Jeudi 4 mai 2023
- Présidence de M. Pierre Henriet, député, président -
La réunion est ouverte à 9 h 40.
Audition publique sur les perspectives technologiques en matière de batteries : progrès incrémentaux ou innovations de rupture ? (Gérard Leseul, député, et Gérard Longuet, sénateur, rapporteurs)
M. Pierre Henriet, député, président de l'Office. - Mesdames et messieurs, chers collègues, je vous souhaite la bienvenue à l'audition publique organisée par l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST) sur les avancées technologiques en matière de batteries.
Depuis les années 1990, les batteries lithium-ion ont permis le développement du recours à l'électricité mobile. Elles équipent non seulement nos smartphones, mais aussi les véhicules électriques, dont le nombre se multiplie. Des interrogations se font toutefois jour sur le possible épuisement des ressources en lithium et le coût écologique de leur exploitation. Ces raisons, combinées à des motifs commerciaux, ont suscité de nombreux travaux de recherche visant à améliorer la capacité et la fiabilité des batteries. Peut-être sommes-nous arrivés à un nouveau tournant dans ce domaine.
Cette audition publique entend tout d'abord dresser un état de l'art des dernières avancées technologiques en la matière, qui se sont traduites par la mise sur le marché de nouvelles batteries. Elle s'intéressera ensuite aux perspectives ouvertes par la recherche actuelle et à la possibilité qu'apparaissent des innovations de rupture.
L'Office poursuit ainsi le cycle de travaux qu'il consacre à la question de la transition énergétique. Différentes notes scientifiques ont déjà été publiées et sont consultables sur son site.
Comme de coutume, les internautes ont la possibilité de soumettre leurs questions en ligne sur la plateforme prévue à cet effet. Certaines seront posées aux intervenants.
Je laisse sans plus tarder la parole à Gérard Leseul, co-rapporteur de cette audition publique avec le premier vice-président de l'Office Gérard Longuet, afin qu'il introduise les débats de la première table ronde.
Première table ronde : l'état de l'art des dernières avancées en matière de batteries
M. Gérard Leseul, député, vice-président de l'Office, rapporteur. - Monsieur le président, chers collègues, mesdames, messieurs, le domaine des batteries est un secteur de la recherche dans lequel de nombreuses avancées sont en cours. Je me réjouis par conséquent de la présence de nos cinq invités, qui vont nous présenter un panorama des progrès accomplis en la matière, ainsi que des travaux sur le point de dépasser le stade des prototypes.
L'OPECST avait déjà réalisé voici quelques années une note scientifique sur le stockage de l'électricité, qui a servi de base à nos réflexions et sur laquelle s'appuiera la note actualisée que Gérard Longuet et moi-même allons produire.
Le champ des interrogations étant très vaste, nous avons, en accord avec les personnalités invitées, décidé d'articuler nos débats autour de deux tables rondes, introduites par le professeur Jean-Marie Tarascon, titulaire de la chaire « Chimie du solide et énergie » au Collège de France, que je remercie.
Je salue d'ores et déjà les participants de la deuxième table ronde, Nesrine Darragi qui après avoir soutenu une thèse sur les systèmes critiques complexes a fondé la start-up Hive Electric, et Sébastien Patoux, auteur d'une thèse sur les matériaux d'électrode positive à charpente polyanionique pour batteries au lithium et aujourd'hui directeur du départements batteries au CEA, au sein du Laboratoire d'innovation pour les technologies des énergies nouvelles et les nanomatériaux (Liten), basé à Grenoble et Chambéry.
La première table ronde va nous permettre de faire le point sur l'état de l'art en matière de batteries.
Après une introduction du professeur Tarascon, nous entendrons Yannick Borthomieu, responsable du développement des accumulateurs et batteries lithium-ion au sein de la division Aérospace, défense et performance de Saft. Vous avez, monsieur, rejoint Saft après une thèse en électrochimie dirigée par Claude Delmas, déposé cinq brevets et récemment publié un ouvrage scientifique sur les batteries lithium-ion pour les systèmes spatiaux, avec un ensemble d'experts des systèmes de puissance de la Nasa, de l'Agence spatiale européenne (ESA) et de fabricants de satellites.
Nous accueillerons ensuite Laurent Torcheux, du groupe EDF, spécialiste du stockage de l'électricité, sujet crucial pour l'équilibre du réseau électrique français. M. Torcheux nous parlera notamment des batteries stationnaires d'EDF.
Pr Jean-Marie Tarascon, professeur au Collège de France, membre de l'Académie des sciences. - C'est un grand plaisir pour moi d'être parmi vous aujourd'hui pour aborder un sujet aussi important que celui des batteries dans la transition énergétique.
Les systèmes de batteries à technologie lithium-ion offrent des performances considérables et ont constitué la plus grande avancée du dernier siècle en matière d'électrochimie. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle cette technologie a été récompensée en 2019 par l'attribution du prix Nobel de chimie à Stanley Whittingham, John Goodenough et Akira Yoshiro.
De quoi parle-t-on ? Comme tout système électrochimique, les batteries lithium-ion fonctionnent avec deux électrodes présentant la particularité d'être des composés inorganiques, poreux, entre lesquels le lithium se déplace. L'empreinte électrochimique de ces systèmes, représentée sur cette première diapositive, fait apparaître la densité d'énergie, définie comme le produit du potentiel par la capacité. D'un point de vue électrochimique, ce potentiel dépend de la structure électronique du matériau et de la capacité de ce dernier, c'est-à-dire du nombre de trous qu'il comporte. Ces quelques éléments sont en arrière-plan de toutes les recherches relatives aux batteries lithium-ion.
Au coeur de ces batteries se trouvent les matériaux lamellaires que sont les oxydes de cobalt. Durant les 25 dernières années, des travaux considérables ont été réalisés sur les substitutions possibles au cobalt, pour obtenir les fameuses « phases NMC », dont il est souvent question dans le jargon des spécialistes. Des milliers de laboratoires de par le monde travaillent pour optimiser ces systèmes, en changeant la nature des éléments utilisés, à savoir le cobalt, le nickel et le manganèse. Le manganèse apporte une stabilité thermique, le cobalt une tenue en cyclage importante et le nickel des capacités élevées. Pour des raisons éthiques et géopolitiques, on essaie actuellement de se passer autant que possible du cobalt. Ceci a conduit à utiliser dans les véhicules électriques les matériaux dits « 8.1.1 », correspondant à une composition de 80 % de nickel, 10 % de manganèse et 10 % de cobalt.
On cherche aujourd'hui comment améliorer encore la capacité et la densité d'énergie des batteries. C'est là qu'intervient la recherche, qui se penche sur les mécanismes réactionnels et les procédés.
Ceci concerne tout d'abord la source de ces systèmes, basée depuis plus de 25 ans sur du redox cationique. Or voici 5 ou 6 ans, nous avons réussi, au Collège de France, à montrer qu'il était possible de profiter à la fois des réseaux de cations et d'anions présents dans ces structures, ce qui permet de doubler la capacité.
L'augmentation de la densité d'énergie peut aussi résulter d'un travail sur l'électrode négative, pour laquelle on utilisait du graphite depuis plus de deux décennies. On savait qu'il était possible d'utiliser des alliages, notamment de silicium ; mais ceci n'était pas réalisable jusqu'à il y a peu, en raison de changements de volume trop importants. Grâce aux nanomatériaux et à la réalisation de composites, il est désormais possible d'obtenir un gain de capacité et d'énergie de l'ordre de 15 %.
Les courbes suivantes représentent l'évolution de la densité d'énergie au fil des années et des différentes phases NMC. Notez par ailleurs l'arrivée d'un nouvel acteur, le phosphate de fer et de lithium (LFePO4 ou LFP), très prisé pour des raisons écologiques. Les projections à horizon 2030 montrent que les matériaux de cathode utilisés pour les véhicules électriques comporteront autant de NMC que de LFP, les NMC étant utilisés pour les produits haut-de-gamme.
Le prix des composants est également un élément important. La frénésie à laquelle nous assistons aujourd'hui a été initiée par Elon Musk, qui a donné un coup de pied dans la fourmilière et décidé que les batteries devaient être bon marché. Il a ainsi annoncé des prix de 100 $ par kWh en avril 2015, ce qui est aujourd'hui réalisé, puis une réduction de 60 $ par kWh d'ici 2030. Cela a entraîné un véritable boom du véhicule électrique, avec plus de 450 modèles proposés aujourd'hui. On estime qu'en 2040 les ventes de véhicules électriques devraient dépasser 150 millions d'unités, ce qui suppose que la production annuelle de batteries progresse de façon spectaculaire.
Cette évolution a des répercussions pour l'Europe, qui veut assurer sa souveraineté en créant des gigafactories, lesquelles poussent comme des champignons. La France en compte deux pour l'instant, avec Verkor et ACC. L'Europe entend ainsi être un acteur majeur de la transition énergétique et compte faire passer sa part dans la production mondiale de batteries de 1 % aujourd'hui à 19 % dans les années 2030.
Il faut cependant savoir que 98 % des machines d'assemblage utilisées dans ces gigafactories sont importées, tout comme plus de 96 % des matériaux utilisés dans les batteries lithium-ion. Il faut donc être prudent lorsqu'on parle d'indépendance énergétique.
D'autres défis se profilent et des technologies alternatives sont en cours de développement. Comment aller au-delà des performances du lithium-ion ? Ceci peut passer par des travaux visant à augmenter la densité d'énergie ou à rendre le matériau plus écocompatible. Ces procédés font l'objet de très nombreuses recherches partout dans le monde.
Sans doute avez-vous entendu parler de la batterie « tout-solide », qui suscite un gigantesque engouement international. Elle présente la même configuration que la batterie lithium-ion, mais s'en distingue par le fait qu'elle possède un électrolyte non pas liquide mais solide, et qu'elle utilise une électrode en lithium métal et non en carbone. En théorie, la formule est géniale puisque l'absence de liquide organique augmente la sécurité du système et le fait de remplacer le carbone par du lithium métal accroît les densités volumiques ou gravimétriques d'au moins 50 %.
Cette avancée a été rendue possible par des recherches fondamentales conduites notamment sur les matériaux. Des progrès conséquents ont ainsi été réalisés au niveau des composés inorganiques à haute conductivité ionique. En 2011, une grande découverte a été effectuée par un groupe japonais qui a identifié un thiophosphate conduisant l'électricité comme une solution aqueuse.
La difficulté tient à la limitation causée par les interfaces, qui sont un véritable cauchemar pour les électrochimistes. En particulier, des dendrites apparaissent à la surface du lithium. Certains acteurs impatients commencent par conséquent à développer des technologies alternatives, hybrides, comportant un peu de liquide et des polymères.
Tous les constructeurs automobiles essaient aujourd'hui de construire des partenariats avec des PME ou des spin-off montées pour développer cette technologie tout solide. Il est difficile de trouver actuellement dans le monde un laboratoire universitaire, un fabricant de batteries, un constructeur automobile, une institution ou un pays qui ne travaille pas sur cette technologie.
Je pense que certaines batteries tout solide devraient faire leur apparition vers 2030, mais dans un premier temps, il ne s'agira que d'une vitrine technologique. Elles seront en effet beaucoup plus chères que les batteries lithium-ion conventionnelles.
Une autre avancée intéressante, issue de recherches françaises, est la technologie sodium-ion, conçue pour diminuer la pression rencontrée actuellement sur le lithium-ion. Contrairement à ce dernier, le sodium-ion est un élément très abondant, dans l'eau de mer et la croûte terrestre. La batterie sodium-ion est le clone de la batterie lithium-ion : ses électrodes comportent les mêmes matériaux, sous forme d'éponges à sodium. La seule différence tient au fait que l'électrolyte y est plus sophistiqué en raison des propriétés et compatibilités chimiques nécessaires pour obtenir des éléments de bonne qualité.
