Mercredi 8 janvier 2020
- Présidence de M. Christian Cambon, président -
La réunion est ouverte à 9 h 45.
Audition de S.E. M. Stéphane Visconti, ambassadeur, coprésident français du groupe de Minsk, sur le Haut-Karabagh
M. Christian Cambon, président. - Monsieur l'ambassadeur, nous sommes très heureux de vous accueillir. Vous êtes ambassadeur pour le partenariat oriental de l'Union européenne et de la mer Noire depuis 2016 et coprésidez le groupe de Minsk en tant que représentant de la France.
Vous avez été par ailleurs ambassadeur en Lettonie et consul général de France à Munich.
Le Sénat a récemment autorisé la ratification de l'accord de partenariat global et renforcé entre l'Union européenne et l'Arménie, sur le rapport de notre collègue Joël Guerriau.
À cette occasion, plusieurs d'entre nous ont souhaité faire un point sur la question lancinante du Haut-Karabagh, qui fait partie des conflits que l'on dit « gelés », issus de l'héritage post-soviétique, à propos desquels on craint toujours de voir repartir une crise dans une région qui en connaît déjà tant.
Depuis maintenant trente ans, le Haut-Karabagh revient régulièrement dans l'actualité sans qu'aucune solution durable ne se dessine. Vous assurez avec vos homologues russe et américain la coprésidence du Groupe de Minsk, constitué en 1992 au sein de l'OSCE pour superviser le processus de paix dans ce conflit.
Après un regain de violence en 2016, la situation semble aujourd'hui stabilisée. Vous nous direz ce qu'il en est.
L'arrivée au pouvoir d'un nouveau Premier ministre en Arménie, en 2018, est-elle un facteur d'apaisement ? Quel est l'état d'esprit du président azerbaïdjanais ? Ces deux dirigeants se sont rencontrés à Vienne en mars 2019. Cette rencontre a suscité des espoirs de réconciliation, mais qu'en est-il concrètement ressorti ?
Le processus politique semble bloqué : une feuille de route avait été établie à partir des principes dits « de Madrid ». Un retour à ces principes est-il envisageable ?
Quel rôle les grandes puissances, notamment la Russie, mais aussi la Turquie et l'Iran, jouent-elles dans ce conflit ?
Enfin, comment évaluez-vous la situation sur le plan humanitaire, notamment pour les centaines de milliers de personnes déplacées ?
M. Stéphane Visconti, ambassadeur, coprésident français du groupe de Minsk. - Mesdames et messieurs les sénateurs, je suis honoré par votre invitation à venir vous parler du conflit du Haut-Karabagh. Je souhaite avant tout vous adresser mes meilleurs voeux pour cette année 2020, qui s'ébauche dans un contexte de très fortes turbulences.
Le Haut-Karabagh est une enclave montagneuse située en Azerbaïdjan. Certains territoires entourant cette entité sont occupés depuis le cessez-le-feu et servent, selon ce pays, de zones de protection contre d'éventuelles attaques de l'Azerbaïdjan.
Le Haut-Karabagh n'est officiellement reconnu ni par l'Arménie ni internationalement. L'Arménie et l'Azerbaïdjan mènent une diplomatie multivectorielle en essayant de ne pas s'aliéner leurs puissants voisins, la Russie, l'Iran et la Turquie, dont ils ont été suzerains au fil des siècles.
La Syrie, qui est proche, compte une forte communauté arménienne. Suite à la guerre, quelques réfugiés syriens d'origine arménienne se sont installés sur les territoires entourant le Haut-Karabagh, ce qui suscite le mécontentement de Bakou, qui y voit une nouvelle preuve de la colonisation et d'une annexion rampante.
On est ici au coeur d'un système qui est en « mouvement tectonique », pour reprendre l'expression récente du ministre des affaires étrangères azerbaïdjanais, ce qui explique un calme relatif sur le terrain.
Vous avez parlé, monsieur le président, d'un conflit « gelé ». On parle aussi souvent de conflit « territorial ». Ce n'est en fait réellement ni l'un ni l'autre. Hier encore, un soldat azerbaïdjanais était tué par un sniper arménien, tout près de la frontière avec la Géorgie, au cours de travaux de fortification et il est à craindre que l'Azerbaïdjan prenne des mesures de représailles.
Le faible niveau de violence s'explique selon moi par les craintes géopolitiques que ces petits pays intègrent dans leur environnement. Ce n'est pas le bon moment pour se déclarer la guerre, mais le conflit ne s'arrête jamais, les événements de 2016 l'ont montré.
Est-ce un conflit territorial ? Oui et non. Pour les Azerbaïdjanais, la perte de leur unité territoriale leur fait un peu penser à celle de l'Alsace-Lorraine. Pour Bakou, le conflit durera jusqu'à ce que les territoires soient libérés et restitués.
Il s'agit des suites d'une guerre, mais c'est avant tout un dossier identitaire. Pour les Arméniens, même au-delà des frontières de la République d'Arménie, le Haut-Karabagh est une terre sacrée. C'est le seul territoire où a existé durant quelques années, au XVIIIe siècle, un petit état arménien indépendant. Il faut donc absolument le défendre contre la menace que représente l'Azerbaïdjan.
Pour l'Azerbaïdjan, cette zone fait partie d'anciens territoires (Khanats) qui furent mongols sous Tamerlan, longtemps ottomans et encore plus longtemps persans. Ils ont connu des situations complexes. Pendant deux siècles, la population, majoritairement arménienne, a connu l'autonomie, sous l'autorité d'un suzerain de la dynastie Kadjar.
Historiquement, il est très difficile de donner raison à l'un ou à l'autre du fait des mouvements de populations.
Ce qui est intéressant c'est la spécificité de ce dossier et son caractère géopolitique. Je pense aux grandes puissances et aux puissances de regain - comme la Russie, la Turquie, dont les initiatives créent des interrogations, l'Iran - ou à la perception d'un intérêt moins marqué par les Américains dans cette région. On a ici un concentré de puissances qui s'affrontent, ce qui n'est pas l'approche de l'Union européenne, ce qui nous donne un avantage, j'y reviendrai.
Ce qui est intéressant, c'est le format des négociations. Ainsi que vous avez mentionné, monsieur le président, le groupe de Minsk comprend une quinzaine d'États. La coprésidence, chargée de faciliter les négociations sur la base d'un mandat de 1997, est composée des États-Unis, de la Russie et de la France, membres permanents du Conseil de sécurité qui - c'est le reproche que nous adressent parfois la Turquie et l'Azerbaïdjan - hébergent de nombreux citoyens d'origine arménienne. Ils nous considèrent parfois comme un club chrétien, peu impartial et peu objectif, favorisant le statu quo arménien et plaidant pour l'annexion, ce qui est évidemment totalement faux.
Ce format fonctionne parfaitement. Je ne sais pas s'il serait aujourd'hui possible de réunir un Russe, un Américain et un Français. Nous sommes toujours ensemble et sommes reçus par Sergueï Lavrov, parfois par le président Poutine ou à la Maison Blanche, au National security council (NSC), etc. C'est un exemple unique, avec l'exploration de l'espace, où les États-Unis, la Russie et la France travaillent conjointement, sans tenir compte des contingences géopolitiques.
