COMMISSIONS MIXTES PARITAIRES
Lundi 21 juillet 2014
- Présidence de M. Jean-Pierre Sueur, président -La réunion est ouverte à 17 h 05
Commission mixte paritaire sur le projet de loi pour l'égalité réelle entre les femmes et les hommes
Conformément au deuxième alinéa de l'article 45 de la Constitution et à la demande du Premier ministre, une commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi pour l'égalité réelle entre les femmes et les hommes.
Elle procède tout d'abord à la désignation de son bureau, constitué de M. Jean-Pierre Sueur, sénateur, président, et M. Jean-Jacques Urvoas, député, vice-président, Mme Virginie Klès, sénateur, étant désignée rapporteur pour le Sénat, et M. Sébastien Denaja, député, étant désigné rapporteur pour l'Assemblée nationale.
La commission examine ensuite les dispositions restant en discussion.
M. Sébastien Denaja, député, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - Mme Klès et moi avons travaillé dans un état d'esprit très constructif. La deuxième lecture à l'Assemblée nationale a fait apparaître un accord sur de très nombreux points : 12 articles sur les 48 qui restaient en discussion ont été adoptés conformes et 9 suppressions ont été entérinées. Mme Klès et moi sommes d'accord sur 28 des 30 articles restant en discussion : nous proposons de retenir le texte du Sénat pour les articles 18 bis, 18 quater et 22, par exemple, celui de l'Assemblée nationale, notamment sur les articles 2 bis B, 5 sexies A - le fameux « bon père de famille » - et 19 bis, ou encore un compromis équilibré entre les rédactions adoptées par les deux assemblées pour six autres articles. Nos désaccords portent sur trois sujets : l'inclusion dans le titre de l'adjectif « réelle » ; la possibilité offerte aux femmes victimes de violences d'élire domicile chez une personne morale qualifiée à l'article 7 ; à l'article 20 bis, l'extension de la représentation équilibrée des femmes et des hommes au sein des conseils d'administration des entreprises de 250 à 499 salariés à partir de 2020. J'espère que ces désaccords mineurs n'empêcheront pas cette loi attendue et en débat depuis un an d'entrer en vigueur dans les meilleurs délais.
Mme Virginie Klès, sénateur, rapporteur pour le Sénat. - Je remercie M. Denaja pour son esprit constructif. Je souhaite moi aussi une entrée en vigueur rapide : tirons-en les conséquences dès maintenant !
M. Jean-Pierre Sueur, sénateur, président. - Souhaitez-vous parler du titre dès maintenant ou en dernier ?
M. Sébastien Denaja, député, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - En dernier.
Article 1er
La commission mixte paritaire adopte l'article 1er dans la rédaction de l'Assemblée nationale, sous réserve d'une modification rédactionnelle.
La commission mixte paritaire adopte l'article 2 G dans la rédaction de l'Assemblée nationale.
Article 2 I
La commission mixte paritaire adopte l'article 2 I dans la rédaction de l'Assemblée nationale.
M. Jean-Pierre Sueur, sénateur, président. - Les rapporteurs nous proposent d'apporter à cet article trois modifications rédactionnelles, dont deux que nous pouvons sans doute améliorer, en parlant de « débuter une vie en concubinage » plutôt que de « l'entamer ». Une proposition de rédaction n° 1 procède également à une coordination.
M. Jean-Pierre Michel, sénateur. - Nous ne savons pas très bien ce qu'est le concubinage. Commence-t-il dès une semaine, un mois ou plus ? Précisons au moins qu'il est « notoire ».
M. Jean-Pierre Sueur, sénateur, président. - Mais il est dans la loi.
M. Jean-Pierre Michel, sénateur. - Grâce au Sénat !
M. Sébastien Denaja, député, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - Il est défini à l'article 515-8 du code civil, introduit par la loi de 1999 relative au pacte civil de solidarité... mais je n'apprends rien à Jean-Pierre Michel.
M. Jean-Pierre Michel, sénateur. - Soit.
La proposition de rédaction de coordination n° 1 et les modifications rédactionnelles sont adoptées.
La commission mixte paritaire adopte l'article 2 dans la rédaction issue de ses travaux.
Article 2 bis BA
La commission mixte paritaire adopte l'article 2 bis BA dans la rédaction de l'Assemblée nationale, sous réserve de deux modifications rédactionnelles.
Mme Virginie Klès, sénateur, rapporteur pour le Sénat. - Nous vous proposons d'adopter le texte de l'Assemblée nationale sur l'autorisation d'absence donnée au futur père pour se rendre aux trois examens médicaux obligatoires durant la grossesse. C'est une autorisation et non une obligation, ce qui devrait rassurer certains de nos collègues...
Mme Muguette Dini, sénatrice. - Une femme enceinte a du mal à réaliser l'existence de son bébé avant de le voir, alors que dire du père ! Assister à l'échographie, qui est avant tout un examen médical, changera-t-il quelque chose ? Néanmoins, je ne m'y opposerai pas.
M. Jean-Pierre Michel, sénateur. - Il faut conserver cette possibilité pour que l'enfant soit réellement celui du père et de la mère et que la mère qui le porte ne se l'approprie pas.
M. Sébastien Denaja, député, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - L'idée à l'origine de cette rédaction était en effet que le futur père puisse se sentir tel le plus tôt possible. Accompagnons le changement de société que l'on peut constater dans ce domaine.
La commission mixte paritaire adopte l'article 2 bis B dans la rédaction de l'Assemblée nationale.
Article 2 bis D
La proposition de rédaction de clarification rédactionnelle n° 2 est adoptée.
La commission mixte paritaire adopte l'article 2 bis D dans la rédaction issue de ses travaux.
Article 2 bis E
La commission mixte paritaire adopte l'article 2 bis E dans la rédaction de l'Assemblée nationale.
Article 3
La commission mixte paritaire adopte l'article 3 dans la rédaction de l'Assemblée nationale.
Article 5
La commission mixte paritaire adopte l'article 5 dans la rédaction de l'Assemblée nationale.
M. Jean-Pierre Sueur, sénateur, président. - Les rapporteurs nous proposent d'en finir avec l'usage réputé sexiste de l'expression « bon père de famille », qui existe pourtant depuis longtemps dans la langue française et dans notre droit.
Mme Nicole Ameline, députée. - Il n'est pas inutile de débusquer dans les lois les expressions discriminantes, souvent invisibles, mais qui traduisent les stéréotypes en vigueur. Cela a donc beaucoup de sens de substituer « raisonnablement » à cette expression antique, pour ne pas dire patriarcale.
Mme Catherine Coutelle, députée. - Cela entérine la fin de l'autorité du père de famille, à qui l'on soumettait jusqu'en 1965 l'ouverture d'un compte en banque ou la prise d'un emploi par l'épouse. Il faudrait à ce propos féminiser l'Académie française qui s'oppose toujours à nous.
M. Jean-Pierre Sueur, sénateur, président. - Il est vrai qu'elle est loin d'être paritaire... Le Sénat avait parlé de « prudence » - ce qui pouvait dénoter un manque d'audace - et l'a assortie de la « diligence », afin d'y mettre de l'entrain. Mais qui pourrait s'opposer à la raison ?
M. Guy Geoffroy, député. - Nous franchissons une étape : a contrario, jadis, lorsque nous disions « en bon père de famille », nous entendions raisonnablement, prudemment et diligemment.
M. Sébastien Denaja, député, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - « Raisonnablement » a été préféré à ma proposition initiale, qui était : « en bon père et mère de famille ».
Mme Virginie Klès, sénateur, rapporteur pour le Sénat. - Cette loi étant déjà bavarde par ailleurs, mieux vaut ne conserver qu'un adverbe.
La commission mixte paritaire adopte l'article 5 sexies A dans la rédaction de l'Assemblée nationale.
Article 6
La commission mixte paritaire adopte l'article 6 dans la rédaction de l'Assemblée nationale.
Mme Virginie Klès, sénateur, rapporteur pour le Sénat. - La proposition de rédaction n° 3 obéit à la volonté de l'Assemblée nationale de mettre en lumière la possibilité de verser les pensions alimentaires par virement bancaire, pour éviter aux femmes, lors de séparations sinon conflictuelles, du moins complexes, de réclamer une, deux, trois fois le paiement de leur pension. Le Sénat était réticent à cette proposition, voulant conserver le libre choix au juge aux affaires familiales ; mais il est vrai qu'il faudrait qu'il pense plus souvent au versement par virement bancaire. Nous avons cependant ajouté « ou tout autre moyen de paiement » pour éviter des effets a contrario sur les femmes n'ayant qu'un compte bancaire joint ou interdites bancaires par exemple.