Après 8 ans de recherches, il apparaît que les accumulateurs reposant sur cette technologie peuvent supporter 5 000 cycles en conservant 80 % de leur capacité initiale, et dépasser 8 000 cycles. A 55 degrés, la batterie présente toujours des performances très importantes. Ses performances en puissance sont également très intéressantes, puisqu'elles sont supérieures à celles des batteries à ion lithium. Il est ainsi possible de restituer plus rapidement l'énergie stockée.
Ce procédé est développé par la start-up française Tiamat, créée en 2018 à Amiens, qui a effectué voici une quinzaine de jours la première annonce mondiale de commercialisation de la technologie sodium-ion. Les premières utilisations seront effectuées en collaboration avec Leroy Merlin et concerneront des outils de puissance. Cette technologie est attrayante pour les marchés de la mobilité, des outils de puissance et du stockage stationnaire d'énergie. Des partenariats ont d'ores et déjà été conclus entre Tiamat et des sociétés comme Solvay ou Arkema.
Le seul écueil tient au fait que la production de ces batteries est sous-traitée en Chine, faute d'avoir pu lever suffisamment de fonds pour construire notre propre gigafactory ou « mini-gigafactory ».
Aujourd'hui, la concurrence s'intensifie et le leadership français s'amenuise. Des compagnies chinoises comme CATL ou HiNa ont ainsi lancé la production de telles batteries en vue d'une mise sur le marché fin 2023 ou début 2024.
Pour conclure ce propos introductif, les éléments que je viens de présenter me permettent de vous assurer que la technologue lithium-ion sera difficile à dépasser pendant encore quelques décennies, si ce n'est plus.
M. Gérard Leseul, député, vice-président de l'Office, rapporteur. - Merci, professeur, pour cette introduction. Comme vous le voyez, la production en Chine de batteries résultant d'une innovation française n'a pas manqué de faire réagir autour de moi. Pouvez-vous nous expliquer pourquoi la France n'a pas été en capacité de localiser cette production sur le territoire national ?
Pr Jean-Marie Tarascon. - Ceci tient tout d'abord à la frilosité de nos industriels. Il faut reconnaître que lorsque nous avons proposé cette technologie voici 7 ou 8 ans, nous ne la maîtrisions pas encore totalement et n'étions pas en mesure de leur apporter une solution clé en main. Nous avons ensuite essayé de lever des fonds pour initier la construction d'une gigafactory, mais nous n'y sommes pas parvenus.
La situation s'est toutefois améliorée, puisque nous sommes en train de lever quelque 100 millions d'euros pour commencer la construction d'une usine à Amiens. Ce montant reste toutefois insuffisant et divers partenaires, parmi lesquels Bpifrance, ont été sollicités aux niveaux national et européen pour abonder le projet. Cela prend du temps.
M. Jean-Luc Fugit, député, vice-président de l'Office. - Le fait que la technologie sodium-ion, bien que mise au point en France, soit produite en Chine signifie, je suppose, que les brevets sont partis là-bas. Pourriez-vous nous éclairer sur ce point ?
Pr Jean-Marie Tarascon. - Cette technologie est couverte par une dizaine de brevets. La sous-traitance chinoise a été mise en oeuvre avec des conditions très strictes : les fabricants n'ont pas les brevets, ils produisent les batteries et les envoient en France, sans aucune information sur la nature des composants. Bien évidemment, rien ne les empêche de pratiquer de la rétro-ingénierie. Je rappelle que toutes les démarches sont entreprises actuellement pour localiser la production en France, dans une première usine implantée à Amiens.
M. Gérard Leseul, député, vice-président de l'Office, rapporteur. - Merci pour cette présentation et ces premiers échanges. Nous sommes extrêmement sensibles, vous l'aurez compris, à la question de la localisation des moyens de production sur nos territoires. Nous y reviendrons notamment dans le contexte d'une discussion prochaine sur l'industrie verte.
M. Borthomieu, vous travaillez encore avec la technologie lithium-ion et nous souhaitons vous entendre sur le développement de batteries pour satellites météorologiques.
Dr Yannick Borthomieu, responsable du département Batteries de Saft. - Aerospace Defense and Performance Division. - Je vais en effet aborder la question des batteries à travers le programme spatial intitulé MTG (Meteosat Third Generation), correspondant aux satellites de troisième génération.
Je vais vous présenter un certain nombre de clés expliquant pourquoi Saft est le leader mondial des batteries pour satellites, fabriquées en France depuis un demi-siècle. Nous exportons nos produits dans le monde entier et fournissons la plupart des maîtres d'oeuvre européens, parmi lesquels les français Airbus Defense and Space et Thales, et l'allemand OHB. Nous exportons également aux États-Unis, en Russie (avant la guerre en Ukraine), mais aussi en Asie, vers l'Inde, la Chine, la Corée et le Japon, qui sont pourtant des références en matière de batteries.
Saft investit énormément pour rester compétitif sur ce marché spécifique, caractérisé par la concurrence du New Space.
Je vais en préambule vous présenter un bref historique de l'entreprise. Créée voici plus de cent ans par Victor Herold sous le nom de Société des Accumulateurs Fixes et de Traction, elle fournissait alors essentiellement des batteries nickel-cadmium. Acquise en 1928 par la Compagnie générale d'électricité (CGE), elle fut alors intégrée, avec Leclanché, Fulmen et Mazda, dans un pôle « batteries ».
En 1985, l'entreprise a connu un changement important, en cédant le secteur des piles alcalines et salines grand public au groupe Tapie, pour se recentrer sur les marchés de niche que sont l'aviation et le transport ferroviaire.
À partir de 1990, le site de Poitiers s'est progressivement reconverti et tourné vers la production de batteries spécialement adaptées à la défense et au secteur spatial.
En 2003, Alcatel (ex-CGE) a cédé Saft à un fonds de pension anglais, qui a introduit la société en bourse sur le marché Euronext en 2005.
2016 enfin a été marquée par l'acquisition de Saft par TotalEnergies, principalement pour la filière stockage d'énergie, afin de réduire les émissions de gaz à effet de serre.
Saft emploie aujourd'hui quelque 4 000 personnes, dont 1 630 en France. Trois de ses 16 sites de production sont situés sur le territoire national et elle compte environ 3 000 clients. 97 millions d'euros ont été investis en R&D en 2022, sur un chiffre d'affaires de 1 milliard d'euros. Même si la société est internationale, il est très important pour nous que notre centre de recherche corporate soit installé à Bordeaux.
L'entreprise est présente sur un grand nombre d'applications, sur terre, sur mer, dans les airs et dans l'espace. Vous-mêmes utilisez quotidiennement des batteries Saft. Lorsque vous prenez l'avion, il y a par exemple 80 % de chances de compter à bord une batterie produite par nos soins, puisque nous équipons la totalité des avions Airbus et Boeing (à l'exception du Boeing 787). Pour mémoire, l'Airbus A320 qui a amerri sur le fleuve Hudson a pu se poser grâce à l'exceptionnel savoir-faire du pilote, mais aussi aux batteries installées à bord, qui lui ont permis de disposer des capacités de guidage et d'information nécessaires à la réussite de cette manoeuvre. Nos batteries équipent aussi des TGV, des tramways, des métros, des compteurs à gaz et à eau, des systèmes d'alarme, mais aussi le système KERS de récupération d'énergie utilisé dans les Formule 1 au moment du freinage et de l'accélération.
Saft contribue par ailleurs à la réduction des émissions de gaz à effet de serre, en équipant des bateaux hybrides (remorqueurs, ferries, etc.) qui fonctionnent avec des systèmes de gaz liquéfié et de batteries.
Nous intervenons également dans les systèmes de stockage d'énergie (ESS - Energy Storage System), combinés avec des éoliennes ou des panneaux solaires. Nous avons ainsi installé le plus grand site de stockage français par batteries à Dunkerque l'année dernière, avec une capacité totale de 1,2 GWh.
Saft équipe enfin la gamme de satellites Copernicus, qui devraient être lancés prochainement avec pour mission de collecter des données scientifiques permettant de surveiller le réchauffement climatique dans différentes zones.
Comment expliquer le positionnement privilégié de Saft dans le secteur spatial ?
Il faut pour ceci comprendre les spécificités de l'application satellites et connaître l'héritage dont l'entreprise tire sa force. Saft est en effet présent dans ces programmes quasiment depuis le début de l'ère spatiale. Le premier satellite équipé d'une batterie Saft était Diapason 1, lancé le 17 février 1966 : il s'agissait du premier satellite du CNES avec une batterie à bord. Nous avons par la suite accompagné la totalité des programmes de satellites européens et de nombreux programmes internationaux, scientifiques, institutionnels et commerciaux. Je citerai notamment, à titre d'exemple, le satellite SoHo, lancé en 1995 et dont le service actif devrait s'achever en 2025, qui a permis aux astrophysiciens de mieux connaître le Soleil et dont le système de batteries fonctionne toujours, ou encore le robot Philae, élaboré par le CNES, qui a permis, malgré un atterrissage manqué, de transférer la totalité des données recueillies sur la comète Tchourioumov-Gerasimenko. Saft a également équipé, dans le cadre de missions spatiales institutionnelles, les douze premiers satellites GPS et l'ensemble des satellites météorologiques européens. Nous sommes enfin en contact avec tous les opérateurs de satellites géostationnaires dans le monde.
Saft a ainsi équipé, depuis l'origine, quelque 1 200 satellites, dont 367 avec des batteries lithium-ion, ce qui constitue la plus grande flotte existante. Je pense par exemple à W3A, satellite fabriqué par Airbus Defence and Space, lancé en 2004, qui arrive aujourd'hui à 19 ans d'exploitation et devrait poursuivre sa mission au-delà de 20 ans.
Nous avons bénéficié de contrats soutenus principalement par le CNES et l'Agence spatiale européenne, qui accompagnent Saft sur des cycles de développement et de qualification extrêmement longs et contraignants, nécessitant de lourds investissements internes.
Quels sont les points clés et exigences nécessaires aux batteries lithium-ion pour satellites ?
Le premier concerne le suivi des énergies massiques évoquées précédemment par M. Tarascon. En effet, tout gramme supplémentaire mis dans la batterie va devoir être porté par le lanceur, avec un coût situé entre 50 et 80 euros par gramme. Lorsque plusieurs centaines de kilogrammes de batteries sont embarqués, je vous laisse imaginer l'économie que permet de réaliser le fait de réduire cette masse de 10 ou 20 %.
Ces batteries sont également spécifiques dans le sens où elles ne peuvent faire l'objet d'aucune maintenance en orbite. Ceci requiert donc une fiabilité démontrée. À ce jour, nous pouvons garantir pratiquement 3 milliards d'heures de fonctionnement du lithium-ion en orbite. Cette performance explique en partie notre présence constante sur ce marché.
Les contraintes auxquelles sont soumis ces équipements sont elles aussi très particulières, avec des niveaux de vibrations importants, des rayonnements cosmiques, des radiations, le vide spatial et des températures extrêmes.
La durée de vie des applications est enfin un élément majeur. Le satellite SoHo va ainsi atteindre 30 ans, mais les spécifications auxquelles nous sommes soumis demandent généralement d'assurer une durée totale de vie allant jusqu'à 25 ans.
Il nous faut donc proposer à la fois fiabilité, durée de vie et cyclage important, avec 60 000 voire 100 000 cycles demandés dans certains cas. Peu d'applications au sol requièrent cela.
L'un des points clés réside dans le fait que Saft garde la maîtrise complète de la totalité de la chaîne de production, depuis les électrodes jusqu'au suivi en orbite. Je précise toutefois que nous ne disposons pas en France des matériaux actifs positifs et négatifs nécessaires et dépendons pour cela des pays asiatiques. Nous maîtrisons en revanche toute la chaîne complémentaire : les électrodes, les éléments, les batteries ; les tests et qualifications des batteries sont réalisés en France, à Poitiers. 95 % de la valeur est ainsi réalisée directement par Saft ou par des fournisseurs français.
L'outil industriel est adapté aux volumes de fabrication du secteur spatial. Il ne s'agit pas de gigafactories, dans la mesure où seuls 200 satellites de configuration standard sont lancés chaque année.
