- Mardi 16 novembre 2021
- Second projet de loi de finances rectificatives pour 2021 - Examen du rapport
- Second projet de loi de finances rectificatives pour 2021 - Désignation des candidats pour faire partie de l'éventuelle commission mixte paritaire
- Projet de finances pour 2022 - Mission « Cohésion des territoires » (et articles 42 bis à 42 quater) - Programmes « Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables », « Aide à l'accès au logement », « Urbanisme, territoires et amélioration de l'habitat » et « Politique de la ville » - Programmes « Impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire » et « Interventions territoriales de l'État » - Examen des rapports spéciaux
- Projet de loi de finances pour 2022 - Mission "Culture" - Examen du rapport spécial
- Projet de loi de finances pour 2022 - Mission "Médias, livre et industries culturelles" et compte de concours financiers "Avances à l'audiovisuel public" - Examen du rapport spécial
- Projet de loi de finances pour 2022 - Mission "Recherche et enseignement supérieur" - Examen du rapport spécial
- Mercredi 17 novembre 2021
- Projet de loi de finances pour 2022 - Mission « Écologie, développement et mobilité durables » - Compte d'affectation spéciale « Financement des aides aux collectivités pour l'électrification rurale (FACÉ) » - Programmes « Paysages, eau et biodiversité », « Prévention des risques », « Énergie, climat et après-mines », « Service public de l'énergie » et « Conduite et pilotage des politiques de l'écologie, du développement et de la mobilité durables » - Programmes « Infrastructures et services de transports », « Affaires maritimes » et « Charge de la dette de SNCF Réseau reprise par l'État » - Budget annexe « Contrôle et exploitation aériens » - Programme « Expertise, information géographique et météorologie » - Examen des rapports spéciaux
- Projet de loi de finances pour 2022 - Mission « Relations avec les collectivités territoriales » (et articles 45 à 49) et compte de concours financiers « Avances aux collectivités territoriales » - Examen du rapport spécial
- Second projet de loi de finances rectificatives pour 2021 - Examen des amendements de séance
- Jeudi 18 novembre 2021
- Projet de loi de finances pour 2022 - Mission « Aide publique au développement » (et article 42 A) et compte de concours financiers « Prêts à des États étrangers » (et article 62) - Examen du rapport spécial
- Projet de loi de finances pour 2022 - Vote sur des missions précédemment examinées et réservées : « Investir pour la France de 2030 »
- Projet de loi de finances pour 2022 - Examen définitif de l'équilibre, des missions, des budgets annexes, des comptes spéciaux et des articles rattachés de la seconde partie
- Projet de loi de finances pour 2022 - Examen d'une motion et d'un amendement de séance à l'article 18
- Projet de loi de finances pour 2022 - Désignation des candidats pour faire partie de l'éventuelle commission mixte paritaire
- Vendredi 19 novembre 2021
Mardi 16 novembre 2021
- Présidence de M. Claude Raynal, président -
La réunion est ouverte à 09 h 05.
Second projet de loi de finances rectificatives pour 2021 - Examen du rapport
M. Claude Raynal, président. - Nous examinons ce matin le rapport sur le second projet de loi de finances rectificative (PLFR) pour 2021.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Je souhaite, comme il est d'usage, présenter le contexte macro-économique dans lequel s'inscrit ce projet de loi, étant entendu que les analyses que j'en fais sont dans le droit fil de celles que j'ai présentées devant vous la semaine dernière, à l'occasion de l'examen du tome 1 du projet de loi de finances (PLF) pour 2022.
Comme l'ont montré les données de l'Insee publiées fin octobre, l'activité s'est nettement redressée au troisième trimestre 2021. Ainsi, le PIB durant ce trimestre se situe 0,1 % en-dessous de celui du dernier trimestre 2019. Autant dire que notre économie a retrouvé son niveau d'avant-crise.
Toutefois, cela n'est pas vrai dans toutes les branches de l'économie. Ainsi, dans le secteur du commerce, de l'hébergement-restauration ou encore du transport, l'activité reste en dessous du niveau constaté au dernier trimestre 2019. Les secteurs qui ont retrouvé ou dépassé leur niveau d'activité d'avant-crise, c'est-à-dire les services non marchands, les services aux entreprises, ceux de l'information et des télécommunications, représentent les deux tiers de la valeur ajoutée totale.
Dans ce contexte, le Gouvernement a révisé sa prévision de croissance en 2021, évidemment par rapport au précédent PLFR - où elle était de seulement 5 % -, mais aussi par rapport à celle qui est inscrite au PLF pour 2022 lors de son dépôt - elle était alors de 6 %. L'hypothèse de croissance de 6,25 % désormais retenue par le Gouvernement apparaît toutefois très prudente au regard des derniers développements conjoncturels. Comme je vous l'ai dit récemment, l'acquis de croissance en 2021 est déjà de 6,6 %, et des prévisions récentes estiment que la croissance sera de 6,8 %.
À l'inverse, le Gouvernement n'a pas - contre toute attente - révisé la prévision d'inflation de l'indice des prix à la consommation harmonisé de 1,7 % pour 2021, alors qu'elle sera très vraisemblablement dépassée.
J'en viens maintenant à l'évolution de nos finances publiques.
L'année 2021 est plus que particulière du fait de l'ampleur des mesures d'urgence et de relance, qui ont été mises en oeuvre avec le soutien, à chaque fois, du Sénat, dans un esprit de responsabilité au regard de la crise sanitaire inédite que nous traversons. Mais comme je l'ai déjà fait remarquer lors de l'examen du rapport sur le PLF pour 2022, ces mesures n'expliquent pas toutes l'aggravation du déficit et de l'endettement. En effet, les dépenses primaires corrigées du coût de ces dispositifs ont augmenté de 41 milliards d'euros entre 2020 et 2021, c'est-à-dire à un rythme deux fois plus rapide que les mesures d'urgence et de relance.
Au final, le Gouvernement prévoit que le déficit public s'élèverait à 8,2 % du PIB, tandis que la dette pourrait atteindre 115,1 % du PIB.
Venons-en plus précisément au budget de l'État, qui fait l'objet de l'autorisation parlementaire en loi de finances.
Le déficit budgétaire de l'État serait de 205,2 milliards d'euros en 2021, soit 181,3 milliards d'euros résultant de l'effet des ressources et des charges inscrites en loi de finances et 23,9 milliards d'euros de crédits non consommés l'an dernier et reportés en 2021. Ces reports, qui ne sont d'ailleurs que partiellement consommés, nuisent singulièrement à la bonne lisibilité du budget de l'État.
Le déficit s'améliore par rapport aux 220,1 milliards d'euros prévus dans la première loi de finances rectificative du 19 juillet dernier, en raison de l'amélioration de la situation économique.
Au mois de septembre dernier, lors de la présentation du projet de loi de finances pour 2022, le déficit de 2021 était estimé à 197,4 milliards d'euros. Au titre des nouvelles mesures, l'indemnité inflation pèse à hauteur de 3,6 milliards d'euros sur le déficit de 2021 et 250 millions d'euros sur le déficit de 2022.
Le niveau réel du déficit exécuté pourrait toutefois être significativement moins élevé, comme cela a été le cas l'an dernier, en raison des sous-consommations prévisibles, notamment pour ce qui concerne les plans de relance et d'urgence.
Les recettes fiscales nettes sont proches du niveau prévu en septembre dernier, le seul mouvement important étant l'affectation d'une fraction supplémentaire de TVA à la sécurité sociale pour un coût de 1,4 milliard d'euros, prévue par l'article 1er du texte.
Par rapport au mois de juillet, l'évolution des prévisions de recettes fiscales au cours de l'année reflète l'évolution des prévisions relatives à la situation économique, ce qui explique notamment les fluctuations des prévisions de recettes d'impôt sur les sociétés, et dans une moindre mesure de TVA et de taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE).
Les recettes non fiscales pèsent sur l'évolution du déficit, car le versement de l'Union européenne pour le cofinancement du plan de relance sera de 5,1 milliards d'euros et non de 10 milliards d'euros. Il ne s'agit toutefois pas d'une perte sèche, mais d'un décalage dans le temps.
Les dépenses des ministères augmentent de 1,8 milliard d'euros.
D'une part, les ouvertures de crédits sont importantes en crédits de paiement (CP), en particulier pour l'indemnité inflation - 3,6 milliards d'euros pour trois missions au titre de 2021 -, sur laquelle je reviendrai dans un instant, mais aussi au bénéfice de France Compétences et du plan de réduction des tensions de recrutement - 2,5 milliards d'euros pour le seul programme 103 « Accompagnement des mutations économiques et développement de l'emploi » -, et pour le chèque énergie, avec 500 millions d'euros. Des ouvertures de crédits permettent aussi de financer les mesures prises en faveur des agriculteurs, qui connaissent cette année plusieurs crises environnementales, ainsi que le secteur de la culture, qui subit toujours des pertes importantes de billetterie.
Les ouvertures de crédits sont plus importantes encore en autorisations d'engagement (AE), notamment pour le plan de relance - + 2,3 milliards d'euros, sans crédits de paiement - et la mission « Travail et emploi », dont les engagements augmentent de 3,4 milliards d'euros. Le décalage d'un marché public permet pourtant une annulation de 1,6 milliard d'euros d'AE concernant la mission « Justice ».
Au total, ce collectif budgétaire, loin de limiter ses effets aux dernières semaines de l'année, engage les dépenses pour l'avenir.
Permettez-moi de faire un point sur les missions « temporaires » que sont le plan de relance et le plan d'urgence.
La mission « Plan de relance » fait l'objet d'ouvertures de crédits en AE uniquement, en principe compensées par d'autres véhicules budgétaires au sein de l'enveloppe globale de 100 milliards d'euros du plan de relance. La justification en est très sommaire. Par exemple, l'ouverture de 1,5 milliard d'euros pour le programme 364 « Cohésion », attribuée à des dispositifs tels que le plan « 1 jeune, 1 solution », correspond en fait à un montant réel bien plus élevé, car des sous-consommations à hauteur de 3 à 4 milliards d'euros sont à prévoir pour ce qui concerne l'activité partielle de longue durée, sans que l'on sache dans quelle mesure ces crédits seront transférés à d'autres dispositifs - sans doute via des reports importants en 2022. Le Gouvernement crée manifestement une réserve de budgétisation, sans qu'il soit possible d'en connaître, à ce stade, la répartition.
C'est pourquoi je vous proposerai, par cohérence, un amendement réduisant de 1 milliard d'euros, un niveau très modéré compte tenu des sous-consommations, les crédits de l'action n° 01 « Sauvegarde de l'emploi » du programme 364.
Ensuite, la mission « Plan d'urgence face à la crise sanitaire » fait déjà l'objet d'une annulation de crédits à hauteur de 2,6 milliards d'euros portant sur les principaux dispositifs de cette mission, sauf s'agissant de la compensation à la sécurité sociale des allégements de prélèvements, pour laquelle est demandée une ouverture de crédits supplémentaires à hauteur de 500 millions d'euros.
Toutefois, même avec ces annulations, les crédits disponibles pour ces dispositifs, qui sont pourtant en voie d'extinction, seraient de 1,4 milliard d'euros pour le financement du chômage partiel, 3,6 milliards d'euros pour le fonds de solidarité et 3,4 milliards d'euros pour le renforcement des participations financières de l'État.
Par parallélisme des formes, je vous proposerai d'annuler 1 milliard d'euros supplémentaire sur chacun des programmes 357 « Fonds de solidarité pour les entreprises à la suite de la crise sanitaire » et 358 « Renforcement exceptionnel des participations financières de l'État dans le cadre de la crise sanitaire », un niveau qui ne remet nullement en cause le paiement de reliquats de droits, ni le financement des investissements prévus par l'Agence des participations de l'État (APE).
Nous ne voulons pas cautionner le principe d'un « matelas » de crédits que conserverait le Gouvernement sans que cela soit justifié devant le Parlement.
Par ailleurs, la dotation pour dépenses accidentelles et imprévisibles (DDAI), qui avait été augmentée à titre exceptionnel de 1,5 milliard d'euros au mois de juillet dernier, est réduite du même montant, n'ayant pas été consommée - nous avions alors souligné le tour de passe-passe qui risquait de se produire...
Concernant la mission « Engagements financiers de l'État », la charge de la dette est réduite de 438 millions d'euros en raison, comme c'est souvent le cas, d'un niveau de taux inférieur à celui qui était prévu précédemment, et les crédits des appels de garantie, dotés de 2,5 milliards d'euros en loi de finances initiale (LFI), sont annulés à hauteur de 741 millions d'euros, après une première annulation de 995 millions d'euros au mois de juillet.
Sur les comptes spéciaux, de nouvelles avances sont consenties à différents organismes, notamment Île-de-France Mobilités, pour 800 millions d'euros.
Enfin, on note une augmentation significative du nombre des emplois de l'État, avec 885 équivalents temps plein travaillés (ETPT) dans les ministères et 226 ETPT chez les opérateurs. Paradoxalement, près du tiers de ces augmentations est attribuée par le Gouvernement à l'accompagnement de la réforme de l'organisation territoriale de l'État. Je constate que cette réforme, qui devait avoir pour objectif de privilégier une administration simple, fluide et privilégiant l'efficacité tout en supprimant des doublons trop nombreux au sein de l'administration d'État, semble en réalité aboutir à une augmentation des effectifs de l'État.
S'agissant des articles, le PLFR en compte 14 après la lecture de l'Assemblée nationale, y compris l'article liminaire.
Hormis les articles habituels de chiffres qui portent sur les annulations et ouvertures de crédits, mais aussi les plafonds d'emplois, ou encore l'article d'équilibre, l'article 1er majore de 0,77 point la fraction de TVA affectée à la Caisse nationale de l'assurance maladie (CNAM), afin de financer deux mesures relatives à la crise sanitaire.
L'article 2 modifie une nouvelle fois les ressources du compte d'affectation spéciale (CAS) « Radars », pour compenser la perte de recettes qu'aurait subie l'Agence de financement des infrastructures de transport de France (Afitf), à hauteur de 150 millions d'euros. Cela ne sera certainement pas sans incidence sur les ressources des collectivités territoriales, notamment du bloc communal.
L'article 10 tend à proroger de deux mois le délai de l'habilitation déjà prolongé concernant toutes les mesures relevant du domaine de la loi et visant à assurer, d'une part, le transfert du recouvrement et de la gestion de plusieurs taxes et impositions à la direction générale des finances publiques (DGFiP) et, d'autre part, la recodification des mesures ayant trait à ces produits au sein d'un nouveau code portant sur les impositions des biens et des services. Sur ce point, je ne manquerai pas d'interroger le ministre en séance. Je ne propose pas de supprimer l'article, car le code préparé par l'administration sur l'imposition des biens et des services est désormais bien avancé. Pour autant, nous nous étions opposés à cette habilitation, car nous en trouvions le champ trop large. Nous avions raison, la codification a été réalisée sur ce fondement alors que cela ne nous avait jamais été mentionné parmi le champ possible.
L'article 10 bis a été inséré par l'Assemblée nationale afin de corriger une suppression par erreur d'une exemption à la taxe sur les titres de séjour, lors de la recodification du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (Ceseda) par ordonnance.
L'article 11 prévoit, quant à lui, de supprimer la condition fixée par la LFI pour 2021 selon laquelle France Compétences devait présenter un budget à l'équilibre en 2022 pour bénéficier en 2021 d'une subvention de 750 millions d'euros. Là encore, la méthode est plus que contestable : le Gouvernement retire une condition qu'il avait lui-même fixée en sachant qu'elle ne pourrait très probablement pas être remplie. Finalement, on la supprime, tout en ouvrant par ailleurs 2 milliards d'euros sur les crédits de la mission « Travail et emploi ».
Enfin, à l'article 12, le Gouvernement instaure l'indemnité inflation. Je serai franc, cette mesure électoraliste ne me convainc pas.
L'indemnité inflation, qui ne ressemble à aucun autre dispositif d'aide sociale ou de soutien au pouvoir d'achat existant, consiste en une aide forfaitaire de 100 euros qui doit bénéficier aux 38 millions de personnes dont les revenus sont inférieurs à 2 000 euros nets par mois, indépendamment de la composition de leur foyer ou de leur exposition réelle à la hausse actuelle des prix des carburants, qui est pourtant à l'origine de cette mesure.
Cette indemnité se caractérise par un ciblage insuffisant, des effets de seuil massifs et des risques d'effets d'aubaine préjudiciables à son efficacité au regard du coût élevé qu'elle représente pour les finances publiques, à savoir 3,8 milliards d'euros. Sa mise en oeuvre concrète, qui repose pour une large part sur les entreprises privées, dont ce n'est pas la vocation, pose encore question. Les dispositifs qui seraient mis en place pour éviter les risques de doublons ou de fraudes dans le versement de l'indemnité ne sont pas connus à ce jour. Elle crée enfin, me semble-t-il, un précédent dangereux pour la conduite de la politique budgétaire dans les mois et années à venir.
Dans les années et décennies précédentes, aucune poussée inflationniste n'a à ma connaissance fait l'objet d'une telle mesure de compensation financée par le budget de l'État. À certains égards, ce « revenu universel d'un jour », si je puis dire, semble témoigner d'une forme d'« accoutumance » au recours à la dépense publique « quoi qu'il en coûte », développée dans le contexte de la crise, alors que le ministre de l'économie lui-même en avait annoncé la fin.
Pour autant, je suis bien sûr très attaché à la préservation du pouvoir d'achat des ménages, notamment de ceux qui sont les plus exposés à la forte hausse des prix des carburants. Je considère que nous devons mener une politique énergétique ambitieuse, mais, avec cette indemnité, nous en sommes bien loin...
Aussi, je vous proposerai un amendement de suppression de cette mesure, très coûteuse pour une inefficacité patente.
Plusieurs solutions pourraient être proposées. Pour ma part, je travaille en particulier sur la prime d'activité, qui me paraît parfaitement ciblée : elle n'est pas individualisée et concerne les publics dont les ressources sont nettement insuffisantes. Le dispositif n'est pas encore finalisé, car se pose, par exemple, la question des étudiants boursiers. J'y travaille et reviendrai vers vous avec des propositions.
Certains préconisent la suppression de TVA payée sur les taxes, mais cette mesure est impossible à mettre en oeuvre au regard du droit européen. On pourrait imaginer de la diminuer. À titre personnel, j'y suis défavorable. Alors que l'accord de la COP26 est en demi-teinte, ce n'est pas, me semble-t-il, le moment de baisser la garde. Je n'exclus toutefois aucune piste. Mon objectif est de proposer une mesure visant plus d'équité et de justice sociale pour les publics les plus exposés, car ils subissent le plus durement la hausse des produits pétroliers.
M. Claude Raynal, président. - Qu'entend-on par retrouver le nouveau d'avant-crise ? On fait un peu l'impasse sur la perte de croissance. Dispose-t-on d'une évaluation de cette perte de croissance ? Ou le Gouvernement estime-t-il qu'un rattrapage est possible dans les années qui viennent ?
M. Albéric de Montgolfier. - Merci de votre analyse. Je regrette que ce PLFR ne se limite pas à des mesures d'ajustement, dans le respect de la nature de ces textes. Or il y a un télescopage avec le projet de loi de finances pour 2022 dans la mesure où le Gouvernement y a introduit aussi beaucoup de mesures nouvelles.
Je m'interroge sur l'augmentation assez considérable du produit de la TVA nette. Comment peut-on avoir un écart aussi important ? Même si le taux de croissance est élevé, certains secteurs sont encore au ralenti. Est-ce dû à une sous-estimation initiale de la TVA ou cette augmentation traduit-elle une telle hausse de la consommation ?
Mme Isabelle Briquet. - Personne n'est dupe de l'indemnité inflation proposée à l'article 12 : cette mesure n'est pas satisfaisante. Pour autant, 3,8 milliards d'euros sont insuffisants pour apporter une solution adaptée aux ménages les plus en difficulté. Nous découvrons votre proposition relative à la prime d'activité, que nous analyserons lorsqu'elle sera finalisée. Pouvez-vous d'ores et déjà nous dire si les chômeurs pourront être concernés ?
M. Jérôme Bascher. - En 2020, nous avions connu une baisse exceptionnelle du PIB et de nombreuses dépenses publiques avaient été engagées. Cette année, nous observons la croissance la plus exceptionnelle depuis cinquante ans et beaucoup de dépenses publiques sont encore prévues. Quand se décidera-t-on à réduire les dépenses et les emplois publics ?
M. Roger Karoutchi. - Un jour...
Mme Christine Lavarde. - Concernant l'article 2, nous attendons de la commission des finances qu'elle se saisisse du sujet. On ne peut pas, chaque année, accepter que le Gouvernement légifère et que nous, représentants des collectivités, voyions passer les textes sans réagir.
Je suis favorable à la proposition du rapporteur général concernant l'article 12. L'indemnité inflation répond à tout sauf à son objectif initial de compenser la hausse du prix de l'essence pour les personnes ayant besoin d'utiliser leur véhicule pour travailler. Il s'agit donc de trouver un dispositif mieux ciblé.
M. Arnaud Bazin. - Pour les matériels de transport, la différence entre la situation actuelle et celle d'avant la crise est particulièrement marquée. Avez-vous une explication ?
Je soutiens l'amendement de suppression de l'article 12. Cela n'a aucun sens d'emprunter près de 4 milliards d'euros pour une mesure de pouvoir d'achat. Plutôt que de distribuer de l'argent public, le Gouvernement devrait travailler à rétablir la compétitivité et l'industrialisation de notre économie.
Mme Sophie Taillé-Polian. - Je me souviens avoir déposé une proposition de loi allant dans le sens d'une indemnité inflation ; le Gouvernement trouvait alors le dispositif trop dispendieux et pas assez ciblé. Quelques mois plus tard, les élections approchant, on nous propose un dispositif encore plus large et non financé.
Doit-on répondre aux difficultés liées au pouvoir d'achat par une mesure budgétaire ? Ou bien, faut-il poser la question de l'augmentation des salaires ? En tout cas, ce type de mesures, qui augmente l'endettement et justifiera ensuite des baisses de dépenses publiques, correspond à un tour de passe-passe électoral.
M. Bernard Delcros. - Nous ne sommes pas opposés à l'examen d'un dispositif alternatif qui se substituerait à celui qui est proposé à l'article 12. En revanche, il nous paraît hasardeux de supprimer ce dispositif avant même de disposer d'un autre mécanisme.
M. Michel Canévet. - Un sondage paru ce matin dans Le Télégramme et Ouest-France nous informe que 40 % des Bretons éprouvent des difficultés à boucler leur budget. Nous devons traiter ce problème du pouvoir d'achat ; une mesure pourrait se justifier au regard de la sortie de crise.
Je souhaite évoquer la position du Fonds monétaire international (FMI) concernant le projet de budget de la France. Le FMI considère que les propositions de notre pays constituent un « assouplissement budgétaire modéré » ; l'institution appelle à des dépenses supplémentaires en matière d'investissement, permettant des recrutements et la relocalisation des ressources. Quelle est votre opinion sur cette appréciation du FMI ?
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Le PIB en volume est en baisse de 4,7 % en 2021 par rapport au tendanciel prévu avant la crise. On aime dire que l'on est revenu au niveau d'avant-crise, mais on occulte ce qui aurait pu se passer pendant ces deux années.
M. de Montgolfier pose une bonne question. L'évolution spontanée de la TVA s'élève, pour l'ensemble des administrations publiques (APU), à près de 11 % en 2021 ; cette évolution est supérieure à la dynamique des emplois taxables, qui est de 8 %. Nous ne disposons pas encore de toutes les explications. La dynamique s'avère peut-être différente selon les taux de TVA à 5,5 %, 10 % ou 20 %. On pourrait interroger le ministre sur le sujet.
Mme Briquet partage le diagnostic d'une indemnité inflation présentant des carences. Ma réflexion sur la situation des chômeurs n'est pas encore aboutie. Avec la prime d'activité, il s'agit en effet d'être vigilant concernant l'exclusion de certaines catégories de population. Dans le travail que je mène, je m'interroge également sur la situation des étudiants.
Je remercie Mme Lavarde, qui nous incite à poursuivre nos travaux pour trouver le bon dispositif.
Mme Taillé-Polian partage également les insatisfactions au sujet de l'indemnité inflation. Ce chèque de 100 euros a beaucoup de défauts ; son seul mérite est de concerner 38 millions de Français, mais il donne le sentiment d'un cadeau électoral de près de 4 milliards d'euros.
Dans un contexte où l'inflation augmente se pose la question du pouvoir d'achat et donc, peut-être, celle des niveaux de revenus et des salaires dans le secteur privé comme dans le secteur public. L'inflation risquant de se maintenir à un niveau encore élevé l'année prochaine, cela risque de susciter des revendications parfaitement légitimes, avec des arbitrages à effectuer.
J'entends la remarque de M. Delcros. N'étant pas en capacité, au vu des délais, de proposer d'ores et déjà le dispositif le plus abouti, je préfère séquencer les choses.
Pour répondre à Michel Canévet, la position du FMI sur l'« assouplissement budgétaire modéré » de la France s'entend en comparaison des États-Unis. Aux yeux du FMI, les actions de notre pays n'ont évidemment pas la même puissance que le plan Biden.
M. Bazin m'interroge sur l'effondrement des matériels de transport. L'arrêt de l'aéronautique compte sans doute pour beaucoup, mais je regarderai plus précisément afin de vous répondre.
M. Claude Raynal, président. - Nous passons maintenant à l'examen des articles.
EXAMEN DES ARTICLES
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Les amendements n° 35 et n° 36 proposent de réduire de 1 milliard d'euros les crédits du programme 364 de la mission « Plan de relance », ainsi que ceux des programmes 357 et 358 de la mission « Plan d'urgence face à la crise sanitaire », au regard de leur sous-consommation.
Les amendements n° 35 et n° 36 sont adoptés.
M. Claude Raynal, président. - L'amendement n° 37 visant à supprimer le dispositif d'indemnité inflation proposé par le Gouvernement n'appelle pas, je pense, de commentaires supplémentaires.
L'amendement de suppression n° 37 est adopté.
La commission décide de proposer au Sénat d'adopter le second projet de loi de finances rectificative pour 2021 tel que modifié par les amendements qu'elle a adoptés.
Le sort des amendements examinés par la commission est retracé dans le tableau suivant :
TABLEAU DES SORTS
Second projet de loi de finances rectificatives pour 2021 - Désignation des candidats pour faire partie de l'éventuelle commission mixte paritaire
La commission soumet au Sénat la nomination de MM. Claude Raynal, Jean-François Husson, Mme Christine Lavarde, MM. Sébastien Meurant, Vincent Capo-Canellas, Rémi Féraud et Didier Rambaud comme membres titulaires, et de MM. Arnaud Bazin, Thierry Meignen, Stéphane Sautarel, Vincent Delahaye, Mme Isabelle Briquet, MM. Christian Bilhac et M. Pascal Savoldelli comme membres suppléants de l'éventuelle commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de finances rectificative pour 2021.
La réunion est close à 9 h 45.
La réunion est ouverte à 15 h 45.
Projet de finances pour 2022 - Mission « Cohésion des territoires » (et articles 42 bis à 42 quater) - Programmes « Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables », « Aide à l'accès au logement », « Urbanisme, territoires et amélioration de l'habitat » et « Politique de la ville » - Programmes « Impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire » et « Interventions territoriales de l'État » - Examen des rapports spéciaux
M. Claude Raynal, président. - Nous examinons cet après-midi quatre missions. Nous commençons nos travaux par l'examen du rapport sur la mission « Cohésion des territoires ». Je salue la présence de Dominique Estrosi Sassone, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, et de Jean-Michel Houllegatte, rapporteur pour avis de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable.
M. Bernard Delcros, rapporteur spécial de la mission « Cohésion des territoires » sur les programmes « Impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire » et « Interventions territoriales de l'État ». - Le volet « Politique des territoires » de la mission « Cohésion des territoires » concerne les programmes 112 et 162, pour un total de 258,8 millions d'euros en autorisations d'engagement (AE) et 282,3 millions d'euros en crédits de paiement (CP), auxquels il faut ajouter 631 millions d'euros au titre des dépenses fiscales prévues dans le programme 112, incluant notamment les zones de revitalisation rurale (ZRR) ou les zones d'aide à finalité régionale (AFR).
Concernant le programme 112, « Impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire », les crédits demandés s'élèvent à 210 millions d'euros en AE et 240 millions d'euros en CP, soit une hausse de 20 % par rapport aux crédits prévus dans loi de finances initiale (LFI) de 2021 à un niveau similaire par rapport à 2020. Cette hausse s'inscrit dans un objectif de redynamisation des territoires ruraux, en particulier du renforcement de leur ingénierie.
Par ailleurs, 96,1 millions d'euros en CP et 8 millions d'euros en AE concernent des crédits potentiellement rattachés au programme 112, mais ouverts dans la mission « Plan de relance ».
Je dirai quelques mots sur l'Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT), dont le programme 112 porte la subvention pour charge de service public, à hauteur de 61 millions d'euros.
Cette subvention est stable, alors que les missions de l'ANCT, en lien avec la mise en place de l'agenda rural, sont, quant à elles, étendues. Par ailleurs, le projet de budget pour 2022 prévoit de conserver les 10 millions d'euros supplémentaires accordés à l'ANCT en 2021 afin de financer l'ingénierie des collectivités - cela correspond au doublement des crédits par rapport à 2020. Cette mesure satisfait une demande que nous avions formulée parce qu'il s'agissait de répondre un réel besoin pour les territoires ruraux.
Ainsi, les dispositifs de soutien en ingénierie aux territoires ruraux répondent à la fois au besoin d'ingénierie interne avec les chefs de projets du programme « Petites Villes de demain (PVD) », les chargés de mission du programme « Fabrique de territoires » ou les chargés de projets dans le cadre du volontariat territorial en administration (VTA) et à des besoins plus spécifiques et ponctuels sous forme de prestations de bureaux d'études dans le cadre du marché à bons de commande passé par l'État.
L'ANCT soutient également plusieurs programmes à destination des territoires, notamment « Action coeur de ville », en faveur de 222 villes ; « Territoires d'industrie », avec 146 territoires retenus ; « Fabrique de territoires », qui concerne aujourd'hui 300 territoires ; ou encore « Petites Villes de demain », qui vise à redynamiser les bourgs-centres ruraux - 933 candidatures ont été retenues et visent 1 600 communes.
L'agence accompagne également les collectivités pour la mise en place des contrats de relance et de transition écologique (CRTE). Ainsi, 377 CRTE devraient être signés d'ici à la fin de l'année, certains à l'échelle des intercommunalités et d'autres à l'échelle plus large des pôles d'équilibre territorial et rural (PETR).
Le programme 112 comprend également les crédits de trois générations de contrats de plan État-région (CPER). Pour la génération 2021-2027, ce sont au total 998,6 millions d'euros qui seront contractualisés au titre du programme 112, et 155 millions d'euros au titre du plan France Relance, ce qui représente une nette augmentation par rapport à la génération précédente.
Concernant les maisons France Services, les crédits qui leur sont dédiés augmentent de 8 millions d'euros, pour atteindre 36,4 millions d'euros. Cette hausse accompagne l'augmentation du nombre de maisons labellisées « France Services » : 1 745 sont actuellement labellisées, pour un objectif de 2 500 maisons fin 2022.
Notons que, à partir du 1er janvier prochain, les maisons de services au public (MSAP) qui ne répondent pas aux critères des maisons France Services ne seront plus labellisées et ne bénéficieront plus de financements de l'État. Il me paraît important de relayer cette information aux collectivités concernées afin que les élus puissent anticiper cette réalité.
Je veux également revenir sur le sujet des zonages, notamment les ZRR, dont nous avons voté en décembre 2020 la prolongation jusqu'à la fin 2022.
Afin de laisser le temps nécessaire pour finaliser les nouvelles modalités de soutien aux territoires ruraux qui pourraient succéder aux ZRR, la ministre de la cohésion des territoires a bien voulu proroger les dispositifs attachés à l'ensemble des zonages, notamment les ZRR jusqu'au 31 décembre 2023, ce qui répond à notre demande. Les 4 000 communes qui ne sont plus éligibles au dispositif des ZRR au regard de la réforme de 2015 continueront à en bénéficier durant cette prorogation.
Je serai plus bref sur le programme 162 « Interventions territoriales de l'État » (PITE), dont la maquette n'est pas modifiée.
Le PITE est composé d'actions répondant à des enjeux locaux spécifiques. Il rassemble des contributions issues de programmes de différents ministères. C'est un outil utile, qui permet de prendre en compte les spécificités des actions locales et de garantir la souplesse et la cohérence de l'action de l'État.
Le projet de budget propose de doter ce programme de 48 millions d'euros en AE et 40,3 millions d'euros en CP, soit une hausse de près de 20 % pour ce qui concerne les AE. Cette augmentation provient essentiellement de la fusion de deux programmes en faveur de la Corse, qui concernent près des deux tiers des crédits.
Ces chiffres doivent toutefois être relativisés dans la mesure où le programme est chaque année abondé de manière importante par des transferts en gestion. En réalité, l'exécution correspond quasiment au double des crédits prévus en loi de finances initiale, ce qui limite quelque peu la portée de l'autorisation parlementaire.
Concernant l'action qui porte sur le plan de lutte contre le développement des algues vertes, je vous avais présenté, au printemps dernier, un travail de contrôle sur ce sujet, à l'issue duquel j'avais présenté 23 propositions pour renforcer son efficacité. Plusieurs d'entre elles sont d'ores et déjà en cours d'application, et le principe de mise en place d'un nouveau programme d'actions à partir de 2023 que nous demandions est aujourd'hui validé. Néanmoins, le suivi de ces recommandations me semble mériter un travail plus approfondi, que je conduirai au début de l'année prochaine.
En conclusion, étant donné que l'on enregistre de réelles avancées en faveur de la ruralité qui répondent à nos propositions, je vous invite à adopter les crédits de la partie « Politique des territoires » de la mission.
Toutefois, je souhaite formuler quelques observations sur plusieurs points pour l'avenir.
Premièrement, avec la montée en gamme des maisons France Services, qui nécessitent désormais deux équivalents temps plein (ETP) et la reprise de missions qui incombaient précédemment à l'État, comme, par exemple, celle qui a été transférée à l'occasion de la réforme des trésoreries, le coût de fonctionnement de ces maisons a augmenté de façon significative. Aujourd'hui, les 30 000 euros de financements apportés à chaque structure, pour moitié au travers du programme 112 et pour autre moitié par les opérateurs via le Fonds national France Services (FNFS), ne représentent en moyenne que 25 à 30 % du coût global de fonctionnement. Aussi, il importera de réexaminer cette question.
Deuxièmement, les différents dispositifs mis en place pour renforcer l'ingénierie locale étaient absolument nécessaires, mais ils devront faire l'objet d'une évaluation, en vue d'envisager des mesures de pérennisation.
Troisièmement, concernant les CRTE, la contractualisation entre l'État et les territoires à l'échelle infra-régionale, que nous soutenons bien sûr, devrait en toute logique permettre aux élus locaux de planifier leurs projets sur la durée du contrat avec toute la visibilité nécessaire. En réalité, cette première année de mise en place des CRTE montre qu'il n'en est rien sur le terrain. Il faut absolument revenir, dès 2022, au principe même d'un contrat, à savoir donner de la visibilité.
