- Mardi 21 mai 2024
- Proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, visant à remédier aux déséquilibres du marché locatif - Examen des amendements aux articles délégués au fond du texte de la commission des affaires économiques
- Proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, visant à faciliter la transformation des bureaux en logements - Examen des amendements aux articles délégués au fond du texte de la commission des affaires économiques
- Mercredi 22 mai 2024
- Proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, visant à mieux indemniser les dégâts sur les biens immobiliers causés par le retrait-gonflement de l'argile - Examen du rapport et du texte de la commission
- Audition de M. Éric Lombard, directeur général de la Caisse des dépôts et consignations
- Personnels administratifs du ministère de l'Éducation nationale - Contrôle budgétaire - Communication
- Proposition de loi visant à accroître le financement des entreprises et l'attractivité de la France - Désignation des candidats pour faire partie de la commission mixte paritaire
Mardi 21 mai 2024
- Présidence de M. Thierry Cozic, vice-président -
La réunion est ouverte à 9 h 30.
Proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, visant à remédier aux déséquilibres du marché locatif - Examen des amendements aux articles délégués au fond du texte de la commission des affaires économiques
M. Thierry Cozic, président. - Nous commençons ce matin nos travaux par l'examen des amendements de séance déposés sur les articles de la proposition de loi visant à remédier aux déséquilibres du marché locatif dont l'examen nous a été délégué au fond par la commission des affaires économiques.
EXAMEN DES AMENDEMENTS DE SÉANCE
La commission a donné les avis suivants sur les amendements dont elle est saisie, qui sont retracés dans le tableau ci-après :
TABLEAU DES AVIS
Proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, visant à faciliter la transformation des bureaux en logements - Examen des amendements aux articles délégués au fond du texte de la commission des affaires économiques
M. Thierry Cozic, président. - Nous en venons aux amendements de séance déposés sur les articles de la proposition de loi visant à faciliter la transformation des bureaux en logements dont l'examen nous a été délégué au fond par la commission des affaires économiques.
EXAMEN DES AMENDEMENTS DE SÉANCE
La commission a donné les avis suivants sur les amendements dont elle est saisie, qui sont retracés dans le tableau ci-après :
La réunion est close à 9 h 35.
Mercredi 22 mai 2024
- Présidence de M. Claude Raynal, président -
La réunion est ouverte à 9 h 05.
Proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, visant à mieux indemniser les dégâts sur les biens immobiliers causés par le retrait-gonflement de l'argile - Examen du rapport et du texte de la commission
M. Claude Raynal, président. - Nous examinons ce matin le rapport de Mme Christine Lavarde sur la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, visant à mieux indemniser les dégâts sur les biens immobiliers causés par le retrait-gonflement de l'argile.
Mme Christine Lavarde, rapporteur. - L'examen de cette proposition de loi s'inscrit dans la continuité de ma communication, la semaine dernière, sur le régime d'indemnisation des catastrophes naturelles. À cette occasion, je n'avais pas laissé beaucoup de suspense sur la position que j'allais arrêter. Sans surprise, je vous propose de rejeter tous les articles du présent texte.
Diverses raisons motivent cette position.
Premièrement, des articles sont déjà satisfaits.
La loi relative à l'indemnisation des catastrophes naturelles, dite loi Baudu, a été promulguée en décembre 2021. Un complément apporté par la loi du 21 février 2022 relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l'action publique locale, dite 3DS, a donné lieu à une ordonnance publiée en février 2023, avec des textes d'application tout juste publiés la semaine dernière. La proposition de loi, déposée au début de 2023, ne pouvait donc pas en tenir compte.
Ainsi, s'agissant de l'article 1er A, le principe de la motivation du refus de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle a déjà été introduit par la loi Baudu.
Les dispositions de l'article 1er, visant à préciser la méthodologie de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle pour le retrait-gonflement des sols argileux (RGA) et adapter la durée de l'arrêté constatant cet état, sont quant à elles prévues par la circulaire publiée le 15 mai 2024.
Enfin, le sujet traité à l'article 1er ter - l'obligation d'information du référent à la gestion des conséquences des catastrophes naturelles et à leur indemnisation dans le cadre de la démarche des administrés - relève du domaine réglementaire, et une doctrine a déjà été transmise aux référents départementaux.
Deuxièmement, des articles sont inopportuns.
Parmi ceux-ci figure l'article 1er bis, ayant pour objet de préciser la composition de la Commission nationale consultative des catastrophes naturelles. Bien que prévue par la loi Baudu, cette commission n'est toujours pas mise en place, car tous les membres la composant n'ont pas encore été désignés. Le ministère de l'intérieur m'a assuré qu'il cherchait à la publier rapidement, avec une première salve de nominations à venir par arrêté.
L'obligation de recourir à des experts inscrits sur les listes des juridictions administratives pour l'expertise du RGA prévue à l'article 1er quinquies s'appliquerait plutôt à des experts travaillant de manière indépendante, alors qu'en matière de catastrophes naturelles, et encore plus de RGA, les experts exercent leurs missions essentiellement dans des entreprises spécialisés. Compte tenu de la tension, en termes de disponibilité, de ces experts, cette disposition ne va pas dans le bon sens. Ce même article traite également de la responsabilité décennale, déjà largement couverte par le code de la construction et de l'habitation.
Il me semble que l'article 2 quater revient à demander un rapport pour une disposition, à savoir l'allongement de déclaration de 10 à 30 jours qui, lors de l'examen de la loi Baudu, n'a donné lieu à aucune opposition. Si l'on veut disposer d'une évaluation, alors celle-ci doit être plus large et avoir pour objectif d'établir si les différentes dispositions de la loi Baudu visant à favoriser la reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle portent leurs fruits.
L'article 2 quinquies tend, quant à lui, à demander un rapport sur la prévention du RGA. Un travail assez fourni a déjà été réalisé sur ce sujet et nous n'avons pas connaissance d'évolutions significatives en matière de recherche ou de technologies qui justifieraient un nouveau document.
J'en viens à l'article 2 sexies et au rapport demandé sur l'opportunité d'élargir les possibilités de recours des sinistrés et des élus locaux. D'une part, les demandes de réexamen des recours contentieux contre les rejets de reconnaissance de catastrophe naturelle n'aboutissent jamais ; d'autre part, une circulaire du 27 avril 2024 portant sur les critères de reconnaissance aura pour conséquence d'accroître le nombre de communes bénéficiant d'une reconnaissance de catastrophe naturelle pour RGA.
L'article 2 octies concerne précisément une demande de rapport sur l'évaluation des possibilités de perfectionnement du critère météorologique. À nouveau, le sujet est largement documenté. Plutôt que d'établir un rapport, il est temps de demander des comptes à Météo France et aux services de l'État quant aux actions qu'ils entreprennent pour améliorer ces données.
L'article 2 nonies tend également à demander un rapport, cette fois-ci sur l'évaluation de la pertinence des critères de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle en matière de RGA. De même que précédemment, beaucoup a déjà été fait sur le sujet.
Troisièmement, des articles prévoient des dispositions très coûteuses.
Ainsi, l'article 1er quater, notamment, prévoit une prise en charge des frais de contre-expertise par l'assureur, ce qui représente entre 70 à 80 millions d'euros par an, à sinistralité constante. En outre, il a pour conséquence directe un allongement très significatif des délais d'indemnisation et serait susceptible de déstabiliser le marché. Or, nous l'avons vu la semaine dernière, il importe précisément d'éviter que le marché ne se déstabilise ou que des zones n'entrent plus dans le champ de la couverture assurantielle. Nous avons plutôt opté, pour notre part, pour une plus grande garantie d'indépendance des experts.
L'article 2 vise à créer une présomption réfragable selon laquelle, en cas de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle, la cause déterminante du dommage est présumée provenir du RGA. Il y a là, de toute évidence, un dysfonctionnement : en cas d'inondation, par exemple, il faudra d'abord prouver que le dommage ne provient pas du RGA ! Par ailleurs, le coût de cette disposition est évalué entre 230 et 290 millions d'euros.
Cet article prévoit également une expertise par l'assureur, plus ou moins redondante avec les dispositions prévues à l'article 1er quater, pour un coût de 70 à 90 millions d'euros pour la contre-expertise, et de 300 à 500 millions d'euros pour l'étude de sol. La mise en oeuvre d'une troisième disposition - la nécessité de considérer l'aggravation d'une fissure comme un événement nouveau ouvrant droit à indemnisation dans certains cas - représente un coût allant de 100 à 140 millions d'euros. Enfin, les dispositions relatives à l'obtention du label « expert RGA » relèvent du domaine réglementaire.
Au total, les dispositions prévues à l'article 2 entraîneraient une charge supplémentaire de 700 à 870 millions d'euros pour le régime CatNat, alors qu'aucune solution fiable de financement n'est proposée.
Quatrièmement, je vous ai indiqué la semaine dernière dans le cadre de ma communication sur le régime d'indemnisation des catastrophes naturelles que je souhaitais déposer dans la foulée du rapport d'information une proposition de loi. C'est désormais chose faite et elle va dans le même sens que quelques-unes des dispositions prévues, tout en allant plus loin.
Je pense tout d'abord à l'article 2 bis, visant à offrir la possibilité aux victimes de dommages de RGA d'utiliser l'indemnité reçue pour faire construire ou acquérir un nouveau logement. L'ordonnance du 8 février 2023 prévoyait, pour le RGA, une affectation obligatoire de l'indemnité d'assurance à la réparation des dommages, ce qui contrevient à la jurisprudence classique dans le domaine assurantiel. Nous proposerons d'autoriser la libre utilisation de cette indemnité, mais d'obliger l'assuré, dans ce cas, à laisser son bien vacant, avec d'éventuelles dépenses de remise à l'état naturel qui pourraient être prises en charge par le fonds Barnier.
L'article 2 ter concerne une demande de rapport sur les incidences financières de la présente proposition de loi. Je signale que, par arrêté du 22 décembre 2023, le taux de surprime sera porté de 12 à 20 % au 1er janvier 2025, ce qui va redonner un peu de liquidités au régime CatNat - je le rappelle, la Caisse centrale de réassurance a vu son niveau de provision pour égalisation tomber à zéro. C'est pourquoi nous proposons, pour éviter les sauts très brusques de surprime, une indexation de celle-ci à l'évolution de la sinistralité.
Enfin, l'article 2 septies vise à demander un rapport sur l'extension du fonds Barnier au financement des expérimentations de techniques de prévention du risque de retrait-gonflement des argiles. Un rapport n'est pas nécessaire car cette mesure figurera également dans notre proposition de loi.
En conclusion, je vous propose de rejeter les articles du présent texte et, en conséquence, j'émettrai un avis défavorable sur tous les amendements déposés.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - La présentation précise qui vient d'être faite complète utilement la présentation qui nous a été faite la semaine dernière sur le régime d'indemnisation des catastrophes naturelles. À ce propos, on mesure bien qu'il existe un sujet important autour du périmètre de la proposition de loi. J'estime, moi aussi, que l'approche « catastrophe naturelle » doit être privilégiée ; elle est plus large que la seule question du RGA, même si ce problème est majeur au regard des cartographies publiées et du risque de retrait des assureurs.
Par ailleurs, la commission des finances se doit de disposer d'une bonne appréciation des coûts. Si l'on n'y prend pas garde, la mesure visant à augmenter la taxe assurantielle sur les catastrophes naturelles à effet du 1er janvier 2025 ne suffira pas.