Un autre point essentiel pour nous concerne la sélection des matériaux en provenance des pays asiatiques, dont nous devons nous assurer qu'ils aient une durée de vie suffisante et une très longue disponibilité, supérieure à 10 ans. Or le problème posé par les gigafactories est que les changements opérés au fil du temps sur ces technologies, au niveau des matériaux, font que ces derniers ne sont plus disponibles pour nos usages.
Les énergies massiques ne sont qu'un élément parmi l'ensemble des points dont il nous faut tenir compte. Nous sommes actuellement, avec le lithium-ion, à 220 Wh/kg effectifs sur des batteries qui répondent à toutes les exigences précédemment énoncées. J'évoquerai ultérieurement nos perspectives à l'horizon 2030 et rejoindrai les propos tenus par M. Tarascon sur les batteries tout solide.
Saft a livré, depuis l'origine, la totalité des systèmes de batteries pour le programme Météosat d'EUMETSAT, organisation européenne pour l'exploitation de satellites météorologiques. Il s'agit des 8 satellites Météosat1, programme démarré en 1977 avec une fiabilité et une durée de vie supérieure à 20 ans en exploitation, et des 4 satellites Météosat de deuxième génération, à partir de 2002, qui sont toujours en opération pour la plupart. Saft fournira de même les systèmes des 6 Météosat de troisième génération, dont le premier a été lancé en décembre 2022, sachant que le contrat initial a été signé en 2014.
Ainsi, depuis plus de 45 ans, chaque prévision météorologique européenne repose sur un système alimenté par une batterie Saft.
Les 6 satellites MTG, d'une durée de vie nominale de 8,5 ans, seront lancés et mis hors service de manière séquentielle afin d'assurer une couverture constante jusqu'au début des années 2040. Notez que le sixième satellite, lancé en 2040, sera équipé de batteries livrées en 2021. Ainsi, la durée de vie de celles-ci sera en réalité supérieure à 30 ans. L'accent est ici mis sur la performance en matière de durabilité plus qu'en matière de cyclage. Il s'agit de produire des éléments présentant des performances de stockage importantes, qui ne sont pas nécessaires pour des applications au sol avec une utilisation directe.
Ces satellites de troisième génération ont été conçus et fabriqués par un consortium réunissant OHB et Thales Alenia Space, dans le cadre d'un contrat de développement attribué par l'Agence spatiale européenne. Les batteries choisies pour assurer ces très longues missions sont des 11S24P (c'est-à-dire composées de 11 éléments en série et 24 strings en parallèle), dotées d'un système d'équilibrage électrique, d'une gestion thermique et de protections leur permettant de résister aux contraintes mécaniques.
Sur la base de quelle technologie seront conçues les futures batteries qui équiperont les satellites dans quelques années ? Cette question rejoint les réflexions conduites sur les applications terrestres. Le lithium-ion classique arrivant à ses limites technologiques, nous avons commencé à réfléchir aux perspectives envisageables pour les applications satellitaires.
Les formats comme les pouch cells, largement utilisés dans les applications terrestres et régulièrement présentés comme le futur du lithium-ion, avec leurs structures solides de type cylindrique ou prismatique, ne sont pas adaptés à l'application satellitaire : leurs tenues au vide et aux vibrations ne sont pas assurées et l'on observe des durées de vie limitées liées à la gestion du gonflement des électrodes.
Comme l'indiquait précédemment M. Tarascon, la technologie de rupture vis-à-vis du lithium-ion est le tout solide. Ceci permettrait une montée en gamme, en augmentant de manière significative les énergies massiques à un niveau compris entre 350 et 450 Wh/kg. Une évaluation liminaire de cette technologie est déjà en cours pour les applications satellites, avec des niveaux de maturité (TRL ou « Technology Readiness Levels ») bas, d'environ 2 ou 3 sur une échelle allant jusqu'à 9. Nous sommes toutefois en train de progresser, dans le cadre de contrats de développement soutenus par l'Agence spatiale européenne et le CNES et nous espérons parvenir à qualifier des solutions tout solide, qui viendraient remplacer ou « quasi remplacer » l'actuel lithium-ion à partir de 2030.
Le satellite peut apparaître dans ce contexte comme un « early adopter » de cette technologie, car, au-delà des contraintes très importantes qu'il impose, ce secteur se caractérise par des conditions d'utilisation très stables, avec des cycles récurrents (les orbites), des courants, des profils d'utilisation et des températures stabilisés. Tout ceci peut aider à mettre en oeuvre une solution tout solide, avec notamment des régimes de charge limités.
Nous espérons que de telles solutions seront disponibles à l'horizon 2030. Notre centre de recherche de Bordeaux travaille de façon très intense avec le CEA pour mettre au point ces technologies. Les défis sont importants, notamment pour ce qui concerne les interfaces, les couches tout solide ou encore le choix des matériaux. Nous allons continuer à y travailler, afin que Saft demeure l'un des leaders mondiaux des batteries pour satellites.
M. Gérard Leseul, député, vice-président de l'Office, rapporteur. - Merci beaucoup, M. Borthomieu, pour cette présentation qui ne manquera pas de susciter de la part de nos collègues et des internautes des questions sur lesquelles nous reviendrons à l'issue de l'intervention de M. Laurent Torcheux.
M. Laurent Torcheux, conseiller senior, direction Recherche et développement d'EDF. - Je vous remercie de me donner la parole pour vous présenter l'état de l'art et les défis concernant les batteries stationnaires.
Ces objets ont vocation à « tamponner », c'est-à-dire pallier, des intermittences susceptibles de survenir sur les réseaux ou différents types d'applications.
Le stockage permet une adaptation des modes de production et de consommation. Je n'évoquerai pas ici certains modes de stockage, comme le stockage hydraulique. Les batteries sont des systèmes assez autonomes, qui peuvent être implantés facilement et répondre à une grande diversité de situations, notamment à l'équilibrage de réseaux, l'optimisation de la vente d'électricité, l'alimentation des micro-réseaux qui se développent essentiellement dans les zones non interconnectées et où les groupes électrogènes sont de plus en plus souvent remplacés par des batteries, l'autoconsommation en permettant à des particuliers ou des entreprises de stocker et consommer l'électricité produite par des panneaux solaires, ou encore l'alimentation des équipements secondaires, afin d'assurer la continuité de production en cas de coupure réseau.
Sur tous ces aspects, EDF a annoncé en 2018 un « plan stockage », ayant pour but d'installer une dizaine de gigawatts de batteries et de STEP dans le monde d'ici 2035. Plusieurs marchés sont visés, qu'il s'agisse de marchés de stockage au service des systèmes électriques, d'offres de stockage proches des clients, incluant par exemple l'autoconsommation résidentielle, ou encore d'accès à l'électricité dans des pays en voie de développement, où le nombre de clients potentiels est très important, même si la part d'énergie par batterie est faible.
L'objectif de 10 GW n'est pas énorme à l'échelle mondiale du stockage par batteries, puisqu'il représente environ 1 million de véhicules électriques. Le stockage stationnaire ne correspond donc qu'à 5 à 10 % du marché des batteries pour l'automobile.
EDF est, au sein de ce microsystème, à la fois assemblier et opérateur de projets. Il est un utilisateur final des solutions proposées et ne fabrique pas de batteries.
Je rappelle qu'un système de stockage par batterie ne se limite pas à des cellules électrochimiques, mais comporte aussi des assemblages de modules décrits par M. Borthomieu, qui nécessitent des systèmes d'équilibrage, des Battery Management Systems (BMS) pour en assurer la supervision et la gestion thermique.
Ces assemblages sont utilisés dans différents types d'applications, qu'il s'agisse de packs pour véhicules électriques ou d'armoires ou de containers destinés au stockage stationnaire à différentes échelles.
La diapositive projetée montre différentes situations concrètes. Vous pouvez voir par exemple, sur les deux photographies de gauche, des batteries installées sur un réseau électrique en Angleterre, à West Burton, ainsi que l'intérieur d'un container, avec des armoires remplies de racks de batteries. L'Angleterre étant une île, le marché relatif au soutien de réglage de fréquence y est considérable. En haut à droite, il s'agit du même type de projet, installé cette fois-ci sur l'île de La Réunion, afin de stabiliser les écarts de fréquence susceptibles de survenir sur le réseau électrique. L'exemple présenté en-dessous montre de plus petites batteries, installées sur l'île de Sein, dans le cadre de micro-réseaux. Les îles et territoires isolés, dont les réseaux électriques n'ont pas la même flexibilité que ceux des territoires continentaux, représentent des marchés relativement importants pour ces technologies.
Notre activité internationale est considérable. Nous avons par exemple équipé le zoo de San Diego avec une batterie stationnaire.
Il ne faut pas oublier le rôle majeur joué par les batteries dans nos centrales nucléaires. La diapositive suivante montre l'une des salles de batteries de l'EPR en construction à Flamanville. Il s'agit de batteries au plomb, technologie assez ancienne mais qui demeure importante dans toutes nos applications. Sachez que les nouveaux EPR en projet sont eux aussi conçus avec cette technologie, dont il n'est pas prévu qu'elle soit remplacée à court terme par des batteries lithium-ion.
Nous utilisons aujourd'hui dans nos projets de batteries stationnaires sur les réseaux des batteries lithium-ion, essentiellement de technologie lithium-fer-phosphate (LFP), mais aussi, pour un tiers environ, de type NMC. Toutes sont fabriquées en Asie.
Nous avons par ailleurs recours, comme je viens de vous l'expliquer, à des batteries plomb-acide et à des batteries nickel-cadmium, fournies par la Saft, pour l'alimentation des systèmes de secours dans les centrales nucléaires.
Les grands défis qui se présentent à nous en matière de batteries stationnaires sont notamment de pouvoir mettre en oeuvre, en tant qu'opérateur de service, des solutions reposant sur des technologies durables et prévisibles. La durée de vie est un élément très important, puisqu'il faut réaliser 5 à 10 fois plus de cycles que pour les batteries automobiles. Il nous faut donc des systèmes très optimisés, avec des densités d'énergie pas nécessairement très élevées - ce qui constitue une différence majeure avec les applications automobiles et satellitaires -, mais avec des électrodes renforcées et une durée de vie et une fiabilité optimales. Cela laisse la porte ouverte à des technologies autres que le lithium-ion, comme les batteries redox flow.
Nous avons en outre besoin d'innovations en matière de capteurs - nous avons d'ailleurs mis en oeuvre une très belle collaboration avec Jean-Marie Tarascon sur ce sujet - et les BMS, autour du recueil et du traitement des données et du développement de programmes numériques permettant de prévoir les facteurs déterminant la durée de vie, la fiabilité et la sécurité des batteries. Il s'agit pour nous d'un objectif important.
La notion de coût durable est également centrale, dans la mesure où l'exploitation des projets s'inscrit dans des durées longues, de l'ordre de 15 à 20 ans. Bénéficier des coûts les plus bas possible suppose d'améliorer les performances, avec des matériaux moins coûteux et moins abondants dans les batteries. Les batteries LFP et sodium-ion nous semblent de ce point de vue très intéressantes.
La maîtrise de la sécurité des systèmes de batteries constitue un autre défi majeur. Les batteries sodium-ion et les électrolytes des batteries tout solide nous paraissent susceptibles d'apporter à terme des gains de sécurité considérables. En matière de batteries stationnaires, le principal bénéfice de la batterie tout solide réside dans la sécurité. Vous pouvez voir sur la droite de la diapositive des images d'incidents récents, liés principalement à l'inflammabilité des matières organiques contenues dans les solvants. Remplacer celles-ci par des matières ininflammables nous paraît très important pour l'avenir.
