Mardi 18 mars 2025

- Présidence de M. Jean-François Longeot, président -

La réunion est ouverte à 13 h 30.

Proposition de loi visant à convertir des centrales à charbon vers des combustibles moins émetteurs en dioxyde de carbone pour permettre une transition écologique plus juste socialement - Examen du rapport pour avis

M. Jean-François Longeot, président. - Nous commençons notre programme de la semaine par l'examen de la proposition de loi visant à convertir des centrales à charbon vers des combustibles moins émetteurs en dioxyde de carbone pour permettre une transition écologique plus juste socialement.

Notre commission s'est saisie pour avis de ce texte visant à faciliter la conversion de la centrale thermique à charbon de Saint-Avold, en Moselle. Je tiens à saluer le travail de notre rapporteure pour avis, Christine Herzog, qui s'est pleinement investie sur ce sujet technique, dans un délai particulièrement contraint. Son engagement et sa collaboration étroite avec la commission des affaires économiques, saisie au fond, méritent d'être soulignés. Ils s'inscrivent dans l'esprit de collaboration fructueux qui prévaut entre nos deux commissions depuis plusieurs mois.

Notre commission suit la fermeture des centrales à charbon avec une attention constante depuis plusieurs années. En juillet 2019, nous avions déjà apporté notre expertise pour avis sur ce sujet à l'occasion de l'examen du projet de loi relatif à l'énergie et au climat, dit Énergie-climat, qui prévoyait l'extinction progressive des dernières centrales en activité. Puis, en juillet 2022, le contexte de crise énergétique a rendu nécessaire de remettre en activité les centrales à charbon pourtant fermées quelques mois auparavant, l'article 36 de la loi portant mesures d'urgence pour la protection du pouvoir d'achat (Muppa) sur lequel nous avions obtenu une délégation au fond, ayant défini le cadre pour ce faire.

Depuis cinq ans, notre position sur ce sujet est constante : la sortie du charbon est un impératif environnemental pour la France, à la fois pour réduire ses émissions de gaz à effet de serre, conformément aux engagements internationaux pris en 2019. Notre commission est très attachée à l'objectif qu'elle s'est fixé, mais elle est également pragmatique et attentive aux préoccupations des Français. Aussi, elle a toujours veillé à ce que les enjeux de sécurité d'approvisionnement énergétique, de viabilité économique et de justice sociale soient bien pris en considération.

Le projet de transition de la centrale Émile-Huchet de Saint-Avold, que cette proposition de loi a vocation à faciliter, répond précisément à ces impératifs. Il s'appuie sur une solution économiquement durable, qui permettra à la fois de réduire les émissions de gaz à effet de serre, de préserver des capacités de production d'électricité de pointe et de garantir l'ensemble des emplois de la centrale.

Le Gouvernement partage ces préoccupations : il a d'ailleurs engagé la procédure accélérée sur ce texte transpartisan déposé par les cinq sénateurs de Moselle, signe de la priorité qu'il y attache, ce dont je me félicite.

Mme Christine Herzog, rapporteure pour avis. - Le rapport pour avis que je vous présente ce matin est crucial pour la Moselle et me tient particulièrement à coeur. En effet, cette proposition de loi visant à convertir des centrales à charbon vers des combustibles moins émetteurs en dioxyde de carbone pour permettre une transition écologique plus juste socialement porte sur la conversion de la centrale thermique à charbon de Saint-Avold. J'ai pris l'initiative de la présenter avec mes collègues sénateurs de Moselle pour défendre la vitalité économique de notre département.

Avant d'aborder l'objet même de ce texte de circonstance, il me semble indispensable d'évoquer les plus de cent salariés de cette centrale. Depuis l'annonce, en 2019, de la fermeture progressive des centrales à charbon, ces travailleurs vivent dans une incertitude permanente. Ils ont tout connu : une fermeture en février 2022, une réouverture quelques mois plus tard, l'échec d'un projet de conversion à la biomasse et, enfin, un projet de conversion au gaz et au biogaz qui est aujourd'hui porteur de nombreuses espérances. La situation d'inertie actuelle est inacceptable. Il est donc de notre responsabilité d'envoyer un signal clair à ces salariés, trop souvent soumis aux aléas des décisions politiques.

La fermeture des centrales thermiques à charbon est une nécessité. Actuellement, 95 % de la production d'électricité en France est bas-carbone grâce à notre parc nucléaire et au développement des énergies renouvelables. Le charbon ne représente plus qu'une part infime de notre mix électrique : seules deux centrales restent en activité, à Cordemais, en Loire-Atlantique, et à Saint-Avold, en Moselle ; elles ne contribuent à la production nationale qu'à hauteur de 0,1 %.

Nous devons arrêter de produire de l'électricité à partir du charbon pour deux raisons majeures : limiter nos émissions de gaz à effet de serre - il s'agit du mode de production d'électricité le plus polluant - et nous montrer exemplaires à l'échelle internationale. En effet, dans le cadre de la COP26 de Glasgow, qui a eu lieu en 2021, la France s'est engagée à sortir du charbon d'ici à 2030, dans la continuité de l'engagement majeur que nous avions pris en 2015 en signant l'accord de Paris, à l'issue de la COP21.

Dès 2019, notre commission avait mis en garde sur les défis de la transition énergétique. Dans son avis sur le projet de loi Énergie-climat, notre collègue Pascale Bories avait soulevé plusieurs points cruciaux à prendre en compte dans l'élaboration des plans de fermeture : la sécurité d'approvisionnement électrique en hiver, l'accompagnement des salariés et la faisabilité d'une conversion à la biomasse.

Force est de constater que ses mises en garde n'ont pas été entendues : en 2022, dans un contexte de crise énergétique liée aux incertitudes consécutives à la guerre en Ukraine, la centrale de Saint-Avold a dû rouvrir en urgence, quelques mois seulement après sa fermeture. Puis, en septembre 2023, le Président de la République a annoncé la conversion des deux dernières centrales à charbon en centrales à biomasse d'ici à 2027. Il s'agit d'une solution peu opérationnelle d'un point de vue financier, puisque dans le cas de la centrale de Saint-Avold, il aurait été moins coûteux de construire une nouvelle centrale que d'opérer une telle conversion...

Face à cette impasse, l'exploitant de cette centrale a proposé une conversion au gaz naturel et au biogaz, à laquelle le ministre de l'Économie Éric Lombard s'est déclaré favorable le 12 février dernier. Nous en convenons, le gaz naturel reste une énergie fossile et le recours à ce type d'énergie ne saurait être considéré comme une solution optimale. Toutefois, une telle conversion constitue un pas en avant.

Tout d'abord, le gaz naturel émet près de trois fois moins de gaz à effet de serre que le charbon. Ensuite, la centrale n'a pas vocation à fonctionner en continu : elle ne le fera qu'en période de pointe, afin de garantir la stabilité du réseau électrique. Enfin, nous devons toujours concilier impératif climatique et justice sociale pour assurer l'acceptabilité des mesures que nous proposons. À cet égard, ce projet est une solution de compromis, car il préserve l'emploi, tout en réduisant l'empreinte carbone de la production électrique. Il mérite donc notre soutien.

C'est dans cette logique que j'ai déposé cette proposition de loi transpartisane avec mes collègues sénateurs de Moselle, Khalifé Khalifé, Jean-Marie Mizzon, Catherine Belrhiti et Michaël Weber. Il y a quelques mois, après avoir été alertée par l'exploitant sur l'urgence de cette reconversion, j'avais interpellé le Gouvernement, qui m'avait encouragée à légiférer sur le sujet. Le choix d'un dépôt collectif, à plusieurs auteurs qui apparaissent dans l'ordre décroissant des âges respectifs traduit un fort engagement commun.

Ce texte, composé de deux articles, vise à garantir la viabilité économique de la centrale à combustion fossile convertie en lui donnant accès au mécanisme de capacité. Ce dispositif, récemment réformé par la loi de finances pour 2025, soutient les moyens de production de pointe, lesquels sont essentiels en période de forte demande hivernale.

L'article 1er établit que les centrales à charbon qui se convertissent dans le but de réduire les émissions de dioxyde de carbone sont considérées comme de nouvelles installations. Ce critère de nouveauté est une condition indispensable pour les rattacher au mécanisme de capacité. Ce faisant, elles pourront bénéficier de contrats pour différence, qui garantissent une rémunération stable et sécurisent les investissements.