M. Sébastien Denaja, député, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - L'Assemblée y était très attachée, ayant déjà adopté cette disposition lors de la première lecture de la proposition de loi sur la famille, avec l'avis favorable du Gouvernement.
Mme Catherine Coutelle, députée. - Nous espérons que cette possibilité, déjà prévue dans le code civil, sera dorénavant plus utilisée par les juges aux affaires familiales.
Mme Sandrine Mazetier, députée. - Félicitons nos deux rapporteurs pour cette belle synthèse.
La proposition de rédaction n° 3 est adoptée.
La commission mixte paritaire adopte l'article 6 bis A dans la rédaction issue de ses travaux.
Article 6 septies
La commission mixte paritaire adopte l'article 6 septies dans la rédaction de l'Assemblée nationale.
M. Jean-Pierre Sueur, sénateur, président. - Nos rapporteurs n'ont pas trouvé d'accord, à l'article 7, sur l'ajout d'un 6° bis à l'article 515-11 du code civil.
M. Sébastien Denaja, député, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - N'étant pas à l'origine de cette disposition, je laisse la parole à Mme la présidente de la délégation aux droits des femmes de l'Assemblée nationale.
Mme Catherine Coutelle, députée. - Il est très important d'autoriser les femmes victimes de violences à dissimuler leur adresse, tant le fait de la laisser connaître peut constituer un danger. Elles pourront choisir de prendre comme adresse celle d'une association ou celle de leur avocat. Si c'est l'expression « pour les besoins de la vie courante » qui pose problème, nous pouvons la retirer.
Mme
Virginie Klès, sénateur, rapporteur pour le
Sénat. - Le droit de dissimuler son domicile est
déjà autorisé par le droit en vigueur. Mais le fait
d'élire domicile
- acte juridique formel - est
différent. Il met justement en lumière l'adresse de la personne
au lieu de la dissimuler. S'il s'agit de faire suivre son courrier, c'est
déjà permis aujourd'hui.
Mme Catherine Coutelle, députée. - Il ne s'agirait pas pour les victimes d'habiter réellement à cette adresse. Certes nous souhaitons que le conjoint violent quitte autant que possible le domicile conjugal ; mais cela donne souvent lieu à des violences, car il sait où trouver sa victime. Si une femme souhaite déménager, nous voulons que le père de ses enfants, par exemple, ne puisse pas connaître sa nouvelle adresse par l'école où ils sont inscrits.
Mme Michelle Meunier, sénatrice. - C'est déjà ainsi que cela se passe ; nous ne sommes pas en désaccord avec vous. Le 6° de l'article 515-11 du code civil prévoit que le juge aux affaires familiales peut « autoriser la partie demanderesse à dissimuler son domicile ou sa résidence... ».
M. Guy Geoffroy, député. - L'ordonnance de protection issue de la loi de juillet 2010 ajoute des dispositions temporaires au droit existant, et notamment la possibilité de quitter le domicile conjugal s'il n'y a pas d'autre solution - même s'il est bien sûr préférable que le conjoint violent soit écarté. Mais il faut que la personne protégée par l'anonymat puisse recevoir des offres d'emploi ou autres courriers relatifs aux « besoins de la vie courante », dans une association ou un centre communal d'action sociale. Cela est complémentaire avec la dissimulation du domicile réel.
Cela ne serait donc pas redondant avec le droit en vigueur mais apporterait une précision.
Mme Sandrine Mazetier, députée. - Ce sur quoi les deux chambres ne sont pas d'accord, ce n'est pas la dissimulation d'adresse mais l'élection de domicile chez une personne morale.
M. Sébastien Denaja, député, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - Nos objectifs sont les mêmes. De plus, le Sénat a émis une réserve sur l'élection de domicile sans l'assentiment de la personne morale concernée. Nous pourrions préciser que son accord est nécessaire.
M. Jean-Pierre Sueur, sénateur, président. - En ajoutant par exemple les mots « avec l'assentiment de celle-ci » ?
M. Sébastien Denaja, député, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - Ou « sous réserve de l'accord de celle-ci. »
Mme Muguette Dini, sénatrice. - Que signifie l'adjectif « qualifiée » ?
Mme Virginie Klès, sénateur, rapporteur pour le Sénat. - Le 6° de l'article 515-11 autorise déjà la partie demanderesse à dissimuler son domicile ou sa résidence et à élire domicile chez l'avocat qui l'assiste ou la représente. Elle peut donc élire domicile chez son avocat. En l'état actuel, le droit est plus protecteur. Vos inquiétudes sont mal fondées.
M. Guy Geoffroy, député. - La loi n'oblige pas la partie demanderesse à être accompagnée d'un avocat dans le cadre d'une demande d'ordonnance de protection. Elle peut faire sa démarche seule, avec le soutien d'une association ou celui d'un avocat. Je suggère donc que nous écrivions qu'elle peut demander à élire domicile chez son avocat « ou toute personne morale habilitée », terme qui serait plus approprié que celui de « qualifiée ».
Mme Nicole Ameline, députée. - Je soutiens cette proposition : il faut renforcer le texte actuel.
M. Sébastien Denaja, député, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - Je ne suis pas d'accord avec cette dernière proposition. Le texte adopté par l'Assemblée nationale vise les besoins de la vie courante, or le 6° de l'article 515-11 du code civil ne concerne que les instances civiles dans lesquelles la partie demanderesse est également partie. Quid des autres courriers ?
M. Jean-Pierre Sueur, sénateur, président. - Cet article ne concerne-t-il que les actes relatifs aux instances civiles ?
M. Sébastien Denaja, député, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - Oui.
Mme Virginie Klès, sénateur, rapporteur pour le Sénat. - Une procédure civile doit respecter le principe du contradictoire. Si la victime n'a pas d'avocat, elle peut élire domicile chez le procureur de la République. L'article 11 bis A, que nous avons voté conforme, prévoit que les personnels des centres d'hébergement et de réinsertion sociale (CHRS) seront tenus par le secret professionnel, et ne pourront donc pas divulguer l'adresse de la personne. Plus nous serons succincts, plus les femmes auront de liberté.
M. Jean-Pierre Sueur, sénateur, président. - Nous pourrions ajouter les mots « pour les besoins des instances civiles dans lesquelles la partie demanderesse est également partie ou de la vie courante »...
Mme Catherine Coutelle, députée. - C'est le retour au texte de l'Assemblée nationale.
Mme Virginie Klès, sénateur, rapporteur. - Cela supprime en outre la possibilité de faire appel à la famille...
La commission mixte paritaire adopte l'article 7 dans la rédaction de l'Assemblée nationale.
Article 14 bis
La commission mixte paritaire adopte l'article 14 bis dans la rédaction de l'Assemblée nationale.
M. Jean-Pierre Sueur, sénateur, président. - Nous vous proposons d'adopter l'article 15 quinquies A dans la rédaction de l'Assemblée nationale sous réserve d'écrire, au lieu de « et leur fonctionnement sont fixées », « , leur fonctionnement et les conditions de récusation de leurs membres sont fixés ».
La commission mixte paritaire adopte l'article 15 quinquies A dans la rédaction issue de ses travaux.
Article 15 septies
La commission mixte paritaire adopte l'article 15 septies dans la rédaction de l'Assemblée nationale.
M. Jean-Pierre Sueur, sénateur, président. - Nos rapporteurs proposent d'adopter l'article 17 dans la rédaction de l'Assemblée nationale, mais d'interpeller le Gouvernement en séance sur la nécessité de réfléchir aux dispositifs de signalement prévus par la loi de 2004 sur la confiance dans l'économie numérique.
Mme Virginie Klès, sénateur, rapporteur. - J'interviendrai sur ce sujet en séance. Il arrive de plus en plus souvent que des gamins - pardonnez-moi l'expression - sortent leur téléphone portable à la moindre occasion pour filmer une agression. C'est ainsi que des vidéos de viols ou de violences se retrouvent sur Internet, sans que l'on puisse toujours mettre en cause la responsabilité pénale des fournisseurs d'accès, qui n'ont pas les moyens de vérifier s'il s'agit d'images réelles ou de plaisanteries de très mauvais goût. Toujours est-il que ce phénomène banalise ce genre de comportement. Nous devons trouver une meilleure articulation des dispositifs de contrôle sur ce point.
La commission mixte paritaire adopte l'article 17 dans la rédaction de l'Assemblée nationale.
Article 17 quinquies
La commission mixte paritaire adopte l'article 17 quinquies dans la rédaction de l'Assemblée nationale.