Nous attachons en outre une attention toute particulière à la maîtrise du bilan carbone de toutes ces opérations. Le bilan carbone d'une batterie est essentiellement lié aux matériaux qui la composent, incluant leur extraction, leur transport, leur raffinage et la préparation des précurseurs électrochimiques. L'analyse du cycle de vie d'une batterie montre que l'essentiel du bilan carbone ne se joue pas au moment de l'assemblage dans les gigafactories, mais dans la filière amont, qui constitue véritablement le point faible de la chaîne. Nous ne disposons malheureusement pas réellement de leviers nous permettant d'avoir une quelconque action sur l'amont afin d'en limiter le bilan carbone, dans la mesure où ces matériaux ne sont ni extraits ni raffinés sur le territoire européen.
Être proche des sites de fabrication et maîtriser le recyclage en Europe sont également selon moi des points clés. Cela permettra en effet d'avoir des matériaux à disposition à l'échelle de l'Union européenne.
M. Gérard Leseul, député, vice-président de l'Office, rapporteur. - Merci beaucoup. Vous avez, dans cette dernière diapositive, réuni l'ensemble des défis extrêmement importants qui nous attendent.
Étant originaire d'une région qui a connu récemment un incendie dans un entrepôt de batteries de Bolloré Logistics, je suis particulièrement sensible à la question de la sécurité, notamment de la sécurité sanitaire pour l'ensemble de nos concitoyens.
Nous sommes également très intéressés par les notions de bilan carbone et de dépendance énergétique, dans la mesure où même si nous commençons à produire en France, les matériaux sont pour l'essentiel importés, d'où la nécessité d'en diminuer le volume dans l'ensemble de la production.
Les questions de l'approvisionnement et du recyclage sont également majeures.
Mme Olga Givernet, députée. - Je souhaite revenir sur la question du cycle de vie et de la masse critique des batteries qui seront à recycler dans les années à venir. À quelle échéance envisagez-vous cela ?
Les dispositifs de charge des batteries ont été très peu évoqués. On peut supposer que la charge s'effectue, dans le cas des satellites, grâce à des panneaux solaires, alors que les batteries terrestres se rechargent plutôt sur le secteur. Ceci a-t-il un impact sur les technologies utilisées pour fabriquer les batteries et sur leur durée de vie ?
Pr Jean-Marie Tarascon. - Je reviendrai sur la question du recyclage lors de ma deuxième intervention.
M. Laurent Torcheux. - La charge dépend largement du moyen dont on dispose. Dans le cas des sources intermittentes solaires, les coefficients de charge sont plutôt faibles : il faut alors une technologie adaptée. Les charges effectuées à partir du réseau, que ce soit pour les opérations de secours ou la mobilité électrique, sont de plus en plus rapides : cela suppose de disposer de technologies susceptibles de supporter ceci sans dégradation.
Un grand intérêt est porté aujourd'hui aux véhicules électriques intelligents (vehicles-to-grid). Certains parcs de véhicules électriques pourraient devenir un réservoir de stockage capable de fournir des services systèmes sur le réseau électrique, avec des charges et décharges rapides. Il faut cependant instruire les conséquences possibles au regard d'une dégradation de la batterie. Il faut également s'interroger sur le type de batterie le plus propice à une telle démarche.
M. Sébastien Patoux, directeur du programme batteries au Laboratoire d'innovation pour les technologies des énergies nouvelles et les nanomatériaux (Liten), CEA. - Le rendement énergétique de la batterie lithium-ion est très élevé, si bien que l'on perd peu dans un cycle charge-décharge. La recharge correspond en réalité à du stockage : l'énergie utilisée pour recharger la batterie n'est pas perdue, mais restituée quasi intégralement, ce qui constitue un bon point pour les technologies lithium-ion et sodium-ion.
Pr Jean-Marie Tarascon. - Pourquoi rencontre-t-on des difficultés de charge ? Cela intervient lorsque l'on veut charger un accumulateur rapidement, ce qui conduit à un dépôt de dendrites, donc à un changement des potentiels. Prenons l'exemple de la voiture Zoé, dont la batterie a une capacité de 52 kWh : la recharge de 15 % à 80 % va prendre environ 40 minutes. La recharge des derniers 20 % va en revanche demander un temps beaucoup plus long.
Il arrive qu'on lise dans les journaux qu'il est possible de recharger complètement une batterie en 5 minutes : cela est totalement faux, sauf à disposer de barres de cuivre de 10 centimètres de diamètre pour recharger directement les accumulateurs. De simples calculs suffisent à le démontrer. Il est impossible de recharger un véhicule électrique à 80 % ou 90 % en moins de 10 minutes.
Ceci pose des problèmes considérables, notamment pour tous les déplacements longue distance. Imaginons un week-end d'été, au cours duquel les départs en vacances sont nombreux. Que se passera-t-il sur les autoroutes ? Des calculs ont montré qu'il faudrait une centrale nucléaire tous les 200 kilomètres pour répondre au besoin et recharger l'ensemble des batteries des véhicules en circulation. Cela signifie que lorsque les véhicules électriques vont se multiplier, notre mode de vie va devoir changer et sera certainement beaucoup plus réglementé. Il faudra par exemple prévoir un échelonnement des départs en vacances sur la semaine et procéder à la réservation de sa borne de recharge. La transition énergétique entraînera ainsi un changement de nos habitudes et une augmentation du coût de la vie. Cela est indéniable.
M. Gérard Longuet., sénateur, premier vice-président de l'Office. - Ma question s'adresse à Laurent Torcheux. Quelle est la politique d'EDF en matière de batteries ? Répond-elle à la volonté de suivre une technologie complémentaire indispensable ou au contraire interstitielle, mais sur laquelle il faut être présent ?
Ma deuxième question est pour Jean-Marie Tarascon, dont j'ai beaucoup apprécié la présentation. Il existe apparemment, pour la batterie tout solide, des perspectives pour 2030. Doit-on accepter l'idée d'une asymptote sur la productivité de cette batterie ou s'inscrit-on plutôt dans la logique de la loi de Moore, avec une progression quasi infinie de la performance des composants telle qu'observée depuis 50 ans ?
M. Laurent Torcheux. - Concernant les batteries stationnaires, EDF se trouve au carrefour de nombreuses applications technologiques qui vont se développer, avec ou sans nous. Je pense par exemple à la stabilité des réseaux isolés, aux micro-réseaux. Ces batteries vont nous aider dans de nombreuses situations, dans un contexte d'essor des énergies renouvelables intermittentes qui a un impact sur un nombre croissant de réseaux. Cet impact est encore peu perceptible sur le continent, où le réseau est très solide et présente beaucoup d'interconnexions et de moyens de flexibilité, avec un pilotage de la demande. Actuellement, les batteries n'y ont pas forcément de raison d'être. En revanche, si l'on se projette à un horizon de 10, 20 ou 30 ans, avec beaucoup plus d'intermittence et de production décentralisée, alors cette batterie pourra devenir un outil fondamental dans la gestion de nos réseaux. Cette situation existe déjà dans les zones non interconnectées.
EDF développe également une stratégie internationale et tire les leçons de réseaux déjà confrontés à ces problèmes. Par exemple, la Californie offre un champ d'expérimentation important pour faire mûrir ces technologies.
Les batteries représentent pour EDF un objet d'avenir pour les réseaux électriques.
Pr Jean-Marie Tarascon. - Il est très intéressant de mentionner la loi de Moore. Malheureusement, nous évoluons dans le domaine de la chimie et non dans celui de l'électronique. Je rappelle que la loi de Moore « prédit » un doublement de la capacité de stockage des mémoires tous les 18 mois. Dans le secteur des batteries, il a fallu deux siècles pour observer un doublement, voire un triplement de la capacité. On ne se situe absolument pas sur les mêmes échelles de temps. Le lithium-ion a certainement été la technologie la plus performante : en effet, la première batterie Sony, en 1991, avait une densité massique d'énergie de 110 Wh/kg, alors que l'on est arrivé aujourd'hui à 220, voire 230 ou 250Wh/kg, soit un facteur 2,5 en 25 ans.
La technologie tout solide va arriver et ne connaîtra pas une progression en asymptote. Il faudra d'abord qu'elle atteigne une certaine maturité pour, peut-être, pouvoir conquérir le marché dans les années 2050.
M. Gérard Leseul, député, vice-président de l'Office, rapporteur. - Merci pour ces précisions en forme de rappel à la réalité. Nos collègues sénateurs étaient optimistes, puisque dans une note rédigée en 2019, ils indiquaient que la technologie tout solide pourrait être déployée en 2022-2023.
M. Jean-Luc Fugit, député, vice-président de l'Office. - Je souhaite placer cette réflexion sur les avancées technologiques en matière de batteries dans une analyse plus complète des questions relatives à la mobilité. Je trouve intéressant, lorsque l'on veut comparer l'impact environnemental des véhicules, de procéder à une analyse du cycle de vie (ACV). Or les ACV montrent qu'actuellement à véhicule équivalent, le véhicule électrique a initialement un impact en CO2 plus important que celui du véhicule à moteur thermique, même si par la suite, le fait qu'il n'utilise pas d'énergies fossiles conduit à ce que les courbes se croisent et à ce que son impact CO2 devienne plus faible. L'impact initial est lié notamment à l'extraction des matériaux nécessaires pour fabriquer la batterie. Cet aspect est-il objectivement pris en compte dans la recherche ? Les innovations dans les matériaux et les procédés de fabrication permettent-elles d'espérer à terme une réduction de l'impact CO2 des véhicules électriques ?
Ces éléments me semblent importants si nous voulons véritablement éclairer nos collègues et nos concitoyens. La mobilité ne pouvant pas être totalement « propre », il faut chercher à en réduire l'impact. Comparer les différents types de mobilité implique d'objectiver l'analyse en matière de pollution de proximité et d'émissions de CO2. Or le seul moyen d'y parvenir est, selon moi, d'adopter une approche par ACV, dont je regrette qu'elle ne soit pas plus développée. Des travaux sont en cours, mais je trouve qu'ils n'avancent pas vraiment. Il faudrait, me semble-t-il, que l'Office se saisisse de cette question.
Pr Jean-Marie Tarascon. - L'ACV est prise en considération au niveau des batteries. Aujourd'hui, nous savons que, pour fournir 1 kWh de batterie, il faut 320 à 350 kWh d'électricité, ce qui correspond à une émission de 90 kg de CO2. Je ne suis en revanche pas compétent pour évoquer ce qui est fait au niveau de l'intégration du système.
En tant que chercheurs, nous travaillons pour diminuer les émissions de dioxyde de carbone dans ce domaine, en élaborant des procédés beaucoup plus écocompatibles, c'est-à-dire mis en oeuvre à température ambiante, et en choisissant des matériaux plus abondants que ceux utilisés traditionnellement dans les batteries.
M. Stéphane Piednoir, sénateur. - Ma question s'adresse à M. Torcheux, qui a évoqué les batteries de secours présentes dans l'EPR de Flamanville et l'utilisation dans ce cadre d'une technologie ancienne, le plomb-acide. Pourquoi avoir fait ce choix ?
Le coût marginal de production d'électricité par des centrales nucléaires est quasiment nul. Est-il envisagé d'installer des batteries en attente afin de restituer de l'électricité pour faire face à un pic, voire compléter les batteries de secours ?
Ma dernière question, adressée à l'ensemble des intervenants, concerne la sensibilité aux températures. Nous savons tous qu'une batterie d'automobile pour laquelle on annonce une autonomie de 300 km lorsqu'elle est chargée et que la température est d'une vingtaine de degrés, passe à 200 km seulement en plein hiver. La capacité intrinsèque de la batterie n'est donc pas exploitée lorsque les températures sont basses. Pour autant, nous n'avons pas nécessairement moins besoin de notre véhicule durant les périodes froides. Ce phénomène est-il l'objet d'un des axes de recherche actuels ?
M. Laurent Torcheux. - Les batteries utilisées dans les centrales nucléaires sont effectivement des batteries de secours. Nous disposons d'environ 1 MW de secours pour tous les systèmes des centrales nucléaires, du moins sensible au plus sensible. L'utilisation de batteries au plomb est le fruit de l'histoire. Cela demeure néanmoins une très bonne technologie pour les applications de secours, y compris en dehors du nucléaire : elle présente en effet l'avantage d'être stable, simple et de ne nécessiter ni électronique de contrôle, ni égalisation, qui sont toutes deux susceptibles d'induire des problèmes de fiabilité. Ce système est bien connu et qualifié pour de nombreuses années, avec des fournisseurs qui se sont engagés à maintenir la technologie pour des décennies. Ceci explique notre choix.