Le débat relatif au RGA sera pris très au sérieux au Sénat en raison de l'importance des problèmes causés à nos concitoyens. Il faudra notamment travailler à une meilleure appréciation des conditions permettant, ou pas, d'entrer dans le périmètre de la reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle. En effet, en matière de RGA, tout peut commencer par une toute petite fissure dans un bâtiment qui, au fil d'années de sécheresse va entraîner des dégâts plus importants. Or, cette toute première fissure sera antérieure à la déclaration de sinistre.
Ces remarques étant faites, je souscris aux orientations de Mme le rapporteur.
Mme Ghislaine Senée. - J'ai déposé un certain nombre d'amendements, dont des amendements de suppression qui vont dans le sens de Mme le rapporteur, avec l'objectif de rationaliser et de simplifier la loi.
Je veux bien que l'on parle de coût, mais la réalité est là : 50 % des maisons individuelles sont aujourd'hui menacées dans 90 départements ; 8 500 communes ont déjà été touchées et la demande de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle est rejetée pour une commune sur deux. Si nous ne faisons rien, ces maisons seront demain presque inhabitables.
La présente proposition de loi a été adoptée pratiquement à l'unanimité à l'Assemblée nationale, et ce de manière transpartisane. Nos collègues auraient donc collectivement voté des mesures qui seraient inappropriées ?... Certes, certains articles sont déjà satisfaits, mais d'autres offrent un meilleur accompagnement des sinistrés, pour lesquels, il faut le dire, c'est un véritable chemin de croix.
L'allongement de la déclaration des sinistres de 10 à 30 jours ne me paraît pas démesuré.
La question de la soutenabilité est effectivement un sujet. Vous entendez le traiter, madame le rapporteur, dans le cadre d'une proposition de loi plus généraliste portant sur l'ensemble du régime CatNat. Faites donc ! Mais il y a urgence en matière de RGA. Or, une fois votée, votre proposition de loi devra passer devant l'Assemblée nationale et certaines questions, on le sait, susciteront de vifs débats. Passer par le fonds Barnier, par exemple, peut poser problème, car celui-ci est conçu pour traiter des besoins collectifs, et non des besoins individuels. A contrario, ce texte, qui a été adopté pratiquement à l'unanimité par l'Assemblée nationale, apporte des solutions concrètes.
Des milliards d'euros ont été investis dans le logement, avec parfois peu d'efficacité ; au moment où nous connaissons une crise du logement, nous ne pouvons pas laisser se dévaloriser ce patrimoine de maisons individuelles.
Je ne reprendrai pas toutes les critiques que vous avez exprimées sur ce texte. Mais prenons l'exemple de l'aménagement de la charge de la preuve : les frais à engager pour l'expertise, l'assignation en justice, les études de sol sont tels que la majorité des ménages n'ont pas les moyens de traiter la question du RGA et se retrouvent avec des maisons complètement fissurées.
S'il faut rationaliser, rationalisons : c'est ce que je propose avec mes amendements. Mais avançons sur cette question !
M. Marc Laménie. - Ce travail a le mérite de mettre sur la table des problèmes essentiels et graves. J'ai une question sur le coût annuel des mesures prévues par la proposition de loi et sur les solutions pour le financer. Vous parlez d'une estimation de 1 milliard d'euros par an. Quelles solutions sont avancées pour financer cette somme ? Par ailleurs, des partenariats public-privé pourraient-ils intervenir dans des situations de cette gravité ?
M. Thierry Cozic. - Si je salue le travail de qualité de notre rapporteur, je ne peux partager son analyse.
Nous sommes d'accord, la proposition de loi n'est pas parfaite. Mais elle a le mérite de poser un premier jalon pour une meilleure indemnisation des conséquences des RGA.
Ce texte n'est d'ailleurs pas pionnier en la matière : Nicole Bonnefoy avait déjà présenté une proposition de loi, qui faisait suite à une mission d'information constituée en janvier 2019. Cette proposition de loi, maximaliste et beaucoup plus coûteuse, avait été adoptée à l'unanimité par le Sénat. J'appelle donc la majorité sénatoriale à la cohérence.
Je rappelle également, sachant l'engagement de chacun d'entre nous sur le sujet, qu'il y a urgence dans les territoires touchés. Les associations et les élus, sur le terrain, ne comprendraient pas que le Sénat ne soutienne pas le présent texte qui, bien qu'imparfait, constitue une avancée.
Le groupe socialiste, mû par un souci de constance et de cohérence, soutiendra donc cette proposition de loi, ayant le mérite de répondre partiellement à l'urgence de la situation dans nos territoires.
M. Éric Bocquet. - Dans l'Essentiel qui nous est présenté par madame le rapporteur, une estimation des coûts annuels est donnée. Quelle en est l'origine ?
Il est dit par ailleurs que la proposition de loi n'avance aucune solution de financement. Ayant écouté les débats à l'Assemblée nationale, j'ai cru entendre un député de la majorité - M. Mathieu Lefèvre, me semble-t-il - évoquer un certain nombre de pistes : une augmentation des primes d'assurance, notamment, ou un financement par l'État. J'en vois une autre qui est rarement mentionnée : une modeste contribution des compagnies d'assurances, dont, je le rappelle, les placements atteignaient 2 427 milliards d'euros à la date du 31 décembre 2022, soit 92 % du PIB de notre pays.
Mme Christine Lavarde, rapporteur. - Je ne referai pas la présentation de ma mission de contrôle de la semaine dernière, mais certaines questions posées y trouveraient une réponse. Je pense, en particulier, à la question du financement du régime CatNat : il est déjà conçu comme un régime à part, et il ressemble à un partenariat public-privé. Ce financement est garanti par la surprime payée par chaque assuré ; la compagnie d'assurances décide alors, soit d'utiliser la réassurance publique fournie par la Caisse centrale de réassurance (CCR) - auquel cas elle lui reverse 50 % de cette collecte -, soit de rester dans un système de réassurance privé. Indépendamment de l'option choisie, la CCR vient jouer le rôle de dernier assureur, avec un stop loss fixé à 90 %.
La question de faire jouer la marge des assureurs peut se poser pour d'autres risques. Mais, dans le régime CatNat, les assureurs ne sont que la courroie de transmission. D'ailleurs, le financement du régime s'effectue, non pas au travers d'une tarification technique, mais par un taux forfaitaire de prime. Le dispositif est assez redistributif.
S'agissant de la proposition de loi de Nicole Bonnefoy - les travaux du Sénat de 2019 sont mentionnés à plusieurs reprises dans le rapport d'information présenté la semaine dernière -, j'insiste sur le fait que le contexte économique du régime CatNat a fortement évolué entre 2020 et 2021, avec, je le rappelle, une chute brutale des réserves de la CCR et de la provision pour égalisation.
Par ailleurs, la loi Baudu a déjà prolongé le délai de déclaration des sinistres à 30 jours. Il est question, ici, de demander un rapport sur l'efficacité de la mesure, alors que celle-ci n'a donné lieu à aucun débat lors de l'examen parlementaire et que strictement personne ne nous en a parlé au cours des auditions.
Je rappelle que le fonds Barnier peut déjà être utilisé pour des mesures individuelles. Il s'avère que la consommation dans ce domaine est faible - ces mesures individuelles représentent seulement 6 % du fonds -, mais rien ne l'interdit. Nous entendons, dans notre proposition de loi, accélérer cet usage.
Ce texte, je le précise, sera inscrit à l'ordre du jour des travaux du Sénat au tout début du mois d'octobre. Nous avons travaillé de manière partenariale avec les services de l'État pour favoriser un examen législatif rapide. En effet, pour moi, le régime CatNat ne peut survivre que si on le traite globalement. Se restreindre au seul RGA, c'est aller droit dans le mur, car cette sinistralité a vocation à croître de manière exponentielle. Sans solution pour la pérennité du régime, nous perdrons tout !
M. Claude Raynal, président. - La position est très claire. Permettez-moi tout de même de relever que nous faisons un pari : on passe d'un texte spécifique à un texte élargi, mais encore faut-il que la nouvelle proposition de loi, une fois adoptée par le Sénat, soit rapidement examinée à l'Assemblée nationale pour espérer une mise en application assez rapide. Notre responsabilité, si vous êtes suivie, madame le rapporteur, sera donc de faire avancer le processus législatif pour parvenir assez rapidement à l'adoption définitive du texte.
En application du vade-mecum sur l'application des irrecevabilités au titre de l'article 45 de la Constitution, adopté par la Conférence des présidents, je vous propose de considérer que le périmètre comprend toutes dispositions ayant une incidence sur la reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle pour cause de mouvements de terrain consécutifs au retrait-gonflement des argiles ; toutes dispositions ayant une incidence sur la connaissance, la prévention, l'indemnisation des dommages causés par les mouvements de terrain consécutifs au retrait gonflement des argiles ; et toutes dispositions ayant une incidence sur l'information des collectivités territoriales, des habitants, des entreprises et des associations de sinistrés, concernant les démarches visant à mobiliser les dispositifs d'aides et d'indemnisation susceptibles d'être engagés après des mouvements de terrain consécutifs à du retrait-gonflement des argiles.
Il en est ainsi décidé.
M. Claude Raynal, président. - Je rappelle que Mme le rapporteur a émis un avis défavorable sur l'ensemble des amendements proposés.
Article 1er A (nouveau)
L'amendement COM-2 n'est pas adopté.
L'article 1er A n'est pas adopté.
Article 1er
L'amendement COM-1 n'est pas adopté.
L'article 1er n'est pas adopté.
Article 1er bis (nouveau)
L'amendement COM-3 n'est pas adopté.
L'article 1er bis n'est pas adopté.
Article 1er ter (nouveau)
L'amendement COM-4 n'est pas adopté.
L'article 1er ter n'est pas adopté.
Article 1er quater (nouveau)
L'amendement COM-5 n'est pas adopté.
L'article 1er quater n'est pas adopté.
Article 1er quinquies (nouveau)
L'amendement COM-6 n'est pas adopté.
L'article 1er quinquies n'est pas adopté.
Article 2
L'article 2 n'est pas adopté.
Article 2 bis (nouveau)
L'article 2 bis n'est pas adopté.
Article 2 ter (nouveau)
L'amendement COM-7 n'est pas adopté.
L'article 2 ter n'est pas adopté.
Article 2 quater (nouveau)
L'amendement COM-8 n'est pas adopté.
L'article 2 quater n'est pas adopté.
Article 2 quinquies (nouveau)
L'amendement COM-9 n'est pas adopté.
L'article 2 quinquies n'est pas adopté.
Article 2 sexies (nouveau)
L'amendement COM-10 n'est pas adopté.
L'article 2 sexies n'est pas adopté.
Article 2 septies (nouveau)
L'amendement COM-11 n'est pas adopté.
L'article 2 septies n'est pas adopté.
Article 2 octies (nouveau)
L'amendement COM-12 n'est pas adopté.
L'article 2 octies n'est pas adopté.
Article 2 nonies (nouveau)
L'amendement COM-13 n'est pas adopté.
L'article 2 nonies n'est pas adopté.
Article 3
L'article 3 n'est pas adopté.
La proposition de loi n'est pas adoptée.
Conformément au premier alinéa de l'article 42 de la Constitution, la discussion en séance portera en conséquence sur le texte de la proposition de loi adoptée par l'Assemblée nationale en première lecture.
La commission a donné les avis suivants sur les amendements dont elle est saisie, qui sont retracés dans le tableau ci-après :
TABLEAU DES SORTS
Audition de M. Éric Lombard, directeur général de la Caisse des dépôts et consignations
M. Claude Raynal, président. - Nous retrouvons Éric Lombard, que nous avons entendu pour la dernière fois en janvier 2023, à l'occasion de sa reconduction au poste de directeur général de la Caisse des dépôts et consignations (CDC).