Article 18 bis
M. Sébastien Denaja, député, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - Nous nous sommes rendus aux arguments du Sénat soulignant le risque d'inconstitutionnalité qu'il y avait à prévoir qu'un maire et son premier adjoint, ou un président et le premier vice-président d'un conseil départemental ou régional, doivent être de sexe différent. Nous souhaitons bien sûr que cet objectif soit atteint, mais il s'agit de deux élections différentes ! Il est difficile de lier l'une à l'autre...
M. Jean-Pierre Sueur, sénateur, président. - Mme Klès vous a donc convaincu. Je crois qu'il y a en effet un risque constitutionnel.
Mme Catherine Coutelle, députée. - Pas forcément. Ces deux élections sont différentes : l'une a pour objet l'élection du maire par le conseil municipal, l'autre correspond à celle des adjoints, un par un ou par liste. Rien n'empêche, une fois le maire élu, de prescrire l'élection d'une personne de sexe opposé. La loi du 17 mai 2013 a bien imposé des listes paritaires dans les communes de plus de 1000 habitants mais, après les dernières élections, la plupart des premiers adjoints n'ont pas été choisis selon l'ordre des listes. Ainsi, la parité sur les listes n'implique pas la parité dans les exécutifs. Le progrès est lent !
Mme Virginie Klès, sénateur, rapporteur. - Je partage votre constat et votre diagnostic mais il s'agit d'élections différentes. Il est impossible de restreindre les possibilités d'être candidat à la seconde en fonction du résultat de la première : ce serait les lier.
La commission mixte paritaire supprime l'article 18 bis.
Article 18 ter
La commission mixte paritaire adopte l'article 18 ter dans la rédaction de l'Assemblée nationale.
Article 18 quater
La commission mixte paritaire adopte l'article 18 quater dans la rédaction du Sénat.
Mme Virginie Klès, sénateur, rapporteur pour le Sénat. - La parité n'est pas assurée par la loi dans les conseils municipaux des communes de moins de mille habitants. Vouloir l'imposer dans les conseils d'administration des établissements publics locaux me semble ingérable. Nous devons d'abord laisser la situation évoluer. Il est inenvisageable de retenir la rédaction de l'Assemblée nationale : ce serait malheureusement mission impossible.
M. Sébastien Denaja, député, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - Je me suis incliné devant les arguments de votre rapporteur, puisque c'est le Sénat qui représente les collectivités territoriales. J'avais pourtant donné un avis favorable à l'amendement de Mme Coutelle...
M. Jean-Pierre Sueur, sénateur, président. - Si le Sénat est fier de cette compétence, l'Assemblée nationale représente tous les Français, partant les collectivités territoriales qui les rassemblent.
Mme Catherine Coutelle, députée. - Je maintiens ma position. Sur ce sujet, chaque reculade est un aveu d'échec. L'on n'y arrive pas « parce qu'il n'y a pas de vivier », mais parce que l'on ne nomme pas de femmes dans les lieux de pouvoir. On le voit dans les fédérations sportives ou dans les chambres d'agriculture. Beaucoup de maires m'ont reproché l'instauration de listes paritaires dans les communes de plus de mille habitants. Pourtant, ils y sont tous arrivés. Mieux, ils affirment à présent que cela a renouvelé les listes : un coup de pied dans la fourmilière fait parfois avancer les choses...
M. Guy Geoffroy, député. - Malgré le vif souhait que nous avons d'en rester au texte voté par l'Assemblée nationale, les arguments de Mme Klès sont irréfutables. Tant qu'il y aura, pour les conseils d'administration des collèges et lycées, par exemple, plusieurs collèges, avec des modalités d'élection différentes, il sera impossible d'édicter une telle règle. Nous pourrions inviter les autorités publiques qui décident par décret de la composition de ces instances à installer la parité en transformant les modes de scrutin. Naguère, nous aurions dit que le Sénat a légiféré « en bon père de famille »...
M. Jean-Pierre Sueur, sénateur, président. - Cela n'existe plus !
Mme Virginie Klès, sénateur, rapporteur pour le Sénat. - Cette règle risquerait aussi de faire sortir des femmes d'instances dans lesquelles elles sont désormais installées - les conseils d'administration des collèges, par exemple - et où elles exercent souvent leur première fonction élective. Très attachée à la parité, je pense néanmoins qu'il faut en rester là pour le moment, quitte à aborder de nouveau la question, instance par instance, lors de l'examen de la réforme territoriale.
Mme François Guégot, députée. - Certes, pour avancer, il faut fixer des objectifs contraignants. L'on pourrait réfléchir à ce que nous avons fait pour les trois fonctions publiques : dans tous les cas, c'est sur les modes d'élection qu'il faut agir si l'on ne veut pas se heurter à des problèmes de constitutionnalité : nous avons su progresser sur l'université.
Mme Muguette Dini, sénatrice. - Je me bats depuis très longtemps pour la parité. La progression se fait par étapes. Si la proposition de Mme Klès est raisonnable, nous devons examiner, instance par instance, dans le public comme dans le privé, les modes d'élection, et réfléchir aux manières d'y imposer la parité. C'est compliqué, mais si nous ne faisons rien, nous reculerons.
M. Jean-Pierre Sueur, sénateur, président. - Je partage le sentiment exprimé par Mme Coutelle, mais nous devons tenir compte des réalités. Dans un conseil d'administration de lycée, par exemple, il y a plusieurs collèges électoraux ou autorités de nomination : y sont représentés les enseignants, les élèves, la région, la commune, les autres personnels... Comment y imposer la parité ? Impossible, sauf à contraindre l'élection dans chaque collège en fonction des résultats dans les autres.
La commission mixte paritaire supprime l'article 18 quinquies.
M. Jean-Pierre Sueur, sénateur, président. - Pour cet article, relatif à la parité au sein de l'Institut, nous nous en remettons au texte voté par l'Assemblée nationale... Que signifie l'expression « Les membres veillent » ?
M. Sébastien Denaja, député, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - Pour féminiser les mots, il fallait commencer par féminiser l'instance qui pourrait le faire... Le texte de l'Assemblée nationale, qui n'est pas contraignant, résulte déjà d'un compromis. Le fait qu'il ne soit pas contraignant était déjà un compromis. Le président de la République, protecteur des Académies, pourrait ne pas ratifier des élections lorsqu'elles témoignent d'un mépris de cette invitation du législateur à assurer au moins un équilibre. L'Académie française n'a compté que sept femmes sur 727 membres. Depuis six mois, deux sièges ont été pourvus : après l'élection qui plus est de M. Finkielkraut, les académiciens ont nommé un deuxième homme, le jour même de la seconde lecture de ce texte à l'Assemblée nationale.
M. Jean-Pierre Sueur, sénateur, président. - Au Panthéon, le président de la République a fait entrer deux hommes et deux femmes...
M. Sébastien Denaja, député, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - Selon qu'on est mort ou immortel...
Mme Virginie Klès, sénateur, rapporteur pour le Sénat. - Souhaitons que les femmes lisent bien le compte rendu de nos débats et qu'elles se portent candidates !
M. Jean-Pierre Sueur, sénateur, président. - Le président de la République ne manquera pas d'être sensible à vos arguments. Espérons que les académiciens le seront aussi !
La commission mixte paritaire adopte l'article 19 bis est adopté dans la rédaction de l'Assemblée nationale.
Article 20 bis
M. Sébastien Denaja, député, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - Nous sommes d'accord pour avancer l'échéance de 2020 à 2017...
Mme Virginie Klès, sénateur, rapporteur pour le Sénat. - Oui, on peut, pourquoi pas, accélérer un peu les choses. Je tiens à préciser sur ce point que, contrairement à ce qu'a dit en séance Mme Zimmermann, les lobbys n'ont pas été plus puissants au Sénat qu'à l'Assemblée nationale. C'est le Sénat qui a pris l'initiative en 2011 d'ajouter au texte de loi les sociétés non cotées, et sa commission des lois, Mme Des Esgaulx étant rapporteur, a proposé de leur laisser trois années de délai supplémentaire, soit 2020 contre 2017 pour les sociétés cotées.
M. Sébastien Denaja, député, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - Mme Zimmermann souhaitait mettre toutes les sociétés à la même enseigne : 2017 et non 2020. Il s'agissait bien de son intention en tant que législateur.
Mme Nicole Ameline, députée. - Rien ne justifie de retenir la date de 2020, alors que nous devons dynamiser l'emploi et l'économie en renforçant la mixité et la parité. Celles-ci ne doivent pas être vues par les entreprises comme des contraintes mais comme des atouts, notamment dans la perspective d'une sortie de crise prochaine. Les mesures spéciales temporaires destinées à accélérer la mise en place de l'égalité sont très recommandées par les conventions internationales. Il nous incombe d'accélérer la mise en place d'une égalité réelle. La date de 2017 devrait s'appliquer à toutes.
