d'irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental est loin d'offrir toutes les garanties d'un jugement, ce qui doit l'exclure du casier judiciaire.
M. le président. - Amendement n°58, présenté par M. Badinter et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Supprimer les VI, VII et VIII de cet article.
M. Richard Yung. - Le fichage des personnes atteintes de troubles mentaux est réintroduit dans ce projet de loi bien qu'il ait été abandonné dans le texte sur la prévention de la délinquance.
Comment justifier l'inscription de l'irresponsabilité pénale au casier judiciaire au regard de la loi informatique et liberté ? Le ministère de la justice a en charge des données à caractère personnel en lien avec des infractions, des condamnations ou des mesures de sûreté déjà prononcées.
La déclaration d'irresponsabilité pénale n'entre dans aucune de ces catégories et elle n'est pas non plus une mesure de sûreté : nous supprimons la mention au casier.
M. Jean-René Lecerf, rapporteur. - Avis défavorable à la suppression de l'article. L'inscription au casier judiciaire est strictement encadrée : elle figure au bulletin n°1, accessible aux seules autorités judiciaires, et au bulletin n°2, consultable pour l'accès à certaines fonctions publiques, seulement lorsque l'irresponsabilité pénale s'accompagne de mesures de sûreté. Le non-lieu d'acquittement pour irresponsabilité pénale figure déjà au fichier judiciaire automatisé des auteurs d'infractions sexuelles ou violentes (Fijais), il est logique que l'irresponsabilité pénale soit inscrite au casier judiciaire.
Cependant, je me demande s'il ne faudrait pas donner au juge un pouvoir d'appréciation pour cette inscription, selon la gravité du délit ou du crime.
Mme Rachida Dati, garde des Sceaux. - Avis défavorable aux amendements identiques n°s56 et 75. Il faut conserver une mémoire des crimes, même lorsque leurs auteurs sont irresponsables. Il est bien normal, par exemple, de s'assurer qu'un éducateur de la protection judiciaire de la jeunesse n'ait pas été déclaré pénalement irresponsable !
Il peut toujours être demandé une dispense d'inscription au bulletin n°2, lors de l'audience : avis défavorable à l'amendement n°58.
M. Jean-René Lecerf, rapporteur. - Même avis.
Les amendements identiques n°s56 et 75 ne sont pas adoptés.
L'amendement n°58 n'est pas adopté.
L'article 4 est adopté.
L'article 9 est adopté, de même que les articles 10 et 11.
Article 12 bis
L'article 706-53-7 du code de procédure pénale est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les présidents des conseils généraux et les maires peuvent également consulter le fichier, par l'intermédiaire des préfets, pour l'examen des demandes d'emploi ou d'agrément concernant des activités ou professions impliquant un contact avec des mineurs ainsi que pour le contrôle de l'exercice de ces activités ou professions. »
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. - En inaugurant le Fijais, le 8 juillet 2005, M. Clément, alors garde des Sceaux, assurait que les informations de ce fichier resteraient strictement réservées aux professionnels chargés de la lutte contre la délinquance sexuelle. Voici que cet article en étend l'accès aux présidents de conseils généraux et aux maires. Les garanties apportées en 2005, que M. Clément rapportait aux valeurs mêmes de notre justice, ne vaudraient donc plus aujourd'hui ? Vous élargissez l'accès à ce fichier, comme si c'était la solution, alors que cela ne règlera pas le problème. Quand le service public est délégué, par exemple pour la garde des enfants, le maire n'est pas l'employeur, mais il aurait accès au fichier ? Il faut à tout le moins consulter la Cnil !
M. le président. - Amendement n°60, présenté par M. Badinter et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Supprimer cet article.
M. Richard Yung. - Jusqu'à présent, l'accès à ce fichier était réservé à certaines autorités de l'État, vous en élargissez la consultation aux trente six mille maires de France. La Cnil doit donner son avis !
