Mercredi 5 juin 2019
- Présidence de Mme Élisabeth Lamure, présidente -
La réunion est ouverte à 12 h 30.
Mme Élisabeth Lamure, Présidente de la Délégation sénatoriale aux entreprises. - Mes chers collègues je vous propose de débuter cette réunion par l'intervention de nos deux collègues de Charente-Maritime et de Charente, Daniel Laurent et Nicole Bonnefoy, chez qui nous nous sommes rendus pour un très intéressant déplacement. Je vous ferai ensuite un compte-rendu de notre réunion de bureau pour vous présenter les travaux à venir de notre Délégation aux entreprises.
Il est assez rare que nous nous déplacions pour deux jours. Cela avait été une fois le cas dans le Finistère et les Côtes-d'Armor, mais c'est une formule extrêmement riche. Nous sommes partis le mercredi soir pour aller d'abord en Charente-Maritime, le jeudi soir, nous étions à Cognac, en Charente où nous avons passés la journée du lendemain, c'est-à-dire du vendredi. Je laisse la parole à nos deux collègues.
Compte rendu par M. Daniel Laurent du déplacement de la délégation en Charente-Maritime et Charente, les 23 et 24 mai 2019
M. Daniel Laurent. - Madame la Présidente, mes chers collègues, je suis très heureux que la Délégation aux entreprises ait accepté mon invitation à venir en Charente-Maritime pour découvrir la variété et le dynamisme des entreprises de ce département. Je remercie particulièrement notre présidente, Élisabeth LAMURE, ainsi que nos collègues qui nous ont accompagnés : Gilbert BOUCHET, Michel CANEVET, Catherine FOURNIER, Xavier IACOVELLI, Sébastien MEURANT, Jackie PIERRE. J'y associe et remercie pour leur participation les autres sénateurs du département : Corinne IMBERT et Bernard LALANDE. Notre collègue Nicole BONNEFOY nous a rejoint le jeudi soir à Cognac, pour effectuer la transition vers la Charente. Nous avions décidé de nous centrer sur deux thèmes différents pour chacun des départements, ce qui était, je pense, très enrichissant.
Nous avions un programme ambitieux pour ce déplacement en Charente-Maritime : trois visites d'entreprises - le chantier naval Fountaine Pajot, la Tonnellerie Baron et la Distillerie de la Tour -, une table ronde à Rochefort et un diner-débat à Cognac.
La première étape s'est déroulée au chantier naval Fountaine Pajot, entreprise familiale de construction de catamarans de tourisme, située à Aigrefeuille-d'Aunis.
Nous y avons été accueillis par Mme Claire Fountaine, présidente de la société. Cette entreprise a été créée par deux anciens champions de voile après les jeux olympiques de 1976, dont Jean-François Fountaine, aujourd'hui maire de La Rochelle. Elle s'est d'abord spécialisée dans la construction de bateaux de course et elle a été auréolée de nombreux prix. L'entreprise commence à produire des catamarans de tourisme dans les années 80 et elle est aujourd'hui le deuxième constructeur mondial de catamarans de tourisme, avec une production mensuelle de 26 à 28 bateaux, principalement à voile : l'entreprise réalise l'essentiel de son chiffre d'affaires dans cette gamme (108 sur 128 millions d'euros), la gamme moteur ayant toutefois doublé son activité.
La construction navale est un secteur extrêmement dynamique, Fountaine Pajot a ainsi vu son chiffre d'affaires croître de 34 % en 2018, faisant de cette année sa huitième année consécutive de croissance. L'entreprise emploie 800 personnes réparties sur deux sites, à Aigrefeuille-d'Aunis et La Rochelle, avec de forts besoins de recrutement : entre 100 et 150 personnes par an. Ce dynamisme touchant tous les chantiers navals, il se répercute également sur les fournisseurs et les sous-traitants qui doivent s'adapter. Je voudrais souligner qu'un tel dynamisme n'a pas toujours été la norme. Ce secteur bénéficie aujourd'hui de l'évolution du tourisme dans le monde.
Le secteur particulier qu'est la construction nautique demande des profils très spécifiques ; si l'entreprise passe par Pôle emploi et les agences d'intérim -- notamment pour certains métiers en tension car également communs au secteur de la construction -- elle forme par ailleurs, en interne, les profils les plus singuliers.
Le groupe a une production 100 % française, presque exclusivement tournée vers l'export (entre 10 et 15 % pour la France, 30 % en Europe et 60 % pour le reste du monde). 215 bateaux sont sortis des deux sites en 2018 et ce nombre sera sûrement porté à 256 en 2019. Il faut en effet 40 jours pour terminer un bateau, sachant qu'un bateau terminé sort du chantier tous les jour et demi.
Pour répondre à la croissance de son activité, le groupe va d'ailleurs inaugurer un nouvel atelier de 6 200 m2 dans la commune voisine. Ce nouvel espace laissera plus de place à l'innovation et permettra au groupe Fountaine Pajot d'être plus autonome de ses sous-traitants pour la découpe du bois, du tissu et des mousses, avec le développement de logiciels de découpe numérique.
