Mardi 20 juillet 2021
- Présidence de M. Laurent Burgoa, vice-président -
La réunion est ouverte à 17 heures.
Audition de M. Adrien Taquet, secrétaire d'État en charge de l'enfance et des familles
M. Laurent Burgoa, vice-président. - Le président de notre mission d'information, Jean Hingray, ne peut être présent cet après-midi et m'a demandé de le suppléer. En son nom et en votre nom à tous, je souhaite la bienvenue à M. Adrien Taquet, secrétaire d'État en charge de l'enfance et des familles auprès du ministre des solidarités et de la santé.
Nous avons identifié la période de la petite enfance comme particulièrement cruciale pour les politiques en faveur de l'égalité des chances. C'est dès ce moment que se forment des inégalités liées au milieu social et familial d'origine, avec des répercussions sur toute la suite du parcours des jeunes, à l'école et à la sortie de l'école.
La politique d'accueil du jeune enfant ne peut donc pas se limiter à offrir des solutions de garde aux parents qui travaillent. Elle doit aussi intégrer cette dimension éducative pour les enfants les moins favorisés par leur environnement familial.
Nous souhaitons connaître les actions entreprises par le Gouvernement dans ce domaine, les résultats obtenus, mais aussi les voies d'amélioration possibles.
Monsieur le Secrétaire d'État, je vous propose d'intervenir pour un propos liminaire avant que notre rapporteure, Monique Lubin, et nos collègues, vous posent leurs questions.
M. Adrien Taquet, secrétaire d'État en charge de l'enfance et des familles auprès du ministre des solidarités et de la santé. - Je ne sais pas où termine l'enfance et commence la jeunesse, cela dépend de chacun. Je sais en revanche que l'émancipation ne se prépare pas la veille de ses 18 ans, mais bien avant.
La petite enfance est ce moment où se forgent les inégalités de destin. C'est une période de la vie qui est peu investie par les politiques publiques dans notre pays, à la différence des pays du nord de l'Europe ; c'est pourquoi nous avons voulu mettre l'accent sur « les 1 000 premiers jours », du quatrième mois de grossesse à l'entrée à l'école, considérant que l'enfant est sujet de droit avant de devenir un élève, et que nous devons mieux garantir l'égalité de chances. Tout ne se joue pas dans ces 1 000 premiers jours, mais des choses s'y passent et, pour reprendre le sous-titre du rapport de la commission Cyrulnik, c'est « là où tout commence ».
C'est dans le début des trajectoires qu'apparaissent des inégalités sociales, de santé, de capacités cognitives. Les sciences nous ont appris beaucoup sur le sujet, en particulier les travaux du britannique David Barker, qui a établi, dans les années 1980, la corrélation du poids à la naissance et la probabilité de mourir d'une maladie cardio-vasculaire. Depuis lors, on fait des corrélations entre des événements intervenant dans la vie du très jeune enfant, ou dans son environnement, et la vie qu'il aura une fois adulte. On sait notamment que le stress de la femme enceinte, qu'elle éprouve par exemple quand elle subit de la violence domestique, aura un impact sur la santé mentale de son enfant devenu adulte, au moins jusqu'à ses trente ans ; on sait aussi, côté positif, que l'activité physique de la femme enceinte diminue la probabilité d'une dépression post-partum.
C'est pourquoi nous investissons sur les 1 000 premiers jours. On a beaucoup parlé, à juste titre, du dédoublement des classes maternelles et primaires en REP+. Mon action se situe avant l'entrée à l'école. C'est aussi très important dans notre pays, sachant qu'on met en moyenne six générations à sortir de la pauvreté, et qu'un fils de cadre de trois ans a deux fois plus de vocabulaire et a entendu 10 millions de mots en plus qu'un fils d'ouvrier. C'est pourquoi nous avons confié une mission à Boris Cyrulnik et 18 autres professionnels de la petite enfance, pour établir l'état des savoirs sur ces inégalités de chances, pour que nous en dégagions ensuite des politiques publiques pertinentes.