Nous sommes aidés sur place par une petite équipe de l'OSCE, le long de la ligne de contact, qui enregistre les violations du cessez-le-feu des deux côtés et aide parfois - sans que cela ne se sache trop - à ramener le corps des soldats tombés dans le no man's land. Tout cela demande des jours de négociations.
Troisième spécificité : ce dossier est exclusivement géré par les deux dirigeants. Il n'y a pas de diplomatie parallèle, quasiment aucun contact entre les sociétés civiles. Nous négocions la moindre décision en direct avec les ministres des affaires étrangères, mais les arbitrages finaux reviennent personnellement aux deux dirigeants.
Les populations avaient pourtant l'habitude de vivre ensemble. 400 000 Arméniens habitaient Bakou et partageaient les mêmes immeubles, la même langue, prenaient leur douche ensemble à l'armée. Aujourd'hui il n'y a plus de contacts entre eux, si ce n'est pas l'intermédiaire des humbles serviteurs que nous sommes, qui tentent de faciliter un minimum de dialogue, ce qui rend les choses très compliquées.
Quand un incident éclate, on nous appelle pour nous dire que quelqu'un est mort et que l'alerte est maximum. Ils ne se parlent pas seuls. C'est très personnalisé, et notre travail - c'est ce qui le rend intéressant - consiste à faciliter les relations et les échanges entre les deux dirigeants.
Où en est la négociation ? Elle est aujourd'hui quelque peu paralysée, pour plusieurs raisons, la principale étant que les deux acteurs campent sur des positions qui ont rarement été aussi maximalistes, chacun considérant que le temps joue pour lui et renforce ses cartes.
L'Azerbaïdjan s'est économiquement beaucoup redressé, a acquis des systèmes d'armement sophistiqués en grand nombre, mène des exercices militaires majeurs, bénéficie de l'appui diplomatique de nombreux pays, y compris au sein de l'Union européenne, parce qu'il promeut le principe de l'intégrité territoriale, principe évidemment fondamental dans les relations internationales et que la France promeut dans ce dossier, comme dans d'autres, sans aucune ambiguïté. Dans le cas du spécifique du Haut-Karabagh, ce principe est nécessairement équilibré, dans le projet de règlement, par un autre principe d'Helsinki, le droit des peuples à l'autodétermination. Et il n'est de secret pour personne que certains partenaires sont plus sensibles au premier principe qu'au second.
Les Arméniens estiment quant à eux, que même si leur situation économique, qu'ils espèrent voir évoluer favorablement, n'est pas comparable, l'impératif pour eux est la sécurité. Les territoires où est déployée leur armée forment une zone tampon. Certains pensent à Erevan et Stepanakert que viendra un jour où cette situation de fait pourrait être reconnue par une partie de la communauté internationale. Ils sont convaincus eux aussi que le temps joue pour eux.
Bien évidemment, les deux parties jouent un jeu dangereux car seul le temps et les évènements déterminent les gagnants et les perdants, et les lignes de fracture sont difficiles à prévoir.
La base du règlement sur laquelle nous travaillons, qu'on appelle le « plan Lavrov », est d'origine russe, même si mon collègue russe n'aime pas qu'on l'appelle ainsi. Sergueï Lavrov a, en effet, en grande partie rédigé ces documents de sa propre main, sur la base des fameux principes de Madrid et de ceux tirés de la charte finale de l'acte d'Helsinki.
La dynamique sur ce dossier doit s'ajuster aux changements intervenus, notamment en Arménie, M. Pachinian ayant déclaré qu'il ne se sentait pas entièrement lié par les négociations menées par ses prédécesseurs. La nouvelle équipe, qui veut plus de transparence, s'interroge sur les principes de Madrid.
L'Azerbaïdjan affirme avoir joué la carte de l'attentisme, que certains à Bakou qualifient de « bienveillant », en espérant une relance plus favorable des nouvelles autorités arméniennes.
Sous les auspices des coprésidents du Groupe de Minsk, les contacts entre les ministres et les deux dirigeants se poursuivent dans un climat suffisamment cordial pour que l'on puisse travailler. Nous réfléchissons à un prochain sommet, le moment venu. J'ai transmis l'invitation de principe du Président de la République à accueillir un sommet en France lorsque les deux dirigeants estimeront que les conditions sont réunies.
Paradoxalement, le bilan en termes de morts et de blessés est le meilleur des 26 dernières années. Jusqu'à hier matin, on comptait neuf morts sur l'ensemble de l'année, contre 30 à 40 auparavant. En avril 2016, lors de l'offensive azerbaïdjanaise, on a officiellement dénombré 180 morts. On pense qu'il y en a eu en réalité beaucoup plus, et ce pour un gain territorial somme toute limité.
Quels sont les enjeux ? Pour la France, le premier enjeu demeure la stabilité et la prospérité des peuples de la région, dans un esprit de justice conforme aux grands principes du droit. Notre mandat est clair, il est, aux côtés de la Russie et des Etats-Unis, d'aider les parties à résoudre ce conflit. Nous ne ménageons ni nos efforts ni nos initiatives en ce sens. Mais il est clair que les décisions relèvent de la seule volonté politiques des parties.
Par ailleurs, pour la France, notre implication, active dans ce format, aux côtés des Russes et des Américains, illustre la capacité de nos trois Etats à travailler ensemble. Nous montrons que nos trois pays, lorsqu'ils se concertent en confiance et pour une cause importante pour notre sécurité peuvent s'exprimer d'une seule voix. La tradition, lors des G8, était d'ailleurs d'avoir une déclaration commune entre le président Poutine et les présidents français et américain qui étaient sur place. Lors de notre dernière visite à Washington, nos interlocuteurs nous ont dit qu'il serait formidable d'y parvenir dans d'autres secteurs et que le monde s'en porterait sûrement bien mieux.
Nous n'avons pas de visées géopolitiques directes dans la région. Cela donne plus de valeur à la voix de la France. Même si nous n'avons pas les leviers militaires des Russes, ni le même degré d'influence, notre autorité et notre réputation d'équilibre et de probité nous sert.
La France a toujours été engagée et active sur ce dossier du Haut-Karabagh et ce au plus haut niveau. Le Président Chirac était très impliqué dans les négociations à la fin des années 1990 et début 2000. Ses successeurs l'ont été également.
Enfin, la France est considérée comme chef de file dans différentes enceintes. Je pense à l'Union européenne. Vous mentionniez le traité d'amitié et de coopération renforcée avec l'Arménie. Les institutions bruxelloises négocient un texte parallèle avec l'Azerbaïdjan. Le sujet du Haut-Karabagh constitue un point extraordinairement difficile dans ses aspects rédactionnels.
L'OTAN elle-même nous interroge au sujet des coopérations entre ces deux pays. C'est également vrai à New York, aux Nations unies, où je me rends régulièrement.
Je me rends à Genève après-demain pour préparer une prochaine réunion entre les deux ministres, à huis clos, fin janvier, pour reprendre langue. Cette information n'est pas encore publique.
