- Lundi 18 décembre 2023
- Proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, visant à prolonger en 2024 l'utilisation des titres-restaurant pour des achats de produits alimentaires non directement consommables - Examen des amendements au texte de la commission
- Proposition de loi visant à améliorer le dépistage des troubles du neuro-développement, l'accompagnement des personnes qui en sont atteintes et le répit de leurs proches aidants - Désignation d'un rapporteur
- Proposition de loi visant à interdire les dispositifs électroniques de vapotage à usage unique - Désignation d'un rapporteur
- Questions diverses
- Mercredi 20 décembre 2023
- Audition de M. Jean Lessi, candidat à la direction générale de la Haute Autorité de santé
- Proposition de loi portant mesures pour bâtir la société du bien-vieillir en France - Audition de M. Jean-René Lecerf, président, et Mme Virginie Magnant, directrice de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA)
Lundi 18 décembre 2023
- Présidence de M. Philippe Mouiller, président -
La réunion est ouverte à 18 h 30.
Proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, visant à prolonger en 2024 l'utilisation des titres-restaurant pour des achats de produits alimentaires non directement consommables - Examen des amendements au texte de la commission
M. Philippe Mouiller, président. - Nous nous réunissons pour examiner les amendements à la proposition de loi visant à prolonger l'utilisation des titres-restaurant pour des achats de produits alimentaires non directement consommables.
EXAMEN DES AMENDEMENTS AU TEXTE DE LA COMMISSION
Mme Marie-Do Aeschlimann, rapporteure. - L'amendement n° 1 rectifié vise à contraindre le Gouvernement à engager, dans les conditions prévues à l'article L. 1 du code du travail, une concertation avec les partenaires sociaux sur l'assouplissement des règles d'utilisation du titre-restaurant. Cette concertation pourrait être suivie, le cas échéant, de la négociation d'un accord national et interprofessionnel.
Il existe déjà un cadre de concertation sur l'évolution du titre-restaurant, qui est la Commission nationale des titres-restaurant (CNTR). Il est préférable que les travaux se poursuivent dans ce cadre et abordent tous les sujets, notamment celui de l'assouplissement des règles d'utilisation des titres-restaurant.
Enfin, la loi ne saurait contraindre le Gouvernement à engager une réforme des règles d'utilisation du titre-restaurant. Une telle disposition n'aurait donc qu'un caractère incitatif.
Je demande le retrait de l'amendement ; à défaut, l'avis sera défavorable.
La commission demande le retrait de l'amendement n° 1 rectifié et, à défaut, y sera défavorable.
Mme Marie-Do Aeschlimann, rapporteure. - Les amendements identiques nos 2 rectifié et 3 visent à fixer au 30 juin 2024 le terme du régime dérogatoire.
En cohérence avec la position adoptée par la commission, l'avis est défavorable.
Mme Raymonde Poncet Monge. - Je rappelle que l'article L. 1 du code du travail prévoit une concertation. Les cinq organisations syndicales ont fait savoir que la proposition de loi ne respectait pas les règles de la négociation paritaire.
Nous nous retrouverons dans un an, car c'est l'avenir du titre-restaurant qui est en jeu. La CNTR n'a même pas été prévenue de la prolongation du régime dérogatoire : Bruno Le Maire a décidé de cette mesure un beau matin...
Mme Cathy Apourceau-Poly. - En se rasant !
Mme Raymonde Poncet Monge. - J'aurais pu déposer l'amendement n° 1 rectifié. Je ne veux pas être mise devant le fait accompli avec cette proposition de loi.
La commission émet un avis défavorable aux amendements nos 2 rectifié et 3.
TABLEAU DES AVIS
Proposition de loi visant à améliorer le dépistage des troubles du neuro-développement, l'accompagnement des personnes qui en sont atteintes et le répit de leurs proches aidants - Désignation d'un rapporteur
La commission désigne Mme Anne-Sophie Romagny rapporteure de la proposition de loi n° 908 (2022-2023) visant à améliorer le dépistage des troubles du neuro-développement, l'accompagnement des personnes qui en sont atteintes et le répit de leurs proches aidants, présentée par M. Mme Jocelyne Guidez et plusieurs de ses collègues.
Proposition de loi visant à interdire les dispositifs électroniques de vapotage à usage unique - Désignation d'un rapporteur
La commission désigne M. Khalifé Khalifé rapporteur de la proposition de loi n° 147 (2023-2024) visant à interdire les dispositifs électroniques de vapotage à usage unique.
Questions diverses
M. Philippe Mouiller, président. - Les modifications de l'ordre du jour de la séance de demain nous ont conduits à reporter au début du mois de janvier 2024 l'audition de la ministre des solidarités et des familles, Aurore Bergé, qui aurait dû se tenir en même temps que l'examen dans l'hémicycle de la proposition de loi visant à faciliter la mobilité internationale des alternants, pour un « Erasmus de l'apprentissage ».
En conséquence, nous nous retrouverons mercredi à 9 heures pour l'audition de M. Jean Lessi, candidat à la direction générale de la Haute Autorité de santé.
La réunion est close à 18 h 40.
Mercredi 20 décembre 2023
- Présidence de M. Philippe Mouiller, président -
La réunion est ouverte à 9 h 00.
Audition de M. Jean Lessi, candidat à la direction générale de la Haute Autorité de santé
M. Philippe Mouiller, président. - Nous allons entendre M. Jean Lessi, candidat proposé par le président de la Haute Autorité de santé (HAS) aux fonctions de directeur général de cette même autorité. En application de l'article L. 1451-1 du code de la santé publique, sa nomination doit être précédée de son audition, sans que celle-ci soit suivie d'un vote, par les commissions compétentes du Parlement.
Je vous précise que cette audition fait l'objet d'une captation vidéo retransmise en direct sur le site internet du Sénat et qui sera consultable en vidéo à la demande.
La Haute Autorité de santé est une autorité publique indépendante à caractère scientifique. Ses missions sont fixées à l'article L. 161-37 du code de la sécurité sociale. Elle est ainsi principalement chargée d'évaluer les médicaments, les dispositifs médicaux et les actes professionnels en vue de leur remboursement ; de recommander les bonnes pratiques professionnelles, ainsi que d'élaborer des recommandations vaccinales et de santé publique ; enfin, de mesurer et d'améliorer la qualité dans les hôpitaux, dans les cliniques, en médecine de ville, et dans les structures sociales et médico-sociales.
Elle occupe donc une position importante dans le paysage institutionnel de la santé en France.
Pour commencer, monsieur Lessi, je vous laisse le soin de vous présenter et de nous expliquer ce qui vous conduit aujourd'hui à vous porter candidat à l'exercice des fonctions de directeur général de la HAS. Vous nous indiquerez également quelles seraient, si vous étiez nommé, vos priorités d'actions.
Sur ce dernier point, vous pourriez notamment nous donner votre vision sur un sujet dont nous sommes parfois saisis par des patients ou des associations, à savoir les délais d'accès à certains médicaments innovants en France, notamment ceux qui visent des types de cancers rares pour lesquels il est difficile d'avoir les cohortes suffisantes pour l'obtention de preuves dans le cadre des essais cliniques. La méthodologie de la HAS peut-elle, selon vous, être adaptée à ces nouvelles thérapies « de précision », dont la part a vocation à croître à l'avenir ?
M. Jean Lessi, candidat à la direction générale de la Haute Autorité de santé. - Je suis très honoré d'être auditionné par votre commission ce matin. Je commencerai par vous présenter rapidement mon parcours ; j'évoquerai ensuite le contexte dans lequel évolue la Haute Autorité de santé, et enfin la manière dont j'envisage la fonction de directeur général.
Je suis membre du Conseil d'État, où j'ai exercé la majeure partie de ma carrière, tant dans les sections consultatives que dans la section du contentieux. Je retire de cette expérience que la collégialité, la contradiction éclairée des points de vue, est la clef de la qualité de la décision rendue, dans tous les domaines ; cela vaut pour le Conseil d'État comme pour la HAS. Les deux structures sont indépendantes. L'indépendance est à la fois individuelle - cette liberté d'esprit qui doit être celle de tout agent public et qui permet d'innover - et de nature institutionnelle : l'autorité dit ce qu'elle a à dire, en droit au Conseil d'État ou en sciences à la HAS, tout en étant à l'écoute du reste de la société.
Au Conseil d'État, j'ai été affecté dans les chambres compétentes dans le champ sanitaire et social. À la première chambre du contentieux, j'ai été rapporteur de nombreux dossiers sur le prix du médicament, l'admission au remboursement de tel ou tel médicament, la tarification des établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) ou des établissements de santé, etc. À la section sociale, j'ai été rapporteur de projets de loi, d'ordonnances ou de décrets sur ces sujets, notamment sur les projets de loi sur l'état d'urgence sanitaire, ou sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2024. J'ai acquis dans ces fonctions une vision globale des enjeux des secteurs sanitaire et médico-social, qui relèvent de la compétence de la HAS.
J'ai aussi exercé la fonction de secrétaire général de la Commission nationale de l'informatique et des libertés (Cnil) entre 2017 et 2020. Celle-ci est similaire à celle de directeur général de la HAS. Il me revenait en effet, sous l'autorité de la présidente, de diriger l'activité des services, d'assurer le fonctionnement du collège qu'elle préside et de garantir l'indépendance de l'institution qu'elle représente à l'extérieur. Le schéma d'organisation est donc comparable à celui de la HAS.