Quatrièmement, enfin, comme je l'avais indiqué l'année dernière, la dispersion, dans plusieurs missions, des crédits liés à l'aménagement du territoire complexifie et affaiblit la lisibilité de la politique globale de l'État en faveur de la cohésion des territoires. J'aimerais que nous puissions réexaminer cette question.
M. Claude Raynal, président. - Merci pour ce bel hymne à la ruralité.
M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur spécial de la mission « Cohésion des territoires » sur les programmes « Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables », « Aide à l'accès au logement », « Urbanisme, territoires et amélioration de l'habitat » et « Politique de la ville ». - C'est avec une grande modestie que je reprends le flambeau de Philippe Dallier pour vous présenter ces programmes.
Il est de plus en plus difficile de se loger dans notre pays. De nombreux observateurs évoquent même une grave crise du logement à venir, peut-être la plus grave depuis fort longtemps.
La mission « Cohésion des territoires », avec des crédits de 17,1 milliards d'euros en CP, connaîtra une hausse de ses crédits de 1,2 milliard d'euros en 2022, due pour l'essentiel aux programmes 177 et 109. Je vous présenterai ces deux programmes, ainsi que les programmes 135 et 147, c'est-à-dire ceux qui traitent de l'hébergement, du logement, de l'urbanisme et de la ville.
Le programme 177 porte sur la politique d'hébergement d'urgence et d'accès au logement pour les personnes les plus défavorisées. Les crédits demandés pour 2022 s'élèvent à 2,7 milliards d'euros en CP, soit une augmentation de 0,5 milliard d'euros par rapport à la loi de finances initiale pour 2021.
Pour la première fois depuis longtemps, aucun crédit n'est ouvert sur l'hébergement d'urgence dans le collectif budgétaire de fin d'année, parce que 700 millions d'euros ont été rajoutés en juillet dernier.
Le niveau élevé des crédits ouverts en 2022 est la conséquence du choix retenu de maintenir le parc d'hébergement au niveau atteint pendant la crise sanitaire, avec quelque 200 000 logements, et une prévision de diminution à 190 000 d'ici à la fin 2022. C'est une politique qui est en mutation, avec une nouvelle administration responsable qui se montre volontariste. Il restera à voir si elle parvient à améliorer l'accès au logement des personnes défavorisées afin de réduire le temps de passage par l'hébergement d'urgence, l'objectif de cette politique devant être la diminution de ses besoins.
Plusieurs problèmes devront être résolus.
Tout d'abord, l'hébergement en hôtel, qui a été fort utile pendant la crise sanitaire, mais qui ne facilite pas les actions d'insertion des personnes, concerne plus de 70 000 personnes, contre 50 000 il y a deux ans et 20 000 il y a dix ans. Par ailleurs, le parc d'hébergement d'urgence, en application du principe d'inconditionnalité de l'accueil, reçoit encore une proportion importante de personnes qui devraient plutôt trouver leur place dans les structures du ministère de l'intérieur dédiées aux demandeurs d'asile ou aux personnes à droits incomplets.
Ensuite, le conventionnement des centres d'hébergement et de réinsertion sociale (CHRS) a pris du retard, et il faudra reporter la date limite du 31 décembre 2022.
Le programme 109, qui concerne les aides personnalisées au logement (APL), mobilise 13,1 milliards d'euros, ce qui représente les trois quarts des crédits de la mission. Il s'agit toutefois d'une aide de guichet, sur laquelle l'État a peu de prise sauf lorsque les règles sont modifiées, ou lorsqu'il fait appel à d'autres financeurs. Action Logement a ainsi contribué deux années de suite au financement des APL, à hauteur de 1 milliard d'euros en 2021. Ce ne sera pas le cas en 2022, et il faut s'en réjouir, car ce n'est pas la vocation de cette structure. En conséquence, la participation de l'État augmente, mais à hauteur de 583 millions d'euros seulement, car certains effets réduisent le coût des APL, en particulier le fait que la réforme du versement contemporain des aides sera pleinement en vigueur.
Cette réforme, par ses retards successifs, aura accompagné la plus grande partie de ce quinquennat, qui se sera illustré par une recherche constante d'économies portant, non sur les structures de l'État, comme l'a déjà exposé le rapporteur général, mais sur cette aide de guichet que sont les APL. Le « rabot » de cinq euros appliqué aux APL en 2017 a marqué les esprits par son effet direct sur les ressources des personnes concernées. L'instauration de la réduction de loyer de solidarité (RLS), quant à elle, a fait supporter une baisse du coût des APL par les organismes de logement social : il conviendra d'évaluer la loi portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique (Élan). Enfin, le versement contemporain, une réforme d'une haute technicité, qui a pris plusieurs années de retard, s'est mis en place cette année avec des dysfonctionnements. Elle se fonde sur un principe difficilement contestable, puisqu'il s'agit d'adapter plus rapidement qu'auparavant les ressources aux revenus. En pratique, son objectif est le même que les réformes précédentes, à savoir réduire le montant consacré par l'État aux APL : l'économie obtenue sera d'environ 1,25 milliard d'euros en 2022. La contribution de l'État passera ainsi de 15,5 milliards d'euros en 2017 à 13 milliards d'euros en 2022, tandis que le cofinancement assuré par les employeurs demeure stable entre 2,5 et 2,8 milliards d'euros. La RLS est une usine à gaz, qui démontre l'absence de vision stratégique de l'État.
Le programme 135 porte des actions diverses relatives à la construction, l'habitat et l'urbanisme, pour un montant de crédits de 535 millions d'euros. Sa particularité est qu'il va « doubler » de taille en cours d'exécution en raison des fonds de concours versés par le secteur du logement social au travers du Fonds national des aides à la pierre (FNAP), et les dépenses fiscales rattachées au programme représentent un montant bien plus important, de 13,3 milliards d'euros. Ce programme est le pivot des politiques du logement et de l'urbanisme.
Quels sont les principaux défis de la politique du logement ?
Le premier est déjà très présent dans les discussions budgétaires, c'est celui de la rénovation énergétique, avec l'impact important de MaPrimeRénov', financé sur d'autres missions budgétaires, mais aussi les programmes de l'Agence nationale de l'habitat (ANAH), partiellement financés sur le programme 135, et dont la dynamique pousse à une ouverture de crédits à hauteur de 92 millions d'euros dans le collectif budgétaire que nous a présenté ce matin le rapporteur général.
Toutefois, un autre enjeu s'impose, qui lui est lié, mais concerne les collectivités encore plus que l'État : c'est celui de la lutte contre l'artificialisation des sols, avec l'objectif de « zéro artificialisation nette » (ZAN), fixé par la loi Climat et résilience. Le succès du fonds Friches le démontre : les collectivités ne manquent pas de projets, de sorte que ce fonds de 300 millions d'euros a dû être porté à 650 millions d'euros, et le Président de la République a annoncé sa pérennisation. Toutefois, il faudra en préciser rapidement les modalités concrètes pour ne pas décevoir les attentes, car le véhicule budgétaire actuel, qui est le plan de relance, ne sera plus disponible. Il conviendra d'accompagner les territoires avec de nouveaux outils et de nouveaux financements, car les ressources propres des collectivités territoriales sont insuffisantes pour mener les projets nécessaires à la réutilisation du foncier disponible. À ce titre, les établissements publics fonciers, qui figurent dans le programme 135, ont tout leur rôle à jouer. Ils sont financés sur ce programme à hauteur de 182,3 millions d'euros, en compensation de la diminution du produit des taxes spéciales d'équipement. Ce financement devra être pérennisé. Il sera aussi nécessaire de réviser les documents d'urbanisme. Or les aides de l'État à ce titre sont en baisse.
Par-delà ces deux tendances majeures qui concernent l'ensemble du secteur de la construction, il faut voir où en est le logement lui-même. Ce quinquennat, qui a commencé par l'annonce d'un choc de l'offre sur le logement, s'achève sur un choc de la demande et une crise de l'offre sans précédent.
Le secteur de la construction tourne en effet à plein régime pour ce qui concerne les commandes, mais manque d'offre de logements. Les permis de construire sont en chute libre et le bâtiment doit faire face à la montée du coût des matériaux de construction - on évoque une augmentation au minimum de 10 % depuis un an. Pour l'avenir, s'y ajoute le surcoût réglementaire, estimé par l'Union sociale pour l'habitat à 30 000 euros par logement, avec, notamment, la nouvelle réglementation environnementale.
Plus généralement, l'Insee souligne dans une note parue la semaine dernière que le parc de logements augmente de moins en moins vite en France. L'évolution est aussi structurelle : le parc de logements collectifs progresse désormais deux fois plus vite que le parc de logements individuels, alors que leur progression était comparable jusqu'à la fin des années 2000.
Comme je l'ai souligné dans mon introduction, il est de plus en plus difficile de se loger en France : on construit moins de 350 000 logements par an et moins de 100 000 logements sociaux. Il faut un véritable plan de relance pour répondre à la demande de logements sociaux de 2,2 millions de ménages, soit une augmentation de 20 % en huit ans.
Dans ces conditions, la situation du logement social soulève des questions qui n'ont pas été résolues. L'instauration de la RLS n'a pas, pour l'instant, mis en difficulté majeure les organismes, mais c'est au prix de mesures d'aide importantes de la part, notamment, d'Action Logement et de la Caisse des dépôts et consignations. Or ces aides prolongent l'endettement dans le temps.
Concernant Action Logement, on peut se demander pendant combien de temps cet organisme va continuer à porter à bout de bras tant de politiques publiques. La réponse de ses responsables est simple : ils vont devoir revenir à un régime d'activité plus sobre et il sera difficile de leur demander, à partir de 2023, plus que les financements pour lesquels ils se sont déjà engagés, c'est-à-dire notamment le financement de l'ANRU. Dès lors, que deviendront les aides à la pierre si Action Logement n'apporte plus 350 millions d'euros en 2023 ? De même, le Fonds national d'accompagnement vers et dans le logement (FNAVDL) pourrait avoir du mal à réaliser ses actions si Action Logement ne lui apporte plus 10 millions d'euros par an. Ces questions devront être traitées en 2022, ainsi que celle de la méthode de calcul des surcompensations d'aides d'État - probablement après l'élection présidentielle. De nombreuses questions sont renvoyées après cette échéance...
Dans ces conditions, l'objectif fixé par le Gouvernement d'agréer 250 000 logements sociaux en deux ans ne sera certainement pas atteint ; la ministre elle-même a reconnu devant la commission des affaires économiques que le nombre serait inférieur à 110 000 en 2021, ce qui est sans doute encore optimiste.
Le dernier programme, le programme 147, porte sur les crédits de la politique de la ville à hauteur de 558 millions d'euros, en hausse de 45 millions d'euros.
Le principal fait est l'augmentation de 2 milliards d'euros du financement de l'Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU) pour la réalisation du nouveau programme national de renouvellement urbain (NPNRU), qui passe de 10 à 12 milliards d'euros. La participation de l'État doit passer de 1 à 1,2 milliard d'euros, mais versera seulement 15 millions d'euros en 2022 sur le programme 147, comme les années précédentes. C'est encore une fois Action Logement qui assurera la majeure partie du financement.
Or permettez-moi de souligner quelques constats du rapport de Jean-Louis Borloo intitulé Vivre ensemble, vivre en grand pour une réconciliation nationale : sur 1 500 quartiers de la politique de la ville (QPV), 216 d'entre eux connaissent des difficultés urbaines, 60 sont en risque de fracture et 15 en risque de rupture. En outre, 10 millions de nos concitoyens se considèrent comme relégués.
Enfin, je présenterai les trois articles rattachés à la mission.
L'article 42 bis prévoit que les logements-foyers en Guadeloupe, Guyane, Martinique, à La Réunion et à Mayotte peuvent donner droit à l'aide personnalisée au logement sur convention. C'est une mesure d'équité qui facilitera le développement des résidences sociales dans des conditions proches de celles qui sont en vigueur en métropole.
L'article 42 ter entérine l'augmentation de l'enveloppe financière du NPNRU, en accord avec les acteurs du secteur.
Enfin, l'article 42 quater prévoit une compensation aux communes de l'exonération de taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB), pendant une durée de dix ans, pour les projets de logements sociaux agréés ou financés entre 2021 et la mi-2026. Le Sénat vote chaque année une mesure plus ambitieuse puisque celle-ci ne porte que sur les nouveaux projets. Cette mesure est attendue de tous les acteurs, elle est importante pour les communes et devrait, on l'espère, contribuer à l'acceptabilité locale des projets de logement social.
Je vous propose donc de donner un avis défavorable aux crédits de la mission et favorable à ces trois articles.
M. Claude Raynal, président. - Félicitations pour ce premier rapport spécial sur un dossier complexe.
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. - Je partage les propos du rapporteur spécial. S'il est vrai que le projet de budget pour le logement est le plus élevé de ce quinquennat, n'oublions pas pour autant la politique du logement menée depuis 2017, avec, notamment, la baisse des APL de 5 euros dans le parc privé et dans le parc public, suivie d'une RLS, avec, pour conséquence, une perte d'autofinancement pour les bailleurs sociaux. Le Gouvernement a économisé 10 milliards d'euros sur des aides au logement destinées aux ménages les plus modestes.
L'année dernière, nous avions exprimé des inquiétudes au sujet d'Action Logement, que Valérie Létard, Marie-Noëlle Lienemann, Viviane Artigalas et moi-même avons relayées dans un rapport d'information. Nous avons réussi à faire reculer le Gouvernement sur le projet de réforme engagé, mais il convient de rester particulièrement vigilant, car le risque de démantèlement est toujours réel.
La relance de la construction neuve est en panne. Nous n'avons jamais connu une telle crise du logement depuis de très nombreuses années. Le Gouvernement, dans le cadre de ce projet de loi de finances, n'a pas pris les mesures susceptibles de conduire à une relance efficace de la construction neuve dans notre pays. La commission Rebsamen a fait un certain nombre de propositions qui ne se traduisent pas toutes dans le cadre budgétaire, hormis l'exonération de taxe foncière sur les propriétés bâties sur les logements sociaux. Le Gouvernement a pris l'engagement de compenser intégralement cette mesure, mais ce n'est pas le cas pour les logements existants. Elle ne sera compensée que pour les nouveaux logements agréés entre le 1er janvier 2021 et le mois de juin 2026. Certes, c'est un pas en avant, mais le cadre de l'exonération est très précis et restreint. À partir de juin 2026, les maires se retrouveront face à de nouvelles difficultés. Le Gouvernement s'exonère de cette politique de construction en faisant peser la responsabilité sur les maires qui ne délivreraient pas autant d'autorisations de construire qu'ils devraient ou pourraient le faire.
En outre, d'autres mesures auraient pu être mises en place dans ce PLF ; je pense en particulier à la baisse du taux de TVA à 5,5 % sur toutes les opérations de construction et de réhabilitation de logements sociaux, une mesure que le Gouvernement a toujours balayée d'un revers de la main. Je pense aussi à la création d'un véritable statut du bailleur privé. Il importe de considérer que l'investisseur immobilier est un entrepreneur de logements et non pas un rentier improductif. Dans le cadre de la loi Climat et résilience, nous avions soutenu des amendements en ce sens. Bien des logements vacants pourraient ainsi être remis sur le marché.
En conclusion, même s'il s'agit du meilleur projet de budget pendant ce quinquennat, on ne peut pas y être favorable. La politique du logement menée depuis cinq ans a affaibli les logements, a paupérisé nos concitoyens - ils consacrent plus d'un tiers de leur budget au logement -, et n'est donc pas à la hauteur des besoins identifiés sur tout le territoire, et pas seulement dans les zones tendues. Force est de constater que le Gouvernement n'aura pas relancé la machine.
M. Jean-Michel Houllegatte, rapporteur pour avis de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable. - Je suis rapporteur sur l'aménagement numérique des territoires, qui s'intègre dans la cohésion des territoires.
Le plan France Très haut débit (PFTHD) est en train de remplir ses objectifs. Financièrement, la France est divisée en plusieurs parties : les zones très denses connaissent une forte appétence des opérateurs privés, qui y installent la fibre optique. Dans certaines zones moins denses, les appels à manifestation d'intention d'investissement (AMII) incitent les opérateurs à s'engager pour une couverture numérique de l'ensemble de ces territoires. Enfin, dans les zones peu denses, ce sont les collectivités qui développent des réseaux d'initiative publique.
Vingt-cinq départements n'arrivent pas à couvrir leurs besoins en financement pour ces zones. La crise du coronavirus a montré l'acuité de la problématique d'une bonne couverture numérique. Ces territoires ont obtenu des crédits complémentaires : 30 millions d'euros au titre d'un projet de loi de finances rectificative (PLFR) l'année dernière, 240 millions d'euros par le plan de relance et 300 millions d'euros de crédits recyclés, afin de boucler les plans de financement du guichet numérique.
En France, il reste 39 millions de locaux à raccorder à la fibre : 6 millions dans des zones urbaines très denses, 14 millions dans les zones dépendant des AMII, sur lesquels les opérateurs ont pris des engagements auprès de l'Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse (Arcep). Il reste 17 millions de locaux à fibrer pour les collectivités locales.
Le déploiement de la fibre dans les réseaux d'initiative publique est important : plus de 6 millions de raccordements ont été faits en un an. C'est un record.
Dans les zones très denses, le taux de couverture est de 94 %, toutes technologies confondues, même s'il y a une grande hétérogénéité selon les zones. À Lille, le taux de couverture n'est que de 54 %, en raison du manque d'intérêt des opérateurs privés à couvrir certaines zones. Il est nécessaire d'alerter l'Arcep sur ce sujet. Ce taux de couverture atteint 87 % dans les zones AMII et 53 % dans les zones d'initiative publique. Il y a eu un million de commercialisations de la fibre.
J'émets également un avis favorable sur l'adoption des crédits qui sont suffisants - de même que le déploiement -, mais soyons vigilants sur quelques points : il faudra terminer les raccordements, avec parfois des difficultés de base d'adressage, d'absence de compétence de certains opérateurs, et de raccordements complexes.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Je remercie les rapporteurs spéciaux et les rapporteurs pour avis.
On voit que les maisons France Services fonctionnent bien, selon le principe « l'offre crée le besoin ». Monsieur Delcros, quelle somme complémentaire aux 30 000 euros de dotation faudrait-il allouer à l'ensemble de ces maisons pour qu'elles fonctionnent correctement ? Il faut revoir cette répartition des frais entre l'État et les collectivités.
Les aides à l'ingénierie de l'ANCT, à partir du moment où elles produisent des effets, ont un effet d'aspiration pour conduire des projets. Les dispositifs d'accompagnement financier postérieurs au diagnostic et à la phase d'ingénierie sont-ils suffisants ? La région Grand Est a noué avec l'État des pactes territoriaux de relance et de transition écologique (PTRTE), fondés sur un périmètre plus large que les CRTE, pour assurer des solidarités territoriales entre zones urbaines et rurales ou sur de grands territoires.
Les crédits de l'État sur le fonds Friches sont-ils suffisants ? Dispose-t-on d'une cartographie des superficies concernées ? Les friches industrielles, économiques et urbaines se situent dans différents territoires. L'État et les collectivités territoriales ont-ils un oeil identique dans leur appréciation de ces espaces, selon qu'ils se situent dans des territoires urbains très denses ou plus excentrés ? Certaines zones ont des superficies énormes, mais bénéficient de peu d'actions.
M. Stéphane Sautarel. - Je partage l'essentiel des remarques des rapporteurs spéciaux, notamment l'insuffisante lisibilité des politiques, du fait de leur présentation.
Monsieur Delcros, où en est la territorialisation de l'ANCT ? Quels sont les moyens prévus pour accompagner les projets ? Certes, cela ne rentre peut-être pas dans le périmètre de cette mission.
Je me réjouis de la prorogation d'un an des ZRR.
Le développement de la fibre est très hétérogène ; nous devons persévérer. Quels leviers de la commande publique pourraient être utilisés ?
Concernant le programme 135, il y a eu un rapport sur la lutte contre l'artificialisation des sols. Au-delà des sommes allouées au fonds Friches, comment celui-ci est-il mis en oeuvre selon les territoires ? Si cette mise en oeuvre est trop aveugle, les maires ne pourront plus aménager durablement leur territoire.
Le programme 147 sur l'ANRU et les NPNRU est un budget magique : entre les annonces, l'inscription de crédits et les volumes globaux engagés, il y a un écart considérable, qui nuit à l'avancée des projets. Quels sont réellement les engagements de l'État dans ce domaine ?
Mme Christine Lavarde. - Merci pour ces exposés très clairs. J'abonde dans le même sens. Les objectifs de réduction de 15 % de la précarité énergétique en cinq ans sont loin d'être atteints, car certains dispositifs d'aide à la rénovation thermique ne sont pas efficients.
Monsieur Delcros, pour quelles raisons les crédits dédiés aux Territoires d'industrie augmentent-ils dans le plan de relance ?
M. Antoine Lefèvre. - Je voudrais protester vivement sur la situation du logement en France. Les prêts à taux zéro sont en chute libre : 123 000 prêts contractés en 2017, contre 90 000 en 2019 et 66 000 en 2020. Jusqu'où va-t-on descendre ? Si l'on veut que les Français sortent du parc social et accèdent à la propriété, il faut poursuivre l'effort. Plus on vote de lois sur le logement, moins on produit de logements ; c'est dramatique !
Mme Isabelle Briquet. - Le budget pour le logement est en hausse pour 2022, mais c'est un peu tard ; la politique du logement est la grande perdante du quinquennat. Elle a appauvri les ménages modestes, avec la baisse des APL, et a affaibli les capacités d'intervention des organismes d'HLM. Depuis 2017, la construction de logements s'est contractée de 14 % - 36 % pour les seuls logements sociaux, ce n'est pas rien ; 10 milliards d'euros ont été économisés sur le dos des ménages les plus modestes.
L'État doit redonner au logement social la place qu'il mérite. Ce modèle social a été attaqué : le Gouvernement oblige les bailleurs sociaux à participer à la réduction des déficits publics en les forçant à se regrouper, ce qui a fait grincer des dents... Dispose-t-on d'un bilan sur la pertinence de ces regroupements ? Ont-ils permis des économies ?
M. Sébastien Meurant. - C'est un paradoxe : plus on met d'argent, moins on construit. C'est le budget logement le plus élevé du quinquennat, mais encore faudrait-il que le Gouvernement ait une stratégie... Au lieu de cela, c'est une politique de gribouille.
Comment inciter les bailleurs privés à mettre en location un logement vide alors qu'il est très difficile d'expulser des locataires indélicats ? Ceux-ci peuvent rester en place pendant trois ans, il y a des frais de justice... Cela ne rassure pas les propriétaires !
Hier ont été annoncées des incitations fiscales en zone tendue. Aboutiront-elles à la mise sur le marché de nouveaux logements ?
Les nuitées hôtelières ont été multipliées par sept en quinze ans, ce qui ne manque pas de nous interroger. À qui bénéficient-elles ? Quelle est la proportion de réfugiés et de migrants ?
Que pensez-vous des mesures d'incitation à la construction de logements sociaux ? Comment sont-elles acceptées par les collectivités ?
M. Jean-Marie Mizzon. - Monsieur Delcros, les conseillers numériques de l'ANCT prennent progressivement leurs fonctions localement. Les besoins sont importants : 13 à 14 millions de Français souffrent d'illectronisme. En 2017, le programme Action publique 2022 promettait de dématérialiser les 250 démarches les plus courantes. Le travail est énorme. Des crédits du plan de relance y sont consacrés, mais ce soutien est conjoncturel. Sera-t-il poursuivi ?
M. Bernard Delcros, rapporteur spécial. - Monsieur le rapporteur général, la dotation de 30 000 euros des maisons France Services se répartit ainsi : 15 000 euros sont financés par l'État et 15 000 euros par le Fonds national France Services. Ces 30 000 euros étaient déjà attribués aux maisons de service au public avant la labellisation France Services. Or le soutien ne devrait pas être au même niveau, car ces maisons ont connu une montée en gamme et ont récupéré des missions autrefois assurées par l'État. Cette somme ne représente que 30 % du coût moyen de fonctionnement d'une maison. J'ai prévu de mener l'année prochaine une mission de contrôle budgétaire sur les maisons France Services, et je ferai des propositions concrètes.
Les périmètres des actions financées par l'ANCT relèvent de l'initiative locale. Les CRTE sont signés tantôt à l'échelle d'intercommunalités, tantôt à l'échelle des schémas de cohérence territoriale (SCoT) ou des pôles d'équilibre territorial et rural... Il en est de même pour d'autres programmes comme Petites villes de demain, avec des candidatures communales ou intercommunales. L'ingénierie s'adapte au périmètre choisi par les collectivités.
Monsieur Sautarel, il y a différentes formes d'ingénierie locale. L'enjeu principal repose dans la pérennisation de cet accompagnement territorial, qui a progressé. L'ANCT a annoncé avoir accompagné 702 projets depuis 2020.
L'accompagnement est réalisé soit par les référents de l'ANCT localement - mais le système est peu identifié et complexe -, soit par les marchés à bons de commande de l'État, qui recourt à des bureaux d'études, sur des projets spécifiques, soit par des chargés de projet ingénierie dans les différents programmes. Mais l'identification de l'ingénierie spécifique de l'ANCT dans les territoires commence juste. Nous verrons comment cela évoluera.
La part des moyens pour chaque programme est un sujet de préoccupation. L'État veut rassembler tous les contrats dans un CRTE. J'y suis favorable, à condition que des crédits spécifiques dédiés à certains programmes - comme Petites villes de demain - et à certaines dotations, en particulier la dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR), soient conservés. Les communes doivent disposer de crédits pour les projets qui ne sont pas dans des CRTE. Nous devons faire des propositions.
Madame Lavarde, pour le dispositif Territoires d'industrie, les crédits de la mission « Plan de relance » du PLF prévoient le recrutement de 50 chefs de projets supplémentaires, financés à parité par l'État et les régions.
Monsieur Mizzon, les conseillers numériques des maisons France Services sont extrêmement importants pour l'animation des territoires. Le recrutement de 4 000 conseillers supplémentaires est actuellement mis en place, mais sera-t-il pérennisé, sans être à la charge des collectivités territoriales ?
M. Jean-Baptiste Blanc, rapporteur spécial. - Monsieur le rapporteur général, le budget du fonds Friches a doublé, pour passer de 300 à 650 millions d'euros. Il connaît un certain succès, qu'il va falloir gérer : les sommes prévues suffiront-elles ? Le fonds sera-t-il pérennisé ? La loi Climat et résilience prévoyait, pour lutter contre l'artificialisation des terres, de lutter contre la vacance et d'utiliser ce fonds - il devra être abondé. Il faudra aussi repenser l'accompagnement, le financement et la fiscalité locale.
Il n'y a pas de cartographie. C'est l'objectif de la loi Climat et résilience, qui se fonde sur le Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (Cerema).
Monsieur Sautarel, nous avons voté la territorialisation des objectifs permettant aux présidents des SCoT de faire des propositions dans les six mois suivant la promulgation de la loi. Les territoires sont très mobilisés, mais inquiets. Ensuite, ces propositions sont accueillies - ou non - par les régions qui devront modifier les schémas régionaux d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires (Sraddet).
Il y a plusieurs saisons de l'ANRU... Il faut plus de huit ans pour qu'un projet voie le jour. C'est illisible. L'ANRU doit bénéficier d'un nouveau souffle. Le rapport Borloo dénonçait « l'inefficacité et l'éparpillement », « l'absence de définition claire, de stratégie et de méthode » de la politique de la ville, ce qui suscite de l'incompréhension. Sur 1,2 milliard d'euros de financement de l'État promis pour l'ANRU, seuls 93,8 millions d'euros ont été débloqués, dont 15 millions d'euros prévus en 2022. L'ANRU reste largement financée par Action Logement, les collectivités territoriales et les bailleurs sociaux.
Madame Briquet, marier deux pauvres ne fait pas un riche. Je l'ai vu dans mon département du Vaucluse. Sans accompagnement à la conduite du changement, c'est un enfer administratif et cela ne marche pas. Il n'y a pas de bilan du regroupement des offices publics de l'habitat (OPH) prévu par la loi Élan. Ces ensembles sont plus grands et plus privés. Nous devons les évaluer, d'autant que la politique du logement est à repenser.
Monsieur Meurant, l'incitation fiscale fonctionne jusqu'à un certain point. Il y a un effet guichet puis gadget... Il faut simplifier et adapter. L'État a fait voter une réforme du « Louer abordable » en zone tendue, mais il est trop tôt pour évaluer ses impacts.
Nous ne connaissons pas le nombre de migrants qui sont hébergés à l'hôtel, mais ils sont nombreux... Nous n'avons donc pas les moyens de contrôler cette politique.
La commission décide de proposer au Sénat de ne pas adopter les crédits de la mission « Cohésion des territoires ».
EXAMEN DES ARTICLES RATTACHÉS
Article 42 bis
La commission décide de proposer au Sénat l'adoption, sans modification, de l'article 42 bis.
Article 42 ter
La commission décide de proposer au Sénat l'adoption, sans modification, de l'article 42 ter.
Article 42 quater
La commission décide de proposer au Sénat l'adoption, sans modification, de l'article 42 quater.
Projet de loi de finances pour 2022 - Mission "Culture" - Examen du rapport spécial
M. Claude Raynal, président. - Nous examinons désormais les crédits de la mission « Culture ».
M. Didier Rambaud, rapporteur spécial de la mission « Culture ». - Je vous prie d'excuser l'absence, pour des raisons de santé, de Vincent Éblé.
Le montant global des crédits demandés dans le cadre du présent projet de loi de finances s'élève à 3,491 milliards d'euros en autorisations d'engagement et à 3,461 milliards d'euros en crédits de paiement. Ces chiffres traduisent une nette progression par rapport à la loi de finances pour 2021, avec une hausse de 8,11 % en crédits de paiement, soit 259,74 millions d'euros.
Nous relevons un véritable engagement budgétaire en faveur de la culture depuis le début de la crise sanitaire. Les crédits de paiement de la mission ont, en effet, progressé de 17,42 %, soit 513,6 millions d'euros, par rapport à 2019. Reste à déterminer si ce niveau de dotation peut perdurer à l'avenir, tant en raison de l'équilibre budgétaire en général que du risque d'extrême dépendance aux fonds publics d'une partie des filières couvertes par la mission.
La mission « Culture » ne résume pas le financement public de la culture et de la communication. L'agrégation des crédits budgétaires et des dépenses fiscales destinés directement et indirectement à la culture et à la communication devrait ainsi atteindre 15,6 milliards d'euros en 2022. Ce montant n'intègre pas les crédits consacrés à la culture et à la communication au sein de la mission « Plan de relance », soit 463 millions d'euros.
La progression des crédits de paiement attendue en 2022 résulte pour 65 % de la montée en charge du pass Culture, couvert par le programme 361 « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture ». Le pass Culture, déployé dans toute la France depuis mai 2021, devrait être étendu, en 2022, aux jeunes de 15 ans et plus, et aux élèves à partir de la quatrième. Le coût de cette montée en charge est établi à 140 millions d'euros en année pleine pour la mission. Le projet de budget pour 2022 prévoit ainsi une dotation de 199 millions d'euros à laquelle viennent s'ajouter 45 millions d'euros en provenance de la mission « Enseignement scolaire ».
Le succès du déploiement, que nous appelions de nos voeux l'an dernier, est indéniable : plus de 770 000 jeunes avaient ainsi activé leur pass en octobre 2021, soit 80 % de la population visée.
L'exercice 2022 devrait donc permettre une évaluation du niveau qualitatif de l'application, tant du point de vue des jeunes que de celui des offreurs. Il s'agira notamment de vérifier que le pass ne serve pas au financement d'achats liés au parcours scolaire et qu'il contribue à faire évoluer des pratiques culturelles. Le pass ne saurait, en effet, se résumer à une simple plateforme d'achat de biens et de services et doit être éditorialisé en vue de mettre en place un véritable parcours culturel, ciblant notamment le spectacle vivant. Au-delà de la question de la médiation culturelle, un accent doit également être mis sur l'accès des jeunes non scolarisés au pass. Il conviendra également de contribuer à faire du pass une véritable plateforme en faveur de l'éducation artistique et culturelle accessible aux jeunes qui ne seraient plus éligibles, si l'on entend que le pass Culture, qui agrège 54 % des crédits dédiés à cette politique, ne se résume pas à une offre limitée dans le temps. Une attention devra enfin être portée sur les frais de fonctionnement de la société par actions simplifiée « pass Culture ».
En tout état de cause, il est indispensable que le pass Culture ne résume pas l'effort de l'État en faveur de l'éducation artistique et culturelle et que la montée en charge budgétaire de l'application ne s'effectue au détriment des moyens qui lui sont traditionnellement affectés. Le projet de loi de finances prévoit à ce titre 23,5 millions d'euros en AE et 11,5 millions d'euros en crédits de paiement de mesures nouvelles. Cette majoration des crédits s'avère indispensable si le Gouvernement entend atteindre ses objectifs en matière d'éducation artistique et culturelle. Les indicateurs rattachés au programme tablent en effet sur une réduction de la part des enfants et adolescents ayant bénéficié d'une action d'éducation artistique et culturelle et de l'effort en faveur des territoires prioritaires.
Le programme 361 appelle, par ailleurs, deux remarques.
D'abord, les crédits dédiés aux travaux des établissements d'enseignement supérieur culturel et à l'insertion professionnelle devraient progresser de 8,82 % en 2022.Ces crédits seront complétés par le Plan de relance à hauteur de 20 millions d'euros. Pour l'heure, le plan de relance peine à s'incarner, avec un taux d'exécution des crédits 2021 établi à 34 %, faisant réapparaître un risque de non-consommation.
Ensuite, une attention particulière devrait être portée à la situation des jeunes diplômés de l'enseignement supérieur culturel. Aucun dispositif particulier n'est cependant présenté dans le programme 361 ni au sein de la mission « Plan de relance ». Au regard des retards pris dans la rénovation des écoles nationales d'art, un recalibrage en faveur d'un mécanisme d'insertion des sommes destinées à compléter le programme 361 pourrait être opportun.
J'aborderai pour conclure le programme 224 consacré au soutien des politiques du ministère, doté de 775,5 millions d'euros en crédits de paiement en 2022.
La masse salariale devrait continuer à croître en 2022 en dépit de la réduction des effectifs : 13 millions d'euros seront fléchés vers le nécessaire plan de rattrapage indemnitaire pluriannuel destiné à combler le retard des agents du ministère sur leurs homologues des autres administrations. La majoration des crédits dédiés à l'informatique de 4,5 millions d'euros doit, de son côté, permettre un rattrapage indispensable de l'écart observé avec d'autres administrations. En ce qui concerne les économies, l'année 2022 devrait coïncider avec la réduction effective du nombre de sites parisiens du ministère.
Je vais désormais lire l'intervention de Vincent Éblé, dédiée aux crédits fléchés vers la création et le patrimoine.
« Le programme 175 « Patrimoines » devrait être doté en 2022 de 1,023 milliard d'euros en crédits de paiement. Le présent projet de loi de finances prévoit 10,1 millions d'euros en crédits de paiement de mesures nouvelles : 4,2 millions d'euros fléchés vers des mesures de personnels au sein des opérateurs ; 2,9 millions d'euros pour la revalorisation des crédits dédiés à la promotion de l'architecture via les réseaux territoriaux comme le réseau « Villes et Pays d'art et d'histoire » ; 2 millions d'euros pour la poursuite du déploiement du plan de mise en sécurité des cathédrales ; et enfin 1 million d'euros pour la revalorisation de la dotation du fonds incitatif et partenarial qui accompagne les collectivités à faibles ressources en vue de financer des opérations de restauration de monuments historiques.