Pour la visite des 21 000 m2 de l'atelier d'Aigrefeuille-d'Aunis, notre Délégation était accompagnée du directeur de production, M. Xavier COLLOCH, qui a pu nous apporter des explications éclairantes sur le processus industriel, et nous montrer 5 catamarans en différentes phases de construction sur le site. Il a notamment insisté sur les techniques innovantes développées par Fontaine Pajot pour rendre le processus d'étanchéisation des bateaux moins polluant et plus efficace. Après des essais en piscine sur site, les bateaux terminés partent en remorque pour être livrés et mis en service à la Rochelle. Le site de construction de La Rochelle permet par ailleurs de mettre directement à la mer les plus gros bâtiments, sans avoir à les transporter sur route.
Après cette première visite de terrain, nous avons pu échanger avec une quinzaine d'entrepreneurs charentais lors d'une table ronde à Rochefort dans les locaux de la CCI installée dans la magnifique Corderie Royale, bâtiment construit en 1666 et long de 374 mètres, soit plus que la Tour Eiffel. Il fut jusqu'au XXème siècle le plus long bâtiment industriel en Europe !
Premier des sujets évoqués, auquel on pouvait s'attendre s'agissant d'un département maritime : les difficultés posées par la loi Littoral pour le développement du tourisme (hôtellerie de plein air), de l'ostréiculture et de l'habitat dans le département -- mais également d'autres département bien sûr. A été notamment visée l'obligation d'extension de l'urbanisation en continuité des zones urbanisées, qui vient d'être assouplie par l'article 42 de la loi du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique, dite loi « ELAN », qui autorise l'urbanisation des dents creuses.
D'autres sujets récurrents ont été abordés, et principalement les complexités administratives et l'instabilité normative (Règlement Général de Protection de Données Personnelles - RGPD), prélèvement à la source, nouvelle loi sur la liberté de choisir son avenir professionnel), le coût du travail, le financement de l'apprentissage, la question des seuils sociaux, les transmissions d'entreprises. Pour reprendre des propos tenus par un participant, les entreprises veulent de la simplicité, de la visibilité, de la compétitivité, et, selon les termes d'un autre, « qu'on les laisse tranquilles ». Les entrepreneurs nous ont déjà faits part de leurs inquiétudes à propos de ces sujets lors des précédents déplacements.
Vous l'aurez noté, nombre de ces thèmes ont été abordés par notre délégation au cours de ses travaux. À cet égard, nous avons eu à coeur de faire valoir les efforts du Sénat, et particulièrement de la Délégation aux entreprises, pour relayer ces préoccupations au cours du processus législatif. Nous avons rappelé notre position sur certains sujets, comme la taxation des contrats courts, la réforme de l'apprentissage ou la mise en place d'un guichet unique pour les démarches des entreprises.
En outre, la difficulté à recruter un personnel formé ou à former, et motivé, est déplorée de façon massive et unanime par les entrepreneurs de ce département. Pour faire écho à Fountaine-Pajot, on peut remarquer que ces entreprises créent des opportunités en termes de création d'emplois. Au vu de notre taux de chômage, nous ne pouvons que nous désoler des difficultés de recrutement de ces entreprises.
Après ces riches échanges, nous sommes partis vers Les Gonds, où nous avons été accueillis par Nicolas Tombu, président de la Tonnellerie Baron, autre entreprise familiale.
Fondée en 1875 et au départ spécialisée dans la réparation de fûts, la Tonnellerie Baron est aujourd'hui une entreprise de 60 salariés qui produit 13 000 barriques par an, pour un chiffre d'affaires de 13 millions d'euros. La Tonnellerie voit sa croissance bondir de 10 à 15 % tous les ans pour répondre au dynamisme de la demande mondiale de vin et de spiritueux, dont le cognac.
Pour que ce développement économique qui sous-tend une plus grande consommation de ressources naturelles, et notamment de bois, soit durable, l'entreprise s'est engagée depuis quelques années dans une stratégie de Responsabilité Sociale des Entreprises (RSE) particulièrement volontariste, et cela sans aucune aide publique. Ainsi, pour chaque barrique produite, un chêne est planté par l'entreprise, soit 13 000 chênes en 2018. Elle évolue également dans des bâtiments basse consommation munis de panneaux solaires ; la construction d'une centrale à hydrogène fait aussi partie des pistes d'amélioration possibles pour le futur.
Ce processus de transformation écologique imprègne toutes les étapes de fabrication des tonneaux : du traitement des matières premières, aux transformations intermédiaires, en passant par les relations avec les fournisseurs (diminution des emballages plastique, amélioration des circuits de recyclage) mais également l'environnement même de l'entreprise, par la mise en place de parcelles écologiques paysagères sur le site de production.
M. Tombu nous a ensuite expliqué les différentes étapes de fabrication des tonneaux, de l'entreposage des troncs au cerclage des barriques, en passant par la scierie et les tests d'étanchéité. La tonnellerie emploie 40 salariés, répartis entre la scierie, l'usine et le bureau d'étude. Les ingénieurs de ce dernier travaillent au développement de machines sur-mesure, comme des supports de barriques, des bras mécaniques et des scies, qui permettent de réaliser des gains de temps et de matériaux.