Notre démarche autour des 1 000 premiers jours s'est incarnée notamment par le doublement du congé paternité. Nous l'avons fait parce que la présence des parents lors des premières semaines est bon pour le développement de l'enfant, pour l'égalité femmes-hommes, et parce qu'elle diminue les risques de dépression post-partum, laquelle reste un sujet tabou dans notre pays bien qu'elle touche 15 à 20 % des femmes après l'accouchement. Les 1 000 premiers jours sont aussi la période où l'on peut établir des parcours pour mieux accompagner les parents, avec une approche universelle, au bénéfice de tous les parents et enfants. Ce parcours se déroule en trois étapes : un entretien prénatal précoce au quatrième mois de la grossesse, cet entretien gratuit permet d'aborder avec un professionnel les divers aspects de l'arrivée d'un enfant ; un contact plus étroit, dans les maternités, avec des professionnels de la protection maternelle et infantile (PMI) ; enfin, un entretien entre la 5ème et la 12ème semaine après l'accouchement, pour prévenir la dépression post-partum, nous recherchons à systématiser cet entretien qui est loin d'être effectué partout.
Nous développons également, dans cette démarche des 1 000 premiers jours, une logique de parcours spécifiques, selon les fragilités identifiées, qui sont très diverses et ne requièrent pas les mêmes actions - qu'il s'agisse par exemple de la naissance d'un enfant prématuré, d'un enfant souffrant de handicap, de personnes en situation de handicap qui deviennent parents. Nous cherchons à contrer les fragilités qui entraînent des pertes de chances si l'accompagnement n'est pas bien fait. Ces parcours spécifiques se traduisent par des actions ciblées, comme l'allongement du congé pour le second conjoint en cas d'hospitalisation d'un enfant prématuré, ou encore le renforcement des équipes de psychiatrie périnatale, pour lequel vous avez voté 10 millions d'euros dans le dernier projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS).
Notre démarche sur les 1 000 premiers jours vient également renforcer des actions déjà conduites dans la stratégie de lutte contre la pauvreté, par exemple les repas de cantine à 1 euro, les petits déjeuners gratuits - car nous savons qu'un enfant sur cinq arrive à l'école le ventre vide et que cela se ressent sur l'acquisition des connaissances. C'est une perte de chances que nous voulons compenser.
Un autre volet de notre action pour la petite enfance concerne les modes d'accueil. Il a un aspect quantitatif, la convention d'objectifs et de gestion avec la Caisse nationale d'allocations familiales (CNAF) prévoyait 30 000 places nouvelles. Nous n'y arriverons pas dans le délai imparti, en raison notamment de la crise sanitaire - mais ce n'est pas la seule raison. Vous connaissez également les bonus mixité, les bonus territoires, l'inclusion des enfants en situation de handicap. Nous avons aussi des actions visant à faciliter l'insertion professionnelle des mères, ainsi qu'un plan de formation de 100 000 professionnels de la petite enfance, mis en oeuvre depuis quelques mois.
En parlant d'accueil et non pas de garde du jeune enfant, je m'inscris dans la lignée des travaux de Sylviane Giampino, qui ont conduit à la charte nationale de l'accueil du jeune enfant, publiée le 23 mars 2017 et qui s'est traduite par tout un ensemble de mesures concrètes, avec des référentiels sur les bâtiments d'accueil, des taux d'encadrement, ou encore sur l'accès à la médecine du travail.
Sur l'aspect quantitatif, la CNAF a constaté que les objectifs de la convention d'objectifs et de gestion ne seraient pas atteints et elle a adopté en février dernier un « plan rebond », doté de 200 millions d'euros, notamment pour accélérer les projets d'investissements qui ont pu être retardés lors de la séquence des élections municipales.
Nous cherchons également à améliorer l'articulation entre vie professionnelle et vie familiale. C'est le sens de la mission qu'avec Élisabeth Borne, nous avons confiée en avril dernier à Christel Heydemann, présidente de Schneider Electric France et Julien Damon, conseiller scientifique de l'École nationale supérieure de sécurité sociale. Il faut réfléchir à l'articulation entre les congés et les modes d'accueil. En Suède, les congés familiaux de 14 à 16 mois sont obligatoirement partagés entre les deux parents, et aucun enfant n'a de place de crèche la première année, car les parents s'occupent de leurs enfants.