Comme nous le rappelons souvent, la CDC est placée sous la « surveillance spéciale » du Parlement. C'est pourquoi nous nous réjouissons de vous accueillir régulièrement depuis votre prise de fonctions en novembre 2017, monsieur Lombard, pour faire le point sur ses activités. Ces rencontres régulières sont d'autant plus importantes que la CDC est un acteur majeur pour nos territoires et qu'elle s'est particulièrement investie dans le plan de relance de notre économie.
Cette audition a pour vocation d'établir un bilan de l'année 2023. Elle pourrait aussi être l'occasion de revenir sur les retombées du plan de relance mis en oeuvre par la Caisse des dépôts. À cet égard, sur les 26 milliards d'euros initialement prévus en 2020, 24 milliards ont déjà été mobilisés ; quelles avancées ce plan a-t-il permises ?
Vous mettez fréquemment en avant, y compris lorsque vous vous êtes récemment entretenu les membres du bureau de la commission des finances, l'engagement climatique de la CDC. En la matière, le groupe s'est donné un objectif de financement de 60 milliards d'euros sur la période 2020-2024, dont 20 milliards d'euros doivent être portés par la Banque des territoires. Le bilan 2023 de la Caisse fait déjà état d'une distribution de 80 milliards d'euros de prêts en faveur de la transformation écologique. À quoi correspond cet écart favorable entre la prévision et l'exécution déjà réalisée ? Plus généralement, quels projets importants ont été financés ? Quels seront vos objectifs de financement pour les années à venir, en matière de montants et de types de projets soutenus ?
Enfin, notre assemblée sera particulièrement attentive à vos propos sur la politique du logement, et notamment la politique en faveur du logement social que la CDC soutient.
Je vous rappelle que cette audition est retransmise en direct sur le site internet du Sénat et, le cas échant, sur certains réseaux sociaux.
M. Éric Lombard, directeur général de la Caisse des dépôts et consignations. - Vous avez bien voulu, l'an dernier, me reconduire au poste de directeur général de la CDC : je viens donc répondre de mon action devant vous. Je commencerai par évoquer les résultats financiers de 2023, qui traduisent la résilience du groupe face à un environnement économique difficile. Le bilan agrégé de la section générale et des fonds d'épargne s'élève à 1 360 milliards d'euros, ce qui représente une hausse de 67 milliards d'euros de nos engagements par rapport à la fin de l'année 2022. Nos fonds propres s'élèvent à 68,3 milliards d'euros à la fin de l'année 2023, ce qui correspond à une hausse de 11 % sur un an.
Enfin, le résultat agrégé atteint en 2023 3,9 milliards d'euros, dont 3 milliards d'euros pour la section générale et 900 millions d'euros pour les fonds d'épargne. Le résultat de la section générale connaît un recul d'un peu plus de 200 millions d'euros, qui tient à deux séries de difficultés.
D'abord, les difficultés du secteur immobilier touchent l'activité de la Caisse des dépôts et de ses filiales, et se traduisent par la dépréciation de certains actifs. Ensuite, il faut évoquer les résultats contrastés de La Poste, qui subit des chocs liés à l'inflation, aux taux d'intérêt élevés, à la faible croissance en Europe, mais aussi à la sous-compensation de ses quatre missions de service public, qui dépasse 800 millions d'euros en 2023, ce qui est lourd.
Cependant, les résultats de l'ensemble de la Caisse traduisent surtout notre capacité à maintenir des résultats élevés dans un contexte de taux volatils, de situation économique difficile et de crise immobilière.
Je soulignerai aussi le résultat net du fonds d'épargne, qui s'établit à un niveau supérieur à la moyenne des années précédentes, alors que le taux de rémunération de l'épargne des Français est passé de 0,5 % à 3 % et que son coût a augmenté de 6 milliards d'euros sur l'année 2023.
En conséquence, la CDC contribue de façon importante au budget de l'État. Au titre de 2023, nous aurons versé 2,573 milliards d'euros.
Enfin, depuis 2017, nos résultats ont connu une augmentation de 50 % et nos fonds propres ont progressé de 42 %. Ces hausses nous permettent de continuer d'agir au service des Français, en faveur de la transformation écologique, de la cohésion sociale et territoriale, et du développement de nos entreprises.
J'en viens à l'action conduite depuis l'audition de janvier 2023 et je me concentrerai sur les trois axes de la feuille de route que j'avais alors présentée.
Le premier axe a trait à la transformation écologique et énergétique, pour laquelle nous nous sommes fixés des objectifs ambitieux. Nous nous engageons aux côtés de l'État, en cohérence avec la feuille de route France Nation verte, mais aussi aux côtés des collectivités territoriales, en première ligne face aux conséquences de plus en plus graves du dérèglement climatique.
Nous avions promis d'engager 60 milliards d'euros en faveur de la transformation écologique pour la période 2020-2024 et cette cible a été largement dépassée, puisque 80 milliards d'euros ont été déployés sur la seule période 2020-2023. Nous avons donc relevé notre niveau d'ambition et souhaitons engager 100 milliards d'euros, à l'échelle de l'ensemble du groupe, pour 2024-2028, montant qui correspond au tiers de ce que Jean Pisani-Ferry et Selma Mahfouz recommandaient dans leur rapport de mai 2023 sur les incidences économiques de l'action pour le climat. Nous souhaitons aider les territoires à devenir plus durables, plus résilients, et nous agissons également sur le plan de l'atténuation et de l'adaptation.
Notre ambition est simple : nous souhaitons que l'ensemble de nos activités et de nos flux financiers soient compatibles avec un développement neutre en carbone à l'horizon 2050.
D'abord, nos efforts portent sur la rénovation énergétique des bâtiments publics et des logements sociaux, pour laquelle la Banque des territoires va mobiliser 2,5 milliards d'euros par an. Nos cibles prioritaires comprennent la réhabilitation du bâti scolaire et la rénovation du logement social, dont la rénovation thermique est en avance sur celle du logement privé. L'année dernière, plus de 100 000 logements sociaux ont bénéficié de ces financements, ce qui représente une hausse de 42 % par rapport à l'année précédente.
Au-delà du logement, nous accompagnons les territoires qui veulent rendre leurs transports plus propres, en investissant 1,3 milliard d'euros, dont 360 millions d'euros pour la seule année 2023, en faveur de la mobilité décarbonée. Nous mettons aussi l'accent sur l'équipement de l'ensemble des territoires en bornes de recharge de véhicules électriques, en réservant une attention particulière aux territoires ruraux.
Nous continuerons d'intensifier nos efforts pour limiter le réchauffement climatique mais nous devons, dès à présent, préparer le pays à l'adaptation aux conséquences de ce changement. D'ici à 2028, nous consacrerons 1,2 milliard d'euros au plan d'adaptation, en fournissant un effort particulier en matière d'ingénierie, pour donner aux collectivités territoriales les outils dont elles ont besoin. À ce titre, nous déploierons 100 millions d'euros.
L'ambition environnementale ne se limite pas aux enjeux climatiques et nous agissons également en faveur de la préservation de la biodiversité et de la ressource en eau.
J'en viens au deuxième axe de notre stratégie : les souverainetés. S'agissant de la souveraineté énergétique, l'évolution du contexte international a des conséquences sur les prix, sur la sécurité de nos approvisionnements et sur l'ardente nécessité environnementale que j'ai évoquée. Il nous faudra utiliser tous nos leviers d'action en la matière.
D'abord, la CDC est actionnaire des deux grands réseaux de distribution d'énergie, ceux du gaz et de l'électricité, dont l'importance sera cruciale dans les années à venir, tant pour la sécurité de la distribution que pour la transition du mix énergétique. Ensuite, en tant que co-actionnaire avec EDF du Réseau de transport d'électricité (RTE), nous prévoyons de lancer un plan d'investissement massif, dont nous discuterons bientôt avec la Commission de régulation de l'énergie (CRE). Ce plan atteindra probablement le même niveau d'amplitude que celui du nouveau programme nucléaire français. En outre, sur le gaz, qualifié d'énergie de transition par la Commission européenne, nous raccorderons douze térawattheures de gaz renouvelables au réseau GRTgaz. Enfin, l'an passé, nous sommes entrés au capital de Coriance, troisième opérateur de réseaux de chaleur en France.
Nous souhaitons également accroître notre action en faveur de la production d'énergies renouvelables (EnR) et nous engagerons 1,5 milliard d'euros de fonds propres pour accompagner la décarbonation de notre mix énergétique. En moyenne, nos investissements contribuent à créer, chaque année, 20 % des capacités nouvelles en matière d'EnR. Éolien, hydrogène vert, photovoltaïque : nous sommes impliqués dans l'ensemble des technologies.
Nous oeuvrons aussi à la souveraineté industrielle et sommes fortement impliqués dans le financement de la réindustrialisation verte, au travers de la Banque des territoires. Sur la période 2020-2023, celle-ci s'est engagée dans plus de 260 projets industriels, dont plus de 40 créations d'usines, dans le cadre du programme national « Territoires d'industrie ».
Le vote de la loi du 23 octobre 2023 relative à l'industrie verte a permis de mobiliser une enveloppe de 1 milliard d'euros de financements supplémentaires pour la période 2023-2027, afin d'accompagner les industriels dans la décarbonation de leurs activités et d'aider les territoires à accroître l'attractivité de leur foncier industriel. Nous sommes également actifs dans le domaine du financement de l'industrie et de la transition écologique dans l'industrie, grâce à l'action de Bpifrance.
Enfin, en partenariat avec la Banque européenne d'investissement (BEI), nous avons notamment développé deux projets emblématiques de giga factories, celles d'Envision à Douai, et de Verkor, à Dunkerque.
J'en viens à la souveraineté financière, trop souvent oubliée, et à la sécurisation des grandes infrastructures des marchés financiers, qui représentent un gage de sécurité pour les opérateurs économiques et de compétitivité au niveau continental. À ce titre, nous investissons dans Euronext, l'une des deux grandes bourses européennes, et Euroclear, qui est un conservateur européen. Ces actifs sont essentiels dans l'achèvement d'un marché unique des capitaux dans l'ensemble de l'Union européenne. J'ai échangé à ce sujet avec Enrico Letta, en amont de la publication de son rapport sur la compétitivité de l'Union.
Je mentionnerai enfin la souveraineté en matière de financement des industries de défense, que nous suivons de près, dans le cadre de notre action pour la souveraineté et l'indépendance stratégique. Ce sujet préoccupe légitimement le Parlement, avec différentes initiatives en cours, et je remercie Dominique de Legge pour la qualité du dialogue qu'il a eu avec la CDC dans le cadre de la proposition de loi relative au financement des entreprises de l'industrie de défense française, dont il a été le rapporteur.
Le troisième et dernier axe concerne la cohésion sociale et territoriale, qui représente pour nous une mission historique, ainsi qu'un engagement constant. Dans le champ social, nous jouons un rôle majeur en tant que gestionnaire des régimes de retraite et en tant qu'opérateur de la politique de formation professionnelle via « Mon compte formation ».
J'évoquerai aussi notre action dans les secteurs du grand âge et de la santé, qui tiennent une place prépondérante dans notre ambition de cohésion. Ces derniers mois, nous nous sommes concentrés sur le sauvetage d'Orpea, devenu Emeis. Cependant, notre action sur ce dossier n'est pas isolée et s'inscrit dans le cadre d'un engagement plus large sur la question. Nous avons notamment procédé à un apport en capital en faveur d'Arpavie, acteur associatif majeur du secteur des Ehpad et des cliniques de soin. Par ailleurs, CDC Habitat détient des résidences autonomie. Enfin, La Poste mène une politique déterminée en la matière. Ainsi, nous construisons une offre diversifiée et globale pour répondre aux enjeux du vieillissement de la population.