L'article 2 prévoit que ces installations seront automatiquement autorisées à produire de l'électricité dès lors qu'elles auront été intégrées au mécanisme de capacité, ce qui évitera une procédure administrative lourde, susceptible de retarder leur mise en service.

Avant de conclure, je tiens à saluer la qualité de la collaboration avec mon collègue rapporteur de la commission des affaires économiques, Patrick Chauvet. Les auditions conjointes que nous avons conduites dans des délais très courts nous ont permis d'entendre les principaux acteurs concernés par ce dossier crucial pour la Moselle et pour notre mix énergétique.

Je vous invite donc à émettre un avis favorable à l'adoption de cette proposition de loi et je forme le voeu que le Parlement l'adopte rapidement afin de répondre aux attentes légitimes des salariés de Saint-Avold et de contribuer efficacement à notre transition énergétique.

M. Ronan Dantec. - Nous comprenons la mobilisation des salariés et des syndicats de Saint-Avold. J'ai moi-même suivi avec une grande attention une situation très similaire à Cordemais.

Toutefois, la proposition de conversion est en contradiction avec le contexte de la production électrique française. En effet, revenir à une production de gaz à l'heure actuelle n'a aucun sens. Nous sommes dans une situation de surproduction électrique : la production nucléaire a repris plus rapidement que prévu et le photovoltaïque et l'éolien se développent très rapidement, car ils sont les moyens de production d'électricité les moins chers. Alors que l'État appelle à ralentir sur le photovoltaïque - ce que je n'approuve pas -, il n'est pas souhaitable, d'un point de vue climatique, de mettre en activité une nouvelle centrale à gaz.

C'est tout le sens de l'amendement que nous avons déposé au sujet de la centrale de Cordemais, dont la philosophie est de faire évoluer ces sites vers le stockage d'électricité, sur lequel il convient d'investir. Le gaz ne doit plus servir qu'à se chauffer, et non à produire de l'électricité. L'ouverture d'une nouvelle centrale à gaz pourrait assécher nos capacités en biogaz et nous conduire à importer du gaz de schiste canadien ou du gaz russe. Cela n'a pas de sens !

Tout en soutenant la mobilisation des salariés et une partie de leurs propositions pour l'avenir du site, il nous faut tenir un langage de vérité et reconnaître que nous n'avons pas besoin d'une centrale à gaz supplémentaire dans notre pays.

Mme Christine Herzog, rapporteure pour avis. - Il ne s'agit pas de faire un pas en arrière. Je rappelle que les salariés de Saint-Avold ont répondu présents lorsqu'ils ont été rappelés pour rouvrir l'usine, car nous manquions d'électricité. Afin de garantir la sécurité d'approvisionnement énergétique, les capacités de production d'électricité de pointe restent nécessaires.

Je vous rappelle également, mon cher collègue, qu'il y a des emplois à la clé.

M. Ronan Dantec. - C'est le cas dans tous les domaines !

M. Jean-François Longeot, président. - C'est bien le problème !

Je comprends votre réaction et vos arguments, M. Dantec, mais il s'agit avant tout d'un choix politique, partagé par l'ensemble des sénateurs du département, et non d'un enjeu d'efficacité énergétique.

M. Ronan Dantec. - En réalité, nous votons des emplois subventionnés...

Mme Christine Herzog, rapporteure pour avis. - Nous cherchons effectivement à préserver l'emploi.

M. Jean-François Longeot, président. - Le caractère transpartisan de cette proposition de loi prouve sa justesse d'un point de vue tant climatique que social.

M. Patrick Chauvet, rapporteur de la commission des affaires économiques. - Cette proposition de loi pragmatique revient sur la suppression des centrales à charbon à l'horizon 2022 prévue en 2019. Deux d'entre elles ont été fermées - celle du Havre et celle de Gardanne - et il en reste deux autres, dont nous avons besoin pour écrêter les pics de production. J'ai eu l'occasion d'entendre les représentants de Réseau de transport d'électricité (RTE) au cours d'une audition, qui en conviennent tous. Il faut relativiser !

La dynamique est la même pour nos centrales à fioul : nous en avions treize, il n'en reste plus que deux. Celles-ci ne tournent que durant un faible nombre d'heures dans l'année, mais nous en avons besoin pour suppléer le réseau lors des pics de consommation.

Par ailleurs, cette proposition de loi ne porte pas seulement sur la centrale de Saint-Avold. À titre personnel, je la vois comme la solution sociale et humaine à un plan social ; ce n'est pas rien ! Il est important de donner des perspectives aux salariés de cette centrale.

Ce texte sera soumis à l'autorisation de l'Europe a posteriori, car il peut être considéré comme une subvention de la France à sa politique énergétique. Il restera donc du chemin à parcourir après l'adoption de la proposition de loi.

En tant que rapporteur de la commission des affaires économiques, j'y suis tout à fait favorable et je défendrai des amendements pour en renforcer la rédaction. Je précise par ailleurs que, dans leur grande majorité, les personnes que nous avons reçues en audition y sont elles aussi favorables.

M. Hervé Gillé. - Pour ma part, j'ai un avis différent de celui de Ronan Dantec.

Tout d'abord, la plupart des projets de reconversion des centrales à combustion fossile ont été abandonnés. Le périmètre a donc été considérablement réduit par rapport à l'objectif initial.

Ensuite, il s'agira bien d'une centrale de relève, qui aura vocation à produire de l'énergie lors de pics de consommation, dont 60 % à base de biométhane. Certes, il serait préférable de pousser cet objectif à 70 %, voire à 80 % à moyen et long terme, mais j'estime que cette production d'appoint est nécessaire.

En revanche, je suis d'accord avec Ronan Dantec sur le fait qu'il nous faut développer nos capacités de stockage. La surproduction actuelle entraîne une facture négative et donc coûteuse pour l'État, car nous ne parvenons pas à améliorer nos capacités de recharge et de production d'hydrogène.

Cela étant dit, la proposition de loi me semble pertinente et le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain la soutiendra.

M. Jean-François Longeot, président. - Mes chers collègues, je félicite Christine Herzog pour son travail et je vous propose de suivre son avis sur la proposition de loi en émettant un avis favorable.

La commission émet un avis favorable à la proposition de loi.

La réunion est close à 13 h 55.

Mercredi 19 mars 2025

- Présidence de M. Jean-François Longeot, président -

La réunion est ouverte à 9 h 30.

Proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, visant à réduire l'impact environnemental de l'industrie textile - Examen du rapport et élaboration du texte de la commission

M. Jean-François Longeot, président. - Mes chers collègues, l'examen de la proposition de loi visant à réduire l'impact environnemental de l'industrie textile constitue le point central de notre réunion plénière de ce jour.

Je suis très heureux d'avoir décidé d'inscrire ce sujet à notre ordre du jour, alors même que l'examen de ce texte n'est pas encore programmé en séance publique. J'ai souhaité, en effet, marquer notre soutien à cette initiative parlementaire, qui suscite de fortes attentes dans l'industrie textile. Déposée par la députée Anne-Cécile Violland, la proposition de loi vise à lutter contre le développement débridé de la mode éphémère, appelée par le grand public, en bon franglais, « fast fashion », qui nuit à la fois à l'environnement et à notre filière textile française.

J'ai pu personnellement constater, jeudi dernier, les effets néfastes de cette évolution, à l'occasion d'un déplacement avec notre rapporteure Sylvie Valente Le Hir : nous nous sommes rendus dans un atelier de réparation ainsi que dans les locaux d'une entreprise de seconde main. Les échanges avec des acteurs engagés et responsables ont été très instructifs pour mesurer les enjeux soulevés par l'ampleur de la mode textile jetable.

L'inscription à l'ordre du jour du Sénat de ce texte relève du parcours du combattant, et c'est peu que de le dire ! Après son adoption à l'Assemblée nationale le 14 mars 2024, il y a maintenant un an, le Gouvernement a engagé la procédure accélérée, ce qui pouvait laisser préjuger d'un examen rapide. Comme vous vous en souvenez, la dissolution de l'Assemblée nationale est intervenue entretemps : l'examen en séance publique, pourtant annoncé, a alors été repoussé. En octobre 2024, j'ai, en ma qualité de président de commission, adressé un courrier au Président Larcher demandant l'inscription de ce texte. En parallèle, je n'ai cessé, tout comme la rapporteure dont l'engagement a été sans faille, d'interpeller les gouvernements successifs sur la nécessité de lutter contre la mode éphémère, afin d'obtenir son inscription à l'ordre du jour.