J'ai été immergé dans les problématiques du numérique et de la protection des données, notamment dans le domaine de la santé, secteur qui figurait en haut de l'agenda de la Cnil : je pense en particulier à la création de la plateforme des données de santé, ou Health Data Hub, à l'extension du système national des données de santé (SNDS), à la constitution des entrepôts de données de santé, notamment de données cliniques d'origine hospitalière, au développement des objets connectés en santé, etc. En somme, il s'agissait de prendre en considération toutes les évolutions technologiques et d'usage liées au numérique en santé. Ces sujets sont importants pour le système de soins et, donc, bien entendu, dans les missions de la HAS.
J'ai aussi acquis à la Cnil une expérience de la gestion d'une autorité administrative indépendante et du management d'experts : juristes, ingénieurs informatiques, auditeurs de systèmes d'information, etc. L'enjeu était pour moi de faire dialoguer ces différents corps de métier entre eux, pour parvenir à produire une décision claire et opérationnelle.
J'en viens à la HAS et à ses problématiques. Vous avez rappelé ses missions, monsieur le président. Elles sont triples : l'évaluation des technologies de santé, l'élaboration de recommandations de bonnes pratiques professionnelles, et la mesure de la qualité, par le biais d'indicateurs ou de procédés de certification.
Le fil rouge de son action est toujours la recherche de la qualité et de l'efficience. La HAS fournit une expertise médico-technique, médicale et médico-économique, pour que l'État, l'assurance maladie, les professionnels de santé, les patients sachent quels sont les soins, les thérapies, les actes qui sont utiles et susceptibles d'être pris en charge par la solidarité nationale, et, le cas échéant, dans quelle mesure. Elle doit aussi définir les bonnes pratiques professionnelles recommandées en l'état de la science.
Les missions de la HAS se sont accrues depuis vingt ans. L'article L. 161-37 du code de la sécurité sociale, qui définit la liste de ces missions, a été modifié trente et une fois depuis 2004 ! C'est sans doute une preuve de la confiance du législateur dans la HAS, mais c'est aussi un symptôme du besoin d'expertise scientifique en santé.
Mais ses tâches se sont aussi densifiées à missions constantes, de deux manières.
Il faut d'abord évoquer le puissant mouvement de l'innovation en santé : les améliorations thérapeutiques, les progrès dans les diagnostics, les innovations organisationnelles grâce au numérique créent de nouvelles compétences pour la HAS en matière de télésurveillance médicale, d'actes innovants de biologie, ou de dispositifs numériques thérapeutiques. La HAS doit donc innover dans sa manière d'exercer ses missions.
Le second mouvement qui aboutit à une densification de ses tâches est l'évolution de la demande sociale ou des attentes de la société dans le champ sanitaire et médico-social, dans un contexte que chacun connaît : vieillissement démographique, prévalence des maladies chroniques, développement de la notion de parcours de santé. On peut aussi citer l'importance des enjeux de la démographie professionnelle, la situation de l'hôpital, la question de la qualité de vie des soignants, la démographie des professionnels de médecine libérale. On assiste également à une montée en puissance des droits des patients. Ces derniers ont plus de revendications ; ils demandent à exercer leur droit à l'autodétermination plus qu'avant : cette dynamique est positive, mais elle doit être intégrée par les pouvoirs publics dans leur action. Tous ces changements se traduisent in fine pour la HAS par de nouvelles sollicitations.
Les orientations stratégiques de la Haute Autorité sont définies dans une feuille de route dont la validité s'achève en 2023. Il conviendra donc de définir une nouvelle stratégie pluriannuelle à partir de 2024. Lionel Collet a déjà mentionné, lors d'auditions, plusieurs orientations qui lui tiennent particulièrement à coeur.
Un premier axe, très important, concerne la place des usagers : ces derniers sont déjà présents dans les travaux de la HAS, dans ses groupes de travail, dans son conseil pour l'engagement des usagers. Ils sont associés à ses recommandations. Le besoin de renforcer la confiance dans l'expertise est tel qu'il faut aller encore plus loin dans cette voie.
Le deuxième axe de travail porte sur l'impact des recommandations de la HAS. Ses travaux sont de qualité et ils sont reconnus, mais il faut évidemment qu'ils soient lus et intégrés dans les pratiques professionnelles. La HAS travaille déjà sur ce sujet, qui constitue un enjeu pour l'avenir.
Un autre axe concerne l'efficacité administrative. Vous avez mentionné l'enjeu relatif aux délais de mise à disposition des innovations. Celles-ci peuvent changer la vie des patients. Elles doivent être évaluées. Il convient de s'interroger sur les délais de traitement de la commission de la transparence : il est objectivement possible d'aller plus vite sur certains points. Toutefois, au niveau européen, la France et la HAS ne sont pas mal classées en termes de délais, notamment lorsque l'on prend en compte les nouvelles procédures d'accès rapide, notamment l'accès précoce aux médicaments innovants. Quelle que soit la procédure, l'essentiel est que le patient en situation d'impasse thérapeutique puisse accéder à la molécule innovante. L'accès précoce, qui existe depuis deux ans, constitue un excellent dispositif. Si on l'intègre dans le calcul des délais, le résultat est très rassurant par rapport aux autres pays européens. Mais il faut continuer à faire mieux et à raccourcir les délais.
Outre la question des délais, se pose la question des comparateurs. On en manque dans les maladies rares ou l'oncologie. Or l'évaluation consiste à comparer le nouveau traitement avec un ancien, pour apprécier l'amélioration du service médical rendu, c'est-à-dire si le nouveau médicament a une valeur ajoutée, afin de pouvoir fixer son prix. Cela pose une question de méthodologie. La commission de la transparence a déjà fait évoluer sa doctrine en mars dernier. La HAS réfléchit de manière continue à sa doctrine sur ce point. Je ne sais pas si de nouvelles évolutions seront nécessaires, mais le sujet est à l'agenda de la HAS et il conviendra de trouver la bonne organisation en interne pour appuyer la commission de la transparence dans sa réflexion.
J'en viens enfin à la manière dont j'envisage la fonction de directeur général, qui diffère de celle de président ou de membre du collège. J'aurai quatre priorités d'ordre managérial.
La première est relative à la cohésion. Le directeur général doit garantir que l'équipe est soudée et qu'elle avance au service du projet stratégique, conformément aux attentes des pouvoirs publics et de la société. À cet égard, les valeurs de la HAS constituent un facteur de cohésion très fort : la rigueur, la transparence et l'indépendance. Lors de nos réflexions sur tous les enjeux, comme l'accélération des délais, il faudra toujours en revenir à ces valeurs essentielles. Un autre élément important est le sens du service public. La HAS l'a déjà et ce sentiment m'anime profondément.
Ma deuxième priorité concerne la transversalité. Celle-ci est essentielle pour assurer la qualité des travaux, véritable fil rouge de la Haute Autorité. Il faut travailler en transversalité. La HAS le fait déjà. C'est aussi un élément important pour la motivation des agents et pour parvenir à capter le réel. Si un signal, faible ou fort, est capté par un membre de l'organigramme de la HAS, il importe qu'il puisse irriguer tous les services. C'est un gage d'amélioration des pratiques et d'adhérence au réel.
La troisième priorité concerne les moyens. Le Parlement a octroyé à la HAS les moyens de fonctionner pour 2024, avec notamment le rebasage de la dotation de l'assurance maladie. Il faut s'interroger aussi sur ses moyens humains. Le plafond d'emplois a été relevé de 438 à 443 équivalents temps plein (ETP). Toutefois, vu le nombre important de nouvelles missions de la Haute Autorité, j'aurai besoin de faire le point sur ce sujet, même si le contexte budgétaire est très contraint.
La dernière priorité sera de garantir l'ouverture de la HAS. Indépendance ne rime pas avec fermeture. Au contraire, elle permet l'ouverture et de parler à tout le monde. Je serai garant de cette dimension, sous l'autorité du président, pour veiller à l'ouverture envers tous les partenaires de l'administration ou de la sphère publique : les agences sanitaires, les conseils départementaux pour les aspects médico-sociaux, les agences régionales de santé, les ministères, et notamment le ministère de la santé. La HAS doit aussi avoir des relations de confiance avec le Parlement, dans une logique aussi bien institutionnelle que d'efficacité, dans la mesure où la HAS s'assure ainsi qu'elle est en phase avec les attentes de la société.
J'ajoute sur ce sujet que toutes les institutions publiques sont confrontées à la question du risque de défiance des citoyens dans l'action publique. Celle-ci a pu se manifester récemment vis-à-vis de l'expertise en santé, d'où qu'elle vienne. La HAS doit travailler sur cette question.
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale. - Je voudrais tout d'abord vous remercier pour votre exposé, qui était très éclairant sur votre parcours et sur l'idée que vous vous faites de la direction générale de la Haute Autorité. Je crois que vous possédez un certain nombre de compétences, acquises dans vos précédentes fonctions, qui font que vous semblez le candidat idéal.
Néanmoins, nous souhaiterions vous découvrir un peu plus parce que, lorsque l'on postule à ce genre de fonction, il est important d'avoir une relation de confiance avec le président ou la présidente, à l'image, par exemple, de celle qui existait entre Fabienne Bartoli et Dominique Le Guludec ou Lionel Collet, afin d'avancer en binôme, dans le respect des compétences de l'autre. Quel est votre positionnement vis-à-vis du président actuel de la HAS ?
Vous avez évoqué l'implication croissante des patients dans le système de santé. Une très forte demande de participation se fait jour. Comment parvenir à associer les usagers dans l'élaboration des mesures qui concernent les patients ? La HAS s'est engagée en faveur de la participation des usagers, par exemple avec le patient expert dans la certification des établissements de santé, l'outil e-Satis sur l'expérience patient ou la représentation des usagers dans ses diverses commissions. Quel regard portez-vous sur cette demande d'association plus forte ? Comment la HAS doit-elle, selon vous, contribuer à soutenir l'engagement des usagers ? Au-delà des patients, il faut aussi associer les familles, car celles-ci jouent un rôle particulier.