M. Christian Cambon, président. - Où résidez-vous donc, monsieur l'ambassadeur ?
M. Stéphane Visconti. - Dans la Ville lumière ! Nous nous rendons sur place régulièrement, mais rencontrons aussi les ministres et les présidents à l'OSCE, à Vienne, à Genève, aux Nations unies lors de l'assemblée générale, lorsque les présidents et les premiers ministres se déplacent. Nous avons aussi le devoir d'informer les capitales des pays membres du groupe de Minsk. Nous effectuons beaucoup de déplacements. C'est parfois à Paris que les ministres se rencontrent, notamment au Quai d'Orsay. J'ai à l'esprit la rencontre du 16 janvier 2019, dans les salons de l'Hôtel du Ministre où a été lancée l'initiative de « préparation des populations pour la paix », endossée par le Président Aliyev et le Premier ministre Pachinian.
M. Christian Cambon, président. - Comment passe-t-on de l'Arménie au Haut-Karabagh ? Existe-t-il un couloir ?
M. Stéphane Visconti. - On compte en réalité trois couloirs.
Le Haut-Karabagh est protégé à l'Est par la province d'Agdam. Toute la zone entre l'Arménie et le Haut-Karabagh est occupée. Il existe donc une continuité territoriale de facto. Il s'agit de zones très montagneuses. En plein hiver, on met huit heures pour se rendre au Haut-Karabagh, dans des conditions difficiles. Le corridor de Latchin constitue la plus courte. Dans nos accords - c'est un point vital -, il est prévu que ce couloir restera, dans des conditions à définir, sous contrôle de l'OSCE et des forces arméniennes.
Il existe aussi une ancienne route remontant à l'époque soviétique qui, au Sud, longe la frontière iranienne et se dirige vers le Haut-Karabagh. Cette route est en mauvais état. On l'emprunte en 4x4. Elle comporte des mines. Tous les villages et la voie ferrée qui existaient à l'époque soviétique ont été détruits.
Enfin, les Arméniens ont construit dans le district de Kalbajar une route humanitaire bien plus facile d'accès sur la base d'une ancienne route soviétique qu'ils ont poursuivi jusqu'en Arménie. Elle est empruntée par les camions et nous l'utilisons également lorsque nous sommes pressés par le temps. On peut ainsi aller d'Erevan à Stepanakert en 4 heures environ. C'est ce qu'on appelle la route du Nord, la plus fréquentée, qui passe par la plaine.
M. Christian Cambon, président. - La parole est aux commissaires.
M. Robert del Picchia. - Nous rencontrons les mêmes problèmes au sein de l'Union interparlementaire (UIP), dont je suis membre du Bureau.
Est-il envisageable de tout remettre sur la table pour essayer de « détricoter » ces problèmes ?
M. Gilbert-Luc Devinaz. - Monsieur l'ambassadeur, le groupe d'amitié France-Arménie, que je préside, vous avait reçu en mars 2018, avec le groupe d'amitié France-Caucase, présidé par Alain Houpert. Depuis, il s'est passé beaucoup de choses. En octobre, le Sénat a accueilli une délégation de députés arméniens, dont la majorité est issue du parti de Nikol Pachinian.
La Russie était alors en train de s'activer en Syrie et était très préoccupée par les propos tenus par les Turcs, repris par le pouvoir azerbaïdjanais, auxquels on ne prête pas toujours attention. Par ailleurs, ils ont beaucoup insisté sur la coopération décentralisée, nous encourageant à la développer. Pourquoi l'État s'obstine-t-il à dénoncer les démarches des collectivités territoriales ? Si je pose la question, c'est en effet que ma commune est concernée...
D'autre part, le Haut-Karabagh va connaître au printemps une élection présidentielle. Est-elle de nature à changer la donne ? Nikol Pachinian a dit qu'il représentait l'Arménie, mais ne se sent pas le droit de parler au nom du Haut-Karabagh. Dans ces conditions, comment ce dernier est-il associé à la médiation ?
Selon certains articles, Nikol Pachinian souhaite tout compte fait aller vers la paix avec l'Azerbaïdjan. Comment est-ce perçu par le Haut-Karabagh ? Comment évolue la confiance entre le Haut-Karabagh et l'Arménie ? Sur le dos de qui la paix peut-elle se faire ?
M. Christian Cambon, président. - Nous recevons de très fréquentes visites de parlementaires en provenance de ces deux pays.
M. Olivier Cadic. - J'étais en Arménie il y a deux ans au moment de la révolution. Je me trouvais dans le bureau du président Sarkissian avec notre ambassadeur, Jonathan Lacôte, et le ministre des affaires étrangères Nalbandian. Il était étonnant de voir qu'au moment où l'Arménie basculait, le ministre avait pour seule préoccupation de savoir qui allait chanter pour la France lors du sommet de la francophonie. L'histoire se passe parfois sous les yeux de ceux qui l'ont créée mais qui ne la comprennent pas !
Au moment de ce déplacement, je me suis également rendu à Goris, ville proche du Haut-Karabagh, pour découvrir le Centre français cardiovasculaire, qui existe grâce au soutien de notre collègue Jean-Noël Guérini. Ce centre a déjà sauvé 1 500 vies.
Quand on passe le long de la frontière, la tension est palpable. Cette pression présente un coût humain pour l'Arménie : les jeunes doivent effectuer deux ans de service militaire dans le Haut-Karabagh pour protéger les territoires, et cela pèse sur le développement.
Si on veut se projeter dans le futur, il faut parfois regarder le passé. Or le conflit est gelé depuis 1995 et l'Arménie abrite toujours 3 millions d'habitants, alors que l'Azerbaïdjan, qui était auparavant à 7 millions d'habitants en compte à présent plus de dix millions.
La croissance de l'Arménie demeure plate contrairement à celle de l'Azerbaïdjan, qui s'arme par ailleurs. Pour qui le temps joue-t-il donc ?
M. Jean-Noël Guérini. - Merci pour les propos me concernant.
Il m'arrive deux à trois fois par an, à titre privé, de me rendre en Arménie. La question la plus épineuse concerne le statut du Haut-Karabagh, à propos duquel les deux parties ont adopté des positions de plus en plus intransigeantes, chacune insistant sur le fait qu'elle doit exercer sa souveraineté sur le territoire.
Certains d'entre vous l'ont dit : il existe une certaine marge d'optimisme, le Premier ministre arménien ayant estimé que la solution au conflit doit être acceptable pour les Azerbaïdjanais comme pour les Arméniens.
On peut lire dans la presse que certaines discussions, à Bakou, portent en coulisses sur l'autonomie qui pourrait être accordée à un Haut-Karabagh dominé par l'Arménie, même s'il ne revient jamais dans le giron de l'Azerbaïdjan.
Quel est votre point de vue ? Pouvez-vous nous en dire plus ? Arrivera-t-on un jour à une solution ?
M. Pierre Laurent. - Vous dites qu'on ne peut pour le moment savoir comment ce problème va se résoudre et que le principal objectif est celui du statu quo, avec le risque de voir la bombe à retardement exploser un jour ou l'autre, compte tenu de la situation géopolitique et du risque d'embrasement. On peut donc se demander pour qui joue le temps.
Dans ce cadre difficile, les principes de Madrid restent-ils intangibles ? Vous avez dit qu'on ne connaissait pas la position de l'actuel président arménien. Quelle initiative supplémentaire pourrait-on prendre ?
