Mardi 19 septembre 2023
Cérémonie de remise du Prix 2023 de la délégation aux droits des femmes
Mme Annick Billon, présidente. - Mesdames les ministres, chères Élisabeth Moreno et Marlène Schiappa, mes chers collègues, chers lauréat et lauréates, Mesdames et Messieurs, c'est un grand plaisir pour moi de vous accueillir au Palais du Luxembourg pour la cinquième cérémonie de remise du prix de la délégation aux droits des femmes du Sénat, créé en 2019 à l'occasion du vingtième anniversaire de notre délégation, qui est donc assez jeune par rapport à notre institution.
Ce prix permet d'affirmer notre considération, et celle du Sénat tout entier, à l'égard d'actrices et d'acteurs de la lutte pour les droits des femmes et l'égalité entre les femmes et les hommes, sans qui aucun progrès dans ce domaine ne serait possible. Chaque année, nous mettons à l'honneur des personnalités qui ont contribué, par leur réflexion et leur engagement, à enrichir et à éclairer les travaux de notre délégation.
Alors que s'achève mon mandat de présidente de la délégation, cette cérémonie est aussi l'occasion de dresser un bilan de nos travaux au cours du dernier triennat, lors de la période 2020-2023. Je remercie les collègues, membres de la délégation, sénateurs et sénatrices, qui se sont engagés dans cette instance, dont le travail a parfois été décapant pour le Sénat, et souvent très efficace.
Ces travaux, très riches et variés, ont porté, au cours des trois dernières années, sur quatre grandes thématiques.
Tout d'abord, sur la lutte contre les violences faites aux femmes dans toutes leurs dimensions : violences sexuelles et sexistes, violences intrafamiliales, prostitution ou encore pornographie sont des préoccupations majeures et récurrentes de notre délégation. Remettre aujourd'hui le prix de la délégation, d'une part au juge Édouard Durand, d'autre part à Valérie Bacot et à Sylvie Testud, marque notre engagement indéfectible aux côtés des femmes victimes de violences, mais aussi de celles et ceux qui les accompagnent, les protègent et oeuvrent pour une prise de conscience collective.
Deuxième axe majeur de nos travaux : la situation des femmes dans l'ensemble de nos territoires et la mise en lumière des difficultés spécifiques auxquelles elles peuvent être confrontées, mais aussi des initiatives locales innovantes qu'elles peuvent faire naître. Nous avons ainsi publié en 2021 un rapport consacré aux femmes dans les territoires ruraux et plus récemment, en juillet dernier, un rapport consacré aux familles dans les outre-mer, en particulier aux mères seules. Christiane Lambert a été une interlocutrice privilégiée de notre délégation lors de nos travaux sur les agricultrices, souvent cheffes d'exploitations, et sur celles qui vivent dans les territoires ruraux. En lui attribuant le prix de notre délégation, nous saluons un parcours remarquable, mais aussi la force d'engagement des femmes de nos territoires.
Notre troisième axe de travail a concerné la place des femmes dans le monde du travail, avec deux rapports sur la parité en entreprise et dans la haute fonction publique. Je salue la présence de Dominique Vérien, une des deux rapporteures de ces rapports, qui a porté à mes côtés la proposition de loi visant à renforcer l'accès des femmes aux responsabilités dans la fonction publique, qui a très rapidement reçu l'approbation du ministre de la fonction publique Stanislas Guerini, puisqu'il communiquait sur sa possible adoption dès le 8 mars 2022 ; nous avons ainsi pu en achever le parcours législatif rapidement, avant la fin de la session parlementaire. Pour notre palmarès 2023, nous avons notamment tenu à saluer l'important travail accompli par l'association Femmes Ingénieures pour promouvoir, auprès des filles et des femmes, les formations et métiers d'ingénieurs. J'en profite pour remercier les collègues présents, car nous sommes en plein renouvellement sénatorial et il n'est pas évident de se libérer : Laurence Cohen, Marie-Pierre Richer, Laurence Rossignol, Dominique Vérien, Marie Mercier, Hussein Bourgi, Valérie Boyer, Loïc Hervé, Joëlle Garriaud-Maylam et Michelle Meunier. J'espère n'avoir oublié personne.
Enfin, notre quatrième axe de travail a été consacré aux sujets internationaux, avec un rapport sur l'aide publique au développement et plusieurs tables rondes consacrées à la lutte internationale pour les droits des femmes, notamment sur la situation des femmes et des filles afghanes, des Iraniennes ou encore des femmes en temps de conflits armés.
Comme vous pouvez le constater, nous avons intensément travaillé au cours des trois dernières années et nous avons, je l'espère, contribué, à notre niveau, à faire avancer la cause et les droits de toutes les femmes. C'est donc avec fierté et émotion que je vais maintenant procéder à la remise du prix de la délégation aux lauréates et au lauréat de la promotion 2023. (Applaudissements.)