Nos efforts ont, dans un premier temps, payé : on nous a annoncé une inscription à l'ordre du jour pour le 26 mars 2025. Toutefois, la veille de la Conférence des présidents, le texte n'était finalement plus annoncé pour être inscrit à l'ordre du jour, sans que les tentatives d'explications du Gouvernement parviennent à nous convaincre du bien-fondé de ce report... J'ai décidé, en parfait accord avec la rapporteure, de maintenir tout de même la date de l'examen en commission pour envoyer un signal politique clair : s'il y a un blocage, il ne vient pas du Sénat, et encore moins de notre commission !

Cette décision pourrait avoir contribué à convaincre le Gouvernement d'inscrire le texte à l'ordre du jour.

Je conclurai mon propos en vous remerciant très chaleureusement, et tout particulièrement les chefs de file membres du bureau, d'avoir appuyé mes efforts en soutien de ce texte, notamment en intervenant en ce sens auprès du Gouvernement pas plus tard que la semaine dernière. Nos efforts conjugués, au-delà même des appartenances politiques, ont permis une fois encore de démontrer que la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable sait unir ses forces lorsqu'il s'agit de soutenir une proposition de loi à la fois environnementalement vertueuse et économiquement juste.

Je cède sans plus tarder la parole à Sylvie Valente Le Hir, qui va nous présenter les grandes lignes de son rapport.

Mme Sylvie Valente Le Hir, rapporteure. - Monsieur le président, mes chers collègues, le secteur du textile est aujourd'hui à la croisée des chemins. Une double transformation est à l'oeuvre, permise par le développement de nouvelles technologies et l'évolution des modes de consommation.

La première transformation, c'est l'émergence d'entreprises innovantes qui assurent la transition écologique du secteur, en s'appuyant à la fois sur les opportunités du numérique et sur le réseau dense du textile français. J'ai ainsi eu l'occasion, jeudi dernier, de visiter une entreprise de réparation représentative de ce verdissement : l'entreprise assure l'intermédiation grâce à une application mobile entre les cordonniers et les couturiers présents sur l'ensemble du territoire et les consommateurs qui, de plus en plus, souhaitent réparer leurs vêtements plutôt que les jeter.

La seconde transformation, c'est l'apparition des entreprises de la mode éphémère, autrement dénommée « fast fashion ». Ces entreprises, dont les plus emblématiques sont Shein et Temu, s'appuient aussi sur les outils numériques pour trouver leur public. En proposant une collection à l'étendue infinie - le nombre de références annuelles proposé sur Shein se compte en millions - à prix minime et à fréquence de renouvellement rapide, ces entreprises incitent à la surconsommation, donc à l'explosion des déchets textiles.

Entre ces deux transformations, le choix est simple : nous devons lutter contre la mode éphémère et favoriser la transition écologique de l'industrie textile.

Les dégâts de ce système de surproduction délétère sont déjà bien visibles. En France, chaque année, 3,3 milliards de nouveaux vêtements sont mis sur le marché, soit plus de 48 vêtements par habitant. Cette surproduction a des conséquences à la fois sur les émissions de gaz à effet de serre - encore plus lorsque le vêtement est produit à l'autre bout du monde -, mais aussi sur la ressource en eau, lorsque l'on sait qu'il faut plusieurs milliers de litres d'eau pour produire un jean, par exemple. Surtout, ces vêtements se transforment bien trop rapidement en déchets : 600 000 tonnes de textiles sont ainsi jetées chaque année en France, soit 35 vêtements par seconde ! Ils finissent alors, en grande majorité, incinérés ou exportés dans des pays d'Afrique ou d'Amérique latine, déjà submergés, où ils s'accumulent dans des décharges à ciel ouvert polluant l'air, l'eau et les sols.

L'aspect environnemental n'est bien sûr qu'une partie du problème. La mode éphémère crée également une concurrence déloyale pour nos entreprises européennes. Bien sûr, les enseignes européennes ne sont pas toutes irréprochables environnementalement. J'ai toutefois pu constater, au cours de mes auditions, qu'elles font toutes des efforts pour diminuer leur impact environnemental. Surtout, ces entreprises, à la différence de la mode éphémère, créent, par leur réseau de magasins, des emplois non délocalisables et contribuent, par leur maillage territorial, à assurer un développement économique équilibré sur l'ensemble du territoire.

La mode éphémère met également en danger le secteur de la mode circulaire, qui regroupe la réparation, le recyclage ou encore la vente de vêtements de seconde main. Tout d'abord, la réutilisation ou le recyclage de ces vêtements, produits avec des matières premières de mauvaise qualité, est bien souvent impossible. Par ailleurs, les faibles prix de vente de ces vêtements remettent en cause la pérennité du marché de seconde main : si vous pouvez acheter sur une plateforme un vêtement neuf pour quelques euros, il est plus difficile de vendre un vêtement de seconde main qui sera au même prix, voire plus cher. Je suis particulièrement attachée à la préservation de l'équilibre économique de la mode circulaire, filière qui permet bien souvent l'insertion de personnes éloignées de l'emploi, tout en étant bénéfique pour l'environnement.

La liste des effets délétères de la mode éphémère est encore longue. Nous pourrions évoquer les conditions de travail indignes des employés de ces enseignes, qui pourraient faire l'objet d'un autre travail sénatorial, ou encore l'impact sanitaire de ces produits à bas coûts, qui contiennent parfois des substances nocives pour la santé à des niveaux dépassant les seuils autorisés.

Vous l'aurez compris, il est urgent d'agir ! Cette proposition de loi le permet, qui définit la mode éphémère et fixe des obligations à ces acteurs. Elle s'inscrit dans la continuité des travaux de notre commission, qui a contribué à définir le cadre de la responsabilité élargie du producteur et, plus largement, de l'économie circulaire lors de l'examen, en septembre 2019, du projet de loi relatif à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire (Agec), puis, en juin 2021, du projet de loi Climat et résilience.

Un certain nombre de contre-vérités circulent sur ce texte - vous les avez sûrement lues ou entendues. Des moyens importants semblent avoir été mobilisés pour assurer leur diffusion.

La première serait que la proposition de loi s'oppose aux classes populaires. Défendre l'idée que la mode éphémère bénéficie aux classes populaires a autant de sens que défendre la restauration rapide au nom de l'alimentation pour tous ! Il n'est dans l'intérêt de personne d'acheter des produits de mode éphémère. Certes, le coût initial est moindre, mais pour un produit sûrement nocif pour la santé, qui survivra à deux ou trois utilisations ! Et vous n'en achèterez pas qu'un, la publicité agressive de ces plateformes incitant à acheter en masse... Ne créons pas ici une fausse opposition entre environnement et justice sociale : la mode éphémère n'est bénéfique pour personne. Mieux vaut acheter plus cher, mais moins.

Vous aurez également peut-être entendu parler d'une faiblesse des invendus de la plateforme Shein, qui limiterait les déchets produits. Cette faiblesse apparente n'est due qu'à la multiplication des références proposées, produites en petite quantité. Et, qu'ils soient vendus ou invendus, ces produits finissent, dans tous les cas, par constituer des déchets.

Enfin, troisième argument, les plateformes de la mode éphémère seraient en train de faire leur mue, pour assurer la transition de leur modèle. J'ai mené l'enquête auprès de plusieurs acteurs de la mode circulaire. Tous restent, à ce stade, pour le moins dubitatifs. Le modèle économique de ces plateformes reposant sur la surproduction est, en effet, intrinsèquement incompatible avec la transition écologique.

La proposition de loi se compose de neuf articles, qui visent donc à encadrer la mode éphémère. Je vous proposerai de sécuriser l'application de ces dispositions et, surtout, d'éviter que des entreprises françaises ou européennes qui ne constituent pas des entreprises de la mode éphémère soient incluses dans le dispositif.

Je commencerai par évoquer les trois mesures principales du texte.