Pour autant, nous ne refusons pas le progrès et des études sont en cours sur la possibilité de remplacer ces batteries par des batteries plus élaborées, au lithium, qui offriraient davantage de capacité de secours, voire d'autres fonctions, comme vous l'évoquez. Il s'agit toutefois de projets à long terme.
Dr Yannick Borthomieu. - Le critère de température est exacerbé dans l'espace par rapport à la situation au sol. Lorsqu'un satellite se trouve à l'ombre, la température est de - 150 degrés. Elle peut à l'inverse, dans certaines situations, atteindre + 200 degrés. La gestion thermique passe notamment par une isolation des batteries et par des systèmes de radiateurs, qui coûtent cher et ne sont pas mis en oeuvre dans les véhicules automobiles. Dans le cadre de la mission d'exploration qui doit se rendre sur Mars, les contraintes thermiques seront importantes et nous travaillons sur des technologies de batteries lithium-ion résistant à des gammes de températures plus larges (de - 40 degrés à + 100 degrés) que celles rencontrées dans les applications terrestres. Certaines technologies peuvent répondre de manière adaptée à des températures très basses, grâce à une sélection appropriée des électrolytes et à des configurations spécifiques. D'autres peuvent répondre favorablement aux hautes températures. La contrainte et le défi pour nous sont de disposer de matériel capable de résister à une large gamme de températures. Des travaux sont en cours pour pouvoir proposer des solutions plus adaptées, avec de meilleures tenues, l'enjeu de sécurité restant une problématique majeure, notamment à chaud.
Pr Jean-Marie Tarascon. - L'électrolyte, c'est-à-dire la substance qui permet d'obtenir la puissance, la vitesse à laquelle les ions vont bouger, est l'élément central. Lorsque le système refroidit, les ions se déplacent moins vite.
Outre la batterie, il faut prendre en considération le véhicule. En hiver, l'air est plus dense et la résistance opposée au déplacement du véhicule est plus importante. La batterie va donc consommer davantage. Le phénomène est le même lorsque vous conduisez à 140 km/h ou à 80 km/h : la résistance de l'air varie. Tous ces paramètres entrent en jeu, en dehors de la batterie elle-même, lorsque l'on utilise un véhicule électrique par temps froid ou chaud.
Seconde table ronde : après le lithium, vers des innovations de rupture ?
Pr Jean-Marie Tarascon. - Ma deuxième intervention vient compléter la première par des éléments relatifs à la recherche et aux perspectives qui s'ouvrent en matière de batteries.
Il a été beaucoup question ce matin de la technologie lithium-ion, qui est très largement utilisée et le sera encore pendant plusieurs décennies. Nous avons également évoqué les technologies tout solide et sodium-ion.
D'autres technologies, comme le lithium-soufre, les batteries Zn-MnO2 ou encore les systèmes redox flow à flux circulant continuent à être explorées, mais présentent des difficultés pas totalement résolues. Aucune n'a atteint une maturité suffisante et le lithium-ion reste le plus intéressant en termes de rapport coût-rendement.
Nous sommes toujours à la recherche de matériaux plus écocompatibles et d'une meilleure maîtrise des interfaces. Nous utilisons pour ce faire toutes les approches modernes de l'intelligence artificielle, des réseaux de neurones et de la science des données. De tels travaux sont en cours dans le cadre notamment du projet Battery 2030.
L'amélioration de la sécurité et de la fiabilité des batteries constitue également un enjeu majeur et fait l'objet de nombreux travaux de recherche, notamment en France. Aujourd'hui, nous disposons en laboratoire de toutes les méthodes de caractérisation pour connaître la « vie intérieure » des accumulateurs. Mais lorsque ces systèmes sont intégrés dans un véhicule électrique, la batterie devient une boîte noire. Il faut alors savoir comment disposer d'informations dans ce contexte, afin de permettre une utilisation optimale de la batterie. À ce jour, on n'utilise, pour des raisons de sécurité, que 75 % de la densité d'énergie maximale d'une batterie.
Les batteries ont une durée de vie annoncée de 10, 15 ou 20 ans. Va-t-on les recycler ou les réutiliser ? Donner une seconde vie à une batterie suppose de disposer de certaines informations, notamment sur la manière dont elle a été utilisée. En d'autres termes, il faut bénéficier d'une meilleure traçabilité. Les études menées dans ce domaine s'inspirent largement du secteur médical, où les données recueillies dans le corps d'un patient lors d'une intervention sont transmises à l'extérieur via des systèmes de fibre optique, par exemple. L'objectif est ainsi de développer des batteries « intelligentes », dans lesquelles seront implantés des capteurs permettant de connaître leur état de santé et leur fonctionnement réel, afin d'établir une sorte de passeport électronique. Nous allons pour ce faire utiliser des capteurs optiques comme ceux utilisés dans les systèmes de télécommunications. Ceci permettra de connaître les paramètres physiques à l'intérieur de l'accumulateur (température, pression), de déterminer les paramètres chimiques à l'oeuvre, les réactions parasites et les phénomènes thermodynamiques. Il s'agit là d'une toute nouvelle aire de recherche, dans laquelle la France est pionnière.
En médecine, lorsque l'on détecte une tumeur, on essaie de la résorber, de guérir le patient. Nous développons de même des systèmes d'autoréparation, d'auto-guérison de la batterie. Le vivant est riche d'exemples dans lesquels il est possible de sélectionner les anions ou les cations qui vont traverser ou non une membrane. L'idée est de s'inspirer de cette chimie supramoléculaire pour concevoir des membranes spécifiques qui permettent de contrôler l'acceptance ou le relargage d'ions à l'intérieur de l'accumulateur.
La batterie du futur ne sera plus un système chimique, mais un cerveau électronique embarqué, avec les traditionnelles électrodes positive et négative et une électrode supplémentaire qui fera office de sortie analytique du système. Grâce à cela, on pourra disposer de systèmes de gestion de batterie (BMS) beaucoup plus sophistiqués, qui permettront une meilleure utilisation du dispositif. Tout ceci sera connecté à des réseaux de neurones, des technologies d'intelligence artificielle, pour déterminer les algorithmes susceptibles, par exemple lorsque la batterie sera défaillante, d'actionner les actuateurs nécessaires.
L'objectif de cette démarche est de créer un passeport électronique de santé de la batterie, de façon à augmenter son efficacité, sa durabilité et de doubler sa durée de vie.
Où en est ce projet ? Nous sommes aujourd'hui en train de connecter des packs de batteries avec des fibres optiques qui vont permettre de connaître la température et la pression. Grâce à une transmission par wifi et des systèmes de communication de la taille d'un défibrillateur, il sera possible de contrôler directement l'état de la batterie. Ce type de processus va au-delà de notre expertise et implique des partenariats avec des compagnies comme Safran, expertes dans le traitement des données. Nous espérons que ce projet pourra aboutir dans quelques années.
Le deuxième aspect que je souhaite aborder concerne le recyclage. Je tiens à vous alerter sur la problématique spécifique que représentent le nombre de batteries et la quantité de matériaux auxquels nous allons être confrontés. Il faut savoir qu'un véhicule électrique nécessite 6 fois plus de matériaux, d'éléments chimiques, qu'un véhicule thermique. Cette différence est uniquement liée à l'électrification.
Avec les transitions énergétique et numérique, on s'aperçoit que la quantité et la diversité des matériaux requis pour mettre en oeuvre les technologies innovantes sont de plus en plus importantes. On estime ainsi qu'il faudrait, pour satisfaire l'ensemble des besoins et demandes numériques et de mobilité, mobiliser d'ici 2050 plus de ressources minérales que depuis le début de l'humanité.
S'agissant des matériaux bien connus que sont le lithium, le nickel, le cobalt et le manganèse, il apparaît par ailleurs que les besoins générés par les batteries rechargeables pourraient à l'avenir préempter l'ensemble de la production. En 2030 par exemple, tout le lithium produit sera utilisé dans le domaine des batteries. Cela milite fortement en faveur du développement d'une filière de recyclage performante, permettant d'anticiper cette situation.
Pour imaginer les batteries et leur devenir, il faut ainsi anticiper le futur sans reproduire les erreurs du passé. Souvenez-vous de l'histoire du plastique, qui était le rêve de tous dans les années 1900, avant de devenir un cauchemar en matière de recyclage et de pollution. En 2025, il faudra recycler plus de 700 GWh et quelque 5 millions de tonnes de batteries. Il faut donc agir dès aujourd'hui et mener des recherches pour anticiper le recyclage de ces grands volumes.
Jusqu'à présent, les procédés de recyclage sont des méthodes classiques de pyrométallurgie ou d'hydrométallurgie, qui ne sont absolument pas vertueuses en termes d'électricité ou d'émissions de CO2. Des travaux de recherche sont donc menés actuellement au sein du Réseau sur le stockage électrochimique de l'énergie (RS2E) pour mettre au point des procédés écocompatibles favorisant des circuits courts de recyclage et consistant non pas à broyer les batteries, mais à les reformater pour être en mesure de les utiliser dans d'autres accumulateurs.
L'un des défis scientifiques réside également dans le fait de repenser la configuration même des batteries, en passant du modèle cylindrique généralisé depuis une centaine d'années à une batterie de type « Lego », dans laquelle tous les éléments seraient indépendants les uns des autres. Les composants défaillants pourraient ainsi faire l'objet de changements sélectifs, en fonction des informations fournies par les systèmes de diagnostic.
Je termine en évoquant le cadre législatif européen relatif aux batteries, qui fixe des échéances. Concernant l'empreinte carbone, il faudra, d'ici juillet 2027, respecter des plafonds d'empreinte CO2. À partir de janvier 2035, les taux minimaux de matériaux recyclés seront relevés à 20 % pour le cobalt, 10 % pour le lithium et 12 % pour le nickel. Enfin, la mise en place du passeport électronique est déjà actée au niveau européen et entrera en vigueur en janvier 2026. La difficulté du contexte européen tient au fait que la législation fixe des objectifs sans pour autant identifier clairement les solutions et les recherches à mener pour les atteindre.
Je vous remercie pour votre attention et conclus mon propos en insistant sur le fait que les grands progrès scientifiques découlent de la recherche fondamentale.
M. Gérard Leseul, député, vice-président de l'Office, rapporteur. - Quel sera le surcoût éventuel du passeport électronique des batteries ? Cela menace-t-il la durabilité ?
Pr Jean-Marie Tarascon. - Les recherches que j'ai évoquées et qui sont loin d'avoir trouvé leur voie dans les batteries actuelles, sont très coûteuses et il faut tenir compte de l'effet de volume pour connaître les coûts associés. Le passeport électronique mentionné dans le cadre législatif européen est beaucoup moins ambitieux que celui que je vous ai décrit, puisqu'il s'agit seulement de vérifier la température et les cycles d'utilisation de la batterie.
Dr Nesrine Darragi, fondatrice de Hive Electric SAS. - Je suis présidente-fondatrice de Hive Electric, société basée en Hauts-de-France, dans la « vallée de la batterie ».
Je vais vous présenter très rapidement notre activité, mais surtout les problématiques liées au développement des batteries par des start-up.
La première diapositive est le résumé de travaux réalisés par l'European Battery Alliance 250 (EBA250), dont fait partie Hive Electric, sur les problématiques auxquelles est confrontée l'ensemble de la chaîne de la batterie, depuis les matières premières jusqu'au recyclage et la deuxième vie, en passant par les matériaux actifs, l'assemblage des batteries et leur intégration.