Cette entreprise innovante est donc prospère et durable, malgré les risques inhérents au temps de séchage de sa production, c'est-à-dire au nombre important d'années entre le temps de stockage des fûts et leur vente.
Dans la même filière, après la tonnellerie, notre délégation a visité la Distillerie de la Tour, située à Pons. Cette entreprise familiale se démarque par sa stratégie de diversification des cultures et des activités.
L'activité principale de la Distillerie est la vente en vrac de vin, de cognac et autres spiritueux ; son activité de production de bouteilles est plus récente (mais se traduit par des marges plus confortables).
La Distillerie de la tour est ainsi la seule entreprise régionale viticole multi-produits -- en vue de valoriser les productions du vignoble charentais -- mais aussi multi-activités. Elle possède en effet plus de 100 hectares de vignes, ce qui lui permet de sécuriser « l'amont » de sa production, des sites de vinification, de vieillissement et des sites de stockage. Viticulteur, distillateur et négociant, cette multitude de produits et de savoir-faire permet à cette entreprise de ne pas être dépendante du cognac. Ce choix n'entrave pas son développement puisqu'elle réalise 80 millions d'euros de chiffre d'affaires en 2018, avec 30 % à l'export vers des pays comme les États-Unis, l'Allemagne, la Russie ou encore la Chine.
Cette croissance, adossée à une politique de qualité, permet à l'entreprise de recruter sur des métiers spécifiques comme celui de qualiticien, mais également d'investir autant dans son équipement (logiciels métiers, nouveau site de production) que dans la recherche viticole. Elle cherche ainsi à développer une activité viticole respectueuse de l'environnement et de cépages dits « résistants », en vue de limiter l'usage de produits phytosanitaires.
Enfin, nous avons participé à un diner-débat avec des professionnels de la filière cognac dans les beaux chais restaurés qui ont appartenu à la famille de Jean Monnet. La filière cognac est structurée par l'union des viticulteurs et des négociants à travers le Bureau national interprofessionnel du Cognac (BNIC). Il fédère les 4 400 viticulteurs et les 300 négociants de la filière, qui partagent la même vision ; ce paritarisme est une des clefs de leur succès. Cette filière est particulièrement dynamique depuis quelques années, poussée par la forte demande étrangère, venant en particulier des États-Unis : les 200 millions de bouteilles exportées chaque année, représentant 98 % de la production, apportent 3,7 milliards d'euros à notre balance commerciale, chiffre qui a doublé en dix ans (1,9 milliard en 2009).
Cette croissance exponentielle, si elle crée de la valeur et des emplois, est aussi à l'origine de l'envolée des prix des parcelles de cépages cognac : un hectare « plantable » se négocie deux fois plus cher qu'il y a 20 ans. Cette situation rend les transmissions de vignobles particulièrement difficiles : les viticulteurs ont déploré le coût de ces transmissions, trop élevé pour les jeunes générations, et qui fait peser le risque de la dissémination du vignoble cognaçais, à l'image du bordelais ou du champenois, avec l'arrivée massive de capitaux étrangers. Les facilités issues de la réforme sur la transmission d'entreprises portée par notre délégation et nos collègues Michel Vaspart et Claude Nougein, ont toutefois été saluées par le BNIC et l'Union générale des viticulteurs pour l'AOC Cognac (UGVC). Ils souhaiteraient néanmoins voir augmenter les seuils d'exonération en cas de reprise familiale. Ces transmissions d'entreprises ne peuvent se faire si les charges sont trop élevées, elles risquent d'être rachetées par des capitaux étrangers, synonymes de pertes pour nos territoires.
Dans ce secteur, comme dans d'autres, les professionnels ont insisté sur les problèmes d'emploi et de formation : manque de formations ciblées, création de précarité, nécessaire recours à une main d'oeuvre étrangère, sont autant d'importants sujets de préoccupation, avec l'espoir que des solutions seront trouvées...
Ils nous ont par ailleurs présenté des propositions qui seraient utiles au développement de la filière : le déplafonnement de la réserve d'exploitation à 75 % pour permettre de pérenniser les exploitations, l'ouverture de la réserve de précaution en cas d'aléas agricoles ou climatiques aux entreprises soumises à l'impôt sur les sociétés, l'exonération de la TVA sur le négoce du cognac, sujets pour lesquels j'ai posé deux questions écrites au Gouvernement.
Par ailleurs, ils ont attiré notre attention sur un cas « d'obligation utile » qui a récemment été supprimée : il s'agit de l'obligation de déclaration des récoltes, rendue facultative dans un effort de simplification, qui, dans ce cas, serait inopportun.
J'ai été très heureux de présenter ces belles réussites à mes collègues. J'espère qu'ils auront découvert avec intérêt la diversité et les richesses de mon département, illustrées par des entrepreneurs qui se battent pour créer de la valeur et de l'emploi, malgré les difficultés rencontrées. Je suis heureux de laisser la parole à notre collègue Nicole Bonnefoy qui pourra vous parler de la suite de ce déplacement, dans son département : la Charente.