La mode éphémère est définie, à l'article 1er, en fonction de seuils de nouvelles références, qui seront fixés par décret. Cet article impose, pour ces produits, l'affichage d'un message de sensibilisation sur la plateforme de vente, indiquant l'impact environnemental de la mode éphémère. Je vous proposerai d'affiner les critères de définition de la mode éphémère, en incluant également l'incitation à réparer ces produits et en précisant les règles spécifiques aux places de marché.

L'article 2 prévoit, à titre principal, une modulation des écocontributions. Ces contributions, qui visent à financer le traitement des déchets, sont versées dans le cadre de la responsabilité élargie des producteurs à l'éco-organisme. Ces derniers disposent de la faculté, étendue par la loi Agec de 2020, de créer des primes ou des pénalités en fonction de critères tels que l'incorporation de matières recyclées.

Je vous proposerai deux évolutions à cet article. D'une part, le texte adopté par l'Assemblée nationale propose de moduler l'écocontribution en fonction du résultat de l'affichage environnemental. Cet affichage, créé par la loi Climat et résilience de 2021, renseigne sur l'impact environnemental du produit sous la forme d'un « écoscore ». Toutefois, cet outil n'est pas encore abouti, le décret et l'arrêté de création étant en cours de notification auprès de la commission européenne. De plus, les conséquences de cet affichage sont encore difficiles à identifier. Moduler les écocontributions à partir de cet instrument pourrait nuire à des enseignes qui ne pratiquent pas le commerce de mode éphémère, ce qui n'est pas l'objet du texte. Je vous proposerai donc plutôt de les moduler en fonction de la durabilité des produits dite « extrinsèque », c'est-à-dire de la durabilité liée aux pratiques commerciales adoptées, et non pas à la qualité du produit en tant que telle.

D'autre part, le texte transmis à l'Assemblée nationale proposait de flécher les contributions ainsi prélevées vers le financement d'infrastructures de collecte et de recyclage dans des pays non membres de l'Union européenne. Favoriser le développement du recyclage des textiles en France est toutefois un objectif à privilégier, d'un point de vue environnemental, pour réduire l'impact carbone de nos déchets, et d'un point de vue économique, pour relocaliser une partie de la chaîne de valeur de la filière textile. Il est ainsi primordial que les déchets collectés sur notre territoire puissent être traités en France en renforçant nos capacités de recyclage pour absorber le gisement actuellement exporté. C'est pourquoi je vous proposerai de flécher les contributions plutôt vers les installations de recyclage du territoire national.

Enfin, l'article 3 pose une interdiction totale de la publicité pour les produits de la mode éphémère. Malheureusement, les travaux préparatoires m'ont permis de constater le risque d'inconstitutionnalité et d'inconventionnalité de cette disposition, qui pourrait être considérée comme une atteinte disproportionnée à la liberté d'entreprendre. Je souhaite assurer la solidité juridique de ce texte, raison pour laquelle je vous proposerai, en lieu et place de l'interdiction généralisée, un double encadrement de la publicité de la mode éphémère : je vous propose, d'une part, d'interdire la promotion des produits de la mode éphémère par les influenceurs, qui constituent aujourd'hui l'un des principaux relais de ces marques ; d'autre part, d'imposer une information synthétique sur l'impact environnemental des biens et services, considérés sur l'ensemble de leur cycle de vie, dans les publicités sur les produits de la mode éphémère, afin d'assurer que le consommateur soit bien conscient de l'impact de ces produits.

Les autres articles, ajoutés au stade de l'examen du texte par l'Assemblée nationale, fixent les conditions de mise en oeuvre de ce nouvel encadrement.

L'article 1er bis ajoute la durabilité aux critères de l'affichage environnemental. Je vous proposerai de supprimer cet ajout, superfétatoire, puisque les critères pris en compte pour cet affichage intègrent déjà implicitement la durabilité.

Les articles 1er bis A, 4 et 5 visent quant à eux à permettre aux administrations d'échanger des informations, d'effectuer des contrôles et d'imposer des sanctions pour assurer le bon respect des nouvelles obligations créées.

Enfin, les articles 6 et 7 constituent des demandes de rapport, relatives respectivement à l'extension du mécanisme d'ajustement carbone aux frontières aux produits textiles et à l'évolution des règles européennes de lutte contre la mode éphémère.

Bien sûr, la présente proposition de loi ne résoudra pas à elle seule les difficultés posées par la mode éphémère. D'un côté, une évolution des règles européennes est plus que jamais nécessaire. Je salue, à cet égard, la proposition de la Commission européenne d'accélérer la réforme de l'Union douanière, qui vise à supprimer l'exemption de droits de douane pour les colis de moins de 150 euros, en anticipant à 2026 au lieu de 2028 son entrée en vigueur . De l'autre, je suis bien consciente que les dispositions que nous proposons feront immédiatement l'objet de contestations par les acteurs concernés, qui disposent de moyens juridiques considérables.

Je forme toutefois le voeu que ce texte facilite une prise de conscience chez nos concitoyens, puisque le meilleur moyen de lutte contre la mode éphémère restera toujours la consommation responsable.

Je remercie notre président de commission, Jean-François Longeot, qui a courageusement tenu face à l'adversité et m'a suivie dans mes pérégrinations ministérielles - elles n'ont pas manqué !

Je vous remercie également tous, qui m'avez largement soutenue au sein de la commission.

Je remercie le whip du groupe LR, Didier Mandelli, et son prédécesseur, Philippe Tabarot, désormais ministre chargé des transports, qui m'a fait confiance en me confiant les travaux préparatoires de ce texte et continue de m'apporter son écoute, son soutien et son aide.

Je me souviendrai de ce premier rapport !

M. Jean-François Longeot, président. - Ce fut effectivement un parcours du combattant !

M. Jacques Fernique. - Merci à Mme la rapporteure pour sa ténacité à faire prospérer ce texte, dans des conditions compliquées - ce n'est pas fini -, et pour sa détermination à ne pas se laisser impressionner par les fortes pressions qu'il suscite.

Si nous voulons rendre effectif le principe de responsabilité des producteurs, qui exige que soient assumés par les producteurs, les distributeurs et les importateurs de produits la collecte, le tri, le réemploi et le recyclage des déchets issus de leurs produits, nous ne pouvons pas, nous, parlementaires, rester l'arme au pied face à cette déferlante de la fast fashion. Par la voix de leurs lobbyistes redoutablement efficaces et, parfois, renommés, leurs marques et leurs entreprises se vantent de faire le bonheur des consommateurs populaires et arguent de leurs bonnes intentions pour progresser.

L'impact de la fast fashion est désastreux : pratiques de production générant 10 % des gaz à effet de serre - taux qui pourrait atteindre 26 % en 2050 si rien n'est fait -, contribution à hauteur de 20 % à la pollution des eaux, responsabilité de plus du tiers des microplastiques émis dans les océans, modes de production à des milliers de kilomètres entravant l'impératif de vigilance, particulièrement pour ce qui concerne les droits sociaux, et, chez nous, destructions d'emplois et disparitions de nombre de boutiques dans nos villes. Certes, les prix sont plus bas, mais les articles sont très vite jetés, créant un engorgement par des montagnes de déchets et des dégâts largement payés par nos collectivités chargées du service public de gestion des déchets.

Le groupe Écologiste - Solidarité et Territoires se réjouit donc que cette proposition de loi soit examinée par notre commission, quasiment un an jour pour jour après son adoption à l'unanimité par l'Assemblée nationale. Je remercie notre président et notre rapporteure de leur engagement à voir ce texte aboutir.

Si j'ai bien compris, nous nous orientons vers un examen en séance publique en mai. Nous pouvons donc parvenir à une application dès cet été ! À cet égard, le rapport de ce matin est une étape particulièrement positive.

Les enjeux de ce texte ont été bien mûris depuis son examen par l'Assemblée nationale. On cerne bien les améliorations que nous pouvons lui apporter. Il s'agit tout d'abord de bien définir cette fast fashion sur laquelle le texte agit. Je pense qu'il ne faut pas pour cela laisser trop la main à un décret : le Parlement doit faire son travail en fixant la ligne en termes de seuil et de critères.

Prenons aussi garde à ne pas permettre à des plateformes multimarques comme Shein ou Temu de passer au travers des mailles du filet.

Il faut également veiller à la clarté de ce qui est indiqué sur les produits, pour que les consommateurs puissent agir en connaissance de cause.

