Convention relative à la responsabilité parentale
M. le président. - L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi autorisant l'adhésion à la convention de La Haye du 19 octobre 1996 concernant la compétence, la loi applicable, la reconnaissance, l'exécution et la coopération en matière de responsabilité parentale et de mesures de protection des enfants (n°s 299, 343, 2006-2007).
Discussion générale
Mme Rama Yade, secrétaire d'État chargée des affaires étrangères et des droits de l'homme. - Cette convention crée des règles pour promouvoir les droits des enfants et faciliter le règlement des situations transfrontalières qui les concernent. Dans ce texte, est un enfant celui qui n'a pas atteint l'âge de 18 ans. La convention de La Haye du 19 octobre 1996 a été élaborée sous les auspices de la Conférence de la Haye sur le droit international privé ; avec celle du 25 octobre 1980 sur les aspects civils de l'enlèvement international d'enfants, et celle du 29 mai 1993 sur la protection des enfants et la coopération en matière d'adoption internationale, elle constitue un triptyque destiné à protéger les enfants qui se trouvent dans des situations de conflit internationales.
Ce texte de droit international privé définit, par exemple, le tribunal internationalement compétent pour un droit de visite d'un père résidant en Italie sur un enfant qui réside chez ses grands-parents au Royaume-Uni, tandis que la mère vit en Irlande. Il répond également à la question de savoir quelle loi le juge saisi va appliquer, et, une fois sa décision rendue, dans quelle condition il va être possible de la faire exécuter dans un autre Etat que celui du juge qui a statué.
Ce qui gouverne la détermination des règles applicables, c'est la recherche, en toutes circonstances, de l'intérêt supérieur de l'enfant.
En conséquence, le juge compétent est celui du lieu de la résidence de l'enfant et la loi applicable sera, en principe, la loi du pays où il réside, sauf les hypothèses identifiées où l'application d'une autre loi serait plus conforme à son intérêt. La concordance des deux règles conduit à ce que le juge saisi appliquera la plupart du temps sa loi nationale.
Les règles d'exécution visent à favoriser la mise en oeuvre effective, dans un État partie, des décisions qui ont été rendues par l'autorité compétente d'un autre État partie. Cette disposition doit éviter d'imposer une autre procédure dans un autre État, pour la seule raison que la résidence d'un enfant à l'égard duquel une décision a été rendue a changé.
La convention comporte, enfin, des règles de coopération qui assureront entre les États parties la meilleure entraide possible pour faciliter la prise des mesures nécessaires à la préservation de l'intérêt de l'enfant et leur exécution.
Ces règles contribuent à la protection des enfants, vous y contribuerez vous-mêmes en autorisant la ratification de cette convention ! (Applaudissements)
M. Jean-Guy Branger, en remplacement de Mme Joëlle Garriaud-Maylam, rapporteur de la commission des affaires étrangères - La convention de La Haye du 19 octobre 1996 marque une avancée importante pour la protection des mineurs. Elle s'efforce de régler les douloureux conflits nés autour de la garde des enfants de couples binationaux divorcés ou séparés et de mettre un terme aux enlèvements transfrontaliers d'enfants.
Son articulation avec le droit communautaire, cependant, demeure difficile et sa ratification se trouve aujourd'hui bloquée.
En effet, le traité d'Amsterdam, entré en vigueur en 1999, a « communautarisé » la coopération judiciaire en matière civile : en d'autres termes, la Communauté européenne s'est vu reconnaître une compétence pour légiférer dans ces domaines.
Sur cette base, le Conseil a adopté, en mai 2000, un règlement communautaire, dit « Bruxelles II », remplacé au 1er mars 2005 par le règlement « Bruxelles II bis ». La Commission européenne considère que les États membres ne sont plus libres de ratifier eux-mêmes la Convention de La Haye, en application de l'arrêt « Accord Européen sur les transports routiers » de la Cour de Justice de Luxembourg, de 1971 : seule la Communauté est compétente pour signer ou ratifier des traités dans des domaines où elle dispose d'une compétence sur le plan interne et où elle a légiféré, ce qui est le cas pour certaines des matières couvertes par la Convention de La Haye.
Toutefois, étant donné que la convention contient aussi des dispositions qui n'affectent pas les compétences communautaires et que la Conférence de La Haye dispose expressément que seuls les États souverains peuvent être parties aux conventions conclues en son sein, il a été décidé de déroger exceptionnellement à ce principe.
Il a donc été admis que les États membres pourront exceptionnellement signer et ratifier cette convention dans l'intérêt de la Communauté, sous réserve de déposer simultanément les instruments de ratification ou d'adhésion auprès du dépositaire de la convention. La Commission européenne a présenté, en 2003, un projet de décision autorisant les États membres à ratifier la Convention de La Haye dans l'intérêt de la Communauté.
Toutefois, l'adoption de cette décision est bloquée, depuis plusieurs années, en raison d'un différend entre le Royaume-Uni et l'Espagne au sujet de l'application de la convention à Gibraltar.
D'un côté, la ratification et l'application de la convention de La Haye font partie des engagements communautaires de la France. De l'autre, le gouvernement ne pourra pas déposer les instruments de ratification auprès du dépositaire de la Convention, tant que n'aura pas été réglé le différend sur Gibraltar.
Il n'est guère acceptable qu'un instrument d'une telle importance pour la protection des mineurs reste bloqué depuis quatre ans pour une question sans rapport avec son objet. Madame la ministre, le gouvernement entend-il prendre des initiatives pour sortir de cette situation ?
Sous le bénéfice de cette observation, votre commission vous propose d'approuver ce projet de loi. (Applaudissements)
La discussion générale est close.
L'article unique du projet est adopté.