M. le président. - Amendement n°79 rectifié bis, présenté par MM. Portelli, del Picchia et Béteille.
Rédiger comme suit cet article :
L'article 706-53-7 du code de procédure pénale est ainsi modifié :
1° Au quatrième alinéa (3°), les mots : « pour l'examen des demandes d'agrément » sont remplacés par les mots : « pour les décisions administratives de recrutement, d'affectation, d'autorisation, d'agrément ou d'habilitation » ;
2° Dans l'avant-dernier alinéa, les mots : « par la demande d'agrément » sont remplacés par les mots : « par la décision administrative » ;
3° Il est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les maires sont également destinataires, par l'intermédiaire des préfets, des informations contenues dans le fichier, pour les décisions administratives mentionnées au 3° concernant des activités ou professions impliquant un contact avec des mineurs ainsi que pour le contrôle de l'exercice de ces activités ou professions. »
M. Robert del Picchia. - Nous précisons que l'accès au Fijais n'est pas limité aux demandes d'agrément, mais concerne toutes les décisions administratives de recrutement, d'affectation, d'autorisation, d'agrément ou d'habilitation. C'est principalement pour le recrutement de personnels travaillant dans les écoles ou les collèges que les maires doivent pouvoir consulter ce fichier.
M. Jean-René Lecerf, rapporteur. - Avis défavorable à l'amendement n°60. Il est utile que le président du conseil général ou le maire puissent vérifier qu'un candidat à un poste de collaborateur de centre aéré, d'école maternelle ou d'un centre de loisirs, ne soit pas inscrit à ce fichier !
Avis favorable à l'amendement n°79 rectifié bis, sous réserve d'une rectification.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission. - L'amendement de M. Portelli concerne les maires, mais avec les nouveaux transferts de compétence, les présidents de conseils généraux et régionaux doivent gérer les personnels Atos et les assistantes maternelles. Il faut donc les mentionner.
M. le président. - Il s'agit donc de l'amendement n°79 rectifié ter.
L'amendement n°60, repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement n°79 rectifié ter, accepté par le Gouvernement, est adopté et l'article est ainsi rédigé.
L'amendement n°61 n'est pas défendu, non plus que l'amendement n°62.
L'article 12 ter est adopté.
Article additionnel
M. le président. - Amendement n°30, présenté par M. Lecerf au nom de la commission.
Après l'article 12 ter, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La présente loi fera l'objet d'un nouvel examen d'ensemble par le Parlement dans un délai maximum de cinq ans après son entrée en vigueur.
M. Jean-René Lecerf, rapporteur. - Compte tenu du caractère très novateur de la rétention de sûreté, il convient de prévoir une évaluation complète des dispositions de la loi en vue d'éventuels ajustements.
Mme Rachida Dati, garde des sceaux. - Cette demande est légitime.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. - Je vais voter cet amendement mais nous serions bien inspiré d'écrire « avant toute nouvelle législation », car il y a fort à parier que nos nous retrouverons avant cinq ans pour examiner une nouvelle loi. Tout le monde est pourtant convaincu qu'il faudrait évaluer les lois en vigueur avant d'en proposer de nouvelles.
L'amendement n°30 est adopté et devient un article additionnel.
Article 13
I. - Les articles 1er à 4, 6, 9 et 11 de la présente loi sont applicables dans les îles Wallis et Futuna, en Polynésie française, en Nouvelle-Calédonie et dans les Terres australes et antarctiques françaises.
II. - La présente loi est applicable à Mayotte.
M. le président. - Amendement n°31, présenté par M. Lecerf au nom de la commission.
I. Après les mots :
en Polynésie française
rédiger comme suit la fin du I de cet article :
et en Nouvelle-Calédonie.
II. Supprimer le II de cet article.
M. Jean-René Lecerf, rapporteur. - Il faut supprimer les mentions d'application de la loi à Mayotte et dans les Terres australes et antarctiques françaises (Taaf), puisque ces deux collectivités sont soumises depuis le 1er janvier 2008 à un nouveau régime d'application des lois et règlements : à Mayotte, les lois s'appliquent directement en matière pénale ou de santé et dans les Taaf, les lois pénales s'appliquent de plein droit.
L'amendement n°31, accepté par le Gouvernement, est adopté.