Il convient, et c'est le coeur du dispositif, d'actionner efficacement le levier des écocontributions, le régime de primes et de pénalités, de leur modulation en fonction du caractère durable ou non des produits et de leur aptitude ou non à s'intégrer dans l'économie circulaire, qui est l'horizon que nous voulons. Ce moyen nous permettra à la fois de rétablir un peu la compétitivité de nos productions de qualité et de financer la gestion des déchets générés, évitant que l'on fasse payer lourdement les collectivités et les contribuables.

L'Assemblée nationale voulait interdire la publicité pour les produits textiles de la fast fashion, manifestement nocifs pour l'environnement, comme pour le tabagisme ou pour les énergies fossiles. Il y a effectivement là quelque chose qui ressemble à un motif d'intérêt général. Cela peut-il être inscrit dans la loi sans compromettre sa constitutionnalité ? L'Assemblée nationale estime que oui, mais pas notre rapporteure. Je pense que nous pouvons prendre le risque de voir retoquer cet article.

Bien évidemment, mon groupe votera en faveur de ce texte.

M. Stéphane Demilly. - Merci à notre rapporteure pour son intervention. Elle met le doigt sur un sujet important, et je voudrais la remercier pour la clarté de son exposé.

Cette proposition de loi vise légitimement à réduire l'impact environnemental de l'industrie textile, notamment de l'industrie de la fast fashion.

En l'espace de deux décennies, le prix moyen des vêtements a diminué de 30 %, ce qui est assez exceptionnel. En parallèle, les quantités achetées ont doublé : 3,3 milliards de vêtements sont mis sur le marché en France chaque année, c'est-à-dire 1 milliard de plus qu'il y a dix ans.

Ce phénomène conduit les vêtements à être moins portés et à être plus rapidement jetés. Cette surconsommation est bien sûr liée à la montée en puissance de nombreuses marques et enseignes dites de fast fashion, voire d'ultra fast fashion.

Ces marques écrasent la concurrence, notamment le textile français et européen, avec des prix très bas qui ne sont rendus possibles qu'au détriment du respect d'exigences sociales, sanitaires et environnementales élémentaires. Mme la rapporteure a raison d'insister sur la surconsommation d'eau nécessitée par la production de ces vêtements et sur les drames liés à leur mise en décharge.

Si l'effondrement du Rana Plaza au Bangladesh a provoqué, en 2013, une vaste onde de choc dans le monde entier, en particulier en France, force est de constater que la production textile continue d'être largement localisée dans des pays ne respectant aucune norme en termes de salaires, de conditions de travail ou d'utilisation de produits chimiques. Bien entendu, aucune industrie ne peut résister à une telle concurrence déloyale.

Au-delà des solutions qui ont été évoquées, je pense à la responsabilisation des consommateurs.

Que pensez-vous de l'application de quotas pour réduire les importations de fast fashion ? Serait-elle compatible avec les règles de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) ?

Mme Nicole Bonnefoy. - Nous attendions nous aussi avec impatience l'inscription de ce texte à l'ordre du jour de notre commission. Je remercie à mon tour le président et les groupes politiques, qui sont intervenus pour que cette inscription soit enfin possible. Nous espérons que l'examen en séance publique au mois de mai sera bientôt confirmé.

L'adoption de .cette proposition de loi à l'Assemblée nationale a suscité de grands espoirs pour la régulation de la mode jetable.

Nous sommes face à un véritable fléau environnemental. Plus de 100 milliards de vêtements neufs sont désormais vendus chaque année dans le monde. L'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe) estime que ce chiffre a doublé entre 2000 et 2014. L'entreprise chinoise Shein est en capacité de mettre en fabrication plus de 7 200 modèles de nouveaux vêtements par jour, ce qui est absolument considérable.

Les conséquences sur l'environnement sont bien évidemment innombrables ; vous avez notamment cité la pollution des eaux. Il faut bien évidemment y ajouter les conséquences sociales et économiques, qui sont elles aussi tout à fait considérables.

Par ailleurs, la composition de ces produits textiles est aussi un problème de taille, puisque la surutilisation des microfibres plastiques est un drame pour nos océans, nos sols, nos airs. Sur ce sujet, on ne compte plus les rapports d'inspection. Le dernier, qui date du mois de mars, appelle à mettre en oeuvre une réponse globale et franche.

Vous l'avez rappelé, madame la rapporteure - je salue vos travaux -, ce texte est un premier pas. La proposition de loi est composée de neuf articles, principalement pour définir la notion de fast fashion dans la loi, renforcer les dispositifs d'encouragement des bonnes pratiques et de sanction des mauvaises pratiques des metteurs sur le marché, au travers des écomodulations, ou encore interdire toute forme de publicité pour ce type de produits. Nous avons une divergence sur ce dernier sujet ; nous en reparlerons.

Bien évidemment, le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain croit qu'il est important de conserver les équilibres du texte qui ont été trouvés à l'Assemblée nationale. Nous avons proposé quelques amendements d'amélioration, qui ne viennent pas remettre en cause les avancées du texte, notamment sur l'interdiction de la publicité.

Je regrette cependant que quelques amendements que nous avions déposés aient fait les frais de l'article 45 de la Constitution. Ces amendements étaient issus de travaux que nous avions réalisés en commission, à l'occasion de notre rapport sur le transport de marchandises face aux impératifs environnementaux, dont un volet concernait plus particulièrement le e-commerce. Rémy Pointereau et moi-même, qui en étions les rapporteurs, avions fait un certain nombre de recommandations - je pense, par exemple, à l'interdiction de la mention de la livraison gratuite, qui est un véritable fléau, puisque la livraison n'est jamais gratuite et a forcément un impact sur l'environnement. La proposition de loi nous offrait l'occasion de mettre en avant les travaux de notre commission et d'être encore plus volontaristes, raison pour laquelle je regrette que ces amendements aient été déclarés irrecevables.

Mme Marta de Cidrac. - Je veux, pour commencer, saluer le travail et la persévérance de notre rapporteure.

Elle nous a fait part des difficultés d'agenda sur ce texte essentiel pour l'économie circulaire. Je me réjouis donc que nous puissions enfin l'examiner.

Je souhaite également la féliciter d'avoir abordé ce sujet important. En réalité, au-delà du secteur purement textile, il convient de s'attaquer à la profusion de tous les produits consommables qui, un jour, deviennent des déchets. Bien évidemment, le commerce doit continuer à exister, mais il faut un minimum de régulation et d'équilibre pour que notre environnement n'en pâtisse pas.

Je veux revenir sur quelques mesures du texte qui vont véritablement dans le bon sens.

La prévention est très importante en matière de produits consommables, notamment de textile.

Je remercie notre rapporteure de lever l'ambiguïté qui existait sur ce que pouvait être la mode éphémère.

Un autre point tout aussi crucial est la durabilité : celle-ci est encore plus importante que le recyclage, comme l'ont montré tous les débats que nous avons pu avoir sur ce que doivent être le réemploi et la réutilisation dans notre société aujourd'hui.

En tant que sénateurs, nous ne pouvons qu'être très sensibles au renforcement de la capacité de recyclage dans nos territoires, compte tenu du déficit commercial de notre pays. Le fait de nous interroger, via le sujet du textile, sur notre capacité de recyclage dans les territoires nous permettra sans doute d'élargir véritablement le spectre de l'économie circulaire.

Je veux de nouveau saluer et remercier notre rapporteure pour le travail qui a été fourni. Nous soutenons évidemment cette proposition de loi, et je voterai bien volontiers les propositions qui nous sont faites.

Mme Marie-Claude Varaillas. - Je partage ce qui a été dit. Madame la rapporteure, vous savez que mon groupe vous soutient et que nous sommes nous aussi intervenus pour essayer de faire évoluer les choses en Conférence des présidents.

Voilà un an que la proposition de loi a été examinée à l'Assemblée nationale. On peut effectivement s'étonner qu'elle ne soit pas parvenue plus tôt au Sénat, même si l'on en connaît un peu les raisons. Mais tâchons aujourd'hui de regarder les choses positivement...

Un collectif de 11 associations s'est mobilisé au niveau national le 14 mars dernier. Dans mon département de la Dordogne, il s'est manifesté pour interpeller le Gouvernement et le Sénat sur l'adoption définitive du texte, qui suscite visiblement une certaine résonance dans l'opinion.