Les prévisions sur les demandes et attentes à l'horizon 2030 montrent tout d'abord que les matériaux indispensables pour y répondre devront être équivalents à la totalité des matériaux extraits depuis l'Antiquité, ce qui est impossible scientifiquement parlant. Il existe ainsi un écart énorme entre les ambitions affichées en termes d'électrification et la réalité des matériaux disponibles. La réglementation incite aujourd'hui au développement de l'électrification : on parle de construire 37 gigafactories en Europe dédiées aux batteries, à la mobilité et plus précisément aux voitures électriques. Mais on oublie ce faisant que la transition énergétique et le stockage des énergies renouvelables ont d'autres applications et que d'autres secteurs ont besoin de ces matériaux et batteries.
À l'échelle de l'Europe, la matière indispensable pour la fabrication d'une seule gigafactory est inexistante. On estime à 2 % seulement la matière disponible pour les gigafactories européennes. La dépendance à l'égard des pays asiatiques essentiellement, mais aussi africains et d'Amérique latine, est donc critique. Il faut aussi savoir que les Chinois ont la main sur la majeure partie des mines.
On observe depuis quelques mois une augmentation des prix de la matière première. Aujourd'hui, la disponibilité de cette ressource résulte de négociations entre les États et pas uniquement entre industriels et fournisseurs. J'ai assisté à quelques réunions entre un gouvernement et des patrons de gigafactories : il s'agit de négociations politiques très compliquées.
Ce champ n'est pas accessible aux start-up, d'où le choix de Hive de travailler sur des technologies alternatives, utilisant des matières disponibles dans un périmètre de 100 km pour n'importe quel industriel, dans n'importe quel pays. Je précise que l'objectif de Hive n'est pas d'être producteur de batteries : dans le monde de l'énergie et de la mobilité, il est très difficile pour une start-up, a fortiori dirigée par une femme et travaillant sur des technologies de rupture, de lever les fonds nécessaires, en France comme en Europe. La technologie initialement utilisée par Hive Electric est le métal-ion, à base d'aluminium et de graphène.
La fabrication des batteries se caractérise aujourd'hui par un manque de financement et des procédés trop coûteux. 100 GWh nécessitent des investissements de plus de 500 milliards d'euros. Passer à l'échelle et assurer la transition impliquent donc de réduire les coûts.
Autre problème : les machines sont fabriquées essentiellement en Asie. Des fabricants commencent toutefois à émerger en France et en Europe, surtout en Italie.
Il a été question précédemment de l'ACV. Évaluer l'impact global d'une batterie impose de prendre en compte non seulement la provenance des matières premières, mais aussi celle des machines utilisées dans le procédé de fabrication. Les différentes phases de production doivent avoir un coût maîtrisé. Aujourd'hui, Hive Electric collabore avec des équipementiers afin de réduire les coûts et d'améliorer les procédés, l'objectif étant que les machines consomment moins et offrent de meilleures performances.
Le ralentissement observé actuellement est dû à une moindre disponibilité des matières premières. Une gigafactory comme celle de Renault produit entre 100 000 et 200 000 voitures électriques par an. Or il est prévu que la production annuelle passe à terme à 2 millions de véhicules, ce qui suppose de disposer a minima de 10 gigafactories. Le passage à cette échelle va être très difficile si l'on ne parvient pas à améliorer les performances des batteries et à trouver le moyen de les recycler.
Aujourd'hui, le recyclage s'effectue surtout par broyage. Or nous avons réalisé une analyse sur la possibilité de deuxième vie des batteries et constaté que plus de 80 % des cellules et accumulateurs utilisés dans une batterie étaient toujours fonctionnels et utilisables. L'une des solutions serait donc d'éviter de tout broyer et de regarder en détail les éléments susceptibles d'être réutilisés et remis à niveau. Les outils d'intelligence artificielle vont permettre d'améliorer les performances et de résoudre la problématique au niveau nanométrique.
Hive Electric est une start-up créée en 2019, à Lille. Elle développe des technologies de rupture et travaille sur des cellules métal-ion sans cobalt, sans nickel, sans manganèse ni lithium. Nous avons toutefois rencontré des difficultés à trouver des financements, car il s'agit d'une technologie de rupture, qui fait pour l'instant l'objet de peu de publications, si l'on exclut les rapports du Département de la défense américain et de la Nasa parus en 2020. Une start-up australienne, GMG, a bénéficié en 2020, soit un an après la création de Hive, de subventions d'un montant de 250 millions d'euros : cette société travaille quasiment sur la même technologie que nous, qui menons depuis 2019 nos développements sur fonds propres, à hauteur de 500 000 euros.
M. Jean-Luc Fugit, député, vice-président de l'Office. - Dans votre diapositive initiale, figurait le logo indiquant que votre projet était soutenu notamment par France Relance. Or vous nous dites disposer uniquement de financements sur fonds propres. Bénéficiez-vous de financements publics ?
Dr Nesrine Darragi. - Les financements France Relance correspondent très précisément à 23 000 euros. J'éprouve quelque difficulté à mentionner ces chiffres, car dans le monde de la batterie ces sommes ne sont que des pourboires. J'ai eu l'occasion d'en discuter avec le patron d'une gigafactory qui a été choqué par le chiffre annoncé. À l'échelle d'une start-up, lever 100 millions d'euros est le minimum. L'investissement nécessaire pour une usine est de 1 milliard d'euros par gigawattheure. Si l'on souhaite relocaliser, il faut trouver de tels financements. Nous essayons de réduire ces coûts, mais les paramètres économiques pour fabriquer en Europe sont ceux-ci.
Nous travaillions à l'origine sur le métal-ion, dont le TRL est 5, mais les difficultés rencontrées nous ont orientés vers une autre technologie. Nous nous étions demandé s'il était préférable de travailler sur des technologies disruptives ou de privilégier des innovations sur des technologies existantes. À l'origine, nous souhaitions travailler sur la rupture. Je me suis investie avec mon équipe pendant plus de 5 ans dans le développement de cette technologie. Or nous avons finalement découvert que la réalité était très différente de ce que nous avions imaginé : il faut aller sur le marché, prouver que l'entreprise fonctionne, travailler sur l'image, gagner en notoriété et en confiance (ce qui est très difficile dans le monde industriel), avant de revenir ensuite vers le métal-ion.
Nous avons donc réorienté nos travaux vers la technologie lithium-fer-phosphate (LFP), sans cobalt, ni nickel, ni manganèse, en conservant le même état d'esprit que précédemment, c'est-à-dire avec l'ambition que les gisements, la matière de supply chain, soient disponibles dans un rayon de 100 km autour de chaque usine et que l'impact environnemental soit réduit. En 2022, nous avons stabilisé un procédé électrochimique. Nous sommes en France les seuls à détenir des droits de propriété intellectuelle sur une technologie LFP, tout au moins pour cette première génération. Nous avons commencé la production, avec une capacité de 60 MWh en sous-traitance. Je peux vous annoncer par ailleurs que nous avons signé une joint-venture avec un équipementier automobile en Italie et allons passer à la production en Europe.
Nous essayons ainsi, avec les moyens du bord, de prouver que la technologie LFP fonctionne, en espérant obtenir par la suite le soutien des grands financeurs, qui attendent pour s'engager de voir des résultats tangibles et rassurants.
Notre centre de R&D a obtenu sur le LFP des résultats intéressants pour une première génération et nous travaillons actuellement au développement de la deuxième génération de batteries LFP, qui seront en phase solide. Notre objectif est de réduire l'impact environnemental et augmenter la sécurité, pour le LFP comme pour n'importe quelle autre technologie de stockage.
Toutes les applications n'ont pas besoin d'une densité énergétique supérieure à 1 kWh/kg. Une densité de 100 Wh/kg est suffisante pour certaines. 99 % des cellules présentes dans les appareils que vous utilisez ne sont pas rechargeables et ont été conçues dans les années 1960-1970. Les batteries plomb-acide continuent de même à être utilisées, alors que la technologie date de plus d'un siècle. Cela signifie qu'il ne faut pas se focaliser sur la densité massique d'énergie et la considérer comme le graal. Peut-être faut-il trouver d'autres moyens, étant donné les conditions actuelles de disponibilité de la matière première, qui vont être de plus en plus difficiles et faire l'objet d'une véritable guerre économique.
Hive Electric souhaite fournir des solutions aux petites sociétés qui veulent fabriquer des batteries et aux industriels qui veulent participer à la transition écologique, en proposant des licences et des franchises. Nous proposons ainsi des technologies comme le LFP, dont personne ne voulait entendre parler il y a deux ans. Le fait que Tesla utilise cette technologie dans ses voitures a depuis lors ouvert des pistes. Depuis quelques mois, plusieurs fabricants ont annoncé l'adoption du LFP dans leurs véhicules. La densité énergétique du LFP est certes moins intéressante que celle du NMC, mais la sécurité offerte permet d'aller vers des batteries et cellules de bonne taille. Il est ainsi question aujourd'hui de 4 kWh par cellule. Le fait d'utiliser de tels formats a évidemment un impact sur la densité énergétique totale de la batterie.
Vous pouvez voir à l'écran un tableau comparatif entre les technologies NMC, LFP et métal-ion. Il existe de nombreuses études de ce type disponibles sur internet, qui montrent que chaque technologie a ses usages.
Pourquoi le métal-ion ? Le choix de Hive est de travailler sur la technologie aluminium-ion, qui présente plusieurs avantages, notamment en termes de disponibilité de la ressource, de densité d'énergie, de recyclage et de coûts.
Je n'entrerai pas dans le détail des batteries tout solide, évoquées précédemment par M. Tarascon. Cette technologie présente de nombreux avantages et tout le monde s'accorde sur la nécessité de renforcer sans tarder les efforts de recherche et développement, car sa mise au point prendra probablement du temps. Nous considérons que notre rôle de centre de R&D est de faire émerger ce savoir-faire. J'insiste sur le fait que notre modèle économique consiste à effectuer des transferts de technologies. Lorsque LG, Panasonic, Samsung ou Tesla mettent au point des technologies de rupture leur permettant d'obtenir des performances très intéressantes, ils les gardent pour eux-mêmes. Nous sommes une équipe de chercheurs et d'ingénieurs de recherche et notre démarche consiste, à l'inverse, à partager les résultats de nos travaux. Notre objectif est ainsi de transférer des technologies à des gigafactories souhaitant mettre en oeuvre une démarche de rupture ou une approche plus vertueuse.
Le modèle de Hive Electric est celui de la licence et de la franchise. Ceci implique d'être en mesure de prouver des résultats, donc de mettre au point des produits et de démontrer leur possibilité d'intégration. Nous avons ainsi développé des systèmes de gestion de batterie (BMS) avec de l'électronique embarquée. Nous travaillons aujourd'hui sur du design sur-mesure, des formats de cellules et technologies spécifiques sur demande, de l'électronique embarquée et des batteries sur mesure.
Les champs d'application sont nombreux. Nous souhaitions initialement travailler plutôt dans le secteur aérospatial et la défense, car la technologie métal-ion, qui est intrinsèquement sûre, est bien adaptée pour cela. Nous nous sommes toutefois heurtés à des difficultés liées à la réglementation. Le choix a donc été fait de développer des solutions dans le domaine du stockage stationnaire, dans lequel les contraintes réglementaires sont moindres.
M. Sébastien Patoux. - Depuis plus de 75 ans, le CEA éclaire la décision publique et donne aux entreprises et collectivités les moyens scientifiques et technologiques de mieux maîtriser quatre enjeux sociétaux majeurs : la défense et la sécurité, la transition numérique, les technologies pour la médecine du futur et la transition énergétique, avec une vision intégrée de l'énergie et une convergence entre le nucléaire et les nouvelles technologies de l'énergie (NTE), dont les batteries, pour une neutralité carbone à horizon 2050.
Le CEA est présent dans la quasi-totalité de la chaîne de valeur des batteries, au niveau du raffinage, mais surtout de la synthèse des matériaux, de la fabrication des électrodes, des accumulateurs, des cellules et des packs batteries, des systèmes, de la conception et de l'assemblage des batteries et des usages (véhicules électriques ou autres).