L'article 13, modifié, est adopté.
Interventions sur l'ensemble
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. - Depuis 2002, les textes sécuritaires ne cessent de s'accumuler dans un sens toujours plus répressif alors que les moyens de la justice et de l'administration pénitentiaire sont insuffisants. La conception française de la détention est complètement archaïque.
Il est donc regrettable que nous légiférions, une nouvelle fois, dans l'urgence, avant même d'avoir évalué les lois que nous avons précédemment votées. Cette logique malheureuse mène à toutes les dérives : aujourd'hui, vous proposez d'enfermer à vie les personnes dangereuses sans avoir envisagé une quelconque alternative. En fait, il s'agit d'un substitut à la peine de mort. Une telle conception est contraire à un État de droit puisqu'une personne ayant purgé sa peine continuera à être enfermée, non pour un quelconque crime, mais parce qu'elle est susceptible de commettre une nouvelle infraction.
Vous n'avez cessé de répéter, madame la ministre, que la rétention de sûreté n'était pas attentatoire aux droits fondamentaux des personnes puisque l'hospitalisation d'office permet déjà d'enfermer une personne contre son gré en raison d'un danger qu'elle pourrait constituer pour elle-même ou pour autrui. Vous oubliez que cette mesure est administrative et non judiciaire.
En outre, on nous dit de prendre exemple sur ce qui se fait à l'étranger mais lorsque cela va à l'encontre de vos convictions, il n'est plus question de procéder de la sorte : c'est très regrettable. Vous préférez une justice vengeresse, politiquement plus payante dans certaines couches de la population.
Le concept de dangerosité n'a pas été défini. Le Gouvernement et les parlementaires de la majorité ne se sont guère expliqués sur cette notion. Et nous ne sommes pas aidés par les déclarations à l'emporte-pièce de l'ex-candidat à la présidence de la République sur le caractère génético-hormonal du suicide et des déviances sexuelles.
L'appréciation de la dangerosité est susceptible de varier dans le temps, en fonction des époques et du contexte. Pour s'en convaincre, il suffit d'observer à quel point le champ d'application du projet de loi s'est élargi entre le 8 avril et aujourd'hui. Au départ, réservé aux criminels ayant commis des infractions graves sur des mineurs de moins de 15 ans et non rétroactif, ce texte sera désormais applicable à quasiment tous les criminels et rétroactif.
Il est donc légitime de s'inquiéter d'éventuels élargissements du champ de cette loi. Ce ne sera pas la première fois que le Gouvernement étendra des législations répressives comme en matière de terrorisme ou de fichage. Vous avez fait, madame la ministre, une comparaison avec les évènements du 11 septembre. Si ces actes de terrorisme expliquent notre coopération judiciaire, ils ne justifient en rien Guantanamo !
Décréter que la prise en charge des criminels dangereux ne peut intervenir qu'après quinze ou vingt ans de prison revient à admettre que la détention est inutile. Il faut donc en tirer les conséquences car cela contredit les durcissements de peines motivées par la lutte contre la récidive, récidive que nous voulons, nous aussi, combattre, mais pas à votre manière.
Une des missions de l'administration pénitentiaire est la réinsertion des condamnés. Comment la remplir au mieux si le prisonnier sait qu'il risque d'être enfermé, après sa peine, pour une durée sans cesse renouvelée ? Nous sommes dans une logique d'enfermement et vous nous proposez une véritable relégation sociale -jadis existait le bagne.
Concernant l'irresponsabilité pénale, nous sommes également en pleine confusion. Il y a des personnes qui ne sont pas irresponsables pénalement, mais dont les capacités de réflexion et de compréhension sont altérées : elles doivent donc être prises en charge médicalement et psychologiquement.
Puisqu'on ne recule pas devant une remise en cause de principes constitutionnels et à la convention européenne des droits de l'homme, pourquoi ne pas abroger notre Déclaration des droits de l'homme et dénoncer la convention européenne ? La sécurité peut nous y amener, comme elle a conduit les Américains à installer des centres de rétention à l'étranger - voulez-vous reconstituer les bagnes ? A cela, je ne peux m'associer : nous voterons résolument contre.