S'agissant des coopérations décentralisées, la réaction française paraît extrêmement dure. Lors du dîner devant le Conseil de coordination des organisations arméniennes de France (CCAF), l'an dernier, le Président de la République a fait une réponse peu diplomatique, provoquant beaucoup d'incompréhensions. Pourquoi dénoncer systématiquement les chartes d'amitié, qui ne sont pas vraiment des coopérations décentralisées mais des initiatives symboliques et modestes ?
Mme Sylvie Goy-Chavent. - Monsieur l'ambassadeur, un million de déplacés azerbaïdjanais se trouvent dans des camps devenus de véritables villages, avec cliniques, écoles, etc. Ces gens nourrissent encore l'espoir de rentrer au Haut-Karabagh, après en avoir été expulsés de manière violente par les militaires.
Le conflit ne pourrait-il être résolu par la restitution de certaines provinces alentour ? Un geste dans ce sens pourrait-il arrondir les angles ?
M. Christian Cambon, président. - Monsieur l'ambassadeur, vous avez la parole.
M. Stéphane Visconti. - Quelques clarifications tout d'abord à propos des autorités de facto de Stepanakert, ville que les Azerbaïdjanais dénomment Khankendi. Le Haut-Karabagh a déclaré son indépendance en 1991, dans la foulée des déclarations d'indépendance de l'Arménie et l'Azerbaïdjan. Depuis, ni cette indépendance ni les autorités qui l'incarnent ne sont reconnues par aucun État, en dehors de l'Abkhazie, autre territoire sécessionniste.
Il apparait clairement qu'une reconnaissance officielle par l'Arménie de cette entité signifierait la fin des négociations et la reprise de la guerre. Je rappelle que la France ni aucun pays au monde ne la reconnaissent.
Cela ne veut pas dire que nous n'avons pas, avec l'accord de l'Azerbaïdjan, de contact avec les représentants de facto, dans le cadre du mandat que nous exerçons avec mes collègues américain et russe.
Tout le monde comprend qu'il n'y aura aucune solution sans que les principaux intéressés la valident.
La participation aux négociations de Karabatsis est prévue depuis le début dans les textes.
Lorsqu'ils participaient, ainsi que des représentants de la communauté azerbaïdjanaise (jamais lors des sommets), le dialogue était heurté et l'on n'arrivait à rien.
Tous les projets de règlement sur la table et en cours de discussion prévoient une consultation des autorités de facto, une fois que les grands principes et l'architecture de la solution auront été approuvés dans un document cadre qui convienne à la fois à Bakou et à Erevan.
Quant aux initiatives, elles ne manquent pas. Les trois pays co-présidents du Groupe de Minsk les soumettent régulièrement aux plus hautes autorités des deux parties. Nos propositions concernent à la fois la substance du règlement, y compris les approches possibles pour surmonter les divergences les plus aiguës et des mesures d'ordre humanitaire destinées à renforcer la confiance et soulager les populations.
Nous sommes parvenus à ce que des visites croisées de journalistes soient organisées en décembre dernier. La France appuie aussi avec vigueur l'activité du Comité international de la Croix-Rouge (CICR) pour le sort des détenus et l'identification future des soldats disparus lors du conflit dans les deux camps. Nous incitons les parties à se monter coopératives et ne relâcherons jamais nos efforts.
Mesdames, Messieurs les Sénateurs, comme pour d'autres conflits, c'est dans la volonté politique des parties belligérantes que réside avant tout une perspective de paix.
Je vous remercie de votre attention.
M. Christian Cambon, président. - Merci. Ceci nous permet de mieux comprendre la problématique de la région. C'est un sujet que nous surveillons de près.
Nomination de rapporteurs
M. Christian Cambon, président. - La commission nomme rapporteurs :
- M. Richard Yung sur le projet de loi n° 199 (2019-2020) autorisant l'approbation de la convention entre le Gouvernement de la République française et le Conseil Fédéral suisse relative à la reconnaissance réciproque des poinçons officiels apposés sur les ouvrages en métaux précieux et les ouvrages multimétaux ;
- Mme Hélène Conway-Mouret sur le projet de loi n° 202 (2019-2020) autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République fédérale d'Allemagne relatif aux modalités de financement des infrastructures et de l'acquisition des outils de formation dans le cadre de la coopération franco-allemande dans le domaine du transport tactique aérien ;
- M. Hugues Saury sur le projet de loi autorisant la ratification du deuxième protocole additionnel à la convention européenne d'extradition, du troisième protocole additionnel à la convention européenne d'extradition et du quatrième protocole additionnel à la convention européenne d'extradition (sous réserve de son dépôt).
Questions diverses
M. Christian Cambon. - Mes chers collègues, à la suite des décisions du Bureau de la commission, il nous reste des rapporteurs à désigner pour les deux rapports d'information de la commission sur les sujets « défense ». Je rappelle que ces rapports ne donneront pas lieu à des déplacements lointains.
Pour l'avion de combat du futur, le SCAF, j'ai reçu la candidature de Ronan Le Gleut et Hélène Conway-Mouret, ce qui est logique, ce rapport étant une déclinaison du rapport sur l'Europe de la défense. Ils sont donc désignés comme rapporteurs. Olivier Cadic sera associé, à sa demande, aux auditions.
Les deux rapporteurs sont donc également désignés pour participer à la prochaine réunion franco-allemande qui devrait avoir lieu à Berlin le 2 mars. Au nom du groupe de l'Union centriste, c'est M. Jean-Marie Bockel qui y participera s'il le souhaite.
Pour le rapport sur l'« Après porte-avions Charles de Gaulle », Olivier Cigolotti et Gilbert Roger seront les rapporteurs. Seront associés aux auditions, suivant leur demande, Cédric Perrin, Pascal Allizard, Philippe Paul, Bruno Sido et Richard Yung.
Il n'y a pas d'opposition ? Il en est ainsi décidé.
Audition de M. Vito Rosario Petrocelli, président de la commission des affaires étrangères du Sénat italien
M. Christian Cambon, président. - Monsieur le Président Petrocelli, merci d'être venu à Paris à notre invitation, après une première rencontre informelle que nous avons eue à Rome en septembre dernier, dans le cadre d'une mission du groupe interparlementaire d'amitié France-Italie. C'est, je l'espère, le début d'une longue histoire : notre commission entretient des liens étroits et fréquents avec les commissions homologues des parlements britannique et allemand, mais à ce jour nous n'avions pas de coopération aussi régulière avec le Sénat italien, que nous connaissons bien pourtant. J'ai voulu combler ce manque, et je vous ai proposé de venir vous exprimer devant notre commission. Je vous remercie beaucoup d'avoir accepté cette invitation et d'avoir fait le déplacement jusqu'à nous.
L'Italie est en effet un partenaire majeur pour la France. Puisque c'est la saison des voeux, je remarque que l'année 2020 commence, pour notre relation, sous de meilleurs auspices que 2019, et je formule le voeu que cela continue dans les mois à venir !
Les difficultés du début de 2019 ont été comme un déclencheur et nous ont fait prendre conscience, de part et d'autre, que nous faisions fausse route. Car l'amitié franco-italienne est aussi évidente qu'indispensable.