J'invite, dans un premier temps, Édouard Durand à me rejoindre.
Cher Édouard Durand, chère Ernestine Ronai, nous avons tissé au cours des six dernières années, durant mes deux mandats de présidente de la délégation, une relation de confiance et d'amitié. Je vous remercie sincèrement tous les deux : j'ai eu de nombreux soutiens de la part des membres de la délégation et des sénatrices et sénateurs engagés pour les droits des femmes lorsque j'ai déposé une proposition de loi visant principalement à établir un seuil de non-consentement, et vous aviez largement contribué à parfaire ce travail. Je vous en suis éternellement reconnaissante. (Applaudissements.)
Cher Édouard Durand, votre sincère et forte implication dans la lutte contre les violences intrafamiliales est ici connue de tous. Vous êtes un interlocuteur fidèle et incontournable de notre délégation sur tous les sujets concernant les violences faites aux femmes, les violences faites aux enfants et la protection de l'enfance. Votre expertise et votre humanité en tant que juge des enfants, notamment au tribunal de Bobigny, en Seine-Saint-Denis, sont unanimement saluées.
Aux côtés d'Ernestine Ronai, avec qui vous formez un binôme emblématique, vous avez co-présidé la commission Violences du Haut Conseil à l'égalité entre les femmes et les hommes (HCE) et également créé le diplôme universitaire « Violences faites aux femmes » à l'université Paris VIII. À ce titre, notre délégation vous a entendu à plusieurs reprises en audition afin de recueillir votre expertise et votre éclairage, ce qui nous a été extrêmement précieux.
En 2020, au lendemain du confinement, dont on sait combien il a été ravageur en matière de violences intrafamiliales, vous aviez une nouvelle fois mis l'accent sur ce qui est pour vous une conviction majeure : le lien entre les violences conjugales et les violences faites aux enfants. Vous l'expliquez régulièrement : il existe une corrélation entre les violences conjugales et les violences physiques, psychologiques et/ou sexuelles faites aux enfants, puisque 40 % à 60 % des enfants témoins de violences conjugales en sont également directement victimes. En outre, même lorsque l'enfant n'est pas une victime directe, les violences subies par sa mère nuisent considérablement à son bien-être et à son développement. Nous nous rejoignons évidemment autour de cette conviction.
Depuis deux ans, et j'espère pour encore longtemps, vous co-présidez la Ciivise, la Commission indépendante sur l'inceste et les violences sexuelles faites aux enfants. Votre travail, jusqu'à présent, y a été titanesque et salvateur.
À titre personnel, je vous remercie des échanges que nous avons eus et de l'expertise que vous avez partagée avec les Vendéens en participant à une réunion que j'avais organisée à La-Roche-Sur-Yon avec le Zonta Club et sa gouverneure, Christine Mousset, que je salue.
Vous vivez, psychologiquement et physiquement, tous les sujets que vous portez avec une sincérité à toute épreuve, envers et contre tous. Compte tenu du nombre d'enfants concernés, j'espère que les travaux de la Ciivise pourront se poursuivre, pour que les parlementaires et le Gouvernement puissent accompagner la reconnaissance et la réparation, si cette dernière est possible, pour toutes ces victimes, bien plus nombreuses qu'on ne le croit.
C'est donc avec un immense plaisir et une profonde émotion que je vous remets aujourd'hui cette médaille consacrant votre indéfectible engagement pour la cause des femmes et de toutes les victimes de violences. Au nom de l'ensemble de la délégation, je vous remercie très sincèrement de votre action et votre implication. À l'issue de mon engagement politique, je pourrai dire que notre rencontre, avec Ernestine Ronai, aura véritablement marqué mon action. Je vous remercie, monsieur le juge, ainsi que votre binôme inséparable. (Applaudissements.)
M. Édouard Durand, magistrat, co-président de la Ciivise. - Madame la présidente, Mesdames les sénatrices, Messieurs les sénateurs, Madame Schiappa, Mesdames et Messieurs, c'est la première fois de ma vie que je reçois un prix. J'en suis très heureux et très fier. Vous me faites un grand honneur. Il y a mon nom dessus, mais je le reçois pour moi-même et pour toutes les personnes avec lesquelles et pour lesquelles je partage la vie.
C'est un soutien personnel d'abord, parce que quand on se sent seul, on doute de la légitimité de son action, et il est bon d'être soutenu, de savoir que l'on a des amis et que les mots que l'on prononce ne le sont pas en vain ou dans le vide. C'est une grande joie de sentir que parfois, les mots que je prononce résonnent en vous.