Enfin, dans le cadre de la stratégie nationale de prévention et de protection de l'enfance 2020-2022, le Gouvernement a déposé un projet de loi relatif à la protection des enfants, que l'Assemblée nationale a adopté le 8 juillet dernier et que le Sénat devrait examiner à son tour prochainement, j'espère à l'automne - je ne doute pas que le Sénat saura y apporter des améliorations. Je le mentionne en particulier pour la question de l'accès à l'autonomie des jeunes sortant de l'aide sociale à l'enfance (ASE), dont on attend trop qu'ils soient autonomes bien plus tôt qu'on ne l'exige de nos propres enfants. Nous devons accompagner ces enfants, ils veulent être considérés comme des enfants comme les autres, ce qui est à la fois simple et compliqué - cela demande qu'on leur garantisse l'horizon du droit commun. C'est pourquoi nous avons décidé que les enfants de l'ASE en études supérieures - ils ne sont que 6 % à le faire, c'est assurément trop peu -, accèdent automatiquement aux bourses les plus élevées et qu'ils disposent d'un accès prioritaire au logement étudiant. Pour ceux qui ne font pas d'études, nous avons déposé un amendement au projet de loi adopté à l'Assemblée nationale, pour qu'ils accèdent automatiquement à la Garantie jeunes, et au contrat jeune majeur. Le débat parlementaire a montré que d'autres dispositifs encore sont possibles pour mieux préparer l'autonomie des jeunes suivis par l'ASE et pour instituer une sorte de droit à l'erreur dans le cas où ceux qui rompent tout lien avec l'institution à leur majorité, puissent cependant accéder à certains dispositifs et qu'ils puissent continuer à être suivis s'ils le demandent.
Enfin, nous travaillons à l'échelle européenne, avec la garantie européenne pour l'enfance, un texte adopté sous la présidence portugaise et qui demande aux États membres d'adopter sous neuf mois une stratégie pour protéger les enfants contre la pauvreté - ce délai conduit à la présidence française, c'est une action sur laquelle nous pouvons mettre l'accent.
Mme Monique Lubin, rapporteure. - L'objectif fixé de places en crèche ne sera pas atteint. Nous constatons une désaffection des collectivités territoriales envers ce mode d'accueil parce qu'il pose des problèmes de coût, mais aussi parce qu'il engage la responsabilité des élus sur l'accueil des jeunes enfants. Que peut-on faire pour que les collectivités retrouvent leur appétence, leur goût pour investir dans les crèches ?
M. Adrien Taquet, secrétaire
d'État. - Effectivement, les objectifs de
la convention d'objectifs et de gestion ne seront pas atteints, et ce n'est pas
la première fois
- il y a, cette fois-ci, l'incidence de la
crise sanitaire et des élections municipales. Les petites
collectivités territoriales ont du mal à s'engager pour des
raisons de coût, il y a aussi des problèmes liés à
l'ingénierie, c'est pourquoi la CNAF a mis en place une
équipe dédiée à l'aide aux collectivités. Il
faut compter aussi avec les autres modes d'accueil, ce qui fait la richesse de
notre modèle - il n'y a pas un mode d'accueil meilleur que les
autres, cela dépend de l'enfant, de son âge, de son environnement
familial. Ces autres modes d'accueil se développent : les
micro-crèches, nous en avons élevé le seuil de 10 à
12 enfants, et, en particulier dans la ruralité, les maisons
d'assistantes maternelles, qui réunissent un peu le meilleur des deux
mondes, du collectif et de l'individuel, en sortant les assistantes maternelles
de l'isolement. Ensuite, il faut peut-être s'interroger sur le
caractère facultatif de cette compétence petite enfance et sur
l'intérêt qu'il y aurait à la rendre obligatoire
- mais je ne fais que poser la question.
Mme Monique Lubin, rapporteure. - Des collectivités se désintéressent de ce mode d'accueil, les élus n'en voient pas l'urgence ; ils semblent davantage motivés pour des installations sportives, mais ils regardent surtout les difficultés pour construire des crèches, d'autant que c'est moins porteur politiquement. Il y a un problème de coût, de responsabilité, mais sans parler de compétence obligatoire qui devrait être assortie de moyens, il faut expliquer aux collectivités l'intérêt d'exercer cette compétence. Dans nos ruralités, on oppose aux crèches les maisons et réseaux d'assistantes maternelles, alors que le collectif revêt un caractère important pour les jeunes enfants et les familles.
M. Adrien Taquet, secrétaire d'État. - Vous avez raison, il est important que les enfants aillent tôt en collectif, je l'ai vu en particulier lors de mon déplacement en Guyane - avec les spécificités de ce territoire, où les besoins sont très importants et peu couverts, parce qu'il manque des porteurs de projets. Le schéma départemental enfance et famille est un bon outil contre le morcellement de l'offre pour la petite enfance, je l'ai vu en action dans les Côtes d'Armor. C'est le lieu où peuvent se retrouver autour de la même table tous ceux qui exercent la compétence petite enfance, pour définir une stratégie territoriale d'accueil du jeune enfant et d'accompagnement de la parentalité.