« À cette somme s'ajoutent 16 millions d'euros supplémentaires en autorisations d'engagement destinés au financement de schémas directeurs de travaux, à Versailles, aux Archives nationales, ou à Fontainebleau par exemple. Cette priorité accordée aux travaux, louable dans un contexte de réduction des ressources propres des principaux opérateurs, s'inscrit cependant dans un contexte d'incertitude quant à leur bonne exécution. Cette question n'est pas anodine au regard de l'exécution des crédits dédiés à la restauration du patrimoine au sein du plan de relance. Si, au 1er octobre 2021, 93 des 136 opérations prévues, hors château de Villers-Cotterêts, ont pu être lancées, le taux d'exécution des crédits de paiement relatifs à celles-ci s'avère relativement faible : 29,86 %. Ces retards ont conduit au report en 2023 d'une partie, à hauteur de 42 millions d'euros en crédits de paiement, de la dotation prévue en 2022, qui devrait s'établir en conséquence à 227,3 millions d'euros en crédits de paiement.
« Je relève que le programme « Patrimoines » est complété par deux dispositifs non budgétaires : les dons en faveur de la restauration de la cathédrale Notre-Dame de Paris - 841,3 millions d'euros de promesses de dons, 160 millions d'euros de travaux déjà engagés -et le Loto du Patrimoine - 72 millions d'euros récoltés depuis sa création. Le ministère complète cet apport en dégelant en fin de gestion un montant représentant le produit des taxes perçues sur le produit du jeu. Au regard de l'ampleur du défi que représente la restauration du petit patrimoine, notamment rural, une exonération complète du produit du jeu aurait pu être décidée en amont, le dégel venant ensuite éventuellement en complément. Une telle solution est déjà retenue au Pays-Bas ou au Royaume-Uni.
« Les pertes cumulées pour les opérateurs du programme devraient atteindre, de leur côté, 310 millions d'euros en 2021 et 182 millions d'euros en 2022. Dans ces conditions, les dispositifs de soutien exceptionnels mis en oeuvre en 2020, dans les collectifs budgétaires, et en 2021 à travers la mission « Plan de relance » en loi de finances, ont pu apparaître, malgré leur caractère exceptionnel, insuffisants. Le collectif budgétaire de fin de gestion 2021 tend à pallier ces difficultés et l'exercice 2022 sera par ailleurs marqué par un apport complémentaire de 102,3 millions d'euros via la mission « Plan de relance ». Au final 567,2 millions d'euros auront été dégagés entre 2020 et 2022, hors subventions pour charges de service public, afin de compenser des pertes nettes estimées de leur côté à 745 millions d'euros.
« La perspective d'un retour à la normale est désormais repoussée à l'horizon 2024. Elle soulève des questions quant à l'avenir des opérateurs du programme 175 à l'issue de l'exercice 2022. Il existe un risque réel d'effet ciseau, conjuguant progression inévitable des charges et perspective de recettes limitées, voire incertaines. Un maintien, lors des prochains exercices budgétaires, d'un soutien financier de l'État destiné à pallier le manque de recettes est à attendre. Il romprait avec la trajectoire de réduction de l'intervention de l'État et le développement des ressources propres.
« Le montant des crédits de paiement du programme « Création » devrait atteindre, de son côté, 914,87 millions d'euros, soit une progression de 54,19 millions d'euros par rapport à la loi de finances pour 2021. Les mesures nouvelles sont principalement orientées dans trois directions : le soutien à la création dans les territoires pour 20 millions d'euros, l'appui aux investissements des opérateurs - 16,65 millions d'euros consacrés aux travaux des salles de l'Odéon et de Chaillot et à la relocalisation du Centre national des arts plastiques à Pantin - et le renforcement des mesures de soutien à l'emploi, avec 5 millions d'euros dédiés au Fonds national pour l'emploi pérenne dans le spectacle (Fonpeps). S'agissant de ce dernier sujet, la prolongation du dispositif d'année blanche pour les intermittents jusqu'au 31 décembre 2021 et la sortie par paliers en 2022, dont le coût global est estimé à 1,3 milliard d'euros, viennent compléter les dispositifs prévus au sein du programme 131.
« Ce dernier programme ne contient pas, en outre, toute l'aide accordée aux filières. Le Plan de relance prévoit ainsi deux enveloppes appelées à compléter le programme 131 pour un montant total de 81,1 millions d'euros en crédits de paiement.
« Ainsi, 44 millions sont fléchés vers les opérateurs du patrimoine. À cette somme, il convient d'ajouter les crédits prévus par le collectif budgétaire de fin d'année 2021 appelés à être reportés en 2022. Cette dotation complémentaire illustre les difficultés traversées par les opérateurs en 2021 - 65,68 millions d'euros de pertes annoncées, contre 48,34 millions d'euros en 2020 - et les doutes qui entourent un retour à la normale de l'activité en 2022.
« Cet appui budgétaire doit là encore être appuyé tant il peut éloigner le spectre d'une cessation de paiement. La crise frappe logiquement plus nettement les opérateurs les plus dépendants de leurs ressources propres. L'hypothèse d'un changement des habitudes culturelles post-covid doit, de fait, inciter à une réévaluation du prix des billets pour accéder à certaines salles publiques. La question de la billetterie est d'autant plus cruciale que les recettes liées au mécénat tendent à s'amoindrir, tant pour des raisons fiscales que sociétales.
« Sous réserve de ces observations, nous vous proposons d'adopter sans modification les crédits de la mission « Culture ». »
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Vous avez évoqué le déploiement du pass Culture. Dispose-t-on de statistiques quant à l'utilisation de ce chèque de 300 euros ? Quels biens culturels sont acquis en priorité via ce dispositif ? Pouvez-vous, par ailleurs, nous détailler les modalités de son extension aux jeunes de moins de dix-huit ans à partir de janvier prochain ? Comment ce dispositif s'articule-t-il avec les dispositifs existants dans certains territoires ?
M. Antoine Lefèvre. - Pourriez-vous nous donner plus de précisions concernant les travaux réalisés au château de Villers-Cotterêts pour accueillir la future Cité internationale de la langue française ? Je voudrais savoir notamment si des crédits du plan de relance sont mobilisés pour son financement.
M. Rémi Féraud. - Ma question portera sur le patrimoine. Si je comprends bien, le projet de loi de finances pour 2022, comme cela avait déjà été le cas l'an passé, ne comporte aucun crédit de l'État pour la restauration de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Pourtant Paris, la région d'Île-de-France, ainsi que d'autres collectivités partout en France, ont participé à la souscription...
M. Claude Raynal, président. - Comment le secteur de la culture rebondit-il après la crise sanitaire ? Il semble que le public ne soit plus aussi nombreux dans les théâtres et les cinémas. La fréquentation a ainsi baissé de 25 % dans les cinémas. Le ministère continuera-t-il à soutenir ces secteurs après la crise ?
M. Didier Rambaud, rapporteur spécial. - La moitié des achats réalisés par le biais du pass Culture sont des achats de livres. Il s'agit principalement de mangas. Certains s'en inquiètent dans la presse, mais il me semble que cela permet d'inciter les jeunes à entrer dans une librairie : ainsi 35 % des acheteurs d'un manga ont acheté aussi une oeuvre plus littéraire. Les autres postes d'utilisation du pass sont l'achat de places de cinéma, pour 11 millions d'euros, et d'instruments de musique, pour 8 millions d'euros. Les spectacles vivants ne représentent que 1,5 % des dépenses, mais il est vrai que le contexte sanitaire est particulier. Quant à la complémentarité avec les autres dispositifs culturels, je ne suis pas sûr qu'elle existe. Les jeunes peuvent profiter de tous les dispositifs. Dans l'Isère, par exemple, un « chéquier jeunes » a été instauré pour les collégiens. Le cumul sera encore accentué à partir de 2022 dans la mesure où le pass Culture sera élargi à tous les élèves à partir de la classe de quatrième, même s'il ne pourra pas être utilisé, dans ce cadre, pour les biens numériques, à l'exception de la presse en ligne, ni pour les jeux vidéo.
En ce qui concerne les travaux au château de Villers-Cotterêts, le plan de relance prévoit une enveloppe de 100 millions d'euros, dont 83 millions doivent être consommés avant la fin 2022, et 17 millions reportés en 2023.
En effet, le projet de loi de finances ne comporte pas de crédits de l'État pour la reconstruction de Notre-Dame de Paris. Celle-ci s'effectue pour l'instant grâce aux dons.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - En somme, le Président décide de tout, mais ce sont les dons qui financent !
M. Didier Rambaud, rapporteur spécial. - Il faut rappeler toutefois que l'État contribue par le biais de la dépense fiscale associée au mécénat.
S'agissant de la chute de la fréquentation, elle est aussi due à la baisse du nombre de touristes étrangers. Les gens, par ailleurs, ne réservent plus à l'avance leurs places de spectacle par crainte des annulations. Les opérateurs des programmes « Patrimoines » et « Création » estiment que l'on ne retrouvera qu'en 2024 les chiffres de fréquentation que l'on connaissait avant la crise.
La commission décide de proposer au Sénat d'adopter, sans modification, les crédits de la mission « Culture ».
Projet de loi de finances pour 2022 - Mission "Médias, livre et industries culturelles" et compte de concours financiers "Avances à l'audiovisuel public" - Examen du rapport spécial
M. Roger Karoutchi, rapporteur spécial de la mission « Médias, livres et industries culturelles » et du compte de concours financiers « Avances à l'audiovisuel public ». - Les crédits dédiés à la mission « Médias, livres et industries culturelles » devraient rester quasiment stables en 2022 à périmètre constant. Les crédits de paiement (CP) s'élèvent à 675,2 millions d'euros, soit une progression de plus de 11 % par rapport à 2021. Elle n'est en réalité que de 2 % à périmètre inchangé. À ces crédits s'ajoutent 140 millions d'euros au titre du Plan de relance.
Le budget 2022 répond donc plutôt aux attentes du secteur.
Les crédits relatifs à la presse et aux médias progressent fortement, à hauteur de 22 %. Cette majoration est due, pour l'essentiel, à une mesure de périmètre : le financement de l'aide au transport postal est en effet transféré au sein du programme. Ce transfert qui accompagne une refonte de l'aide à la distribution va dans le bon sens même si le Gouvernement ne se décide pas à remettre à plat la totalité du régime des aides à la presse. Le système, héritage de l'après-guerre et modifié à de nombreuses reprises depuis, ne fonctionne pas pleinement, car certains titres de la presse d'information politique et générale apparaissent favorisés. Or, ces avantages sont dépassés.
Il y a bien de timides avancées en faveur du développement du numérique, le Gouvernement consacrant quelques moyens à ce sujet. Ces sommes restent cependant plus faibles que celles consacrées au maintien de la presse imprimée, comme si l'avenir de la presse était dans le papier... Même si j'aime lire la presse papier, la plupart des journaux se développent en numérique. On est passé du lecteur au chercheur d'informations.
Je relève par ailleurs, que les organisations professionnelles du secteur limitent toute velléité de réforme ambitieuse. Dans ces conditions, toute tentative de lancement d'un nouveau média peut apparaître extrêmement difficile en raison de la défense des droits acquis. Il faudra vraiment remettre à plat les aides et revoir certains critères d'attribution. La direction générale des médias et des industries culturelles du ministère de la culture le reconnaît, mais elle retarde l'échéance d'une réforme à l'après-présidentielle.
La situation de l'Agence France-Presse (AFP), qui reçoit, de son côté, 40 % des aides à la presse, et qui connaissait de nombreuses difficultés depuis des années, s'est nettement améliorée. Je rappelle qu'elle était fortement endettée et que les correspondants locaux n'avaient pas de véritable statut, ce qu'ils contestaient devant les tribunaux. Depuis, l'AFP a bien évolué : elle est davantage présente numériquement, avec des vidéos, elle a conquis de nouveaux clients, et a réglé le problème des correspondants locaux.
Sur les crédits d'aide au livre et à la lecture, nous avons l'avantage et l'inconvénient de disposer d'un gros paquebot : la Bibliothèque nationale de France (BNF), reconnue par les chercheurs du monde entier, est un gouffre financier. Elle concentre 78 % des dépenses d'investissement des opérateurs du programme dédiés au livre et à la lecture. Les crédits sont donc insuffisants pour les autres établissements, qu'ils soient provinciaux ou franciliens. Je m'interroge d'ailleurs sur le maintien des crédits d'aide à la lecture au sein du programme 334, car ils ne s'élèvent qu'à 8 millions d'euros et que l'essentiel des actions en faveur de la lecture sont portées par d'autres programmes budgétaires.
Le Centre national de la musique (CNM) a bénéficié, de son côté, de nombreuses aides directes et indirectes grâce aux lois de finances rectificative adoptées en 2020 et au plan de relance. Les salles de spectacle, en difficulté, ont reçu des aides massives. Le Centre national de la musique espère désormais consommer les crédits de relance en 2022. Je les trouve un peu optimistes. La remontée épidémique rend ce rebond incertain. Il faudra sans doute plus de crédits pour faire face aux conséquences des réductions des jauges. Le plan de relance avait attribué 200 millions d'euros au CNM sur la période 2021-2022.
Le Centre national du cinéma et de l'image animée (CNC) s'attend à percevoir, quant à lui, 694 millions d'euros de taxes - un montant considérable ! Il s'agit d'un retour à la normale après la crise. Il y a eu entretemps des aides massives pour les salles de cinéma et pour la production de films. La France est un grand pays de production. Le plan de relance a alloué 165 millions d'euros au secteur, mais il a servi en large partie à un maintien de l'activité et non à une relance ... Très peu de salles de cinéma ou de producteurs ont fermé. Les prévisions de recettes pour 2022 reposent sur une hypothèse de fréquentation relativement optimiste. Un rebond de l'épidémie sera-t-il amortissable sans injection de crédits publics ?
Si je vous proposerai donc, dans ces conditions, l'adoption des crédits de la mission « Médias, livre et industries culturelles », en revanche, la coupe est pleine pour l'audiovisuel public. Cela suffit, le Gouvernement se moque du monde. La contribution à l'audiovisuel public (CAP) reste fixée à 138 euros en métropole et 88 euros en outre-mer, et devrait rapporter 3,7 milliards d'euros.
Depuis 2019, une trajectoire de réduction des ressources attribuées aux sociétés audiovisuelles publiques a été élaborée afin d'inciter celles-ci à diminuer leurs dépenses. Ainsi France télévisions se réorganise, avec une pseudo-baisse de ses effectifs, non totalement mise en oeuvre. Et si elle réalise des économies, on lui redonne des crédits via le plan de relance... Soyons clairs, le service audiovisuel public n'a quasiment pas perdu de moyens.
Dans le même temps, toutes nos demandes de réflexion sur le périmètre ou les missions de service public n'ont pas abouti. A-t-on besoin d'autant de chaînes de télévision et de radio ? La question de la viabilité de certaines d'entre elles se pose.
Quelle est la spécificité de France 2 par rapport aux chaînes privées, en termes d'émissions ou de films programmés ? On nous répond qu'il faut faire de l'audience, ce qui revient à avoir une vision concurrentielle des chaînes de service public. Or le contribuable paie pour avoir des émissions éducatives, culturelles - certes non soporifiques - sur le service public, et non pour regarder les mêmes films que sur TF1 ou M6. Or les dirigeants de France Télévisions sont heureux lorsqu'ils battent les chaînes privées... Ils raisonnent avec l'audimat et non uniquement selon leur mission de service public. Les plages de publicité avant 20 heures sont d'autant plus chères que la chaîne fait de l'audimat... A-t-on eu tort de supprimer la publicité après 20 heures ? Après tout, un réel service public ne devrait pas du tout dépendre de la publicité. Ce débat devra avoir lieu.
Contrairement à l'année dernière, j'émets donc un avis défavorable sur les crédits de ce compte de concours financiers. Durant les débats du PLF pour 2019, le Gouvernement s'était engagé à préciser avant juin 2019 les conditions de prélèvement de la redevance dans le contexte de suppression de la taxe d'habitation. Nous n'avons pas avancé d'un iota. La grande réforme de l'audiovisuel public n'a pas vu le jour. Résultat, il n'y a aucune priorité dans l'audiovisuel public ni de volonté de réorganisation avec une culture de service public.
Nous avions demandé comment faire pour que les stations locales de France 3 et France Bleu fusionnent. La solution du Gouvernement, c'est de laisser les deux réseaux et de créer de nouvelles chaînes localement... C'est fou !
En 2019, le Président de la République avait déclaré que la situation ne pouvait plus durer... Or il ne s'est rien passé depuis deux ans. On ne sait pas sur quoi la redevance sera adossée. Un rapport devait être remis au Parlement en septembre 2019. Nous l'attendons toujours. L'ancien ministre du budget, actuel ministre de l'intérieur, proposait de supprimer la CAP et de la budgétiser dans le budget de l'État. Ses successeurs ne sont pas sur la même ligne, mais ils ne sont sur aucune ligne... On ne sait pas comment sera financé l'audiovisuel.
L'année dernière, je vous avais présenté des amendements pour soutenir France Médias Monde, qui voit ses crédits rognés, alors qu'elle est une arme à l'international, C'est la société sur laquelle il faut concentrer des crédits. Le système français tourne sur lui-même, sans répondre à quoi que ce soit.
M. Jean-Raymond Hugonet, rapporteur pour avis de la commission de la culture. - Le discours du rapporteur spécial est conforme au rapport pour avis que je présenterai demain. Le budget général de l'audiovisuel public est en léger retrait. La trajectoire de réduction du personnel de France Télévisions et Radio France a été respectée.
Mais le Gouvernement a échoué à réformer l'audiovisuel. Il n'y a eu qu'une petite loi croupion dont j'ai été le rapporteur. En novembre 2017, le Président de la République s'était pourtant plaint devant les députés de la majorité : l'audiovisuel public serait une honte pour nos concitoyens. Nous attendions donc une grande réforme. Il y a eu trois ministres de la culture. Seul Franck Riester a porté le projet de réforme devant le Parlement - elle a été examinée par la commission de la culture de l'Assemblée nationale. Mais elle n'a pas suivi son cours, soi-disant en raison du coronavirus, alors qu'il aurait été possible de trouver un créneau pour l'examiner.
La taxe d'habitation, sur laquelle est adossée la CAP, sera, de son côté, supprimée en 2023 : les dirigeants de l'audiovisuel public sont donc incapables de faire des prévisions, or ils ne peuvent vivre éternellement dans l'incertitude.
Alors que les plateformes numériques sont l'avenir, et prévues dans les contrats d'objectifs et de moyens, France télévisions a investi dans la plateforme Salto, aux côtés de TF1 et M6, pour près de 45 millions d'euros. Elle démarre timidement. Que se passera-t-il en cas de fusion de TF1 et M6 dans dix-huit mois ? Salto bénéficiera d'un enterrement de première catégorie aux frais du contribuable français...
Le président de la République avait indiqué son souhait que France Médias Monde rayonne. Cette ambition est d'actualité avec la présidence française de l'Union européenne. Il est cependant malheureux de voir qu'elle reste le parent pauvre de l'audiovisuel public, alors qu'il est un instrument de rayonnement de notre culture et de nos valeurs pour un prix relativement modique. Or son budget est encore rogné. Je proposerai également à la commission de la culture de ne pas adopter les crédits du compte de concours financiers.
M. Roger Karoutchi, rapporteur spécial. - Comme Salto est géré pour un tiers par France Télévisions, un tiers par TF1 et un tiers par M6, en cas de fusion entre TF1 et M6, Salto sera géré principalement par une chaîne privée, le degré d'autonomie de France Télévisions au conseil d'administration étant réduit à la portion congrue.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Les réformes annoncées sur l'audiovisuel public n'ont jamais été mises en oeuvre - à moins que le Président de la République fasse des annonces, à l'instar de la somme de 1,9 milliard d'euros annoncée pour l'hydrogène... Nous avons jusqu'à Noël pour recevoir des cadeaux !
M. Marc Laménie. - Je remercie le rapporteur pour son rapport défendu avec talent et passion. De nombreux jeunes ne savent pas lire. Quels sont les liens des opérateurs de la lecture publique avec l'éducation nationale, et leur implication au sein des territoires locaux ?
M. Rémi Féraud. - Sans partager l'opinion du rapporteur spécial sur ce qu'il faudrait faire sur l'audiovisuel public, je suis d'accord avec lui sur un point : le Gouvernement a fait ce qu'il ne fallait pas faire. À ne pas choisir, il rabote chaque année les crédits, sans choix stratégique. Le budget de France Médias Monde est aberrant par rapport aux déclarations du Président de la République. Je suis rapporteur spécial de la mission « Action extérieure de l'État. » À quoi sert de faire un réel effort sur l'enseignement français à l'étranger, si on ne soutient pas l'audiovisuel français à l'étranger ? Ce qui a été fait pendant cinq ans se poursuit dans ce PLF...
Le budget consacré au livre, aux médias et aux industries culturelles n'est pas catastrophique, car il a été abondé par le plan de relance, mais sans garantie pour l'avenir.
La production cinématographique a bénéficié de 165 millions d'euros en 2021 avec un engagement du Gouvernement de reconduire ce budget en 2022. Je n'en ai pas trouvé trace dans les documents budgétaires. Ces crédits sont-ils ailleurs, ou absents ? Manquent-ils, ou n'en a-t-on pas besoin ? Il faudrait vérifier qu'il n'y a pas de trou dans la raquette.
M. Arnaud Bazin. - Je ne voulais pas voter les crédits à l'audiovisuel public en raison de la situation à Radio France. Il est indispensable d'avoir une presse d'opinion - et nous le savons lorsque nous achetons Le Figaro, L'Humanité, Libération - à condition qu'elle soit financée par les acheteurs et les annonceurs. Les contribuables financent Radio France, dont les émissions sont souvent de qualité, mais avec un arrière-plan idéologique évident et permanent. Cela va bien au-delà des émissions politiques. La gouvernance de Radio France se défend en invoquant des choix éditoriaux, mais ce sont des choix politiques, presque de la propagande.
Quels fonds sont spécifiquement dédiés à Radio France ? L'établissement est habitué à cet état de fait. Daniel Cohn-Bendit, invité à la matinale de France Inter, a salué les journalistes d'un « Bonjour à Radio nostalgie socialisme » !
M. Didier Rambaud. - Sur l'audiovisuel public, je partage le constat de MM. Karoutchi et Hugonet, mais sans la tonalité politique. On peut regretter l'absence de grande loi sur l'audiovisuel, mais sur quelles bases l'écrire ? Ces dix dernières années, je n'ai jamais entendu - ni à droite ni à gauche - de propositions concrètes sur l'audiovisuel public de demain. Actuellement, les jeunes regardent Netflix, Amazon ou Disney +. Comment réguler ces plateformes ? Le téléviseur a été remplacé par les smartphones et les tablettes. Faut-il élargir l'assiette de la CAP à ces supports ? Bon courage...
M. Roger Karoutchi, rapporteur spécial. - Monsieur Laménie, ce n'est pas le rôle de la BNF d'apprendre à lire aux enfants. Elle mène une politique en faveur des éditeurs, des collectionneurs et des chercheurs. Il faudrait aller voir dans le budget de l'éducation nationale, car les liens sont ténus avec les bibliothèques et l'édition. Il n'y a pas de classes qui se rendent à la BNF.
Monsieur Féraud, le CNC avait effectivement demandé au Gouvernement de mettre le paquet en 2021 et en 2022, mais en versant la totalité des crédits en 2021 - ils ont tous été consommés... D'où le problème pour 2022. Si le secteur n'a pas de difficultés majeures, il pourra tenir. Sinon, les éventuels moyens supplémentaires ne sont pas budgétés...
Monsieur Bazin, je n'ai rien à rajouter sur l'idéologie de Radio France. Le budget prévu en 2022 atteint 588,8 millions d'euros. La neutralité du service public est un élément dont on parle beaucoup, mais qui est peu pratiqué. Lorsque vous regardez Arte ou France 5, il y a des reportages intéressants avec un certain soubassement...
Monsieur Rambaud, il y a eu un projet de loi de réforme de l'audiovisuel, pour réorganiser le service public. Un débat parlementaire sur le périmètre et la définition des missions de service public était aussi prévu. On aurait pu faire avancer les choses, mais ce débat n'a jamais eu lieu.
En revanche, que fait-on pour la CAP ? Des propositions ont été faites soit pour maintenir l'assiette aux téléviseurs, soit pour l'élargir aux tablettes et portables. C'est au Gouvernement soit de faire des propositions, soit de débattre devant le Parlement.
Les acteurs de l'audiovisuel ont des idées, mais elles ne sont jamais débattues, donc jamais tranchées. On y va à l'aveugle...
M. Jean-Raymond Hugonet, rapporteur pour avis. - Le Sénat publie d'excellents rapports, notamment celui de MM. Jean-Pierre Leleux et André Gattolin de 2015 sur le modèle de financement de l'audiovisuel public, qui donne les grands axes de la réforme - le ministre Franck Riester s'en était inspiré pour son projet de loi.
La commission décide de proposer au Sénat l'adoption, sans modification, des crédits de la mission « Médias, livre et industries culturelles ».
Elle décide de proposer au Sénat de ne pas adopter le compte de concours financiers « Avances à l'audiovisuel public ».
Projet de loi de finances pour 2022 - Mission "Recherche et enseignement supérieur" - Examen du rapport spécial
M. Jean-François Rapin, rapporteur spécial de la mission « Recherche et enseignement supérieur ». - L'année 2022 constitue la deuxième année de mise en oeuvre de la loi de programmation pour la recherche, que nous avons votée l'année dernière. C'est donc à l'aune de la trajectoire définie dans cette loi de programmation qu'il convient d'analyser le budget de la recherche.
Je retiens trois points saillants des diverses auditions menées ces dernières semaines.
En premier lieu, le budget de la recherche est conforme à la trajectoire votée pour 2022 puisque, à périmètre constant, les crédits alloués au programme 172 progressent de 334,5 millions d'euros tandis, tandis que la recherche spatiale bénéficie de 76 millions d'euros supplémentaires.
Cependant, le budget de la recherche spatiale manque singulièrement de clarté cette année, puisqu'il devrait être complété, en gestion, par un transfert de 150 millions d'euros en provenance de la mission « Défense ». Cette budgétisation peu orthodoxe est d'autant plus regrettable que l'année 2022 s'annonce charnière pour le Centre national d'études spatiales (CNES), avec la fin de l'exploitation d'Ariane 5, le premier lancement d'Ariane 6, mais également la mise en oeuvre des plans France Relance et France 2030 qui comportent tous deux un volet spatial significatif.
De manière plus générale, le budget de la recherche sera cette année complété de manière très substantielle par des crédits en provenance du plan de relance, du programme d'investissements d'avenir (PIA) 4 et de France 2030. À ce stade, étant donné les données parcellaires dont nous disposons, il est très difficile d'évaluer l'ampleur de ces abondements ; j'estime néanmoins que près de 2,5 milliards d'euros supplémentaires seront alloués à la recherche.
Ces dotations supplémentaires sont évidemment bienvenues étant donné le sous-investissement chronique dont souffre la recherche française. Il me semble néanmoins problématique que près de 20 % des crédits de la recherche soient budgétés en dehors de la mission interministérielle « Recherche et enseignement supérieur » (Mires). Cette situation nous contraint à mener un travail de consolidation particulièrement complexe et nuit bien évidemment à la lisibilité de la politique publique de recherche dans notre pays.
J'en viens à mon deuxième point, à savoir le redressement financier de l'Agence nationale de la recherche (ANR), qui se poursuit cette année. Conformément à la loi de programmation de la recherche (LPR), le PLF pour 2022 prévoit une hausse de 158 millions d'euros en autorisations d'engagements (AE), des moyens dévolus à l'Agence par rapport à 2021. Ces crédits seront complétés par une enveloppe de 142 millions d'euros, en autorisations d'engagement et crédits de paiement (CP), en provenance du plan de relance, si bien que l'ANR devrait cette année bénéficier de 438 millions d'euros supplémentaires par rapport à 2020, pour un total de 1,2 milliard d'euros.
Les hausses de crédits substantielles consenties en 2021 ont d'ores et déjà permis d'atteindre un taux de succès sur les appels à projets de 23 %, contre 16 % en 2020. Le taux de préciput a également progressé, pour atteindre 25 % dès 2021, contre 19 % en 2020.
Je me suis prononcé à plusieurs reprises en faveur d'une enveloppe budgétaire minimale de l'ordre d'un milliard d'euros, permettant d'atteindre un taux de succès de l'ordre de 25 %. Je me félicite donc que l'impact conjoint de la LPR et du plan de relance ait permis de réaliser cet objectif dès 2021.
Il me semble néanmoins que la priorité doit être désormais d'augmenter le montant moyen des financements alloués, qui demeurent relativement plus faibles que ceux qui sont attribués dans le cadre des appels à projets européens.
De manière générale, le redressement financier de l'ANR constitue un signal très encourageant pour nos chercheurs, d'autant plus qu'il va de pair avec une amélioration de la situation financière des organismes de recherche. Ceux-ci devraient bénéficier de 103,8 millions d'euros supplémentaires pour la mise en oeuvre de mesures issues de la LPR - les revalorisations indemnitaires et les mesures statutaires, ainsi que la création de 265 emplois supplémentaires.
Il est indéniable que ces moyens nouveaux vont redonner des marges de manoeuvre aux organismes de recherche. Depuis plusieurs années, en effet, ces opérateurs ne sont pas en mesure d'exécuter leur plafond d'emploi, étant donné le dynamisme des mesures salariales et la stagnation des moyens qui leur sont alloués. Le budget pour 2022 devrait ainsi mettre un terme à l'érosion du nombre de chercheurs rémunérés par les organismes, ce qui constitue une avancée notable.
Je note qu'en parallèle, le budget pour 2022 prévoit de consacrer 52,3 millions d'euros supplémentaires aux Très grandes infrastructures de recherche (TGIR) ainsi qu'aux Organisations scientifiques internationales. Ces crédits ont notamment vocation à financer la modernisation et le renouvellement de deux navires de la Flotte océanographique française (FOF). Depuis plusieurs années, j'alerte sur le coût des investissements à consentir pour le renouvellement de cette flotte ; je me réjouis donc de cet effort d'investissement, qui traduit une meilleure programmation des dépenses pluriannuelles.
Pour conclure, le budget pour 2022 se révèle conforme à la loi de programmation, et la plupart des organismes de recherche notent que la tendance s'est désormais inversée : la recherche bénéficie désormais de crédits supplémentaires, alors que son budget tendait à à s'atrophier au fil des années.
Est-ce à dire que notre pays se donne les moyens de rester une grande puissance scientifique ? Je pense que non, malheureusement. De nouvelles données viennent étayer, année après année, le constat d'un décrochage de la France en matière de recherche. En 2018, notre dépense intérieure de recherche et développement (DIRD) représentait ainsi 2,2 % de notre produit intérieur brut (PIB). Non seulement ce seuil se situe bien en deçà de l'objectif de 3 % fixé par la stratégie de Lisbonne, mais surtout, nos concurrents directs font bien mieux : la DIRD atteint 2,83 % aux États-Unis et 3,13 % en Allemagne, pays qui s'est récemment fixé pour objectif d'atteindre une DIRD de 3,5 % du PIB !
La position de la France ne cesse de s'éroder parmi les pays les plus intensifs en matière de recherche. Or, si la LPR permet de redonner quelques marges de manoeuvre à nos organismes, elle n'augure pas d'un réinvestissement massif dans la recherche qui permettrait, a minima, à la France de conserver son rang mondial, dans un contexte marqué par une concurrence internationale toujours plus intense.
En dépit de ces réserves, et dans la mesure où le budget pour 2022 se révèle conforme à la LPR, je souhaite que notre commission des finances propose au Sénat d'adopter les crédits de cette mission.
Mme Vanina Paoli-Gagin, rapporteur spécial de la mission « Recherche et enseignement supérieur ». - Conformément à la loi de programmation pour la recherche, le budget alloué à l'enseignement supérieur connaît cette année une progression substantielle, de l'ordre de 385 millions pour les deux programmes de la mission, soit une hausse de 2,3 % par rapport à l'année dernière.
Les établissements d'enseignement supérieur bénéficieront ainsi de 224 millions d'euros supplémentaires, dont 137,5 millions d'euros pour la mise en oeuvre des mesures issues de la LPR, à savoir principalement des revalorisations indemnitaires et des mesures statutaires, mais également la création de 385 emplois.
Pour la deuxième année consécutive, le budget pour 2022 entend ainsi redonner des marges de manoeuvre aux universités, jusqu'à présent confrontées à des tensions très importantes, puisque leur budget est resté constant en dépit d'une masse salariale très dynamique. Dans ce contexte, la plupart des établissements ont été contraints de geler des postes ou de supprimer des emplois pour équilibrer leur budget, tout en rognant sur les dépenses immobilières.
Cette situation était d'autant moins acceptable que les établissements doivent accueillir un nombre toujours croissant d'étudiants. Ainsi, depuis le début du quinquennat, près de 68 500 nouveaux étudiants sont venus grossir les rangs de l'université !
C'est notamment pour absorber ce flux qu'a été lancé le plan « Étudiants » et que la loi relative à l'orientation et à la réussite des étudiants (ORE) a été votée : près de 83 000 places ont été créées à l'université. Cet effort significatif mérite d'être salué.
Je voudrais néanmoins rappeler que près de la moitié de ces places ont été cofinancées à l'aide des crédits du plan de relance, pour un montant de 43 millions d'euros en 2021 et 84 millions d'euros en 2022. Mes chers collègues, permettez-moi d'insister sur ce point : en 2021 et 2022, des mesures d'urgence ont permis de répondre à la hausse exceptionnelle du nombre d'étudiants inscrits, mais qu'en sera-t-il à compter de 2023, quand le budget de la mission ne bénéficiera plus de crédits additionnels en provenance du plan de relance ? Cette question est d'autant plus préoccupante qu'après une période de relative accalmie, la démographie étudiante devrait à nouveau fortement progresser en 2024.
Je note, en parallèle, que la subvention versée aux établissements d'enseignement privé demeure stable en 2022, alors même que ces derniers contribuent très largement à absorber le flux des nouveaux arrivants dans l'enseignement supérieur.
Ainsi, entre 2018 et 2021, les effectifs étudiants accueillis dans les établissements privés ont progressé de plus de 20 %, tandis que l'effort budgétaire consenti par l'État n'a augmenté que de 13 %. Mécaniquement, la part du soutien de l'État par étudiant a donc diminué sur cette période : le financement public moyen d'un étudiant s'élève désormais à 11 500 euros dans l'enseignement supérieur public contre 587 euros dans l'enseignement privé.
De manière plus générale, face à la hausse continue du nombre d'étudiants, le mode de financement des universités paraît relativement obsolète ; je regrette que le constat d'une pression démographique inégalée ne suscite pas de réflexion plus large sur le devenir de l'enseignement supérieur français.
À cet égard, la question de l'immobilier universitaire me paraît aujourd'hui particulièrement cruciale. En effet, dans le cadre de mes travaux de contrôle budgétaire, j'ai pu constater l'ampleur du défi posé par le caractère vétuste et énergivore du patrimoine universitaire.
Dans ce contexte, le lancement d'un appel à projets pour financer la rénovation énergétique des bâtiments publics constituait donc une opportunité unique pour les établissements d'enseignement supérieur, et je me félicite qu'ils aient pleinement réussi à s'en saisir : ainsi, 813 projets ont été retenus pour l'enseignement supérieur, pour un total de l'ordre d'un milliard d'euros.