M. Jean-Pierre Sueur, sénateur, président. - Nous accomplissons tous notre travail en toute indépendance. Au I, les rapporteurs sont d'accord sur une échéance de 2017.
La commission mixte paritaire adopte le I dans la rédaction de l'Assemblée nationale.
M. Sébastien Denaja, député, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - Faut-il étendre les dispositions de la loi, qui ne s'appliquent qu'aux sociétés non cotées de plus de 500 salariés, à celles qui en comptent entre 250 et 499 ? L'Assemblée nationale le souhaite. Les difficultés éventuelles pourront être réglées en retenant un délai de six ans, jusqu'à 2020.
Mme Virginie Klès, sénateur, rapporteur pour le Sénat. - L'Assemblée nationale ayant étendu le champ de cet article en deuxième lecture à l'Assemblée nationale, le Sénat n'a pas pu se prononcer sur ces dispositions. Nous manquons d'une étude d'impact. Quelles sont les sociétés concernées ? Apparemment, essentiellement des sociétés familiales, qui sont parfois très féminisées. Ne réduisons pas le conseil d'administration à une fonction de représentation et non de compétence effective. Imposer la parité dans leurs conseils d'administration nous paraît dangereux, surtout en période de crise.
Mme Sandrine Mazetier, députée. - Il s'agit des entreprises de taille intermédiaire en faveur desquelles la mobilisation des pouvoirs publics est totale. Notre rédaction leur laisse suffisamment de temps pour s'organiser. Je ne comprends pas l'objection selon laquelle il est impossible de changer la composition des conseils d'administration : les femmes sont déjà actives dans l'encadrement. Des conseils d'administration fantoches ? On entendait déjà l'argument dans la bouche des adversaires de la loi sur la parité en politique.
Mme Nicole Ameline, députée. - Il est maladroit de vouloir introduire une distinction entre représentation et compétence. Nous avons à relever le défi formidable de revaloriser la place des femmes dans les entreprises. Cessons d'envisager la parité comme une contrainte, c'est une chance pour l'entreprise. Je préside une fondation européenne qui regroupe de grandes sociétés. Pour elles, la parité est un instrument de compétitivité, d'image. Il faut vivre l'égalité professionnelle de manière dynamique.
Mme Catherine Coutelle, députée. - N'attendons pas la fin de la crise pour agir en faveur de l'égalité ! Voyez l'Islande, que les femmes ont sortie du marasme.
Mme Virginie Klès, sénateur, rapporteur pour le Sénat. - Je ne dis pas que les femmes qui siègeront dans les conseils d'administration seront des potiches. La parité est une chance. Mais il n'est pas judicieux de fixer des règles rigides de composition. En période de crise, les entreprises ont besoin de s'appuyer sur la compétence des membres de leur conseil d'administration, avant de songer à en modifier sa composition. Six ans, c'est court dans la vie d'une entreprise.
M. Jean-Pierre Sueur, sénateur, président. - Êtes-vous d'accord pour un seuil à 250 salariés ?
Mme Virginie Klès, sénateur, rapporteur pour le Sénat. - Nous ne savons pas combien ni quel type d'entreprises cela représente.
M. Sébastien Denaja, député, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - Ce sont les entreprises de plus de 250 salariés, dont le chiffre d'affaires ou le bilan est supérieur à 50 millions d'euros.
La commission mixte paritaire adopte le II et le III dans la rédaction de l'Assemblée nationale.
La commission mixte paritaire adopte l'article 20 bis dans la rédaction issue de ses travaux.
Article 20 ter
Mme Sandrine Mazetier, députée. - La proposition de rédaction n° 4 est en repli par rapport au texte de l'Assemblée nationale, si elle n'organise pas une retraite en rase campagne. À l'Assemblée nationale, nous avions pris le risque de l'inconstitutionnalité allégué par certains pour favoriser la parité dans les nominations de la haute fonction publique. Afin d'éviter les nominations en rafale d'hommes, nous voulions qu'en cas de nominations successives au sein d'un département ministériel, elles portent, sauf sous-représentation, alternativement sur chaque sexe. Ce dispositif nous semble conforme à la Constitution. Ne renonçons pas à modifier les habitudes dans les procédures de nomination. Les autres pays savent concilier vie privée et vie professionnelle. Je me rallierai néanmoins à la proposition de rédaction des rapporteurs...
M. Sébastien Denaja, député, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - C'est à regret que je me suis rallié à cette proposition de rédaction. Nous avons dû céder au lobbying intense du Gouvernement. Le mécanisme, sans doute audacieux, adopté par l'Assemblée nationale me semblait respectueux de la Constitution. Le Gouvernement toutefois promeut activement la place des femmes dans la haute fonction publique. Espérons que cet effort se poursuivra au-delà de la mandature.
Mme Virginie Klès, sénateur, rapporteur pour le Sénat. - Le mécanisme proposé était difficile à mettre en oeuvre. Les nominations ont lieu au fil de l'année, mais le contrôle ne pourrait avoir lieu qu'a posteriori. Que ce serait-il passé en cas de nullité des nominations tant pour les personnes concernées que pour celles qui les auraient remplacées dans leur poste d'origine ? Quelles auraient été les conséquences pour leur traitement, leur carrière ? Qui choisir entre un homme atteint d'un handicap ou une femme, dans un service où le quota de personnes handicapées n'est pas atteint ?
Mme Muguette Dini, sénatrice. - Ce qui est exigé des entreprises deviendrait-il insurmontable dans la fonction publique ? J'étais favorable à la rédaction de l'Assemblée nationale, je m'abstiendrai sur la proposition de rédaction n° 4.
Mme Françoise Guégot, députée. - Tout est très compliqué en la matière, et il faut sans cesse se battre. Il y aura toujours de bonnes raisons pour prendre du retard dans la mise en oeuvre de la parité dans la haute fonction publique. Toute avancée est importante, et j'apprécie le raccourcissement du délai imparti pour atteindre les objectifs.
Mme Catherine Coutelle, députée. - Lors du vote de la loi de 2012, nous avions soutenu Mme Guégot sur ce sujet. Les hommes ne sont pas les seuls à avoir des plans de carrière.
La commission mixte paritaire adopte la proposition de rédaction n° 4, qui réécrit l'article 20 ter.
Elle adopte l'article 20 ter dans la rédaction issue de ses travaux.
Article 22
Mme Catherine Coutelle, députée. - Je ne suis pas d'accord avec nos rapporteurs, qui proposent d'adopter l'article 22 dans la rédaction du Sénat. Je voterai contre cette proposition.
La commission mixte paritaire adopte l'article 22 dans la rédaction du Sénat.
Article 23
M. Sébastien Denaja, député, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - Le Gouvernement souhaitait être habilité à procéder par ordonnances pour favoriser une égale représentation des hommes et des femmes au sein des organismes administratifs consultatifs ou délibératifs et des autorités administratives indépendantes. L'Assemblée avait préféré une disposition législative englobant toutes ces institutions. La proposition de rédaction n° 5 est un compromis. Conformément au souhait de l'Assemblée nationale un principe est inscrit dans la loi pour certains organismes. En revanche, le Gouvernement sera autorisé à intervenir par ordonnance pour les autorités indépendantes. Nous atteindrons l'objectif et gagnerons en lisibilité.
Mme Virginie Klès, sénateur, rapporteur pour le Sénat. - Cette rédaction est gage de lisibilité.
La commission mixte paritaire adopte la proposition de rédaction n° 5.
M. Jean-Pierre Sueur, sénateur, président. - Nous reprendrions ensuite la première phrase du I du Sénat, sous réserve d'une correction rédactionnelle.
M. Sébastien Denaja, député, rapporteur. - Par cohérence, il convient de supprimer le pluriel et d'écrire « par ordonnance ».
M. Guy Geoffroy, député. - « Par voie d'ordonnance » ?
M. Sébastien Denaja, député, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - « Par ordonnance » est préférable.
La commission mixte paritaire adopte le I, ainsi modifié.
La commission mixte paritaire adopte le II dans la rédaction du Sénat, sous réserve de corrections rédactionnelles.
La commission mixte paritaire adopte l'article 23 dans la rédaction issue de ses travaux.
Article 25
La commission mixte paritaire adopte le I dans la rédaction du Sénat sous réserve de modifications rédactionnelles.
Elle adopte les paragraphes I bis à IV dans la rédaction de l'Assemblée nationale sous réserve de modifications rédactionnelles.