C'est évidemment un prix collectif, puisqu'on n'est jamais seul. Je me méfie toujours des personnes qui disent qu'elles se sont construites seules. J'ai une histoire, j'ai une éducation, j'ai un tempérament, une famille, des alliées et alliés, nombreuses et nombreux ici, des compagnons et des compagnes de lutte. À toutes les personnes qui partagent cet engagement, je dédie ce prix que je reçois aussi en leur nom.
Vous ne serez pas surprise, Madame la présidente, que je commence évidemment par le partager avec la première dame qui a été récipiendaire du prix de la délégation aux droits des femmes il y a quelques années déjà, l'infatigable, l'indestructible, l'incorruptible Ernestine Ronai. (Applaudissements.) Au septième jour de la création, le Bon Dieu vous regarda et vit qu'il avait bien fait. (Sourires et applaudissements.)
Je voudrais que vous partagiez cette ovation avec toute l'équipe de la Ciivise, mes collègues assis au fond, qui, à leur place, chaque jour, avec une minutie et une attention extrêmement généreuse, accueillent nos semblables qui ont été victimes de viols dans leur enfance, prennent l'ascenseur avec elles pour les mener jusqu'à la Ciivise, les accueillent lors de nos réunions publiques, partout sur la surface de cette petite Terre. Vous faites un travail magnifique, chers collègues, et je vous en suis infiniment reconnaissant. (Applaudissements.)
Nos réflexions, nos engagements, nos propositions, tout cela serait vain s'il n'y avait pas des parlementaires et des ministres qui les retenaient et les portaient sur leur cheval de bataille. À vous, Mesdames et Messieurs les parlementaires et les ministres, je dis ma reconnaissance, mes voeux pour votre réélection (sourires), pour vos combats et vos engagements. Nous serons toujours à vos côtés, quel que soit le côté où vous vous situez.
Enfin, évidemment, vous me permettrez de dire ce qui fait que je suis ici aujourd'hui, et la raison pour laquelle je ne mérite absolument pas le prix que vous voulez bien me décerner : parce qu'il n'y a pas d'honneur ni de joie à se préoccuper de la souffrance des autres. Et si vous me pensez digne de recevoir un prix de la République, c'est parce qu'il y a des enfants qui vivent tous les jours dans la terreur, des femmes qui ont cru avoir rencontré un homme humain et qui vivent elles aussi dans la terreur et l'injustice.
Je veux vous citer l'un des témoignages que nous avons reçus à la Ciivise : « Ce que je voudrais dire, c'est que je témoigne pour tous ceux qui en sont morts, qui se sont jetés d'un pont, sous un train. Je voudrais témoigner pour tous ceux qui ont choisi de mourir plutôt que de vivre dans le néant, tous ceux qui en sont devenus fous, malades, réellement fous, tous ceux qui n'ont pas pu sortir le chaos de leurs entrailles, tous ceux qui ont fini par mourir de leur belle mort, mais en même temps découpés en deux et dévastés, tous ceux qui ont passé leur vie murés dans le silence. Et avec tous ceux-là, donc, je témoigne pour tous ceux qui n'ont pas cette voix. Je veux juste dire : ce que nous avons vécu, c'est l'horreur. C'est la solitude extrême. C'est un froid, c'est une incompréhension. C'est le fin fond de l'humanité à l'endroit où tout est dévasté. Ça n'a pas de mot, c'est un enfer. Et nous sommes une multitude. Nous sommes terrés dans le silence et la peur, mais nous sommes là et nous sommes aussi un des visages de l'humanité. Et ce que je voudrais dire, c'est que, tous ceux-là, ils aspirent à la lumière et que, au-delà de mes mots, ma parole, elle est aussi pour eux. »
Ma parole, à moi aussi, est pour elles et eux. La vôtre aussi. Puissent ceux qui disposent du pouvoir avoir la grâce de maintenir la Ciivise, pour que la Ciivise puisse continuer à recueillir cette parole, lui signifier au nom de tous que cette parole est digne et légitime. Il n'est pas sûr que je sois entendu, mais je l'aurai dit. (Applaudissements.)
Je ne l'ai pas assez souligné : il faut remettre le monde à l'endroit. Je suis un juge, un juriste et j'appelle cela une législation plus impérative. La délégation aux droits des femmes, et Annick Billon, qui a donné son nom à cette loi, ont remis le monde à l'endroit, en disant que quand un adulte met son pénis dans le corps d'un enfant, ça s'appelle un viol, et pas autre chose. Il vous a fallu beaucoup de courage pour cela, à vous toutes et tous dans cette délégation, et cet honneur, vous le garderez pour l'éternité. (Applaudissements.)
Mme Annick Billon, présidente. - Nous vous écoutons toujours avec beaucoup d'émotion. Je partage vos remerciements avec mon groupe ainsi qu'avec les sénateurs et sénatrices présents, qui ont été des soutiens indéfectibles, comme les associations et les personnalités engagées.