Pour répondre aux difficultés de la démographie médicale et mieux valoriser les professionnels de santé, il est fréquemment envisagé d'enrichir les compétences des professionnels de santé et d'accroître les partages de tâches. Quel regard portez-vous sur ces évolutions et quelle contribution la HAS peut-elle, selon vous, y apporter ? Des priorités doivent-elles, selon vous, être identifiées en la matière ?
M. Jean Lessi. - En ce qui concerne la relation avec le président, un seul mot me vient à l'esprit pour la définir : la loyauté. Celle-ci doit être totale. On doit pouvoir se parler en toute franchise en privé, car cela contribue à la force du binôme. Toutefois, vis-à-vis de l'extérieur, l'institution ne doit avoir qu'une seule voix, celle du président, tandis que le directeur général travaille auprès de lui, sous son autorité. J'ai déjà connu ce positionnement à la Cnil, et tout s'est très bien passé.
L'implication des patients est nécessaire pour renforcer l'efficacité du système de santé et pour pallier le risque de défiance. En ce qui concerne le patient expert, la HAS reconnaît depuis des années que l'expérience des patients constitue une forme d'expertise. Lionel Collet est, je crois, très attaché à cette idée. Les représentants des usagers sont d'ailleurs présents dans les instances en tant qu'experts. Il existe des axes de progrès. La HAS a ainsi créé, en 2019, une commission spécifique pour réfléchir à l'engagement des usagers, le conseil pour l'engagement des usagers, qui est une commission permanente. Celle-ci a rendu récemment un rapport, assorti de recommandations pour aller plus loin pour assurer l'effectivité des droits des patients et dans leur représentation collective.
Certains droits ont été reconnus aux patients - la France est plutôt pionnière en la matière -, mais tous ne sont pas complètement effectifs, tandis que les droits collectifs, qui s'exercent par exemple par le biais d'une participation à certaines instances, sont source d'une certaine insatisfaction, en raison du poids numérique des représentants des associations dans les enceintes hospitalières ou médico-sociales qui leur sont dédiées ; cela peut créer des frustrations, et entraîner des difficultés à trouver des volontaires pour siéger dans ces instances. Un travail est donc à réaliser. Un diagnostic a été posé récemment. Il nous reste à suivre une feuille de route.
En ce qui concerne le partage des compétences entre les personnels de santé, la question de la délégation des tâches et du partage des responsabilités se pose en effet. Les frontières entre les différentes professions évoluent et ont été plusieurs fois redessinées ces dernières années de manière intéressante. La loi du 19 mai 2023 portant amélioration de l'accès aux soins par la confiance aux professionnels de santé a ainsi créé de nouvelles formes de partage des responsabilités : infirmiers en pratique avancée, accès direct aux masseurs-kinésithérapeutes, etc.
Dans ce domaine, la HAS ne doit avoir pour seule boussole que la qualité. Elle doit rendre des avis sur les conditions de prise en charge des actes réalisés dans ces conditions. Elle doit aussi réfléchir à la manière d'intégrer ces évolutions dans ses recommandations de bonnes pratiques professionnelles. Ce nouveau partage de responsabilités est très intéressant pour répondre aux évolutions de la démographie médicale, même s'il ne constitue pas la seule solution. Il constitue aussi une source de motivation pour tous les acteurs impliqués. Nous pouvons donc être plutôt confiants dans notre capacité à fournir des soins de qualité dans ce cadre.
Mme Corinne Imbert, rapporteure pour la branche assurance maladie. - Ces dernières années, le contexte sanitaire, et plus particulièrement la crise du covid-19, a rappelé la nécessité pour les autorités sanitaires de se préparer et d'agir en situation de crise et d'urgence. Cela suppose d'anticiper ces épisodes. Quels enseignements la HAS doit-elle, selon vous, tirer de cette expérience ? Comment son organisation peut-elle s'adapter pour gérer la survenue de nouveaux épisodes de crise ?
Lors des auditions relatives au PLFSS 2024, le professeur Lionel Collet, président de la HAS, et Fabienne Bartoli, directrice générale, ont évoqué la forte augmentation du nombre de vaccins entrant sur le marché, ce qui tendrait à allonger les délais d'accès pour les patients, en raison du temps d'évaluation préalable non seulement par l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) pour les autorisations de mise sur le marché (AMM), mais aussi par la HAS concernant les conditions de remboursement. Le président et la directrice générale de la HAS avaient, lors de ces auditions, exprimé une préoccupation quant aux moyens dédiés à ces missions d'évaluation, en gardant l'objectif d'une stratégie vaccinale sécurisée et efficace, exigeant une certaine réactivité. Quelle est votre appréciation de cet enjeu et comment entendez-vous y faire face ? Plus généralement, comment voyez-vous vos relations avec l'ANSM en matière de sécurité médicale ?
La mission de certification des établissements de santé est souvent critiquée, car perçue comme une charge administrative excessive pour des équipes soignantes déjà fortement mobilisées. Quel regard portez-vous sur la conduite de la démarche de certification et quelles améliorations voyez-vous encore à mettre en oeuvre ?
Alors que le nouveau modèle de financement du champ MCO (médecine-chirurgie-obstétrique) prévoit une refonte du dispositif dit Ifaq (incitation financière à l'amélioration de la qualité), comment les visites d'inspection de la HAS peuvent-elles, selon vous, participer à mieux valoriser la qualité dans les hôpitaux ?
Enfin, comment la HAS doit-elle travailler sur l'impact de l'intelligence artificielle (IA) dans la prise en charge des patients ?
M. Jean Lessi. - Si vous le permettez, je commencerai par la dernière question.
L'IA est une véritable révolution qui n'en est qu'à ses débuts. En matière de santé, elle a plusieurs répercussions. Tout d'abord, elle change en amont la manière de faire des essais cliniques. Ensuite, c'est une aide précieuse au diagnostic. Par ailleurs, elle aide la HAS à effectuer un meilleur suivi de ses recommandations de bonnes pratiques auprès des professionnels de santé. Enfin, elle nous autorise à mieux évaluer les données recueillies via e-Satis s'agissant de la qualité de prise en charge dans nos établissements de santé. C'est notamment le cas pour analyser les résultats des questionnaires dits libres, ce qui donne des résultats très intéressants.
Madame la rapporteure, votre première question portait sur les conséquences de la pandémie de covid-19 sur nos organisations. À l'évidence, nous n'étions pas préparés à une telle crise. Aussi, le rapport prospectif 2022 de la HAS s'est attaché à trouver les voies et moyens de faire mieux la prochaine fois. Il importe de se préparer hors crise et de manière partenariale avec les autres organisations intervenant dans le champ de la santé. En effet, on ne communique pas bien en période de crise si l'on ne s'est pas parlé avant la crise.
Nous avons entrepris d'adapter tous nos systèmes d'information, en intégrant de nouveaux protocoles à activer. C'est toute une culture de crise à mettre en place, tout en ayant à l'esprit qu'aucune crise ne ressemble à une autre.
S'agissant des nouveaux vaccins, nous affichons trois objectifs : la rapidité de mise à disposition ; la qualité ; la confiance des utilisateurs. Il s'agit d'aller le plus vite possible, dans la rigueur la plus totale. C'est une question de méthode scientifique, à laquelle je serai très attentif. Il y a un véritable défi à restaurer la confiance dans la vaccination.
Concernant la certification des établissements de santé, j'identifie deux enjeux : la qualité en santé attendue par les patients ; la charge de travail.
Il y a environ 800 experts visiteurs issus du monde de la santé, principalement du secteur hospitalier. C'est d'ailleurs un de mes objectifs d'ouvrir un peu plus le secteur au monde libéral. Tous ces visiteurs sont formés spécifiquement et ils effectuent un travail remarquable. Les établissements visités en sont majoritairement satisfaits.
Quant à la charge de travail, nous devons améliorer les systèmes d'information nationaux afin d'éviter les doublons.
J'y insiste, la certification crée de la fierté dans les établissements concernés.
J'en viens aux Ifaq. Certes, le financement de la qualité est important, mais il importe d'avoir les bons indicateurs. Néanmoins, la HAS a des avis mitigés. Nous regrettons que le dispositif nous place davantage dans une logique de concours que dans une logique d'examen.
Les relations de la HAS avec l'ANSM sont très bonnes depuis deux ans. Nous travaillons ensemble sur les effets indésirables des médicaments et le confort des patients, ainsi que sur l'accès précoce aux nouvelles molécules.
M. Daniel Chasseing. - Je vous remercie pour votre feuille de route, qui repose sur les trois piliers que sont la rigueur, l'indépendance et la qualité.
Je veux vous interroger plus particulièrement sur le médico-social. Nous le savons, d'ici à 2040, il y aura de plus en plus de personnes âgées de plus de 85 ans, et nous compterons chaque année 200 000 personnes dépendantes de plus.
Certes, le maintien à domicile est de plus en plus privilégié, mais cela signifie que les personnes entrant en Ehpad sont de plus en plus dépendantes et nécessitent des soins lourds. On estime ainsi à 40 000 le nombre d'emplois supplémentaires nécessaires dans le secteur, soit cinq emplois de plus par Ehpad. Êtes-vous prêt à y faire face ?
Mme Jocelyne Guidez. - J'ai été interpellée par une personne atteinte de mucoviscidose et de pseudo obstruction intestinale chronique (Poic). Ces patients sont aujourd'hui traités avec la nalbuphine, qui n'est plus remboursée par l'assurance maladie.