Ces résultats sont d'autant plus méritoires que les établissements ont dû élaborer leurs projets dans des délais particulièrement restreints, puis veiller à ce qu'ils soient lancés avant la fin de l'année 2021.
Il me semble néanmoins que l'effort ponctuel consenti dans le cadre du plan de relance demeure insuffisant, et ne permettra pas à notre pays de respecter les objectifs ambitieux qu'il s'est fixés en matière de transition énergétique.
Or, j'ai acquis la conviction que le rayonnement futur de nos universités dépendra étroitement des choix que nous ferons en matière d'immobilier.
Je suis donc favorable au lancement d'un vaste plan de rénovation globale du bâti universitaire, qui s'inscrirait dans la continuité des efforts déployés dans le cadre de France Relance : à la dotation d'un milliard d'euros pour la réalisation de gains rapides succéderait une dotation plus importante pour la réalisation de gains différés.
J'en viens maintenant aux crédits consacrés à la vie étudiante. En 2022, ces derniers progresseront de 179,1 millions d'euros en CP, soit une hausse de 6,4 %.
Cette augmentation résulte principalement de la revalorisation des bourses sur critères sociaux versées aux étudiants, qui représente 150,9 millions d'euros.
En parallèle, la subvention versée au réseau des oeuvres universitaires progressera de 26,5 millions d'euros, pour financer notamment la prolongation du « ticket U » à 1 euro pour les étudiants boursiers et du gel des loyers.
Le budget pour 2022 prévoit également des mesures nouvelles en faveur des étudiants et des étudiantes, comme l'installation de distributeurs de protections périodiques, l'embauche de 1 000 étudiants référents en résidences universitaires et le recrutement de 60 assistantes sociales supplémentaires.
Plus largement, je voudrais rappeler que depuis le début de la crise sanitaire, la forte mobilisation des centres régionaux des oeuvres universitaires et scolaires (Crous) a permis de lutter efficacement contre la précarité étudiante, ce qui mérite d'être salué. Cependant, en parallèle, ces derniers ont subi de lourdes pertes d'exploitation, si bien que leur situation demeure fragilisée et devra faire l'objet d'un suivi attentif.
Dans la mesure où l'enseignement supérieur bénéficie de hausses importantes de crédits, qui permettent d'assurer le respect de la trajectoire définie en loi de programmation, je vous proposer de les adopter.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Comment expliquer le décrochage de la France en matière de recherche ? En dépit d'une hausse des financements, on perd des places au niveau international. Est-ce seulement une question de moyens ou bien faut-il aussi s'interroger sur les formations ?
Le Gouvernement a utilisé des crédits du plan de relance pour faire face à la hausse du nombre d'étudiants. Cela constitue un dévoiement préjudiciable de ce plan, qui ne permet pas, en outre, de préparer l'avenir, car le nombre d'étudiants devrait continuer à augmenter. Enfin, on compte 60 créations de postes d'assistantes sociales pour les étudiants, soit une pour deux départements. Est-ce suffisant pour rattraper le retard ?
M. Jean-Claude Requier. - On compte 68 000 étudiants de plus à l'université depuis 2018. Cette hausse s'explique par un taux élevé de réussite au bac. Pourra-t-on à l'avenir accueillir les nouveaux étudiants dans de bonnes conditions ? Faut-il craindre une baisse de niveau à l'université ?
M. Claude Raynal, président. - Des crédits de la mission « Défense » sont mobilisés pour renforcer ceux de la « Recherche » dans le domaine spatial. Il me semble que l'existence d'interactions entre la recherche et la défense est naturelle. Je ne comprends pas les réserves de nos rapporteurs à cet égard.
Mme Christine Lavarde. - Comment l'Institut français de recherche pour l'exploitation de la mer (Ifremer) perçoit-il le développement des prérogatives de l'Office français de la biodiversité (OFB) en matière maritime ? Craint-il d'être absorbé, à terme, par l'OFB ?
M. Claude Raynal, président. - On passe du spatial aux fonds marins !
Mme Christine Lavarde. - Je ne fais que suivre les annonces du Président de la République, qui passe d'un sujet à l'autre...
Mme Vanina Paoli-Gagin, rapporteur spécial. - Vous avez raison de poser la question de l'accueil à l'université de promotions d'étudiants toujours plus nombreuses, en raison de la hausse du taux de succès au bac. Ce taux a d'ailleurs été particulièrement élevé en 2020 à cause de la crise sanitaire. Mais le ver est dans le fruit depuis 1985, date où l'on a fixé l'objectif d'amener 80 % d'une classe d'âge au baccalauréat. Cette réforme a eu des effets pervers. Tout le monde ne peut réussir à l'université, et on a détourné de nombreux jeunes de filières, de métiers qui sont tout aussi nobles que les études supérieures. Le résultat est que la dépense par étudiant diminue, faute de moyens. Notre rapporteur général a raison, le recours à des crédits du plan de relance constitue une forme de dévoiement de ce plan, mais il n'y avait sans doute pas d'autres solutions à court terme. En tout cas, la question de l'avenir reste posée. La hausse du nombre d'étudiants est structurelle : je déplore le manque d'anticipation depuis des années. On consacre moins de moyens à nos étudiants que nos voisins, donc on a moins de résultats en matière de recherche. Il conviendrait qu'une structure comme le haut-commissariat au plan s'interroge sur la pyramide des âges et propose des mesures pour préparer la France.
Évidemment, 60 assistantes sociales, c'est trop peu, même si avec le dispositif Santé Psy Étudiants, les étudiants en situation de mal-être peuvent bénéficier de consultations gratuites avec des psychologues.
M. Jean-François Rapin, rapporteur spécial. - Le décrochage en matière de recherche est notamment dû au fait que les crédits alloués à l'ANR ont été sous-calibrés pendant plusieurs années. On essaie chaque année de rattraper le retard, mais on ne trace pas de perspectives ambitieuses pour aller au-delà. Voilà cinq ans que je réclame un milliard d'euros pour la recherche : on y est cette année, cela permettra de soutenir 25 % des projets déposés, contre 11 % à 16 % auparavant. On rattrape le retard, mais pas plus, et tant qu'un effort massif ne sera pas effectué pour la recherche, la France n'atteindra pas ses objectifs.
J'ai l'impression que nos chercheurs sont tentés de se tourner vers les projets de recherche européens, plus faciles d'accès et mieux financés. À terme, l'ANR pourrait devenir l'organisme de recherche de la souveraineté française. Cela lui donnera peut-être un nouveau souffle.
En ce qui concerne le spatial, 150 millions d'euros de crédits sont inscrits à la fois dans la loi de programmation militaire et dans la loi de programmation de la recherche. Mais il s'agit en fait d'un transfert de crédits de la première vers la seconde. C'est un jeu de bonneteau, les crédits ne s'additionnent pas ! D'où nos réserves.
Madame Lavarde, je ne pense pas que l'OFB souhaitera intégrer à terme l'Ifremer, un organisme qui coûte très cher, car le renouvellement de la flotte océanographique était estimé il y a deux ans à 500 millions d'euros d'investissements sur quinze ans. Il est normal que les deux organismes travaillent ensemble, car l'OFB s'enrichit des travaux de l'Ifremer, mais les deux n'ont pas, me semble-t-il, vocation à fusionner. En outre, l'Ifremer a une vocation européenne et internationale.
La commission décide de proposer au Sénat d'adopter, sans modification, les crédits de la mission « Recherche et enseignement supérieur ».
La réunion est close à 18 h 35.
Mercredi 17 novembre 2021
- Présidence de M. Claude Raynal, président -
La réunion est ouverte à 9 h 05.
Projet de loi de finances pour 2022 - Mission « Écologie, développement et mobilité durables » - Compte d'affectation spéciale « Financement des aides aux collectivités pour l'électrification rurale (FACÉ) » - Programmes « Paysages, eau et biodiversité », « Prévention des risques », « Énergie, climat et après-mines », « Service public de l'énergie » et « Conduite et pilotage des politiques de l'écologie, du développement et de la mobilité durables » - Programmes « Infrastructures et services de transports », « Affaires maritimes » et « Charge de la dette de SNCF Réseau reprise par l'État » - Budget annexe « Contrôle et exploitation aériens » - Programme « Expertise, information géographique et météorologie » - Examen des rapports spéciaux
M. Claude Raynal, président. - Nous en venons à l'examen des crédits de la mission « Écologie, développement et mobilités durables », pour lesquels quatre rapporteurs spéciaux sont compétents. M. Hervé Maurey est excusé ce matin.
Mme Christine Lavarde, rapporteur spécial des programmes « Paysages, eau et biodiversité », « Prévention des risques », « Énergie, climat et après-mines », « Service public de l'énergie » et « Conduite et pilotage des politiques de l'écologie, du développement et de la mobilité durables » de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » et du compte d'affectation spéciale « Financement des aides aux collectivités pour l'électrification rurale (FACÉ) ». - Les crédits de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » augmentent de 500 millions d'euros par rapport à l'an passé, soit une hausse de 2,4 %. Pour les programmes dont je suis rapporteur, la hausse s'élève à 200 millions, mais celle-ci ne fait que compenser à moitié la baisse des crédits enregistrée l'année dernière.
Le ministère de l'écologie est un des seuls, avec le ministère des finances, à avoir supporté des baisses d'effectifs au cours du quinquennat. Le schéma d'emplois était particulièrement restrictif lors des exercices précédents. Cette année, la baisse est moins forte, car le projet de loi de finances ne prévoit qu'une réduction de 224 ETP ; les baisses sont supportées par l'administration centrale, les effectifs à l'échelon départemental étant préservés. Les opérateurs de la mission sont aussi épargnés. Le plafond d'emplois de l'office français de la biodiversité (OFB), qui aurait dû voir ses effectifs diminuer, est finalement maintenu inchangé. Toutefois, la question des effectifs n'est pas réglée. Ainsi l'Agence de la transition écologique (Ademe) comme l'OFB ont recours à des intérimaires, dont le coût salarial est plus élevé, pour mettre en oeuvre le plan de relance, et sans doute demain France 2030. On peine à comprendre pourquoi on recrute des ETP pour des missions conjoncturelles, comme la gestion de la crise sanitaire, et pourquoi on le fait pas pour des missions pérennes...
J'ai déjà eu l'occasion de présenter le programme 113 « Paysages, eau et biodiversité » lors de la présentation de mon contrôle budgétaire sur les aires protégées. Celles-ci sont gérées par une grande diversité d'acteurs, diversité qui se retrouve dans la répartition des crédits du programme : les ressources proviennent pour les trois quarts de reversements de redevances par les six agences de bassin. Alors que la France vient d'accueillir le Congrès mondial de la nature en septembre, la hausse des crédits est modeste : 5 millions d'euros sont prévus pour la nouvelle stratégie nationale biodiversité 2030 ; 3,5 millions permettront de renforcer les actions de lutte contre l'orpaillage illégal en Guyane ; 2,3 millions viennent renforcer le financement les missions d'intérêt général « biodiversité » de l'Office national des forêts. En somme, les financements ne sont donc pas à la hauteur des ambitions si l'on veut vraiment parvenir à protéger 30 % du territoire, dont 10 % sous protection forte. Je note aussi que les crédits supplémentaires au titre du plan de relance sont supérieurs aux crédits budgétaires du programme 113 : 300 millions d'euros sont ainsi prévus par exemple pour sécuriser les infrastructures de distribution d'eau potable, d'assainissement et de gestion des eaux pluviales.
J'en viens au programme 181 « Prévention des risques ». Le fonds de prévention des risques naturels majeurs, ou fonds « Barnier », voit ses crédits augmenter pour faire face aux suites de la tempête Alex. Après un abondement de 50 millions d'euros l'année dernière, le fonds bénéficie de 30 millions d'euros supplémentaires cette année pour financer des acquisitions de terrains. Toutefois, la question de la soutenabilité financière du dispositif à moyen terme reste posée dans la mesure où le risque de gonflement des argiles demeure.
L'Ademe est l'opérateur principal du programme. Ses effectifs augmentent pour que l'agence puisse remplir les nouvelles missions qui découlent de la loi Climat et de la loi relative à l'économie circulaire et à la lutte contre le gaspillage.
Les crédits inscrits au programme 345 « Service public de l'énergie » s'établissent à environ 8,5 milliards d'euros. Les montants sont très fluctuants : les charges de service public de l'énergie (CSPE) avaient augmenté en 2019 et 2020 en raison de la chute des prix de gros de l'électricité ; en 2021 et 2022, on observe le mouvement inverse et la Commission de régulation de l'énergie (CRE) a dû corriger en octobre ses estimations de juillet, estimant que le montant de la CSPE devrait être inférieur d'1,5 milliard pour 2021 et de 2,7 milliards d'euros pour 2022 à sa précédente évaluation. Le projet de loi de finances prévoit une minoration de seulement 415 millions par rapport à l'estimation du mois de juillet. Il faut donc s'attendre à des régularisations substantielles en 2023.
En ce qui concerne la répartition, des CSPE, le soutien aux énergies renouvelables (EnR) électriques représente 56 % de l'enveloppe, dont 60 % pour le photovoltaïque. Le Gouvernement escompte des économies potentielles liées à la révision des contrats photovoltaïques, mais rien n'est inscrit dans le budget : vu les retards dans la mise en oeuvre et l'existence d'une clause de sauvegarde, je maintiens mes doutes sur les économies escomptées.
Je craignais une bulle sur le dispositif de soutien au biométhane, car les charges bondissaient d'année en année. Elles doivent encore augmenter de 86 % en 2022. Heureusement, mais avec beaucoup de retard en dépit des messages d'alertes du régulateur, un nouvel arrêté tarifaire a été pris fin 2020, qui devrait réduire les charges dans le futur, mais un grand nombre de projets doit encore être mis en service aux anciennes conditions tarifaires.
Le soutien au nucléaire et à l'hydrogène relève pour l'instant plus de la communication que de l'action. Peu de crédits sont consacrés à ces filières. Au cours des neuf premiers mois de l'année 2021, seuls 35 millions de crédits ont été engagés pour la filière hydrogène et 4 millions décaissés. Le plan de relance consacre 200 millions au nucléaire, et France 2030 un milliard d'euros d'ici à 2030. Ces sommes sont très faibles au regard du soutien accordé aux EnR. Je ne sais pas si l'enveloppe de 1,9 milliard annoncée par le Président de la République hier à Béziers intervient en complément des 7 milliards déjà annoncés en septembre 2020, ou s'il s'agit d'un recyclage de crédits...
Le programme 174 « Énergie, climat et après-mines » concerne principalement l'efficacité énergétique. Les aides aux ménages augmentent de 30 % au travers de deux dispositifs.
MaPrimeRénov', tout d'abord. Le nombre de demandes augmente très fortement. L'étude d'impact réalisée dans le rapport dirigé par Benoît Coeuré sur la mise en oeuvre du plan de relance est critique : la plupart des dossiers concernent des monoactions qui ont un effet assez faible sur les émissions de gaz à effet de serre et sur l'amélioration thermique des bâtiments, tandis que les rénovations globales, qui ont le plus d'effet pour réduire la consommation d'énergie, sont très minoritaires.
Les aides à l'achat de véhicules propres, ensuite. La pénurie de semi-conducteurs met le secteur automobile sous pression. Le durcissement des critères du bonus écologique et de la prime de conversion qui devait avoir lieu en janvier sera reporté au 1er juillet 2022, soit juste après les élections... Je ne sais pas si ce durcissement sera à nouveau reporté si les tensions sur le secteur automobile perdurent. Le secteur des transports connaît des difficultés pour assurer la transition, car les véhicules lourds propres n'ont pas les mêmes caractéristiques que les véhicules thermiques. Cela est perceptible à travers le taux de recours aux dispositifs de soutien : ainsi, seuls 320 000 euros sur 100 millions de crédits ouverts ont été décaissés pour l'acquisition de véhicules lourds propres, ce qui représente sept bus et quatre camions... Cela me semble insuffisant pour décarboner le secteur des transports !
Pour toutes ces raisons, je vous proposerai d'émettre un avis défavorable sur les crédits des programmes de la mission dont je suis rapporteur.
Le montant des aides versées par le FACÉ sera stable en 2022, mais les crédits du plan de relance se déploient laborieusement, puisque seuls 0,001 % des crédits de paiement ont été utilisés à la fin du mois de septembre.
L'article 42 septies augmente le plafond de la fourchette de contribution de l'OFB aux parcs nationaux. Je n'ai pas d'objection, même s'il s'agit d'un jeu à somme nulle : on prend à l'un pour donner aux autres.
L'article 42 octies soulève des enjeux plus importants. Il concerne la mise en oeuvre du bouclier tarifaire sur le gaz. La hausse du prix du gaz frappe les consommateurs de gaz, mais a aussi des répercussions sur les consommateurs d'électricité. Comme les énergies renouvelables sont appelées en priorité sur le réseau de distribution d'électricité, quand leur production ne suffit plus, il faut recourir à des centrales thermiques à cycle combiné qui utilisent du gaz, ce qui explique que le coût marginal de l'électricité soit élevé lorsque le prix du gaz est élevé. Pour limiter la hausse de la facture des ménages, le Gouvernement a décidé de créer un bouclier tarifaire, pour que les fournisseurs ne répercutent pas les hausses de prix sur le tarif réglementé. Pour aider les fournisseurs, le Gouvernement se réserve la possibilité de diminuer la taxe intérieure de consommation sur le gaz naturel (TICGN) en 2022, mesure dont le coût est estimé à 1,2 milliard d'euros. Si les fournisseurs n'arrivent pas à récupérer les sommes non perçues durant le gel tarifaire, l'article 42 octies prévoit que les pertes puissent être compensées par le budget de l'État, sous la forme de charges de service public de l'énergie, par le biais du programme 345. Avant sa budgétisation, le niveau des charges de service public de l'énergie était ajusté automatiquement en fonction des charges réellement constatées. La réforme introduit des charges supplémentaires destinées à protéger les consommateurs. Cet article met en oeuvre concrètement ce dispositif. J'émets donc un avis favorable, tout en soulignant que cela ne suffira pas si la hausse des prix du gaz, due notamment à des tensions géopolitiques avec les pays fournisseurs, perdurait.
M. Stéphane Sautarel, rapporteur spécial des Programme 203 « Infrastructures et services de transports », programme 205 « Affaires maritimes », programme 365 « Charge de la dette de SNCF Réseau reprise par l'État ». - Je vous prie d'excuser l'absence, pour des raisons de santé d'Hervé Maurey, corapporteur des programmes 203 « Infrastructures et services de transports », 205 « Affaires maritimes » et 365 « Charge de la dette de SNCF Réseau reprise par l'État » de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » que je vais vous présenter.
Les investissements dans les infrastructures de transports et le respect des trajectoires fondamentales qui ont été fixées dans la loi d'orientation des mobilités (LOM) dépendent très largement du budget de l'Agence de financement des infrastructures de transports de France, l'Afitf. Or, il existe un décalage entre le caractère certain des dépenses pluriannuelles qu'elle porte et la grande volatilité de certaines des recettes qui lui sont affectées, au premier rang desquelles l'écocontribution sur le transport aérien et les amendes radars. Chaque année, c'est à nouveau le cas en 2021 avec le PLFR que l'on examine en ce moment même, l'Afitf doit aller quémander des subsides dans le collectif budgétaire de fin d'année pour compenser l'insuffisance de ses recettes effectives et respecter la trajectoire d'investissement de la LOM. Cette situation n'est à l'évidence pas satisfaisante et doit conduire à réviser le panier de ressources de l'Afitf pour le sécuriser.
Par ailleurs, au cours de nos auditions nous avons été alertés sur une nouvelle fragilité dans les ressources de l'Afitf. Parce qu'elles contestent une évolution de la taxe d'aménagement du territoire, les sociétés concessionnaires d'autoroutes ont refusé de verser à l'Afitf la contribution annuelle de 61 millions d'euros qu'elles lui doivent. L'Afitf est étrangère à ce contentieux entre l'État et les sociétés d'autoroute, et il n'est pas normal qu'elle en fasse les frais et avec elle le financement des infrastructures.
Nous tenons également à souligner qu'il n'est pas dit que les trajectoires de la LOM auraient pu être tenues sans les crédits du plan de relance qui permettent notamment de financer le canal Seine-Nord Europe et la ligne Lyon-Turin. Ces deux opérations n'étaient pas intégrées à la trajectoire fixée par la LOM et leur financement aurait pu conduire à remettre en cause cette dernière.
Si les prévisions de recettes de l'Afitf pour 2022 sont plus prudentes et plus sérieuses que les estimations fantaisistes de la loi de finances pour 2021, nous restons très dubitatifs sur le niveau de recettes attendues de l'écocontribution sur le transport aérien fixé à 91 millions d'euros.
À condition que l'Afitf dispose bien des ressources attendues et grâce aux financements complémentaires alloués en faveur du canal Seine-Nord Europe et de la ligne Lyon-Turin, la trajectoire d'investissement prévue par la LOM devrait pouvoir être respectée en 2022.
Les crédits du programme 203 augmentent de 3 %. Les financements dédiés à l'entretien du réseau routier national poursuivent leur progression et permettront de respecter l'objectif de la LOM, même s'il manque toujours une dizaine de millions d'euros pour les ponts du réseau routier national. La contribution de l'État à l'exploitation des lignes intercités doit atteindre 300 millions d'euros en 2022, mais son montant effectif dépendra de la nouvelle convention que l'État doit signer avec SNCF Voyageurs. En ce qui concerne le fret ferroviaire, l'État a présenté cette année la stratégie qui doit permettre de doubler sa part modale d'ici à 2030. Elle passe notamment par un maintien des aides à l'exploitation qui avaient été instaurées en 2021. Le PLF 2022 les confirment en effet.
L'Agence de régulation des transports, l'ART, s'est vu confier de nombreuses nouvelles missions ces dernières années. En conséquence, ses effectifs ont augmenté de 62,5 équivalents temps plein travaillés (ETPT) en 2015 à 102 ETPT en 2022. Pour autant, sa subvention pour charges de service public avait stagné jusqu'en 2021. L'ART doit ainsi puiser chaque année un peu plus dans ses réserves pour financer ses charges de fonctionnement. Cette situation est d'autant moins soutenable que l'agence est exposée à de nombreux contentieux de par ses activités et qu'elle est son propre assureur. La perte d'un conflit lié à un litige pourrait la mettre en grave difficulté. Pour cette raison, nous proposons un amendement qui vise à majorer de 4,6 millions d'euros la subvention de l'ART en 2022 afin de la porter à 18,6 millions d'euros.
Nous avons eu l'occasion de vous le signaler en septembre dernier à l'occasion du point d'étape de notre mission de contrôle, les modalités de financement du réseau ferroviaire nous préoccupent. Premièrement, nous ne sommes pas convaincus que les 2,9 milliards d'euros annuels prévus pour sa régénération soient suffisants au regard des décennies de sous-investissement et de l'ampleur de la tâche à accomplir. Notre inquiétude est même renforcée par de fâcheux antécédents. Par le passé, il est arrivé que l'enveloppe de régénération soit détournée de sa vocation et employée à d'autres fins, notamment pour financer des solutions alternatives à certains produits pour désherber les voies. Nous soulignons d'ailleurs, là encore, que, sans un concours exceptionnel de 4 milliards d'euros de l'État, la trajectoire de régénération aurait volé en éclats dès 2021. Cette aide était indispensable pour répondre à l'urgence, mais elle ne résout en rien les problématiques structurelles du financement du réseau et de la performance du gestionnaire d'infrastructures. L'actualisation du contrat de performance entre l'État et SNCF Réseau devait jouer ce rôle. Mais, là encore, force est de constater que le bât blesse. Ce contrat, qui vient d'être finalisé après maints et maints reports, ne donne pas de vision stratégique, notamment sur le périmètre du réseau qui, à terme, pourrait rester dans l'escarcelle de SNCF Réseau. Ce point est pourtant majeur pour déterminer l'effort de régénération.
Par ailleurs, nous déplorons qu'aucun financement ne soit prévu aujourd'hui en faveur de la modernisation du réseau. Les programmes de commande centralisée du réseau et de système européen de gestion du trafic ferroviaire - l'European Rail Traffic Management System (ERTMS) - présentent des coûts considérables estimés à 15 milliards d'euros pour le premier et à 20 milliards pour le second. Mais ils doivent permettre de générer des gains de performance non moins considérables. Je n'évoquerai pas les nouveaux engagements pris pour renforcer les lignes à grande vitesse (LGV), en contradiction avec les annonces de 2018, et qui ne sont pas financés à ce stade.
En juillet dernier, la Société du Grand Paris (SGP) a annoncé de nouveaux retards dans la mise en service du Grand Paris Express. En octobre, elle a réévalué le coût total du projet de 500 millions d'euros. Après ce nouveau surcoût, le projet est évalué à 36,1 milliards d'euros. Nous espérons ne plus avoir de mauvaises surprises dans le futur, mais les dérives passées en termes de délais comme de coûts nous incitent à la plus grande prudence.
Au 1er janvier 2022, l'État reprendra 10 milliards d'euros de la dette de SNCF Réseau. Cette opération constitue la deuxième étape de la décision prise par l'État en 2018 de reprendre 35 milliards de la dette accumulée par le gestionnaire d'infrastructures. L'engagement a été tenu et nous le saluons. Depuis des décennies la dette du gestionnaire d'infrastructures constitue le point noir du système ferroviaire. Elle résulte largement de sous-investissements de l'État dans un contexte de « tout TGV ». Néanmoins, cette mesure ne résoudra pas à elle seule les problématiques de performance du réseau ni même les perspectives financières du gestionnaire d'infrastructures qui demeurent préoccupantes, faute d'une réforme structurelle à la hauteur des enjeux.
Nous en venons enfin au programme 205 « Affaires maritimes », qui joue un rôle économique et social important et porte des fonctions régaliennes essentielles, la France disposant du deuxième domaine maritime le plus vaste du monde, avec plus de 5 000 kilomètres de côtes et 10 millions de kilomètres carrés de zone économique exclusive (ZEE), dont 97 % outre-mer.
En 2022, les crédits du programme augmentent de plus de 20 %, portés par les premières traductions de la concertation baptisée « Fontenoy du maritime », notamment en matière de formation des officiers navigants, et la création d'un fonds d'intervention maritime doté de 17,5 millions d'euros.
En conclusion, et en dépit des critiques que nous formulons sur le panier de recettes de l'Afitf ou encore le financement du réseau ferré, nous sommes favorables aux crédits des programmes 203, 205 et 355 que nous vous avons présentés, et nous appelons par conséquent à adopter les crédits de la mission « Écologie, développement et mobilité durables ».
M. Vincent Capo-Canellas, rapporteur spécial du programme « Expertise, information géographique et météorologie » de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » et du budget annexe « Contrôle et exploitation aériens ». - Le programme 159 « Expertise, information géographique et météorologie » regroupe les subventions pour charges de service public du Centre d'études et d'expertise pour les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (Cerema), de l'Institut national de l'information géographique et forestière (IGN) et de Météo-France.
Comme chaque année, du fait des trajectoires de rationalisation budgétaire exigeantes que poursuivent ces trois opérateurs, les crédits du programme 159 doivent baisser de 2 % en 2022 pour tomber à 472 millions d'euros.
Comme j'ai pu le souligner dans le rapport que je vous ai présenté en septembre, les missions de Météo-France deviennent de plus en plus sensibles en raison des conséquences des dérèglements climatiques. Météo-France doit anticiper et améliorer la précision des prévisions des phénomènes météorologiques extrêmes.
Pour cela, l'établissement vient de conclure un nouveau contrat d'objectifs et de performance dont la mise en oeuvre reste néanmoins conditionnée à la stabilisation des moyens et des effectifs de l'opérateur. Je rappelle que, depuis dix ans, Météo-France a conduit d'importantes transformations de son organisation et une rationalisation très profonde de son réseau qui se sont traduites par une réduction de 25 % de ses effectifs, une diminution des deux tiers de ses implantations territoriales et une baisse de près de 20 % de sa subvention pour charges de service public.
En 2019, pour la période 2018-2022, Météo-France a signé un contrat budgétaire avec la direction du budget. S'il se traduit par des trajectoires rigoureuses de diminution d'effectifs et de masse salariale, ce contrat donne de la visibilité budgétaire à l'établissement puisque l'État s'est engagé sur une trajectoire, certes en baisse, de la subvention qu'il verse à Météo-France. Les deux parties ont parfaitement tenu leurs engagements et je considère que les termes du contrat doivent être respectés jusqu'au bout. C'est aussi une question de crédibilité.
Cependant, depuis la signature du contrat, plusieurs nouvelles dépenses ont été imposées à l'opérateur. Elles ont conduit à remettre en cause les équilibres de l'équation budgétaire. Pour cette raison, je proposerai un amendement visant à majorer la subvention de Météo-France pour 2022 du montant de ces dépenses nouvelles, soit 5,8 millions d'euros. Il s'agit, premièrement, de compenser le surcoût de 2 millions d'euros imposé à l'établissement pour la mise en ligne de ses données publiques, d'autant que cette publication permet à la concurrence de se développer ; deuxièmement de financer un dispositif de départ volontaire destiné à accompagner les suppressions d'effectifs demandées à l'opérateur, pour un montant de 2 millions d'euros ; et enfin, troisièmement, de tenir compte des conséquences financières de la décision nécessaire d'étaler partiellement les suppressions d'effectifs initialement prévues en 2022 sur l'exercice 2023, ce qui représente 1,8 million d'euros.
Le Cerema se trouve quant à lui dans une situation très délicate.
D'une part, il se cherche un avenir qu'il pourrait trouver, à la faveur du projet de loi relatif à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l'action publique locale, dit « 3DS », dans un système de « quasi-régie » conjointe entre l'État et les collectivités locales - ces dernières pourraient passer des commandes directement au Cerema.
D'autre part, ses effectifs et sa subvention pour charges de service public se sont contractés de 20 % depuis 2014. Les efforts de rationalisation conduits par l'établissement depuis 2017 sont profonds. En juin dernier, un rapport commun de l'inspection générale de l'administration (IGA) et du Conseil général de l'environnement et du développement durable (CGEDD) a dressé un constat alarmiste, en des termes très forts, considérant que les trajectoires de diminution des moyens de l'établissement le conduisaient vers une impasse. Le rapport, contesté par les tutelles, évoquait notamment des « injonctions contradictoires » adressées à l'organisme.
Après avoir entendu les différentes parties prenantes au cours de mes auditions, j'ai le sentiment que la nouvelle réduction d'effectifs de 40 ETP prévue dans le cadre du projet de loi de finances 2022 n'est pas soutenable. C'est pourquoi je considère qu'il est nécessaire de l'annuler, et par l'amendement, que je vous propose, de majorer de 2 millions d'euros la subvention pour charges de service public de l'opérateur pour couvrir le coût de cette stabilisation de ses effectifs. Le rapport que j'ai cité évaluait même le besoin à 10 millions. Je souligne que ces dernières années le Cerema a surexécuté, pour des raisons techniques, les diminutions d'ETP qui lui étaient demandées. Or le schéma d'emplois s'applique sur l'exécution de l'année précédente sans qu'il soit ajusté par les efforts complémentaires réalisés par l'établissement. En conséquence, le Céréma se distingue par un effectif réel très nettement inférieur à son plafond d'emploi autorisé en loi de finances.
J'en viens à présent au budget annexe « Contrôle et exploitation aériens », dit « BACEA ». Dans la mesure où il est exclusivement financé par le secteur du transport aérien vous comprendrez que son équilibre budgétaire est totalement bouleversé depuis 2020, en raison de la chute du trafic aérien.
La crise du transport aérien est sans équivalent historique et la reprise observée en 2021 reste fragile. Selon les dernières projections, le trafic 2021 devrait se situer entre 30 % et 40 % de son niveau de 2019. Pour 2022, la direction générale de l'aviation civile (DGAC) mise sur un trafic à 67 % de son niveau d'avant la crise. Cette hypothèse semble raisonnable. Un retour du trafic à son niveau de 2019 n'est pas attendu avant au mieux 2024. Déjà fragiles avant la crise, les compagnies aériennes françaises sont dans une situation délicate. Leurs pertes cumulées ont dépassé les 5,5 milliards d'euros en 2020.
Après s'être effondrées de plus de 60 % en 2020, les recettes du BACEA remontent à la faveur de la reprise du trafic. En 2022, une progression de 38 % est attendue. Cependant, cette hausse trouve également son origine dans une augmentation des redevances de navigation aérienne qui pourrait nuire à l'équilibre financier très précaire des compagnies. En raison du mécanisme de correction, le paradoxe est que la baisse du trafic s'accompagne d'une hausse du coût des redevances. J'ai eu plusieurs échanges avec les compagnies et la DGAC pour tenter de trouver une solution. Il semble que la DGAC prévoie des augmentations moins élevées que ce qui avait été envisagé pour la redevance pour services terminaux, qui concerne les compagnies basées en France, car le trafic intérieur reprend de façon plus vigoureuse que le trafic international.
Les taux de redevances pour 2022 doivent être proposés cette semaine à la Commission européenne. Je note que pour la période de crise, l'Union européenne autorise, de manière exceptionnelle, les États membres à prendre des mesures budgétaires pour éviter des augmentations insoutenables des redevances. J'aimerais que le Gouvernement étudie sérieusement cette possibilité qui est mise en oeuvre par l'Espagne.
Pour la première fois depuis 2017, la DGAC va supprimer des effectifs : 76 ETP. Les recrutements de contrôleurs aériens diminuent du fait de la baisse de trafic. Je tiens à rappeler néanmoins que, ces dernières années, les capacités insuffisantes de la direction des services de la navigation aérienne (DSNA) étaient l'une des causes de sa performance très insuffisante. Je constate que les évolutions des effectifs opérationnels de contrôleurs aériens arrivent souvent à contretemps, car cinq années sont nécessaires pour les former. La France est très en retard en Europe pour le contrôle aérien. Le trafic évolue, avec une baisse du trafic d'affaires et une augmentation de la part du trafic de loisir, avec des pics le week-end, ce qui oblige à repositionner les contrôleurs pour y faire face. Des mesures ont été prises. Il faut les soutenir, pour éviter que la France ne soit un facteur de blocage en Europe.
L'amélioration de la qualité du service délivré par la DSNA passera avant tout par l'aboutissement des grands programmes de modernisation de la navigation aérienne. Après avoir accumulé les retards et les surcoûts, je me félicite que le programme de modernisation du contrôle aérien dit « 4-Flight » commence enfin à être déployé en 2022, à Reims, et que les dépenses d'investissements dédiées à ces programmes progressent de 7,5 millions d'euros. Cette modernisation est essentielle.
La dette du BACEA va continuer de gonfler en 2022, à cause de la baisse du trafic, pour dépasser les 3 milliards d'euros. Elle devrait continuer d'augmenter au moins jusqu'en 2024.
Je tiens également à souligner qu'à ce stade le PLF 2022 ne comporte aucune mesure visant à compenser les pertes de recettes de taxe d'aéroport et de taxe sur les nuisances sonores aériennes. Je le regrette et j'espère que le Gouvernement proposera des mesures en ce sens. Mieux vaut tard que jamais.
Notamment car il permet de maintenir l'effort indispensable visant à mettre en oeuvre les grands programmes de modernisation de la navigation aérienne, je souhaite que la commission propose au Sénat d'adopter les crédits du budget annexe. Un rapport des inspections générales souligne les efforts en cours.