Nous intervenons également dans le démontage et le recyclage. Notre objectif dans ce domaine est de parvenir à la boucle la plus courte possible, sachant que certains composants peuvent être réutilisés et certains matériaux réintégrés dans le marché de la batterie. Nous effectuons aussi beaucoup de caractérisation et de modélisation, avec des approches multi-physiques et multi-échelles.
L'analyse du cycle de vie est systématiquement prise en compte. Nous avons par exemple travaillé sur une technologie à base de matériaux organiques issus de la biomasse, considérant que ceci allait permettre d'obtenir des impacts plus faibles. Or, en l'état, il apparaît que le résultat n'est pas au niveau des batteries classiques. Les procédés de fabrication des biomatériaux et les performances des systèmes qui les utilisent doivent être optimisés. L'ACV apparaît ainsi comme un critère, mais ne doit pas conduire à mettre un point d'arrêt aux recherches au motif que la technologie considérée ne serait pas suffisamment mature de ce point de vue.
Le CEA travaille depuis 30 ans sur les batteries au lithium et ses dérivés, avec 300 personnes et 500 brevets déposés sur le sujet. Il est présent aux différentes étapes de la chaîne de valeur, ce qui lui permet d'appréhender l'impact d'un matériau au niveau d'un système complet. Notre positionnement est celui d'un continuum entre amont et aval, propice à l'innovation. Nous développons ainsi de la recherche fondamentale pour faire mûrir les technologies amont et réaliser les preuves de concept qui nous permettent d'aller jusqu'au transfert vers les industriels.
Nous disposons d'une capacité d'adaptation grâce à un large spectre de moyens, d'outils et de méthodes.
Nous veillons en outre à prendre en compte au bon niveau la démarche d'éco-innovation, incluant analyses du cycle de vie, écoconception et éco-innovation.
Nous jouissons enfin d'une reconnaissance de la part des acteurs industriels, académiques et institutionnels de l'écosystème, au niveau français, européen et au-delà.
Sur le plan technique, la majorité des efforts porte sur les générations 3 et 4 de batteries, basées sur le lithium, technologie qui, comme l'a indiqué Jean-Marie Tarascon, va perdurer pendant de très nombreuses années. Nous effectuons par ailleurs de la veille active sur les générations suivantes, qu'il s'agisse de la génération 5 lithium-soufre ou de technologies à base de lithium, sodium et potassium notamment. Nous développons aussi, parallèlement, des briques technologiques communes à plusieurs chimies, autour notamment de l'intelligence artificielle et des capteurs.
Depuis 200 ans, les technologies mises en oeuvre dans les batteries et commercialisées à grande échelle ont considérablement évolué, avec la pile Volta au 18e siècle, puis les batteries au plomb, au nickel-cadmium et enfin, depuis les années 1990, au lithium-ion, qui ont connu plusieurs générations. Aujourd'hui, c'est essentiellement la génération 3 qui est fabriquée dans les gigafactories en Europe et dans le monde. Les deux premières générations concernaient plutôt l'électronique portable, avec des volumes relatifs à de petites batteries. En ordre de grandeur, les batteries au lithium représentaient 2 GWh en 2000, 200 GWh en 2020, soit une multiplication par 100 en 20 ans, et représenteront au moins 2 TWh en 2030. Cette forte croissance est due au développement du véhicule électrique et, dans une moindre mesure, du stockage stationnaire. En valeur, les batteries lithium-ion ont, depuis deux ou trois ans, dépassé les batteries au plomb. Il est à noter que ce phénomène ne va faire que s'amplifier dans les années à venir.
Il existe plusieurs choix de technologies au lithium, en fonction de l'électrode positive ou négative, de l'électrolyte - liquide ou solide -, du format, de la taille de la batterie, de la conception globale du système. Le délai de mise sur le marché de ces technologies est d'environ 10 ans. Ce fut le cas pour le phosphate de fer ou les électrodes de silicium. Parfois, ce délai est beaucoup plus long : je pense notamment aux technologies sodium-ion ou lithium-soufre.
L'une des caractéristiques du lithium-ion est la durée de vie des produits. La première batterie lithium-cobalt-oxyde (LiCoO2) commercialisée par Sony en 1990 est encore sur le marché aujourd'hui et, si elle n'en représente que quelques pourcents, elle connaît une croissance constante depuis 30 ans. M. Borthomieu a aussi montré que certaines technologies extrêmement bien maîtrisées pouvaient avoir des durées de vie très longues.
De nombreux critères, en matière de densité d'énergie, de densité de puissance, de durée de vie, de sécurité, etc., doivent en outre être respectés pour qu'une mise sur le marché soit envisageable.
Les technologies actuelles connaissent des progrès continus. Pour l'accumulateur lithium-ion par exemple, ceci s'est traduit tout d'abord par un fort gain en densité d'énergie (de 90 Wh/kg dans les années 1990 à plus de 250 Wh/kg au milieu des années 2000), puis une baisse significative des coûts (de 1 000 €/kWh au milieu des années 2000 à moins de 100 €/kWh vers 2015) et enfin un fort allongement de la durée de vie (de 500 cycles au milieu des années 2010 à 5 000 aujourd'hui en moyenne). Nous tentons également de faire progresser la charge rapide, la sécurité et l'empreinte environnementale, qui sont à nos yeux des éléments primordiaux.
Quelles sont les tendances du marché ? La frise affichée à l'écran montre l'évolution des accumulateurs au lithium depuis 2017, en matière de densité d'énergie. Nous sommes ainsi passés de la génération 3a aux générations 3b, 4a, 4b, voire 5, en intégrant progressivement des innovations au niveau des électrolytes, des procédés, des électrodes positive et négative, etc. L'électrolyte est passé d'un liquide à un hybride, il sera peut-être un solide demain. Au-delà, la technologie lithium-soufre présente l'intérêt de ne pas nécessiter de matériau de transition tel que le cobalt, le nickel ou le manganèse et d'utiliser du soufre, beaucoup moins coûteux.
L'empreinte environnementale est aujourd'hui un sujet de préoccupation majeur. Les procédés de fabrication des électrodes impliquent le recours à des solvants, potentiellement toxiques et dont le retraitement a un coût énergétique considérable. De ce fait, les générations actuelles de gigafactories sont particulièrement attentives à la manière de limiter la teneur en solvants, parallèlement aux développements de la chimie. On envisage à l'avenir des fabrications sans solvant. Il est donc important de considérer non seulement les matières premières, mais aussi les procédés et l'ensemble du système, qu'il faut faire progresser dans le sens d'une réduction de l'empreinte environnementale.
Au niveau de l'électrode positive, la déclinaison actuelle est surtout centrée sur la NMC, avec une amélioration continue de ces matériaux, dont 700 000 tonnes environ sont utilisées chaque année, contre 50 000 tonnes seulement de LiCoO2.
Notez que le LFP, commercialisé en Chine à très grand volume depuis 2005, soit 10 ans après sa découverte aux États-Unis, est revenu peu à peu en Europe : bien que moins performant que le NMC, il présente en effet l'avantage d'une empreinte environnementale plus faible. Le LFP entraîne derrière lui une série de technologies, dont le sodium-ion qui permet de s'affranchir du lithium-ion, le lithium-soufre et, à long terme, des batteries « tout organique » (à base de carbone, hydrogène, oxygène, azote, issus si possible de la biomasse).
La technologie lithium-soufre, découverte dans les années 1960, suscite un intérêt croissant depuis une quinzaine d'années. On observe notamment une augmentation du nombre de publications scientifiques et de brevets déposés depuis 2010. Le lithium-soufre présente l'avantage de combiner performance et abondance de la matière première. Certains verrous subsistent néanmoins, notamment en termes de durée de vie, de performances en puissance et de maîtrise du lithium métal, qui expliquent que cette technologie ne soit pas encore commercialisée.
Aujourd'hui, le CEA envisage plutôt cette technologie sous le prisme du lithium-soufre en version solide et il est appuyé dans cette démarche par France Relance et l'un des programmes ciblés du PEPR « Batteries ».
Le CEA a lancé en 2012, à l'initiative de Jean-Marie Tarascon, une task force CEA - CNRS sur la technologie sodium-ion. Celle-ci n'était pas nouvelle en tant que telle : dans les années 1980 à Bordeaux, le Pr Claude Delmas travaillait déjà sur le sodium-ion. Entre 2012 et 2015, la task force s'est efforcée de fabriquer des matériaux en quantité suffisante puis, en 2017, une preuve de concept a été réalisée au niveau d'une cellule, qui mesure 6,5 cm de hauteur et 18 mm de diamètre. Le CEA et le CNRS ont par la suite continué à travailler sur différents projets, différents formats de cellules. La création de Tiamat est intervenue en 2017-2018. Des projets ont également été développés au niveau européen, réunissant le CEA, le CNRS et d'autres partenaires dont Tiamat.
Parmi les applications en stationnaire, on peut citer les projets Naïades en 2020 et, plus récemment, Naïma en 2022. Une nouvelle preuve de concept est actuellement en cours au CEA, avec un objet incorporant des cellules Tiamat et un module fabriqué au CEA. Il faut savoir par ailleurs que la Chine s'est emparée du sujet de façon massive ces derniers temps, avec CATL, qui est numéro un mondial, BYD et HiNa Battery. Le CEA et le CNRS continuent à travailler sur le développement d'une nouvelle génération de sodium-ion, comme ce fut le cas pour le lithium-ion. L'étape suivante est l'industrialisation à grande échelle et nous espérons que Tiamat pourra lever en France les fonds nécessaires pour mener ce projet à bien. Je précise que cette technologie ne va pas remplacer le lithium-ion. Elle ne représentera que quelques pourcents du marché global, mais elle arrive et est moins utopique que d'autres technologies, qui sont plus en amont dans leur cycle de développement.
Quelles batteries demain ? Selon le CEA, la tendance sera à une diversification modérée des solutions technologiques au niveau industriel, avec surtout, pendant de nombreuses décennies, du lithium-ion de générations 3 et 4a. Une opportunité pourrait néanmoins s'ouvrir à terme pour le sodium-ion et, plus tard peut-être, le potassium-ion. On envisage enfin une possible confirmation du lithium-métal de générations 4b et 5. Il convient toutefois de noter qu'en 2030 ou 2035, ces technologies ne devraient pas représenter plus de quelques pourcents du marché.
Parallèlement au développement technologique, la forte croissance de la demande nécessitera de mieux maîtriser l'approvisionnement en matières premières, qu'elles soient issues des mines ou du recyclage, avec des boucles les plus courtes possible, d'optimiser les procédés de fabrication pour les rendre moins énergivores et utiliser moins de solvants, et de proposer des batteries plus résilientes en termes de durée de vie, de réparation, de flexibilité, etc.
En conclusion, le CEA est un acteur incontournable en matière de batteries, puisqu'il est positionné sur l'ensemble de la chaîne de valeur. Si le marché est mondial, la France et l'Europe semblent désormais disposer d'un avenir industriel, avec des sociétés comme Saft, Bolloré, Solvay, etc. Enfin, comme l'indiquait précédemment M. Tarascon, les technologies de demain seront essentiellement à base de lithium, car plus performantes, moins chères et moins polluantes que les autres.
M. Gérard Leseul, député, vice-président de l'Office, rapporteur. - Dans vos propos sur les technologies en développement, vous n'avez pas évoqué la question des coûts. Certaines ont-elles un moindre coût de production, à la fois environnemental et financier ?
M. Sébastien Patoux. - Une grande partie du coût est due aux matériaux, notamment à la présence de cobalt, de nickel et, dans une moindre mesure, de manganèse. C'est la raison pour laquelle on tend à s'affranchir autant que possible du cobalt. Bien évidemment, le fait de produire énormément de batteries fera que l'on aura toujours besoin d'un certain volume de cobalt ; mais la proportion par batterie diminue. On utilise aujourd'hui encore beaucoup de nickel. Il existe toutefois des solutions ressemblant au NMC ou au LiCoO2, avec du manganèse en grande quantité, sur le même créneau que le phosphate de fer. C'est ce qu'a annoncé par exemple Umicore dans la presse voici quelques semaines. Cela va conduire à une diminution du coût.