La tonalité est un peu dramatique et j'en suis désolée, mais les sujets que nous portons sont souvent très difficiles ; notre travail sur l'industrie de la pornographie, dont les co-rapporteures à mes côtés étaient Laurence Cohen, Laurence Rossignol et Alexandra Borchio Fontimp, nous a fait vivre des séquences extrêmement douloureuses et marquantes. Il était important, via ce prix, de souligner l'émotion et la difficulté de ces sujets.
J'invite désormais Valérie Bacot et Sylvie Testud à me rejoindre.
Mesdames, c'est avec beaucoup d'émotion que nous vous accueillons toutes deux aujourd'hui au Sénat.
Madame Valérie Bacot, nous vous avions reçue au sein de notre délégation le 4 novembre 2021. Vous nous aviez livré un témoignage bouleversant du calvaire que vous avez traversé et des défaillances des structures qui auraient dû vous venir en aide. Vous menez désormais un combat afin que ce qui vous est arrivé ne se reproduise plus.
Vous nous l'aviez expliqué : votre premier objectif est de faire connaître le « syndrome de la femme battue » et les phénomènes d'emprise, afin que les femmes qui les vivent en prennent conscience et que les professionnels de santé et les forces de l'ordre, comme la colonelle de gendarmerie Véronique Sandahl ici présente, sachent les reconnaître et accueillir au mieux la parole des femmes qui se tournent vers eux.
Vous vous battez également pour que les femmes vivant dans les campagnes soient mieux prises en charge. Malheureusement, dans les campagnes, même lorsque « tout le monde sait », les violences sont bien souvent tues et ignorées. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle votre livre s'intitule Tout le monde savait. Il est donc primordial de faire venir davantage de dispositifs d'aide dans les campagnes et de les faire connaître. Vous-même nous aviez dit n'avoir découvert le 3919, numéro d'urgence pour les femmes victimes de violences, qu'au tribunal... Lors de notre travail sur femmes et ruralités, nous nous sommes rendu compte que l'on croit, parce que l'on a un smartphone à la main, que l'information circule, mais parfois cette dernière circule moins bien que si nous n'en avions pas...
Merci, chère Madame Bacot, d'être présente aujourd'hui. Je sais combien vous êtes pudique et sensible, et combien il est toujours douloureux pour vous de vous exprimer en public.
Je salue également la présence à vos côtés de celle qui vous a incarnée dans l'adaptation au théâtre de votre livre Tout le monde savait. Madame Sylvie Testud, en décembre 2022, beaucoup de sénatrices et de sénateurs de la délégation ont assisté à une représentation de Tout le monde savait au théâtre de l'OEuvre. Je m'en souviens très bien : nous nous retrouvions pour un moment de convivialité, et nous avions choisi d'aller vous voir au théâtre. Je reste estomaquée par le souvenir de votre performance. J'avais l'impression que vous ne formiez qu'un avec cette vie et ces souffrances, que vous incarniez totalement le personnage. À l'issue de la représentation, je me suis dit que ce travail, répété aussi régulièrement, devait être physiquement et mentalement une épreuve de haut niveau. Seule sur scène, vous avez joué tous les rôles et même fait vivre les absents : son bourreau, mais aussi tous ceux qui se sont tus, qui savaient, mais n'ont rien fait, qui auraient pu venir en aide, mais ont préféré détourner le regard. Ce silence meurtrier est lancinant tout au long de la pièce. La tension était palpable dans la salle.
Je pense que c'est la force de cette pièce : nous faire prendre conscience, à nous spectateurs, de notre rôle et de l'impérieuse nécessité d'entendre la parole des victimes, comme l'évoquait à l'instant Édouard Durand. C'est aussi cela le théâtre : ouvrir les yeux et les oreilles du public et créer des prises de conscience collectives. Je suis convaincue que votre performance y a contribué largement.
Mesdames, vous attribuer à toutes deux le prix de la délégation aux droits des femmes est une façon pour nous de signifier notre vigilance continue face aux violences conjugales et notre combat pour soutenir les femmes victimes. Madame Bacot, votre audition au Sénat a été vécue comme un moment traumatisant : la manière dont vous avez raconté votre histoire, simplement, avec vos mots et votre pudeur, nous a tous marqués, pour longtemps. Votre témoignage et votre action aident les victimes : nous vous en remercions. (Applaudissements.)
Mme Valérie Bacot, auteure de Tout le monde savait. - Il est compliqué de s'exprimer après Édouard Durand, dont le discours m'a énormément parlé et émue.
Madame la présidente, Mesdames, Messieurs, mes chers amis, merci bien. Merci de m'avoir donné la chance de m'exprimer au Sénat, et d'avoir accompagné cette audition par une remise de prix. Je dédie cette médaille à toutes les victimes de violences conjugales ainsi qu'à toutes les personnes décédées sous les coups de leurs conjoints ou conjointes. (La voix de l'oratrice se noue.)