M. Jean-Pierre Sueur, sénateur, président pour le Sénat. - Relative aux alinéas 20 à 23, 31 à 34 et 42 à 45, la proposition de rédaction n° 6 assure les coordinations nécessaires.
La commission mixte paritaire adopte la proposition de rédaction n° 6, ainsi que les paragraphes V à VII dans la rédaction issue de ses travaux.
Elle adopte les paragraphes restants dans la rédaction de l'Assemblée nationale.
La commission mixte paritaire adopte l'article 25 dans la rédaction issue de ses travaux.
Intitulé du projet de loi
M. Sébastien Denaja, député, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - Je suis très attaché à l'adjonction de l'adjectif « réelle », afin de bien marquer la volonté du législateur de ne pas en rester à une égalité formelle. Nous notons aussi avec humilité que nous nous inscrivons dans un corpus législatif déjà étoffé. J'ai bien lu que vous estimiez que de même qu'aimer beaucoup, c'est moins qu'aimer, de même l'adjectif affaiblissait la portée du terme égalité, mais nous maintenons notre souhait.
Mme Virginie Klès, sénateur, rapporteur pour le Sénat. - Les sénateurs dans leur grande majorité sont hostiles à l'ajout d'un adjectif. Certains auraient du reste accepté plutôt les adjectifs « effectif » ou « concret ». Nous nous en remettons à la sagesse de la commission mixte paritaire.
M. Jean-Pierre Sueur, sénateur, président. - Je suis farouchement opposé à cet adjectif. Non seulement il n'apporte rien d'un point de vue juridique, mais en plus il affaiblit le sens. Je me suis battu contre l'expression « laïcité positive » ; la laïcité se suffit à elle-même : parler de « laïcité positive » suppose qu'il existerait une laïcité négative... La devise de la République n'est pas « liberté concrète, égalité vraie, fraternité effective » ! Nous sommes des combattants de l'égalité, c'est tout. Les adjectifs affadissent les textes juridiques et à force d'ajouter on retranche. Quand on dit « certainement », c'est que ce n'est pas certain ; quand on dit « sûrement », c'est que rien n'est sûr ; « honnêtement », c'est que ce n'est pas clair ! En écrivant « égalité réelle », vous reculez déjà sur l'égalité. Laissons aux mots leur sens ! Mallarmé, qui se battait contre l'adjectivisme, voulait « donner un sens plus pur aux mots de la tribu ». Croyez en l'égalité : elle n'a pas besoin d'adjectifs pour exister dans sa plénitude.
Mme Muguette Dini, sénatrice. - Je ne saurais mieux dire !
Mme Nicole Ameline, députée. - Dans beaucoup de domaines, en effet, less is more. Toutefois je suis favorable à l'expression « égalité réelle ». Un peu de pédagogie ne nuit pas. Rendre effectif notre droit à l'égalité constitue un défi majeur. Comme vous le soulignez, les mots ont un sens : avec cette formulation, nous soutenons l'initiative du Gouvernement en faveur de l'égalité des droits. De plus, même si nous écrivons le droit, il nous appartient aussi de faire de la politique. Or en reprenant une expression utilisée dans toutes les instances internationales, nous enverrions un bon signal. Quoique davantage politique que juridique, le concept reste utile. La loi ne sert à rien si elle n'est pas appliquée.
Mme Sandrine Mazetier, députée. - Vous avez raison, il serait invraisemblable de revoir la devise de la République pour lui ajouter des adjectifs. En l'espèce, il s'agit juste de faire justice aux mesures d'un texte qui visent à rendre effectifs des droits inscrits dans nos codes depuis très longtemps. Voilà plus de quarante ans que la loi fait mention de l'égalité salariale !
M. Jean-Pierre Sueur, sénateur, président. - Il faudrait parler alors d'égalité salariale réelle !
Mme Catherine Coutelle, députée. - Votre plaidoyer a failli m'ébranler. Je partage votre point de vue sur les exemples que vous avez évoqués. Je me rallie pourtant à l'expression défendue par notre rapporteur. Plusieurs textes ont été votés en faveur de l'égalité entre les hommes et les femmes. Le Gouvernement est résolu à accélérer. Mais l'égalité bute sur la réalité. Sans cesse on nous oppose l'absence de vivier. Nous sommes d'accord sur les principes, mais il faut leur donner une existence concrète.
M. Sébastien Denaja, député, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - Après le vibrant plaidoyer du président Sueur, un mot à la défense... L'emploi de cet adjectif constitue plutôt une marque d'humilité qu'un signe d'audace. L'adjectif n'affaiblit pas toujours le sens : un grand amour vaut mieux qu'un amour tout court. Beaucoup pensent que l'égalité entre les hommes et les femmes est déjà bien avancée, ce n'est pas le cas. Nous marquons notre intention avec un texte qui transcende les clivages et approfondit l'oeuvre du législateur. En ce sens l'emploi de l'adjectif n'est pas contraire à votre plaidoyer.
M. Guy Geoffroy, député. - J'apprécie beaucoup vos propos, monsieur le président Sueur. L'important est de mettre en oeuvre les dispositions que nous votons. Le texte est destiné à alerter les pouvoirs publics pour qu'ils appliquent les dispositions. En outre, quel titre donnerons-nous à la prochaine loi sur le sujet ?
Mme Michelle Meunier, sénatrice. - Je suis pour l'expression « égalité réelle » car les faits sont têtus. Les chiffres sont là. Il est temps d'agir.
M. Jean-Pierre Sueur, sénateur, président. - Songez à la beauté du mot égalité ! Que serait l'égalité irréelle ?
La commission mixte paritaire adopte l'intitulé retenu par l'Assemblée nationale.
M. Jean-Pierre Sueur, sénateur, président. - Nous aurons l'égalité réelle...
La commission mixte paritaire adopte ensuite, ainsi rédigées, l'ensemble des dispositions restant en discussion du projet de loi.
En conséquence, la commission mixte paritaire vous demande d'adopter le projet de loi pour l'égalité réelle entre les femmes et les hommes dans le texte figurant dans le document annexé au présent rapport.
La réunion est levée à 19 heures
Mercredi 23 juillet 2014
- Présidence de M Daniel Raoul, président -Commission mixte paritaire sur le projet de loi d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt
La séance est ouverte à 10 h 05.
Conformément au deuxième alinéa de l'article 45 de la Constitution et à la demande du Premier ministre, une commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt s'est réunie au Sénat le mercredi 23 juillet 2014.
Elle procède d'abord à la désignation de son bureau, constitué de M. Daniel Raoul, sénateur, président ; de M. François Brottes, député, vice-président ; de M. Didier Guillaume, sénateur, rapporteur pour le Sénat, auquel se substituera pour le titre V, M. Philippe Leroy, sénateur et de M. Germinal Peiro, député, rapporteur pour l'Assemblée nationale.
La commission mixte paritaire procède ensuite à l'examen des dispositions restant en discussion.
M. Daniel Raoul, sénateur, président. - La deuxième lecture, malgré des conditions éprouvantes au Sénat en raison d'un calendrier tendu, a rapproché nos positions : seuls 37 articles restent en discussion, ainsi que deux autres modifiés pour coordination.
M. François Brottes, député, vice-président. - Il est dommage que le vote définitif de cette loi ne puisse avoir lieu avant la fin de la session : attendre un trimestre est dommageable.
M. Antoine Herth, député. - J'ai une pensée pour le ministre, que le Sénat a beaucoup fatigué... Lors des deux dernières commissions mixtes paritaires auxquelles j'ai participé, les tableaux comparatifs ne précisaient pas la numérotation des alinéas, pourtant mentionnés par les propositions de rédaction. Ceux qui les présentent pourraient en indiquer la page.
L'article 1er est adopté dans la rédaction du Sénat.
Article 3
Création des groupements
d'intérêt économique et environnemental (GIEE) et
définition des conditions de leur reconnaissance
M. Germinal Peiro, député, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - La proposition de rédaction n° 1, présentée par vos deux rapporteurs, revient au texte de l'Assemblée nationale ; le projet de loi autorise déjà les échanges de semences dans certaines conditions entre agriculteurs membres d'un groupement d'intérêt économique et environnemental (GIEE). Nous souhaitons que cette pénalité ne soit pas étendue à l'ensemble des récoltes. Depuis 1936 et le Front Populaire, l'organisation du marché des céréales est fondée sur la connaissance des volumes des récoltes grâce à l'obligation de recourir à un organisme stockeur. N'ouvrons pas une brèche dans un système que les étrangers nous envient. Les cotisations volontaires obligatoires se baseraient sur un système déclaratif et le risque de création de GIEE d'opportunité n'est pas nul. Il est préférable que les échanges transitent par les organismes stockeurs.