En ce qui concerne le programme 159 de la mission « Écologie, développement et mobilité durables », je suis favorable à l'adoption des crédits modifiés par les deux amendements que je vous propose.
En conclusion, j'en viens à l'article 60 rattaché au budget annexe « Contrôle et exploitation aériens » qu'il me revient de vous présenter et que je vous propose d'adopter.
Cet article prévoit de fixer dans la loi les règles applicables aux exploitants d'aérodromes au terme de leur gestion en ce qui concerne certaines sommes qu'ils détiennent et qui n'ont pas trouvé à être employées pour financer les opérations auxquelles elles sont spécifiquement affectées avant la fin de l'exploitation. Il s'agit notamment des soldes des recettes de taxe d'aéroport, qui servent à financer les dépenses de sécurité et de sûreté aéroportuaires, des recettes de taxe sur les nuisances sonores aériennes (TNSA) utilisées pour financer les opérations d'atténuation des nuisances sonores à proximité des aéroports ou, pour les aéroports appartenant à l'État, des sommes perçues pour le financement du service public aéroportuaire.
L'article précise les conditions dans lesquelles ces soldes sont transférés de l'ancien vers le nouvel exploitant de l'aéroport.
Ces dispositions apparaissent nécessaires pour garantir la sécurité juridique de pratiques qui sont appliquées aujourd'hui par l'État et les exploitants d'aéroports.
M. Arnaud Bazin. - Je lis que les frais de gestion de la CSPE représentent 13,9 % du montant. Comment expliquer ce niveau élevé ? Doit-on craindre que ce pourcentage augmente avec la baisse de la CSPE ?
Le programme de modernisation du contrôle aérien, qui a connu bien des vicissitudes, avance-t-il ?
M. Marc Laménie. - Merci à nos rapporteurs, dont la tâche n'est pas simple... Ma question s'adressera à Stéphane Sautarel. Si la reprise de la dette de SNCF Réseau, d'un montant de 35 milliards d'euros, semble réglée, la situation de SNCF Réseau n'en demeure pas moins très préoccupante. Y a-t-il à ce sujet des perspectives positives ?
En ce qui concerne la « régénération » du réseau, je souhaiterais savoir ce que recouvre ce terme : s'agit-il seulement des travaux de voies et d'infrastructures ou aussi des ouvrages d'art, ponts, viaducs et tunnels ? Par ailleurs, quels sont les besoins financiers nécessaires en la matière ? Enfin, quel rôle peuvent jouer les collectivités territoriales ?
Mme Vanina Paoli-Gagin. - Je poserai trois questions, qui s'adressent particulièrement à Christine Lavarde. Au sujet des 2,3 millions d'euros venant renforcer les missions d'intérêt général de l'Office national des forêts (ONF), le fonctionnement est-il couvert par ce montant ? Peut-on rassurer nos communes forestières à cet égard ?
De plus, il me semblait que la somme d'1,9 milliard d'euros, annoncée en faveur des nouvelles technologies dédiées à l'hydrogène, s'ajoutait aux 7 milliards d'euros déjà prévus suite aux annonces faites en septembre 2020. Pourriez-vous préciser ?
Enfin vous déplorez, et on ne peut que partager votre ressenti, la lenteur du déploiement du plan de relance en ce qui concerne MaPrimRénov' et la rénovation thermique. Cette lenteur est-elle due aux problèmes d'approvisionnement en matières premières et aux difficultés rencontrées dans le bâtiment pour recruter du personnel formé ?
M. Vincent Segouin. - Je poserai une question à chaque rapporteur. Tout d'abord, nous consacrons aujourd'hui 200 millions d'euros au nucléaire, 4,7 milliards d'euros aux EnR et 600 millions d'euros à l'hydrogène. La filière des EnR est donc toujours privilégiée, mais cela semble contraire à toutes les annonces, présidentielles et gouvernementales.
Ensuite, le contrat de performance entre l'État et la SNCF n'est pas encore signé, et je me demande s'il le sera un jour... Nous continuons donc de compenser ses dettes sans trouver de solution et je m'interroge sur une telle gestion.
Enfin, sur le contrôle aérien, j'ai retenu que la France était devenue un élément bloquant au niveau européen, parce que nous ne parvenons pas à adapter les effectifs aux besoins du trafic. Cette situation pourrait finir par ressembler à celle que connaissent nos ports : je rappelle que l'on débarque aujourd'hui les marchandises à Amsterdam plutôt qu'au Havre, parce que les moyens y sont suffisants et adaptés.
M. Éric Bocquet. - Ma question s'adresse à Stéphane Sautarel, qui a fait état du contentieux entre les sociétés concessionnaires d'autoroutes et l'Agence de financement des infrastructures de transport en France (Afitf), concernant le versement d'une contribution pour un montant de 61 millions d'euros, dont ces sociétés contestent l'évolution. Pourriez-vous préciser sur quoi porte la contestation ? Le Gouvernement s'exprime-t-il sur le sujet ? Est-ce le fait d'un seul concessionnaire ou sont-ils unanimes ? Je rappelle ici les travaux de la commission d'enquête menée par notre collègue Vincent Delahaye, qui avaient établi que les concessions d'autoroutes seraient rentables dès 2022, avec des bénéfices annuels évalués à 3,1 milliards d'euros par an, soit 350 000 euros par kilomètre et par année...
M. Roger Karoutchi. - Le budget de la Société du Grand Paris (SGP) atteint à présent 36,1 milliards d'euros. Dans le cadre d'un rapport, nous avons entendu il y a quelques mois des dirigeants de la SGP, qui s'étaient engagés à la fin des dérapages et des surcoûts. Je rappelle que le projet initial était évalué à environ 22 milliards d'euros, qu'il a connu l'augmentation progressive que nous savons et je prédis tranquillement que la facture finale tournera plutôt aux alentours de 40 milliards d'euros. Nous avons été témoins d'une gestion délirante et je n'ai jamais observé aussi peu de contrôle et de cadrage. J'ignore comment on finira par payer ces surcoûts considérables.
Dans le même temps, la SNCF annonce 1,6 milliard de surcoût pour Éole, et demande aux collectivités locales de payer, les menaçant même d'arrêter les travaux si elles refusaient de le faire ! Et devant l'annonce hallucinante de ce surcoût, je n'entends aucune réaction de la part du ministère des transports, et j'ignore par ailleurs où en est l'intervention auprès du ministère des présidents des conseils départementaux des Yvelines et des Hauts-de-Seine, qui se demandent comment gérer ce surcoût. Auriez-vous des éléments de réponse à ce sujet ?
M. Vincent Delahaye. - Je faisais partie du groupe de travail sur le Grand Paris Express et je suis toujours favorable à ce que les grands projets d'investissement comme celui-ci, qui apportent une valeur ajoutée à un territoire, puissent être financés en partie par ce territoire, par le biais d'une taxe sur les plus-values immobilières. Vous savez pourtant que je ne suis pas un partisan des impôts et des taxes, mais celle-ci me semble parfaitement justifiée sur le plan économique.
Je remercie Éric Bocquet pour ses commentaires sur la commission d'enquête. Le contentieux dont il est question porte sur l'indexation de la taxe d'aménagement du territoire (TAT) sur l'inflation, les sociétés concessionnaires d'autoroutes considérant que celle-ci devrait être stable, et que son évolution menacerait l'équilibre financier du contrat, ce qui semble aberrant quand on connaît leurs bénéfices. De plus, malgré leurs craintes quant à la récupération du trafic, cette année va s'avérer pour elles exceptionnelle. L'État montre-t-il un peu de fermeté face à ces sociétés ? Je trouve scandaleux qu'elles puissent refuser de verser ces 61 millions à l'Afitf.
Ma troisième question concerne l'autorité de régulation des transports (ART) que nous avons eu l'occasion d'entendre lors de cette commission d'enquête. Je ne suis déjà pas favorable aux amendements qui augmentent les dépenses, mais 4,6 millions d'euros supplémentaires, qui s'ajoutent aux 2,6 millions d'euros déjà proposés, cela représente une augmentation de 70 % en une seule année ! Malgré le travail de qualité effectué par l'ART, cette hausse semble énorme.
En outre, en ce qui concerne Météo-France, il me semble que lorsque l'on revoit un budget et des effectifs à la baisse, il faut revoir les missions dans le même sens. Or les missions de Météo-France sont trop détaillées. Nous avons besoin d'un organisme qui prévoit les catastrophes et les événements météorologiques importants, mais les usagers devraient payer s'ils souhaitent avoir accès à des informations plus détaillées, sachant que ces détails ne sont pas toujours conformes à la réalité observée...
Enfin, j'aimerais savoir quelles collectivités locales utilisent le Cerema. Dans mon département, je n'en ai jamais entendu parler, et je ne suis pas sûr que ce soit différent ailleurs. Serait-ce vraiment une catastrophe de supprimer cet organisme ?
M. Michel Canévet. - Ma première question porte sur l'Afitf : cette agence a-t-elle une utilité quelconque ? D'autre part, je m'interroge sur l'amendement proposé au sujet de l'ART. En effet, des fonds de roulement de six mois pour une institution me paraissent largement suffisants, et il ne me semble pas nécessaire d'augmenter indéfiniment ces fonds et les réserves de ces différentes agences dans lesquelles l'État investit. Si la motivation est l'éventuel contentieux qui pourrait survenir, il vaudrait mieux attendre qu'il advienne plutôt que d'abonder a priori.
M. Jean-Claude Requier. - Je ne comprends pas pourquoi la hausse des prix de l'électricité se traduit par une diminution des charges du service public de l'électricité (CSPE). Mon deuxième point concerne le compte d'affectation spéciale FACÉ. Les crédits du plan de relance se déploient très laborieusement et, à la fin du mois de septembre, 0,001 % ont héroïquement été consommés. Le programme est long à être mis en oeuvre parce qu'Enedis doit se prononcer sur des projets qui souvent ne relèvent pas de sa compétence.
Mme Isabelle Briquet. - Je voudrais commencer par une remarque générale sur Météo-France : les crédits de la mission connaissent une hausse - certes légère -, et pourtant, l'affaiblissement des opérateurs se poursuit et les effectifs du ministère de l'écologie continuent de diminuer. Ainsi, depuis 2018, le ministère a perdu 4 000 ETP, soit une perte de 12 % de ses effectifs. Si 2022 marque un ralentissement de cette baisse, on observe tout de même la suppression de 347 ETP. Parmi les opérateurs les plus touchés, on compte Météo-France, avec 60 ETP supprimés. J'ai bien noté les amendements visant le Cerema et Météo-France, et j'y souscris. Cependant, au vu des conséquences du réchauffement climatique et du lancement du second plan national d'adaptation au changement climatique, les attentes concernant Météo-France seront grandissantes. Comment gérer cette contradiction entre des moyens largement diminués et des demandes en forte hausse ?
M. Bernard Delcros. - Le Gouvernement a annoncé un plan en faveur des petites lignes ferroviaires ; où en est-on de sa mise en oeuvre ? Concernant l'Afitf, je m'associe sans réserve à la question posée par Éric Bocquet. Par ailleurs, il semble incroyable que cette agence soit prise en otage entre les sociétés de concessionnaires et l'État.
Enfin, quelles sont les perspectives pour le transport aérien en matière de carburant propre ? Des solutions sont-elles envisagées et si oui, à quelle échéance ?
M. Jean-Baptiste Blanc. - Ma question s'adresse à Vincent Capo-Canellas, qui nous annonce que le Cerema se cherche un avenir. J'avais compris que cet avenir pourrait se jouer à travers la mise en oeuvre de l'Observatoire national de l'artificialisation des sols, que le Cerema pourrait être l'outil de l'État dans le cadre de la loi Climat, en ce qui concerne la sobriété foncière, pour établir un diagnostic et aider les collectivités locales à appréhender ce sujet qui sera le sujet le plus important pour les territoires dans les années à venir : celui du zéro artificialisation nette (ZAN). Le Cerema ne pourrait-il pas s'inscrire dans ce dispositif et avoir ainsi une utilité et un avenir ? Un budget y est-il consacré ?
M. Philippe Dominati. - Je souhaiterais compléter l'intervention du président Karoutchi sur la SGP. La société connaît effectivement des dérapages, mais cela est le cas de tous les grands projets lancés par l'État, tels qu'Éole ou Meteor en Île-de-France. À chaque fois, le chiffrage du projet a été presque multiplié par deux dans sa mise en oeuvre et à chaque fois, des retards très importants ont été enregistrés. Par ailleurs, la liaison entre Charles-de-Gaulle (CDG) et Paris, le CDG Express, n'a pas été mentionnée. Son coût est pourtant incertain et le projet même est jugé inutile par un grand nombre d'acteurs, parmi lesquels Air France. De plus, ce projet se fait au détriment du RER B, et il devait être prêt, comme toutes les autres infrastructures, pour les jeux Olympiques (JO) ; autant de retards et de milliards qui s'accumulent, dans une quasi-indifférence et malgré l'urgence. Nous savons que le CDG Express sera structurellement déficitaire et c'est pour cette raison que la liaison n'avait pas été prévue dans le cadre de la création de la SGP. Cela avait d'ailleurs fait l'objet de vifs débats au Sénat. Le projet a finalement été lancé par ordonnance, même si l'on ignore comment il sera financé. Cette situation est préoccupante pour l'Île-de-France, et j'ai parfois l'impression d'être revenu quarante ou cinquante ans en arrière, au temps de la planification et des grands projets. La présidente de la région comme la maire de Paris ont d'autres préoccupations en ce moment... L'État aussi. Et en attendant, les Franciliens peinent, le RER B fonctionne mal, les équipements ne seront prêts qu'après les JO et un trajet avec le CDG Express coûtera plus cher qu'une course en VTC (voiture de transport avec chauffeur).
En ce qui concerne le transport aérien, la situation est presque aussi paradoxale puisque l'État consacre des milliards afin de sauver la compagnie nationale, sans gérer les plateformes aéroportuaires. Qui commande dans ce ministère ? Les entreprises publiques qui ont chacune leur propre politique ou le ministre qui assure un semblant de coordination ?
M. Gérard Longuet. - Ma question concerne le schéma de répartition des CSPE. D'après les chiffres qui nous sont présentés, les frais de gestion me semblent particulièrement élevés.
M. Vincent Capo-Canellas, rapporteur spécial. - Je répondrai tout d'abord à la question d'Arnaud Bazin sur le contrôle aérien, qui fait référence au programme 4-Flight. J'ai indiqué que ce programme serait déployé à partir du printemps à Reims, et j'ai prévu de me rendre sur place, car, effectivement, les dépenses sont importantes et les délais s'allongent. À la suite du rapport que je vous ai présenté il y a trois ans, des mesures ont été prises qui ont eu des effets insuffisants, et je ne trahis pas de secret en vous confiant que certaines personnes chargées de ces questions m'ont indiqué que mon rapport était toujours d'actualité.
Cependant, les services de navigation aérienne accueillent un nouveau directeur, qui vient du programme européen Single European Sky Air Traffic Management Research (SESAR) et semble être l'homme qui convient. Il faut le soutenir, ainsi que la DGAC, afin que soit poursuivi l'effort de rationalisation de ces programmes, et que l'industriel Thalès fasse sa part. Il s'agit de déployer le programme dans cinq centres en-route de la navigation aérienne - Reims, Athis-Mons, Brest, Aix-en-Provence et Bordeaux -, de former des contrôleurs, et d'opérer progressivement la bascule des programmes. La transition s'achèvera en 2026.
Vincent Segouin rappelait que la France créait des blocages en matière de contrôle aérien. De fait, elle compte à elle seule pour 40 % des retards enregistrés en Europe, bien qu'elle ne représente que 30 % du trafic. Ces retards ont de nombreuses conséquences. Tout d'abord, les avions qui nous survolent doivent parfois modifier leurs routes, ce qui entraîne des pertes de redevance et engendre plus d'émissions en rallongeant les distances. À cela s'ajoutent les grèves relativement courantes du centre d'Aix-en-Provence. Les retards désorganisent aussi les compagnies, la chaîne des sous-traitants et tous les services d'escale, et ces perturbations ont un coût. Il faut moderniser les programmes et parvenir à une plus grande agilité sociale afin de placer les contrôleurs au bon moment aux bons endroits. Des efforts ont été menés qui doivent être amplifiés, et nous faisons confiance aux nouvelles équipes.
Un véritable sujet demeure néanmoins. En effet, la DGAC fait tout, se contrôle elle-même, se certifie et se régule, et le désastre est contenu dans cette facilité. La direction souhaite à présent sauver son modèle ; elle a toutes les cartes en main et si elle n'était pas capable de le faire, il faudrait la démanteler.
En ce qui concerne la question de Vincent Delahaye, qui s'interrogeait sur une possible révision des missions de Météo-France, il me semble malheureusement que la pression s'exerce plutôt dans l'autre sens. On demande à l'établissement de prévoir plus tôt et au plus près. La France compte aujourd'hui l'un des trois premiers services météorologiques au monde et je ne perçois pas de volonté de déclasser ni de casser le réseau plus qu'il ne l'a déjà été. Certains pays ont des systèmes sans réseau, mais ils n'ont ni notre topographie variée ni les particularités climatiques qui lui sont liées. Qui pourrait aujourd'hui assumer de demander à Météo-France de faire moins ?
Les collectivités ont-elles recours au Cerema ? C'est une très bonne question... Le centre pourrait trouver un marché auprès des collectivités et répondre à une demande que le privé ne peut pas toujours satisfaire. Il possède des savoir-faire essentiels, notamment sur les routes, les ponts ou l'adaptation climatique pour les villes. J'ignore, Jean-Baptiste Blanc, si son savoir-faire couvre aussi la sobriété foncière ; il faudrait se pencher sur la question. Néanmoins, le Cerema a divisé le nombre de ses cibles par trois, effectuant un important travail de rationalisation. Tout le monde s'accorde aujourd'hui à dire que le ciblage des missions à la baisse doit cesser. Faut-il conserver cet outil ? Il me semble, pour la puissance publique, il conserve des savoir-faire. Cependant, la question du niveau des moyens demeure.
Isabelle Briquet soulignait la baisse des effectifs de Météo-France. Je n'imagine pas de ne pas donner suite au rapport que je vous ai présenté, et ces baisses sont effectivement importantes. J'émets toutefois une réserve : l'établissement a signé un contrat avec la direction du budget, et je pense qu'il faut le respecter. Cependant, sur des sujets qui ne sont pas couverts par le contrat nous pouvons compléter les financements, et c'est ce que je propose de faire par voie d'amendement.
En ce qui concerne la question posée par Bernard Delcros, sur la perspective des carburants propres pour le transport aérien, je commencerai par répondre que leur utilisation est efficace et qu'elle a un effet colossal sur la réduction des émissions. De plus, la perspective semble plus tangible que l'hydrogène, qui est un pari et nécessite un saut technologique. Les carburants verts sont une bonne solution. Reste cependant à résoudre la question des filières et l'État se montre faible à ce sujet ; il lui faudrait passer du discours à la pratique.
Je ne résiste pas à un petit commentaire sur le CDG Express, qui n'est pas dans mon programme, mais concerne la desserte de Roissy. Air France n'a pas vu avec faveur la possibilité d'une taxe sur les passagers, mais approuve bien sûr le concept d'une desserte directe entre son aéroport et la capitale ; c'est une question de compétitivité. Je signale également qu'un arbitrage du Premier ministre a été rendu récemment pour ne pas trop pénaliser le RER B, auquel 500 ou 600 millions des travaux bénéficieront aussi. L'étalement des travaux du CDG Express a été discuté avec la région Île-de-France qui s'est bien fait entendre, même si l'arbitrage rendu n'est pas tout à fait celui qu'elle espérait. Il faut rester vigilant et aller au bout de ce projet dans les meilleures conditions possibles.
M. Stéphane Sautarel, rapporteur spécial. - En réponse à Marc Laménie sur la reprise de la dette de la SNCF, je confirme qu'avec les 10 milliards d'euros prévus par le PLF pour 2022, nous répondons à l'engagement de reprise des 35 milliards d'euros. En ce qui concerne les crédits inscrits pour la régénération des lignes, ils s'élèvent à 2,9 milliards d'euros et correspondent à la trajectoire de la LOM telle qu'adoptée en 2019. Cependant, les besoins en termes de régénération s'élèvent plutôt à 4 milliards d'euros par an sur dix ans, soit 40 milliards d'euros. Je réponds au passage à Bernard Delcros sur l'exécution sur les petites lignes qui relèvent de ces crédits de régénération : l'objectif est aujourd'hui rempli à 58 %. J'en profite également pour rappeler que seuls ces crédits de régénération sont ici prévus, alors que les enjeux financiers sont plus larges, qu'il faudrait par ailleurs 15 milliards d'euros pour les commandes centralisées du réseau, afin de passer de 2 200 à 15 postes d'aiguillage, et que 20 milliards d'euros de besoins ne sont pas financés pour l'ERTMS, un système qui permet d'accroître la fréquence des trains sur les réseaux existants, qui existe chez nos voisins européens et sur lequel nous avons un retard très conséquent.
Pour répondre à Vincent Segouin sur le contrat de performance : c'est là le coeur du sujet. La signature de ce contrat ne cesse d'être repoussée. Il vient enfin d'être soumis au conseil d'orientation des infrastructures (COI). Ce contrat n'est pas à la hauteur de l'enjeu. Il fait l'impasse sur les choix stratégiques, les itinéraires ou les réseaux. Il ne répond ni aux priorités ni au partage de responsabilités entre l'État et les collectivités. Après la reprise de la dette par l'État, une règle a été mise en place pour éviter de nouveaux endettements. Mais si le contrat n'est pas clair, des injonctions contradictoires risquent de persister entre des objectifs mal définis et des moyens limités.
Éric Bocquet et Vincent Delahaye m'ont interrogé sur le contentieux entre l'État et les sociétés concessionnaires d'autoroutes. Je voudrais d'abord préciser qu'il s'agit bien d'une posture commune à l'ensemble de ces sociétés. Le contentieux oppose donc ces sociétés et l'État, l'Afitf n'étant qu'une victime collatérale. Il porte effectivement sur une indexation de la TAT sur l'inflation, et sur la volonté de l'État que cette augmentation ne se répercute pas sur les péages. D'après mes informations, l'État, et la direction générale des infrastructures, des transports et de la mer (DGITM) en particulier, ont l'intention d'aller au contentieux avec les sociétés concessionnaires sur ces questions. En attendant, cela crée une incertitude sur le versement des 61 millions d'euros à l'Afitf.
En ce qui concerne la SGP, nous sommes bien entendu inquiets des dérives et des retards. Les 500 millions supplémentaires aujourd'hui affichés pour parvenir à 36,1 milliards d'euros, correspondent à une révision de l'estimation des provisions. Par ailleurs, on observe une structuration de cette société, qui semble un peu mieux répondre aux enjeux, même s'il est permis de rester sévère. Nous avons notamment été frappés, durant les auditions, par une intervention des nouveaux responsables, qui nous ont expliqué qu'ils étaient passés d'une méthode artisanale à une méthode industrielle et, ce, de manière récente... Nous parlons tout de même d'un enjeu de plus de 36 milliards d'euros ! Cela ne manque pas d'inquiéter sur le mode de gestion jusqu'alors en place.
Par ailleurs, en ce qui concerne le financement, un rapport de Gilles Carrez suggérait en 2018 d'accroître de 200 à 250 millions supplémentaires les taxes qui permettent de financer cette opération. Des dispositions adoptées en lois de finances pour 2019 et 2020 ont augmenté le montant des taxes affectées à la société du grand Paris (SGP) sans néanmoins couvrir la totalité des besoins identifiés dans le rapport. En 2022, les taxes affectées à la SGP devraient représenter 800 millions d'euros. La principale source de financement de la SGP reste le recours à l'emprunt. Je ne reviens pas sur la question des retards, qui a été largement développée.
Sur les moyens de l'ART et l'amendement que nous proposons, je commencerai par rappeler que l'agence est passée de 62 à 102 postes entre 2015 et 2022, en lien avec des missions nouvelles confiées par l'État, sa subvention pour charges de service public passant de 11 millions d'euros à 11,4 millions d'euros. Aujourd'hui, le PLF pour 2022 propose d'atteindre 14 millions d'euros, et nous vous proposons de rajouter encore des crédits parce qu'il nous semble nécessaire de garantir ces six mois de fonds de roulement. En effet, l'ART est son propre assureur et des engagements très lourds nécessitent la consolidation de cette autorité indépendante, dont par ailleurs les travaux sont précieux pour le Parlement, afin d'éclairer certains sujets de façon neutre et transparente.
En ce qui concerne l'utilité de l'Afitf, je rappellerai que sa création répondait à une préoccupation structurelle d'« agencification » des services sur laquelle on peut s'interroger, et à un objectif de pluriannualité. Il s'agissait de donner une visibilité aux infrastructures par le financement via l'Afitf et les taxes affectées, afin d'assurer les programmes de réalisation des infrastructures que nous attendons tous. On peut aujourd'hui s'interroger quand on considère la difficile stabilité des recettes.
Mme Christine Lavarde, rapporteur spécial. - Je reviens sur une erreur qui a fait l'objet de deux questions, et je vous remercie pour votre lecture attentive, qui va nous permettre de la corriger. Sur la répartition des frais de gestion de la CSPE, il ne s'agit pas de 13,9 %, mais bien de 1,39 %. Malgré tout, ces frais de gestion s'élèvent à 117 millions d'euros, et correspondent à deux grands postes de dépense. D'une part, 67 millions d'euros couvrent les frais de gestion de la Caisse des dépôts et consignations, qui assure le rôle de compte bancaire dans l'interface entre la CSPE collectée et les versements faits aux fournisseurs de gaz et d'électricité, et dans les remboursements opérés, notamment pour les électro-intensifs. Ces frais de gestion sont définis par un arrêté, dont le dernier date du 3 juin 2021. D'autre part, des frais de gestion de 62,9 millions d'euros sont versés aux opérateurs, pour la mise en oeuvre des dispositifs d'obligation d'achat et de complément de rémunération. Le principal montant revient évidemment à EDF, pour 55 millions d'euros. Ces frais sont encadrés par une délibération de la CRE, dont la dernière date du 27 mai 2021. Dans ces frais de gestion, on retrouve aussi les intérêts, de 1,72 %, qui peuvent être versés aux opérateurs quand les charges prévues sont inférieures aux charges supportées ou, à l'inverse, versés à l'État quand les opérateurs ont reçu plus que ce qu'ils ont supporté. Cette année, seule EDF a perçu 12 millions d'euros d'intérêt. Enfin, Powernext perçoit aussi des frais de gestion, à hauteur de 348 000 euros, au titre de l'émission des garanties d'origine et de leur mise sur le marché.
Sur les questions liées à l'énergie, un amendement vient d'être adopté par les députés et la ventilation change chaque jour. Initialement, 7 milliards d'euros devaient être consacrés à l'hydrogène d'ici 2030 et nous apprenons hier que 2 milliards d'euros supplémentaires y seront consacrés suite à l'annonce du Président de la République. Il faudra que ces 2 milliards d'euros soient repris ailleurs... La ventilation des crédits comme la gouvernance sont floues, alors que nous parlons d'enjeux financiers importants et de secteurs structurants pour la compétitivité de notre pays.
En ce qui concerne le compte d'affectation spéciale FACÉ, le président Requier partageait mon constat. Je vais répondre au deuxième volet de sa question, sur l'augmentation des prix de l'électricité et la diminution des CSPE. Le soutien aux EnR prévoit que l'on paye aux acheteurs obligés - EDF et les entreprises locales de distribution - le différentiel entre le prix auquel ils sont contraints d'acheter les EnR et le prix auquel ils auraient fourni la même électricité en s'approvisionnant sur les marchés de gros. Quand ces marchés sont faibles, le différentiel est élevé et dès qu'ils augmentent, le différentiel baisse et les charges supportées par les opérateurs au titre de leur obligation d'achat sont plus faibles. Nous observons donc des mouvements très importants sur les charges 2021 et 2022, car les prix sur les marchés de gros se sont fortement appréciés.
Vincent Segouin faisait remarquer que la filière des EnR semble être privilégiée, mais il faut tenir compte du fait que la très grosse partie de ces charges ne sont pas imputables au gouvernement actuel. Sur les 56 % des charges correspondant aux EnR électriques, 60 % concernent le photovoltaïque, dont la plus grande partie correspond à des contrats antérieurs au moratoire de 2011. Beaucoup d'argent est donc dépensé, mais il ne s'agit pas tant d'une véritable politique du Gouvernement que de la continuité de l'État dans ses actions.
Enfin, pour répondre à Vanina Paoli-Gagin, l'ONF est un opérateur rattaché à la mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales », d'où proviennent ses financements. Les 2,3 millions d'euros que j'ai évoqués correspondent à une mission complémentaire, une mission d'intérêt général en matière de biodiversité, confiée à l'ONF, et qui se trouve financée par le programme 113, car elle diffère des projets de gestion de la forêt. Cependant, pour les communes forestières, un amendement a été adopté à l'Assemblée nationale, en seconde partie du présent projet de loi de finances.
M. Claude Raynal, président. - Je remercie nos trois rapporteurs spéciaux pour ces réponses détaillées. Passons à présent au vote sur les amendements qui vont vous être présentés.
M. Stéphane Sautarel, rapporteur spécial. - L'amendement n° II-1 vise à augmenter les crédits de l'ART de 4,6 millions d'euros, pour assurer un équilibre de ses charges qui permettrait d'établir ses ressources à 18,6 millions d'euros, et de stabiliser le fonds de roulement de six mois, au regard des enjeux juridiques à venir. Ce prélèvement s'opérerait à partir de l'action no 7 « Pilotage, support, audit et évaluations » du programme 217.
L'amendement n° II-1 est adopté.
M. Vincent Capo-Canellas, rapporteur spécial. - L'amendement n° II-3 porte sur le Cerema. J'ai indiqué qu'un rapport de l'inspection générale de l'administration et du conseil général de l'environnement et du développement durable concluait à une subvention pour charges de service public trop faible, et au fait que l'établissement était en déséquilibre depuis la fin 2019. Par ailleurs, le Cerema a surexécuté un certain nombre de suppressions de postes et chaque fois, Bercy repart de ce solde à la baisse. Tout le monde convient de la nécessité d'un geste et je vous propose qu'il soit à hauteur de 2 millions d'euros. C'est aussi une façon de faire respecter la voix du Parlement.
L'amendement n° II-2 concerne Météo-France. Un contrat budgétaire a été signé avec la direction du budget et il faut le respecter. Cependant, l'organisme s'est vu contraint d'assumer des dépenses : la mise en ligne et l'accès facilité à un volume considérable de données météorologiques publiques pour 2 millions d'euros ; l'accompagnement des profondes transformations de Météo-France et le dispositif de départ volontaire, pour 2 millions d'euros ; et enfin le schéma d'emplois de l'établissement étalé en 2023 pour 1,8 million. Il faut donc majorer de 5,8 millions d'euros la subvention pour charges de service public de Météo-France.
Les amendements n° II-2 et n° II-3 sont adoptés.
La commission décide de proposer au Sénat d'adopter les crédits de la mission « Écologie, développement et mobilités durables », sous réserve de l'adoption de ses amendements.
Article 42 septies
La commission décide de proposer au Sénat l'adoption, sans modification, de l'article 42 septies.
Article 42 octies
La commission décide de proposer au Sénat l'adoption, sans modification, de l'article 42 octies.
La commission décide de proposer au Sénat l'adoption, sans modification, des crédits du budget annexe « Contrôle et exploitation aériens ».
Article 60 (nouveau)
La commission décide de proposer au Sénat l'adoption, sans modification, de l'article 60.
La commission décide de proposer au Sénat l'adoption, sans modification, des crédits du Compte d'affectation spéciale « Financement des aides aux collectivités pour l'électrification rurale » (FACÉ).
- Présidence de M. Bernard Delcros, vice-président -
Projet de loi de finances pour 2022 - Mission « Relations avec les collectivités territoriales » (et articles 45 à 49) et compte de concours financiers « Avances aux collectivités territoriales » - Examen du rapport spécial
M. Bernard Delcros, président. - Nous examinons les crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » (et articles 45 à 49) et du compte de concours financiers « Avances aux collectivités territoriales »
M. Charles Guené, rapporteur spécial de la mission « Relations avec les collectivités territoriales ». - Les crédits demandés pour 2022 au titre de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » (RCT) s'élèvent à 4,6 milliards d'euros en autorisations d'engagement (AE) et 4,2 milliards d'euros en crédits de paiement (CP), soit une hausse respectivement de 9,8 % et 8,1 % par rapport à l'an passé.
Les crédits de la mission « RCT » ne représentent qu'une très faible part des transferts financiers de l'État aux collectivités territoriales (4,4 %), qui s'élèveraient à 105,5 milliards d'euros en 2022 et ils représentent 8,7 % des concours financiers de l'État aux collectivités territoriales.
Contrairement aux années précédentes au cours desquelles la première caractéristique de la mission « RCT » était la stabilité, le projet de loi de finances pour 2022 prévoit quelques évolutions avec la hausse des crédits alloués à certaines dotations.
Ainsi, la principale action de la mission concerne les dotations d'investissement au bloc communal. En projet de loi de finances pour 2022, cette action enregistre une hausse de 349 millions d'euros en AE et de 51,4 millions d'euros en CP.
En effet, les crédits de la dotation de soutien à l'investissement local (DSIL) ont été majorés de 337 millions d'euros en AE entre la LFI 2021 et le PLF 2022. Cet abondement permettra de soutenir en particulier les collectivités bénéficiaires du programme « Action coeur de ville ».
Par ailleurs, les CP de la dotation d'équipement aux territoires ruraux (DETR) enregistrent également une hausse de 14 millions d'euros, les AE restant stables à 1 046 millions d'euros depuis 2018, afin de couvrir les engagements en cours revus légèrement à la hausse pour s'ajuster au cycle des investissements.
La dotation de biodiversité, pour sa part, augmente de 10 millions d'euros en AE et en CP. Cette hausse prévue à l'article 46 du projet de loi de finances pour 2022 a été majorée de 4,3 millions d'euros par un amendement déposé par le Gouvernement et adopté à l'Assemblée nationale.
Les CP de la DSIL exceptionnelle passent de 100 à 276,1 millions d'euros afin de tenir compte de la montée en puissance de la consommation des CP.
Cette évolution des crédits de la mission s'explique également par des ouvertures de crédits sur les dotations des départements. En effet, la dotation de soutien aux projets des départements est majorée de 20 millions d'euros en AE et de 10 millions d'euros en CP afin d'améliorer l'attractivité du département de la Seine-Saint-Denis et de renforcer la qualité de vie de ses habitants conformément à l'engagement pris par le Gouvernement en octobre 2019.
De surcroit, il est créé une dotation exceptionnelle de 51,6 millions d'euros par l'article 48 du projet de loi de finances afin de compenser les pertes sur le dispositif de compensation péréquée (DCP) en raison de la réforme des impôts de production prévue par l'article 29 de la loi de finances pour 2021.
Enfin, il convient de souligner la hausse des crédits du programme 122 « Concours spécifiques et administration ». Cette augmentation de 33,4 % en AE et de 22,6 % en CP soit respectivement 64,9 millions d'euros en AE et 43,4 millions d'euros en CP résulte quasi exclusivement de l'abondement du fonds de reconstruction institué par la première loi de finances rectificative pour 2021 à la suite de la tempête Alex survenue dans les Alpes-Maritimes en octobre 2020.