M. Laurent Burgoa, président. - La compétence petite enfance n'intéresse pas toujours car elle est très lourde en budget de fonctionnement, alors que c'est là où les marges de manoeuvre sont les plus faibles. Une communauté de communes du Gard a failli être mise sous tutelle du fait des charges financières entraînées par cette compétence petite enfance.
M. Rémi Cardon. - Une remarque sur l'accompagnement des jeunes dans le cadre de la Garantie jeunes : je crains que les missions locales ne se sentent placées en concurrence avec Pôle emploi, et que les jeunes eux-mêmes ne sachent pas bien à quelle porte frapper. La question de l'égalité territoriale se pose aussi : le Gouvernement pense-t-il amplifier les moyens pour certains territoires, pour plus d'équité ?
Ensuite, je redoute le manque de compréhension sur la Garantie jeunes, la plateforme est certes simple, à condition de s'y intéresser. Pour avoir été administrateur d'un centre régional d'information jeunesse (CRIJ), je peux témoigner de ce que les moyens ont été réduits, et qu'il est devenu difficile de produire une information de qualité pour les jeunes, alors que le réseau d'information jeunesse est un outil connu et éprouvé. Il faut faire savoir aux jeunes qu'ils peuvent être accompagnés, l'enjeu n'est pas nouveau mais il est loin d'être réglé.
M. Adrien Taquet, secrétaire d'État. - Je partage vos constats, mais je ne peux guère répondre hors de mon champ de compétence. Sur l'information jeunesse, je vous crois volontiers. Sur la Garantie jeunes, vous avez entendu le Président de la République évoquant un revenu d'engagement qui va faire l'objet de discussions avec les partenaires sociaux, je ne peux guère vous en dire davantage. J'évoquais la Garantie jeunes pour le lien que je souhaite obligatoire avec les enfants suivis par l'ASE. Actuellement, nous avons une convention avec les différentes institutions qui participent aux politiques publiques en direction des jeunes, pour que chacune désigne un « référent ASE » qui se rapproche des équipes d'ASE, car trop souvent, les accompagnants n'ont pas de culture de l'insertion professionnelle. Je me suis rendu dans une mission locale où ce lien est très bien établi, avec un suivi des jeunes de l'ASE. Nous sommes allés plus loin dans la loi, avec cet accès automatique. Pour le reste, Élisabeth Borne serait plus à même de vous répondre.
Mme Monique Lubin, rapporteure. - Quel bilan faites-vous des bonus territoires et mixité ? Sont-ils suffisants pour atteindre les familles moins favorisées, ou faudrait-il un ciblage plus précis sur les quartiers prioritaires et les familles modestes ? Dans bien des zones rurales et des quartiers prioritaires, les familles hésitent à recourir à un mode de garde collectif quand la maman ne travaille pas, alors que l'accueil collectif est assurément un soutien aux familles défavorisées : comment les y aider ?
M. Adrien Taquet, secrétaire d'État. - Je n'ai pas les données chiffrées avec moi, mais je vous les communiquerai - je sais que le bonus fonctionne bien pour le lien avec le handicap. Faut-il amplifier ces mécanismes ? Peut-être, même s'il ne faut pas perdre de vue la diversité des modes d'accueil. Il faut aussi aider le retour à l'emploi des femmes, c'est un sujet lié. C'est la vocation des crèches à vocation d'insertion professionnelle. Nous allons en effectuer une évaluation approfondie, et sur cette base, nous pourrions développer ce dispositif dans la prochaine convention d'objectifs et de gestion. Je pense également aux crèches à horaires atypiques ; en Finlande, des parents peuvent laisser leurs enfants en crèche jusqu'à cinq jours de suite, y compris les nuits, lorsque la situation professionnelle le commande, ceci pour des enfants jusqu'à 6 ans ; et dans l'évaluation faite de ces crèches, on voit qu'elles bénéficient d'abord aux plus précaires.
Après les rixes dramatiques qui se sont produites en Essonne, où des adolescents ont tué d'autres adolescents, j'ai rencontré les acteurs locaux, associations, maires, professionnels ; ils m'ont décrit cette réalité en grande couronne, où l'éloignement du lieu de travail fait que des parents laissent leurs enfants seuls. Des maires m'ont dit devoir faire une sorte de garde partagée avec les parents, qui partent très tôt le matin et reviennent tard le soir - c'est pour cela que nous avons besoin de crèches à horaires atypiques. Nous n'en disposons pas assez. Il y en a par exemple près de Roissy, il faut développer ce type d'accueil. Le plan « bandes » prévoit des mesures pour les plus grands, j'ai demandé à la Mutualité française de faire un panorama des dispositifs existants dans notre pays, pour aider les acteurs à mettre en place ces crèches à horaires atypiques qui nous font encore bien trop défaut.