Quels sont les critères sur lesquels s'appuie la HAS pour décider du déremboursement ?
Mme Florence Lassarade. - La maladie d'Alzheimer est un défi majeur pour nos sociétés occidentales vieillissantes.
Actuellement, aux États-Unis, un traitement prometteur à base d'anticorps monoclonaux donne d'excellents résultats s'il intervient assez tôt dans la maladie. Son coût est d'environ 2 000 euros par mois. J'ai cru comprendre que la France ne souhaitait pas s'y intéresser. Au regard du coût global de la prise en charge une fois la maladie avancée, ne serait-il pas pertinent de miser sur ce nouveau traitement ?
M. Olivier Henno. - La HAS a une responsabilité forte en matière d'anticipation et de prévention. Actuellement, nos compatriotes sont préoccupés par les ruptures d'approvisionnement de certains médicaments, notamment l'amoxicilline. Cette situation est inadmissible, notamment s'agissement des traitements pédiatriques. Que comptez-vous faire à cet égard ?
M. Jean Lessi. - Monsieur Chasseing, vous avez raison, le vieillissement de la population est un enjeu majeur. Les chiffres sont éloquents. Sur l'encadrement, on peut recourir à la méthode des ratios, mais c'est un choix politique. Ce qui est sûr, c'est qu'il faut plus de personnels encadrants pour donner des soins qui aient du sens, tant pour les patients que pour les personnels.
La proposition de loi portant mesures pour bâtir la société du bien-vieillir en France prévoit justement de confier à la HAS et à la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA) une mission pour évaluer les moyens nécessaires à une bonne prise en charge.
S'agissant de la prise en charge des médicaments par l'assurance maladie, abordée par Mme Guidez, la HAS intervient avant la décision des autorités politiques pour donner un avis scientifique rigoureux qui s'attache à mettre en évidence le service médical rendu (SMR) et la plus-value apportée dans un traitement. Ensuite, le ministère de la santé décide si tel ou tel produit doit être remboursé.
Cela peut aboutir à ne pas mettre à disposition des médicaments ou à contraindre les établissements à les prendre en charge sur leur propre budget.
Pour les médicaments que vous évoquez, l'enjeu est celui de la liste « en sus », qui permet, dans les hôpitaux, la prise en charge de molécules onéreuses hors tarifs d'hospitalisation. Il s'agit généralement de produits d'une ASMR supérieure à IV, c'est-à-dire à valeur ajoutée au moins minimale. Cela nécessite donc une évaluation extrêmement rigoureuse.
Il y a eu deux évolutions récentes à ce sujet.
Tout d'abord, il peut y avoir un accès précoce à certaines molécules innovantes en oncologie avant les résultats définitifs de la phase d'évaluation que je viens d'évoquer. L'accès précoce permet un remboursement sans grever le budget des hôpitaux.
Ensuite, la loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) pour 2024 prévoit la possibilité de poursuivre le traitement pris en accès précoce à la fin d'une première phase, sans que la valeur ajoutée ne soit certaine, quand la phase d'évaluation de la HAS n'a toujours pas pu être menée à terme.
J'en viens naturellement aux nouveaux traitements Alzheimer évoqués par Mme Lassarade. Ils seront bien évidemment évalués par la HAS, le plus rapidement possible, lorsqu'ils arriveront en France.
Monsieur Henno, les ruptures d'approvisionnement peuvent avoir deux causes : soit l'industriel ne produit pas assez, soit la répartition entre officines sur le territoire est déséquilibrée. Dans les deux cas, c'est un problème majeur, qui relève du ministère et de l'ANSM.
La HAS, quant à elle, peut envoyer des alertes au prescripteur, ce qu'elle a d'ailleurs fait pour l'amoxicilline, via notre logiciel recensant les bonnes pratiques thérapeutiques.
Elle a des moyens d'incitation, au travers notamment des logiciels d'aide à la prescription intégrant des alertes, mais elle ne dispose pas de moyen de contrainte. Les alertes ne sont toutefois intégrées qu'aux logiciels certifiés ; or la volonté de la France de rendre la certification obligatoire s'est heurtée au droit de l'Union européenne.
M. Jean Sol. - En 2022, une réforme de l'évaluation des établissements médico-sociaux sur la base d'un référentiel unique composé de 147 critères est entrée en vigueur. Sur les 40 000 structures existantes, seulement 1 700 ont été évaluées à ce jour. Comment envisagez-vous d'évaluer les structures restantes, sachant que les organismes évaluateurs sont au nombre de 118 ?
M. Jean Lessi. - Vous en savez plus que moi, monsieur le sénateur ! Si vous le permettez, je vous répondrai donc par écrit.
C'est non pas la HAS, mais le Comité français d'accréditation (Cofrac) qui accrédite les organismes évaluateurs. Je prendrai contact avec le directeur de cet organisme dès que je serai nommé.
M. Philippe Mouiller, président. - Je vous remercie pour vos explications, monsieur Lessi.
Cette audition a fait l'objet d'une captation vidéo qui est disponible en ligne sur le site du Sénat.
Proposition de loi portant mesures pour bâtir la société du bien-vieillir en France - Audition de M. Jean-René Lecerf, président, et Mme Virginie Magnant, directrice de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA)
M. Philippe Mouiller, président. - Mes chers collègues, nous allons conclure nos travaux de l'année 2023 par l'audition de M. Jean-René Lecerf, président, et de Mme Virginie Magnant, directrice de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA) sur la proposition de loi portant mesures pour bâtir la société du bien-vieillir en France.
Je vous rappelle que ce texte sera examiné par notre commission dès la semaine de rentrée parlementaire, mercredi 17 janvier 2024, puis en séance à partir du mardi 30 janvier.
Pour commencer, monsieur le président et madame la directrice, je vous laisse le soin de vous présenter la position générale de la CNSA sur ce texte et sur les principales dispositions qu'il contient.
Vous pourriez, en particulier, nous indiquer comment cette proposition de loi s'articule avec la convention d'objectifs et de gestion (COG) de la CNSA pour 2022-2026. Quelles mesures permettent de concrétiser des engagements de la COG ? Quels engagements nécessiteraient encore, à vos yeux, une traduction législative ?
Nos rapporteurs, Jean Sol et Jocelyne Guidez, puis les membres de la commission pourront ensuite vous poser leurs questions.
M. Jean-René Lecerf, président de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie. - Je suis d'autant plus honoré de clôturer vos travaux de cette année, mesdames, messieurs les sénateurs, que le Sénat est une maison chère à mon coeur. Je vous indiquerai la position du Conseil de la CNSA sur cette proposition de loi, puis Virginie Magnant précisera son articulation avec la COG, à laquelle il faudrait du reste signer un avenant, car depuis sa signature de nombreux engagements ont été pris par le Gouvernement.
Le Conseil de la CNSA regrette tout d'abord qu'il n'y ait pas eu une grande loi sur l'autonomie qui aurait embrassé la prise en charge, à la fois, des personnes âgées et des personnes en situation de handicap et qui, sans nécessairement tout prévoir, constituerait en quelque sorte un phare pour les dispositions législatives ultérieures. Un tel texte devrait permettre d'améliorer les conditions de vie de ces personnes en situation de vulnérabilité, tout en renforçant l'attractivité des métiers de l'accompagnement et du soin.
Nous souhaitions également voir affirmer de manière plus directe la fin du choix réducteur entre le domicile traditionnel et les établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad). Cela est d'autant plus nécessaire qu'après l'affaire Orpéa, d'autres Ehpad commerciaux, notamment du groupe Emera, font aujourd'hui l'objet de nouvelles suspicions.
Aux présidents de département qui m'interrogent sur l'avenir de ces établissements, dont certains ne sont aujourd'hui remplis qu'à 65 %, je réponds que la solution est peut-être de les transformer en résidences autonomie. Les personnes qui sont encore très largement valides pourraient ainsi être prises en charge sans que cela pose autant de difficultés au regard de leur dignité, et même de leur citoyenneté, que dans certains Ehpad.
A contrario, j'estime que pour les personnes en situation de grande dépendance ou en extrême fin de vie, il nous faut renforcer l'appréhension domiciliaire.
La grande loi autonomie qui fait aujourd'hui défaut devrait du reste également fixer les grandes orientations en matière de fin de vie.
En lieu et place de cette grande loi, nous avons plusieurs initiatives qui, pour être intéressantes, n'en sont pas moins compartimentées : le Conseil national de la refondation dans son volet « Bien vieillir », la Conférence nationale du handicap, la stratégie « Bien vieillir », avec la présentation d'une feuille de route interministérielle, et donc la mobilisation d'un grand nombre de membres du Gouvernement, et enfin cette proposition de loi remise à l'ordre du jour du Parlement après quelques aléas.
En dépit des limites inhérentes à une proposition de loi au regard de l'article 40 de la Constitution, ce texte nous paraît comporter un certain nombre de dispositions intéressantes. Nous avons reçu avec satisfaction la promesse d'une loi de programmation pluriannuelle pour le grand âge, dont la première devrait être votée avant la fin de l'année prochaine. Nous aurons ainsi l'occasion, tous les cinq ans, d'avoir un véritable débat sur les progrès réalisés et sur les difficultés qui persistent. Ce n'est certes pas la grande loi autonomie dont nous rêvions, notamment parce que ce texte sera contraint par l'aspect financier, mais cela s'en approche.
Nous accueillons de même favorablement les réflexions sur la tarification forfaitaire pour le domicile. Si l'instauration d'un tarif plancher partait d'une bonne idée, l'indifférenciation de la compensation selon les départements a créé une sorte d'effet d'aubaine pour les départements les plus aisés, sans compter que la tarification à l'heure entrave toute autonomie dans l'organisation de l'emploi du temps des personnels, ce qui ne contribue pas à redonner du sens à ces métiers.