M. Gérard César, sénateur. - Sur ce point très important, je me rallie à cette position et retire ma proposition de rédaction n° 2.
La proposition de rédaction n° 2 est retirée.
Mme Renée Nicoux, sénatrice. - Le Sénat avait voulu procéder à une simplification des GIEE en autorisant la commercialisation en interne ; l'apparition de GIEE d'opportunité est peu probable, puisqu'ils sont soumis à certification. La contribution est inscrite dans le texte. Je conçois pourtant qu'il soit difficile de revenir sur un dispositif ancien qui alimente les caisses de l'organisme gestionnaire.
M. Jacques Lamblin, député. - L'organisation du marché des céréales donne pleinement satisfaction ; ne mettons pas le doigt dans cet engrenage.
M. Gérard Le Cam, sénateur. - L'échange de céréales devra-t-il transiter physiquement par l'organisme stockeur ?
M. Daniel Raoul, sénateur, président. - Non, il devra transiter juridiquement et sera soumis à déclaration.
La proposition de rédaction n° 1 est adoptée.
L'article 3 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.
Article 4
Déclarations d'azote, extension
du bail environnemental et adaptation de la politique de développement
agricole
M. Germinal Peiro, député, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - La proposition de rédaction n° 3 revient à la rédaction de l'Assemblée nationale, issue d'un amendement du groupe UDI.
La proposition de rédaction n° 3 est adoptée.
M. Didier Guillaume, sénateur, rapporteur pour le Sénat. - La proposition de rédaction n° 4 est de forme et de cohérence.
La proposition de rédaction n° 4 est adoptée.
M. Antoine Herth, député. - Nous voterons contre l'article 4.
L'article 4 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.
La suppression de l'article 4 bis A est confirmée.
L'article 4 quinquies est adopté dans la rédaction du Sénat.
Article 7
Modification des règles
relatives à la contractualisation et renforcement du rôle de
médiateur des relations commerciales agricoles
M. Didier Guillaume, sénateur, rapporteur pour le Sénat. - Les remises, rabais et ristournes, les fameux trois R, ont fait l'objet d'une longue discussion au Sénat. Le dispositif voté au Sénat en généralisant le renvoi au décret de la liste des secteurs pour lesquels les 3R sont interdits, présente de réels inconvénients. Le pragmatisme commande d'en revenir à la rédaction de l'Assemblée nationale, avec la proposition de rédaction n° 5.
La proposition de rédaction n° 5 est adoptée.
L'article 7 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.
L'article 8 est adopté dans la rédaction du Sénat, ainsi que les articles 8 bis et 10 bis A.
Article 12
Préservation du foncier
agricole
M. Germinal Peiro, député, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - La proposition de rédaction n° 6 est de forme.
La proposition de rédaction n° 6 est adoptée.
M. Germinal Peiro, député, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - La proposition de rédaction n° 7 est un compromis entre les deux chambres ; elle autorise la commission départementale de la préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers (CDPENAF) à s'autosaisir sur les projets de plans locaux d'urbanisme (PLU) de communes comprises dans un schéma de cohérence territoriale (SCoT) uniquement si ce dernier a été approuvé avant l'entrée en vigueur de la présente loi.
M. Didier Guillaume, sénateur, rapporteur pour le Sénat. - Le Sénat a voulu s'appuyer sur l'intelligence des territoires et des élus. Nous avons trouvé une rédaction tenant compte de ce qui existe, tout en prévoyant la correction d'éventuels petits dérapages.
M. Dominique Potier, député. - Les SCoT ont été inspirés par la loi de solidarité et de renouvellement urbains (SRU) dans les années 2000 et par les lois Grenelle en 2007-2008 ; si ceux de la première génération sont très souples, voire légers quant à la consommation du foncier, ceux de la nouvelle génération ont été soumis à l'avis de la CDPENAF. Cette disposition évite de prévoir ceinture et bretelle...
M. Jacques Lamblin, député. - L'avis de la CDPENAF est-il conforme ?
M. Didier Guillaume, sénateur, rapporteur pour le Sénat. - Non, il est consultatif.
M. Joël Labbé, sénateur. - Mon groupe était favorable à un avis conforme car malgré une évolution dans le bon sens, il y a eu aussi des dérives. Nous faisons tous confiance à l'intelligence des élus, mais le cadrage reste une nécessité.
Mme Annie Genevard, députée. - Lorsque nous préparons un SCoT ou un PLU, nous procédons à de larges consultations. Ceux qui sont dans le périmètre d'un parc naturel savent particulièrement ce que cela signifie... L'autosaisine de la commission, même pour un avis simple, pourrait fragiliser les élus qui sont déjà très exposés. Prudence... Je préfère nettement une consultation a priori.
M. Germinal Peiro, député, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - C'est ce qui se passera.
M. Jean-Jacques Lasserre, sénateur. - Je suis de l'avis de Mme Genevard. Je m'abstiendrai.
Mme Annie Genevard, députée. - L'autosaisine me semble plutôt permettre un jugement a posteriori.
M. Germinal Peiro, député, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - La proposition de rédaction n° 7 est en recul par rapport au texte de l'Assemblée nationale, qui avait prévu une auto-saisine de la CDPENAF dans tous les cas. En réalité, cette faculté se justifie seulement pour les PLU non couverts par des SCoT ou couverts par des SCoT d'ancienne génération.
M. François Brottes, député, vice-président. - Ne réécrivons pas l'histoire : les PLU sont en conformité avec les SCoT. Les modifications ou révisions de PLU sont-elles concernées ? Le compte rendu de notre réunion fera foi.
M. Didier Guillaume, sénateur, rapporteur pour le Sénat. - Ce compromis peut satisfaire tout le monde. Dans mon idée, nous visons seulement les nouveaux PLU, et non les révisions de PLU, qui ne nécessitent pas de consulter la CDPENAF.
M. Germinal Peiro, député, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - En cas de révision, la consultation de la CDPENAF n'est pas obligatoire.
M. Daniel Raoul, sénateur, président. - Autrement dit, les PLU « grenellisés » ne passeront pas devant la CDPENAF.
M. Germinal Peiro, député, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - La CDPENAF étant désormais systématiquement consultée en amont, l'auto-saisine ne se justifie que pour le passé.
M. Dominique Potier, député. - Pour suivre le président Brottes, que les anciens SCoT, ceux de la génération d'avant 2014, échappent en cas de révision à la capacité d'auto-saisine de la CDPENAF ne serait pas anecdotique. Progressivement, la France se simplifierait.
La proposition de rédaction n° 7 est adoptée.
M. Didier Guillaume, sénateur, rapporteur pour le Sénat. - Le Sénat tient beaucoup à la proposition de rédaction n° 8 que j'ai élaborée avec Germinal Peiro. Elle témoigne, encore une fois, de notre confiance en l'intelligence des élus locaux. D'une manière générale, on gaspille moins de foncier qu'il y a dix ans. Les mentalités ont évolué : peu de maires aménagent désormais des lotissements sur des terres agricoles. Certains préfets, dérogeant à la loi, acceptent des nouvelles constructions dans les zones agricoles et naturelles ; d'autres les refusent catégoriquement. D'où notre proposition : autoriser l'extension ou le changement de destination de bâtiments agricoles existants. Ne nous perdons pas en faux débats, nous avons placé plusieurs verrous : le PLU doit prévoir de telles souplesses, et la CDPENAF doit délivrer un avis conforme pour les changements de destination des bâtiments agricoles. De cette façon, nous éviterons le mitage.
M. Gérard César, sénateur. - Mais pas le pastillage !
M. Germinal Peiro, député, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - L'Assemblée nationale était revenue sur cette disposition introduite par le Sénat, la jugeant contraire au code de l'urbanisme. Autoriser le changement de destination de tous les bâtiments agricoles se retournerait contre les agriculteurs. Des familles s'installeraient, il faudrait amener l'eau et l'électricité, prévoir le passage du bus scolaire et du camion de ramassage des ordures ménagères... Ce n'est pas le cas avec cette proposition de rédaction : le règlement du PLU doit prévoir cette possibilité et la CDPENAF (ou la commission départementale de la nature, des paysages et des sites (CDNPS) quand il s'agit de zones naturelles) doit donner un avis conforme.
Outre le changement de destination, nous autorisons l'extension des habitations existantes dans les zones agricoles. Que la loi pour l'amélioration du logement et pour un urbanisme rénové (ALUR) l'ait interdite est un peu fort de café !