Évidente, par la culture, l'histoire, la géographie, les valeurs partagées, l'engagement européen qui depuis toujours nous unissent et nous rassemblent. C'est d'ailleurs la culture et l'histoire qui nous ont rapprochés dans les derniers mois, autour de l'immense figure de Léonard de Vinci : le 2 mai 2019, jour du 500ème anniversaire de la mort du peintre et savant italien, le président français recevait son homologue le président Sergio Mattarella à Chambord. Ces jours-ci, l'exposition Léonard de Vinci au musée du Louvre est un grand succès populaire.
La relation franco-italienne est également indispensable pour réguler le monde d'aujourd'hui : les événements des dernières heures viennent encore de rappeler à quel point notre monde est troublé. Le thème de notre rencontre de ce matin, « l'analyse franco-italienne du contexte stratégique : un regard croisé », va nous conduire à évoquer un nombre important de crises où nos intérêts sont très étroitement liés : qu'il s'agisse bien évidemment de la situation de sécurité en Afrique du nord et au Sahel, mais tout particulièrement en Libye, pays que l'Italie connait si bien et qui se trouve aujourd'hui à nouveau au bord du gouffre, avec une intervention turque dans ce pays déjà si fragmenté, qui viendra fragiliser nos efforts pour une solution politique.
Autre sujet d'intérêt commun, la question des migrants, et plus globalement de la sécurité de la Méditerranée. Nous reconnaissons que nous avons trop longtemps laissé l'Italie un peu seule, sans que l'Europe fasse preuve d'assez de solidarité.
Par ailleurs, l'Italie est aussi impactée que la France par la situation à Chypre et les forages turcs illégaux ;
Membre de l'alliance atlantique, l'Italie est concernée au premier chef par la réflexion lancée par le Président de la République française sur le nécessaire « réveil stratégique » de l'organisation, qui doit redevenir une alliance à dimension plus politique.
Membres fondateurs de l'Union européenne, l'Italie et la France ont des analyses parfois divergentes, parfois convergentes, sur son avenir - je pense en particulier à l'élargissement de l'Europe aux Balkans occidentaux. Nous sommes tous deux concernés par le Brexit, qui est, pour la France, un contresens géopolitique qui affaiblit l'Europe dans son entier.
Enfin, France et l'Italie sont toutes deux alliées des Etats-Unis. Quelle est votre analyse des difficultés que nous rencontrons dans la relation transatlantique et des divergences d'analyse que nous avons avec les Américains, en particulier au Moyen-Orient ?
Vous le voyez, nous avons beaucoup de sujets à aborder ensemble ! D'ailleurs il était évoqué que la relance de notre coopération puisse passer par un nouveau traité bilatéral du Quirinal : c'est notre souhait, allons plus loin dans la coopération.
M. Vito Rosario Petrocelli. - Je me réjouis que nous puissions échanger aujourd'hui sur les difficultés des mois passés, et sur la façon dont nous avons dépassé ces difficultés en rappelant nos liens amicaux très forts et anciens. Nous avons des frontières, des traditions culturelles et même culinaires communes. Je voudrais tout d'abord souligner des évolutions qui concernent nos deux pays. En Italie comme en France, les dernières années ont vu l'arrivée de forces politiques nouvelles. Le changement ne touche pas que le personnel politique, mais aussi l'ensemble de la culture politique. Il y a dans nos deux pays une demande très forte pour un changement dans la société. Cela se traduit par exemple, en France, par les Gilets jaunes, ou en Italie par le mouvement des « sardines ». La France et l'Italie sont, par ailleurs, deux pays complémentaires. La France a de très grands groupes internationaux, l'Italie a un tissu dense de PME et ETI.
Notre pays a une vision et un attachement particuliers à la Méditerranée. Le Président Cambon a dit fort justement que la solution à la crise libyenne ne pourra être que politique, pas militaire. Comme l'a dit le Haut représentant de l'Union européenne, Josep Borell, cette solution politique doit reposer sur le respect de l'intégrité et de l'unité du pays. La France et l'Italie sont sur cette ligne.
La chute de Kadhafi a été une source de problèmes majeurs. L'Italie aurait dû peser plus à l'époque. Les flux migratoires en sont une conséquence. Il faut aussi penser à la révision du règlement de Dublin sur le traitement des migrants : l'Italie a assumé pendant des années l'impact principal de ce flux. Mais cela ne peut pas continuer. Il faut une répartition plus juste de l'effort. J'adresse aussi cette critique à certains partis italiens qui sont alliés avec des partis de pays de l'est de l'Europe qui refusent leur quota de migrants.
Les puissances extérieures à la région sont de plus en plus présentes en Méditerranée, comme la Russie ou la Chine. L'Italie veut des relations de coopération avec ces pays. La Russie est un partenaire stratégique. Il est temps de dépasser les sanctions, qui ont fait beaucoup de tort à l'Italie, mais aussi à l'Espagne ou même à la France.
La Méditerranée, c'est aussi l'action de la Turquie, et d'une certaine façon le conflit en Irak et en Iran. Sur ce dernier point, l'action du président Trump ne nous aide pas.
Je voudrais revenir à l'idée de Josep Borrell que la politique extérieure de l'Union européenne doit être adossée aux parlements nationaux, dans un élan de participation démocratique. C'est peut-être le moment pour que les parlements se mettent en situation de pouvoir soutenir le Haut Représentant. C'est pourquoi des échanges entre parlements nationaux comme celui que nous avons aujourd'hui sont vraiment les bienvenus, et je tenais à vous en remercier à nouveau. Il nous faut continuer dans cette voie de la coopération interparlementaire, comme nous le faisons déjà avec d'autres parlements européens, ou hors de l'Union européenne, comme avec le Conseil de la Fédération russe.
M. Christian Cambon, président. - Vos propos illustrent la complémentarité de nos approches, par exemple sur la nécessité de dialogue avec le Conseil de la Fédération de Russie. Aujourd'hui, il n'y a pas de crise majeure dans le monde qui puisse être réglée sans la Russie. Je relève aussi notre convergence sur la nécessité d'un rôle accru des parlements nationaux pour soutenir la politique extérieure de l'Union. C'est un point très important.
Il y a aussi quelques divergences d'analyse entre nos pays, par exemple sur les Balkans. Dans le même temps, les échanges au niveau parlementaire sont d'autant plus utiles que, sur la question de l'adhésion de la Macédoine du nord et de l'Albanie, nous ne nous reconnaissons pas entièrement dans la position du Président de la République, et les parlements peuvent aussi contribuer à rapprocher les positions des exécutifs.
M. André Vallini. - Concernant la Libye, je partage votre diagnostique. La presse explique que l'Italie soutient le Gouvernement de Fayed El-Sarraj, et la France plutôt Haftar. Cette opposition faite dans la presse vous semble-t-elle fondée ?
M. Olivier Cigolotti. - Depuis septembre 2019 et la constitution en Italie d'une nouvelle coalition, les relations entre nos deux pays se sont fort heureusement apaisées, notamment sur la question migratoire. En octobre 2019, au Luxembourg, la France, l'Italie, l'Allemagne et Malte ont fait des propositions pour une solution d'accueil partagé, avec des sanctions financières éventuelles. Malheureusement, seule une dizaine d'Etats membres sur 28 ont soutenu cette proposition. Pensez-vous qu'il soit encore possible de trouver une solution partagée sur ce dossier ?