Toutes les médailles du monde n'auront jamais autant de poids que votre pouvoir à vous, élus de la République.
J'ai l'espoir que tous ensemble nous puissions faire avancer les choses, du fond du coeur. Merci beaucoup. (Applaudissements.)
Mme Sylvie Testud, comédienne. - « Vous avez l'impression que les personnages vont tout vous prendre, mais, en fait, ce sont eux qui vous donnent tout. », déclarait Isabelle Huppert lors du dernier Festival de Cannes. C'est exactement ce qui m'est arrivé en jouant sur scène l'histoire de Valérie Bacot. Je n'avais pas accepté d'emblée, ne sachant pas si j'aurais suffisamment de retenue et de recul face à tout ce qu'elle a traversé, et avec quel courage ! Mais l'essentiel pour moi était de transmettre, de sortir des statistiques pour faire appel à l'humanité et à la sensibilité des gens. Le trac, je ne l'ai eu que pour me demander si je saurais faire preuve d'autant de dignité et de courage qu'elle. J'ai incarné deux personnages très forts : l'avocate et Valérie, qui, malgré les souffrances endurées, a réussi à garder assez d'amour pour protéger ses quatre enfants. Merci de m'avoir tant apporté, Valérie ! (Applaudissements.)
Mme Annick Billon, présidente. - Je vous remercie vivement, Mesdames, d'être parmi nous aujourd'hui. Votre présence nous tenait particulièrement à coeur. Notre délégation est ravie d'avoir modestement contribué à faire rayonner vos travaux. (Applaudissements.)
J'invite désormais Christiane Lambert à me rejoindre. Chère Christiane Lambert, je suis très heureuse de vous accueillir de nouveau au Sénat et de vous remettre aujourd'hui le prix de la délégation aux droits des femmes. Vous avez participé à nos travaux à plusieurs reprises, tout comme Jacqueline Cottier, ancienne présidente de la commission des agricultrices de la Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles (FNSEA), que nous avons souvent entendue en audition et que je souhaite également associer à ce prix.
Nous vous avions ainsi accueillie en mai 2017, un mois seulement après votre élection à la présidence de la FNSEA, premier syndicat d'exploitants agricoles de France. Cette audition s'inscrivait dans le cadre des travaux préparatoires à notre rapport Femmes et agriculture. Vous nous aviez alors exposé l'action que vous entendiez mener au sein de la FNSEA, ainsi que vos priorités pour accompagner au mieux les agricultrices. Vous aviez notamment insisté sur l'importance de la formation, déplorant que les agricultrices ne s'en saisissent pas suffisamment, du fait des difficultés à quitter l'exploitation.
Vous aviez également évoqué alors les très faibles revenus des femmes retraitées de l'agriculture. L'amélioration des retraites des agriculteurs et des agricultrices a été l'un de vos combats ; il a trouvé sa concrétisation dans plusieurs textes que nous avons adoptés. Je pense en particulier à la loi du 17 décembre 2021, qui a permis une revalorisation de 100 euros par mois en moyenne des plus petites retraites agricoles, celles des conjoints collaborateurs et des aides familiaux, qui sont des femmes dans 70 % des cas.
À l'occasion de la Journée internationale des droits des femmes, le 8 mars dernier, dans le cadre d'une journée consacrée au thème : « Femmes et ruralités », vous nous aviez livré un puissant témoignage sur votre parcours personnel et votre engagement professionnel et syndical. Au-delà de votre implication dans votre exploitation, que vous avez gérée avec votre mari, vous avez gravi tous les échelons du syndicalisme agricole, au sein des Jeunes agriculteurs dès l'âge de dix-neuf ans, puis au sein de la FNSEA.
À l'issue de votre témoignage, vous aviez également lancé un appel aux vocations féminines dans l'agriculture, soulignant que les métiers agricoles ont aujourd'hui besoin de jeunes filles et de jeunes femmes. Vous vous étiez félicitée que les jeunes filles soient de plus en plus nombreuses dans les écoles d'agriculture, y compris dans des métiers et secteurs qui étaient par le passé exclusivement masculins. Un parcours tel que le vôtre est une source d'inspiration pour ces jeunes femmes !
C'est donc un privilège pour moi de vous remettre cette médaille, au nom de l'ensemble des membres de la délégation. (Applaudissements.)
Mme Christiane Lambert, ancienne présidente de la FNSEA. - J'avoue qu'il n'est guère aisé de prendre la parole après les témoignages de M. Durand et de Mmes Bacot et Testud. En tant que femme, mère et, depuis peu, grand-mère, je suis particulièrement interpellée. Dans notre société parfois tumultueuse, la famille doit être le cadre de protection, de confiance et d'amour qui construit des personnes. On peine à imaginer que de tels actes aient pu exister. Et pourtant, ils ont existé !