Comme les années précédentes, nous vous proposons d'adopter les crédits de la mission.
M. Claude Raynal, rapporteur spécial de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » - Nous examinons également, le compte de concours financiers « Avances aux collectivités territoriales », qui voit notamment transiter le produit des impositions locales versées mensuellement par l'État aux collectivités territoriales : 114,8 milliards d'euros sont prévus à ce titre pour 2022 soit 2,4 milliards de plus qu'en loi de finances initiale pour 2021 qui correspondent au solde entre une hausse de 3,5 milliards d'euros sur le programme 833 et une baisse de 700 millions d'euros sur le programme 834.
Cette hausse notable des crédits du programme 833 résulte des différentes réformes de la fiscalité locale, en particulier la suppression de la taxe d'habitation et la réforme des impôts de production. Cette hausse tient au dynamisme des mécanismes de compensation mis en oeuvre : entre 2021 et 2022, le prélèvement sur les recettes de l'État au titre de la compensation de la réduction de 50 % des valeurs locatives de taxe foncière sur la propriété bâtie (TFPB) et de cotisation foncière des entreprises (CFE) des locaux industriels augmente de 352 millions d'euros ; soit plus de 10 % passant de 3,3 milliards d'euros à 3,6 milliards d'euros en raison du dynamisme des bases de ces impositions. La hausse constatée tient également à de la prise en charge par l'État de l'absence de prélèvement sur les petites communes surcompensées, entraînant mécaniquement une hausse des avances par douzième aux collectivités locales.
À l'inverse, aucune ouverture de crédits n'est demandée sur le programme 834, créé par la troisième loi de finances rectificative pour 2020 en réponse à la crise sanitaire pour soutenir les départements via des avances de droits de mutation à titre onéreux (DMTO), qui était doté de 700 millions d'euros en 2021. Cela s'explique par le maintien des DMTO en 2021 et des prévisions rassurantes pour 2022.
Nous vous proposons également de donner un avis favorable à l'adoption des crédits de ce compte de concours financiers.
M. Claude Raynal, rapporteur spécial. - L'article 45 réforme les modalités d'attribution de la dotation de soutien à l'investissement des départements (DSID), en prévoyant que la part dite « péréquation » de la dotation soit désormais gérée par le préfet de région de façon identique à la première part, c'est-à-dire selon une logique d'appel à projets.
Cette réforme aura un impact mineur sur les départements, la part actuellement libre d'emploi ne représentant pour la plupart d'entre eux que quelques centaines de milliers d'euros. En outre, elle permet d'aligner la DSID sur les autres dotations de soutien à l'investissement et améliorera le ciblage des projets. L'Assemblée des départements de France, que nous avons entendue sur ce point, n'y voit donc pas d'inconvénient.
Nous vous proposons d'adopter cet article sans modification.
M. Claude Raynal, rapporteur spécial. - L'article 45 bis aligne le calendrier de notification par le préfet des quatre dotations de soutien à l'investissement des collectivités. Il harmonise également les modalités de publication de la liste des opérations ayant bénéficié de ces dotations. Nous vous proposons d'adopter cet article sans modification.
M. Charles Guené, rapporteur spécial. - L'article 46 prévoit un élargissement des bénéficiaires de la dotation de soutien aux communes pour la protection de la biodiversité ainsi que la fixation d'un minimum de dotation pouvant être perçu par les communes bénéficiaires. Cet élargissement représente un coût de 10 millions d'euros financés en crédits « frais » dans le projet de loi de finances.
L'examen de l'article à l'Assemblée nationale a donné lieu à plusieurs apports importants. En premier lieu, les conditions d'éligibilité seraient assouplies : le taux minimum de couverture par un site Natura 2000 a été abaissé de 75 % à 50 %, et le bénéfice de la quatrième fraction de la dotation serait désormais ouvert aux communes figurant dans un décret portant classement ou renouvellement de classement d'un parc naturel régional et non plus nécessairement avoir adhéré à la charte d'un parc naturel régional. En outre, pour les seules communes bénéficiant de la dotation au titre de la fraction « parcs nationaux », le montant minimum de dotation serait porté de 1 000 à 3 000 euros.
Je me félicite de ces avancées, qui sont le fruit d'un travail commun que nous avons mené avec notre collègue Bernard Delcros et avec le Gouvernement.
Je regrette cependant que le Gouvernement entende financer cette mesure, qui représente un coût de 4,3 millions d'euros, par une minoration à due concurrence de la dotation globale de fonctionnement (DGF). Cela ne correspond pas à l'accord que nous avions conclu.
Nous vous proposons cependant d'adopter cet article sans modification.
M. Claude Raynal, rapporteur spécial. - L'article 47 prend diverses mesures en lien avec la répartition de la DGF en 2022 et des fonds de péréquation horizontale. Je n'entre pas dans le détail de l'ensemble des mesures proposées et me bornerai à présenter celles qui nous ont paru les plus problématiques.
L'article prévoit de 200 millions d'euros des composantes péréquées de la DGF, avec notamment une hausse de 95 millions de la dotation de solidarité rurale (DSR) et une hausse équivalente de la dotation de solidarité urbaine (DSU).
Toutefois, dans le même temps, un amendement adopté à l'Assemblée nationale a prévu une évolution des modalités de financement des besoins internes de la DGF, dans le sens d'une intensification de leur caractère péréquateur. Le nombre de communes qui verraient leur dotation forfaitaire « écrêtée » pour financer la péréquation verticale passerait de 21 000 à 15 500, soit une concentration assez importante du prélèvement.
Le contexte actuel de réforme des indicateurs financiers ne se prête pas, selon nous, à une telle évolution, dont les conséquences précises sont mal connues à ce jour. Nous vous proposons donc d'adopter l' amendement II.6 revenant sur ces dispositions.
L'article 47 prévoit également les conditions de la poursuite de la réforme des indicateurs financiers engagée en 2021 dans le sillage de la suppression de la taxe d'habitation, avec un élargissement du potentiel financier à de nouvelles ressources. Nous émettons un point de vigilance quant à l'intégration d'impôts comme la taxe locale sur la publicité extérieure ou la majoration de la taxe d'habitation sur les résidences secondaires qui, certes, accroissent la richesse des communes, mais comportent également une dimension incitative. Leur intégration au potentiel financier pourrait donc dissuader les communes de les instituer. Néanmoins, cette évolution est conforme aux délibérations du comité des finances locales et son impact serait somme toute limité.
Notre principal sujet de préoccupation concerne la révision proposée du calcul de l'effort fiscal, qui n'a fait l'objet d'aucune évaluation précise à ce jour. Présentée comme une simplification, la réforme conduit à retirer de la formule de calcul de l'indicateur les ressources intercommunales perçues par la commune. Cette évolution serait donc fortement pénalisante pour les communes appartenant à des intercommunalités fortement intégrées. Certaines évaluations qui circulent évoquent des diminutions d'effort fiscal pouvant aller jusqu'à 40 % dans certaines communes à l'horizon 2028, date de sortie de la réforme des indicateurs.
Dans l'attente de simulations détaillées sur son impact, nous vous proposons donc d'adopter un amendement II.7 supprimant ces dispositions. Nous voulons donner un signal au ministre sur la nécessité de revoir les choses. Mais l'année 2022 étant de toute façon une « année zéro » où l'impact de la réforme de la réforme est nul - ce qui est habile s'agissant d'une année électorale... - nous prenons le temps d'examiner les choses de plus près pour y revenir en PLF pour 2023.
M. Charles Guené, rapporteur spécial. - Nous vous proposons également d'adopter deux amendements II.8 et II.9, additionnels après l'article 47 et relatifs au fonds de péréquation des ressources intercommunales et communales (FPIC) reprenant les recommandations que nous avions formulées dans le cadre de notre récent rapport sur le sujet. Je les présente brièvement car nous avons déjà évoqué le sujet à cette occasion. Nous avons retenu seulement les amendements qui ne sont pas concernés par la réforme en cours des indicateurs.
L' amendement II.8 vise à instaurer un mécanisme de garantie de sortie pluriannuel pour les ensembles intercommunaux perdant l'éligibilité à une attribution au titre du FPIC. Un tel dispositif, que les élus locaux appellent de leurs voeux, nous paraît particulièrement nécessaire pour donner de la visibilité aux élus sur l'évolution de leurs ressources, dans un contexte bouleversé par la suppression de la taxe d'habitation et la réforme des indicateurs financiers que nous avons évoquées. Le système actuel de garantie de sortie, avec une dotation égale à 50 % de la dernière attribution la première année uniquement, nous semble trop brutal.
L' amendement II.9 vise à faire en sorte que 60 % des ensembles intercommunaux bénéficient effectivement d'une attribution.
L'application qui est aujourd'hui faite du critère d'effort fiscal agrégé conduit en effet à ce que l'attribution soit versée à 55 % d'entre eux environ, ce qui ne nous paraît pas conforme à l'esprit de la loi. Cela nous semble d'autant plus souhaitable que la répartition du reversement au titre du FPIC accorde une place plus importante aux critères de charges que la répartition du prélèvement.
M. Claude Raynal, rapporteur spécial. - L'article 47 bis prévoit que la liste des opérations subventionnées par de la DSIL ou de la DETR est publiée dans un format ouvert et réutilisable. Ce sont des ajustements somme toute mineurs et qui, dans la plupart des cas, rejoignent les pratiques existantes. Nous vous proposons d'adopter cet article sans modification.
M. Charles Guené, rapporteur spécial. - L'article 47 ter crée un fonds de solidarité régional, en lieu et place de l'actuel fonds de péréquation régional, afin de tirer les conséquences de l'attribution aux régions en 2021 d'une fraction de TVA en compensation de la suppression de leur part de cotisation sur la valeur ajoutée (CVAE). Ce nouveau fonds de péréquation serait alimenté en 2022 par 0,1 % de la fraction de TVA puis, les années suivantes, par 1,5 % de la dynamique de cette fraction.
L'article modifie également le calcul de la part de TVA affectée à chaque région en compensation. Celle-ci inclurait les attributions et prélèvements au titre du fonds de péréquation régional en 2020 et en 2021 et au titre du fonds national de garantie individuelle des ressources (FNGIR). Sur ce dernier point, nous avons souhaité revenir au texte de l'accord conclu entre l'État et les régions en septembre 2020. L'ajout de la prise en compte des contributions au titre de 2021 n'y figurait pas. De plus, cet accord initial prévoyait que serait appliqué à l'indice par habitant un retraitement conduisant à limiter l'impact de la péréquation pour certaines des régions contributrices, pris en charge par les autres régions. Nous vous proposons donc d'adopter l' amendement II.10, excluant du calcul de la fraction de TVA les contributions au titre de 2021 et mettant en place un système de retraitement à destination de certaines collectivités, afin de revenir au système proposé par les régions.
M. Charles Guené, rapporteur spécial. - L'article 47 quater encadre et précise la procédure qui permet à un EPCI à fiscalité propre de réduire unilatéralement les attributions de compensation de ses communes membres dans le cas où une diminution des bases imposables génère une diminution de ses recettes de fiscalité économique.
Il intègre également au calcul de la dotation de solidarité communautaire le prélèvement sur recettes de l'État au titre de la compensation de la réduction de 50 % des valeurs locatives de TFPB et de CFE des locaux industriels. Ces modifications offrent une plus grande visibilité aux communes.
M. Claude Raynal, rapporteur spécial. - L'article 47 quinquies prévoit à titre exceptionnel en 2022, comme en 2021, le versement par les établissements publics territoriaux (EPT) à la métropole du Grand Paris (MGP) d'un montant égal aux deux tiers de la dynamique de la CFE afin d'assurer une compensation de ses pertes de recettes au titre de la CVAE attendues pour 2022.
Les recettes de CVAE perçues par la MGP n'ayant que faiblement diminué, de 2,7 % en 2021, il est permis de se demander si, rétrospectivement, le versement exceptionnel des deux tiers de la dynamique de la CFE était indispensable à l'équilibre financier de la MGP cette année. Il se justifie toutefois sans doute davantage en 2022, compte tenu de la baisse de CVAE plus forte attendue cette année : - 5 % au niveau national.
Dans la rédaction initiale de l'amendement dont cet article est issu, qui avait été proposé par les députés rapporteurs spéciaux Jean-René Cazeneuve et Christophe Jerretie avant que celui-ci ne soit sous-amendé par le Gouvernement, le versement se limiterait en 2022 à la moitié de la dynamique de la CFE perçue par les EPT et serait conditionné à une perte de CVAE de 5 % au moins par la MGP en 2022.
L' amendement II.11 que nous vous proposons vise à revenir à la proposition des rapporteurs spéciaux de la commission des finances de l'Assemblée nationale, qui constitue un compromis plus équilibré entre la métropole du Grand Paris et les territoires qui la composent.
M. Charles Guené, rapporteur spécial. - L'article 48 prévoit la création, en 2022, d'une dotation de 51,6 millions d'euros visant à compenser la diminution du dispositif de compensation péréquée des départements en raison de la réforme des impôts de production.
Nous ne pouvons qu'approuver la création de cette dotation. Il conviendra cependant de veiller à ce que le montant proposé corresponde à la perte subie, ce à quoi c'est d'ailleurs engagé le Gouvernement. Nous relevons, en outre, que cette dotation n'est prévue que pour la seule année 2022 le Gouvernement estimant que le dispositif de compensation péréquée (DCP) retrouvera son dynamisme dès 2023. Il conviendra donc d'être attentifs à l'évolution du DCP en 2023.
Nous vous proposons d'adopter cet article sans modification.
M. Charles Guené, rapporteur spécial. - L'article 49 prévoit une dotation de 107 millions d'euros visant à compenser l'impact, pour les régions, de la baisse de 50 % de la CFE des établissements industriels et la suppression de 50 % de la CVAE.
Comme pour la dotation destinée aux départements susmentionnée, nous approuvons la création de cette dotation. Cependant, comme précédemment, cette dotation n'étant prévue que pour la seule année 2022, nous serons attentifs à l'évolution des ressources transférées au titre de la compétence formation professionnelle.
Nous vous proposons d'adopter cet article sans modification.
M. Bernard Delcros, président. - Merci de cette présentation très complète.
M. Éric Bocquet. - On nous annonce une chute prévisible de la CVAE de 10 à 12 % au niveau national - même si ce n'est pas le cas pour le Grand Paris. Comme le versement intervient à l'année N+1 ou N+2, les collectivités territoriales doivent s'attendre à des pertes. Un amendement de compensation est-il prévu dans le PLF ?
Les dépenses d'aide sociale des départements ont été fortement impactées : le nombre d'allocataires du revenu de solidarité active (RSA) a doublé. Il y a un risque de perte financière importante pour les départements, qui assument depuis de nombreuses années le reste à charge que l'État n'a jamais compensé. Des mesures spécifiques sont-elles prévues ?
Nous sommes encore au début des mandats municipaux durant lequel les décisions d'investissement se prennent. Les élus déplorent le manque de visibilité de leurs ressources financières. Il y a une évolution de la philosophie : les collectivités territoriales dépendent désormais davantage de la contractualisation, d'appels à projets et non plus de versements pérennes et systématiques - on le voit avec les contrats de relance et de transition écologique (CRTE), et dans ce budget avec la réforme de la part péréquation de la DSID. Nos rapporteurs ont-ils appréhendé cette question ?
M. Vincent Segouin. - On a transféré une part de taxe foncière des départements vers les communes, qui leur sera compensée par de la TVA. Mais s'agit-il d'une allocation forfaitaire ou d'un taux de TVA, avec une évolution dynamique ?
M. Marc Laménie. - Merci aux rapporteurs pour ce travail étayé sur des sujets complexes. Les élus ont souvent du mal à s'y retrouver.
Les programmes 119 et 122 totalisent 4,23 milliards d'euros ; ce n'est qu'une petite part du partenariat financier entre l'État et les collectivités territoriales - qui s'élève à 100 milliards d'euros. Il reste le prélèvement sur les recettes de fonctionnement, notamment pour la DGF, qui reste un prélèvement sur recettes très important. Quelle est la répartition des masses financières ?
Les élus sont associés aux commissions DETR uniquement pour les gros projets. Nous ne sommes pas associés aux décisions sur la DSIL. Des évolutions sont-elles prévues pour que les parlementaires aient davantage voix au chapitre ?
Mme Christine Lavarde. - Je suis heureuse de constater que les rapporteurs vont dans mon sens, à savoir de préserver les intérêts des établissements publics territoriaux de la métropole du Grand Paris. Votre analyse est juste !
Le débat à l'Assemblée nationale est une nouvelle illustration d'un pouvoir descendant qui ne tient absolument pas compte des réalités locales. L'amendement des deux rapporteurs spéciaux tenait compte des difficultés rencontrées et prévoyait une clause de sauvegarde pour la métropole du Grand Paris en cas de perte de recettes trop importante. Cette clause était parfaitement dans l'étiage de ce qui était supportable pour les comptes des établissements publics territoriaux comme de la métropole du Grand Paris. Or le Gouvernement n'a organisé aucune concertation avec les établissements publics territoriaux. Il a déposé un amendement contre les deux rapporteurs spéciaux qui appartiennent à sa majorité. Personne ne comprend cet amendement, qui met vent debout les présidents des établissements publics territoriaux. Le Gouvernement aurait-il tranché la question de l'organisation institutionnelle de la métropole du Grand Paris ? Qu'il le dise alors ouvertement...
M. Didier Rambaud. - Les deux amendements sur le FPIC ont retenu mon attention. Il y a quelques semaines, je vous avais alerté sur la nécessité d'un lissage pour les communautés d'agglomération issues des anciennes villes nouvelles. Le premier amendement me convient donc, de même que celui prévoyant que 60 % des intercommunalités puissent effectivement bénéficier de cette ressource. J'espère que ces amendements seront adoptés par le Sénat.
Avec Philippe Dallier, j'ai publié un rapport au titre de la délégation aux collectivités territoriales sur l'organisation du Grand Paris. Quelle gouvernance mettre en place ? Celle de la métropole du Grand Paris n'est à pas à la hauteur de son rang.
Mme Vanina Paoli-Gagin. - Je salue le travail des rapporteurs. Avez-vous envisagé de réviser les modalités de calcul de l'enveloppe globale de la DETR, pour tenir compte des effets de l'inflation ? Avec le renchérissement des prix de l'énergie et des matières premières, le coût des travaux et des appels à projet augmentera mécaniquement.
M. Jean-Marie Mizzon. - Je m'interroge sur la logique de l'article 47 quater qui prévoit, en cas de baisse des bases imposables d'une intercommunalité, que celle-ci puisse se refaire en diminuant l'attribution de compensations. C'est l'EPCI et non plus la commune qui est comptable du développement économique, et donc responsable de la baisse des bases. Or en ouvrant cette possibilité, on fera payer par des communes des conséquences dont elles ne sont pas comptables. Les rapporteurs envisagent-ils de déposer un amendement revenant à une logique s'inscrivant dans la philosophie initiale de la coopération intercommunale ?
M. Bernard Delcros, président. - Je remercie Charles Guené de son travail sur la dotation biodiversité qui n'est pas intégrée dans la DGF, et qui valorise les aménités rurales. C'est une belle avancée.
Je suis inquiet sur le financement des CRTE, sortes de contrats de ruralité ou de ville de deuxième génération. Nous sommes favorables à une contractualisation infrarégionale entre l'État et les collectivités territoriales. Mais le principe même d'un contrat est de donner de la visibilité financière aux élus, afin qu'ils planifient leurs projets sur la durée du mandat. Or concrètement, dans les départements que je connais, la première année de mise en oeuvre du CRTE fonctionne comme les attributions DETR, sans aucune connaissance de l'enveloppe dont le territoire disposera chaque année. Les territoires y perdent par rapport aux contrats de ruralité qui avaient une visibilité sur cinq ans.
Il y a un vrai risque que la DETR soit absorbée par les CRTE, financés par des crédits de droit commun, et non par des crédits dédiés. La DETR doit rester un outil souple de financement annuel des projets communaux. Sinon les communes n'auront plus de financements de l'État pour leurs projets.
Avec un appel à projet, la collectivité essaie de faire rentrer son projet dans le cadre prédéfini, alors que c'est l'inverse pour un contrat, qui adapte les outils financiers aux initiatives locales. Le CRTE est une forme de régression par rapport aux contrats de ruralité.
Selon Claude Raynal, les 337 millions d'euros de DSIL supplémentaire - en réalité des crédits européens non consommés - sont affectés prioritairement aux villes participant au programme Action coeur de ville, et non aux CRTE comme annoncé initialement par le ministre. Quel est l'avis des rapporteurs sur le financement des CRTE ?
Je suis satisfait du calendrier de notification des dotations. Cette année, dans certains départements, la DETR a été notifiée en août ! Cela complique la réalisation des projets.
Je partage les amendements proposés sur le FPIC, même si le chantier reste ouvert pour une évolution des critères dans les années à venir, notamment en intégrant des critères de superficie.
Que pensent les rapporteurs de l'évolution de la DGF ? Entre 2014 et 2017, elle a baissé de 25 %, passant de 40 à 30 milliards d'euros, hors transferts aux régions. Elle a été stabilisée durant ce quinquennat, mais au final cela diminue le pouvoir d'intervention des collectivités. À l'avenir, ne faudra-t-il pas mettre en place un dispositif d'indexation de la DGF sur l'inflation ? Avec la hausse de celle-ci, on diminuera sinon les capacités d'autofinancement des collectivités.
M. Claude Raynal, rapporteur spécial. - Une partie des questions posées ne concernent pas directement la mission RCT, mais les finances locales de manière plus large. Avec la réforme de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) que nous devrions prochainement adopter, l'ensemble de ces sujets pourraient être regroupés dans le cadre d'un débat spécifique sur les finances des collectivités territoriales, ce dont je me réjouis.
En réponse à Éric Bocquet, il y a un débat sur la chute prévisionnelle des CVAE pour 2022, qui est plutôt estimée à environ 5 %. Aucune compensation n'est prévue à ce stade, même si certains déposeront peut-être des amendements en ce sens en séance. La compensation des pertes de recettes des collectivités territoriales relevant de la première partie du PLF avec les prélèvements sur recettes, et non de la mission RCT, nous n'avions donc pas vocation à proposer de tels amendements. Je relève cependant que cette chute prévisionnelle est générale mais qu'elle se focalisera sur quelques territoires qui ont été les plus fortement touchés, notamment ceux qui abritent les industries aéronautiques ou ferroviaires. Dans de nombreux autres territoires en revanche, la baisse de CVAE sera absorbable.
Cette année, il y aura des rebonds très significatifs de recettes liés à la prise en compte de l'inflation dans les indices d'évolution des bases foncières. Il n'y a pas non plus à ce stade de raison de craindre une baisse de recettes de DMTO. La TVA devrait quant à elle augmenter de 5 à 6 % cette année. À ce stade, une compensation de l'État ne semble pas nécessaire globalement. Certes, certains territoires peuvent connaître des situations spécifiques nécessitant une intervention ponctuelle en cours d'année.
Concernant toujours les compensations mises en place en faveur des collectivités territoriales, une enveloppe de 200 millions d'euros pour les pertes de recettes en régie - par exemple de thermes ou de stations de ski - de certaines communes a été votée en 2021. Voyons comment les choses évoluent avant de créer des prélèvements sur recettes supplémentaires.
Je partage l'inquiétude de M. Bocquet. L'État a tendance à inciter les collectivités à investir sur certains domaines qu'il juge prioritaires - et parfois approuvés par les associations d'élus -, par exemple le climat. Mais plus il incite les collectivités à investir sur ces sujets, plus il limite leurs capacités à mener leurs propres politiques sur d'autres terrains, qui peuvent répondre au programme électoral de leurs élus et à l'intérêt local qu'il exprime ... Les collectivités territoriales deviennent en quelque sorte les outils des directeurs des services de l'État, qui conditionnent les subventions à l'investissement sur une thématique particulière. L'État organise ainsi la dépense. Comment distinguer la nécessaire impulsion de l'État et la liberté des collectivités ? La réponse n'est pas si simple et une réflexion me paraît devoir être menée sur le sujet. Pourrait-on envisager l'instauration d'une clef de répartition, limitant le fléchage des dotations d'investissement de l'État ?
Monsieur Delcros, effectivement les CRTE trouveront petit à petit leur financement dans la DETR, ce qui limite là encore l'utilisation libre de la DETR... Avançons des propositions plutôt que de subir, car l'État sera tenté de piloter toujours davantage l'investissement des collectivités territoriales, notamment des communes et des intercommunalités.
Monsieur Segouin, la compensation de la suppression de la taxe d'habitation est assurée par une fraction de TVA, dynamique, avec donc une hausse de presque 6 % cette année. Si l'on était une année « normale », Bercy n'aurait pas manqué de dénoncer un effet d'aubaine - comme il l'a fait l'année dernière pour les départements. Mais nous sommes en année préélectorale...
M. Bernard Delcros, président. - Et ce système est fortement péréquateur !
M. Claude Raynal, rapporteur spécial. - N'ayons pas d'approche idéologique du sujet : remplacer la taxe d'habitation par de la TVA est une bonne solution pour les petites collectivités territoriales. Au contraire de certaines grosses communes qui bénéficiaient d'une forte dynamique de TH, des communes sans croissance ont intérêt à ce transfert de TVA.
Madame Paoli-Gagin, l'enveloppe de DETR n'augmente pas alors que le coût des travaux a augmenté significativement. Certes, parfois quelques réajustements ont été possibles localement grâce à des crédits non consommés. Cela signifie donc que la DETR diminue, en raison de l'inflation. Le manque de matériaux fait monter les prix, notamment dans le bâtiment. Il faut décoincer les compteurs.
M. Charles Guené, rapporteur spécial. - Monsieur Laménie, les 105 milliards d'euros de transferts financiers de l'État se répartissent en 52,4 milliards d'euros pour les prélèvements sur recettes, principalement la DGF, et les crédits de la mission RCT ; 40,8 milliards d'euros de fiscalité transférée, poste en croissance ; et 11,2 milliards d'euros résultant de transferts de crédits de différents ministères.
Madame Lavarde, je me réjouis d'être en parfaite harmonie avec vous cette année. En général, nous avions plutôt adopté une position de sagesse...
Monsieur Rambaud, nous sommes heureux d'être en phase avec vous sur le FPIC.
Monsieur Mizzon craignait que l'article 47 quater contraigne les communes car il permettrait aux intercommunalités de réviser les attributions de compensation. C'était mon premier réflexe à titre personnel. Il y a normalement le pacte d'origine, et ensuite des cas exceptionnels où on peut modifier les attributions de compensation. Mais cela a dérivé. Cet amendement vient sécuriser les règles de baisse des attributions de compensation, jusqu'alors unilatérales et sans encadrement, pour une meilleure lisibilité.
Monsieur Delcros, nous avons pu faire évoluer les choses sur la dotation biodiversité. Il était important que le Gouvernement nous entende.
Claude Raynal a évoqué l'avantage qu'il y a à contractualiser plutôt que de recourir à des appels à projets, mais prenons garde à ce que ces contrats ne soient pas aussi léonins que ceux que l'État a l'habitude de signer....
Il faudrait actualiser et indexer la DGF pour les communes dont elle représente un pourcentage important des ressources. Mais il faut repenser entièrement le système. Nous avons évoqué le problème des indicateurs financiers. Lorsque les trajectoires de ces indicateurs jusqu'en 2028 seront révélées lors de la prochaine législature, beaucoup d'entre nous souhaiteront une réforme de la fiscalité locale. La situation actuelle nous invite selon moi à une réforme globale davantage qu'à des ajustements marginaux de paramètres financiers qui n'ont plus grand sens.
Monsieur Laménie, le seuil fixé pour les commissions DETR leur permet d'examiner 80 % des projets. En 2020, le Sénat a adopté une proposition de loi pour renforcer le rôle de ces commissions, qui n'a jamais été examinée par l'Assemblée nationale. Cela pourrait faire progresser les choses.
M. Bernard Delcros, président. - Merci pour ces précisions.
La commission décide de proposer au Sénat l'adoption, sans modification, des crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales. »
EXAMEN DES ARTICLES RATTACHÉS
Article 45
La commission décide de proposer au Sénat l'adoption, sans modification, de l'article 45.
Article 45 bis
La commission décide de proposer au Sénat l'adoption, sans modification, de l'article 45 bis.
Article 46
La commission décide de proposer au Sénat l'adoption, sans modification, de l'article 46.
M. Claude Raynal, rapporteur spécial. - L' amendement II.6 vise à supprimer l'alinéa 14, introduit en première lecture à l'Assemblée nationale, qui relève de 0,75 à 0,85 fois le potentiel financier moyen par habitant du seuil d'éligibilité des communes à un écrêtement de leur dotation forfaitaire. Modifier la structure des communes écrêtées serait malvenu, car nous manquons de simulations. Le nombre de communes concernées passerait de 21 000 à 15 500, ce qui concentrerait l'effort sur ces communes.
M. Bernard Delcros, président. - Avant de modifier les critères, il faut faire des simulations pour évaluer les conséquences concrètes de ce changement.
L' amendement II.6 est adopté.
M. Claude Raynal, rapporteur spécial. - L' amendement II.7 supprime la modification de la formule de calcul de l'effort fiscal qui supprime les produits intercommunaux de ce calcul. Cela se ferait au détriment des intercommunalités fortes et de leurs communes membres. Il n'y aurait pas d'impact en 2022, mais nous voulons envoyer un message au Gouvernement et à la direction générale des collectivités territoriales (DGCL).
L' amendement II. 7 est adopté.
La commission décide de proposer au Sénat l'adoption de l'article 47 ainsi modifié.
M. Charles Guené, rapporteur spécial. - L' amendement II.8 vise à instituer un mécanisme de garantie de sortie lissé sur quatre ans au lieu des deux premières années. L' amendement II.9 permet que 60 % des EPCI perçoivent une attribution au titre du FPIC, alors qu'actuellement la proportion n'est que de 55 % - ce qui n'est pas conforme à l'esprit du texte.
L' amendement II.8 est adopté, ainsi que l' amendement II.9. La commission décide de proposer au Sénat l'adoption de ces articles additionnels.
Article 47 bis
La commission décide de proposer au Sénat l'adoption, sans modification, de l'article 47 bis.
M. Charles Guené, rapporteur spécial. - L' amendement II.10 vise à revenir aux termes de l'accord de partenariat conclu entre l'État et les régions le 28 septembre 2020. L'accord initial prévoyait l'application, à l'indice par habitant permettant de calculer la fraction de TVA, d'un retraitement conduisant à traiter les situations particulières de la région des Pays-de-la-Loire et de la Corse. L'article 47 ter prévoit que le produit de la fraction de TVA est majoré des attributions reçues et minoré des prélèvements appliqués en 2020 et en 2021 au titre du fonds de péréquation. L'ajout de la prise en compte des contributions au titre de 2021 ne figurait pas dans le texte de l'accord entre l'État et les régions, qui prévoyait uniquement que le produit perçu par chaque région devrait être majoré des attributions reçues et minoré des prélèvements appliqués en 2020. Enfin, l'amendement prévoit que les attributions individuelles perçues ou versées par chaque collectivité au titre du FNGIR fassent l'objet d'une notification annuelle. Ces ajustements ont été approuvés par les régions. Pourquoi le Gouvernement est-il revenu dessus ? Revenons à la rédaction initiale.
L' amendement II.10 est adopté.
La commission décide de proposer au Sénat l'adoption de l'article 47 ter ainsi modifié.
Article 47 quater
La commission décide de proposer au Sénat l'adoption, sans modification, de l'article 47 quater.
M. Claude Raynal, rapporteur spécial. - L'amendement que nous proposons à l'article 47 quinquies revient sur la proposition d'équilibre entre les établissements publics territoriaux et la métropole du Grand Paris. La position des rapporteurs spéciaux de l'Assemblée nationale semblait équilibrée, alors que le sous-amendement du Gouvernement a déplacé maladroitement le curseur, et d'une manière non nécessaire.
Mme Christine Lavarde. - Je reçois à l'instant une information complémentaire, qui m'incitera à sous-amender l'amendement des rapporteurs. La version préparée par les députés Jean-René Cazeneuve et Christophe Jerretie prend mal en compte l'intégration des dotations de compensation pour perte de fiscalité dans le calcul au profit de la métropole du Grand Paris. Cela concerne surtout le territoire Paris-Est - Marne & Bois. Il faudrait préciser la rédaction pour que le dispositif soit pleinement efficient. Les présidents des établissements publics territoriaux y travaillaient hier encore.
L' amendement II.11 est adopté.
La commission décide de proposer au Sénat l'adoption de l'article 47 quinquies ainsi modifié.
Article 48
La commission décide de proposer au Sénat l'adoption, sans modification, de l'article 48.
Article 49
La commission décide de proposer au Sénat l'adoption, sans modification, de l'article 49.
La commission décide également de proposer au Sénat l'adoption, sans modification, du compte de concours financiers « Avances aux collectivités territoriales. »
La réunion est close à 12h15.
- Présidence de M. Claude Raynal, président -
La réunion est ouverte à 14 heures.
Second projet de loi de finances rectificatives pour 2021 - Examen des amendements de séance
M. Didier Rambaud, président. - Mes chers collègues, nous sommes réunis pour examiner les amendements de séance au second projet de loi de finances rectificative (PLFR) pour 2021, mais nous allons commencer par deux amendements du rapporteur général.
EXAMEN DES AMENDEMENTS DU RAPPORTEUR GÉNÉRAL
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - L'amendement n° 61 porte sur le remplacement de l'indemnité inflation.
J'ai eu l'occasion hier de vous faire part de mon opposition à ce dispositif, que nous avons supprimé. Je ne reviendrai pas sur ses défauts de conception - défaut de ciblage, effet de seuil, effet d'aubaine, coût très élevé pour le budget de l'État, mise en oeuvre qui repose notamment sur les entreprises.
Je reste cependant préoccupé par les conséquences de l'inflation - en particulier la hausse des prix des carburants - sur un grand nombre de ménages, raison pour laquelle je souhaite vous proposer une solution alternative, avec un dispositif, de mon point de vue, mieux ciblé et plus efficace.
Le Fonds monétaire international (FMI) nous y invite, qui, dans son dernier rapport consacré à la France, estime que, « face à la flambée des prix de l'énergie (...) les autorités devraient toutefois éviter les transferts de nature générale et les mesures de contrôle des prix de longue durée, qui sont moins bien ciblées et plus coûteuses », soulignant en particulier qu'« il conviendrait de mieux cibler l'indemnité inflation ».
Je vous propose donc une réponse comportant trois volets et s'appuyant sur des dispositifs existants, de manière à être rapidement efficace.
Ma proposition ne remet pas en cause l'objectif d'un soutien financier d'urgence. Elle a le mérite de n'impliquer à aucun moment les employeurs dans sa mise en oeuvre ; elle laisse ce soin aux organismes de sécurité sociale, dont c'est d'ailleurs la vocation.
À la place de l'indemnité inflation, je vous propose d'abord une majoration exceptionnelle de 150 euros de la prime d'activité, au bénéfice des travailleurs précaires ou modestes, souvent contraints d'utiliser leur véhicule pour se rendre au travail.
Je propose ensuite une allocation exceptionnelle, elle aussi de 150 euros, pour les bénéficiaires de minima sociaux et de prestations sociales, minimum vieillesse inclus, donc là encore en direction de nos concitoyens modestes et, surtout, des plus fragiles.
Ces deux premiers volets relèvent de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances ». Ils font l'objet de l'amendement n° 61, que je vous inviterai à adopter.