Mme Nicole Bonnefoy. - Madame la Présidente, mes chers collègues, ce déplacement charentais a débuté à Cognac, le 23 mai, par le diner-débat dont Daniel Laurent vient de vous parler. Mais la Charente est loin de se limiter au cognac- dont la moitié du vignoble est planté en Charente-Maritime, et j'espère avoir pu montrer à nos collègues la diversité du tissu entrepreneurial de mon département, la Charente, qui ne se conjugue pas au pluriel, je le précise.
Après un diner-débat consacré à la filière du cognac, nous avons ainsi pu visiter trois entreprises : Lysipack, Cortex Production et Nayade, et rencontrer des entrepreneurs charentais à l'occasion d'une table ronde à Angoulême, composée avec l'aide de l'Union patronale de la Charente.
Notre première visite s'est déroulée dans l'entreprise Lysipack, société d'emballage alimentaire flexible située à Merpins.
Nous avons été accueillis à Merpins près de Cognac par M. Charvin, directeur de la société, qu'il a reprise après y avoir été salarié, alors qu'elle était au bord de la faillite. C'est une belle réussite. En effet, Lysipack est aujourd'hui leader dans l'emballage de produits laitiers et notamment du beurre (sa production concerne à 86 % des produits laitiers et à 68 % du beurre), avec 13,5 millions d'euros de chiffre d'affaires en 2018. Il y a de fortes probabilités que le beurre que vous consommez se présente dans un emballage Lysipack !
L'entreprise a réussi à se développer sur le segment concurrentiel de l'emballage de produits laitiers tout en mettant en place une stratégie écologique ambitieuse, à travers notamment la construction d'une station solaire, et le développement d'emballages dont la part non recyclable est réduite.
Cette entreprise florissante nous a cependant fait part de ses grandes difficultés à recruter du personnel : il n'existe pas de formation d'opérateur sur machine et les métiers industriels sont dévalorisés dans notre société. Pour preuve, certains des intérimaires que l'entreprise emploie refusent d'être recrutés en contrat à durée indéterminée (CDI), et une partie des apprentis formés ne restent pas ensuite dans l'entreprise, le fonctionnement en trois huit de l'entreprise semblant agir comme un repoussoir. La croissance de cette dernière en est freinée et elle compte désormais sur les acquisitions extérieures (dans l'industrie pharmaceutique et cosmétique) pour se développer.
Nous nous sommes ensuite rendus à La Couronne, dans la banlieue d'Angoulême, pour visiter la société Cortex Production, studio d'animation 3D à l'origine de ce qui est appelé le « Tumulte », un bijou de technologie permettant une immersion en 3D, à 360 degrés, en relief interactif.
Nous avons été accueillis par M. Andreas Koch, ingénieur et gérant, qui nous a décrit le travail « artisanal » nécessaire au développement de cette technologie inédite, qui a réussi là où les ingénieurs de grands studios d'animation comme Disney estimaient le concept infaisable.
Cette société qui porte le label « Jeune entreprise innovante » a pu bénéficier d'aides publiques pour développer son produit, comme le Crédit Impôt Recherche (CIR), utile mais dont M. Koch a déploré la complexité et les coûts supplémentaires induits par la nécessité d'une aide extérieure pour le montage des dossiers.
Cortex développe ses propres outils d'animation ainsi que leurs contenus, du film médical qui permet de naviguer dans le flux sanguin et les cellules, à des projets plus ludiques sur des planètes inconnues. 90 % de son chiffre d'affaires est réalisé à l'export, avec comme produit phare le « Tumulte », sorte de tonneau dans lequel on se tient debout, et dont la diffusion en 3D interactive est si immersive qu'on en oublie la technologie.
Après ces deux visites de terrain, nous avons pu échanger lors d'une table ronde à Angoulême avec une douzaine d'entrepreneurs du département, qui adapte son patrimoine à l'innovation économique.
Parmi les sujets évoqués, ici encore l'inadéquation entre offre et demande d'emplois a été citée comme principal problème au développement des entreprises, notamment industrielles, qui n'arrivent pas à recruter dans un contexte de croissance de leur activité. L'inadéquation entre offre d'emplois et formation a été également déplorée, ce qui n'est bien sûr pas sans lien.
Une raison d'espérer cependant : un entrepreneur a estimé que les problèmes de recrutement dans les secteurs industriels pourraient trouver une solution, au moins partielle, avec « l'usine 4.0 », les évolutions technologiques permettant de rendre moins pénibles un certain nombre de métiers.
Parmi les autres difficultés récurrentes, je peux citer celles posées par les complexités administratives et l'instabilité normative, la difficulté de financement de l'activité par les banques, le manque de business angels, l'absence de fléchage de l'épargne vers l'économie réelle, l'incongruité de la taxation des contrats courts quand de nombreux intérimaires et employés en contrat à durée déterminée (CDD) refusent un contrat à durée indéterminée (CDI)...
Après ces riches échanges, nous sommes partis chez Nayade, société de production de films en images de synthèse, où nous avons été accueillis par Nadia et Yannick Violin, respectivement gérante et directeur de production.
Cette entreprise part des technologies existantes pour développer des films d'animation aux qualités techniques et narratives incontestables, avec des réalisations allant du mapping, aux films d'animation en 3D, en passant par des réalisations en caméra avec « hyperjaillissement » ou des séquences en casques de réalité virtuelle. Je précise que le mapping vidéo est une animation visuelle projetée sur des structures en relief, par exemple un monument historique, telle la façade de l'Hôtel de Ville d'Angoulême à Noël.
