Convention européenne sur l'exercice des droits des enfants
M. le président. - L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi autorisant l'approbation de la convention européenne sur l'exercice des droits des enfants.
Discussion générale
Mme Rama Yade, secrétaire d'État chargée des affaires étrangères et des droits de l'homme. - Je sollicite votre autorisation pour ratifier la convention du 25 janvier 1996 qui renforce les droits procéduraux. La convention du Conseil de l'Europe sur l'exercice des droits des enfants du 25 janvier 1996 complète celle des Nations unies sur les droits de l'enfant de 1989 pour préciser certaines obligations juridiques à la charge des États. Il s'agit donc de renforcer, éventuellement de créer, des droits procéduraux que les enfants peuvent mettre en oeuvre, dans les procédures familiales.
Il incombe à chaque État de déclarer à quelles procédures ces droits vont s'appliquer. Pour ce qui nous concerne, notre déclaration vise cinq procédures, relatives aux modalités d'exercice de l'autorité parentale ; à la détermination de la résidence de l'enfant ; à l'organisation des rencontres des titulaires de l'autorité parentale avec l'enfant ; aux modalités du lien de l'enfant avec des tiers ; à l'assistance éducative pour les enfants en danger. Ces procédures relèvent soit de la compétence du juge aux affaires familiales, soit de celle du juge des enfants.
La convention reconnaît aux enfants le droit d'en être informés, d'exprimer leur opinion, et de demander la désignation d'un représentant spécial en cas de conflit d'intérêts avec les détenteurs des responsabilités parentales. Ils doivent aussi pouvoir bénéficier de l'aide judiciaire Il incombe au juge, correctement informé, de statuer rapidement, dans l'intérêt supérieur de l'enfant. Il devra aussi s'assurer que l'enfant, de son côté, a reçu des informations en rapport avec son discernement, et le consulter. Il pourra aussi, si nécessaire, intervenir d'office.
Il n'y a donc plus d'obstacle à la ratification par la France de cette convention, à laquelle participent déjà onze États du Conseil de l'Europe. Je vous remercie d'autoriser cette ratification. (Applaudissements à droite et au centre)
présidence de Mme Michèle André,vice-présidente
M. Didier Boulaud, rapporteur de la commission des affaires étrangères - La notion de droits de l'enfant est relativement récente. La plupart des sociétés antiques ne le considéraient pas comme une personne à spécialement protéger. Dans le droit romain, le père avait droit de vie et de mort sur son enfant. Le mot enfant vient d'ailleurs du latin infans, qui signifie : celui qui ne parle pas. C'est au milieu du XIXe siècle, essentiellement en France, qu'est née l'idée que les enfants doivent être spécialement protégés : « Enfants, vous êtes l'aube, et mon âme est la plaine qui des plus douces fleurs embaume son haleine quand vous la respirez... » écrivait Victor Hugo dans Les feuilles d'automne.
Dans la reconnaissance d'un statut juridique de l'enfant au niveau international, la Convention des Nations Unies sur les droits de l'enfant, adoptée en 1989, signée et ratifiée par l'ensemble des États, à l'exception notable des États-Unis et de la Somalie..., a marqué une étape importante car elle a consacré, en effet, une approche nouvelle de l'enfant, personne humaine bénéficiant de droits propres.
Peu après, l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe a invité le Comité des ministres à élaborer un instrument spécifique sur les droits de l'enfant. Au départ, cette idée a été accueillie avec un certain scepticisme : ce nouvel instrument ne risquerait-il pas de faire double emploi ? Afin d'éviter toute duplication, il a été décidé de consacrer une attention particulière à l'intérêt de l'enfant dans les procédures devant les tribunaux.
La principale nouveauté de la convention qui nous intéresse tient à la reconnaissance au profit de l'enfant du droit d'être informé et d'exprimer son opinion dans les procédures qui le concernent.
Comme vous l'avez souligné, Madame la ministre, cette ratification ne devrait entraîner aucune modification de notre droit. En effet, la loi du 5 mars 2007 réformant la protection de l'enfance a mis en complète conformité notre législation avec les stipulations de la convention par un amendement du groupe socialiste, adopté à l'unanimité, le Sénat a renforcé ce dispositif, en prévoyant que le juge doit s'assurer que le mineur a été informé de son droit à être entendu et à être assisté par un avocat. Du reste, le droit de l'enfant à être entendu n'emporte pas qu'il faille systématiquement l'auditionner s'il n'en manifeste pas la volonté : l'enfant a aussi le droit de rester silencieux, notamment en cas de conflit familial.
L'Union européenne s'est également préoccupée récemment de cette question. Les droits de l'enfant ont été reconnus dans la Charte des droits fondamentaux et la Commission a proposé, l'année dernière, une stratégie européenne sur les droits de l'enfant. Quelle est la position du gouvernement sur ce sujet et comptez-vous prendre d'autres initiatives dans ce domaine ?
Cette convention marquant une avancée en matière de droits des enfants, votre commission des affaires étrangères vous propose, à l'unanimité, d'adopter ce projet de loi. (Applaudissements à droite et au centre)
La discussion générale est close.
Mme Rama Yade, secrétaire d'État. - Certaines mesures listées dans le document européen manquent de clarté, en particulier en ce qui concerne le rôle des banques et des établissements de crédits dans les affaires de pédophilie sur internet. Nous ne sommes pas favorables au Forum européen sur les droits des enfants. En revanche, nous sommes favorables à la création de deux numéros de téléphone pour l'assistance aux enfants et les appels d'urgence. Secrétaire d'Etat aux droits de l'homme, j'attacherai une importance particulière aux droits des enfants dans le monde. (Applaudissements à droite)
L'article unique est adopté.