Enfin, je vous propose d'allouer une dotation ponctuelle aux opérateurs du service public de l'emploi, pour leur permettre de renforcer les aides à la mobilité qu'ils ont déjà la possibilité de verser au cas par cas aux chômeurs ou aux jeunes en parcours d'insertion, notamment s'ils ont besoin d'utiliser leur véhicule dans le cadre de leurs démarches de retour à l'emploi. Ce dernier volet relève, lui, de la mission « Travail et emploi » ; il est l'objet de l'amendement n° 62.
Au total, l'ensemble de ces mesures représenterait un coût estimé à 1,5 milliard d'euros pour l'État, ce qui est un effort considérable en faveur de nos concitoyens les plus en difficulté. L'objectif est de cibler prioritairement les personnes les plus exposées. Je n'ai pas souhaité entrer, à ce stade, dans une logique de suppression des taxes sur l'énergie, qui pourrait par ailleurs s'avérer quelque peu explosive.
M. Vincent Capo-Canellas. - Je remercie M. le rapporteur général d'avoir cherché à améliorer le dispositif proposé par le Gouvernement.
L'amendement n° 62 ne paraît pas gagé. Comment est-ce possible ?
En séance, il serait plus cohérent de discuter en même temps des articles 4 et 12 : il ne faudrait pas que l'on vote le dispositif de notre rapporteur général sans supprimer celui du Gouvernement.
Le dispositif proposé diminuera le nombre de bénéficiaires. Certains Français qui doivent prendre leur voiture pour travailler vont se trouver au-dessus des seuils... Cela va poser un certain nombre de questions.
M. Rémi Féraud. - Cet amendement essaie de trouver une amélioration au dispositif du Gouvernement, indispensable mais mal calé. Il permet à l'État d'économiser plus de 2 milliards d'euros, qui ne seront donc pas versés par soutenir le pouvoir d'achat. Outre l'augmentation du coût des carburants, il faut tenir compte de celle des produits alimentaires. Si je comprends bien, vous n'avez pas voulu travailler à montant constant.
Avez-vous prévu des dispositifs pour ceux qui ne touchent pas la prime d'activité ? Y a-t-il des « trous dans la raquette », autrement dit des personnes qui échapperont au dispositif alors qu'elles auraient dû y entrer ?
M. Pascal Savoldelli. - Je ne reviendrai pas sur les effets d'aubaine de la politique du Gouvernement pour les entreprises. Il y en a eu un certain nombre ! Vous dites qu'il ne faut pas contraindre les employeurs. Compte tenu de ce qui a été fait précédemment, cela paraît cohérent...
Je conçois que nous sommes entrés dans une période électoraliste, mais je trouve que nous faisons beaucoup de gymnastique. Le versement d'une indemnité inflation ne suffit pas à constituer une politique. C'est un geste condescendant. Ces propositions sont des accommodements entre la majorité du Sénat et la majorité gouvernementale.
Il est évident que l'on trouvera des trous dans la raquette : par exemple, un couple de smicards ne bénéficiera pas du dispositif. Il sera pourtant fortement concerné par la précarité énergétique, ainsi que d'autres augmentations de prix, parfois à deux décimales !
Pour nous, le compte n'y est pas. Nous n'approuvons pas cet amendement.
Mme Sophie Taillé-Polian. - La proposition limite le nombre de personnes touchées et reste ponctuelle, alors que la pauvreté s'intensifie. Nous allons regarder le dispositif de plus près, mais il est évident qu'il reste en deçà des besoins.
À cet égard, je regrette le mépris avec lequel notre proposition d'aide ciblée pour les bénéficiaires de l'aide personnalisée au logement (APL) a été balayée en mai dernier.
Mme Christine Lavarde. - Nous tenons à remercier M. le rapporteur général de son travail, qui a permis d'aboutir à un dispositif ciblé.
Rappelons que l'indemnité inflation devait couvrir l'évolution du prix à la pompe, que l'on ne pouvait couvrir avec les autres dispositifs du paquet énergie. Pour répondre à cet impératif, le Gouvernement a cherché une solution de facilité, touchant 38 millions de bénéficiaires et représentant près de 4 milliards d'euros de dépenses pour les finances publiques.
Le dispositif du rapporteur général est moins large, donc bénéfique pour nos finances publiques. L'indemnité inflation n'était qu'un chèque en bois !
M. Didier Rambaud, président. - Je prends la parole au nom de mon groupe.
Hier matin, vous avez fait voter un amendement de suppression d'une mesure que vous avez dénoncée comme électorale. Celle que vous proposez cet après-midi ne le serait donc pas ?...
Quelles sont les personnes que votre proposition fera sortir du dispositif de l'indemnité inflation ?
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Monsieur Capo-Canellas, les amendements déposés à l'article 4 vident les crédits prévus pour financer le dispositif d'indemnité inflation de l'article 12. Il n'est donc pas nécessaire de les gager.
Pour ce qui concerne les bénéficiaires, je me suis attaché à une priorité : aider les Français les plus vulnérables face à la situation d'inflation qui touche l'ensemble de notre population.
Le chèque énergie représente 600 millions d'euros. Le dispositif de blocage des prix de l'énergie représente 6 milliards d'euros ; cela touche donc de nombreux Français. Avec l'indemnité inflation, on a l'impression d'arroser le sable pour une mesure individuelle coûtant 3,8 milliards d'euros.
Je pense que nous devons, à un moment donné, faire preuve d'esprit de responsabilité, alors que la pauvreté reste relativement stable, comme une étude l'a encore montré ce matin, même si nous devons aussi être attentifs. C'est à cela que je me suis employé.
Certaines personnes vont nécessairement sortir du dispositif, puisque ce dernier coûtera 1,5 milliard d'euros, et non plus 3,8 milliards d'euros. Cependant, l'aide pour les publics concernés passerait de 100 à 150 euros ; ce n'est pas rien pour les bénéficiaires. La « familialisation » permet d'accroître l'amplitude des ménages touchés - les familles monoparentales avec enfants percevant environ 2 300 euros de revenus seraient ainsi concernées.
Pour ce qui est des éventuels « trous dans la raquette », les étudiants qui sont actifs et qui sont éligibles à la prime d'activité sont automatiquement touchés par la mesure que je propose. À l'inverse, certains étudiants non boursiers qui auraient bénéficié du dispositif du Gouvernement en sortent, mais je ne suis pas sûr que l'équité sociale aurait toujours été au rendez-vous. J'assume la proposition que je vous fais.
Tous les allocataires des minima sociaux, de l'allocation aux adultes handicapés, les invalides peuvent être bénéficiaires. À l'inverse, une partie des classes moyennes et certains retraités ne seront plus bénéficiaires.
Ne dilapidons pas l'argent que l'on n'a pas ou que l'on n'a plus. Je pense que nous devons être raisonnables dans l'accompagnement des Français. Jamais personne n'aurait présenté un tel dispositif avant la crise sanitaire. C'est pourquoi je fais cette proposition plus ciblée.
Madame Taillé-Polian, on voit bien qu'il y a une ouverture sur les questions de pauvreté. Je répète que mon dispositif alternatif touche des populations nouvelles, de manière plus ciblée, comme certaines familles monoparentales avec enfants.
J'ai bien conscience qu'il n'y a pas de copie parfaite, mais je cherche à conférer davantage d'équité et d'objectivité au dispositif, notamment en direction de celles et de ceux qui sont les plus exposés à ces difficultés. La question du coût des carburants me paraît traitée, avec ces propositions, à un niveau convenable.
M. Bernard Delcros. - Il n'y a pas de copie parfaite. L'alternative proposée est avantageuse pour les familles aux revenus les plus modestes, auxquelles elle apporte 50 euros supplémentaires. En revanche, trop de ménages modestes qui travaillent en seraient exclus. Le groupe UC s'abstiendra sur cet amendement.
M. Pascal Savoldelli. - J'avais l'intention de voter contre, avant d'avoir connaissance des amendements qui viennent d'être déposés. Cette mesure doit être davantage étudiée. Contrairement à mon habitude, je ne participerai pas au vote. Les délais sont trop courts.
Mme Isabelle Briquet. -Le groupe SER réservera également son vote, dans l'attente d'avoir étudié en détail le dispositif.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Je précise que certaines personnes au SMIC touchent la prime d'activité.
M. Bernard Delcros. - ... pour 15 euros.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - , et même au-delà du seuil de 2 000 euros en fonction de la composition et des ressources du foyer.
M. Pascal Savoldelli. - Plus de 4,5 millions de personnes touchent la prime d'activité.
L'amendement n° 61 est adopté, de même que l'amendement n° 62.
EXAMEN DES AMENDEMENTS DE SÉANCE
La commission a donné les avis suivants :
PREMIÈRE PARTIE : CONDITIONS GÉNÉRALES DE L'ÉQUILIBRE FINANCIER |
||
Auteur |
N° |
Avis de la commission |
M. DELAHAYE |
38 |
Demande de retrait |
Article additionnel après l'article 1er |
||
Auteur |
N° |
Avis de la commission |
M. SAVIN |
34 rect. |
Avis du Gouvernement |
M. SAVIN |
17 rect. |
Sagesse |
Article additionnel après l'article 4 |
||
Auteur |
N° |
Avis de la commission |
M. SAVIN |
19 rect. |
Demande de retrait |
Article 7 |
||
Auteur |
N° |
Avis de la commission |
Mme TAILLÉ-POLIAN |
46 |
Défavorable |
Mme TAILLÉ-POLIAN |
51 |
Demande de retrait |
Article additionnel avant l'article 10 |
||
Auteur |
N° |
Avis de la commission |
M. SAVOLDELLI |
30 rect. |
Défavorable |
Article additionnel après l'article 10 |
||
Auteur |
N° |
Avis de la commission |
Mme HERZOG |
7 rect. |
Demande de retrait |
Article 12 |
||
Auteur |
N° |
Avis de la commission |
M. RETAILLEAU |
23 rect. |
Favorable |
M. LEVI |
40 |
Favorable |
M. CAPUS |
41 rect. |
Demande de retrait |
La réunion est close à 14 h 35.
Jeudi 18 novembre 2021
- Présidence de M. Claude Raynal, président -
La réunion est ouverte à 10 h 05.
Projet de loi de finances pour 2022 - Mission « Aide publique au développement » (et article 42 A) et compte de concours financiers « Prêts à des États étrangers » (et article 62) - Examen du rapport spécial
M. Claude Raynal, président. - Nous examinons le rapport de nos collègues Jean-Claude Requier et Michel Canévet, rapporteurs spéciaux pour la mission « Aide publique au développement » et l'article 42 A ainsi que pour le compte de concours financiers « Prêts à des États étrangers » et l'article 62. Nous accueillons pour l'occasion notre collègue Hugues Saury, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées.
M. Jean-Claude Requier, rapporteur spécial. - Nous avons le plaisir, cette année encore, de vous présenter les crédits de la mission « Aide publique au développement », trois mois après la promulgation de la loi du 4 août 2021 de programmation relative au développement solidaire et à la lutte contre les inégalités mondiales.
Pour 2022, le montant des crédits demandés s'élève à 6,6 milliards d'euros en autorisations d'engagement (AE) et à 5,1 milliards d'euros en crédits de paiement (CP). Ces crédits augmentent donc de 18,1 % en AE et diminuent de 5,4 % en CP. Quant au compte de concours financiers « Prêts à des États étrangers » qui retrace les ressources mobilisées pour l'octroi de prêts par l'État à des conditions préférentielles, les crédits s'élèvent à 1,7 milliard d'euros en AE et 1,2 milliard d'euros en CP.
Avant de vous présenter plus précisément les facteurs qui expliquent l'évolution des crédits demandés, je veux vous rappeler que la mission « Aide publique au développement » ne constitue qu'une partie des moyens mis en oeuvre par la France pour sa politique d'aide au développement. En l'occurrence, plusieurs autres programmes budgétaires contribuent à cette politique, de même qu'elle mobilise plusieurs acteurs, comme les collectivités territoriales, les agences de l'eau ou encore les personnes privées.
À cet égard, il me paraît intéressant de vous présenter un rapide bilan de l'aide publique au développement (APD) des deux dernières années pour lesquelles des données agrégées sont disponibles, c'est-à-dire 2019 et 2020.
En 2020, l'aide publique au développement de la France s'est élevée à 13,5 milliards de dollars, soit quelque 12,5 milliards d'euros. En valeur, la France est ainsi le cinquième pays contributeur à l'APD parmi les trente pays du Comité d'aide au développement (CAD) de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE). Elle n'est, en revanche, que huitième lorsque l'on rapporte l'aide versée à son revenu national brut.
L'aide que nous versons présente surtout un caractère bilatéral, c'est-à-dire que nous l'attribuons directement à des États ou à des personnes privées, comme des entreprises ou des organisations non gouvernementales (ONG) sur le territoire d'un État. Nous nous distinguons de nos partenaires en raison de la place importante que nous accordons à l'instrument des prêts à conditions préférentielles, plutôt qu'au versement de subventions.
Notre intervention est à 53,7 % tournée vers l'Afrique, le Cameroun et la Côte d'Ivoire figurant en tête des bénéficiaires de notre aide. Nous privilégions les projets qui soutiennent le développement des services économiques, de la distribution et l'assainissement d'eau et de l'éducation.
Le versement d'aides à certains pays qualifiés d'« émergents », mais qui paraissent avoir déjà largement émergé, comme la Turquie ou la Chine, a souvent suscité des interrogations bien légitimes au sein de notre commission des finances. Afin d'y répondre par avance, nous avons regardé ce que recouvrait l'aide publique au développement versée à ces deux pays. Concernant la Turquie, nous relevons que la moitié de l'aide versée correspond à notre participation à la Facilité européenne pour l'accueil des réfugiés, c'est-à-dire à la contribution que nous versons à la Turquie pour la prise en charge qu'elle offre aux réfugiés, notamment syriens. S'agissant de la Chine, l'essentiel de l'aide est constitué des « frais d'écolage », c'est-à-dire notamment des bourses versées aux étudiants chinois accueillis en France. Ces deux exemples rappellent que la notion d'aide publique au développement est avant tout un agrégat statistique, qui peut recouvrir une grande diversité d'interventions.
On peut s'interroger : est-on véritablement dans une démarche de développement lorsque l'on verse à la Turquie une contribution pour l'accueil des réfugiés, alors que cette initiative est, finalement, dans l'intérêt de l'Europe dans son ensemble ? Nous ne tranchons pas le débat, mais nous remarquons que les règles fixées par l'OCDE permettent de procéder à une telle comptabilisation.
M. Michel Canévet, rapporteur spécial. - J'en viens aux crédits de la mission « Aide publique au développement » proprement dite. Trois faits nous paraissent devoir être relevés. D'abord, les crédits augmentent de 1,5 milliard d'euros en autorisations d'engagement. Cela s'explique par la reconstitution anticipée du fonds de l'Association internationale de développement (AID), guichet concessionnel de la Banque mondiale.
Ensuite, des efforts assez importants sont fournis en faveur de la santé mondiale. Ainsi, les crédits de paiement dédiés à la coopération multilatérale augmenteront de 340 millions d'euros afin d'abonder le fonds de lutte contre le sida, l'initiative « ACT-A » en faveur de la distribution d'un vaccin contre la covid-19 au niveau mondial et Gavi, l'Alliance du vaccin, qui assure la prévention contre les maladies infectieuses.
Enfin, les moyens en faveur de la préservation de l'environnement au niveau mondial seront renforcés. Dans cette perspective, 325 millions d'euros sont demandés en autorisations d'engagement pour la reconstitution des ressources du Fonds pour l'environnement mondial (FEM) et 419,3 millions d'euros en crédits de paiement pour le Fonds vert pour le climat, qui est le bras financier de l'accord de Paris. Cette « valse des millions », pour paraphraser une expression chère au rapporteur général, nous rappelle que la mission « Aide publique au développement » est d'une grande richesse, mais aussi d'une grande complexité, en raison du nombre très important de dispositifs financés et de la diversité des instruments mobilisés.
Au final, il est clair que le montant des crédits demandés augmente, en particulier si on le compare au niveau de l'année 2020, afin de neutraliser l'effet de l'opération de recapitalisation de l'Agence française de développement (AFD).
Toutefois, nous considérons que le niveau des crédits est conforme aux engagements pris lors du vote de la loi de programmation pour le développement, que nous avons soutenus collectivement. Cela n'exonère pas l'État de chercher à améliorer l'efficience de cette dépense, qui, nous le rappelons, est essentiellement mise en oeuvre par l'AFD. Comme vous le savez, celle-ci constitue l'opérateur pivot de la politique de développement de la France. Elle a connu une spectaculaire croissance de son activité depuis 2005, qui n'est pas sans conséquence pour le budget de l'État.
Si nous devions apporter quelques points de vigilance quant au budget de la mission pour cette année, ils concerneraient précisément l'AFD. Nous considérons, en effet, que l'agence doit chercher à optimiser ses charges d'exploitation, ce qui passe sans doute par une amélioration de son organisation interne et par une réflexion sur le statut et les modes de rémunérations de ses personnels.
Cette question nous paraît devoir être traitée prioritairement à l'occasion de la négociation du prochain contrat d'objectifs et de moyens (COM). Sur ce sujet, nous témoignons d'un certain étonnement face au temps pris par l'AFD et sa tutelle pour négocier l'actuel contrat d'objectif. Au final, le COM 2020-2022 arrive seulement à l'étape de la signature par les parties prenantes, alors que l'essentiel de la période de programmation est derrière nous. Ainsi, nous souhaiterions que le prochain COM, d'une part, soit négocié beaucoup plus rapidement et, d'autre part, porte sur une période plus longue, peut-être de cinq ans.
L'AFD et sa tutelle doivent aussi définir au plus une stratégie concernant l'emploi des surfaces du nouveau siège en construction à Austerlitz, dont l'agence n'aura pas l'usage de la totalité. Quoique le chiffre fasse débat, il semble que l'opérateur disposera de 10 000 mètres carrés excédentaires sur les 50 000 mètres carrés du futur siège.
Actuellement, l'emploi de cette surface n'est pas clairement défini et cette incertitude conduit à ce qu'il ne soit pas véritablement possible d'apprécier la cohérence et la soutenabilité du projet. Nous souhaitons donc que l'AFD et la tutelle règlent cette question le plus rapidement possible.
Enfin, s'agissant des opérations de l'agence en tant que telles, nous avons été récemment sensibilisés à l'incompréhension de plusieurs entreprises qui ont constaté que les critères de responsabilité sociale et environnementale étaient sans doute insuffisamment pris en compte dans le cadre des appels à projets auxquels participe l'AFD à différents niveaux. Nous rappelons que faire du prix le seul critère retenu pour apprécier l'opportunité d'une offre ne sert l'intérêt ni des projets soutenus ni des entreprises européennes. Nous souhaiterions que l'AFD entende les inquiétudes sur ce point.
Mes chers collègues, nonobstant ces observations, nous vous appelons à adopter les crédits de la mission « Aide publique au développement » et du compte de concours financiers, qui traduisent les engagements pris en loi de programmation.
M. Jean-Claude Requier, rapporteur spécial. - Nous examinons deux articles rattachés à la mission « Aide publique au développement », tous deux issus d'amendements du Gouvernement adoptés par nos collègues de l'Assemblée nationale.
L'article 42 A prévoit que le ministre de l'économie pourra prendre des participations supplémentaires au capital de la Banque ouest-africaine de développement, demande justifiée par le fait que la banque procédera bientôt à une augmentation de capital et que la France souhaite conserver une part stable. Au final, la part de la France ne pourra pas dépasser le seuil actuel de 3,5 % et le montant des parts appelables ne pourra excéder 17,2 millions d'euros. Nous vous proposons d'adopter sans modification cet article.
L'article 62 prévoit de relever le plafond du montant total de remise de dette que la France peut accorder aux pays très pauvres et très endettés au sein du Fonds monétaire international. Ce plafond est actuellement fixé à 4,7 milliards d'euros. Or la France souhaite signer un nouvel accord avec la Côte d'Ivoire, lequel prévoit l'annulation de 1,1 milliard d'euros de dette. Dans ce contexte, il est demandé de relever le plafond total à 5,8 milliards d'euros. Pour permettre la mise en oeuvre de l'accord, nous vous proposons d'adopter cet article sans modification.
Mes chers collègues, vous l'avez vu, nous n'avons pas éludé les questions qui fâchent : Turquie, Chine, nouveau siège de l'AFD et part des entreprises françaises dans les marchés étrangers.
M. Hugues Saury, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. - Je vous remercie de me donner la parole. La commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a émis un avis favorable à l'adoption de ce budget, la trajectoire définie par la loi de programmation relative au développement solidaire et à la lutte contre les inégalités mondiales étant respectée.
Comme vous, nous avons soulevé un certain nombre de réserves, notamment sur la mise en place de la commission indépendante d'évaluation, qui est l'un des éléments forts de cette loi de programmation. Nous craignons que le mot « indépendance » ne soit qu'un affichage.
L'AFD est très présente dans certains pays instables qui ont connu des coups d'État, comme le Mali, le Soudan ou la Guinée. Cela pose un certain nombre de questions, notamment lorsque les troupes du groupe Wagner sont présentes. Nous nous inquiétons de savoir de quelle manière l'aide française sera appliquée.
En outre, cette loi prévoit la remise de pas moins d'une dizaine de rapports, lesquels arrivent avec retard. Nous voulons que les délais de rendu soient respectés.
Enfin, nous avons le même questionnement que vous sur l'aide de l'AFD à la Turquie ou à la Chine, assorti d'un débat sur une dissociation entre les activités de banque de développement et d'aide publique au développement.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Derrière les bonnes intentions, nous devons être vigilants, notamment sur la nécessité de maîtriser les frais généraux, l'organisation interne, les compétences, les conditions de rémunération des personnels de l'agence française de développement, ainsi que la destination de la surface excédentaire du nouveau siège de celle-ci.
Les Français sont soucieux de la dépense publique et d'une forme de frugalité de leurs assemblées et de leurs élus. Par ces moyens très importants, un levier d'action considérable est fourni à l'agence française de développementpour mener une politique au nom de la France. Qu'est-il imaginé pour les surfaces excédentaires du nouveau siège ? Cela ne me semble pas répondre pour l'instant à une bonne gestion des deniers publics.
M. Albéric de Montgolfier. - Quelle est la motivation principale et réelle des prêts de l'AFD à la Chine ? Avons-nous des précisions sur les taux auxquels l'agence prête à ce pays, qui a un accès illimité au marché financier et dispose de réserves de liquidités considérables ?
Mme Sylvie Vermeillet. - Où en est le rattachement d'Expertise France à l'AFD, prévue par la loi du 4 août 2021?? En quoi cela renforcera-t-il son efficacité ?
M. Arnaud Bazin. - Je suis également très intrigué par le projet de nouveau siège. Quel est l'état d'avancement de ce projet ? Quel est le taux de mètres carrés par équivalent temps plein (ETP) représenté par cette surface de 40 000 mètres carrés?
M. Vincent Segouin. - S'agissant des prêts à la Chine, nous faisons appel à de la dette pour financer ces crédits, dette qui est elle-même, en partie, financée par la Chine. Quel est le but de l'opération ? Faisons-nous don des intérêts et des frais de l'opération ?
M. Thierry Cozic. - S'agissant des financements solidaires additionnels, notamment de la taxe sur les transactions financières (TTF), le Sénat a dû renoncer à inscrire un plafond équivalant à 51 % du montant de cette taxe, au lieu d'une somme de 528 millions d'euros. Comment les parlementaires peuvent-ils avoir un retour sur l'utilisation de la TTF à des fins d'aide publique au développement ?
M. Jean-Claude Requier, rapporteur spécial. - Nous nous sommes effectivement étonnés auprès de responsables de l'AFD que la Chine, qui prête à toute l'Afrique, se voie concéder des prêts par l'AFD.
Il s'agit précisément de prêts concessionnels effectués à des taux préférentiels. Bien que les taux soient en dessous de ceux du marché, l'AFD assure y gagner. Le montant de l'élément-don des prêts à la Chine s'est élevé à 19 millions d'euros en 2020, sur un total de 135,6 millions d'euros d'aides, et a concerné des projets en faveur de la biodiversité, de la production de biomasse ou de centrales électriques.
En outre, la Chine étant acquéreur d'une partie des obligations émises par l'agence, contracter des créances auprès de la France serait une manière de maintenir des liens avec cette dernière.
M. Michel Canévet, rapporteur spécial. - Nous avons bien fait d'interpeller le Gouvernement sur l'usage des ressources de l'APD avec des pays tels que la Chine ou la Turquie. Nous demandions de recentrer les thématiques sur des sujets d'intérêt général ; elles le sont désormais sur le climat. L'enjeu est bien de faire changer les comportements et d'aller vers une décarbonation.
Les locaux de l'AFD sont un vrai sujet. La décision en faveur du site de Paris-Austerlitz a été prise en février 2020. Ce projet est coûteux ; on peut le déplorer. J'ai démêlé la raison de la surface excédentaire : elle tient à ce qu'il est envisagé que des bâtiments puissent accueillir des organisations internationales à Paris. Les surfaces excédentaires auront cette destination ; j'ai évalué leur surface à 20 000 mètres carrés. On me dit que ce serait 10 000 mètres carrés, mais je crois qu'il faut tenir compte des évolutions, liées à la crise sanitaire, dans l'usage des bureaux. Il faut également tenir compte de l'intégration prochaine d'Expertise France. Le ministère met en avant que l'AFD compte 2 800 salariés, auxquels vont s'ajouter les 600 salariés d'Expertise France, mais il ne faut pas oublier que l'AFD dispose de 85 implantations internationales, et que tous ses personnels ne travaillent pas à Paris.
Nous sommes donc vigilants. Nous voulons des informations précises sur la réalité du projet, qui doit sortir de terre en 2025 - il en est au permis de construire, qui fait l'objet de recours. En tout état de cause, il faut que la destination des bâtiments soit connue, car il ne serait pas admissible que ces derniers restent vides.
La TTF, ensuite, devait atteindre 1,2 milliard d'euros en 2022 d'après l'évaluation des voies et moyens annexé au PLF. Sur ce montant seuls 528 millions d'euros sont effectivement fléchés vers l'APD au travers d'une affectation du produit de la taxe au Fonds de solidarité (FSD). La loi de programmation prévoyait que les ressources du fonds pourraient être relevées de 100 millions d'euros en 2022, mais le Gouvernement a finalement préféré recourir à des crédits budgétaires. Le débat reste donc ouvert sur les moyens du FSD et sur la part de la de TTF à lui transférer pour financer l'APD. Le Quai d'Orsay voudrait le plus possible quand Bercy freine et préfère éviter le recours à de la fiscalité affectée. Nous en débattrons en séance.
Concernant Expertise France, la loi a prévu que, au 1er janvier 2022, l'entreprise serait intégrée à l'AFD. On nous dit que des décrets sont en préparation, mais nous n'avons toujours pas d'information sur l'organisation concrète, en particulier sur la façon dont les deux établissements seront regroupés et quelles seront les relations hiérarchiques - je compte encore sur la séance publique pour obtenir des réponses.
Comment améliorer l'efficacité de l'aide publique au développement ? Nous voulons plus de cohérence entre les différentes institutions qui font de l'APD. Il faut les faire aller dans le même sens. C'est pourquoi nous favorisons leur rapprochement avec l'Agence française de développement, qui a fêté ses 80 ans. Il faut une réflexion en vue d'harmoniser le statut et la rémunération des acteurs de l'APD, les situations étant aujourd'hui très disparates. Les frais généraux de l'AFD s'élèvent à un peu moins de 500 millions d'euros et malgré ce qu'en dit l'agence, je crains qu'ils ne risquent de continuer à croître avec l'opération du nouveau siège. Nous devons faire quelque chose pour que le coût de gestion de l'APD reste le plus faible possible. On nous dit de comparer l'AFD avec d'autres institutions comme la Banque mondiale. Nous devons effectivement nous pencher sur la question, parce qu'il ne serait pas acceptable de constater des écarts entre les niveaux de rémunération proposés dans ces institutions et par l'AFD.
Nous nous réjouissons que deux représentants du Sénat - Isabelle Briquet et Alain Joyandet - siègent à l'Agence française de développement ; les deux suppléants restent encore à nommer. Nous espérons que ce sera le cas prochainement. Nous devrons également veiller à être présents au sein d'Expertise France : ce sera très pertinent pour l'évaluation de l'APD.
La commission décide de proposer au Sénat l'adoption, sans modification, les crédits de la mission « Aide publique au développement » et de l'article 42 A rattaché, ainsi que du compte de concours financiers « Prêts à des États étrangers » et de l'article 62 rattaché.
Projet de loi de finances pour 2022 - Vote sur des missions précédemment examinées et réservées : « Investir pour la France de 2030 »
M. Claude Raynal, président. - Nous examinons les crédits de la mission « Investir pour la France de 2030 », qui est la nouvelle dénomination de la mission « Investissements d'avenir ». Nous avions réservé cet examen pour attendre des amendements éventuels du Gouvernement.
M. Thierry Meignen, rapporteur spécial pour la mission « Investir pour la France de 2030 ». - Il est difficile de s'opposer à une mission qui représente 34 milliards d'euros. Pourtant, les chiffres que le Gouvernement présente relèvent du jeu de colin-maillard.
Comme vous le savez, le Gouvernement a décidé d'inscrire les crédits dédiés au plan France 2030 au sein de la mission « Investissements d'avenir ». Pour ce faire, trois amendements ont été déposés et adoptés à l'Assemblée nationale : un amendement de crédits permettant d'abonder la mission « Investissements d'avenir » de 34 milliards d'euros en AE et 3,5 milliards d'euros en CP ; un amendement destiné à changer le nom de la mission « Investissement d'avenir », désormais rebaptisée « Investir pour la France de 2030 » ; enfin, un amendement visant à étendre aux crédits du plan France 2030 les règles de gouvernance et de gestion des fonds applicables aux programmes d'investissements d'avenir (PIA).
S'agissant de la répartition des crédits entre les différentes actions et de la ventilation des moyens entre les priorités stratégiques, je vous renvoie au commentaire d'article qui sera annexé à mon rapport.
Je ne reviendrai pas sur le caractère extrêmement contestable du procédé, qui fait bien peu de cas de l'autorisation parlementaire - en passant par un amendement, en cours de discussion, qui augmente de 170 % les crédits d'une mission budgétaire.
Le rattachement de France 2030 à la mission « Investissements d'avenir » présente des avantages indéniables en termes de déploiement et de gestion. D'une part, dans la mesure où le PIA 4 et France 2030 présentent des convergences incontestables, voire une certaine redondance, il ne serait pas efficace de confier ces investissements similaires à deux entités distinctes : l'architecture choisie facilitera le suivi et la coordination de la gestion et du pilotage des fonds. D'autre part, le premier semestre 2021 a été consacré à l'adoption du cadre juridique applicable au PIA 4. L'inscription des crédits France 2030 au sein de la mission « Investissements d'avenir » est ainsi de nature à en faciliter le déploiement, en s'appuyant sur l'architecture budgétaire et contractuelle existante.
Je regrette cependant que ce rattachement laisse augurer un suivi laborieux de l'emploi des crédits. En effet, la ventilation des crédits demeure très indicative. Il est précisé que les crédits ont vocation à pouvoir être redéployés facilement entre les différentes stratégies, ces dernières n'ayant pas encore été déclinées sur plan opérationnel.
En réalité, le Gouvernement nous invite à signer un chèque en blanc. De surcroît, la budgétisation opérée risque d'aggraver l'opacité de cette mission : nous aurons beaucoup de difficultés à évaluer l'avancement concomitant de deux programmes qui seront abondés par les mêmes actions budgétaires.
Enfin, le lancement à seulement un an d'intervalle de deux plans stratégiques portant sur des thématiques similaires témoigne d'une absence d'anticipation à la tête de l'État, qui me paraît très préoccupante.
Sur la gouvernance de ces programmes, l'exposé des motifs précise que la démarche d'évaluation sera renforcée, ce qui constitue une inflexion opportune. Cependant, l'effectivité de cette démarche dépendra de la gouvernance des programmes. Or, si le Président de la République a indiqué que cette gouvernance avait vocation à être complètement rénovée au cours des prochains mois, aucune précision ne nous a été communiquée, et bien des questions demeurent sans réponse. Quelle sera, notamment, la place accordée à la représentation nationale dans la définition et l'évaluation des priorités stratégiques d'investissement ? Ces questions revêtent une importance cruciale : le succès ou l'échec de France 2030 dépendra étroitement des choix de gouvernance.
En dépit de ces nombreuses réserves, je suis favorable à l'adoption de l'article 42 quaterdecies rattaché à la mission, ainsi qu'à celle des crédits de la mission.
M. Claude Raynal, président. - Je partage votre point de vue : ces crédits sont un chèque en blanc. Le Gouvernement affiche un montant de dépenses, claironne des thèmes qui ont chacun de l'intérêt, mais dont il ne dit rien de précis, ni surtout comment les articuler, et critique la gestion passée, pour se contenter de dire qu'il faut en changer. En réalité, les crédits vont changer d'affectation en cours de route, passer de thème en thème sans évaluation ni contrôle parlementaire.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Christine Lavarde nous avait déjà montré, avec le PIA 3, combien l'annonce de milliards de crédits n'avait pas été immédiatement suivie de dépenses. Aujourd'hui, j'ai du mal à m'y retrouver dans les annonces : le Président de la République a parlé, en nous recevant à l'Élysée, de 30 milliards d'euros, qui sont devenus 34 milliards d'euros, auxquels s'ajoutent le PIA et le fonds d'innovation pour l'industrie, sans aucune lisibilité, en particulier, comme vous le dites, sur la stratégie. En réalité, il y en a pour tout le monde, sans que l'on puisse évaluer ni suivre l'allocation des crédits et leurs dépenses ; c'est évidemment un risque. Sur des sujets aussi importants, il faut tirer le signal d'alarme et demander de mieux partager l'information.
Mme Christine Lavarde. - Je vous félicite d'avoir trouvé le tableau de ventilation des crédits qui était annoncé avec l'amendement à 34 milliards d'euros que le Gouvernement a déposé à l'Assemblée nationale, mais qui n'était en réalité pas joint et que l'on ne m'a pas communiqué. Je vois, cependant, qu'il ne répond pas à la question que je me posais : à Béziers avant-hier, le Président de la République a annoncé 1,9 milliard d'euros supplémentaires pour l'hydrogène vert. S'ajoutent-ils aux 34 milliards d'euros ou trouvent-ils leur place dans l'amendement ? Difficile à dire, avec la ventilation des crédits que le Gouvernement, dans l'objet de son amendement, présente comme « indicative et susceptible d'évoluer en fonction de la pertinence des dispositifs » : avez-vous réussi à avoir des précisions ?
M. Vincent Capo-Canellas. - Le Gouvernement annonce 1,2 milliard d'euros pour produire un avion bas carbone. C'est une bonne nouvelle, mais il semble qu'une question de gouvernance se pose - j'en ai été alerté par des acteurs de la recherche en aéronautique. Habituellement, les chercheurs, l'État et les industriels se concertent, avant de lancer des investissements aéronautiques, dans le cadre du Conseil pour la recherche aéronautique civile (Corac), une instance ancienne, spécifique à la France, où les relations sont suivies et de grande qualité. France 2030 s'accompagne d'une nouvelle gouvernance : est-ce le cas ici ? Va-t-on prendre le risque de se passer de cette instance reconnue, qui a démontré son utilité, ou bien va-t-on recourir au Corac ? Je poserai la question en séance plénière.