Mme Alima Boumediene-Thiery. - Je salue le travail de la commission des lois et le courage du rapporteur, qui a tenté -en vain- de dresser des garde-fous. Mais le Gouvernement n'en a pas voulu, car il entend faire peser la responsabilité sur le Conseil constitutionnel. L'épisode de la rétroactivité est symptomatique à cet égard. La ministre a laissé les députés y contrevenir, puis pour s'opposer au rapporteur qui essayait d'y remédier, elle a soutenu le sous-amendement de M. Portelli. À quoi bon écrire que ce sera « à titre exceptionnel » puisque les juges ne prendront pas plus le risque d'y déroger qu'ils n'osent individualiser les peines.
Quelle honte pour notre système pénal que d'assimiler la dangerosité à la culpabilité en balayant d'un revers de main des principes fondamentaux. À M. Portelli qui invoque le devoir qui incombe à l'État de protéger la société, je fais observer que l'État a une obligation de moyens, non de résultat, et que l'objectif de défense de la société ne doit pas contrevenir de façon aussi désinvolte aux principes constitutionnels et aux traités. Les moyens doivent être respectueux du droit et des libertés, ce que n'est pas la rétention de sûreté, cette peine de privation totale de la liberté qui vient s'ajouter à la peine accomplie.
Vous tentez de nous faire croire que l'enfermement est le seul moyen efficace pour lutter contre la récidive, que la rétention n'est qu'une mesure de sûreté, mais je ne crois pas que le Conseil constitutionnel considère qu'une privation totale de liberté est une mesure de sûreté, car c'est bien d'une relégation à durée indéterminée qu'il s'agit, différente de l'hospitalisation d'office, admise par la Convention. Je refuse un enfermement justifié par la seule dangerosité. Mais vous confondez troubles mentaux et troubles du comportement, de même que mesures de sûreté et hospitalisation d'office. Mettant dans le même sac malades et criminels, vous criminalisez les troubles psychiatriques et psychiatrisez la criminalité, au risque d'alimenter la haine à l'encontre des personnes dangereuses, ainsi instrumentalisées.
Que deviennent les mesures que nous avons votées si, en vertu du principe de précaution, l'enfermement devient la règle et les vraies mesures de sûreté l'exception ?
Nos nombreuses propositions n'ont reçu aucun écho. Elles auraient pourtant rendu constitutionnel un texte que vous ne voulez que d'affichage. Pour toutes ces raisons, philosophiques, juridiques et humaines, nous voterons contre la loi en espérant que le Conseil constitutionnel rendra son honneur à notre droit en retrouvant la tradition des Lumières.
M. Richard Yung. - Nous avons eu un débat long et complet. Grâce au travail de la commission des lois et de son rapporteur, nous avons pu améliorer le texte sur certains points et le faire évoluer de manière significative, mais ces avancées ne peuvent nous amener à changer de point de vue sur ce projet élaboré sans cohérence ni analyse sérieuse de toute la législation adoptée depuis cinq ans. Nous avons pourtant bien besoin d'un tel bilan. Il aurait d'ailleurs fallu avoir ce débat après la loi pénitentiaire : on marche sur la tête.
Pour l'essentiel, ce texte repose sur l'enfermement, déjà beaucoup plus fréquemment prononcé que dans le reste de l'Europe, et poursuit la chimère d'un risque zéro qui impose de plus en plus d'atteintes aux libertés. Il contient de nombreux ferments d'inconstitutionnalité. Ce n'est pas grave, ont dit certains tandis que d'autres en acceptaient le risque. Curieuse approche pour un Parlement que de se défausser sur le Conseil constitutionnel pour mieux affirmer : « on a prévu ce qu'il fallait mais le Conseil constitutionnel manque de courage ».