Nous apprécions également le fléchage des bénéfices des Ehpad commerciaux. L'actualité montre qu'il nous faut renforcer les contrôles, non pas systématiques dans l'intégralité des Ehpad - ce choix nous avait laissés dubitatifs -, mais sur le fondement de procédures d'alerte déclenchant des contrôles inopinés et plus approfondis. De fait, les structures du groupe Emera qui sont aujourd'hui pointées du doigt avaient fait l'objet de ces contrôles systématiques, ce qui montre bien que cela n'a pas suffi à arranger la situation.
Nous saluons l'intérêt porté par le texte aux résidences autonomie, qui nous paraissent être l'une des clés du logement des personnes âgées dans le continuum qui, du domicile traditionnel aux Ehpad, inclut également le logement partagé et le logement inclusif.
Les résidences autonomie ayant été fort peu entretenues ces dernières années, elles ont besoin d'être réhabilitées, ce qui nécessitera des crédits bien plus importants que ceux qui y sont consacrés aujourd'hui. La résidence autonomie permet en outre une bien meilleure appréhension domiciliaire que certains Ehpad qui accueillent une proportion importante de personnes en fin de vie ou en situation de grande dépendance.
Sur ce sujet comme sur d'autres, nous sommes tout à fait en accord avec les propositions portées par cette proposition de loi, même si, comme je l'indiquais, la CNSA souhaite que l'ensemble de ces sujets soient traités de manière globale et cohérente.
Mme Virginie Magnant, directrice de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie. - J'aborderai pour ma part l'articulation entre la proposition de loi et la feuille de route de la CNSA, fixée notamment par la COG 2022-2026.
Cette proposition de loi conforte des actions importantes prévues par la COG en leur donnant une base législative. Je pense notamment au renforcement de la prévention de la perte d'autonomie par la création d'une Conférence nationale de l'autonomie et à la création du service public départemental de l'autonomie (SPDA).
La Conférence nationale de l'autonomie a vocation à assurer le pilotage national de cette politique en prenant appui sur un centre de ressources et de preuves géré par la CNSA. Ce faisant, la rédaction actuelle de la proposition de loi consolide la politique de prévention de la perte d'autonomie engagée depuis la loi du 28 décembre 2015 relative à l'adaptation de la société au vieillissement. Si celle-ci a créé une instance territoriale de coordination des actions de prévention avec les conférences des financeurs de la prévention de la perte d'autonomie, elle n'a pas instauré de gouvernance nationale.
À défaut d'une telle gouvernance, les têtes de réseau des parties prenantes des conférences des financeurs se sont organisées. La CNSA participe à un comité de pilotage national de la prévention de la perte d'autonomie qui associe l'assurance vieillesse, les caisses d'assurance retraite et de santé au travail (Carsat) et des représentants des départements, mais cette instance, technique, a simplement vocation à coordonner le soutien apporté aux acteurs territoriaux des conférences des financeurs. Elle a notamment contribué à doter ces conférences de méthodes leur permettant de définir des programmes concertés de prévention de la perte d'autonomie, ainsi que d'outils d'évaluation. Toutefois, sa composition l'empêche de jouer le rôle d'une véritable instance de pilotage de la politique de prévention de la perte d'autonomie.
Nous accueillons donc avec beaucoup d'optimisme la création de la Conférence nationale de l'autonomie.
Cette proposition de loi reconnaît par ailleurs le rôle du centre de ressources et de preuves dédié à la prévention de la perte d'autonomie, chantier phare de la COG de la CNSA. Ce centre a été installé à la fin de l'année 2022, puis il a constitué sa gouvernance, commencé à recruter et noué des partenariats avec les gérontopôles dans le courant de l'année 2023. Il a, dans le même temps, démarré son action d'animation de conférences pour renforcer la culture de la preuve, dans le triple objectif de capitaliser sur les démarches probantes, d'essaimer ces démarches dans un format accessible et de soutenir la culture de la prévention dans les territoires.
Si la reconnaissance du rôle du centre de ressources et de preuves en soutien à la future Conférence nationale de l'autonomie nous paraît donc de très bon aloi, nous nous inquiétons que le texte lui assigne la fonction nouvelle de labelliser les aides techniques. Non seulement cette mission nous paraît étrangère au champ des responsabilités actuelles du CNSA, mais elle est en décalage avec les ressources dont le centre dispose - nous estimons qu'il faudrait plus de 30 équivalents temps plein (ETP) pour instruire les dossiers des plusieurs milliers d'aides techniques qui existent, quand le centre n'en compte que 3 - tandis que d'autres instances, en particulier la Commission nationale d'évaluation des dispositifs médicaux et des technologies de santé de la HAS, paraissent mieux armées pour une telle mission.
La seconde disposition de ce texte qui fait écho à la COG est la création d'un service public départemental dédié aux personnes âgées et aux personnes en situation de handicap. Issue des propositions formulées par Dominique Libault dans son rapport intitulé Vers un service public territorial de l'autonomie, l'instauration d'un tel guichet unique dans les territoires permettra d'informer, d'orienter et d'accompagner les personnes dans la mise en oeuvre de leurs droits, de soutenir les aidants et de promouvoir des actions de prévention de la perte d'autonomie.
La CNSA est d'ores et déjà mobilisée pour préparer et soutenir la création de ce futur service public départemental. Un comité d'orientation et de suivi a été mis en place pour accompagner la préfiguration du SPDA. Sous l'égide de la ministre Aurore Bergé, la CNSA a lancé l'été dernier un appel à manifestation d'intérêt pour inviter les départements qui souhaitent déjà avancer à se manifester, afin que nous puissions concevoir avec eux le futur cahier des charges de ce SPDA.
Tout est donc réuni pour qu'une telle disposition soit effective dans les meilleurs délais.
Le texte confie également à la Caisse un nouveau rôle en matière de promotion de l'audit et du contrôle interne en direction des « réseaux » de la caisse, en particulier des maisons départementales de l'autonomie (MDA).
Il nous semble en effet important de proposer des outils tels que le développement de systèmes d'information harmonisés et les référentiels, et de nous assurer qu'ils sont pleinement mobilisés par les acteurs territoriaux. Tel est précisément l'objet de la démarche de contrôle interne.
La CNSA devra être impliquée à la fois dans la préparation de la loi de programmation pluriannuelle qu'évoquait le président Lecerf et dans sa mise en oeuvre. Il ne s'agit pour l'heure que d'une perspective, mais il est clair que son adoption pourrait conduire à faire varier la trajectoire financière de la branche et nécessiter un avenant à la COG.
La proposition de loi prévoit également une expérimentation de dotation forfaitaire pour les services d'aide à domicile en remplacement des tarifs horaires. La CNSA est d'ores et déjà mobilisée par plusieurs réformes visant à conforter la capacité des services à domicile à garantir le maintien des personnes à domicile. Je pense aux réformes tarifaires qui sont actuellement en phase de montée en charge afin de soutenir le financement des services d'aide et d'accompagnement à domicile, ainsi que le bon fonctionnement des services de soins infirmiers à domicile (Ssiad).
Cette expérimentation de dotation forfaitaire, de même que l'aide au soutien à la mobilité des professionnels à domicile ou le travail sur les taux d'encadrement, sont autant de chantiers nouveaux pour la CNSA qui appelleront une modification de la COG.
M. Jean Sol, rapporteur. - Pensez-vous que la création d'un SPDA permette de réaliser la mise en place de guichets uniques par département et de faciliter les démarches administratives d'accompagnement et de suivi des parcours des personnes âgées ou en situation de handicap ? Où en est le chantier de préfiguration de ce SPDA, qui a été lancé sans attendre l'adoption de la proposition de loi ?
Par ailleurs, quelle serait la répartition des rôles entre la Conférence nationale de l'autonomie et le Conseil de la CNSA ?
Le texte confie à la CNSA une mission nationale d'audit et d'évaluation des départements et des maisons départementales des personnes handicapées (MDPH) en tant qu'acteurs des politiques de soutien à l'autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées. Il introduit l'obligation pour les départements et les MDPH de communiquer à la CNSA tous documents et renseignements utiles et d'autoriser la tenue de missions sur place.
Ces dispositions sont-elles de nature à faciliter le travail de coordination et d'animation de la CNSA ? Auront-elles pour effet de modifier les relations entre la CNSA et les départements qui semblent assez hétérogènes ?
Plus généralement, le texte contient-il selon vous de réelles avancées dans le domaine de la prévention de la perte d'autonomie ?
M. Jean-René Lecerf. - Sur la mise en place du SPDA, nous sommes actuellement dans un processus de préfiguration. Un appel à candidatures a été adressé aux départements, 16 d'entre eux seront retenus. La CNSA leur financera un équivalent temps plein (ETP) pour les aider à coordonner ce travail de préfiguration. L'État souhaitait que toutes les régions soient représentées, ce qui sera quasiment réalisé.
Nous souhaitons parvenir à davantage d'uniformité et d'universalité sur les aides accordées aux uns et aux autres en fonction de leurs besoins. Effectivement, on se heurte là à une difficulté : nos « services extérieurs », si je peux m'exprimer ainsi, sont les agences régionales de santé (ARS) et les départements, et parfois les politiques départementales sont très disparates. Or nous voulons éviter qu'en France, à partir d'un certain âge, on doive choisir son lieu d'habitation en fonction des politiques menées au niveau départemental. Le développement de programmes comme le système d'information de l'allocation personnalisée d'autonomie (SI-APA) permet de lisser le manque d'équité potentiel.