En matière de cohésion territoriale, la Banque des territoires poursuit son engagement massif, dans le cadre de grands programmes nationaux d'aménagement du territoire : « Action coeur de ville », « Petites villes de demain », France Ruralités et « Villages d'avenir ».
Par ailleurs, dans le cadre des engagements pris par le comité interministériel des villes en faveur des quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV), la CDC s'impliquera de manière forte dans « Engagements quartiers 2030 », que ce soit en faveur de l'entreprenariat dans les quartiers ou de la rénovation écologique et énergétique.
Enfin, face à la crise du logement, qui est sociale, territoriale et environnementale, la CDC agit avec détermination et aux côtés de l'État, pour stimuler le secteur et enclencher une dynamique vertueuse. Il s'agit de notre mission historique d'acteur contracyclique, à laquelle nous nous attelons en utilisant tous les leviers à notre disposition.
En ce qui concerne le financement, nous sommes le premier financeur du logement social en France, avec un encours de prêts en faveur du logement social atteignant près de 180 milliards d'euros à la fin 2023. Nous sommes le premier financeur : un logement sur quatre mis en chantier en 2023 a été financé par la CDC.
Nous disposons également de leviers en matière de construction grâce à notre filiale CDC Habitat, qui détient un parc de 545 000 logements locatifs sociaux, intermédiaires et libres, permettant de loger plus d'un million de personnes.
Nous avons plaidé pour une stabilisation du cadre économique et du taux du livret A. La décision prise par le ministre de stabiliser ce taux jusqu'à janvier 2025 nous offre une ressource compétitive et permet aux investisseurs d'avoir de la visibilité. Les effets de cette stabilisation à 3 % se montrent déjà dans les chiffres de 2023 et de début 2024. À date, 7,4 milliards d'euros de prêts ont été signés, ce qui représente une augmentation de 46 % par rapport à la même période l'année dernière. Sur ces 7,4 milliards d'euros, 4,8 milliards ont été engagés pour la construction de logements neufs et 1 milliard d'euros pour la rénovation.
Notre avons accru nos efforts en matière de production de nouveaux logements, en accord avec l'État. Lors du congrès HLM de Nantes, qui s'est tenu au mois de septembre, j'ai annoncé un nouveau plan de 6 milliards d'euros de prêts locatifs aidés d'intégration (PLAI), afin de soutenir la construction de logements très sociaux, grâce à une enveloppe exceptionnelle et à une bonification doublée.
En parallèle, nous développons notre activité en matière de logement intermédiaire. L'enveloppe pluriannuelle de 5 milliards d'euros de prêts locatifs intermédiaires (PLI) est d'une ampleur nouvelle. Le montant des prêts signés depuis le début de l'année s'élève à 1 milliard d'euros, ce qui représente une accélération considérable. Le logement intermédiaire ne se substitue pas au logement social ; il s'y ajoute.
En tant que bailleur, le groupe CDC est également très engagé via CDC Habitat pour répondre aux inquiétudes des promoteurs et à la crise de la production. Ainsi, après l'effort considérable que nous avons fourni au moment de la crise de la covid en acquérant 40 000 logements en vente en l'état futur d'achèvement (Vefa), nous avons lancé un plan d'acquisition de logements intermédiaires et sociaux en Vefa, en 2023. Fin décembre, environ 17 400 logements ont ainsi été commandés, dont deux tiers de logements intermédiaires et un tiers de logements sociaux, pour un montant d'investissement de 4,1 milliards d'euros.
Pour répondre à la crise que traverse le secteur du logement, il faut accroître la mobilisation des collectivités locales. À cette fin, la Banque des territoires se mobilise pleinement, grâce au programme « Territoires engagés pour le logement », lancé par le Gouvernement le 14 janvier 2024. Cette démarche se limite à quelques territoires mais peut en inspirer d'autres. Cependant, ces engagements supplémentaires ne répondront pas seuls à la crise structurelle que traverse le secteur. Le travail sera long, notamment sur le sujet du foncier, dont la rareté et le coût pèsent lourdement sur les opérations, ajoutant aux difficultés liées à l'augmentation des coûts de financement et des matières premières, mais aussi au dispositif « zéro artificialisation nette » (ZAN), qui peut compliquer certains projets d'aménagement du territoire. Je veux mentionner les échanges fructueux que nous avons eus avec Jean-Baptiste Blanc pour contribuer à sa réflexion sur le sujet.
Nos efforts portent sur l'ensemble du foncier existant. Tout en respectant les règles du ZAN, nous pouvons libérer plus de foncier en faveur du logement et nous menons des expériences prometteuses, notamment en matière de reconversion des entrées de ville. Nous reprenons d'anciens sites commerciaux d'entrées de ville à des grands distributeurs, afin d'y installer de nouveaux quartiers. De nombreux gisements de foncier existent, qui doivent être mobilisés. Cette responsabilité concerne aussi l'État, ses opérateurs et les entreprises publiques, qui doivent faire davantage pour libérer le foncier.
J'en terminerai par quelques mots sur l'Europe, dont il est nécessaire d'améliorer la compétitivité économique. Enrico Letta a remis un rapport à ce sujet et Mario Draghi remettra le sien dans les semaines à venir - nous y avons aussi contribué. L'ancrage européen de la Caisse des dépôts est profond. Nous participons à un partenariat vivant avec les 36 membres de l'association européenne des investisseurs de long terme, qui regroupe l'ensemble de nos homologues. Nous accomplissons aussi un travail resserré avec les quatre autres grandes caisses de dépôts de l'Union européenne : les caisses allemande, italienne, espagnole et polonaise, en liaison avec la Banque européenne d'investissement (BEI). Pour nous, l'Europe est une réalité concrète, qui avance.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - En 2023, la Caisse a enregistré une forte baisse de ses résultats liés à ses activités dans le secteur de l'immobilier de bureau, notamment s'agissant de la filiale Icade avec une baisse de 670 millions d'euros, et de La Poste, avec une baisse approchant les 400 millions d'euros. S'agit-il d'une tendance de fond ? Si ce n'est pas le cas, comment répondre à cette difficulté, si elle est passagère ?
La valeur des actifs et des plus-values dues à la rotation du portefeuille de la Caisse a beaucoup augmenté. Ainsi, les actifs sous gestion ont progressé de 44 milliards d'euros pour atteindre 288 milliards d'euros fin 2023. Quels sont les ressorts de cette bonne performance ? Peut-on espérer qu'elle se prolonge ?
En 2017, la Caisse s'est engagée à ce que chaque euro placé sur le livret de développement durable et solidaire (LDDS) soit utilisé pour financer la transition écologique et énergétique ; qu'en est-il de cet engagement ?
Enfin, en 2023, la Cour des comptes a souligné un retard en matière de prêts en faveur de la rénovation énergétique et des mobilités durables ; quelles en sont les raisons ? Vous avez évoqué la rénovation des bâtiments publics ; vous serait-il possible de participer au financement de la rénovation de certaines gendarmeries ? Souvent, les gendarmeries situées en milieu rural ne bénéficient pas d'un modèle économique soutenable, comme c'est le cas pour les bailleurs sociaux. La Caisse pourrait être un acteur idéal en la matière.
M. Éric Lombard. - Les résultats sont effectivement en forte baisse pour l'immobilier de bureau : cela touche Icade et, dans nos portefeuilles d'investissement propre, au travail de la filiale CDC Investissement immobilier. Ce secteur est touché par la crise immobilière et la hausse des taux. En outre, du fait du recentrage vers les bureaux situés en centre-ville ou à proximité des transports publics, en lien aussi avec le développement du télétravail, les bureaux plus éloignés ne trouvent plus preneurs et enregistrent des pertes de valeur importantes.
Les crises immobilières sont lentes à se résorber et le moment où le cycle s'inverse est difficile à prévoir. Nous sommes toujours dans une phase d'ajustement à la baisse, qui devrait se poursuivre en 2024. Cependant, nous ne sommes pas loin du creux et l'impact sur nos comptes sera sans doute moindre en 2024 qu'en 2023.
Quant à La Poste, ses difficultés sont de trois ordres. D'abord, elle fait face à des difficultés économiques dans le domaine du colis, qui ont touché la filiale Geopost, notamment parce que cette activité a connu un ralentissement, pour la première fois dans la période récente. Il y a eu une compétition très forte avec l'Allemagne, qui a fait apparaître de mauvais résultats. Ce problème est en train d'être corrigé et les résultats devraient retrouver une trajectoire plus positive.
Ensuite, il faut mentionner les difficultés de La Banque postale, dont les résultats ont tout de même été de bonne facture, grâce à la contribution de CNP Assurances. La hausse des taux s'est traduite par un pincement des marges, notamment dans l'activité du prêt immobilier, ce qui a pesé. Le rétablissement des marges positives devrait se traduire par une amélioration des résultats.
Enfin, nous tentons de trouver des solutions avec les pouvoirs publics à la sous-compensation de 800 millions d'euros des quatre missions de service public de La Poste : le service universel postal, l'aménagement du territoire, la distribution de la presse et l'accessibilité bancaire. La charge de cette sous-compensation est trop élevée pour La Poste et ne lui permettra pas de maintenir une trajectoire de développement autonome si une solution n'est pas trouvée.
S'agissant de la valorisation des actifs, les 288 milliards d'euros cités sont liés, d'une part, à la gestion d'excédents de liquidité des fonds d'épargne - ce qui n'est pas prêté - et, d'autre part, à la gestion des liquidités de la section générale. Les fonds d'épargne représentent 410 milliards d'euros de bilan. Plus de 200 milliards sont prêtés au logement social et aux collectivités locales. Le reste - 210 milliards - est placé utilement sur les marchés. La collecte nette, importante en 2023, alimente ces volumes, pour la partie qui n'est pas prêtée. Nous entrevoyons une baisse depuis le début de l'année 2024. Il faut aussi souligner de très bonnes performances de nos activités de gestion en actions, puisque la CDC a fait mieux que l'indice CAC 40. Pour les gestions obligataires, après une longue période de baisse des taux qui se traduit par une augmentation de la valeur des obligations au portefeuille, la remontée des taux s'est traduite par la passation de provisions, notamment en 2022, et la stabilisation des taux longs suscite de bonnes nouvelles.
Les performances passées ne sont pas gages de performances futures. Pour l'immobilier de bureau, nous avons provisionné de façon prudente. Quant aux marchés d'actions, ils sont très dynamiques, traduisant la bonne santé des entreprises dans lesquelles nous investissons. Cependant, les marchés peuvent être volatils. Sur les taux longs, nous anticipons une certaine stabilité.
L'engagement que nous avons pris pour le LDDS vaut aujourd'hui pour toute la CDC et l'ensemble de ses actions : pas un euro ne doit être investi ou prêté s'il ne contribue pas à la lutte contre le dérèglement climatique ou à la préservation de la biodiversité. Nous nous inscrivons dans une action positive pour nos investissements, qui touche aussi nos investissements anciens. Le rythme de décarbonation de notre portefeuille d'investissement se poursuit à un rythme très rapide.
J'en viens au rapport de la Cour des comptes. Pour la rénovation du logement social, nous sommes en avance puisque seuls 17 % des logements sociaux figurent dans les catégories G et H, alors que cette proportion est de 25 % dans le secteur privé. En matière de rénovation des bâtiments publics, nous faisons des progrès du côté des écoles mais, de façon plus générale, les choses avancent moins vite que nous le souhaitons. Cependant, la décision appartient à l'État ou aux collectivités locales, propriétaires de ces bâtiments. Je signale que l'État, du côté du ministère des finances, nous a ouvert des enveloppes très privilégiées en ce sens.