M. Ladislas Poniatowski. - Où en sommes-nous aujourd'hui des relations franco-italiennes sur la Libye ? L'Italie reproche à la France de soutenir Total, dont les intérêts sont différents du groupe italien ENI, ce qui est dommage car je pense que ce sujet il pourrait y avoir convergence de ces entreprises.
M. Jean-Pierre Vial. - Je voudrais moi aussi évoquer la Libye. Je faisais partie de la mission de la commission sur ce sujet, qui s'était rendue à Rome. On nous y avait reproché de ne pas avoir assez associé l'Italie à nos prises de positions. De même, Ghassan Salamé a récemment regretté qu'il n'y ait pas une position unifiée de l'Europe. Qu'est-ce qui permettrait, selon vous, de rapprocher les positions de la France et de l'Italie, et plus largement des autres pays européens ?
M. Alain Cazabonne. - Vous avez évoqué la nécessité de dialoguer avec la Russie et porté une appréciation critique sur la politique des sanctions. Néanmoins, face à une agression telle que celle qui s'est produite en Crimée, comment répondre ? Les sanctions ne sont peut-être pas la bonne réponse. Mais peut-il n'y avoir aucune réponse ?
M. Yannick Vaugrenard. - La situation en Libye est déterminante pour les flux migratoires et pourrait entraîner, en cas d'effondrement, une résurgence de Daech. Ces derniers jours, les forces du maréchal Haftar se sont emparées de Syrte. La Turquie menace d'intervenir. Compte tenu de l'histoire ancienne de l'Italie vis-à-vis de la Libye, ne pensez-vous pas qu'une initiative diplomatique internationale majeure soit nécessaire, en liaison étroite entre l'Italie et la France ?
M. Richard Yung. - Nous partageons une préoccupation commune vis-à-vis du Japon. Plus d'une vingtaine d'enfants italiens sont retenus dans ce pays par leur parent japonais. C'est également le cas d'enfants franco-japonais. Nous devrions adopter une démarche commune sur cette question lancinante.
M. Olivier Cadic. - Sur l'élargissement ou l'« intégration », l'Italie a une position différente de celle de la France. Quels sont vos arguments en faveur d'une adhésion rapide à l'Union européenne des pays des Balkans occidentaux ?
M. Vito Rosario Petrocelli. - Merci pour vos questions intéressantes et précises auxquelles je vais essayer d'apporter des réponses concrètes.
Comme une bonne partie de la société italienne, je considère l'intervention de 2011 en Libye comme la plus grande défaite de l'Italie depuis la fin de la Seconde guerre mondiale. Personne en Italie n'a jamais tenu Kadhafi pour un champion de la démocratie. Mais l'Italie le considérait comme un allié crédible et surtout comme le fédérateur d'un pays qui, dans 50 ans, ne sera peut-être plus celui que nous connaissons aujourd'hui. Peut-être y aura-t-il à l'avenir deux entités séparées. Le gouvernement et le parlement italiens souhaitent le maintien de l'unité de ce pays dévasté par l'intervention de 2011. L'Italie se reproche à elle-même cette intervention et regrette de ne pas avoir eu le choix. Nous en supportons les conséquences terribles.
Depuis cette intervention, la question des flux migratoires est devenue en Italie le problème numéro un, comme l'est, en France, la question des attentats terroristes. Il nous revient de proposer des solutions et de trouver des convergences. Soutenir le gouvernement d'unité nationale de Sarraj est une nécessité. Cela ne signifie pas qu'il ne faille pas dialoguer avec Haftar. C'est ce que font l'Italie et la France. Mais la légitimité internationalement reconnue du gouvernement de Sarraj n'est pas discutable. L'Italie, la France, l'Allemagne et le Royaume-Uni doivent exercer une pression commune. Les flux migratoires sont actuellement sous contrôle grâce à l'action de l'Italie pour endiguer les départs, en particulier depuis la région tripolitaine, mais l'aggravation du conflit sur le terrain pourrait remettre en cause cette évolution.
Sur les Balkans occidentaux, la vision de l'Italie est différente de celle de la France. Mais l'Italie ne demande ni une adhésion rapide ni une accélération du processus. Elle souhaite simplement que le travail fait soit reconnu et surtout que nos promesses soient tenues. Des progrès ont été réalisés par les pays concernés, du point de vue de la coopération judiciaire, de la transposition du droit européen, des libertés civiles, de la presse... C'est-à-dire sur toutes les caractéristiques fondamentales des démocraties occidentales. Ce travail doit être reconnu sans préjugés qui s'opposeraient à une adhésion non pas accélérée mais graduelle, comme le prévoient les normes de l'Union européenne.
Ce qui se passe au Moyen-Orient est très inquiétant bien sûr. L'assassinat du général Souleymani va à l'encontre du droit international, il faut être clair. Nous représentons les citoyens italiens, il ne faut pas se cacher derrière des conventions diplomatiques ou de convenance. Cet acte signé, qui a été autorisé par le président Trump est un événement très grave et pourra représenter un précédent dangereux au-delà de la figure que représentait Souleymani et au-delà de la réaction que l'on a déjà vue la nuit dernière. Les intérêts italiens, et pas qu'en Iran, ne sont pas uniquement des intérêts économiques. Ce sont des intérêts qui impliquent tous les pans de la société : le monde de la recherche universitaire, archéologique, de la maintenance du patrimoine. Le président Trump n'a pas pris la bonne distance par rapport aux sites protégés par l'UNESCO. On ne contribue pas, avec de telles déclarations, à la stabilisation d'une zone qui souffre depuis des décennies. Personne n'aurait l'idée de pouvoir régler la situation de façon unilatérale. Nous sommes très inquiets. Nous tenons à ce que nos militaires soient en sécurité. Nous verrons comment la situation évolue. Nous allons bien évidemment travailler avec nos alliés. Certains pays ont déjà déclaré penser à un retrait partiel de leurs troupes. Nous avons confirmé, comme la France l'a fait d'ailleurs, vouloir trouver un accord avec toutes les composantes de la coalition. Le parlement évidemment soutiendra totalement le gouvernement italien sur les décisions prises dans ce dossier.
Il est vrai qu'il y a eu, en Italie, une grande campagne de presse qui a tendu à exacerber le climat entre nos deux pays, en particulier pour ce qui est des questions de la Libye, mais aussi de la Syrie, qui restera une thématique importante. La reconstruction de ce pays, à laquelle les entreprises italiennes et françaises devront participer, sera cruciale lorsque, au final, nous pourrons reprendre des relations avec le gouvernement de ce pays. Au-delà de la présence de Bachar Al-Assad, il faudra reprendre nos relations avec ce pays et le parlement italien a récemment voté une résolution pour pouvoir réactiver les relations diplomatiques.