M. François Brottes, député, vice-président. - N'en déplaise à certains, je ne suis pas de ceux qui aiment laisser des ruines partout dans nos campagnes. Votre proposition de rédaction mentionne « le règlement ». Il s'agit bien du règlement du PLU, n'est-ce pas ? Les territoires couverts par des cartes communales ou le règlement national d'urbanisme ne sont donc pas concernés.
M. Dominique Potier, député. - MM. Hervé Pellois et Yves Daniel ont défendu une telle modification à l'Assemblée nationale, je salue ce compromis intelligent.
M. Gilles Lurton, député. - En votant cette proposition de rédaction, nous répondons aux interrogations de bien des maires sur la loi ALUR. La nouvelle disposition s'appliquera-t-elle seulement aux PLU à venir ? De nombreuses communes sont en train de réviser leur PLU.
M. Didier Guillaume, sénateur, rapporteur pour le Sénat. - Les PLU en cours de révision pourront prévoir cette souplesse. Nous avons d'ailleurs ajouté un dernier verrou : le changement de destination ne doit pas compromettre l'activité agricole.
M. Gilles Lurton, député. - Pourquoi avoir exclu les secteurs de taille et de capacité d'accueil limités, les STECAL ?
M. Germinal Peiro, député, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - Parce que les constructions y sont déjà autorisées.
M. Jacques Lamblin, député. - La disposition vaudra-t-elle pour les territoires où existe seulement une carte communale ?
M. Daniel Raoul, sénateur, président. - Non, le PLU est indispensable.
M. Didier Guillaume, sénateur, rapporteur pour le Sénat. -De toute façon, dans deux à trois ans, il y en aura sur tout le territoire. Cette ouverture est très attendue, nous l'avons encadrée pour apaiser les inquiétudes.
M. Gérard César, sénateur. - Il faudra veiller au grain, prendre garde à ce que les zones N et NH soient mentionnées dans le décret. C'est important pour les maires ruraux.
M. Jacques Lamblin, député. - On présuppose que le maire poussera à l'ouverture face à une CDPENAF qui jouera le rôle de garde-fou. L'inverse pourrait se produire.
M. Joël Labbé, sénateur. - Arrêtons de diaboliser la CDPENAF ; réunissez les acteurs autour de la table et faites-les discuter, l'intérêt général progressera. Didier Guillaume l'a expliqué, cette mesure incitera les communes à élaborer un PLU.
M. François Brottes, député, vice-président. - Que les CDPENAF poussent ou non au crime, les communes gardent la main. Ce sont, elles, qui décident en définitive.
M. Didier Guillaume, sénateur, rapporteur pour le Sénat. - Gérard César, aucun décret n'est prévu concernant ces dispositions. Jacques Lamblin a raison sur les CDPENAF, ce n'est pas les diaboliser pour autant. Faisons confiance aux élus locaux.
M. Germinal Peiro, député, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - Le second alinéa de la proposition de rédaction n° 8, sur les extensions d'habitation, est d'application immédiate, et ne nécessite pas de décret, et ne nécessite pas de décret.
Mme Annie Genevard, députée. - Le règlement du PLU fixera un principe général que nous déclinerons selon les cas particuliers, est-ce bien cela ? L'identification portera sur les zones...
M. Didier Guillaume, sénateur, rapporteur pour le Sénat. - ...et les catégories de bâtiment. Évidemment, on ne va pas à identifier chaque bâtiment pouvant faire l'objet d'un changement de destination dans le PLU.
La proposition de rédaction n° 8 est adoptée.
La proposition de rédaction n° 9 rectifiée, de coordination, est adoptée.
L'article 12 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.
Article 12 bis C
Densification des hameaux
existants en zone littoral
M. Germinal Peiro, député, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - La proposition de rédaction n° 10 supprime cet article. Ne touchons pas à la loi Littoral au détour d'une loi sur l'agriculture. Que ceux qui ne sont pas convaincus viennent sur la Côte d'Azur... Vous y verrez une bordure maritime urbanisée en dépit du bon sens, faute de loi.
M. Antoine Herth, député. - La rédaction du Sénat me convenait mieux.
M. Joël Labbé, sénateur. - Les écologistes ne veulent pas ouvrir une brèche dans la loi Littoral.
M. Gilles Lurton, député. - Pour être un élu du littoral, je sais que l'article 12 bis C, issu des travaux du Sénat, répondait à une véritable préoccupation : nous devons combler les dents creuses de nos hameaux.
M. Jean-Jacques Lasserre, sénateur. - Ma connaissance du littoral landais et basque m'incite à rester sur la position du Sénat. Laissons respirer les habitants de ces zones, ce n'est pas ouvrir une brèche dans la zone littoral.
La proposition de rédaction n° 10 est adoptée ; en conséquence, l'article 12 bis C est supprimé.
L'article 12 bis D est adopté dans la rédaction du Sénat.
L'article 12 ter est adopté dans la rédaction du Sénat.
Article 13
Amélioration de
l'efficacité de l'intervention des SAFER
M. Didier Guillaume, sénateur, rapporteur pour le Sénat. - La proposition de rédaction n° 11 est de compromis entre nos deux assemblées concernant le taux de pénalité applicable en cas de défaut d'information des SAFER par les vendeurs. La pénalité est exprimée en pourcentage de la vente. Le taux est fixé à 2 %.
M. Daniel Raoul, sénateur, président. - C'est un compromis arithmétique...
M. Dominique Potier, député. - ... auquel je ne me rallie qu'à contrecoeur. Nous étions à 2,5 %.
La proposition de rédaction n° 11 est adoptée.
L'article 13 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.
L'article 15 est adopté dans la rédaction du Sénat.
Article 16 bis A
Création d'un
répertoire des actifs agricoles
M. Germinal Peiro, député, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - La proposition de rédaction n° 12 effectue une coordination au sein du code rural et de la pêche maritime.
La proposition de rédaction n° 12 est adoptée.
L'article 16 bis A est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.
L'article 16 bis B est adopté dans la rédaction du Sénat.
Article 16 bis
Rapport sur l'opportunité
d'affilier au régime social agricole les activités d'accueil
social ayant pour support l'exploitation
M. François Brottes, député, vice-président. - Le Sénat a pour les demandes de rapports au Parlement une aversion de principe. Certains sont pourtant utiles. Des exploitations agricoles accueillent des jeunes et des moins jeunes en situation de handicap des autistes. Seul le Gouvernement, parce que le sujet est interministériel, peut engager une réflexion pour stabiliser le régime de sécurité sociale dont relèvent les personnels des exploitations concernées. D'où la proposition de rédaction n° 13 qui rétablit l'article.
M. Antoine Herth, député. - Certaines fermes pédagogiques n'ont de ferme que le nom, vérifions que la pédagogie s'appuie bien sur des activités agricoles.
M. Joël Labbé, sénateur. - En séance, j'avais voté contre la suppression de cet article. Le sujet est réel, un rapport sur l'accueil social véritable se justifie tout à fait.
M. Thierry Benoît, député. - Je soutiens cette proposition de rédaction, au nom du groupe UDI de l'Assemblée nationale. La diversification des activités ayant pour support l'agriculture et les territoires ruraux se développer à l'avenir.
Mme Renée Nicoux, sénatrice. - Quoique nous soyons farouchement opposés aux rapports au Parlement, celui-ci nous renseignerait utilement sur la diversification des activités de certains agriculteurs, au titre de laquelle Accueil paysan réclame l'affiliation à la Mutualité sociale agricole (MSA).
La proposition de rédaction n° 13 est adoptée.
L'article 16 bis est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.
L'article 17 est adopté dans la rédaction issue du Sénat.
Article 18
Extension des mesures de police
sanitaire aux animaux de la faune sauvage
M. Didier Guillaume, sénateur, rapporteur pour le Sénat. - La proposition de rédaction n° 14 revient au texte de l'Assemblée nationale, celui-ci ayant été modifié en séance au Sénat contre l'avis de la commission des affaires économiques. Nous avions trouvé un équilibre concernant les nouvelles responsabilités des chasseurs en matière sanitaire lors de la première lecture et de la deuxième lecture de l'Assemblée nationale. Revenons-y.
M. Germinal Peiro, député, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - Je suis du même avis.
Mme Renée Nicoux, sénatrice. - En réclamant une modification de cet article en séance, je visais les propriétaires qui ne veulent pas que leur surface soit incluse dans les associations communales de chasse agrées (Acca). À la relecture, je comprends que cet amendement était inapproprié et je m'en remets à votre proposition de rédaction.
La proposition de rédaction n° 14 est adoptée.
L'article 18 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.