J'ai toujours beaucoup aimé venir m'exprimer devant le Sénat, une assemblée dont les membres sont des hommes et des femmes de territoires et dont la qualité d'écoute est très appréciable à une époque où prévalent punchlines et effets de tribune.
Je dédie ce prix à toutes les femmes agricultrices, qui représentent aujourd'hui 30 % de la profession. Les femmes, longtemps invisibilisées - le mot « agricultrice » n'est entré dans Le Larousse qu'en 1961, année de ma naissance -, sont créatrices de liens. Leur sensibilité s'exprime dans l'action et dans l'engagement, avec comme moteur et comme carburant l'intérêt général et le besoin d'être utiles aux autres.
Je veux également partager cette distinction avec des gens qui ont compté pour moi, depuis le lancement de mon exploitation agricole du Cantal en 1980, quand j'avais dix-neuf ans : mes parents, qui m'ont transmis des valeurs chrétiennes et terriennes, véritable fil conducteur de mon engagement ; les responsables des Jeunes agriculteurs qui m'ont inspirée et donné le goût du militantisme, comme Michel Teyssedou et Michel Fau.
J'ai toujours défendu le lien, que certains s'acharnent aujourd'hui à distendre, entre agriculture et environnement - ceux qui entretiennent au quotidien les paysages, les espaces et la biodiversité, ce sont les agriculteurs et les agricultrices -, en mettant l'accent sur la formation, notamment dans le cadre de mes fonctions au sein de l'Institut de formation des cadres paysans, lancé sur l'initiative de Michel Debatisse et à la présidence de Vivea, le fonds de formation des entrepreneurs du vivant, durant douze ans aux côtés de ma directrice Béatrice Dingli.
Ayant côtoyé plusieurs présidents de la FNSEA, comme Luc Guyau, Jean-Michel Lemétayer et Xavier Beulin, je savais que la fonction était exigeante et stressante, mais qu'elle donnait aussi la capacité de changer les choses et d'être utile aux autres. C'est ce qui m'a conduite à l'accepter à la suite du décès brutal de Xavier Beulin. J'ai pu compter sur mon numéro deux, Jérôme Despey, ainsi que sur de nombreux collaborateurs et collaboratrices avec lesquels j'ai tissé des relations fortes, comme Pascale Gélin, qui fut ma directrice pendant vingt-trois ans, et tant d'autres femmes : Rachel, Florence, Anne, Marion, Patricia. Cela m'a permis d'obtenir des augmentations des revenus agricoles grâce aux lois alimentation et aux dispositifs fiscaux et assurantiels obtenus, d'améliorer les retraites des agriculteurs et des agricultrices et enfin d'améliorer l'image de la profession, en faisant connaître et rayonner l'agriculture au-delà des cercles traditionnels.
Au moment de mon départ de la présidence de la FNSEA, Mme la sénatrice Joëlle Garriaud-Maylam, présidente de l'assemblée parlementaire de l'Otan, m'a accordé le prix du rayonnement international, car j'assure la présidence du Comité des organisations professionnelles agricoles de l'Union européenne (Copa), qui représente 21 millions d'agriculteurs et leurs familles. Je préside ainsi le syndicat européen avec des convictions européennes chevillées au coeur et au corps.
Je souhaite enfin évoquer celui sans lequel rien n'aurait été possible : mon mari, Thierry. Il est l'eau ; je suis le feu. C'est lui qui restait aux côtés de nos enfants pendant que je partais quatre ou cinq jours par semaine. Tous trois ont aujourd'hui de belles situations professionnelles : Guillaume travaille dans le domaine des chiffres, c'est tout à fait l'ADN de mon mari ; Thibaut nous a rejoints dans l'exploitation, à notre grande satisfaction ; et Pauline, en plus d'être chargée d'études sur les fermes laitières bas-carbone dans un institut de recherche, a choisi récemment de faire la traite trois matins par semaine et le week-end chez un éleveur voisin. L'amour des animaux, c'est quelque chose qui ne s'explique pas : ça se vit.
Je remercie la délégation aux droits des femmes du Sénat de cette reconnaissance et de cette mise en valeur de parcours particuliers. Lorsque je vois les étoiles dans les yeux d'agricultrices qui m'entendent parler d'elles, lorsque des agriculteurs me disent qu'ils sont fiers et heureux de la manière dont je les ai défendus, je me dis que je ne me suis pas engagée pour rien. C'est pour moi une immense satisfaction. Merci encore ! (Applaudissements.)
Mme Annick Billon, présidente. - Chère Christiane Lambert, je vous remercie de nous avoir montré que l'on pouvait être une femme engagée, battante, et réussir sa vie personnelle. Votre parcours est inspirant : vous pouvez servir de modèle pour tant de jeunes filles, et même de jeunes hommes, sur l'ensemble du territoire national.