Comme je le disais, la campagne de presse très âpre a été dépassée grâce aux rencontres entre le président Mattarella et le président Macron, avec les discussions du conseil italien et le président Macron, avec les ministres des affaires étrangères également. Nous avons pu dépasser cela grâce à des collaborations et grâce à tout ce qui est fait au niveau parlementaire et du Sénat en particulier. Beaucoup ont évoqué les intérêts divergents d'ENI et de Total en Libye. Mais bien souvent, et comme l'ambassadrice me le rappelait, nos grandes compagnies de pétrole trouvent des accords au-delà des évolutions géopolitiques. Par ailleurs, je suis sûr que si la situation en Libye s'apaise, il n'y aura pas de difficultés entre ENI et Total, de même qu'il n'y a pas de difficultés dans ma région de la Basilicate parce qu'il y a deux grands gisements ; un géré par ENI et un par Total dont la production a débuté il y a peu. Il faut apprendre à régler en revanche l'influence qu'une certaine presse a sur les citoyens italiens et français et nous pouvons le faire en rappelant que nous avons d'excellentes relations, pas uniquement parlementaires mais aussi dans le tissu sociétal.
L'Italie et la France ont des relations économiques qui sont complémentaires avec des atouts respectifs, les exportations pour l'Italie, les investissements étrangers pour la France. Il ne faut pas se laisser distraire par des propos de presse qui ciblent les irritants conjoncturels et voir à long terme. Nous devons représenter les citoyens italiens et français qui lorsqu'ils se rencontrent sont loin d'avoir dans des relations inamicales.
Pour ce qui concerne les relations avec la fédération de Russie, il est important qu'un changement intervienne. Les sanctions doivent être considérées comme un moyen mais pas comme une fin. Nous avons réalisé de nombreuses auditions sur ce sujet au sein de notre commission. Cette politique de sanctions a visé des personnes et des produits et elle a eu des effets en retour sur nos propres secteurs économiques. Ne peut-on trouver les moyens de réévaluer ces mécanismes de sanctions ? La réponse est de reconsidérer tous les aspects, dans un dialogue avec la Fédération russe y compris la situation qui est à l'origine des sanctions (Crimée, Donbass). Ce faisant, nous avons la responsabilité d'examiner complètement la relation entre la Russie et l'Ukraine car les responsabilités de l'impasse sont partagées. Des débats ont eu lieu en Ukraine : on avait espéré une relance des négociations ; peut-être faut-il faire évoluer le format de ces négociations. Il y a peu d'évolutions. Nous espérons qu'avec la contribution du président Macron, il y aura des avancées.
M. Christian Cambon, président. - Je relève de nouveau beaucoup de convergences dans nos appréciations.
Sur la question de la Libye, la France reconnaît officiellement le gouvernement d'entente nationale dirigé par M. Sarraj, mais cela ne l'empêche pas, comme vous, d'avoir des contacts avec le Général Haftar. Elle avait d'ailleurs pris l'initiative de les réunir à La Celle-Saint-Cloud, sans beaucoup de résultats mais en faisant en sorte que ces parties dialoguent. Ce faisant, nous devons rester vigilants devant la dégradation de la situation afin que la Libye ne devienne pas le champ d'affrontement des intérêts régionaux : nous voyons déjà à l'oeuvre la Turquie et l'Egypte, et la poursuite de la déstabilisation de ce pays irait à l'encontre des intérêts européens car elle susciterait la création de nouveaux foyers d'agitation et aggraverait la situation sécuritaire en Méditerranée rendant plus difficile encore la résolution des questions migratoires. Il faut que nous aidions l'Italie à gérer ces flux migratoires et je reconnais l'action de l'Italie pour résoudre cette crise, notamment l'action de ses forces navales qui sont très performantes.
Sur les Balkans occidentaux, personnellement je pense qu'on ne peut pas fermer définitivement la porte à des pays qui appartiennent incontestablement à l'Europe. Les préventions du Président de la République française tiennent aux préoccupations en matière de politique migratoire et de sécurité, notamment dans le domaine de la criminalité organisée. Cela étant, on peut, comme nos amis italiens, inverser le raisonnement : je crains justement qu'en leur fermant la porte, on risque d'avoir plus d'immigration et plus d'insécurité. Prenons le cas de la Macédoine du Nord. On lui a demandé bien des efforts pour résoudre son différend avec la Grèce et maintenant qu'il est résolu, on lui dit que ce n'est pas suffisant et qu'il faut de nouveaux efforts. Ce n'est pas un message très encourageant. Il ne faut pas désespérer ces populations. D'ailleurs, je reçois beaucoup de délégations de ce pays qui viennent montrer les progrès qu'ils accomplissent en termes de gouvernance, de lutte contre la criminalité, de mise en place d'un système judiciaire conforme aux normes européennes. Il faudrait introduire de la souplesse et de la progressivité dans les procédures d'adhésion, avec des strates intermédiaires qui reconnaîtraient les progrès réalisés sur Schengen, sur les politiques migratoires, sur la mise en oeuvre des normes relative à la lutte contre la corruption et la criminalité organisée.... Aujourd'hui, on ouvre progressivement 36 chapitres et tant qu'aucun n'est définitivement clos, vous n'êtes pas membre. Il faudrait être plus encourageant et accompagner les progrès réalisés. Cela prendra sans doute des années mais il ne faudrait pas fermer la porte brutalement, car ces pays perdront confiance dans l'Europe et se tourneront vers d'autres acteurs internationaux.
Sur l'Irak, nos analyses sont assez convergentes. Tout le monde considère que la « neutralisation » du général Suleimani qui, certes avait une action nuisible de déstabilisation des pays de la région, est sans doute critiquable, car c'est un barreau supplémentaire qui est franchi sur l'échelle des tensions, car il y a un risque d'escalade. Et cela se fait de façon unilatérale, sans aucune concertation avec l'Europe. D'ailleurs, le Congrès américain a semble-t-il été lui-même mis devant le fait accompli. La méthode de gouvernance du président Trump pose beaucoup de difficultés.
Il faudra aussi faire évoluer cette posture au sein de l'OTAN qui consiste à considérer systématiquement la Russie comme l'adversaire principal. Il n'est pas le seul. Nous qui sommes de grandes puissances tournées vers le Sud et très attachées à la sécurité de la Méditerranée, notamment occidentale, nous mesurons l'importance du risque terroriste islamiste contre lequel la France s'est engagé au Sahel. Il faut trouver au sein de l'OTAN un équilibre dans les analyses et faire comprendre à nos partenaires, et c'est parfois difficile, que - sans naturellement être naïf concernant la Russie et en comprenant les raisons de leur appréhension - l'implosion du continent africain - on voit bien ce qui se passe aujourd'hui au Burkina Faso après le Mali - est très inquiétante et constitue une menace directe pour l'Europe.
Il serait effectivement nécessaire de revoir la politique de sanctions, car ce n'est pas toujours la bonne réponse. J'inviterai la commission à travailler sur une évaluation de la politique des sanctions. Cela pénalise aussi certaines de nos entreprises notamment agricoles et la Russie se tourne vers d'autres sources d'approvisionnement ce qui n'est pas le but recherché, même s'il faut maintenir un langage de fermeté. Sur l'Ukraine, la France a pris l'initiative de faire se rencontrer les présidents Poutine et Zelensky. Des gestes ont été réalisés sur l'échange de prisonniers, c'est peu, mais cela va dans le bon sens et nourrit la confiance.