Il s'agit véritablement d'un travail d'orfèvre, avec des milliers d'heures de travail pour produire quelques minutes de séquences animées, au réalisme saisissant, comme ont pu le constater nos collègues lors de l'immersion qu'ils ont effectuée au paléolithique.
L'entreprise Nayade a été une des seules entreprises à nous dire ne pas rencontrer de difficultés de recrutement : en effet, l'écosystème existant autour du pôle image d'Angoulême et de ses 12 écoles de formation reconnues à l'international et formant annuellement 1 300 étudiants, permet la constitution d'un vivier disponible et qualifié.
Ce fut un plaisir de faire découvrir la diversité et la robustesse du tissu économique de la Charente à mes collègues de la Délégation aux entreprises.
Je voulais montrer que l'emploi industriel est encore bien présent dans le département, malgré de graves difficultés de recrutement, en inadéquation avec la croissance économique retrouvée et le chômage persistant.
Je tenais également à remercier notre collègue Michel Boutant, sénateur de Charente, qui nous a fait le plaisir de sa présence pendant cette journée.
Je veux enfin témoigner de l'étonnement manifesté par les chefs d'entreprise à chaque fois qu'une délégation sénatoriale leur rend visite, de leur fierté également d'être écouté par les sénateurs, qui souligne que nous restons des élus de terrain. Je vous remercie.
Mme Élisabeth Lamure. - Ce sont deux beaux départements dont l'économie repose notamment sur l'agriculture -la viticulture et l'ostréiculture- et le tourisme. J'ai bien noté que la Charente-Maritime disputait au Var la première place pour les nuitées touristiques. Nous avons vu des entreprises atypiques, avec des dirigeants qui croient en leur entreprise et se battent pour leur réussite, y compris avec des sacrifices personnels. L'un de ceux qui nous accueilli a vendu sa maison pour développer son entreprise. Il faut saluer cette démarche entrepreneuriale : il ne suffit pas d'être ingénieur ou scientifique pour investir ; il faut disposer de fonds et y croire. Par ailleurs, il est normal que les entreprises nous adressent souvent les mêmes demandes : la simplification, la stabilité et, ce qui est nouveau, les problèmes criants de recrutement. Ce témoignage s'est durci récemment, avec la colère de dirigeants qui ne peuvent se développer ou conquérir des marchés faute de recrutements suffisants. Des salariés préfèrent le CDD au CDI, ce qui pose la question de l'indemnisation du chômage et de la valeur travail. Nos prochains travaux en tiendront compte.
Mme Catherine Fournier. - Ces déplacements étaient intéressants et les territoires, accueillants. Ces départements sont prospères avec un taux de chômage faible, 9 %, comparé à celui du Pas-de-Calais, à 13,6 %. À Angoulême, j'ai noté la demande de stabilité fiscale exprimée par Renaud Dutreil qui a regretté les fluctuations des taux des cotisations sociales et fiscales à chaque loi de finances. La pause proposée par le Sénat pour la hausse de l'impôt sur les sociétés pour celles dont le chiffre d'affaires est supérieur à 250 millions d'euros prend en considération ce genre de demande.
Mme Martine Berthet. - Je regrette de ne pas avoir pu participer à ce déplacement. La progression du chiffre d'affaire de l'entreprise de construction navale est-elle due à celle du marché nautique ou à la fermeture d'autres entreprises de cette filière ? Par ailleurs, se développe-t-il à Angoulême un pôle d'entreprises autour de la filière de l'image comme s'est développée une industrie métallurgique en Savoie ?
M. Daniel Laurent. - Le développement de Fountaine-Pajot n'est pas lié à la faillite de concurrents, même s'ils ont racheté certaines entreprises. Le principal concurrent, le groupe Beneteau, est établi en Vendée. Le marché des bateaux est dynamique et leur niche, le catamaran, l'est particulièrement. Le groupe entend construire 6 200 m² de bâtiments nouveaux, ce qui va générer de l'emploi. Les formations internes sont très développées car la spécialisation de leurs salariés est pointue dans la construction navale.
Mme Élisabeth Lamure. - Il serait dommage que leur développement soit freiné par l'absence de ressources humaines. Leur marché est soutenu par la vente à des sociétés en vue de la location, jusqu'en Australie, et pas seulement à des particuliers.
Mme Nicole Bonnefoy. - Il existe en effet un pôle et un écosystème particulier lié à l'image d'animation à Angoulême, avec une douzaine d'écoles internationalement réputées. La première entreprise propose des produits ludiques et médicaux, la seconde, du cinéma d'animation. Il existe toutefois également en Charente des entreprises dans des filières industrielles plus classiques comme la table-ronde l'a soulignée.
Mme Élisabeth Lamure. - Nous y avons retrouvé l'ancien ministre Renaud Dutreil qui a racheté une entreprise d'eau minérale et une entreprise de chaussures traditionnelles, de charentaises.