J'ai parlé à plusieurs reprises des gendarmeries avec le ministre de l'intérieur. Pour que nous intervenions, il faut un modèle économique reposant sur un loyer susceptible d'équilibrer le coût de construction, de rénovation et de développement, même si nos exigences de rentabilité sont bien plus modestes que celles des acteurs privés. Nous avons pu financer les rénovations de certaines gendarmeries mais il nous faut passer un accord avec le preneur, le ministère de l'intérieur. Certains de nos projets avancent. Je partage votre préoccupation et la présence des gendarmeries sur l'ensemble des territoires constitue un élément important, en matière de sécurité et d'équilibre. Quand nous pouvons inciter les collectivités locales à mettre à disposition un bâtiment existant dans des conditions avantageuses, nous le faisons.
M. Antoine Lefèvre. - L'article 1er du projet de loi relatif au développement de l'offre de logements abordables prévoit une dérogation au dispositif de la loi du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains (SRU). Il s'agit d'autoriser les communes n'ayant pas atteint le taux de logements sociaux prévus par leur contrat de mixité sociale à combler leurs carences en construisant des logements intermédiaires. Vous avez rappelé votre engagement actif dans la construction de cette catégorie de logements dont les critères d'éligibilité sont caractérisés par des niveaux de revenus supérieurs à ceux de la population vivant en HLM. Si l'Union sociale pour l'habitat (USH) a récemment fait part de ses réserves sur cette disposition, les élus locaux seront sensibles à cet assouplissement des taux fixés par la loi SRU, surtout à l'heure où le ZAN ajoute de nouvelles contraintes. Cependant, le fait de privilégier le financement de logements intermédiaires plutôt que l'intensification de la construction des logements sociaux ne représente-t-il pas un pari risqué pour la résorption de la crise du logement et pour la mixité sociale ?
M. Jean-François Rapin. - Au nom de la commission des finances et avec un sénateur de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable, je mène un travail sur les inondations en France. Dans le cadre de leur reconstruction, certaines toutes petites communes doivent financer des travaux énormes, quelques fois sans ressources immédiates, avec des promesses de soutien financier et de subventions. L'État explique que son rôle n'est pas de faire des avances de trésorerie ou des avances remboursables pour pouvoir financer ces travaux en urgence et qu'il n'a pas les outils pour le faire. La CDC pourrait-elle procéder à ces avances remboursables ? Que peut faire une commune face à des dégâts s'élevant à 1 million d'euros et touchant ses structures communales, quand elle n'a que 10 000 euros de budget d'investissement et que même les banques prêtant traditionnellement aux collectivités refusent de le faire ?
Il est bon de revenir à la question des marchés financiers européens. En effet, ce chantier a été oublié pendant quelques années. Je vous remercie pour vos propos sur ce sujet important pour l'avenir de la construction européenne et de nos banques européennes.
M. Marc Laménie. - Quelles sont les perspectives d'engagement du groupe concernant le financement par les prêts aux petites collectivités territoriales ? Les dossiers sont souvent compliqués à remplir et il faut travailler à les simplifier.
M. Arnaud Bazin. - Nous avons mentionné la question de la dépréciation de l'immobilier de bureau, actuellement en crise pour diverses raisons structurelles. Le chiffre de 5 millions de mètres carrés vacants en Île-de-France est évoqué et ce sera peut-être le double ou le triple à terme. Cependant, j'avais cru comprendre que l'immobilier de bureau de la Caisse était plutôt situé en zone centrale, qu'on pourrait parfois qualifier d'immobilier de prestige, et donc moins sujet à cet aspect structurel du problème. S'agit-il d'une affaire plus conjoncturelle ?
Vous avez évoqué la possibilité de construire des logements dans les entrées de ville, en restructurant des zones commerciales. Il s'agit d'une piste intéressante et les maires pourront s'approprier le sujet. De même que la transformation de bureaux en logements entraîne des pertes de valeur et une dépréciation des biens pour les propriétaires, les opérations de restructuration d'entrées de ville, qui risquent d'être lourdes, reposent-elles aussi sur une reconnaissance de perte de valeur pour les propriétaires commerciaux ?
Enfin, vous avez parlé des investissements colossaux à prévoir pour RTE. Or nous ne disposons pas de loi de programmation de l'énergie qui permette d'avoir une vision claire de la répartition entre le nucléaire et les EnR. Pourtant, le dimensionnement et la précision du déploiement du réseau dépendront des choix qui seront faits ; comment affronter cette difficulté dans vos prévisions d'investissement ?
M. Didier Rambaud. - Les stations de moyenne montagne, qui ont vécu au cours des cinquante dernières années grâce à « l'or blanc », connaissent actuellement un tournant du fait du réchauffement climatique, et certaines sont en train de devenir des friches. La diversification est désormais nécessaire : il faut passer du tout-ski au tourisme quatre saisons, ce qui nécessite de nouveaux équipements, donc des investissements. En Isère, des stations sont prêtes à engager cette diversification, comme celle de l'Alpe du Grand Serre, ou d'autres encore dans le massif du Vercors.
Quelle est la position de la CDC sur l'avenir de ces stations ? Pouvez-vous donner des exemples concrets de son engagement ?
Mme Vanina Paoli-Gagin. - Je ne crois pas que le financement de l'immobilier, notamment universitaire, soit couvert par le champ de la rénovation énergétique que vous avez indiqué. Plus de 7 milliards d'euros sont nécessaires pour rénover le bâti universitaire, ce qui est un impératif au regard des coûts de fonctionnement énergétique.
Dans le domaine des mobilités, seriez-vous prêt à soutenir, sous forme de garantie, le constructeur Safra ? Cette société installée dans le Tarn a mis au point, dans une approche d'économie circulaire, des solutions de rétrofit d'autocars en hydrogène qui intéressent les Indiens et les Chinois, et elle a besoin de garanties pour poursuivre son développement. Cela relève-t-il, selon vous, de la souveraineté industrielle ?
La surépargne des Français peut-elle servir à financer les entreprises de la base industrielle et technologique de défense (BITD) ?
Vous avez évoqué les interventions en fonds propres : la CDC peut-elle avoir un rôle de co-investisseur pour la création de fonds d'investissement structurels dédiés aux infrastructures énergétiques et à la transition écologique ?
M. Grégory Blanc. - Alors que nous devons nous préparer à un réchauffement de 4 degrés, de quel instrument financier disposons-nous pour adapter les bâtiments et les infrastructures, et comment celui-ci peut-il être modernisé, voire associé, à d'autres outils ? La capacité financière des collectivités ne suffira pas. Évoquant le sujet du foncier et la nécessité d'avoir plusieurs fonctions sur un même espace, vous avez cité les entrées de ville et la reconquête des friches commerciales ; il faudra faire évoluer la loi et le règlement en ce sens, ce qui revient aux parlementaires.
Dans les territoires, l'équation économique est parfois complexe, et nous devons inventer de nouveaux instruments. Quelles sont vos réflexions sur les prises de participation de longue durée ? Lorsque les conditions ne sont pas toutes au rendez-vous mais que le sujet est d'intérêt général, comment faire aboutir certaines opérations ?
Les niveaux d'eau vont baisser considérablement. À l'horizon 2050, en été, l'étiage de la Loire sera 50 % moindre. Il faudra donc conserver l'eau tombée lors des saisons humides, créer des retenues collinaires, mais pas sur les bassins versants, et accompagner les agences de l'eau en vue d'élaborer un plan global. Où en sont vos échanges avec ces agences ?
M. Hervé Maurey. - Ma question porte sur les comptes et les contrats d'assurance vie en déshérence. Ces fonds inactifs sont transmis à la CDC, qui a l'obligation de les transférer à l'État au bout d'une vingtaine d'années s'ils n'ont pas été réclamés. Quel est le montant de ces fonds inactifs détenus par la Caisse ? On parle de 5 ou de 7 milliards d'euros... Qu'en est-il des flux ? Quelles sommes récupérez-vous chaque année et combien reversez-vous aux ayants droit qui se manifestent sur la plateforme créée à cet effet ? La loi du 13 juin 2014 relative aux comptes bancaires inactifs et aux contrats d'assurance vie en déshérence, dite loi Eckert, prévoit qu'un rapport annuel soit transmis au Parlement ; à ma connaissance, tel n'est pas le cas.
M. Stéphane Sautarel. - Des projets, des montages ou des outils spécifiques dédiés à l'immobilier industriel sont-ils envisagés ? Qui dit relocalisation d'activité dit implantation. Or les montages qui existaient par le passé ne sont plus adaptés, notamment dans les territoires ruraux où la valeur du foncier est plus faible.
La CDC accorde-t-elle des prêts à très long terme pour le financement du renouvellement et de l'optimisation des réseaux d'eau potable ? Après la sortie du financement par subvention assuré par les agences de l'eau, ce type de financement sera sans doute le seul moyen de rendre ces investissements soutenables. Les collectivités répondent-elles favorablement à vos offres ?
S'agissant de la situation du groupe La Poste, au-delà de la sous-compensation de 800 millions d'euros pour ses obligations de service public, faut-il interroger le périmètre et la nature de ce service public ?
M. Christian Bilhac. - Vous avez évoqué la souveraineté industrielle : on a vu que l'arrêt des importations lié à la crise de la covid avait bloqué totalement notre industrie. Sur le plan financier, comment être souverain avec 3 000 milliards d'euros de dettes ?
Vous n'avez pas abordé le sujet de la souveraineté dans le domaine de la santé. On constate sur l'ensemble du territoire des pénuries de médicaments - antibiotiques, anti-inflammatoires, traitements contre le diabète ou utilisés dans le cadre de chimiothérapies, etc. Quelle est votre position sur ce sujet ?
Vos résultats nets pour 2023 - presque 4 milliards d'euros - sont flatteurs, mais vous reversez 2,5 milliards dans le tonneau des Danaïdes du budget de l'État. Ne pourraient-ils pas être utilisés pour rénover les gendarmeries, pour proposer aux communes des avances remboursables ou pour moderniser les réseaux d'eau potable ?
Mme Florence Blatrix Contat. - La mise en place de la directive MiFID 2 (Markets In Financial Instruments Directive 2) relative à la recherche financière s'est traduite par la réduction de la couverture des petites et moyennes entreprises (PME) européennes. Si la recherche de transparence est louable, les effets de bord sont là. Le Listing Act adopté en 2024 prévoit de revitaliser ce marché, opérant ainsi un retour en arrière. Quelle est votre position sur le soutien de la recherche financière via un dispositif public-privé impliquant éventuellement la CDC ?
Mme Isabelle Briquet. - Une source importante de besoins de financement concerne les réseaux d'eau et d'assainissement, alors que le transfert de ces compétences aux établissement public de coopération intercommunale (EPCI) sera effectif au 1er janvier 2026. L'état des réseaux, très contrasté selon les communes, risque de mettre à mal les finances des intercommunalités. Il est arrivé que la CDC propose des prêts à très long terme à des taux défiant toute concurrence ; pourrait-elle le faire afin de financer l'entretien des réseaux d'eau ?
M. Éric Bocquet. - Évoquant la souveraineté financière, qui relève de vos missions, vous avez indiqué que la CDC avait désormais des parts dans Euronext et Euroclear, dans le cadre du marché unique des capitaux. Quel est l'intérêt stratégique de cette démarche ?
Depuis le Brexit, on parle beaucoup de l'attractivité financière de la France, et notamment de la place financière de Paris, qui est en concurrence sévère avec d'autres places européennes - Amsterdam, Francfort, Dublin, notamment. N'est-il pas paradoxal de poursuivre l'objectif d'une plus grande compétitivité financière de l'Europe comme vous le défendez et, en même temps, de jouer la carte de l'attractivité financière de la France ? Comment comptez-vous éviter cet écueil ?