Voici le moment de décerner notre dernier prix, à Mme Aline Aubertin, présidente de l'association Femmes Ingénieures. Chaque année, nous distinguons, au-delà de personnalités marquantes, une association dont nous souhaitons saluer l'action en faveur des droits des femmes et de l'égalité entre les femmes et les hommes.
Cette année, notre choix s'est très spontanément et unanimement porté - Dominique Vérien a beaucoup milité en ce sens - sur l'association Femmes Ingénieures, qui a participé, le 8 mars 2022, à un événement organisé, avec la délégation aux entreprises, sur la place des femmes et la mixité de genre au sein des entreprises. Mesdames les ministres, nous l'avons bien vu lors de l'examen de plusieurs textes issus tant de l'Assemblée nationale que du Sénat : la place des femmes dans les entreprises et la fonction publique n'a rien d'une évidence. Or encourager la mixité des emplois est l'une des préoccupations majeures de notre délégation, alors que les femmes ne représentent encore qu'un quart des ingénieurs et un quart des salariés du secteur numérique, dont le potentiel d'emplois est pourtant massif.
Nous sommes convaincus que c'est en amont qu'il faut agir, auprès de nos jeunes : étudiants, lycéens, collégiens et même écoliers. Les jeunes filles ne représentent que 28 % des étudiants en école d'ingénieur, un taux qui stagne depuis dix ans. Depuis 2017, avec la grande cause nationale, les femmes ont été mises en avant ; et pourtant, les chiffres stagnent... En classe de terminale, en 2022, alors que les doublettes « Humanités » comptaient 80 % de filles, les doublettes « Mathématiques et sciences de l'ingénieur » et « Mathématiques, numérique et sciences informatiques » n'en comptaient que 10 %.
Il est donc primordial de casser les stéréotypes de genre et de donner aux jeunes filles l'envie de s'orienter vers les filières scientifiques. Nous croyons à l'importance des modèles comme à la force des réseaux féminins, qui font la preuve de leur efficacité, dans le monde professionnel comme dans le monde politique. C'est pourquoi nous tenons à saluer les actions menées par Femmes Ingénieures.
La mission de cette association est double. D'une part, aller auprès des jeunes filles, dans les établissements scolaires et d'enseignement supérieur et dans les forums des métiers, afin de promouvoir le métier d'ingénieur et les aider à s'y projeter en mettant en avant des femmes ingénieures. Et il y a aussi des sénatrices ingénieures ! D'autre part, accompagner les ingénieures dans la valorisation de leur parcours et aider les entreprises à améliorer la mixité en leur sein et dans les conseils d'administration.
Je suis particulièrement heureuse de vous remettre ce prix. C'est aussi pour moi l'occasion de saluer l'initiative de ma précédente homologue à l'Assemblée nationale, Marie-Pierre Rixain, dans le domaine de la parité au sein des comités de direction des grandes entreprises, mais aussi celle de Dominique Vérien et Martine Filleul pour que les femmes occupent des postes à responsabilité dans la fonction publique. À travers vous, je souhaite saluer toutes les femmes ingénieures, mais aussi toutes les jeunes filles auxquelles vous donnez envie de s'engager dans ces parcours. Avec l'introduction de seuils de parité au sein des entreprises, les jeunes filles vont être très recherchées : des parcours professionnels exceptionnels les attendent ! (Applaudissements.)
Mme Aline Aubertin, présidente de l'association Femmes Ingénieures. - C'est avec une très grande émotion que je reçois ce prix au nom de Femmes Ingénieures. Mon émotion est d'autant plus grande que je le reçois de vos mains, Madame la présidente Billon. Votre présidence s'achève et les travaux de votre délégation furent très riches. Permettez-moi de les rappeler, car ils nous concernent.
Je pense d'abord à la lutte contre les violences faites aux femmes, qui pourrait pourtant paraître éloignée de l'objet de notre association, mais ces violences sont à la racine du stéréotype selon lequel les femmes ne seraient pas légitimes dans certains domaines et dans certains métiers. C'est pourquoi l'association Femmes Ingénieures a été l'une des associations présentes autour de Laurence Rossignol, alors ministre et désormais sénatrice, qui avait souhaité que l'égalité femmes-hommes soit intégrée à son portefeuille et avait créé le collectif Ensemble contre le sexisme. Je suis très émue de partager ce micro avec les autres lauréats : avec leurs compétences, leur histoire, leurs forces, ils contribuent à lutter contre ces violences.
Autre sujet : la situation des femmes dans nos territoires, notamment ruraux. Ce sujet me touche à titre personnel : permettez-moi d'avoir une pensée pour ma grand-mère, agricultrice puis retraitée de l'agriculture, sans profession et sans reconnaissance, ainsi que pour ma tante, qui vient de prendre sa retraite d'agricultrice. C'est grâce à vous, Madame Christiane Lambert, que la situation de la deuxième est un peu moins difficile que la celle de la première...