Le projet remet en cause deux principes fondamentaux de notre droit depuis la Révolution. On en revient aux lettres de cachet en invoquant une présomption de danger, une dangerosité virtuelle. Le Gouvernement a beau affirmer qu'il s'agit d'une mesure de sûreté, il ne nous convainc pas. En outre, le texte tourne le dos au principe de non-rétroactivité de la loi pénale plus dure, qui est issu de la Déclaration des droits de l'homme. Finalement, on établit un enfermement à vie sans qu'il y ait eu infraction. Initialement, le texte ne devait viser que les délinquants sexuels récidivistes sur mineurs, mais il a été élargi par l'Assemblée nationale pratiquement à tous les crimes, y compris ceux qui n'ont pas été commis par des récidivistes. D'autres dérives suivront. Jusqu'ou ? Nous voterons contre cette évolution de la conception pénale !
M. Nicolas Alfonsi. - J'avais souligné avec plaisir l'unanimité du RDSE sur la loi constitutionnelle, mais cet enthousiasme aura été de courte durée puisque la sensibilité que je représente -M. Othily a exprimé la sienne- est très réservée sur ce texte.
Je veux toutefois rendre hommage à la commission des lois, aux efforts déployés par notre rapporteur pour surmonter les inconvénients de la procédure d'urgence qui n'est jamais bénéfique en matière pénale.
Ensuite, des efforts ont été faits pour améliorer le texte, qui se sont révélés insuffisants pour compenser la volonté d'affichage du Gouvernement. L'argument de M. del Picchia est d'une certaine façon recevable : il ne s'agit pas de se prosterner devant la Convention européenne des droits de l'homme, et nous devons conserver notre liberté d'appréciation. Mais tout de même ! Le goût de l'affichage conduit le Gouvernement à déposer des textes sans se préoccuper de leurs conséquences et du verdict du Conseil constitutionnel. « Qui vivra verra », semble-t-il dire. Nous avons vu la même chose se produire l'été dernier au sujet des intérêts d'emprunts.
S'il subsistait encore des doutes sur l'intérêt du bicamérisme, ils seraient dissipés par la qualité du travail de notre commission des lois, dont la réécriture a corrigé un texte rédigé par l'Assemblée dans l'urgence. Le principal argument qui doit nous guider est l'anticipation de la décision du Conseil constitutionnel, dont un membre éminent, son Président, a déclaré un jour que « trop de lois tuent la loi ».
M. Robert del Picchia. - Ce n'est qu'une formule !
M. Nicolas Alfonsi. - Nous aurions pu nous prononcer en faveur du texte de la commission des lois, mais le sous-amendement du Gouvernement a ruiné les espoirs qu'avait suscités l'amendement n°29.
Lorsque je lis dans l'amendement n°92 que les dispositions « sont applicables aux personnes faisant l'objet d'une condamnation prononcée après la publication de la présente loi pour des faits commis avant la publication », j'ai le sentiment qu'on porte là atteinte à un principe intangible, et cela doit primer sur toute autre considération. La majorité du groupe RDSE votera contre ce projet, et c'est pour une fois la minorité qui votera en faveur de ce texte.
M. Robert del Picchia. - J'ai dit que, selon moi, le risque que couraient les victimes et leurs familles méritait d'être davantage pris en considération que le risque d'une éventuelle condamnation de la Cour européenne des droits de l'homme. Je persiste et je signe ! Et un grand nombre de Français pensent comme moi.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. - Certainement !
M. Robert del Picchia. - Le groupe UMP votera avec plaisir un texte exigé par nos concitoyens, qui ne comprennent pas que soient commis des crimes odieux qui auraient dû être évités. Il est de notre responsabilité, madame la ministre, de soutenir ce dispositif qui renforce, à l'instar de ce qui se fait dans d'autres pays, la surveillance de criminels présentant une dangerosité intrinsèque rare, en les plaçant dans des centres socio-médicaux. Le texte constitue également une sérieuse avancée pour le droit des victimes en améliorant le traitement judiciaire des dossiers de personnes présentant des troubles mentaux qui les rendent irresponsables sur le plan pénal. Enfin, l'efficacité de l'injonction de soins sera renforcée. Nous saluons donc votre courage et votre détermination, madame la ministre, ainsi que le travail du président de la commission des lois et du rapporteur, en dépit de certaines divergences de vue que nous avons eues, bien naturelles lors d'un débat !