La moindre utilisation de solvants va aussi conduire non seulement à limiter l'empreinte environnementale, mais aussi à réduire les coûts.
L'allongement de la durée de vie des batteries est un critère important, qui va également conduire à une baisse du coût par nombre de cycles. Il sera ainsi possible de les utiliser non seulement dans les véhicules, mais aussi sur le réseau lorsque cela sera nécessaire.
Nous avons observé une baisse très rapide du coût voici une dizaine d'années. Aujourd'hui, nous sommes plutôt sur un plateau, mais sans doute y aura-t-il ultérieurement une deuxième phase de baisse des coûts, due à la combinaison des facteurs que je viens de citer.
M. Jean-Luc Fugit, député, vice-président de l'Office. - Merci pour toutes ces interventions.
Mme Darrigi, j'ai cru comprendre qu'il était envisageable, pour les technologies sur lesquelles vous travaillez, d'étendre la gamme des températures de fonctionnement. Cela permettrait-il de conserver les capacités de la batterie ?
Vous avez évoqué, M. Patoux, de possibles recherches sur la technologie potassium-ion. Cela vous apparaît-t-il être une piste intéressante, sachant que le sodium et le potassium sont tous deux des éléments alcalins ?
Ma question suivante concerne les véhicules hybrides. Aujourd'hui, la batterie d'une Zoé est de 60 kWh, ce qui correspond à 6 batteries de 10 kWh chacune. Quel regard portez-vous sur les batteries de taille plus modeste, que l'on utilise pour les véhicules hybrides ? Que pensez-vous, plus globalement, des véhicules hybrides, à propos desquels les avis sont très contrastés, à la fois sur leur bilan CO2 et la manière de les utiliser ?
La batterie idéale existe-t-elle ?
Les technologies présentées par Mme Darrigi sont disruptives, innovantes. Que vous inspirent-elles, M. Tarascon ?
M. Pierre Henriet, député, président de l'Office. - Le couple aluminium-air est souvent évoqué dans les travaux de recherche de laboratoires comme Phenix. Il n'en a pas été question ce matin. Est-ce une piste de réflexion pour vous ? Savez-vous où en sont les recherches à ce sujet ?
M. Gérard Longuet., sénateur, premier vice-président de l'Office. - Je souhaiterais vous interroger sur les batteries de traction implantées dans les automobiles électriques. A-t-on une idée précise de leur durée de vie ? Je crois avoir compris que dès lors qu'elles perdaient une part minoritaire mais néanmoins significative de leur capacité, de l'ordre de 20 ou 25 %, elles ne pouvaient plus être utilisées pour la traction d'un véhicule ; cela ne signifie d'ailleurs pas pour autant qu'elles ne puissent pas être utilisées à d'autres fins moins exigeantes en valeur ajoutée par rapport au poids, liées en particulier au stockage stationnaire et à la régulation de l'énergie renouvelable, dont une fraction est intermittente et aléatoire - je pense essentiellement ici à l'énergie éolienne. Une batterie de traction a-t-elle une vie homogène et linéaire ou connaît-elle au contraire une rupture qui laisse des capacités inutilisées mais la rend impropre à remplir un rôle de traction du véhicule ?
M. Laurent Torcheux. - Cette question renvoie à la notion de deuxième, voire de troisième vie de la batterie avant recyclage final. Les constructeurs garantissent aujourd'hui leurs batteries jusqu'à un état de santé de l'ordre de 75 %, soit environ 10 ans. Au-delà, il n'y a plus de garantie. Cela ne signifie pas pour autant que le véhicule ne fonctionnera plus à partir de cette date. Les batteries au lithium ont en effet un réservoir de puissance assez important, si bien que la batterie pourra toujours mouvoir le véhicule. En revanche son autonomie sera réduite et ce phénomène sera de plus en plus prégnant au fil du temps.
Se pose alors la question de garder ou revendre un véhicule déclassé, avec la batterie toujours à bord, dans des applications nécessitant moins d'autonomie. Cela constitue une première piste.
L'autre possibilité consiste à laisser évoluer la batterie, puis à la retirer afin de la consacrer à des usages autres, dont des applications stationnaires comme la production photovoltaïque domestique ou sur les réseaux électriques, éolien, etc.). Tout ceci est envisageable, mais a un coût. Je pense notamment au démantèlement et au tri, nécessaires pour garantir les batteries pour leur nouvel usage, ou encore au coût logistique. Aujourd'hui, l'équation économique n'est pas excellente et nous travaillons à son amélioration.
Ces procédés entrent par ailleurs en compétition avec le recyclage final, qui a également une valeur. Cet aspect mérite encore réflexion.
Pr Jean-Marie Tarascon. - La question relative à la technologie aluminium-air illustre parfaitement la difficulté qu'il y a à juger la situation actuelle. Je traiterai ce point en évoquant plus globalement la technologie métal-air, et notamment lithium-air. Cette technologie est apparue voici une dizaine d'années et Toyota a annoncé en 2017 qu'ils allaient la développer afin d'en équiper leurs véhicules électriques. Des investissements nationaux et internationaux ont alors eu lieu, équivalents à l'engouement - initié également par Toyota en 2018 - que l'on rencontre aujourd'hui pour la technologie tout solide. Sept à huit ans plus tard, il n'en est plus question. Cette technologie est tombée dans les oubliettes. Ceci montre qu'il convient de considérer les annonces avec la plus grande prudence. L'aluminium-air est probablement une technologie intéressante, mais elle requiert, pour être véritablement opérationnelle, de lever de très importants verrous technologiques.
J'ajoute que la technologie lithium-phosphate n'est pas du métal-ion : elle est connue depuis plus de 20 ans, mais est arrivée en Europe voici seulement 2 ou 3 ans, pour la bonne et simple raison que l'Europe ne pouvait pas, jusqu'alors, bénéficier de brevets dont la Chine avait la jouissance exclusive.
Que serait la batterie idéale ? Je pense pour ma part qu'elle n'existe pas, car on aspire toujours à davantage d'autonomie, à de meilleures performances. Au niveau de la chimie, la batterie lithium-ion semble assez idéale, car elle est prévue pour durer un siècle et présente une chimie beaucoup moins complexe que la batterie au plomb. L'autonomie d'une batterie est contrôlée par les électrons, provenant de molécules, de réactions chimiques. Chaque liaison que l'on casse compte un, voire deux électrons. Nous connaissons ces limites et essayons de les repousser. La marge d'amélioration réside selon moi autant dans l'ingénierie que dans la chimie. C'est la raison pour laquelle je pense qu'il faut travailler, pour l'avenir, à rendre les batteries toujours plus fiables, plus durables, plus écocompatibles, etc. Nous disposons selon moi de plus de 50 ans pour améliorer la technologie lithium-ion en ce sens.
Dr Yannick Borthomieu. - Nous sommes, chez Saft, particulièrement bien placés pour répondre à la question de la batterie idéale. Nous avons coutume de dire qu'elle n'existe pas et qu'il n'existe que des batteries adaptées à des applications. Ce sont les usages qui vont faire la batterie idéale. Lorsque l'on vise la sécurité, on aura plutôt tendance à utiliser des éléments et des systèmes à base de phosphate. Quand on recherche une capacité de recharge très rapide, une puissance importante (pour des applications militaires de défense notamment), on choisit prioritairement des technologies à base de titanate.
M. Sébastien Patoux. - Le véhicule hybride a un coût intrinsèque induit par la gestion de ses deux moteurs (électrique et thermique) et de la chaîne de roulage. Peut-être peut-on imaginer des batteries « échangeables », composées en fonction du kilométrage que l'on souhaite accomplir. L'hybride peut être un bon compromis, permettant de rouler au quotidien à l'énergie électrique et de recourir occasionnellement à l'énergie thermique pour effectuer les longs voyages lors des départs en vacances, sans avoir à se poser la question de la charge très rapide sur l'autoroute en période d'affluence. Evidemment, si la loi interdit les véhicules thermiques, cette solution n'en sera pas une. Il peut s'agir d'une possibilité intermédiaire.
Comme nous l'avons vu, le lithium-ion recouvre différentes technologies. Il est aussi possible, comme l'a expliqué M. Borthomieu, de spécifier la batterie la mieux appropriée à chaque usage. Au sein d'une même application, par exemple le véhicule électrique, la diversification des solutions apparaît également comme une possibilité intéressante. On peut faire le parallèle avec les moyens de production d'électricité, où le nucléaire et les énergies renouvelables coexistent et où il n'est pas nécessaire de choisir l'un au détriment des autres.
J'ai cité le potassium-ion, sachant que le lithium, le sodium et le potassium, qui sont des substances alcalines, se comportent quasiment de la même façon, à la différence d'éléments comme l'aluminium, le magnésium ou le calcium, qui présentent une autre complexité. Le potassium est intéressant par rapport au lithium, mais pas nécessairement par rapport au sodium. L'idée de cette technologie, comme celle des générations suivantes au sodium, est d'utiliser des matériaux d'électrode positive sans cobalt, sans nickel, etc. Ceci ne constituera pas une révolution, car potassium et sodium ne permettront pas d'obtenir des performances meilleures que le lithium-ion, mais participera d'un équilibre global : lorsque l'on aura besoin d'une batterie moins chère ou plus puissante dans le cas du sodium, cette technologie trouvera sa place.
Pr Jean-Marie Tarascon. - Je tiens à ajouter que des études très poussées sont actuellement menées sur la possibilité d'effectuer une recharge en changeant de batterie à chaque arrêt. Un projet de batteries amovibles a été étudié il y a longtemps en Israël par la compagnie Better Place qui, depuis, a fait faillite, pour diverses raisons. Cette approche est de nouveau prise en considération aujourd'hui, afin d'en identifier les avantages et les inconvénients.
Dr Nesrine Darragi. - Hive Electric a travaillé sur des technologies d'échange susceptibles d'être reproduites n'importe où. La problématique de la transition énergétique ne se situe en effet pas uniquement en Europe, où nous avons la possibilité d'installer des stations de recharge. Si l'on souhaite circuler en véhicule 100 % électrique en Australie ou au Canada par exemple, il est nécessaire de disposer d'une infrastructure très complexe de réseaux de recharge, avec plusieurs protocoles et plusieurs types d'équipement pour la recharge. L'échange de batteries est une solution. Better Place a fait faillite car leur concept consistait à effectuer un échange avec 400 kg de batterie et une infrastructure beaucoup trop coûteuse. Ce modèle ne pouvait donc pas passer à l'échelle.
Depuis un an, Hive Electric propose des modèles de batteries « échangeables », composées de plusieurs modules dénommés Percheron, qu'il est possible d'assembler et de connecter pour obtenir une batterie de traction. Ceci nous permet d'intégrer des batteries très rapidement. Nous avons ainsi deux marques déposées, EZ-SWAP pour la batterie « swappable » et Percheron pour les modules. L'objectif à terme est de disposer d'infrastructures d'échange pour résoudre cette problématique d'infrastructure.
M. Gérard Leseul, député, vice-président de l'Office, rapporteur. - Les questions soumises par les internautes montrent qu'ils sont particulièrement intéressés par la problématique du recyclage, qui a été abordée lors de nos échanges.
Je tiens à remercier très sincèrement les intervenants et les collègues ayant participé à cette audition, qui va éclairer la rédaction d'une prochaine note scientifique actualisant un travail antérieur sur le stockage électrique.
M. Pierre Henriet, député, président de l'Office. - Nous nous retrouverons la semaine prochaine pour une nouvelle audition, dans la continuité des travaux conduits par nos collègues Angèle Préville et Philippe Bolo sur la pollution plastique.
Nous procèderons par ailleurs, mardi 9 mai à 13 heures 30, à l'examen du rapport sur les lois de programmation militaires et l'innovation élaboré par Huguette Tiegna et Ludovic Haye.
Merci pour votre présence ce matin.
La réunion est close à 12 h 50.