Enfin, la délégation a travaillé sur la place des femmes dans le milieu professionnel et porté son attention sur les femmes qui vivent dans des pays où elles sont opprimées.
C'est parce que nous avons la conviction que l'égalité réelle est source de richesses que l'association Femmes Ingénieures valorise les ingénieures pour inspirer notre société. Depuis maintenant quarante et un ans, notre mission est d'atteindre la mixité et l'égalité dans les faits - nous n'y sommes pas encore -, d'inspirer autour de nos valeurs - l'audace, l'ouverture, le respect, l'équilibre et l'indépendance -, de promouvoir le métier d'ingénieur auprès des filles et des femmes dans le monde de l'éducation - avec en moyenne une intervention par jour en milieu scolaire -, de rendre les ingénieures visibles dans l'entreprise et dans la société - car ce manque de visibilité explique que les jeunes filles aient du mal à se projeter dans nos études et dans nos métiers - et enfin de faire rayonner et de développer la collaboration.
Notre association est reconnue d'intérêt général et organisée en délégations régionales, donc présente dans tous les territoires. Nos membres sont des hommes et des femmes qui exercent des fonctions scientifiques ou d'ingénieurs, mais aussi des personnes morales - associations ou entreprises - qui nous soutiennent. Je salue nos membres présents aujourd'hui. En leur nom, je vous remercie de mettre notre association en lumière.
Vous avez évoqué la désaffection des bachelières pour les matières scientifiques, en particulier les mathématiques. L'année 2023 constitue la troisième année du nouveau baccalauréat qui était censé diversifier les profils des élèves pour améliorer l'entrée dans les études supérieures et dans le monde du travail - intention louable -, mais le nombre de bachelières scientifiques a été divisé par près de trois par rapport à 2020. Alors que les secteurs de l'industrie, du conseil, du numérique et de la haute technologie ont des besoins croissants de personnes qualifiées en sciences, moins de femmes s'orientent vers ces métiers. Ce monde économique est inquiet de la trop faible présence des femmes.
On entend beaucoup de choses sur la façon de motiver les jeunes femmes à s'orienter vers des études scientifiques, notamment des études d'ingénieurs. En ma qualité de présidente de Femmes Ingénieures et de directrice générale de l'Institut supérieur d'électronique de Paris (Isep) - une grande école des technologies du numérique -, je considère que l'enjeu majeur n'est pas, ou plutôt n'est plus, la volonté des écoles d'accueillir des jeunes filles, mais la sensibilisation des bachelières, des collégiennes, et même des écolières à la variété de nos métiers, au plaisir que nous avons à les exercer, en étant bien rémunérées, en connaissant le plein emploi et en ayant un impact sur les grands enjeux du monde.
Il faut dire aux jeunes filles que pour sauver le monde, pour résoudre les problèmes environnementaux, de santé, de mobilité, d'énergie et d'éthique sur les réseaux sociaux et dans l'intelligence artificielle, nous avons besoin de compétences scientifiques et techniques et nous avons besoin des femmes.
Nous avons donc de nombreux projets à mener. Être ainsi reconnus aujourd'hui, savoir que les élus sont à nos côtés, est source d'énergie supplémentaire pour nous. C'est important pour toutes les personnes qui oeuvrent pour faire connaître la réalité de nos métiers.
Vous pouvez compter sur notre engagement, aujourd'hui comme hier et comme demain. (Applaudissements.)
Mme Annick Billon, présidente. - L'engagement de la délégation est varié. Il y a bien sûr la lutte contre les violences faites aux femmes, mais aussi la ruralité, le travail, l'emploi, la formation, etc. Toutes les femmes sont différentes et toutes les problématiques méritent d'être embrassées.
Nous avons créé ce prix il y a cinq ans, car la délégation ne peut pas travailler toute seule : elle a besoin de vos compétences et des témoignages des associations et de leurs militants.
C'est avec plaisir et honneur que j'ai présidé cette délégation. Je n'étais pas seule : avec mes collègues et nos équipes, nous avons formé une petite famille. Nous avons parfois fait avec les moyens du bord, pendant le confinement notamment. Je me souviens que le 3919 était alors assez méconnu, mais des initiatives ont fleuri partout : dans les gendarmeries, mais aussi sur les cartons de pizzas, les sachets de pain, etc.
Pour lutter contre les violences intrafamiliales, nous devons nous sentir tous concernés, comme le dit si bien le titre de votre livre, chère Valérie Bacot. Nous devons nous engager collectivement, hommes et femmes, pour faire progresser l'égalité et lutter contre les violences intrafamiliales.
Ces prix ont été attribués avec coeur, j'espère que vous l'aurez senti. (Applaudissements.)