Mme Nicole Bonnefoy. - La filière de la charentaise, utilisant le feutre, constitue une niche de chaussons, très confortables et haut de gamme, mais développe également une sorte de basket. Il s'agit d'un patrimoine charentais, remis à la mode.
Mme Annick Billon. - Comment les catamarans sont-ils transportés sur autoroutes ? Pour les acheminer, ces dernières sont-elles bloquées et pratiquent-elles des tarifs spécifiques, ce qui constitue une problématique en Vendée ?
M. Daniel Laurent. - La Rochelle est le seul port en eau profonde de la façade atlantique. Cela lui permet de charger des catamarans sur des paquebots à tout moment de l'année. Le transport routier n'emprunte pas les autoroutes mais des voies spécialement aménagées à cet effet. Le site de Fountaine-Pajot dans le port rochelais leur permet de construire de plus grandes unités.
M. Sébastien Meurant. - On se réjouit de voir à chacun de nos déplacements la qualité des produits de notre pays. On constate que la France a toujours un taux de chômage à 8,8 % contre 2,5 % au Japon, 3,6 % en Grande-Bretagne malgré le Brexit, comme aux États-Unis, et 3,2 % en Allemagne, avec un taux élevé de personnes bénéficiant du revenu de solidarité active (RSA). Or, j'ai appris que pour les récoltes, les viticulteurs charentais font venir, grâce à des sociétés spécialisées, de la main d'oeuvre de Pologne ou de Tunisie. Il est extrêmement regrettable que les Français au chômage ou au RSA ne puissent être recrutés. Cette situation concerne tous les secteurs de l'économie et tous niveaux de qualification confondus. Je connaissais le recrutement de free-lance afin de répondre plus facilement à des marchés, mais pas l'existence de sociétés spécialisées dans ce recrutement saisonnier.
M. Daniel Laurent. - Cette situation est spécifique à tous les vignobles et elle a permis également de créer des entreprises qui recrutent des étrangers pour les différentes étapes du développement de la vigne. Je connais à Pons une entreprise spécialisée dans l'élevage du champignon de Paris qui compte 130 salariés polonais sur un effectif total de 380, car la récolte du champignon sur couche est contraignante. On n'arrive pas à mobiliser des chômeurs pour ce type d'emploi qui ne requiert pourtant aucune spécialisation.
Mme Pascale Gruny. - J'ai visité un lycée agricole qui craignait des fermetures de classe faute d'élèves alors que tous les diplômés sont recrutés. Je connais d'ailleurs un agriculteur qui peine à recruter. Mon département connaît un fort taux d'illettrisme. Des entreprises d'intérim et de travailleurs détachés fleurissent. Certaines contournent la loi. La différence de rémunération avec un travailleur détaché auquel s'applique la législation et ne peut bénéficier d'aides publiques, et un ouvrier français est devenue infime. Je connais les papeteries de La Couronne puisque mon époux en était dirigeant. Beaucoup de salariés de cette entreprise ont une double activité, souvent la viticulture, et ne sont donc pas disponibles pour des heures supplémentaires lors des pics d'activité.
Mme Élisabeth Lamure. - J'aborderai ensuite le compte-rendu de notre réunion de bureau.
Compte rendu, par Mme Élisabeth Lamure, de la réunion du bureau de la délégation du 22 mai 2019
Mme Élisabeth Lamure, Présidente de la Délégation sénatoriale aux entreprises. - Mes chers collègues,
Les membres du Bureau de notre délégation se sont réunis le 22 mai dernier afin de faire un point des activités de notre délégation, depuis sa dernière réunion du 4 octobre 2018, et de tracer des perspectives pour la rentrée.
En premier lieu donc, quel est le bilan depuis octobre 2018 ?
Depuis cette date, nous avons poursuivi nos travaux, notamment sur le projet de loi PACTE, mais aussi les immersions de sénateurs en entreprise, nos déplacements dans les départements, sans oublier la 4ème Journée des entreprises, qui a eu beaucoup de succès le 28 mars comme vous le savez.
S'agissant des immersions de sénateurs en entreprise, en 2018, 8 immersions ont été réalisées, dans la majorité des cas pour 2 ou 3 jours. Que ce soit du côté des entreprises ou des sénateurs, des retours positifs ont été exprimés lors de la Journée des entreprises. Nous allons relancer un appel à candidatures et j'attire votre attention sur les difficultés que peut poser une annulation tardive, pour notre image auprès des entreprises qui nous accueillent et auprès des CCI.
S'agissant des déplacements dans les départements, depuis la dernière réunion du Bureau, notre Délégation s'est rendue dans les départements suivants : le Doubs, en octobre ; les Vosges, en février ; le Val d'Oise, en mars. J'ajoute le Calvados en novembre mais il s'agissait d'un déplacement plus circonscrit, dans le cadre des Finales nationales des Olympiades des Métiers à Caen.
Bien sûr la Charente-Maritime et la Charente en mai, nous venons d'en parler, puis les Alpes-Maritimes sont programmées pour les 4 et 5 juillet. Nous avons relancé hier les inscriptions pour ce déplacement. Il sera également très intéressant, centré sur la filière du parfum dans la région de Grasse, puis sur la zone de Carros, à Nice.