Le SPDA sera un instrument puissant pour parvenir non pas à une uniformité totale des politiques mises en oeuvre, mais à une situation où globalement les personnes avec les mêmes problèmes recevront une aide équivalente. Il offre aussi l'opportunité de gérer de nouvelles relations entre les ARS et les départements, car les relations n'étaient pas très bonnes entre la CNSA et les départements - ces derniers ayant largement boycotté les conseils de la CNSA pendant le précédent mandat. Mais les relations des départements avec les ARS étaient également fort difficiles : quand j'ai pris la tête du département du Nord en 2015, on ne se parlait pas ! La crise du covid-19 nous a fait progresser et aujourd'hui ce dialogue ARS-département-CNSA doit être renforcé.
Cela étant, la question du contrôle de la CNSA sur les politiques départementales est un sujet explosif : si l'on parlait de « tutelle » de la CNSA sur un département, mes anciens collègues présidents de département monteraient au créneau ! Si la CNSA peut jouer un rôle de bons offices entre les uns et les autres, elle le fera très volontiers. Elle obtient souvent des résultats, précisément parce qu'elle représente l'État sans l'être tout à fait, et cela semble faciliter les relations de travail, par exemple pour les aides accordées aux MDPH les plus en difficulté. Nous ne cherchons nullement à exercer un contrôle.
Mme Virginie Magnant. - Nous sommes très favorables à la création d'une mission d'appui et d'évaluation de la qualité qui donnera à la CNSA la capacité de réaliser de l'accompagnement, de l'audit et du conseil sur l'ensemble des services autonomie. Cette disposition nous semble importante, même s'il ne s'agit pas de bouleverser le sens de la relation entre la CNSA et les services des conseils départementaux et des MDPH. La CNSA n'a aucun lien hiérarchique ou d'autorité sur ces services ; dans le passé, elle a joué un rôle d'animation et de coconstruction de référentiels. Plus récemment, avec la feuille de route MDPH 2022, elle a accompagné une vingtaine de MDPH dans la conception et la mise en oeuvre de plans d'amélioration de la qualité, afin de réduire durablement leurs délais de traitement, en revisitant les processus d'instruction des demandes et de délivrance des droits.
Cette mission a connu un franc succès, notamment à la MDPH du Finistère, où les délais de traitement ont été divisés par deux, ou à la MDPH de l'Aisne dont le rétablissement a été spectaculaire.
Pour autant, dans le contexte de création d'une branche de la sécurité sociale dont les comptes sont désormais certifiés, il importe que nous puissions garantir l'ouverture de justes droits avec un contrôle interne dépassant le périmètre strict de la CNSA. Il faut en effet inclure le fonctionnement des services qui oeuvrent aujourd'hui pour l'ouverture des droits comme les commissions des droits et de l'autonomie des personnes handicapées (CDAPH).
Cette mission est donc étroitement liée à la création de la branche et à la certification de ses comptes globaux. Elle vise à garantir au certificateur la parfaite conformité des droits ouverts et soutenus par les financements de la branche aux référentiels adoptés. L'inscription de cette mission dans la COG de la CNSA ne s'oppose pas à nos autres activités, qu'il s'agisse du travail d'expertise et de promotion de la coconstruction avec les MDPH et les services autonomie, ou de l'activité d'audit. On pourra par exemple réaliser des études thématiques sur plusieurs MDPH pour identifier les modalités d'ouverture des droits à la prestation de compensation du handicap (PCH) qui est fort complexe.
Il s'agit pour nous, d'une part, de répondre aux attentes du certificateur et, d'autre part, de conforter nos capacités d'accompagnement des équipes dans leurs activités d'évaluation et d'instruction, afin de garantir l'équité de traitement des situations individuelles.
Concernant le SPDA, je confirme qu'un travail de préfiguration est en cours et que l'appel à manifestations d'intérêt a été lancé. Les résultats seront annoncés prochainement par Mme Bergé. En 2024, la CNSA travaillera à favoriser le développement de ce guichet unique en soutenant les préfigurateurs dans leur démarche et en coconstruisant avec les territoires, les outils qui aideront les autres départements à structurer un tel guichet.
Au sujet de l'apport de ce service aux personnes, nous partageons le constat de Dominique Libault sur le fait que les démarches administratives que doivent remplir les personnes âgées ou en situation de handicap s'apparentent encore trop souvent à un parcours du combattant. Elles sont complexes et il importe de pouvoir mieux coordonner les acteurs comme les MDPH, les dispositifs d'appui à la coordination, les points info services, les centres locaux d'information et de coordination (Clic), les centres communaux d'action sociale (CCAS), les services polyvalents de conseils départementaux qui, tous, apportent un service mais dont la lisibilité est loin d'être garantie.
M. Jean Sol, rapporteur. - Parce qu'ils ne se parlent pas ?
Mme Virginie Magnant. - Pas, ou pas assez. C'est donc pour en améliorer la qualité qu'est prévu ce dispositif, avec l'objectif d'être utile aux personnes.
Mme Jocelyne Guidez, rapporteure. - La proposition d'une programmation pluriannuelle est vraiment attendue et serait très appréciée. Aujourd'hui, l'aspect financier n'est pas extrêmement lisible. Pourriez-vous nous dire à quelle hauteur la CNSA contribuerait au financement des dépenses liées à la coordination du SPDA et au fonctionnement de la conférence des financeurs, dans le cadre de la conférence territoriale de l'autonomie ? Les concours de la CNSA au titre des dépenses décidées par cette conférence des financeurs ont-ils vocation à progresser ?
L'article 1er bis C qui prévoit la transmission par les départements à la CNSA de données relatives au nombre de financements de projets pérennes vous semble-t-il applicable ?
Comment appréciez-vous la proposition de réserver une fraction des bénéfices réalisés par les Ehpad privés lucratifs au financement des actions en faveur de l'amélioration des conditions d'accueil et d'hébergement des résidents ?
On parle des contrôles qui doivent être faits dans les Ehpad, mais qu'en est-il pour les établissements de personnes handicapées ? Il me semble que les contrôles doivent y être renforcés également.
Existe-t-il des possibilités de financement des services d'aide et d'accompagnement à domicile sous forme de dotation globale et quelles sont leurs éventuelles limites ? En la matière, quels sont les objectifs des expérimentations prévues à l'article 8 ? Vous semblent-elles de nature à améliorer le financement des services à domicile ?
M. Jean-René Lecerf. - Concernant les contrôles, j'accueille avec satisfaction votre remarque consistant à dire qu'il faut appréhender ensemble le grand âge et le handicap. Les dérives ont pu être plus importantes dans le secteur du grand âge, mais nul ne peut l'assurer.
Pour le secteur du handicap, il faut également prendre en compte le fait que certains États voisins, comme la Belgique, ont acquis une certaine compétence, qu'il faut certes contrôler, mais qui complique toute interruption brutale de la collaboration. Il faut revaloriser les entreprises situées à l'étranger qui travaillent bien, de la même manière qu'on le fait pour les entreprises françaises, car nous n'avons pas vraiment le choix.
S'agissant de la dotation globale portant sur le secteur de l'aide à domicile, tous les éléments de réflexion sont importants. C'est un secteur en grande difficulté alors qu'il est de plus en plus indispensable. Des efforts colossaux doivent être menés pour améliorer la reconnaissance financière et l'attractivité de la fonction. Pour ce faire, la proposition de loi prévoit notamment une aide à la mobilité pour les personnels. La CNSA, l'État ou les départements pourraient ainsi faciliter l'acquisition de véhicules ou l'accès à des véhicules professionnels, qui pourraient également être utilisés pour des trajets personnels.
Par ailleurs, une réforme doit entrer en vigueur le 1er janvier prochain afin de transformer les heures dites « de convivialité » en heures « de lien social », permettant que ces professionnelles soient rémunérées non seulement pour le temps qu'elles passent à faire la toilette et les repas, mais aussi pour le temps qu'elles consacrent aux discussions avec les personnes âgées ou handicapées. Ces personnes ont besoin de temps d'échange, qui doivent être pris en compte dans la définition des fonctions des personnels d'aide.
On est encore très loin des souhaits formulés dans différents rapports comme celui de Mme El Khomri qui appelait à créer 350 000 emplois dans l'accompagnement et le soin, un chiffre qui ne sera pas atteint. Par conséquent, à côté des aides à domicile, il faut être très vigilant sur les aidants qui représentent environ 8 millions de personnes. Les progrès réalisés en la matière restent insuffisants. Il faut également que l'État, au niveau des départements en particulier, adopte une approche différente sur la question des séjours de répit des aidants.
En effet, j'ai reçu de nombreuses protestations des territoires concernant des initiatives très riches consistant à mettre en place des structures d'accueil pour aidants et aidés, de façon à ce que la solution ne soit pas toujours de recourir à l'Ehpad pour deux ou trois semaines mais qu'il soit également possible de prendre ensemble les repos nécessaires. Ces solutions ne sont pas encouragées à la hauteur des enjeux aujourd'hui.
Mme Virginie Magnant. - Les financements dédiés à la prévention de la perte d'autonomie pour 2022-2026 dans le cadre de la COG sont très significatifs. La branche autonomie a prévu de mobiliser 1 milliard d'euros sur cette période pour soutenir les actions pilotées au niveau territorial par les conférences des financeurs. La trajectoire est ascendante. Les crédits progressent chaque année : les concours destinés à soutenir la prévention en résidence autonomie et ceux dédiés aux autres actions de prévention, en particulier collectives, représentent aujourd'hui plus de 50 % des crédits mobilisés par les conférences.