Quel est votre avis sur l'idée de puiser dans les dépôts du livret A pour financer l'économie de la défense, alors même que le pays connaît une grave crise du logement ?
Interrogé par Challenges, en prélude au 10e sommet de l'économie organisé par ce magazine, en novembre 2023, vous avez notamment dit : « Les salariés ne doivent pas regarder passer le train des profits » : c'est magnifique. « Il faut que les salariés soient incités à devenir davantage actionnaires : [...] ils peuvent ainsi profiter de la création de valeur [...] ». Et : « L'objectif est qu'une part importante de la valeur aille aux salariés, et qu'ils ne regardent pas le train des profits passer. » Je tiens, au nom de mon groupe, à saluer ces propos assez rares dans le monde de la finance.
M. Jean-Marie Mizzon. - Quelque 2,5 milliards d'euros par an seront fléchés par la CDC sur la rénovation des bâtiments scolaires, qui est l'une des priorités que vous avez citées. La mission d'information sénatoriale sur le bâti scolaire à l'épreuve de la transition écologique avait chiffré à 55 milliards d'euros le premier niveau à atteindre en 2030, aux termes du décret de rénovation tertiaire, ce qui représente 40 % d'économies par rapport à 2010 - les deux autres niveaux à atteindre seront de 50 %, puis en 2050 de 60 % d'économies. Cette estimation ne tenait pas compte des travaux connexes, notamment de la présence d'amiante sur les bâtiments existants, de la mise en accessibilité des bâtiments ou de certaines mises aux normes. Le fonds vert est fortement sollicité pour réaliser ces travaux. Si les 2,5 milliards d'euros que vous évoquiez s'avéraient être insuffisants, envisagez-vous d'augmenter ce soutien financier ?
M. Éric Lombard. - Monsieur Lefèvre, vous m'avez interrogé sur le logement abordable et la loi SRU. La première des priorités de la CDC est le logement social, qui se taille la part du lion dans les chiffres que je vous ai indiqués. Nous sommes convaincus de la nécessité de mobiliser les collectivités locales et les acteurs concernés pour en construire.
Le Gouvernement a souhaité donner de la flexibilité en ce domaine en accordant une place accrue au logement intermédiaire, qui a pour vertu d'être abordable et offre une souplesse importante, notamment lorsqu'il s'agit de loger les salariés des entreprises et les fonctionnaires de nos collectivités, du système hospitalier ou de l'État. Le logement intermédiaire fait effectivement l'objet d'une contractualisation avec un opérateur, qu'il s'agisse d'une entreprise ou d'une collectivité publique.
Pour autant, la priorité de la Caisse demeure le financement du logement social. Je rappelle à cet égard qu'indépendamment des souplesses autorisées par les textes, ce sont les élus qui, in fine, décident des programmes d'aménagement.
Monsieur Rapin, la Banque des territoires prête à toutes les collectivités locales, quelle que soit leur taille, sans montant minimum de prêt : cela peut être quelques milliers d'euros pour une petite collectivité. En revanche, nous sommes attentifs à ce que les prêts puissent être remboursés, puisqu'ils sont financés par l'épargne des Français. Nous avons le souci de trouver un équilibre d'ensemble.
Vous faites référence à une collectivité qui devrait toucher une subvention d'État tardant à arriver. Nous allons regarder s'il est possible, dans ce cas, d'envisager une avance. Quand une collectivité est touchée par un drame, le rôle de la Caisse des dépôts est de tout faire pour lui apporter de l'aide.
J'en viens à l'Union européenne et à l'union des marchés de capitaux, avec, tout d'abord, un rappel historique.
Euronext, qui a été constituée à la fin du siècle dernier et mise en bourse en 2000, fut un temps une filiale de la Bourse de New York. C'était, de mon point de vue, une mauvaise période pour la société, la France et l'Europe. Quand la Bourse de New York a revendu Euronext, le nouveau directeur général Stéphane Boujnah a eu une attitude très offensive et nous avons jugé utile de sécuriser son capital pour que cet incident ne se reproduise pas : les deux principaux actionnaires sont la Caisse des dépôts italienne et la Caisse des dépôts française, aux côtés d'acteurs privés et publics. En ce qui concerne les infrastructures d'intérêt général - une bourse en est une -, l'ancrage européen me paraît important, car l'Europe est la bonne échelle pour le marché financier.
Idem pour Euroclear, qui est notamment chargée de la conservation des obligations représentant la dette des États. Lorsque nous sommes intervenus sur cette société, elle allait être vendue à un fonds d'investissement américain. De nouveau, nous avons pensé que cela n'était pas conforme à l'intérêt général, et nous avons constitué avec nos homologues belges un tour de table permettant de sécuriser l'ancrage européen d'Euroclear.
Ces investissements sont rentables, les entreprises étant bien gérées. Par ailleurs, je signale qu'Euroclear représente un enjeu de souveraineté important. L'essentiel des fonds russes sous sanctions y sont détenus : on évoque un montant de 300 milliards d'euros. La Commission européenne a récemment pris la décision d'allouer le produit de ces fonds à la reconstruction future de l'Ukraine.
Monsieur Laménie, nous sommes très engagés sur la question des collectivités locales. Des plans ont été mis en place : « Petites villes de demain », France Ruralités. Il me semble avant tout important d'apporter un soutien en matière d'ingénierie aux collectivités de petite taille. Celles-ci n'ont pas forcément les équipes techniques nécessaires. Nous mettons donc à leur disposition des sachants pour préparer la décision, les appels d'offres et le lancement des travaux. La Caisse a, par ailleurs, installé une antenne qui fonctionne de façon permanente, Rural Consult et qui est à leur disposition pour un avis et une sécurisation en cas de question. La première étape passe donc largement par des subventions. S'agissant de « Petites villes de demain », le montant de subventions pour l'ingénierie qui sera versé à la fin du programme par la Caisse des dépôts représente 200 millions d'euros, ce qui est un montant important.
Ensuite, tous les financements de la Caisse peuvent être utilisés pour les projets, lesquels peuvent - je le redis - être de petite taille. Nous souhaitons renforcer notre présence dans les zones rurales, moins couvertes par les grands établissements, où notre rôle est essentiel.
Monsieur Bazin, je vous remercie d'avoir rappelé que les investissements de la Caisse étaient avisés. Notre portefeuille dans ce domaine est sain. La dépréciation de l'immobilier de bureau est un phénomène conjoncturel. Beaucoup de ces bureaux sont toujours loués : ils reprendront de la valeur dans le cours du cycle. Il est un peu tôt pour en parler, mais il y a un ou deux actifs pour lesquels nous entrons dans la période des cessions parce qu'on pense que la capacité de retournement est modeste.
S'agissant des entrées de ville, il faut le temps que les détenteurs réalisent que leurs actifs ont perdu de la valeur. Par chance, les sociétés françaises de grande distribution sont des acteurs réalistes : elles ont lancé des programmes qui prennent en compte l'ajustement de valeur et nous permettent de faire des transactions. Il arrive d'ailleurs qu'il faille faire un effort supplémentaire. Comme l'a dit M. Blanc, nous disposons d'outils, en liaison avec les collectivités locales. Les établissements publics fonciers sont purement publics, mais je pense aussi aux sociétés d'économie mixte (SEM), dont nous sommes les partenaires et qui peuvent éventuellement faire des opérations de portage immobilier. Nous avons également mis en place plus de 80 foncières de commerce au moment de la crise de la covid, de façon à permettre les ajustements de valeur.
En matière de transport d'énergie, il est effectivement important avant de tirer les câbles de vérifier qu'ils partent des lieux où l'on produit de l'électricité et qu'ils arrivent vers des endroits où l'on en consomme ! C'est ce qui explique le développement de zones comme Dunkerque. J'étais vendredi dans l'Indre, à Châteauroux, qui a des ambitions industrielles, mais il faut, et c'est prévu, que davantage d'électricité y parvienne. Nous allons gérer cette question au fur et à mesure - c'est l'avantage d'avoir un plan sur dix ans -, dans le cadre des décisions prises par l'État, afin de connecter les centrales nucléaires.
Monsieur Rambaud, nous sommes engagés sur la question des stations de montagne, via notre filiale la Compagnie des Alpes, qui gère des délégations de service public importantes, plutôt dans les stations de haute montagne. Les stations de moyenne montagne doivent devenir des stations de tourisme quatre saisons. Même sans neige, elles sont des endroits magnifiques où différentes activités sportives et touristiques peuvent être pratiquées. Nos financements sont disponibles pour les collectivités locales, en liaison souvent avec les départements qui peuvent soutenir les projets. Le réalisme doit nourrir le dialogue que nous avons avec ces collectivités.
Madame Paoli-Gagin, je suis tout à fait d'accord avec vous ! Nous proposons des financements très intéressants en termes de coût pour la rénovation thermique des universités. L'Université de Bordeaux en est un magnifique exemple. En revanche, nous sommes confrontés à une difficulté liée à l'organisation des universités. Pour celles qui ont choisi la dévolution, il faut des équipes prêtes à ouvrir le dialogue. Une fois ce dialogue ouvert, les financements sont mis en place. Je souhaiterais que l'on puisse faire plus.
Je ne connais pas le dossier Safra. La garantie n'est pas ce que Bpifrance, La Banque postale ou nous-mêmes pratiquons le plus. En revanche, s'il y a un projet industriel, nous pouvons intervenir soit en capital - au vu du sujet, cela concernera davantage la Banque des territoires ou Bpifrance -, soit en financement.
Plusieurs questions ont porté sur la BITD. Nous gérons 59,5 % des fonds du livret A et du LDDS, et 50 % des fonds du livret d'épargne populaire (LEP) ; le reste est conservé par les banques. Il est envisagé, notamment par des dispositifs votés au Parlement, d'orienter certains de ces fonds vers la BITD et cela concerne ce que détiennent les banques. Les fonds d'épargne ne prêtent pas aux entreprises : c'est le rôle de Bpifrance et de La Banque postale, lesquelles financent les industries de défense. Le livret A peut être conduit à financer les industries de défense en étant actionnaire, mais compte tenu du profil de risque des fonds d'épargne, ce sont plutôt à travers de très grandes sociétés qui sont concernées. S'il faut soutenir le tissu français de PME, et nous souhaitons le faire de façon beaucoup plus active, cela passera plutôt par la Banque des territoires ou les filiales bancaires de la Caisse. Cela s'explique non pas pour des raisons de principe - les fonds d'épargne peuvent tout à fait financer les industries de défense -, mais pour des raisons de typologie de risques. Le risque PME n'a pas sa place dans les fonds d'épargne, et notre mandat ne nous permet d'ailleurs pas de l'assurer.
En ce qui concerne l'adaptation des infrastructures à la transition énergétique, nous sommes souvent co-investisseurs de fonds pilotés soit par des entreprises privées, soit par des entreprises publiques.
Monsieur Blanc, vous avez évoqué le réchauffement du monde de 4 degrés. De nombreuses collectivités locales gardent une capacité d'endettement non utilisée. On peut, dans des limites raisonnables sur lesquelles nous avons des marges de manoeuvre, transférer la dette écologique vers la dette financière. C'est ce que nous proposons aux collectivités, avec des financements très longs : jusqu'à 80 ans pour du foncier ou 60 ans sur les aqua prêts. On perd 25 % de l'eau des réseaux : rénover ces réseaux, qui ont une durée de vie de 60 ans, est immédiatement rentable. C'est, me semble-t-il, une des urgences pour les collectivités locales.
Concernant le foncier d'entrée de ville, je ne suis pas sûr que le sujet soit réglementaire. Les plans locaux d'urbanisme (PLU) et les plans d'aménagement peuvent changer la destination d'une partie du territoire des villes. Nous avons le véhicule approprié : les SEM, avec nos partenaires.