M. Thierry Meignen, rapporteur spécial. - Le tableau de ventilation nous a été transmis avec l'amendement ; je n'ai aucun mérite à l'avoir obtenu. Le montant de 1,9 milliard d'euros est inclus dans les 34 milliards d'euros, à ce que je comprends, mais je le dis sans avoir plus d'information, et c'est bien ce qui fonde mes réserves.
Même chose pour la gouvernance : on ne saura rien avant le premier semestre 2022. Le Gouvernement nous demande de jouer à colin-maillard.
M. Claude Raynal, président. - Le Président de la République semblait vouloir balayer toutes les structures, notamment le Corac, qui rassemblait recherche, industrie, administration...
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Il fallait casser les codes...
M. Claude Raynal, président. - Nous verrons ce que deviendra le Corac. Je comprends donc que l'avis est favorable, mais pas enthousiaste.
M. Arnaud Bazin. - Un avis vigilant !
La commission décide de proposer au Sénat l'adoption, sans modification, des crédits de la mission « Investir pour la France de 2030 », ainsi que de l'article 42 quaterdecies.
Projet de loi de finances pour 2022 - Examen définitif de l'équilibre, des missions, des budgets annexes, des comptes spéciaux et des articles rattachés de la seconde partie
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Cette traditionnelle « réunion balai » nous permet de confronter nos votes émis, par anticipation, avec ceux de l'Assemblée nationale. Nous n'avons pas encore eu l'occasion de nous prononcer sur certaines modifications adoptées par l'Assemblée nationale, soit sur les crédits, soit sur les articles rattachés aux missions.
Le déficit budgétaire prévu par le texte initial du projet de loi de finances était de 143,4 milliards d'euros. À l'issue de l'examen de la première partie, le déficit budgétaire de l'État s'établissait à 148,4 milliards d'euros, en dégradation de 5 milliards d'euros.
La principale évolution est l'instauration d'un « bouclier tarifaire », pour un coût estimé à 5,1 milliards d'euros en recettes.
Les amendements adoptés en première et en seconde délibération sur la seconde partie du PLF ont conduit à dégrader le solde du budget général de 6,8 milliards d'euros supplémentaires, portant le déficit de l'État à 155,1 milliards d'euros, avec notamment les évolutions suivantes : l'inscription dans la mission « Investissement d'avenir », renommée « Investir pour la France de 2030 », de 34 milliards d'euros en autorisations d'engagement et 3,5 milliards d'euros en crédits de paiement dès 2022 ; pour la mission « Engagements financiers de l'État », une ouverture de 1,1 milliard d'euros au titre de la révision à la hausse de la charge de la dette de l'État prévue pour 2022 ; pour la mission « Travail et emploi », une ouverture de 0,7 milliard d'euros visant à financer l'annuité 2022 du plan de réduction des tensions de recrutement, ainsi que 0,6 milliard d'euros pour renforcer les moyens du plan « 1 jeune, 1 solution ».
Je vous propose de confirmer définitivement la position de la commission des finances sur chacune des missions et des articles rattachés, hormis les deux missions que nous venons d'examiner ce matin même.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - La commission des finances n'a pas adopté les crédits de la mission. Je vous propose de confirmer cette décision.
M. Rémi Féraud, rapporteur spécial. - Il est délicat pour moi de me prononcer, car j'avais personnellement émis un avis de sagesse positive, et mon collègue rapporteur spécial Vincent Delahaye un avis de sagesse négative...
La commission confirme sa décision de proposer au Sénat de ne pas adopter les crédits de la mission.
ADMINISTRATION GÉNÉRALE ET TERRITORIALE DE L'ÉTAT
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - La commission des finances n'a pas adopté les crédits de la mission. En première délibération, l'Assemblée nationale a adopté les crédits de la mission tels que modifiés par deux amendements de crédits.
Les crédits votés par l'Assemblée nationale visent notamment à renforcer les effectifs titulaires des centres d'expertise ressources titres (CERT), résolvant en partie une difficulté qui avait été relevée par la rapporteure spéciale, Mme Isabelle Briquet.
Malgré cette légère avancée, celle-ci vous propose de confirmer le rejet des crédits de la mission.
Après avoir pris acte des modifications adoptées par l'Assemblée nationale, la commission confirme sa décision de proposer au Sénat de ne pas adopter les crédits de la mission.
AGRICULTURE, ALIMENTATION, FORÊT ET AFFAIRES RURALES
Compte d'affectation spéciale « Développement agricole et rural »
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - La commission des finances a adopté sans modification les crédits de la mission et a rejeté ceux du compte d'affectation spéciale. Les rapporteurs spéciaux vous proposent de confirmer ces décisions.
La commission confirme sa décision de proposer au Sénat d'adopter, sans modification, les crédits de la mission, et de ne pas adopter les crédits du compte d'affectation spéciale.
ANCIENS COMBATTANTS, MÉMOIRE ET LIENS AVEC LA NATION
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - La commission des finances a adopté sans modification les crédits de la mission ainsi que l'article 42. En première délibération, l'Assemblée nationale a adopté les crédits de la mission tels que modifiés par un amendement de crédits et a adopté sans modification l'article 42.
Après avoir pris acte des modifications apportées par l'Assemblée nationale, le rapporteur spécial vous propose de confirmer ces décisions.
Après avoir pris acte des modifications adoptées par l'Assemblée nationale, la commission confirme sa décision de proposer au Sénat d'adopter les crédits de la mission tels que modifiés par l'Assemblée nationale. Elle décide de proposer au Sénat d'adopter sans modification l'article 42.
COHÉSION DES TERRITOIRES
Articles 42 bis, 42 ter, 42 quater
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - La commission des finances n'a pas adopté les crédits de la mission et a adopté sans modification les articles 42 bis, 42 ter et 42 quater. Je vous propose de confirmer ces décisions.
La commission confirme sa décision de proposer au Sénat de ne pas adopter les crédits de la mission et d'adopter, sans modification, les articles 42 bis, 42 ter et 42 quater.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - La commission des finances a adopté sans modification les crédits de la mission, de même que l'Assemblée nationale en première délibération. Le rapporteur spécial vous propose de confirmer cette décision.
La commission confirme sa décision de proposer au Sénat l'adoption, sans modification, des crédits de la mission.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - La commission des finances a adopté sans modification les crédits de la mission. Les rapporteurs spéciaux vous proposent de confirmer cette décision.
La commission confirme sa décision de proposer au Sénat l'adoption, sans modification, des crédits de la mission.
DÉFENSE
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - La commission des finances a émis un avis de sagesse sur les crédits de la mission et adopté sans modification l'article 42 quinquies. Le rapporteur spécial vous propose de confirmer ces décisions.
La commission confirme sa décision de s'en remettre à la sagesse du Sénat sur les crédits de la mission et d'adopter, sans modification, l'article 42 quinquies.
DIRECTION DE L'ACTION DU GOUVERNEMENT
Budget annexe « Publications officielles et information administrative »
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - La commission des finances a adopté sans modification les crédits de la mission et ceux du budget annexe, de même que l'Assemblée nationale en première délibération. Le rapporteur spécial vous propose de confirmer ces décisions.
L'Assemblée nationale a également adopté un article additionnel 42 sexies, qui prévoit de repousser de fin 2021 à fin 2024 le délai dans lequel les ayants droit des victimes des essais nucléaires français peuvent déposer une demande d'indemnisation auprès du Comité d'indemnisation des victimes des essais nucléaires. Le rapporteur spécial vous propose d'adopter sans modification cet article.
La commission confirme sa décision de proposer au Sénat d'adopter sans modification les crédits de la mission et ceux du budget annexe.
Après avoir pris acte des modifications adoptées par l'Assemblée nationale, la commission décide de proposer au Sénat d'adopter sans modification l'article 42 sexies.
ÉCOLOGIE, DÉVELOPPEMENT ET MOBILITÉ DURABLES
Budget annexe « Contrôle et exploitation aériens »
Compte d'affectation spéciale « Financement des aides aux collectivités pour l'électrification rurale (FACÉ) »
Articles 4 septies, 42 octies et 60
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - La commission a adopté les crédits de la mission tels que modifiés par trois amendements de crédits. Elle a adopté sans modification les articles 42 septies, 42 octies et 60. Elle a adopté sans modification les crédits du budget annexe et ceux du compte d'affectation spéciale. Les rapporteurs spéciaux vous proposent de confirmer ces décisions.
La commission confirme sa décision de proposer au Sénat l'adoption des crédits de la mission tels que modifiés par ses amendements, de même que l'adoption, sans modification, des articles 42 septies, 42 octies et 60, des crédits du budget annexe et de ceux du compte d'affectation spéciale.
ÉCONOMIE
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - La commission des finances a adopté les crédits de la mission tels que modifiés par son amendement et a adopté sans modification les crédits du compte de concours financiers « Prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés ». Les rapporteurs spéciaux vous proposent de confirmer les décisions de la commission.
La commission avait réservé son vote sur les quatre articles additionnels 42 nonies, 42 decies, 42 undecies et 42 duodecies adoptés par l'Assemblée nationale la veille. Ils vont donc nous les présenter.
M. Thierry Cozic, rapporteur spécial. - L'article 42 nonies vise à adapter le mécanisme de compensation carbone des entreprises électro-intensives en mettant en place une avance sur le versement de l'aide. Ainsi, les 450 entreprises bénéficiaires de cette compensation bénéficieront en 2022 de 25 % de l'aide qu'elles auraient normalement touchée en 2023. L'article procède par ailleurs à des ajustements visant à renforcer les exigences environnementales vis-à-vis de ces entreprises.
En parallèle, un amendement de crédits de 150 millions d'euros a été adopté sur la mission pour financer l'avance. Ce mécanisme doit permettre de soutenir la trésorerie des entreprises électro-intensives ; nous sommes donc favorables à son adoption sans modification.
Mme Frédérique Espagnac, rapporteure spéciale. - L'article 42 decies prévoit la création de la dotation de compensation permettant de couvrir les coûts pour le prestataire de service postal universel, à savoir le groupe La Poste.
L'article prévoit un certain nombre de garanties - décret en Conseil d'État après consultation de l'Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse (Arcep) et de la Commission supérieure numérique et des postes - qui nous conduisent à lui donner un avis favorable.
Alors que la compensation avait été annoncée dès le mois de juillet et que la dotation était prévue dans le projet de loi de finances initiale, je déplore cependant que cet article n'ait pas été intégré directement dans le texte initial, ce qui nous aurait permis de mieux en évaluer la portée et de disposer d'une évaluation préalable de la part du Gouvernement.
L'article 42 undecies proroge le dispositif de prêts participatifs sur l'enveloppe du fonds de développement économique et social, introduit par la deuxième loi de finances rectificative pour 2020. Ce dispositif devant permettre de faciliter l'accès à l'emprunt pour les très petites entreprises (TPE) ne parvenant pas à accéder au crédit malgré les prêts garantis par l'État (PGE), nous sommes favorables à sa prorogation.
M. Thierry Cozic, rapporteur spécial. - L'article 42 duodecies prévoit de créer un nouveau document de politique transversale dédié aux activités de Bpifrance financées par des dotations publiques. Depuis le début de la crise, Bpifrance constitue l'un des principaux acteurs de la réponse économique à la crise sanitaire : les PGE, un grand nombre de dispositifs du plan de relance ou encore des dispositifs de garantie d'emprunt sont gérés par la Banque publique. Le renforcement de l'information des parlementaires est indispensable, raison pour laquelle nous sommes favorables à cet article.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Je partage ces avis.
La commission confirme sa décision de proposer au Sénat l'adoption des crédits de la mission tels que modifiés par son amendement, et l'adoption sans modification des crédits du compte de concours financiers « Prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés. »
Elle décide de proposer au Sénat d'adopter sans modification les articles 42 nonies, 42 decies, 42 undecies et 42 duodecies.
ENGAGEMENTS FINANCIERS DE L'ÉTAT
Compte d'affectation spéciale « Participation de la France au désendettement de la Grèce »
Comptes de concours financiers « Accords monétaires internationaux »
et « Avances à divers services de l'État ou organismes gérant des services publics »
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - La commission des finances a adopté sans modification les crédits du compte d'affectation spéciale « Participation de la France au désendettement de la Grèce » ainsi que les crédits des comptes de concours financiers « Accords monétaires internationaux » et « Avances à divers services de l'État ou organismes gérant des services publics ». Elle a rejeté les crédits de la mission « Engagements financiers de l'État ». Le rapporteur spécial vous propose de confirmer ces décisions.
La commission confirme sa décision de proposer au Sénat l'adoption, sans modification, des crédits du compte d'affectation spéciale ainsi que des crédits des comptes de concours financiers. Elle propose au Sénat de ne pas adopter les crédits de la mission « Engagements financiers de l'État ».
ENSEIGNEMENT SCOLAIRE
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - La commission des finances a adopté sans modification les crédits de la mission et l'article 42 terdecies. Le rapporteur spécial vous propose de confirmer ces décisions.
La commission confirme sa décision de proposer au Sénat l'adoption, sans modification, des crédits de la mission et de l'article 42 terdecies.
GESTION DES FINANCES PUBLIQUES
CRÉDITS NON RÉPARTIS
TRANSFORMATION ET FONCTION PUBLIQUES
Compte d'affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l'État »
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - La commission a adopté sans modification les crédits de la mission « Gestion des finances publiques », de la mission « Crédits non répartis » et de la mission « Transformation et fonction publiques ». Elle n'a pas adopté les crédits du compte d'affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l'État ».
En première délibération, l'Assemblée nationale a adopté sans modification les crédits des missions « Gestion des finances publiques » et « Transformation et fonction publiques », ainsi que les crédits du compte d'affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l'État ». Elle a adopté les crédits de la mission « Crédits non répartis » tels que modifiés par un amendement de crédits qui a majoré le programme 551 « provision relative aux rémunérations publiques » de 100 millions d'euros destinés au financement de l'indemnité inflation pour les agents de l'État et de ses opérateurs.
Les rapporteurs spéciaux vous proposent tout d'abord de confirmer les décisions d'adoption pour les missions « Gestion des finances publiques » et « Transformation et fonction publiques » et de rejet pour le compte d'affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l'État ».
Après avoir pris acte des modifications apportées par l'Assemblée nationale, je vous propose de confirmer l'adoption sans modification des crédits de la mission « Crédits non répartis ». Les conséquences de la suppression de l'indemnité inflation par le Sénat dans le cadre du PLFR seront tirées dans le cadre de la séance publique.
La commission confirme sa décision de proposer au Sénat d'adopter, sans modification, les crédits des missions « Gestion des finances publiques » et « Transformation et fonction publiques », et de ne pas adopter les crédits du compte d'affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l'État ».
Après avoir pris acte des modifications apportées par l'Assemblée nationale, la commission décide de proposer au Sénat l'adoption sans modification des crédits de la mission « Crédits non répartis. »
IMMIGRATION, ASILE ET INTÉGRATION
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - La commission des finances n'a pas adopté les crédits de la mission. En première délibération, l'Assemblée nationale a adopté sans modification les crédits de la mission. Le rapporteur spécial vous propose de confirmer le rejet des crédits de la mission.
La commission confirme sa décision de proposer au Sénat de ne pas adopter les crédits de la mission.
JUSTICE
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - La commission des finances a adopté les crédits de la mission tels que modifiés par son amendement et a adopté sans modification les articles 44 et 44 bis. Le rapporteur spécial vous propose de confirmer ces décisions.
La commission confirme sa décision de proposer au Sénat d'adopter les crédits de la mission tels que modifiés par son amendement, et d'adopter, sans modification, les articles 44 et 44 bis.
MÉDIAS, LIVRE ET INDUSTRIES CULTURELLES
Compte de concours financiers « Avances à l'audiovisuel public »
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - La commission des finances a adopté sans modification les crédits de la mission et n'a pas adopté les crédits du compte de concours financiers. Le rapporteur spécial vous propose de confirmer ces décisions.
La commission confirme sa décision de proposer au Sénat d'adopter, sans modification, les crédits de la mission, et de ne pas adopter les crédits du compte de concours financiers.
OUTRE-MER
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - La commission des finances a adopté sans modification les crédits de la mission. En première délibération, l'Assemblée nationale a adopté les crédits de la mission tels que modifiés par un amendement de crédits. Elle a également adopté un article additionnel 44 ter.
Après avoir pris acte des modifications apportées par l'Assemblée nationale, les rapporteurs spéciaux vous proposent de confirmer l'adoption des crédits de la mission.
L'article 44 ter prévoit que, dans les douze mois suivant la promulgation de la loi de finances pour 2022, le Gouvernement remette au Parlement un rapport visant à évaluer l'activité d'accompagnement et d'insertion des étudiants ultramarins par l'Agence de l'outre-mer pour la mobilité (LADOM), en particulier le dispositif Passeport mobilité formation professionnelle, au regard du contexte d'exode massif de la jeunesse des territoires des outre-mer.
Il n'est pas certain que ce rapport répondra aux interrogations sur l'exode des jeunes ultramarins, mais, pour les rapporteurs spéciaux, il permettra, à tout le moins, d'avoir une vision plus complète de leur accompagnement par LADOM et des débouchés à l'issue du parcours de formation.
Même si l'on peut s'interroger sur le rattachement de cette disposition au domaine d'une loi de finances, ils vous proposent d'adopter cet article sans modification.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Je fais confiance aux rapporteurs spéciaux.
Après avoir pris acte des modifications apportées par l'Assemblée nationale, la commission confirme sa décision de proposer au Sénat d'adopter les crédits de la mission tels que modifiés par l'Assemblée nationale, de même que l'article 44 ter.
COMPTE D'AFFECTATION SPÉCIALE « PARTICIPATIONS FINANCIÈRES DE L'ÉTAT »
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - La commission des finances n'a pas adopté les crédits du compte d'affectation spéciale. En deuxième délibération, l'Assemblée nationale a adopté les crédits du compte d'affectation spéciale tels que modifiés par un amendement de crédits, qui augmente de 700 millions d'euros les crédits du compte d'affectation spéciale. Après avoir pris acte des modifications apportées par l'Assemblée nationale, le rapporteur spécial vous propose de confirmer le rejet des crédits du compte d'affectation spéciale.
Après avoir pris acte des modifications apportées par l'Assemblée nationale, la commission décide de proposer au Sénat de ne pas adopter les crédits du compte d'affectation spéciale.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - La commission a adopté sans modification les crédits de la mission. Le rapporteur spécial vous propose de confirmer cette décision.
La commission décide de proposer au Sénat l'adoption, sans modification, des crédits de la mission.
RECHERCHE ET ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - La commission des finances a adopté sans modification les crédits de la mission. Les rapporteurs spéciaux vous proposent de confirmer cette décision.
La commission décide de proposer au Sénat l'adoption, sans modification, des crédits de la mission.
RÉGIMES SOCIAUX ET DE RETRAITE
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - La commission a adopté sans modification les crédits de la mission et du compte d'affectation spéciale. En première délibération, l'Assemblée nationale a adopté les crédits de la mission tels que modifiés par un amendement de crédits et ceux du compte d'affectation spéciale tels que modifiés par deux amendements de crédits. L'Assemblée nationale a par ailleurs adopté, sur le compte d'affectation spéciale, un article additionnel 61.
Après avoir pris acte des modifications apportées par l'Assemblée nationale, la rapporteure spéciale vous propose de confirmer l'adoption des crédits de la mission et du compte d'affectation spéciale tels que modifiés par l'Assemblée nationale. Les conséquences de la suppression de l'indemnité inflation par le Sénat dans le cadre du PLFR seront tirées dans le cadre de la séance publique.
Mme Sylvie Vermeillet, rapporteure spéciale. - L'article 61 porte sur les modalités de prise en compte dans la constitution du droit à pension, au sein du régime de la fonction publique, des disponibilités prises pour élever un enfant. Il aligne le droit à pension sur le droit à l'accès au congé parental.
Je remarque cependant l'absence d'évaluation préalable du coût du dispositif actuel et de celui de la modification apportée. Les différences des conditions d'octroi de ce congé parental entre régime de la fonction publique et régime général seraient accentuées, ce qui peut paraître contraire à l'objectif d'harmonisation retenu dans le projet de réforme des retraites. Nonobstant ces réserves, un rejet de l'article serait excessif. Je vous propose un avis favorable.
Après avoir pris acte des modifications apportées par l'Assemblée nationale, la commission confirme sa décision de proposer au Sénat l'adoption des crédits de la mission et du compte d'affectation spéciale tels que modifiés par l'Assemblée nationale. Elle décide de proposer au Sénat d'adopter, sans modification, l'article 61.
RELATIONS AVEC LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES
Compte de concours financiers « Avances aux collectivités territoriales »
Articles 45, 45 bis, 46, 47, 47 bis, 47 ter, 47 quater, 47 quinquies, 48 et 49
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - La commission a adopté sans modification les crédits de la mission et ceux du compte de concours financiers. Elle a adopté sans modification les articles 45, 45 bis, 46, 47 bis, 47 quater, 48 et 49. Elle a adopté l'article 47 tel que modifié par deux amendements, l'article 47 ter tel que modifié par un amendement et l'article 47 quinquies tel que modifié par un amendement. Elle a adopté deux amendements portant articles additionnels après l'article 47. Les rapporteurs spéciaux vous proposent de confirmer ces décisions.
La commission confirme sa décision de proposer au Sénat l'adoption, sans modification, des crédits de la mission et du compte de concours financiers, des articles 45, 45 bis, 46, 47 bis, 47 quater, 48 et 49. Elle confirme également sa décision de proposer au Sénat d'adopter les articles 47, 47 ter et 47 quinquies tels que modifiés par ses amendements, et d'adopter ses deux amendements portant articles additionnels après l'article 47.
REMBOURSEMENTS ET DÉGRÈVEMENTS
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - La commission a adopté sans modification les crédits de la mission, de même que l'Assemblée nationale en première délibération. L'Assemblée nationale a également adopté un article additionnel 50.
Le rapporteur spécial vous propose de confirmer l'adoption des crédits de la mission.
L'article 50 vise à ce qu'un rapport soit remis par le Gouvernement au sujet des intérêts moratoires dus par l'État aux contribuables dans les contentieux fiscaux. Ceux-ci représentent des montants très importants pour la mission - près de 800 millions prévus pour 2022, de sorte que le rapporteur spécial vous propose d'accepter la demande de rapport et d'adopter l'article 50 sans modification.
La commission confirme sa décision de proposer au Sénat l'adoption, sans modification, des crédits de la mission.
Après avoir pris acte des modifications apportées par l'Assemblée nationale, elle décide de proposer au Sénat l'adoption, sans modification, de l'article 50.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - La commission n'a pas adopté les crédits de la mission. En première délibération, l'Assemblée nationale a adopté les crédits de la mission tels que modifiés par un amendement de crédits. Après avoir pris acte des modifications adoptées par l'Assemblée nationale, le rapporteur spécial vous propose de confirmer le rejet des crédits de la mission.
Après avoir pris acte des modifications apportées par l'Assemblée nationale, la commission confirme sa décision de proposer au Sénat de ne pas adopter les crédits de la mission.
SÉCURITÉS
Compte d'affectation spéciale « Contrôle de la circulation et du stationnement routiers »
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - La commission a adopté sans modification les crédits de la mission et du compte d'affectation spéciale. Les rapporteurs spéciaux vous proposent de confirmer ces décisions.
La commission confirme sa décision de proposer au Sénat l'adoption, sans modification, des crédits de la mission et du compte d'affectation spéciale.
SOLIDARITÉ, INSERTION ET ÉGALITÉ DES CHANCES
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - La commission des finances a adopté sans modification les crédits de la mission et l'article 51. En première délibération, l'Assemblée nationale a adopté les crédits de la mission, tels que modifiés par un amendement de crédits, ainsi que l'article 51, modifié par deux amendements. L'Assemblée nationale a également adopté deux articles additionnels 52 et 53.
Après avoir pris acte des modifications adoptées par l'Assemblée nationale, les rapporteurs spéciaux vous proposent de confirmer l'adoption des crédits de la mission et de l'article 51 tels que modifiés par l'Assemblée nationale.
M. Arnaud Bazin, rapporteur spécial. - L'article 52, adopté en première lecture à l'Assemblée nationale, prévoit de demander au Gouvernement un rapport sur l'opportunité de la publication de certaines données relatives aux bénéficiaires de l'allocation aux adultes handicapés (AAH), dont le coût s'élève à plus de 10 milliards d'euros. Cela va dans le sens des recommandations de notre récent rapport, visant à rendre la prestation plus transparente. Même si c'est une demande de rapport, nous vous proposons d'adopter cet article.
M. Éric Bocquet, rapporteur spécial. - L'article 53, issu d'un amendement adopté par l'Assemblée nationale en première lecture, prévoit que le Gouvernement remette au Parlement, avant le 1er septembre 2022, un rapport dressant un état des lieux des travaux menés concernant la modernisation de la délivrance de la prime d'activité et le développement d'outils de récupération automatique des données déclaratoires des bénéficiaires.
Nous vous proposons d'adopter un amendement II-12 qui supprime cet article, compte tenu, d'une part, des explications données par le Gouvernement lors de l'examen de cet amendement en séance publique, indiquant qu'au vu de l'état d'avancement de ces travaux la remise d'un tel rapport était prématurée, et, d'autre part, de la position constante de la commission des finances sur les demandes de rapport.
L'amendement est adopté.
Après avoir pris acte des modifications apportées par l'Assemblée nationale, la commission confirme sa décision de proposer au Sénat d'adopter les crédits de la mission et l'article 51, tels que modifiés par l'Assemblée nationale.
La commission décide de proposer au Sénat d'adopter, sans modification, l'article 52.
La commission décide de proposer au Sénat de supprimer l'article 53.
SPORT, JEUNESSE ET VIE ASSOCIATIVE
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - La commission a adopté les crédits de la mission et les articles 54 et 55. Le rapporteur spécial vous propose de confirmer ces décisions.
La commission confirme sa décision de proposer au Sénat d'adopter, sans modification, les crédits de la mission et les articles 54 et 55.
TRAVAIL ET EMPLOI
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - La commission n'a pas adopté les crédits de la mission. Elle a adopté sans modification les articles 56, 58 et 59. Elle n'a pas adopté l'article 57. Je vous propose de confirmer ces décisions.
La commission confirme sa décision de proposer au Sénat de ne pas adopter les crédits de la mission ni l'article 57, et d'adopter sans modification les articles 56, 58 et 59.
Projet de loi de finances pour 2022 - Examen d'une motion et d'un amendement de séance à l'article 18
M. Claude Raynal, président. - Nous commençons par l'examen de la motion n° I-559, déposée par le groupe communiste républicain citoyen et écologiste et tendant à opposer la question préalable. Si la motion était votée, vous le savez, le Sénat déciderait qu'il n'y a pas lieu de poursuivre la délibération sur le projet de loi. J'invite M. Bocquet à dire quelques mots de cette motion, qu'il a présentée avec M. Savoldelli.
M. Éric Bocquet. - Nous présenterons cette motion en détail cet après-midi. Disons pour l'instant qu'il s'agit peut-être d'une forme d'anticipation...
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - J'émets un avis défavorable à cette motion.
La commission émet un avis défavorable à la motion n° I-559.
M. Claude Raynal, président. - L'amendement n° I-234 porte sur l'article 18, qui concerne le prélèvement sur recettes pour l'Union européenne. Il est présenté par M. Levi et remplace le montant de 26,4 milliards d'euros par celui de 25,52 milliards d'euros.
M. Jean-Marie Mizzon. - Je suis défavorable à cet amendement, même si je ne suis pas opposé à ce que nous trouvions, à terme, des contributions auprès des États membres pour financer l'opération Barkhane, d'autres pays que la France souffrant également de la menace posée par le terrorisme islamiste.
Toutefois, la manière choisie ne semble pas adéquate et représenterait un mauvais précédent. J'habite la circonscription de Robert Schuman, voisine de l'Allemagne et du Luxembourg, et je respecte trop l'Union européenne pour procéder de la sorte.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Je partage l'avis défavorable de M. Mizzon.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° I-234.
Projet de loi de finances pour 2022 - Désignation des candidats pour faire partie de l'éventuelle commission mixte paritaire
La commission soumet au Sénat la nomination de MM. Claude Raynal, Jean-François Husson, Mme Christine Lavarde, MM. Roger Karoutchi, Bernard Delcros, Rémi Féraud et Didier Rambaud comme membres titulaires, et de MM. Vincent Segouin, Jean-Baptiste Blanc, Thierry Meignen, Mme Sylvie Vermeillet, MM. Thierry Cozic, Jean-Claude Requier et Éric Bocquet comme membres suppléants de l'éventuelle commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de finances pour 2022.
La réunion est close à 11 h 40.
Vendredi 19 novembre 2021
- Présidence de M. Claude Raynal, président -
La réunion est ouverte à 13 h 30.
Projet de loi de finances pour 2022 - Examen des amendements de séance sur la première partie
M. Claude Raynal, président. - Nous examinons aujourd'hui les amendements de séance sur la première partie du projet de loi de finances (PLF) pour 2022.
EXAMEN DES AMENDEMENTS DU RAPPORTEUR GÉNÉRAL
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - L'amendement n° I-785 renforce le dispositif de lutte contre la fraude, en revenant sur les pratiques d'arbitrage de dividende, mis en lumière par le fameux épisode des CumEx Files. La situation ne nous paraît pas satisfaisante, l'inventivité dans ce domaine ne manque pas.
L'amendement n° I-785 est adopté.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - L'amendement n° I-786 compense les pertes de recettes de cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE). En raison des conséquences de la crise sanitaire, les départements, les communes et les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre vont être pénalisés en 2022, compte tenu du mode de calcul de cette cotisation. Cette compensation devrait coûter 482 millions d'euros, nous souhaitons maintenir un filet de sécurité.
L'amendement n° I-786 est adopté.
EXAMEN DES AMENDEMENTS DE SÉANCE
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Comme d'habitude, je vous donnerai les avis sur chacun des amendements. Certains parmi vous m'ont demandé pour quelle raison nous n'avions pas poursuivi nos travaux en commission après la discussion générale en séance publique. La raison en est le délai limite pour les amendements, fixé en fin de matinée et la nécessité pour moi de tous les examiner.
Mme Christine Lavarde. - Il y a beaucoup moins d'amendements cette année.
M. Claude Raynal, président. - Un faible nombre d'amendements ont été déclarés irrecevables au titre de l'article 40 de la Constitution, mais de nombreux autres sont liés à l'application de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF). Au total, il reste 606 amendements.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - L'amendement no I-287 rectifié quinquies est déclaré irrecevable en application de l'alinéa 3 bis l'article 44 bis du Règlement du Sénat. En effet, les sénateurs ne peuvent autoriser le Gouvernement à prendre par ordonnances des mesures qui sont normalement du domaine de la loi.
L'amendement n° I-287 est déclaré irrecevable en application de l'article 44 bis du Règlement du Sénat.
La commission a également donné les avis suivants sur les autres amendements dont elle est saisie, qui sont retracés dans le tableau ci-après :
TABLEAU DES AVIS
Article additionnel après Article 3 |
||
Auteur |
N° |
Avis de la commission |
M. LOZACH |
I-105 rect. |
Demande de retrait |
Article 4 |
||
Auteur |
N° |
Avis de la commission |
Mme VERMEILLET |
I-75 rect. |
Demande de retrait |
Mme PAOLI-GAGIN |
I-318 rect. bis |
Demande de retrait |
Article 4 ter |
||
Auteur |
N° |
Avis de la commission |
M. BOCQUET |
I-609 |
Défavorable |
M. LABBÉ |
I-760 |
Défavorable |
Article 4 quater |
||
Auteur |
N° |
Avis de la commission |
M. BOCQUET |
I-610 |
Défavorable |
Mme PAOLI-GAGIN |
I-329 rect. bis |
Demande de retrait |
Article additionnel après Article 5 quater |
||
Auteur |
N° |
Avis de la commission |
M. CANÉVET |
I-467 |
Avis du Gouvernement |
Article additionnel après Article 6 |
||
Auteur |
N° |
Avis de la commission |
Mme PAOLI-GAGIN |
I-334 rect. ter |
Demande de retrait |
Mme BLATRIX CONTAT |
I-431 rect. |
Demande de retrait |
Article 8 |
||
Auteur |
N° |
Avis de la commission |
M. TABAROT |
I-414 |
Favorable |
M. CANÉVET |
I-657 |
Demande de retrait |
M. TABAROT |
I-415 |
Favorable |
Article additionnel après Article 8 bis |
||
Auteur |
N° |
Avis de la commission |
M. BILHAC |
I-376 rect. bis |
Défavorable |
M. BOCQUET |
I-577 rect. |
Défavorable |
Article additionnel après Article 8 quater |
||
Auteur |
N° |
Avis de la commission |
Mme Nathalie DELATTRE |
I-381 rect. |
Demande de retrait |
M. MENONVILLE |
I-746 |
Demande de retrait |
Article 8 quinquies |
||
Auteur |
N° |
Avis de la commission |
Le Gouvernement |
I-626 |
Favorable |
Le Gouvernement |
I-625 |
Favorable |
M. BOCQUET |
I-748 |
Défavorable |
M. MANDELLI |
I-705 |
Demande de retrait |
Article 9 ter |
||
Auteur |
N° |
Avis de la commission |
M. BOCQUET |
I-592 rect. |
Demande de retrait |
Mme ARTIGALAS |
I-100 rect. |
Avis du Gouvernement |
Mme LIENEMANN |
I-502 |
Avis du Gouvernement |
Article 9 quater |
||
Auteur |
N° |
Avis de la commission |
M. LUREL |
I-189 rect. |
Défavorable |
M. LUREL |
I-190 rect. |
Défavorable |
Article 10 |
||
Auteur |
N° |
Avis de la commission |
M. DANTEC |
I-92 |
Demande de retrait |
M. LUREL |
I-486 |
Défavorable |
Article additionnel après Article 10 |
||
Auteur |
N° |
Avis de la commission |
M. SALMON |
I-699 |
Défavorable |
M. COZIC |
I-459 |
Demande de retrait |
Article 10 ter |
||
Auteur |
N° |
Avis de la commission |
M. SAVOLDELLI |
I-518 |
Demande de retrait |
M. MAUREY |
I-247 rect. |
Avis du Gouvernement |
Article additionnel après Article 10 ter |
||
Auteur |
N° |
Avis de la commission |
Mme Mélanie VOGEL |
I-708 |
Défavorable |
M. TEMAL |
I-287 rect. quinquies |
Irrecevable |
Article 12 |
||
Auteur |
N° |
Avis de la commission |
M. SAVOLDELLI |
I-531 |
Défavorable |
M. SAVOLDELLI |
I-532 |
Défavorable |
M. MIZZON |
I-782 rect. |
Demande de retrait |
M. SAVOLDELLI |
I-533 |
Défavorable |
Article additionnel après Article 13 |
||
Auteur |
N° |
Avis de la commission |
M. DELCROS |
I-465 rect. |
Demande de retrait |
Article additionnel après Article 14 |
||
Auteur |
N° |
Avis de la commission |
M. BOCQUET |
I-554 rect. |
Défavorable |
M. BOCQUET |
I-555 rect. |
Défavorable |
Article 16 |
||
Auteur |
N° |
Avis de la commission |
M. BOCQUET |
I-546 |
Demande de retrait |
M. ASSOULINE |
I-106 rect. |
Demande de retrait |
La réunion est close à 14 h 15.