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission. - Cela n'empêche pas d'apprécier le travail !
M. Robert del Picchia. - Grâce à M. Lecerf, le dispositif a été précisé, notamment avec la transformation de la commission en juridiction. Le groupe UMP approuve le projet de loi enrichi par nos travaux.
M. Pierre Fauchon. - Dans sa grande majorité, le groupe de l'Union centriste votera très volontiers ce texte. « Trop de lois tuent la loi », disent d'aucuns mais si elles permettent d'éviter quelques meurtres, cela me convient ! (Exclamations à gauche)
Le dispositif a été beaucoup caricaturé dans les médias : « prison à vie », « bagne », que sais-je encore ! Ces interventions ne niaient d'ailleurs pas la réalité, qui est la suivante : il existe des individus dangereux...
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. - Oh !
M. Pierre Fauchon. - Naturellement, il n'existe pas de certitude absolue en la matière, mais faut-il pour autant ne rien faire ? Il y a peut-être une marge d'erreur, mais vous ne pouvez nier cette réalité. De plus, le texte apporte des précautions sérieuses. Il s'agit d'individus pour lequel la probabilité d'une récidive est très forte. (Nouvelles exclamations à gauche) Et vous, que proposez-vous ? Qu'on les laisse en liberté, et après on verra bien ? (Même mouvement)
M. Richard Yung. - C'est une caricature, une insulte à la raison !
M. Pierre Fauchon. - Derrière ce débat, il est vrai, il y a des conceptions de l'homme différentes. Robert Badinter campe sur ses positions, décrivant l'homme idéal tel que l'imaginait Rousseau au siècle des Lumières, à la veille de la Révolution : l'homme de l'Aufklärung, maître de lui comme de l'univers.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. - Caricature !
M. Pierre Fauchon. - Entre-temps, il a coulé beaucoup d'eau sous les ponts. Vous semblez ignorer tout de la psychologie et de la psychanalyse ; vous vous figurez que tout le monde dispose de son libre arbitre et vous évoquez la peine en termes moraux, en l'associant à une sanction. Mais avec la psychanalyse, nous avons beaucoup appris sur l'homme, qu'il n'est plus possible de juger comme on le faisait au XVIIIe siècle. Il est temps de réviser nos tablettes !
L'épouvantail de la rétroactivité a été largement brandi par certains, à tort selon moi : la condamnation d'origine est la condition de l'examen de l'état psychique de la personne, elle n'en est pas la cause, de même que le fait d'être majeur est une condition, et non une cause du jugement. Le fondement de la mesure sera l'examen par les experts, suivi de la décision de la juridiction, c'est cet examen qui sera la cause de cette mesure technique de sûreté, qu'il ne faut pas confondre avec une sanction morale. L'interprétation proposée du texte de la Convention européenne des droits de l'homme ne me donc paraît pas juste : il faut considérer la situation évoquée comme une variante de l'aliénation mentale, ne supposant donc pas une condamnation antérieure.
Nous pouvons voter ce texte avec sérénité. Je formule toutefois le souhait, madame la ministre, que soient trouvés, au-delà des discussions théoriques certes passionnantes, des moyens pratiques pour assurer aux personnes concernées des conditions de rétention telles qu'on ne puisse les confondre avec la détention. Il s'agit avant tout de malheureux que nous protégeons d'abord contre eux-mêmes.
À la demande du groupe CRC, le projet de loi est mis aux voix par scrutin public.
M. le président. - Voici les résultats du scrutin :
Nombre de votants | 326 |
Nombre de suffrages exprimés | 318 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 160 |
Pour l'adoption | 189 |
Contre | 129 |
Le Sénat a adopté.
Mme Rachida Dati, garde des Sceaux. - Je vous remercie pour la qualité de ce débat. Une fois de plus, la Haute assemblée a montré son attachement aux grands sujets et à la rigueur de la rédaction.