Il nous faudra déterminer les déplacements suivants, à compter de septembre et je vous remercie d'indiquer si vous souhaitez proposer votre département. Nous veillerons seulement à ne pas organiser de déplacements dans les 4 à 6 semaines précédant les élections municipales ni les 2 mois précédant les élections sénatoriales. Emmanuel Capus nous a déjà suggéré une visite dans son département en Maine-et-Loire.
Par ailleurs, le Bureau de la Délégation a bien voulu adopter mes propositions pour les travaux à engager à la rentrée. Ceci supposera de nommer des rapporteurs en juillet.
Nous avons trois sujets à vous proposer :
· 1er thème : comment
répondre aux difficultés croissantes de recrutement par les
entreprises et aux défis posés par l'évolution des
métiers ?
Ce sujet recouvre également les enjeux de sauvegarde et de transmission des savoir-faire, d'attractivité des métiers, d'adaptation des personnes et des structures à des métiers en évolution. Bien qu'étant aux prémices de ces bouleversements, on peut prévoir que toutes les professions, ou presque, seront impactées par les innovations technologiques... Nous nous devons de fournir des réponses aux entreprises sur ce thème.
· 2ème thème : les
obligations des entreprises liées à des seuils.
Nous avions évoqué la question des seuils, débattue lors de l'examen de la loi PACTE, qui a permis certaines avancées. Mais l'attente des entreprises semble encore forte sur ce sujet et le terrain est encore largement à défricher.
Imaginez que nous avons découvert l'existence de 199 obligations liées à des seuils ! Il faudrait donc identifier toutes ces obligations, interroger leur pertinence et réfléchir à leurs possibles évolutions. Il y a donc encore du travail... Grâce à l'accord-cadre qui a été passé récemment par le Sénat pour la réalisation d'études d'évaluation, je propose dans un premier temps que le secrétariat examine la possibilité de confier le « défrichage » de cette question aux experts sélectionnés dans le cadre de ce marché.
· 3ème thème : les
entreprises responsables et engagées. Comment favoriser et valoriser
l'exemplarité des entreprises ?
Lors de nos déplacements dans les départements, nous avons maintes fois rencontré des entreprises ayant engagé une forte politique de responsabilité sociétale des entreprises (RSE), ce que nous aimerions voir se développer. Il serait intéressant de travailler sur ce sujet, dont le prolongement pourrait se trouver dans la prochaine édition de notre Journée des entreprises. Comment développer le bien-être en entreprise, tant pour les salariés que pour le chef d'entreprise ?. Cela ne se limite pas à la question du bien-être. Nous avons vu, lors de nos déplacements, des exemples de chefs d'entreprise engagés qui innovent avec leurs salariés. L'écologie étant un sujet d'actualité, elle devrait aujourd'hui intégrer la performance des entreprises.
· Enfin, je propose que nous participions à
davantage de salons professionnels, comme avec VivaTech - où Olivier
Cadic a représenté notre délégation - ou le salon
du Bourget, auquel nous participerons mi-juin. J'ai également pu me
rendre à Lyon à la 32ème édition de
l'Electric Vehicule Symposium. De nombreux salons se tiennent dans les
régions et vous pourriez, chers collègues, vous y rendre pour
représenter notre Délégation en nous prévenant en
amont.
· D'ici à la suspension des travaux
parlementaires en juillet, outre le déplacement évoqué,
nous allons demain à Station F pour une visite et une table ronde que
nous y organisons avec Pascale Gruny ; vous y avez tous été
conviés. Puis nous aurons la visite du salon du Bourget le mercredi 19
juin, à laquelle une quinzaine d'entre nous participeront. Nous y
déjeunerons et visiterons les entreprises présentes.
Enfin, le jeudi 4 juillet au matin, Pascale Gruny nous présentera les conclusions du rapport que nous lui avons confié sur l'accompagnement de la transition numérique des PME. Ce sera aussi l'occasion de rendre compte de notre déplacement à Station F et à nommer des rapporteurs pour la suite de nos travaux.
S'agissant de nos méthodes de travail, nous nommons traditionnellement pour nos travaux un ou des rapporteurs. Les travaux sont assez lourds et longs. Nous pourrions réfléchir à simplifier nos travaux et produire de courts rapports de 8 à 10 pages en fournissant essentiellement des recommandations.
Par ailleurs, à l'occasion des travaux et déplacements de notre délégation, nous veillons à Twitter via la direction de la communication. Lors du dernier déplacement, le Sénat a beaucoup « tweeté ». Les retours en termes d'image pour notre délégation ne seront cependant effectifs que si vous retweetiez. Aussi, la presse locale a été bien présente lors de ce déplacement, ce qui n'est pas toujours le cas. Plusieurs parutions ont été relevées.
Enfin, notre Délégation aux entreprises pourrait parfois poser une question fermée dans le cadre de l'enquête mensuelle que la CCI réalise auprès de 600 entreprises via Opinionway. N'hésitez pas à nous soumettre vos idées de questions.
M. Sébastien Meurant. - Je me permets de vous demander : qu'entendons-nous par « impôts de production » ?
Mme Élisabeth Lamure. - Les industriels que nous avons rencontrés évoquent la fiscalité locale. Cela nous pose un problème : comment les collectivités territoriales peuvent compenser la perte que représenterait un allègement fiscal ? Nous faisons face à un dilemme.