Ce que je souhaiterais vous proposer, à l'image de ce que nous faisons avec les Parlements britannique et allemand, c'est que, pour poursuivre et approfondir ces échanges, nous organisions des rencontres régulières. C'est ce que l'on appelle d'un bien grand mot la « diplomatie parlementaire », mais cela permet un dialogue des peuples et des territoires que nous représentons qui dépasse et complète les relations entre les gouvernements. Cela permet parfois un dialogue plus direct et de lever des incompréhensions. Nous l'avons bien vu, lorsque la tension est montée, il y a quelques mois entre nos gouvernements.
J'aurais une dernière question : pouvez-vous nous donner votre vision de la politique intérieure italienne ? Un nouveau gouvernement vient d'être mis en place, ce dont nous nous réjouissons compte tenu des difficultés diplomatiques rencontrées avec le précédent. Des élections régionales et locales auront lieu en 2020. La nouvelle coalition, à laquelle participent le Mouvement cinq étoiles, auquel vous appartenez, et le Parti démocratique, va-t-elle tenir le choc ? En effet, des observateurs affirment que Matteo Salvini et la Ligue attendent les prochaines échéances électorales pour tenter de reprendre la main. Quelle est votre analyse de la situation politique intérieure italienne, qui, on le sait, peut avoir des répercussions sur la politique étrangère européenne ?
M. Vito Rosario Petrocelli. - Permettez-moi de commencer par une remarque d'ordre personnel. J'ai presque 56 ans et comme nombre d'acteurs politiques de mon mouvement, cela fait 6 ans et demi que je suis parlementaire. Néanmoins, je fais de la politique depuis l'âge de 16 ans, ayant débuté au Parti communiste. Lorsque les résultats des élections en 2018 ont permis d'envisager une coalition avec le Parti démocratique ou avec la Ligue, j'ai pensé comme d'autres politiques du Mouvement cinq étoiles, que la formation d'une coalition avec la Ligue serait la plus juste, celle qui refléterait au mieux la volonté du peuple qui était celle d'un changement substantiel. Pourtant, il a été difficile de travailler au sein de cette coalition. De nombreux dossiers ne pouvaient tout simplement pas être évoqués, à l'image de celui de la coopération avec l'Iran, que la Ligue considérait comme une question idéologique. Désormais, avec le Parti démocratique et la formation Italia Viva de Matteo Renzi, avec le nouveau gouvernement Conte, il est possible de débattre sur tous les sujets et d'aboutir à des compromis, même si ce n'est pas systématique. La place prépondérante occupée par l'ancien ministre de l'intérieur Matteo Salvini dans le précédent gouvernement Conte, telle que la décrivaient les médias, correspondait à une réalité. Beaucoup des sujets traités n'intéressaient que la Ligue. Le président du Conseil s'était pourtant attaché à montrer une attitude respectueuse de l'Italie dans ses relations extérieures, au sein de l'UE ou avec ses partenaires comme l'OTAN.
Aujourd'hui, depuis le changement de gouvernement, l'approche est différente. Avec nos alliés politiques, à Bruxelles, il a été possible de nous mettre d'accord sur des sujets comme l'investiture d'Ursula von der Leyen, le nouveau « green deal », l'attention portée à la rive sud de la Méditerranée... Une plus grande sérénité règne, même si les médias italiens se complaisent à rapporter l'existence de dissensions. Je pensais qu'en tant que nouvelle formation au pouvoir, la Ligue se maintiendrait au moins pendant cinq ans, mais la dynamique s'est rapidement essoufflée.
Il y a beaucoup de débats entre nos différentes formations politiques. Ce qui nous rassemble est notre volonté d'améliorer la situation économique, notamment celle des catégories de la population les moins favorisées, si possible par une politique budgétaire expansionniste, dans le respect des règles européennes, en soutenant notamment les programmes de recherche scientifique et technologique et la formation. Mon mouvement partage cette préoccupation avec Italia Viva et le Parti démocratique.
Certes, nous avons des divergences sur certains sujets, comme celui de la justice. La simplification des procédures judiciaires, qui sont beaucoup plus longues que dans d'autres pays, est une priorité pour le Mouvement cinq étoiles. Il faut avancer dans ce domaine et nous pensons que nous avons pris la bonne direction avec des mesures comme le blocage de la prescription après le premier niveau de justice.
C'est une réforme fondamentale qui va garantir une meilleure justice en Italie. Nous comprenons que des positions divergentes s'expriment. Pour autant, il ne me semble pas que ces différences d'appréciation puissent déclencher une crise gouvernementale, surtout dans une séquence caractérisée par d'importantes tensions internationales. Personne ne peut se permettre de déclencher une crise sur une question de procédure judiciaire. Il s'agit là de mon appréciation personnelle, en réponse à votre question.
S'agissant de la perspective politique, certains analystes en Italie évoquent un possible retour du bipolarisme de la vie politique. Je n'y crois pas ; la société italienne a besoin représentation des différentes forces politiques. Quand une différence, de type idéologique tend à disparaître entre la gauche et la droite, cela entraîne un besoin de représentation nouveau. Nous avons aujourd'hui une partie de la société, non négligeable, et non limitée à une petite partie du Parlement, qui se reconnaissait par exemple dans Forza Italia mais qui ne se reconnaît pas dans la dérive de droite de M. Salvini et Mme Meloni. Une partie de la société italienne souhaite être représentée par une force politique qui n'est pas que modérée, mais qui est une référence européenne forte. Bien sûr, une autre partie de la société n'adhère pas à cette aspiration vers le changement que nous représentons en tant que mouvement « cinq étoiles ». On voit d'ailleurs éclore d'autres mouvements, tels celui des « sardines ». Enfin, la gauche traditionnelle garde son bassin électoral, même si sa représentativité peut à certains moments être questionnée.
Dans ce contexte, un retour du bipolarisme politique en Italie me semble difficile. J'espère qu'une nouvelle loi électorale ne sera pas prévue sur la base de l'intérêt personnel et temporaire d'une seule force politique, comme la mienne par exemple. Le processus de réforme électorale doit garantie la « gouvernementalité » du pays, quel que soit le parti vainqueur, comme cela a d'ailleurs été le cas avec le parti du Président Macron qui gouverne avec 24 % des suffrages exprimés, si je ne m'abuse. Nous avons besoin de stabilité politique, ce qui n'est pas nouveau et nous devons trouver le moyen d'y parvenir grâce au juste équilibre entre le système proportionnel et le système majoritaire. L'équilibre actuel n'a pas fonctionné jusqu'à maintenant. Les résultats des élections de 2018 ont amené une force politique au pouvoir, portée par 32 % des suffrages exprimés, qui n'est pas parvenu à développer un programme de gouvernement convaincant du fait de la nécessaire recherche de compromis avec des alliés.
M. Christian Cambon, président. - Je vous remercie de cet échange. Je vous propose de prévoir que deux délégations française et italienne se rencontrent de façon récurrente, avec un nombre limité d'élus pour poursuivre ce travail de coopération interparlementaire que nous avons initié aujourd'hui.
La réunion est close à 12 h 05.