En ce qui concerne l'eau, nous sommes confrontés à un sujet de dévolution de nos interlocuteurs. Une partie de la compétence est en train d'être transférée vers les EPCI, mais les agences de bassin jouent un rôle essentiel. Je ne parle jamais du millefeuille territorial parce que, étant souvent sur le terrain, je vois l'utilité de chaque strate de collectivité et je note que cela fonctionne très bien dans beaucoup de territoires. En revanche, pour la gestion de l'eau, nous ne sommes pas à l'optimum. Une meilleure coordination entre les EPCI, les régions et les agences de bassin permettrait d'accélérer l'ensemble des chantiers, lesquels sont massifs, qu'il s'agisse du petit ou du grand cycle de l'eau, ou encore de la question des retenues. Ainsi, dans les territoires de montagne, il faut à tout prix ralentir l'écoulement de l'eau, ne serait-ce que pour réguler ce qui arrive dans les vallées.
Monsieur Maurey, nous avons comme chaque année envoyé notre rapport annuel au Président du Sénat. Quelques chiffres : le montant déposé est de 8,4 milliards d'euros, avec 12,3 millions de comptes et de contrats pour un montant moyen de 685 euros. Depuis l'ouverture du site Ciclade, 15 millions de personnes ont recherché un compte. Nous avons reçu 524 000 demandes de restitution, et avons restitué, depuis la mise en place de la loi Eckert jusqu'au 31 décembre 2023, près de 840 millions d'euros. Le dispositif fonctionne très bien. Nous avons versé, au titre de la déchéance, 460 millions d'euros à l'État. Nous vous communiquerons le rapport.
Monsieur Sautarel, nous sommes très actifs en ce qui concerne l'immobilier industriel, en partage avec Bpifrance. La partie « foncier » est gérée par la Caisse, avec les collectivités locales. Nous achetons le foncier, seuls ou avec les collectivités locales, et nous l'aménageons, selon nos propres conditions de rentabilité, qui sont assez agressives. Nous participons ainsi à l'industrialisation du pays.
Le taux des aqua prêts est indexé sur celui du livret A auquel s'ajoute 0,40 % et la durée d'amortissement peut aller jusqu'à 60 ans ; il s'agit de conditions assez concessionnelles.
Concernant La Poste, vous avez demandé s'il fallait réinterroger ses missions de service public. La question risque de vous revenir et il est un peu tôt pour la poser. Je rappellerai que nous sommes particulièrement attachés à la présence territoriale.
Monsieur Bilhac, nous reversons 2,5 milliards d'euros à l'État par différents biais : le versement d'un équivalent impôt sur les sociétés par l'établissement public, celui de l'excédent des fonds d'épargne - l'État est ayant droit des fonds d'épargne qu'il garantit, donc ce versement est logique - et celui de la moitié des résultats consolidés, selon un accord existant depuis de nombreuses années. Savoir ce que l'État fait de cette somme dépasse ma compétence.
Madame Blatrix Contat, la directive MiFID 2 ne permet plus aux acteurs financiers de financer la recherche, ce qui devait garantir l'indépendance de cette dernière - mais il y a tellement d'indépendance qu'il n'y a plus de recherche. Cela explique en partie les difficultés du marché des PME cotées puisque certains investisseurs, en l'absence d'indications, préfèrent se tourner vers des entreprises de grande taille. Nous travaillons sur ce sujet et tentons de trouver des formes de mutualisation, considérant que c'est plutôt aux acteurs de marché de financer la recherche. Nous entretenons un dialogue continu avec Paris Europlace pour tenter d'identifier d'autres solutions. Je ne suis pas sûr qu'une recherche financée par la Caisse serait considérée par les acteurs comme indépendante. Nous n'avons pas abouti sur ce dossier, présent sur mon bureau depuis mon arrivée.
Sur l'eau, madame Briquet, nous avons signé 160 millions d'euros de prêts depuis le début de l'année et ce chiffre s'élève à 1,8 milliard d'euros sur cinq ans. Nous sommes de plus en plus actifs depuis que ces aqua prêts ont été annoncés par Édouard Philippe lorsqu'il était premier ministre.
J'ai répondu à la question de M. Bocquet sur l'utilisation des fonds du livret A pour financer les industries de défense. Je me permets de noter au passage que je serais heureux qu'une partie des fonds investis finance davantage le logement social, les collectivités locales et les réseaux d'eau.
Monsieur Mizzon, concernant les bâtiments scolaires, notre rythme de collecte - plus de 20 milliards d'euros depuis le début de l'année - nous offre des marges de manoeuvre pour mener nos grandes politiques, même quand les enveloppes prévues sont dépassées.
Cette audition a fait d'une captation vidéo qui est disponible sur le site du Sénat.
Personnels administratifs du ministère de l'Éducation nationale - Contrôle budgétaire - Communication
M. Claude Raynal, président. - Nous entendons maintenant une communication de notre collègue Olivier Paccaud, rapporteur spécial de la mission « Enseignement scolaire », sur les personnels administratifs du ministère de l'éducation nationale.
M. Olivier Paccaud, rapporteur spécial. - Au cours de l'examen du dernier projet de loi de finances, vous avez été nombreux à m'interroger sur l'administration de l'éducation nationale. Afin de pouvoir répondre à vos questions sur ce sujet important, j'ai souhaité consacrer mon travail de contrôle budgétaire aux personnels administratifs du ministère de l'éducation nationale.
Le premier constat que je dresse est le suivant : cette administration est peu ou mal connue. Elle est mal connue des élèves et des familles, qui sont peu en contact avec elle, mais parfois aussi des enseignants, qui n'ont de contacts fréquents qu'avec une administration : celle de leur établissement scolaire. Depuis vingt-cinq ans, aucun travail approfondi n'a été produit sur la question : ni rapport parlementaire ni enquête, qu'elle provienne de la Cour des comptes ou d'une inspection générale. Le dernier écrit d'importance consacré à l'administration de l'éducation nationale figure dans le rapport d'une commission d'enquête sénatoriale présidée par Adrien Gouteyron, en 1999. Le rapport que je vous présente fera donc, je l'espère, oeuvre utile.
Il faut d'abord savoir qui compose l'administration et garder en tête la distinction entre personnels administratifs, personnels n'étant pas devant élèves et personnels non-enseignants. L'essentiel des 300 000 personnels non-enseignants sont devant élèves. C'est le cas des personnels de vie scolaire, notamment des accompagnants d'élèves en situation de handicap (AESH) et des assistants d'éducation (AED). Les personnels administratifs proprement dits ne représentent qu'une part très marginale des personnels du ministère, 4,3 %, soit environ 51 000 emplois. C'est sur eux que se concentre mon rapport. S'ils sont peu nombreux et souvent invisibles, l'éducation nationale ne fonctionnerait pas sans eux.
Ensuite, il faut savoir si ces personnels sont trop nombreux au regard des missions qu'ils doivent accomplir. Il convient de noter que les effectifs des personnels administratifs ont légèrement diminué depuis 2015 et qu'ils ont baissé de 21 % depuis 2007. On constate donc une chute d'un cinquième des effectifs en quinze ans, qui sont passés de 65 000 à 51 000. La hausse du nombre de personnels non-enseignants à laquelle la presse a fait référence est liée quasiment exclusivement à la mise en oeuvre de l'école inclusive. En effet, le nombre d'AESH a triplé depuis 2015 et s'élève désormais à plus de 120 000 emplois.
Pour évaluer la taille de l'administration de l'éducation nationale, la comparaison avec les autres ministères est frappante. La direction du budget a établi un ratio du nombre de gérants pour le nombre de gérés, qui est de six pour mille à l'éducation nationale. Il est cinq fois plus élevé au ministère des armées et trois fois plus au ministère de l'économie. Le nombre de personnels administratifs de l'éducation nationale est donc loin d'être surdimensionné. De plus, il faut prendre en compte l'ampleur des missions à accomplir : gérer 1,2 million de personnels et permettre l'accès à l'éducation pour 12,7 millions d'élèves.
L'administration de l'éducation nationale est peu nombreuse, mais aussi inégalement répartie sur le territoire national, le ratio d'administration variant de un à trois selon les académies. Des redéploiements de personnels sont parfois nécessaires pour limiter ces inégalités territoriales.
L'administration de l'éducation nationale est enfin peu qualifiée. Ainsi, les personnels administratifs comptent 40 % de fonctionnaires de catégorie C, contre 18 % en moyenne dans la fonction publique d'État. Les missions accomplies par les personnels administratifs sont pourtant de plus en plus complexes, ce qui génère des frustrations et un sentiment d'injustice, alors même qu'ils accomplissent des tâches ne relevant pas de leur catégorie statutaire.
Vous me permettrez également d'évoquer le cas particulier des écoles du premier degré, dans lesquelles aucun personnel administratif n'est présent. Les tâches administratives y sont accomplies intégralement par les directeurs d'école, qui bénéficient de peu de décharges dans les petites écoles. L'ampleur des tâches ne relevant pas de la mission pédagogique du directeur, mais simplement de la gestion logistique de l'établissement, engendre un mal-être bien compréhensible. Le directeur d'école doit pouvoir disposer de temps pour piloter son école d'un point de vue pédagogique. Une réflexion devrait être engagée pour mutualiser certaines tâches administratives au sein des directions départementales et mobiliser des inspecteurs de l'éducation nationale.
J'en viens aux enjeux budgétaires. Évidemment, dès qu'il s'agit de l'éducation nationale, les montants en valeur absolue sont impressionnants. Pour 2024, le coût annuel des personnels administratifs de l'éducation nationale s'élève à 2,745 milliards d'euros. Cependant, ce montant ne représente que 3,3 % des dépenses totales de la mission « Enseignement scolaire » et 3,5 % des dépenses de personnel. À titre de comparaison, les rémunérations des AESH devraient coûter près de 5,5 milliards d'euros en 2025.
Depuis la rentrée 2020, les moyens budgétaires inscrits en loi de finances ne prévoient aucune mesure d'emploi pour les personnels administratifs, de sorte que les nouveaux établissements scolaires ne sont pourvus que par redéploiement.
Si les crédits dédiés ont augmenté de 160 millions d'euros entre 2023 et 2024, cette hausse est due pour moitié à des mesures de revalorisation concernant l'ensemble de la fonction publique, notamment aux deux augmentations du point d'indice. Cette hausse est également liée à une politique de revalorisation salariale de ces personnels, qui paraissait nécessaire. Le ministère de l'éducation nationale a admis être « très en retard » par rapport à la moyenne des administrations pour la rémunération de ses personnels administratifs. En moyenne, ces derniers sont payés 360 euros bruts de moins par mois que les agents d'autres administrations. La différence atteint 410 euros bruts par mois pour les personnels de catégorie B.
Cet écart est le résultat d'une sédimentation historique et a commencé à se résorber. Le ministère a mis en place une politique de convergence indemnitaire, financée à hauteur de 57 millions d'euros. Cette mesure aura permis d'augmenter en moyenne les agents de catégorie A de 3 000 euros annuels et celle des catégories B de 2 000 euros. Pour les agents de catégorie C, cette hausse aura entraîné un gain de rémunération de 56 euros par mois, soit 675 euros annuels.
En outre, les grilles de carrière sont très plates : il faut 19 ans d'ancienneté à un agent de catégorie C pour voir sa rémunération brute mensuelle augmenter de 100 euros par rapport à celle qu'il obtenait en début de carrière.
Le ministère a également mis en place un plan de requalification pour la période 2021-2026. L'objectif de ce plan est de réduire de neuf points la proportion d'agents de catégorie C sur cinq ans, ce qui permettra de reconnaître les compétences de ces personnels.