L'évolution du secteur de l'habillement pousse à la consommation de vêtements de mauvaise qualité, et un besoin constant de renouvellement est nocif à bien des égards. Il en découle une surconsommation de vêtements, avec 92 millions de tonnes de déchets textiles produites chaque année, dont très peu sont recyclées.

Cette industrie est responsable de 35 % des rejets de microfibres plastiques dans les cours d'eau et les océans, ce qui n'est pas négligeable.

Du fait d'un trop-plein, la filière est en crise. Dans mon département, le recyclage des vêtements était assuré par une association d'insertion appelée La Tresse. À cause de l'inflation, de la fast fashion et de baisses de subventions, cette association importante, qui collectait tous les vêtements dans les bornes de recyclage, vient de demander sa liquidation judiciaire. J'ignore comment les choses vont évoluer.

On ne peut pas occulter que 70 % de ces vêtements vendus en France sont fabriqués en Asie, où des ouvrières et parfois même des enfants sont exploités pour produire des vêtements dans des conditions particulièrement indignes. Nous ne pouvons y être insensibles.

La situation n'est pas non plus sans mettre en difficulté nos entreprises françaises, avec des pertes d'emplois significatives dans l'habillement : 40 000 emplois ont été supprimés en dix ans.

Bien évidemment, nous soutiendrons votre rapport et nous voterons ce texte.

M. Guillaume Chevrollier. - Merci à la rapporteure de son travail.

Dans le beau département de la Mayenne, que je représente, une très belle entreprise, Renaissance Textile, a établi, en 2022, la première plateforme industrielle de recyclage textile en France. Cependant, elle a dû suspendre ses activités, du fait d'un problème de visibilité économique et faute de cadre structurant adapté, malgré le soutien des collectivités locales et même de ministres - plusieurs sont venus lui rendre visite. Malgré des perspectives prometteuses, ce projet innovant a rencontré des difficultés. Cet exemple illustre combien il est compliqué de trouver un cadre réglementaire adapté pour développer des activités de recyclage de ce type sur notre territoire.

Quelles mesures concrètes pourraient être envisagées, dans le cadre de cette proposition de loi sur l'empreinte environnementale, pour structurer une véritable filière française de recyclage textile et éviter que d'autres projets innovants ne connaissent les difficultés que je viens d'évoquer ? Je pense à des mesures de soutien financier accru, avec l'augmentation du fonds dédié au recyclage du textile, ou à l'adaptation du cadre réglementaire pour inciter davantage au recyclage ou fixer des quotas. C'est un point que nous pourrons aborder dans le cadre du débat en séance.

M. Pierre Jean Rochette. - Cette proposition de loi est à la fois un texte « écolo », un texte totalement dans l'air du temps et un texte attendu. Je vous remercie, madame la rapporteure, pour votre abnégation sur ce sujet. Je remercie également notre président !

Ce texte est attendu par les entreprises qui croient en l'avenir du textile en France. Il n'y en a déjà plus beaucoup, mais certaines, aujourd'hui, se battent pour maintenir des emplois. Dans mon département de la Loire, et plus précisément dans ma commune de Boën-sur-Lignon, des dirigeants d'entreprises aujourd'hui en difficulté attendent ce texte avec beaucoup d'impatience et nous sollicitent régulièrement pour savoir quand il sera examiné. Il y a véritablement un sujet de réindustrialisation et de préservation des entreprises, qui sont souvent de petites entreprises qui font beaucoup de bien à nos territoires.

Les membres du groupe Les Indépendants - République et Territoires soutiendront bien évidemment cette proposition de loi.

Mme Sylvie Valente Le Hir, rapporteure. - Monsieur Fernique, nous avons fait le choix du décret pour obtenir plus de souplesse et pour permettre au Gouvernement de s'adapter, car nous savons très bien que nous avons face à nous des entreprises très structurées qui sauront détourner les montants que l'on fixera.

Malheureusement, nous nous sommes bien rendu compte, à la suite de nos échanges, notamment avec nos interlocuteurs au gouvernement, que l'interdiction de la publicité était véritablement un motif d'inconstitutionnalité, puisqu'elle risque de contrevenir au principe constitutionnel de la liberté d'entreprendre.

Nous souhaitons rendre ce texte le plus robuste possible et éviter qu'il soit censuré par le Conseil constitutionnel. Nous avons assez perdu de temps !

J'ai fait un rapprochement avec la restauration rapide et la malbouffe : on ne peut pas empêcher la publicité pour la restauration rapide, mais on peut dire « mangez, bougez ». C'était un peu notre idée.

Cher collègue Stéphane Demilly, la décision sur les quotas relève du droit européen, la proposition de loi n'a donc pas abordé cette mesure.

Chère collègue Nicole Bonnefoy, je souscris à l'importance de la régulation des livraisons, mais les amendements qui ne concernent pas spécifiquement le textile n'entrent malheureusement pas dans le champ du texte.

Je remercie mes collègues Marta de Cidrac et Marie-Claude Varaillas pour leurs encouragements.

Cher collègue Guillaume Chevrollier, je pense moi aussi qu'il est impératif de soutenir les filières. C'est pour cette raison que mon choix s'est porté sur le niveau national plutôt que sur le niveau européen pour redistribuer les écocontributions.

Merci à mon collègue Pierre Jean Rochette d'avoir rappelé que le Sénat est la chambre des territoires ! Nous avons tous été sollicités par nos filières sur nos territoires.

C'est un texte de progrès qui a été voté à l'Assemblée nationale voilà un an. J'entends les critiques qui peuvent nous être adressées, mais, entretemps, les choses ont pu évoluer, y compris à l'échelle européenne.

Je ne le cache pas, mon souhait était vraiment de cibler les entreprises de la mode éphémère et de préserver ce qu'il nous reste sur le territoire. Nous nous souvenons tous de toutes ces personnes qui se sont retrouvées sans emploi lors de la fermeture des magasins Camaïeu, qui faisaient vivre nos centres commerciaux. C'est bien Shein et Temu que je vise.

M. Saïd Omar Oili. - Je souscris totalement à cette proposition de loi, sauf qu'il ne faut pas oublier les outre-mer. Malgré l'éloignement de nos territoires, la fast fashion s'est implantée chez nous. Comment faire pour que l'on ne nous accuse pas, demain, d'empêcher ceux qui vivent dans la difficulté de s'habiller moins cher ? Je pense notamment à Mayotte, où 80 % de la population vit sous le seuil de pauvreté.

Comment faire en sorte d'adapter les grandes lois dont nous débattons aux difficultés des outre-mer ?

Mme Sylvie Valente Le Hir, rapporteure. - Je comprends parfaitement votre position, cher collègue. Nous avons tous entendu parler, ces derniers jours, d'une loi des nantis contre les pauvres, alors que c'est tout le contraire.

L'enjeu, aujourd'hui, c'est que le consommateur soit conscient des conséquences de son achat. Il faut communiquer le plus possible pour que ceux qui commandent sur ces sites le fassent en pleine conscience. Malheureusement, ils ne connaissent pas toujours l'impact de ces achats !

Au demeurant, la mode éphémère est-elle vraiment une bonne affaire s'il faut atteindre un montant de commandes minimum pour bénéficier de la livraison gratuite ? Pour arriver à cette somme, il faut en acheter, des vêtements ! Au bout du compte, ce n'est pas intéressant.

Nous devons expliquer davantage ce qu'implique le fait de commander sur ce type de sites en termes d'impact environnemental, de justice sociale et, bien évidemment, de durabilité. On peut laver, porter longtemps, revendre un vêtement de seconde main, mais à condition qu'il soit de bonne qualité. On ne peut pas le faire avec les vêtements de la mode éphémère : après deux lavages, ils sont bien souvent bons à jeter. Il s'agit non pas d'interdire, mais de faire en sorte que les clients sachent pleinement ce qu'ils achètent.

M. Jean-François Longeot, président. - Je vous invite, madame la rapporteure, à présenter le périmètre de recevabilité des amendements.

Mme Sylvie Valente Le Hir, rapporteure. - Je propose que le périmètre indicatif de la proposition de loi inclue les dispositions relatives : à la pratique commerciale consistant à renouveler très rapidement les collections vestimentaires, aux obligations et limitations spécifiques à cette pratique ainsi qu'aux sanctions associées à ces obligations et limitations ; à l'obligation de désigner un mandataire pour les personnes non établies en France soumises au principe de responsabilité élargie du producteur ; à la modulation des écocontributions dans la filière à responsabilité élargie du producteur des produits textiles.