Mme Pascale Gruny. - Je pense qu'il existe, dans ce contexte de baisse générale des moyens dans les collectivités territoriales, un levier sur les taxes, sur les entreprises, les exploitations agricoles, le foncier non bâti. La question mérite d'être débattue. Les chefs d'entreprises nous ont manifestés à maintes reprises leur exaspération face à ces nombreuses taxes. Le remplacement de la taxe professionnelle par la contribution économique territoriale, composée par la contribution sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) a permis de diminuer le montant des impôts payés. Cela a permis une répartition plus juste, car l'impôt est calqué sur la valeur ajoutée, mais n'a pas réellement supprimé la taxe professionnelle.
Mme Élisabeth Lamure. - La taxe sur la publicité est également évoquée par les entreprises. Il existe d'énormes disparités que nous nous devons de rapporter.
M. Jean-Marc Gabouty. - J'ai assisté, à la Maison de l'Industrie, à une présentation d'un catalogue de 12 propositions par les industriels de l'Union des industries et des métiers de la métallurgie. Ce problème de fiscalité de production a été abordé. La réforme, et non la suppression, de la taxe professionnelle a été évoquée. Ils ont convenu qu'il fallait diminuer les taxes tout en faisant attention à garder un lien entre entreprises et territoires. Je suis totalement d'accord : s'il n'existe plus de lien fiscal entre territoires et entreprises, ces dernières seront les mal-aimées des territoires, les habitants préférant une commune aménagée à un bâtiment industriel à proximité. La CVAE n'est pas tant contestée car calée sur la valeur ajoutée et beaucoup plus juste. Les impôts fonciers - la cotisation foncière des entreprises (CFE) - le sont : les entreprises ont l'impression de payer des impôts avant même de produire. Les industriels sont donc préoccupés par ces questions.
Mme Élisabeth Lamure. - Ayant également assisté à cette préparation, je confirme que les industriels reviennent régulièrement sur le poids de la fiscalité locale.
M. Michel Forissier. - Je pense que lorsque nous discutons avec des grands groupes, plusieurs paramètres doivent être évoqués malgré les pressions qu'elles mettent sur les collectivités locales afin d'obtenir plus d'avantages. Lorsque nous sommes à proximité d'une autoroute, d'un aéroport et dans une ville aménagée, nous devons tâcher de préserver le paysage urbain de la pollution publicitaire. Les associations d'industriels permettent aux collectivités d'entretenir des relations avec les entreprises locales et d'échanger. Au vu de l'autonomie croissante des communes, le lien fiscal avec les entreprises sera débattu. Je suis pour le maintien de ce lien. La question sera celle de l'équilibre entre les collectivités qui devront lever un fort impôt et celles qui ont des bases fiscales plus confortables. Aussi, je tiens à souligner que la qualité de l'aménagement et de l'entretien des villes comptent pour les chefs d'entreprise, qui consentent à l'impôt dans la mesure où l'environnement dans lequel ils évoluent est propice à leur développement.
Mme Martine Berthet. - J'aimerais aborder la question du versement transport (VT), mis en place par de nombreuses agglomérations lors du transfert de compétences en 2017. Toutes les entreprises d'une agglomération le paient bien que certaines ne soient pas desservies par le réseau. Des exceptions devraient être accordées face à cette situation.
Mme Élisabeth Lamure. - Ce sujet pourra être débattu dans le cadre du projet de loi d'orientation des mobilités.
M. Michel Forissier. - Membre de la mission d'information sur la gratuité des transports, je pense que le coeur du sujet se résume à cette question : qui paie ? Qu'il existe nombre de tarifs préférentiels à l'initiative des gestionnaires de transports, c'est une chose, mais rendre obligatoire la gratuité comme certains le voudraient, ce serait, je pense, une catastrophe. La réorganisation autour des régions doit permettre de définir des montants raisonnables de versements. Aussi, lors de l'ouverture d'une ligne de transport au service des entreprises, il faut expliquer aux chefs d'entreprises le coût que cela représentera pour eux. Il y a un lien entre le service et l'impôt. Ce qui n'est pas supportable, c'est l'impôt sans le service.
Mme Élisabeth Lamure. - Très bien, merci pour ces échanges fructueux. Je vous rappelle que la France est candidate à l'organisation des finales mondiales Worldskills de 2023. Notre délégation, le Président du Sénat, ainsi que le Président de la République, ont soutenu cette candidature. Nous aurons le verdict lors de la finale de l'édition 2019 qui se tiendra du 20 au 23 août à Kazan ; j'essaierai de m'y rendre avec Olivier Cadic afin de représenter la délégation. La France est en concurrence avec le Japon pour l'organisation de ces finales. Nous avions reçu en décembre, lors d'un dîner au Sénat, les membres du jury européen Worldskills. Cela avait été l'occasion d'échanger autour cette candidature et de faire valoir nos atouts pour l'organisation de cet évènement. Nous suivrons donc avec attention la délibération du jury.
La réunion est close à 14 h 00.