Il n'en demeure pas moins que l'objectif de rattrapage entre le personnel du ministère de l'éducation nationale et les autres ministères est loin d'être atteint et que ce décalage entraîne des difficultés de recrutement. Les inscriptions aux concours administratifs du ministère de l'éducation nationale ont significativement diminué entre les sessions 2018 et 2023, baissant de 35 % en cinq ans. Cette baisse doit également être reliée aux conditions de travail de ces personnels.
Les missions des personnels administratifs sont de plus en plus complexes et diversifiées. Le coeur du métier des personnels administratifs se transforme progressivement, même si les effets concrets de cette réorientation des missions tardent à être perçus par les autres personnels de l'éducation nationale. De plus, de récents développements informatiques ont représenté des sources de frustrations très importantes pour ces personnels. Ainsi, la satisfaction au travail des personnels administratifs de l'éducation nationale est inférieure d'un point par rapport à la moyenne des actifs français. Un meilleur accompagnement doit être assuré par le ministère, qui doit notamment accentuer sa stratégie de conduite du changement.
J'en viens enfin à la question du temps de travail des personnels administratifs de l'éducation nationale, qui a pu faire l'objet de controverses. Il convient de noter que le régime de temps de travail des personnels administratifs est identique à celui des autres personnels de l'éducation nationale. Il est conçu pour adapter le régime légal des 1 607 heures de travail annuelles aux contraintes spécifiques du calendrier scolaire. Les personnels administratifs doivent réaliser davantage d'heures de travail en période scolaire que pendant les congés.
Toutefois, une circulaire de 2002 permet aux personnels de déroger à la règle des 1 607 heures annuelles, notamment en comptant les jours fériés suivis ou précédés de jours travaillés comme des jours de travail. Ces dispositions sont obsolètes, fragiles juridiquement et doivent être abrogées pour aligner l'ensemble du cadre juridique du temps de travail des personnels administratifs sur celui du reste de la population.
Je signalerai toutefois que l'ensemble des personnes que j'ai entendues à ce sujet, au ministère et dans les établissements, ont estimé que les personnels administratifs réalisaient effectivement 1 607 heures de travail annuelles. L'abrogation du cadre juridique obsolète ne permettra pas de diminuer le nombre de personnels administratifs.
Le constat était sans doute un peu long, mais il était nécessaire de présenter ces personnels dans le détail avant d'aborder les recommandations découlant de mes travaux. Celles-ci sont au nombre de dix et je ne les citerai pas toutes. Certaines sont techniques, comme la recommandation, tenant à l'information du Parlement, qui vise à inclure un suivi de ces personnels dans les documents budgétaires. D'autres recommandations correspondent à des cas rencontrés sur le terrain, lors des deux déplacements que j'ai effectués à Créteil et dans l'académie de Nancy-Metz. À titre d'exemple, des missions assurées bénévolement par les personnels administratifs des établissements auraient pu donner lieu à une rémunération supplémentaire, au titre du pacte enseignant mis en place à la rentrée 2023. Or le pacte est réservé aux équipes éducatives et reste inaccessible aux personnels administratifs. Si un agent administratif réalise une mission pouvant être rémunérée au titre du pacte, il serait souhaitable qu'il puisse bénéficier des mêmes avantages que les enseignants. Il s'agit d'une mesure de justice, qui porte sur des cas marginaux. Nous devons également conduire une réflexion sur la place de l'administration dans le premier degré, en apportant un soutien administratif aux directeurs d'école, afin de leur permettre de remplir leur mission de pilotage pédagogique.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Sur cette dernière question, pour bien évaluer les enjeux, il faudrait comparer les charges de travail administratif dans une école de 300 élèves et dans un petit collège situé en territoire rural, qui n'accueille que 200 élèves. Le second bénéficie d'un appui administratif, mais non la première, ce qui pose question. Il faudrait déterminer si un modèle est plus performant que l'autre.
Le rapport permet de mesurer les écarts qui demeurent entre les académies en matière de nombre de personnels administratifs. On constate un ratio de un à trois entre académies les mieux et les moins bien dotées, ce qui pourrait certes être pire, mais dont nous ne pouvons nous satisfaire.
En matière de qualification et de rémunération, nous apprenons que 40 % de ces personnels administratifs sont des agents de catégorie C et qu'il peut leur falloir vingt ans pour progresser de 100 euros sur la grille indiciaire, ce qui paraît d'une autre époque. Ce rapport souligne bien les efforts qui restent à fournir en la matière. Je note aussi qu'un plan de requalification est mis en place, qui doit participer à l'encadrement de l'ensemble de la communauté éducative, y compris des personnels administratifs, souvent mal identifiés par les parents, les enseignants et même les enfants.
Très en amont de nos discussions à venir sur le budget, ce rapport nous permet de développer nos connaissances sur ces agents, qui représentent moins de 5 % des personnels de l'éducation nationale, et de mieux comprendre à quoi correspondent les 25 % de personnels non-enseignants, chiffre que l'on retrouve fréquemment dans le débat public.
M. Stéphane Sautarel. - Je partage les recommandations présentées dans ce rapport, qui a le mérite de donner des chiffres sur un sujet souvent évoqué. Ma remarque portera toutefois non sur les personnels administratifs mais sur les 75 % d'enseignants que compte l'éducation nationale. Cette proportion comprend des enseignants qui ne sont pas devant élèves ; pourrait-on en savoir davantage à leur sujet ?
Mme Christine Lavarde. - Quelles fonctions remplissent ces personnels administratifs ? Quelle part représentent-ils parmi les personnels des directions des services départementaux de l'éducation nationale (DSDEN) ?
S'agissant du temps de travail, le mot « obsolète » semble effectivement adapté. Pourquoi ces personnels sont-ils soumis au calendrier de l'éducation nationale alors qu'ils ne sont pas tous devant élèves ? Sont-ils tous soumis au régime des 36 semaines scolaires ou peuvent-ils choisir un temps de travail plus classique ? Y a-t-il une durée maximale de temps travaillé par jour ?
M. Arnaud Bazin. - Le rapport réfute l'idée d'une suradministration de l'éducation nationale. Cependant, on peut se poser la question des tâches effectuées par ces agents ; font-elles toutes sens ? Quel est l'impact de la numérisation sur les besoins en personnel et sur les tâches elles-mêmes ?
Mme Florence Blatrix Contat. - Je suis frappée par la sous-rémunération des agents par rapport aux personnels des autres administrations, créant un problème d'attractivité. Les revalorisations relativement faibles pour les catégories C sont aussi sources d'inégalité.
En ce qui concerne l'accompagnement administratif des directeurs d'école que vous proposez, je soulignerai un biais possible : placer des administratifs dans les écoles, pour prendre en charge des tâches qu'il n'est pas toujours simple de différencier des tâches pédagogiques, risque d'aboutir à des regroupements d'écoles et à la disparition de certains établissements dans nos communes rurales.
M. Olivier Paccaud, rapporteur spécial. - Le rapporteur général nous engage à comparer un petit collège à une école. Le premier est dirigé par un principal : il s'agit, non pas d'un personnel administratif, mais d'un personnel de direction, qui est entouré, au minimum, d'un secrétaire et d'un gestionnaire, dénommé « secrétaire général », soit deux personnels administratifs. Au sein de l'école primaire, le directeur est seul et il est plus ou moins déchargé, selon la taille de l'établissement - la décharge est totale uniquement à partir de douze classes ou plus. En la matière, je préconise non pas de placer un personnel administratif dans toutes les écoles, mais éventuellement de réfléchir à la mutualisation de secrétaires volants, qui pourraient venir de l'administration rectorale ou des DSDEN afin d'accompagner les directeurs dans le travail purement administratif.
Quant aux disparités entre académies, elles sont effectivement très fortes et le rapport donne des chiffres précis. Entre Versailles ou Créteil d'une part et la Corse d'autre part, le ratio est bien supérieur à celui de un à trois. Certes, des considérations démographiques entrent en ligne de compte, mais elles n'expliquent pas la totalité de ces disparités. Le redéploiement n'a pas forcément été bien mené et certaines académies sont sur-dotées, comme celle de Limoges.
Monsieur Sautarel, les enseignants qui ne sont pas devant les élèves représentent 1,5 % des enseignants dans le premier degré et ce pourcentage se décompose ainsi : 1,1 % sont en congé de longue maladie et 0,4 % bénéficient d'une décharge syndicale ou sont élus. Dans le second degré, ce taux s'élève à 3,2 % et 1,8 % sont en congé en maladie.
Qui sont ces personnels administratifs ? D'abord, 61 % travaillent dans des établissements publics locaux d'enseignement (EPLE), 20 % au rectorat, 3 % au ministère et d'autres encore au Centre national d'enseignement à distance (Cned), dans le réseau Canopé ou à l'Office national d'information sur les enseignements et les professions (Onisep).
Dans les collèges, ces personnels ont des fonctions de gestion et de secrétariat. Ils accomplissent parfois des tâches auxquelles on ne pense pas. À titre d'exemple, ils peuvent gérer les gratifications des stages en lycée professionnel. Dans les gros établissements, interviennent des agents comptables, qui ont la charge de plusieurs collèges ou lycées. J'ai ainsi rencontré lors d'un déplacement un agent comptable dont l'agence gérait un budget total de 13 millions d'euros.
De nouveaux logiciels informatiques, relativement complexes, ont été mis en place, avec, parfois, des formations lacunaires. Un système de référents a été instauré pour aider à l'appréhension de ces nouveaux logiciels. Certains des outils informatiques sont parfois un peu vieillots. Sur cette question, je signale que le directeur d'école doit payer lui-même une partie de son ordinateur. Il touche désormais une prime à cet effet ; à raison de 150 euros par an, celle-ci est insuffisante pour obtenir du matériel de qualité, que les municipalités fournissent parfois.
Vous avez raison, madame Blatrix Contat, si nous commençons à rencontrer un problème de recrutement, c'est parce que ces personnels ne sont pas très bien payés. Les revalorisations effectuées vont dans le bon sens, mais restent insuffisantes. À titre d'exemple, les personnels de Moselle sont souvent démarchés par le Luxembourg, où ils touchent jusqu'à trois fois plus. On trouve de moins en moins de directeurs d'écoles, parce que le travail est conséquent et la prime de direction relativement ridicule. Des efforts doivent être fournis, que détaillent les recommandations, notamment sur les heures supplémentaires.
S'agissant du temps de travail, ces personnels administratifs accomplissent bien 1 607 heures annuelles, tout le monde en convient. Les personnels administratifs n'ont pas les mêmes vacances que les enseignants, mais travaillent plus en période scolaire, a fortiori ceux, majoritaires, présents dans les établissements scolaires. Le maximum réglementaire est de 40 heures par semaine. Certains font plus, les surcharges de travail étant difficiles à absorber à certains moments de l'année.
La commission adopte les recommandations du rapporteur spécial et autorise la publication de sa communication sous la forme d'un rapport d'information.
Proposition de loi visant à accroître le financement des entreprises et l'attractivité de la France - Désignation des candidats pour faire partie de la commission mixte paritaire
La commission soumet au Sénat la nomination de M. Claude Raynal, M. Jean-François Husson, M. Albéric de Montgolfier, M. Laurent Somon, M. Michel Canévet, M. Rémi Féraud et M. Bernard Buis comme membres titulaires, et de Mme Christine Lavarde, Mme Muriel Jourda, M. Vincent Capo-Canellas, Mme Florence Blatrix Contat, M. Éric Bocquet, M. Louis Vogel et M. Thomas Dossus comme membres suppléants de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi visant à accroître le financement des entreprises et l'attractivité de la France.
La réunion est close à 12 heures.