Il en est ainsi décidé.

EXAMEN DES ARTICLES

Article 1er

Mme Sylvie Valente Le Hir, rapporteure. - Mon amendement COM-25 améliore la définition de la mode éphémère en clarifiant les pratiques et les entreprises visées.

D'une part, afin d'harmoniser la rédaction avec celle en discussion au sein des instances européennes, il est précisé que la mode éphémère renvoie aux pratiques qui ont pour conséquence la diminution de la durée d'usage ou de la durée de vie d'un produit neuf, notamment en raison de la mise sur le marché d'un nombre élevé de références de produits neufs ou de la faible incitation à réparer ces produits. Cette définition, plus complète que le seuil de nouvelles références qui figure dans la proposition de loi, renforce la sécurité juridique du dispositif.

D'autre part, les modalités d'intégration des places de marché sont clarifiées. Pour ces plateformes, la mode éphémère est appréciée à l'échelle de l'ensemble des références de produits neufs, sauf si la place de marché dispose d'éléments justifiant qu'une autre entreprise est titulaire de la marque des produits. Cette précision facilite l'intégration à la mode éphémère des places de marché, en distinguant les places multimarques, qui sont de simples intermédiaires entre producteur et consommateur, des producteurs de textile ayant adopté le statut de place de marché par opportunisme.

M. Jacques Fernique. - Sur la définition de la fast fashion, nous pensons qu'il convient de définir un seuil de référence dans la loi. Le décret pourra abaisser ce seuil pour permettre une vraie adaptation et mieux cadrer les choses.

Nous réfléchirons à la question d'ici au mois de mai. Pour l'heure, nous nous abstiendrons sur l'amendement de Mme la rapporteure, qui, d'une certaine façon, est moins précis que le nôtre.

L'amendement COM-25 est adopté. En conséquence, les amendements COM-19 et COM-4 deviennent sans objet.

Mme Sylvie Valente Le Hir, rapporteure. - L'impact social des produits de la mode éphémère constitue un enjeu central, sur lequel le public est insuffisamment informé. L'ajout d'une dimension sociale au message de sensibilisation, que propose l'amendement COM-5 rectifié bis, apparaît donc approprié. Avis favorable.

L'amendement COM-5 rectifié bis est adopté.

Mme Sylvie Valente Le Hir, rapporteure. - L'amendement COM-20 rectifié, qui prévoit un avis de l'Ademe sur le décret définissant le contenu des messages de sensibilisation, semble pertinent, d'autant que l'Agence mène depuis plusieurs années des travaux d'études sur l'impact environnemental de l'industrie textile. Avis favorable.

L'amendement COM-20 rectifié est adopté.

L'article 1er est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Après l'article 1er

Les amendements COM-2 et COM-3 rectifié sont déclarés irrecevables en application de l'article 45 de la Constitution.

Article 1er bis A (nouveau)

L'article 1er bis A est adopté.

Article 1er bis (nouveau)

Mme Sylvie Valente Le Hir, rapporteure. - Mon amendement COM-11 vise à supprimer l'article 1er bis.

Ce dernier, introduit à l'Assemblée nationale en séance publique, paraît en effet superfétatoire : il propose de compléter la liste des critères justifiant un affichage environnemental par un élément lié à la durabilité. Or les critères de l'affichage environnemental mentionnés à l'article L. 541-9-11 du code de l'environnement, à savoir les émissions de gaz à effet de serre, les atteintes à la biodiversité et la consommation d'eau et d'autres ressources naturelles, constituent déjà des sous-critères de la durabilité environnementale. De plus, ces critères ne sont pas exhaustifs, l'information devant tenir compte « notamment » des critères précités. L'ajout de ce critère serait donc redondant.

L'amendement COM-11 est adopté.

L'article 1er bis est supprimé.

Article 2

L'amendement COM-1 est déclaré irrecevable en application de l'article 45 de la Constitution.

Mme Sylvie Valente Le Hir, rapporteure. - Mon amendement COM-13 prévoit que les modulations des contributions de la filière à responsabilité élargie du producteur des textiles puissent se baser sur les pratiques industrielles et commerciales des producteurs de ces produits.

En effet, ces pratiques influencent la durée d'utilisation et la durabilité d'un produit, mesurées par la probabilité qu'un produit devienne un déchet en raison d'aspects qui ne sont pas nécessairement liés à sa conception. Ces pratiques commerciales regrettables participent dès lors à la mise au rebut du produit de manière anticipée, dans le but d'alimenter une surconsommation de produits textiles. Cet état de fait conduit à une surproduction de déchets textiles.

Afin de lutter contre cette pollution textile, qui ne cesse de croître, le projet de révision en cours de la directive-cadre relative aux déchets permet aux États membres d'introduire une telle modulation lorsque ces pratiques commerciales sont mises en oeuvre. Cette mesure constitue une avancée majeure dans la lutte contre la mode ultra-éphémère. La France a été fer de lance à cet égard et a été rejointe et soutenue par de nombreux autres États.

Il est proposé ici de reprendre les termes qui figurent dans le projet de la directive-cadre relative aux déchets.

M. Jacques Fernique. - Sur cette question, certains avancent comme argument que l'écoscore n'a pas encore abouti. Reste qu'il va aboutir ! Ce sera un indicateur clair et pertinent.

La référence à des pratiques industrielles et commerciales risque, à terme, d'obliger les entreprises à une sorte de double reportage. Celles qui disposeront d'un label plus ou moins réputé écoresponsable l'afficheront comme étant suffisant.

Il faut que le travail sur l'affichage environnemental aboutisse. Voilà un moment que le législateur le demande. Il y va d'un enjeu de cohérence, mais aussi de lisibilité, de praticité et de faisabilité.

Au reste, je ne crois pas que cela nuirait à nos producteurs. Au contraire !

L'amendement COM-13 est adopté.

Mme Sylvie Valente Le Hir, rapporteure. - L'article 2 de la proposition rehausse le plafond des pénalités des écocontributions de 20 % à 50 % du prix des produits pour la filière textile. Ce rehaussement se justifie par les spécificités de la mode éphémère, qui propose des produits à très bas prix.

Un rehaussement supplémentaire à 100 % du prix du produit, tel que le propose l'amendement COM-21, n'apparaît pas souhaitable : il pourrait être considéré comme confiscatoire par le juge constitutionnel. Je préfère un plafond moins élevé, mais plus solide juridiquement. Avis défavorable.

L'amendement COM-21 n'est pas adopté.

Mme Sylvie Valente Le Hir, rapporteure. - Mon amendement COM-12 vise à préciser, comme le prévoient les textes européens relatifs aux filières à responsabilité élargie du producteur, que le mandat entre le producteur soumis à REP et son mandataire doit se faire par écrit. Une telle précision permet de formaliser les responsabilités respectives et de mieux identifier le responsable en cas de sanction ou de contentieux.

L'amendement COM-12 est adopté.

Mme Sylvie Valente Le Hir, rapporteure. - L'impact social de l'industrie textile constitue un enjeu central, qui pourrait faire l'objet d'un texte spécifique. 

Toutefois, la modulation des écocontributions que prévoit l'amendement COM-24 ne me paraît pas constituer le moyen approprié pour assurer une prise en compte de cet impact. Au niveau européen, la directive-cadre déchets fixe une liste de critères qui peuvent être pris en compte pour moduler les écocontributions, liés de manière plus ou moins directe à la prévention et à la gestion de déchets. L'impact social ne figure pas parmi ces critères. Avis défavorable.

L'amendement COM-24 n'est pas adopté.

Mme Sylvie Valente Le Hir, rapporteure. - Mon amendement COM-14 propose que les compléments de contribution prélevés par les écocontributions soient orientés vers le financement de l'industrialisation du recyclage sur notre territoire national.

Le dispositif prévu par la proposition de loi, qui flèche les contributions prélevées vers le financement d'infrastructures de collecte et de recyclage dans des pays non membres de l'Union européenne, n'est pas opportun.

Favoriser le développement du recyclage des textiles en France est un objectif à privilégier, d'un point de vue environnemental, pour réduire l'impact carbone de nos déchets, et d'un point de vue économique, pour relocaliser une partie de la chaîne de valeur de la filière textile. Il est primordial que les déchets collectés sur notre territoire puissent être traités en France par le renforcement de nos capacités de recyclage pour absorber le gisement actuellement exporté.