La CNSA est le premier financeur des actions de prévention, abstraction faite de l'accès aux aides techniques financées par l'assurance maladie via la liste des prestations et produits remboursables. La COG de la Caisse nationale d'assurance vieillesse (Cnav) lui permet de renforcer ses moyens dédiés à la prévention de la perte d'autonomie au travers des crédits d'action sociale mobilisés par les Carsat : nous accueillons avec plaisir ce renforcement de la capacité collective.
S'agissant de l'expérimentation des dotations forfaitaires, la réforme du financement des services autonomie à domicile (SAD) permettait de tracer le chemin d'un financement plus global avec la mise en place de la dotation complémentaire, puisque celle-ci est conditionnée à la signature des contrats pluriannuels d'objectifs et de moyens (CPOM). L'expérimentation de la dotation forfaitaire représente une avancée symbolique mais importante, car elle engage la rupture avec le principe d'un financement horaire. Elle permet de se rapprocher du mode de fonctionnement d'établissements médico-sociaux classiques, dans lesquels la dotation finance le fonctionnement global de la structure. On abandonne ainsi la référence à toute intervention horaire, très dénoncée par les acteurs comme allant de pair avec un fractionnement des interventions, une difficulté à financer les temps de coordination et des temps qui ne se mesurent pas strictement par la présence auprès de la personne accompagnée.
Mme Corinne Féret. - Je partage votre regret que l'on n'ait toujours pas cette grande loi autonomie promise depuis des années.
Au sujet du titre Ier qui concerne la création d'une Conférence nationale de l'autonomie et la mise en place d'un SPDA, des conférences territoriales n'auraient-elles pas été plus pertinentes pour garantir des réponses plus proches des acteurs concernés ? En outre, il existe des conférences des financeurs dans les territoires, mais comment trouver la bonne articulation avec la Conférence nationale ?
Le SPDA est issu d'un amendement du Gouvernement qui fait écho à une proposition de Dominique Libault dans son second rapport. Que pensez-vous de la façon dont les choses se sont passées ?
Les propositions formulées dans le titre III, sur l'accompagnement des professionnels notamment, sont-elles suffisantes pour rendre ces métiers attractifs ? En effet, les organisations syndicales ont rappelé que ces emplois étaient occupés à 95 % par des femmes et que plus de 66 % d'entre elles étaient à temps partiel non choisi. Des propositions sont faites en matière de mobilité, d'organisation, de temps d'échange, mais où sont les moyens ? Si ces mesures ne sont pas financées, elles ne sont pas applicables.
Enfin, je m'interroge sur la formation de ces femmes : celles-ci craignent d'être parfois maltraitantes, faute d'avoir été formées. Il faut rappeler que la maltraitance, ce n'est pas seulement en établissement.
Mme Corinne Imbert. - Pour l'expérimentation de la fusion des sections soins et dépendance, le Gouvernement avait annoncé que 20 départements au plus seraient concernés. Pouvez-vous nous confirmer que 16 départements ont été retenus ?
L'accueil familial n'est pas développé de la même manière dans les différents départements. La loi prévoit qu'un accueillant familial peut être agréé pour trois personnes au plus, et jusqu'à quatre s'il accueille un couple par dérogation accordée par le président du conseil départemental, et si les conditions le permettent. Que pensez-vous de l'accueil familial comme solution pour les personnes âgées ou handicapées ? Cette dérogation pourrait-elle être élargie à l'ensemble des accueillants familiaux, à condition bien sûr que les conditions d'accueil le permettent ? Compte tenu du vieillissement de la population et des réticences à entrer en Ehpad, l'accueil familial présente des atouts : la proximité et la possibilité pour les services du conseil départemental de faire un suivi des personnes, quand, en parallèle, de plus en plus de structures d'accueil ouvrent leurs portes sans agrément et échappent à tout contrôle.
M. Alain Milon. - Monsieur le président, vous avez déclaré douter de l'avenir de ces propositions de loi. On observe pourtant leur multiplication, exonérant le Gouvernement de faire ses propres lois. La semaine dernière, lors d'une audition d'opérateurs privés, l'un d'eux a déclaré que le prix de journée pouvait varier de 75 euros à 1 500 euros. N'y a-t-il pas un risque de voir certains tenter de transformer leur Ehpad en soins palliatifs ?
M. Philippe Mouiller, président. - Rappelons qu'une proposition de loi ne fait l'objet ni d'étude d'impact ni d'avis du Conseil d'État.
M. Jean-René Lecerf. - Les 16 départements ont été choisis dans le cadre de la préfiguration du SPDA - c'est une autre thématique.
À propos de l'accueil familial, il n'existe aujourd'hui qu'à dose très homéopathique... Or il connaît un vrai succès, notamment en milieu rural. Des opportunités existent tant pour les personnes âgées que pour les personnes en situation de handicap, y compris dans le milieu agricole. Quand le dispositif fonctionne bien, les personnes accueillies y restent jusqu'à leur dernier jour. Il me semble tout à fait pertinent de réfléchir à son développement, comme pour le logement partagé ou le logement inclusif.
Le fait que la conférence créée par l'article 1er soit nationale et non territoriale répond au constat qu'aujourd'hui en France, on a beaucoup de mal à garantir un minimum d'équité entre les situations des différents départements. J'ai été vice-président de l'Assemblée des départements de France, aujourd'hui Départements de France, chargé des finances et j'ai pu constater l'extrême difficulté d'obtenir des décisions oecuméniques. Pour aller vers plus d'équité ou d'universalité, il faut parfois imposer des structures qui ont une compétence nationale plutôt que locale.
Je ne critique pas les propositions de loi, mais j'ai quelquefois l'impression qu'elles servent à préparer la loi, ce qui n'était pas la raison d'être de ce droit d'initiative parlementaire. Bien que je puisse me vanter d'avoir eu une proposition de loi qui soit allée au bout du processus lorsque j'étais sénateur, le nombre de ces textes qui aboutissent est assez restreint. Néanmoins, la discussion que vous aurez sur la proposition de loi est fondamentale pour ce que sera l'avenir des lois de programmation. Elles devront être débattues tous les cinq ans si j'ai bien compris, afin de mettre en musique les décisions que vous aurez contribué à faire prendre.
Notre situation à la CNSA ressemble parfois à celle du législateur se trouvant sous les fourches caudines de l'article 40 de la Constitution. Depuis le vote de la COG, des ministres font des déclarations en faveur de la mise en place de politiques intéressantes mais coûteuses, et au moment du vote du budget on doit tirer les sonnettes. Il faut donner à la CNSA les moyens de tenir les promesses gouvernementales. Lorsqu'on demande d'utiliser les possibilités d'avenant de la COG, qui sont pourtant prévues, on a parfois l'impression de proférer des insanités. Mais nous y arriverons !
Mme Monique Lubin. - La mise en place du SPDA conduirait à une certaine uniformisation des services proposés dans les départements. Devons-nous y voir une territorialisation de la cinquième branche ? Les départements garderont-ils leur capacité d'innovation ? Je redoute une tentative d'amener la dépendance vers les ARS, et donc de priver les départements d'une partie de leurs compétences sur ce sujet.
Concrètement, comment le SPDA sera-t-il mis en place et qui le financera ? Ne faut-il pas craindre que progressivement le service ne puisse être maintenu que grâce aux financements des collectivités, comme on le voit pour les maisons France Services ?
Enfin, je rejoins tout ce qui a été dit sur les propositions de loi, qui permettent d'éviter d'avoir à réaliser une étude d'impact et donc de répondre à des questions. Je crains que cette proposition de loi ne conduise à créer des instances supplémentaires, mais qu'en est-il de l'offre ? Lorsque je discute avec mes concitoyens, ils ne sont pas inquiets de savoir où trouver l'information, mais plutôt de l'offre.
Vous avez évoqué les projets de certains départements à propos des aidants, mais il y a d'autres projets que nous peinons à financer. Ce qui m'intéresse, c'est l'offre. Cette proposition de loi n'empêchera-t-elle pas d'avoir un grand texte sur la dépendance ?
M. Olivier Henno. - Il y a une tension entre l'uniformité et l'équité ; il ne faudrait pas que les gens choisissent leur lieu d'habitation en fonction de ce que l'on offre dans tel ou tel territoire. Les Ehpad et les départements connaissent en outre des tensions financières. Pour ma part, je m'inquiète surtout de l'équité territoriale. Je suis pour la décentralisation, mais l'équité territoriale doit être assurée. Comment renforcer la légitimité de la CNSA dans le cadre de la cinquième branche et dans le respect de l'équité territoriale ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe. - Vous avez parlé d'universalité, mais ne confondons pas universalité et uniformité. Compte tenu de la centralité de la CNSA, je crains que le cahier des charges soit appliqué uniformément partout sur le territoire, alors qu'il est au contraire essentiel de réfléchir selon les territoires, autour du département ou d'un autre territoire, dans le cadre d'une convention entre le département, l'ARS et la structure concernée.
En matière de financement, il y a deux acteurs : la sécurité sociale, qui prend en charge le soin, et le département, qui finance le social. Mais comment garantir la cohérence, quand les équipes autonomes de soignants et d'aides à domicile fonctionnent en groupe ? Faut-il scinder son activité selon que ce que l'on fait relève de la sécurité sociale ou du département ? Il faudrait repenser les circuits de financement.
Mme Corinne Bourcier. - Une association m'a alertée sur l'insuffisance de la tarification qui leur est appliquée par rapport à leur coût de revient : le tarif d'une heure à domicile est 25,60 euros et le coût de revient est de 32 euros, sachant que l'on ne peut pas facturer de reste à charge. Cette tarification insuffisante met en péril l'équilibre financier de ces associations alors que la demande explose. Comment faire évoluer la tarification des services d'aide à domicile ?