Mme Monique Lubin, rapporteure. - Où en est-on sur la formation des professionnels de la petite enfance ?
M. Adrien Taquet, secrétaire d'État. - Le plan de lutte contre la pauvreté prévoyait déjà de renforcer la formation des professionnels. Les discussions ont pris du temps avec les organismes de formation. Une signature est intervenue dans deux des trois branches professionnelles. Les premières formations sont lancées depuis peu, autour de sept modules qui vont de la qualité de l'accueil, à l'éveil culturel et artistique, en passant par les questions de langage. Il n'y a nul besoin d'attendre l'école pour avoir un projet pédagogique.
Mme Monique Lubin, rapporteure. - Peut-on envisager un rapprochement des structures de la petite enfance avec les établissements scolaires ? Peut-il y avoir des échanges avec les maternelles et des sortes de passerelles ?
M. Adrien Taquet, secrétaire d'État. - Oui, il pourrait y avoir des échanges. Il faut, autant que possible, éviter le travail en silo. Il est pertinent d'avoir un projet pédagogique, tant en crèche qu'en maison d'assistantes maternelles. Mais je crois que le problème central n'est pas dans la distance avec l'école. Nous sommes plus préoccupés par l'éclatement des structures d'accueil, qui forment un système peu lisible. Il n'existe pas de guichet unique pour connaître l'offre disponible. Même le maire n'a qu'une vision parcellaire de l'offre sur la petite enfance. Ensuite, il y a un problème sur le reste à charge, qui varie beaucoup selon le mode d'accueil, c'est un problème.
Mme Monique Lubin, rapporteure. - Effectivement, d'autant que ce reste à charge peut accentuer les inégalités. Que pensez-vous de l'institution d'un service public de la petite enfance ?
M. Adrien Taquet, secrétaire d'État. - Je peux vous renvoyer la question, car je ne suis pas sûr qu'on mette tous la même chose dans le périmètre d'un tel service public. S'agit-il d'instaurer un droit garanti à une place, comme en Allemagne ? Ou bien un nouveau partage des compétences, avec la notion d'obligation ? Je crois que nous avancerons progressivement vers ces objectifs, mais je n'en connais pas toutes les modalités - mon objectif c'est que tous les parents puissent se voir proposer une place, et à tout le moins une information précise et claire sur ce qui existe. Nous pouvons commencer par atténuer les inégalités en particulier sur le reste à charge.
Mme Monique Lubin, rapporteure. - En matière d'apprentissage du langage, dont on sait qu'il est déterminant pour le reste de la vie, envisagez-vous des programmes spécifiques visant les enfants les moins bien dotés ?
M. Adrien Taquet, secrétaire d'État. - Nous soutenons des actions spécifiques autour de la lecture, mais nous n'avons pas de plan précis à ce stade. D'une manière générale, nous avons travaillé avec Santé publique France pour constituer une série de messages sur une dizaine de sujets importants dont on sait qu'ils donnent lieu à des informations erronées, sachant que deux Français sur trois vont sur internet quand ils cherchent une réponse à leurs questions sur la petite enfance. Nous avons des messages sur le syndrome du bébé secoué, sur les perturbateurs endocriniens, sur l'éveil culturel et artistique, nous avons constaté que même les professionnels disaient des choses hétérogènes sur ces sujets. Nous développons une application sur les 1 000 premiers jours pour accompagner les parents, leur donner des informations sur cette période si particulière du début de l'enfance, qui peut être aussi celui de la parentalité. Il y a aussi une expérimentation avec un cadeau à la naissance, qui contient un livre à lire à l'enfant, c'est intéressant.
Mme Monique Lubin, rapporteure. - Nous le faisons dans les Landes.
M. Laurent Burgoa, président. - Merci encore pour toutes ces informations. Notre prochaine réunion se déroulera à la reprise de la session au mois de septembre, pour la présentation du rapport d'information.
Ce point de l'ordre du jour a fait l'objet d'une captation vidéo qui est disponible en ligne sur le site du Sénat.
La réunion est close à 18 h 15.