Nous avons beaucoup échangé, sans être toujours d'accord, mais attachés, sur tous les bancs, à la qualité de l'argumentation, et animés de la volonté d'apporter de vraies réponses à un sujet qui nous concerne tous.
Je remercie M. Lecerf et le président Hyest pour la qualité de leurs travaux, et je suis sûre que ceux de la CMP seront fructueux.
Ce texte, qui améliore la protection des citoyens et auquel 81 % des Français se sont déclarés favorables, répond à une vraie attente. Je salue votre volonté unanime d'assurer un suivi adapté des délinquants dangereux dès le début de la peine et de permettre dès à présent l'application de la rétention de sûreté aux délinquants les plus dangereux au moment de leur sortie de prison.
Je ne doute pas de la richesse de nos débats sur la future loi pénitentiaire. (Applaudissements à droite et au centre)
CMP (Nominations)
M. le président. - M. le Président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre la demande de constitution d'une commission mixte paritaire sur le texte que nous venons d'adopter.
La liste des candidats établie par la commission des lois a été affichée conformément à l'article 12 du Règlement. Je n'ai reçu aucune opposition. En conséquence, cette liste est ratifiée et je proclame représentants du Sénat à cette commission mixte paritaire, comme membres titulaires : MM. Hyest, Lecerf, Gélard, Portelli, Fauchon, Badinter et Mme Mathon-Poinat ; et comme membres suppléants : M. Alfonsi, Mme Boumediene-Thiery, MM. Cointat, Collombat, Courtois, Garrec et Zocchetto.
Prochaine séance, mardi 5 février 2008 à 10 heures.
La séance est levée à 19 h 20.
Le Directeur du service du compte rendu analytique :
René-André Fabre
ORDRE DU JOUR
du mardi 5 février 2008
Séance publique
A DIX HEURES
1. Dix-huit questions orales.
À 16 HEURES ET LE SOIR
2. Discussion de la proposition de loi (n° 136, 2007-2008), modifiée par l'Assemblée nationale, relative à la sécurité des manèges, machines et installations pour fêtes foraines ou parcs d'attraction.
Rapport (n° 162, 2007-2008) de M. Pierre Hérisson, fait au nom de la commission des affaires économiques.
3. Discussion du projet de loi (n° 149, 2007-2008) relatif aux organismes génétiquement modifiés (urgence déclarée).
Rapport (n° 181, 2007-2008) de M. Jean Bizet, fait au nom de la commission des affaires économiques.
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DÉPÔTS
La Présidence a reçu :
- transmis par M. le Premier Ministre, un projet de loi, modifié par l'Assemblée nationale, relatif à la nationalité des équipages de navires ;
- de M. Jean-Claude Carle un rapport fait au nom de la commission des affaires culturelles sur la proposition de loi de M. Jean-Marc Todeschini, Mme Gisèle Printz, MM. Jean-Pierre Masseret, Jean-Pierre Bel, Serge Lagauche, Mme Christiane Demontès, MM. Simon Sutour, Bertrand Auban, Mme Michèle André, MM. Bernard Angels, Yannick Bodin, Mme Claire-Lise Campion, MM. Jean-Louis Carrère, Pierre-Yves Collombat, Roland Courteau, Jean-Pierre Demerliat, Claude Domeizel, Mme Josette Durrieu, MM. Bernard Dussaut, Jean-Pierre Godefroy, Alain Journet, Yves Krattinger, Alain Le Vern, Roger Madec, Philippe Madrelle, Jacques Mahéas, Marc Massion, Jean-Luc Mélenchon, Gérard Miquel, Jean-Marc Pastor, Bernard Piras, Marcel Rainaud, Daniel Raoul, Thierry Repentin, Mme Patricia Schillinger, MM. Michel Sergent, René-Pierre Signé, Michel Teston, Robert Tropeano, Richard Yung, Bernard Frimat, Michel Dreyfus-Schmidt, Claude Haut, Mme Bariza Khiari, MM. Jean-Claude Peyronnet, Jean-Pierre Sueur, Mme Catherine Tasca, M. Jean-Pierre Michel et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, tendant à abroger l'article 89 de la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales (n° 106, 2007-2008).