Le chèque emploi service universel (Cesu) permet d'employer une personne à domicile. Ces services sont soumis à un contrôle, mais comment sont exercés les contrôles des personnes payées par Cesu ? Cela paraît bien obscur...
M. Jean-René Lecerf. - Je préfère l'universalité à l'uniformité. Il n'est pas sain que tout se passe de la même manière sur tout le territoire. Mais les services offerts sur le territoire doivent être comparables.
Ensuite, avec des mesures trop ambitieuses, ne risque-t-on pas de décourager l'innovation ? Actuellement, nous orchestrons la réforme des dotations de la CNSA aux départements ; cette réforme doit conduire à ce que les aides accordées soient proportionnelles aux difficultés de chaque département, car l'égalité complète est une rupture d'égalité. Les départements qui ont le plus besoin d'aide doivent être plus aidés. On le voit, des départements défavorisés, notamment ruraux, ont des tarifs planchers plus importants que les départements riches, qui peuvent avoir un tarif plancher très faible sans que cela leur coûte trop. Si l'on réforme les concours de la CNSA aux départements, on devra se pencher sur cette question.
La forfaitisation ne doit pas entraîner une diminution du temps passé au chevet de la personne, cela doit donner plus de souplesse. On évoquait le quota de neuf heures de lien social par mois lors d'un conseil d'administration récent de la CNSA ; ce sont des heures très intéressantes, car le compagnonnage, la conversation, sont importants. Mais certains départements envisagent de confier ces heures de lien social aux agents de La Poste. J'ai de la sympathie pour cet établissement, mais je ne peux pas accepter cela. Ce travail doit être assuré par des professionnels, qui pourront ainsi passer peu à peu d'un emploi du temps hachuré à un emploi à temps complet, d'autant que le salaire moyen est honteux.
Mme Virginie Magnant. - Monsieur Milon, vous nous interrogez sur le tarif des Ehpad et sur le positionnement des Ehpad commerciaux. La CNSA publie les tarifs des Ehpad. Les écarts des tarifs journaliers vont de 63 à 97 euros en moyenne, avec des prix plus élevés en région parisienne - 155 euros -, notamment dans les Hauts-de-Seine - 132 euros - mais aussi dans les Yvelines, et en Haute-Savoie. Cela correspond en réalité aux territoires où le prix du foncier est très élevé.
Les durées de séjour sont différentes aussi : elles sont d'autant moins importantes que le coût est élevé - c'est un dernier recours. Mais ce n'est pas aux seuls Ehpad de prendre en charge les publics très dépendants. Le financement du soin consacré aux Ehpad ne suffirait pas. Le modèle Pathos ne va pas jusqu'à la prise en charge des soins palliatifs. Cela dit, les liens entre les Ehpad et les filières gériatriques ou d'hospitalisation à domicile se sont renforcés à la faveur de la pandémie de covid-19, au travers de conventions. C'est indispensable pour assurer l'accueil des personnes en fin de vie.
Je veux dire un mot sur le soutien de la CNSA aux départements qui promeuvent l'accueil familial des personnes âgées. Dans le cadre des rencontres interdépartementales sur l'autonomie, je me suis rendue dans des départements où j'ai visité des maisons d'accueillants familiaux. Cela m'a beaucoup intéressée. Ce sont des maisons comparables à un habitat autonome. Il y a trois ou quatre résidents, avec un hôte qui est là en permanence. L'accueillant familial est salarié et agréé. Cela permet de disposer d'autres services et cela garantit à la fois un chez-soi et des activités pour les pensionnaires.
Mme Brigitte Devésa. - La maltraitance peut prendre de nombreuses formes et touche aussi les services à domicile. Les familles peuvent en partie compenser ces maltraitances quand elles accueillent le bénéficiaire, mais les contrôles sont insuffisants. Quand il y a une réelle maltraitance et que l'on porte plainte, les plaintes ne donnent lieu à aucun suivi, on met même en doute les témoignages des plaignants au motif qu'ils sont séniles. Comment améliorer la situation ?
M. Khalifé Khalifé. - Je suis inquiet des couches multiples que l'on ajoute les unes aux autres. Certains départements sont de bons élèves, ils ont essayé de trouver des solutions, mais cette nouvelle couche risque de les mettre en difficulté.
Le Sénat a adopté à l'unanimité un amendement sur le dispositif dit « Creton » lors de l'examen du PLFSS. Nous aimerions maintenant que le Gouvernement s'en empare, car il y a 10 000 personnes en attente. Qu'en pensez-vous ?
Mme Frédérique Puissat. - Il n'y a rien dans le texte sur l'accueil de jour pour les personnes atteintes de troubles du comportement, comme la maladie d'Alzheimer, car cela relève du pouvoir réglementaire. Mais la circulaire qui organise l'accueil de jour date de 2011 et on constate qu'il y est dérogé sur le terrain. Pourtant, l'ARS considère qu'un accueil de 2 ou 3 places n'est pas suffisant et ferme les services. En avez-vous entendu parler ? Que pensez-vous des seuils de 6 et de 10 personnes ? Une disposition législative pourrait-elle rendre la gestion plus souple sur le terrain ?
M. Jean-René Lecerf. - Sur
l'amendement Creton, il y a des progrès, notamment la volonté de
créer des places dans le cadre des « 50 000
solutions ». Le dernier PLFSS marque cette orientation. Sur les
dérives constatées dans les SAD, la seule solution est
forcément globale : il faut que les personnels soient plus
formés et plus nombreux. Il y a des cas de maltraitance, mais aussi des
exemples nombreux de personnes qui se dévouent pour un salaire de
misère. Je regrette par ailleurs la féminisation
outrancière
- 97 % - de cette fonction ! Dans les
départements, on essaie de recruter plus d'hommes assistants familiaux,
et on arrive à un équilibre 70 %-30 %.
Je comprends votre crainte que les départements les mieux disants soient pénalisés. Le tarif plancher a eu pour effet de compenser plus fortement les départements ayant fait le moins d'efforts.
Je suis moins pessimiste que vous sur l'évolution des tarifs. Le tarif est actuellement entre 24 et 25 euros, mais il faut ajouter souvent les 3 euros de qualité. Or, il n'y a pas si longtemps, on était encore à 16 euros. Les progrès dépendront de la qualité du recrutement et de la limitation d'un nombre de vacances de poste. Il y a beaucoup de congés maladie, car ce métier est devenu plus exposé aux risques. Cela s'explique par le fait que les aides techniques ne sont pas assez utilisées et que les formations sont insuffisantes. En outre, la personne qui n'a plus assez de force physique pour exercer ce métier doit cesser de l'exercer et devenir une personne ressource.
Mme Virginie Magnant. - Sur la qualité des accompagnements et les risques de maltraitance, vous soulignez les difficultés posées par les interventions trop fractionnées, des absences non remplacées ou un turn-over des intervenantes, qui sont des symptômes des difficultés existantes sur le recrutement et la fidélisation des professionnelles de l'autonomie. C'est un sujet central auquel la CNSA a consacré ses dernières rencontres sur les métiers de l'autonomie qui sont en tension. Un livre blanc a été remis au Gouvernement.
Le soutien de l'attractivité de ces métiers appelle une mobilisation collective pour actionner de nombreux leviers : la rémunération des professionnelles, les conditions de leur recrutement, le fonctionnement des services.
La CNSA n'intervient pas dans le contrôle des structures qui incombe au premier chef aux autorités de tarification et de contrôle, c'est-à-dire les départements et les ARS.
Nous faisons partie des acteurs mobilisés pour promouvoir des organisations bien traitantes et avons lancé à cette fin une étude d'évaluation très importante du fonctionnement des services en équipes autonomes, afin de rompre avec des interventions trop minutées et de conforter des interventions au plus près des besoins.
Via des conventionnements de plusieurs dizaines de millions d'euros avec les grandes fédérations d'aide à domicile, nous soutenons aussi la formation des professionnels, des managers de ces équipes pour les sensibiliser à des modes d'organisation bientraitants et à la lutte contre la maltraitance. Cette culture de la bientraitance doit régulièrement être promue pour obtenir des résultats. Il faut, en écho aux préoccupations du Conseil, redire que les personnes sont des sujets de droit et non des objets de soin et s'assurer du plein consentement de la personne aux soins et à l'accompagnement qui lui sont prodigués.
L'effort doit être collectif et la CNSA s'applique à mobiliser plusieurs leviers comme la formation, l'accompagnement des fédérations, la promotion de l'organisation bientraitante pour faire progresser cette qualité de service.
Enfin, sur la question du développement des places de répit, l'inspection générale des affaires sociales (Igas) a produit un rapport l'an dernier sur les freins à leur développement. Nous savons que le fait de conditionner la capacité des structures à organiser des séjours de répit avec un nombre de places minimum peut constituer un obstacle. En même temps, comme le rapport de l'Igas le soulignait, nous constatons avec dépit que les places peuvent être sous-occupées.
Mme Jocelyne Guidez, rapporteure. - La situation est différente selon les territoires car elle est liée aux problèmes de transports.
Mme Virginie Magnant. - Une réflexion est en cours pour étudier différentes solutions de répit, y compris à domicile, ce qui répondrait parfaitement au besoin des aidants d'être soutenus sans perturber le mode de vie de la personne aidée.
M. Philippe Mouiller, président. - Je vous remercie pour vos interventions.
La réunion est close à 11 h 45.
Ce point de l'ordre du jour a fait l'objet d'une captation vidéo qui est disponible en ligne sur le site du Sénat.