M. Jacques Fernique. - Je comprends tout à fait l'idée de permettre de structurer une démarche d'économie circulaire territorialisée - Marta de Cidrac y a insisté.

Cela dit, la priorisation du soutien aux installations de recyclage sur le territoire national figure déjà dans le cahier des charges de la filière. Au reste, il est nécessaire de maintenir la possibilité d'un soutien à la performance d'installations de traitement situées en dehors de l'Union européenne.

Nous souscrivons à l'esprit de l'amendement de Mme la rapporteure, mais nous pensons que l'inscription de cette priorité dans le cahier des charges suffit.

M. Ronan Dantec. - La réutilisation est une bonne chose : elle permet une utilisation ailleurs, mais ne crée pas d'appel à la consommation. Or c'est bien notre consommation qui est en cause.

À cet égard, je pense qu'adopter l'amendement serait un signal extrêmement négatif, alors que cette forme de recyclage est tout à fait justifiée. Dans le contexte d'effondrement des aides publiques au développement, il me paraît dangereux que nous nous engagions en ce sens.

L'amendement COM-14 est adopté.

L'article 2 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Après l'article 2

Mme Sylvie Valente Le Hir, rapporteure. - Comme je l'ai détaillé au sujet de l'amendement COM-24, la modulation des écocontributions que propose l'amendement COM-6 ne me paraît pas constituer le moyen approprié pour assurer une prise en compte de l'impact social. Avis défavorable.

L'amendement COM-6 n'est pas adopté.

Les amendements identiques COM-8 rectifié et COM-9 et l'amendement COM-10 sont déclarés irrecevables en application de l'article 45 de la Constitution.

Article 3

Mme Sylvie Valente Le Hir, rapporteure. - Mon amendement COM-15 vise à supprimer l'interdiction de la publicité pour les produits de la mode éphémère.

Les travaux préparatoires ont en effet mis en lumière un risque d'inconstitutionnalité et d'inconventionnalité : le Conseil constitutionnel encadre les interdictions de publicité, en réservant ces limitations à la liberté d'entreprendre à des dispositions liées à des exigences constitutionnelles ou justifiées par un motif d'intérêt général, la disposition pourrait également être contraire au droit de l'Union européenne.

Un dispositif alternatif sécurisé visant à interdire la promotion par les influenceurs de la mode éphémère et à imposer dans les publicités un message de sensibilisation est proposé dans un autre amendement.

L'amendement COM-15 est adopté. En conséquence, les amendements COM-7 et COM-23 deviennent sans objet.

L'article 3 est supprimé.

Après l'article 3

Mme Sylvie Valente Le Hir, rapporteure. - Mon amendement COM-16 vise à mieux encadrer la publicité pour les produits de la mode éphémère, tout en garantissant la constitutionnalité du dispositif.

D'une part, il interdit la promotion des produits de la mode éphémère par les influenceurs, qui constituent aujourd'hui l'un des principaux relais de ces marques.

D'autre part, il impose une information synthétique sur l'impact environnemental des biens et services, considérés sur l'ensemble de leur cycle de vie, dans les publicités sur les produits de la mode éphémère.

L'amendement COM-16 est adopté et devient article additionnel.

Article 4 (nouveau)

Mme Sylvie Valente Le Hir, rapporteure. - Mon amendement COM-18 est un amendement de coordination pour tenir compte de la suppression de l'article 3, relatif à l'interdiction de publicité.

L'amendement COM-18 est adopté.

L'article 4 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Article 5 (nouveau)

Mme Sylvie Valente Le Hir, rapporteure. - Mon amendement COM-17 est un autre amendement de coordination pour tenir compte de la suppression de l'article 3, relatif à l'interdiction de publicité.

M. Jacques Fernique. - Les agents de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) devraient pouvoir être habilités à contrôler les infractions à l'interdiction de la promotion par les influenceurs et à l'obligation d'une information synthétique sur l'impact environnemental. Cela sera-t-il le cas ?

Mme Sylvie Valente Le Hir, rapporteure. - Oui. Nous nous appuyons, pour ce faire, sur la loi sur les influenceurs, qui peuvent encourir jusqu'à deux ans d'emprisonnement.

L'amendement COM-17 est adopté.

L'article 5 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Article 6 (nouveau)

L'article 6 est adopté.

Article 7 (nouveau)

L'article 7 est adopté.

La proposition de loi est adoptée à l'unanimité dans la rédaction issue des travaux de la commission.

M. Jean-François Longeot, président. - Si le texte n'est pas inscrit à l'ordre du jour après ce vote unanime, je n'y comprendrai plus rien !

Merci et bravo pour votre travail, madame la rapporteure. (Applaudissements.)

Les sorts de la commission sont repris dans le tableau ci-dessous :

Article 1er

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

Mme VALENTE LE HIR, rapporteure

25

Clarification des pratiques et des personnes visées par la définition de la mode éphémère

Adopté

M. FERNIQUE

19

Seuil de dix mille références annuelles pour définir la mode éphémère 

Satisfait ou sans objet

Mme BONNEFOY

4

Seuil d'un million de références annuelles pour définir la mode éphémère 

Satisfait ou sans objet

Mme BONNEFOY

5 rect. bis

Information sur l'impact social du produit textile

Adopté

M. FERNIQUE

20 rect.

Message de sensibilisation imposé aux produits de la mode éphémère

Adopté

Article(s) additionnel(s) après l'article 1er

Mme BONNEFOY

2

Impact environnemental des livraisons

Irrecevable au titre de l'article 45 de la Constitution

Mme BONNEFOY

3 rect.

Impact environnemental des livraisons

Irrecevable au titre de l'article 45 de la Constitution

Article 1er bis (nouveau)

Mme VALENTE LE HIR, rapporteure

11

Suppression

Adopté

Article 2

M. PELLEVAT

1

Gouvernance des filières REP

Irrecevable au titre de l'article 45 de la Constitution

Mme VALENTE LE HIR, rapporteure

13

Modulations des écocontributions de la filière REP Textiles en fonction des pratiques industrielles et commerciales des producteurs 

Adopté

M. FERNIQUE

21

Rehaussement du plafond des pénalités des écocontribution à 100 % du prix des produits 

Rejeté

Mme VALENTE LE HIR, rapporteure

12

Caractère écrit du mandat des producteurs établis hors de France

Adopté

M. FERNIQUE

24

Modulation des écocontributions en fonction de l'impact social

Rejeté

Mme VALENTE LE HIR, rapporteure

14

Orientation des compléments de contribution vers les installations de recyclage du territoire national

Adopté

Article(s) additionnel(s) après l'article 2

Mme BONNEFOY

6

Modulation des écocontributions en fonction de l'impact social

Rejeté

M. MANDELLI

8 rect.

Visibilité et non-réfaction de l'écocontribution dans la filière REP Éléments d'ameublement 

Irrecevable au titre de l'article 45 de la Constitution

Mme BILLON

9

Visibilité et non-réfaction de l'écocontribution dans la filière REP Éléments d'ameublement 

Irrecevable au titre de l'article 45 de la Constitution

Mme HAVET

10 rect.

Visibilité et non-réfaction de l'écocontribution dans les filières REP Éléments d'ameublement et Produits et matériaux de construction du secteur du bâtiment

Irrecevable au titre de l'article 45 de la Constitution

Article 3

Mme VALENTE LE HIR, rapporteure

15

Suppression

Adopté

Mme BONNEFOY

7

Entrée en vigueur de l'interdiction de publicité

Satisfait ou sans objet

M. FERNIQUE

23

Précision des sanctions encourues en cas de non-respect de l'interdiction de publicité

Satisfait ou sans objet

Article(s) additionnel(s) après l'article 3

Mme VALENTE LE HIR, rapporteure

16

Interdiction de la promotion par les influenceurs et information synthétique dans les publicités

Adopté

Article 4 (nouveau)

Mme VALENTE LE HIR, rapporteure

18

Coordination avec la suppression de l'article 3

Adopté

Article 5 (nouveau)

Mme VALENTE LE HIR, rapporteure

17

Coordination avec la suppression de l'article 3

Adopté

La réunion est close à 10 h 45.