Article 18 bis
Protection des
éleveurs en cas d'attaques de loups
M. Didier Guillaume, sénateur, rapporteur pour le Sénat. - Si certains sujets font l'objet de débats plus abondants que d'autres, la palme revient à cet article introduit par le Sénat en première lecture. Nous avons trouvé un compromis. Chacun défend la biodiversité et reconnaît que la réintroduction du loup dans les Alpes et ailleurs a été bien faite ; il n'y a plus de problème de sous-population de cet animal. Les attaques de loups, qui se comptent par centaines, rendent l'élevage et le pastoralisme de plus en plus difficile à exercer. Résultat : les alpages d'altitude sont désertés, rendus aux forêts et aux friches, ce qui pose un problème à la fois économique et environnemental. Nous proposons d'adopter cet article en y effectuant une légère modification, afin de remplacer les mots « à l'éleveur concerné » par les mots « à chaque éleveur concerné ». Tel est l'objet de la proposition de rédaction n°15.
M. François Brottes, député, vice-président. - Cette précision est-elle indispensable ? L'inconvénient de cet article est qu'il ne renvoie qu'aux éleveurs. Or ce sont des bergers, non l'éleveur en personne, qui gardent les troupeaux.
M. Germinal Peiro, député, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - Il y a quelques années, parler du loup relevait du folklore, évoquer les dégâts qu'il cause faisait sourire. À présent, il s'agit d'une réalité - je l'ai constaté récemment dans les Alpes de Haute-Provence, mais le loup est aussi désormais dans la Marne ! - dont les éleveurs souffrent, et qui doit donc être encadrée par le législateur, faute de quoi des actes individuels illégaux finiront par survenir. Nous devons avant tout redonner confiance aux éleveurs en leur montrant que la représentation nationale ne prend pas leurs problèmes à la légère.
M. Jacques Lamblin, député. - Une espèce prédatrice se trouve actuellement sans prédateur et dispose d'une abondance de nourriture. Inexorablement, elle va se développer - la situation est comparable à celle du cormoran. Il se pourrait bien que dans une décennie la fable du petit chaperon rouge ne relève plus du mythe ! Nous devons donc réguler cette population, c'est une question de bon sens.
M. Joël Labbé, sénateur. - J'avais déposé, en deuxième lecture, un amendement de compromis, incluant des mesures dissuasives. L'automaticité de l'autorisation de tir dans votre rédaction, me gêne. Le problème vient en partie de l'évolution du pastoralisme : c'est aussi le manque de présence humaine, voire équine ou asine, qui enhardit les loups. Conditionner la mise en oeuvre de ces dispositions à l'épuisement des mesures de protection était un enrichissement de la loi. Nous étions prêts à ce compromis...
Mme Frédérique Massat, députée. - Cette problématique, déjà ancienne, est enfin prise en compte par le Gouvernement, qu'il en soit remercié. De même sur l'ours, la ministre du développement durable et de l'énergie a tenu des propos très forts. Dans tous les massifs, le loup arrive aux portes des villages. Des mesures dissuasives auraient satisfait tout le monde, car le maintien du pastoralisme en montagne est une préoccupation générale. Le nombre de tirs de prélèvement autorisés a augmenté... Nous devons prendre en compte ce problème, c'est ce que fait le présent texte et je m'en félicite.
Mme Brigitte Allain, députée. - Les loups vivent en meute. Autoriser l'autodéfense, même organisée, peut être très dangereux : si l'on tire sur un loup, c'est la meute qui revient le lendemain. Ce n'est pas la bonne méthode contre cet animal.
M. Gérard Le Cam, sénateur. - Je me réjouis de ces évolutions du texte, mais ces mesures sont d'ordre réglementaire. Je souligne également que la plupart des bergers ou des éleveurs n'ont pas le permis de chasser et ne peuvent donc porter une arme. Devront-ils déléguer la possibilité de tir à la société locale de chasse ? Quelles armes, quelles munitions faudra-t-il utiliser ? Le loup attaque la nuit... Il faudrait préciser ces points.
Mme Annie Genevard, députée. - Je suis heureuse que ce problème soit enfin pris en compte. Le loup n'étant plus une espèce menacée, une révision de la convention de Berne et de la directive « Habitats » s'impose.
M. Daniel Raoul, sénateur, président. - Cette dernière recommandation a été longuement évoquée en présence du ministre...
M. Didier Guillaume, sénateur, rapporteur pour le Sénat. - Nous sommes tous - y compris Joël Labbé - à peu près du même avis. Les dispositifs de légitime défense, pris pour sécuriser les éleveurs, ne doivent pas être confondus avec les prélèvements autorisés par la ministre de l'Écologie - qui, soit dit en passant, a pris la mesure du problème. Appelons un chat un chat : il n'y a plus de problème de sous-population chez les loups. Le précédent gouvernement s'était dérobé, nous verrons si celui-ci aura l'audace d'ouvrir le chantier de la réécriture de la directive « Habitats » et de la renégociation de la convention de Berne. C'est la seule solution ! Les mesures dont nous parlons ici concernent la légitime défense et ont pour objectif - important - de sécuriser les éleveurs, mais elles ne suffisent pas. Aller plus loin prendra des années, car nous devrons construire une majorité en Europe, qui n'existe pas aujourd'hui. Mais c'est indispensable : il y va de la pérennité de l'élevage en montagne. Inclure dans la mesure le personnel employé par l'éleveur risquerait d'aboutir à ce qu'on voit en Italie, des sociétés de gardiennage... Le terme « éleveur » correspond à celui qui garde les bêtes.
M. François Brottes, député, vice-président. - Je vous propose de remplacer le mot « éleveur » par le mot « élevage ». Les éleveurs travaillent souvent à plusieurs centaines de kilomètres de leur troupeau, dont ils confient la garde à un berger... Veillons à ce que notre texte soit applicable.
M. Jean-Michel Clément, député. - Quelle rédaction retenir ? Nous devons nous assurer de la portée du texte. Or, que signifie, d'un point de vue juridique, « l'éleveur » ? Pourquoi ne pas écrire « le gardien du troupeau » ?
M. Germinal Peiro, député, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - Vos deux rapporteurs vous proposent de retenir la rédaction suivante : « à chaque éleveur ou berger concerné ».
La proposition de rédaction n° 15 rectifiée est adoptée.
L'article 18 bis est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.
Article 19 bis
Participation des
laboratoires départementaux à la politique publique de
sécurité sanitaire
M. Didier Guillaume, sénateur, rapporteur pour le Sénat. - La proposition de rédaction n° 16 rectifiée concerne les laboratoires départementaux d'analyse, dont le rôle dans l'économie et l'aménagement des territoires ne saurait être sous-estimé : ils exercent une véritable mission de service public, nous devons l'inscrire dans la loi. Les laboratoires privés leur font une concurrence féroce, qui en conduit certains à fermer ou à licencier. Nous ne pouvons pas laisser faire cela. J'aurais aimé en faire des services d'intérêt économique général (SIEG) mais cela semble impossible juridiquement. Nous proposons donc d'écrire que « les conditions d'exécution des missions de service public dont ils sont chargés » - je rectifie la proposition pour y introduire cette mention - soient précisées par voie réglementaire.
M. Antoine Herth, député. - Les propos tenus à l'Assemblée nationale laissaient penser que le ministre souhaitait que les laboratoires publics acquièrent une dimension régionale, mais nous ne pouvons pas préempter le résultat du débat sur la réforme territoriale. Prévoir dans un acte réglementaire le périmètre des missions constitue une bonne solution.
M. Joël Labbé, sénateur. - Ayant travaillé trente ans dans un laboratoire public, je ne peux que défendre leur maintien. Ils sont performants, bien équipés, conduisent des recherches dans la neutralité et la transparence. On a vu à quoi s'en tenir lors de l'épisode de la vache folle.
M. Jean-Jacques Lasserre, sénateur. - Je suis d'accord, mais les situations sont diverses, les périmètres variables selon les régions. Certains laboratoires sont des sociétés d'économie mixte (SEM), d'autres non. L'intention est belle et j'y souscris, mais si l'on s'en remet au décret, il faudra qu'il définisse le périmètre - et les engagements financiers, contrepartie de la mission de service public.
M. Germinal Peiro, député, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - Il s'agit d'une compétence des conseils généraux. Cela plaide pour le maintien de ces derniers en zone rurale.
La proposition de rédaction n° 16 rectifiée est adoptée.
L'article 19 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.
Article 20
Dispositif anti-cadeaux et
encadrement de la délivrance des médicaments
vétérinaires
La proposition de rédaction de coordination n° 17 est adoptée.
L'article 20 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.
Article 21
Règlementation de la
publicité des produits phytopharmaceutiques et création d'un
dispositif de phytopharmacovigilance
La proposition de rédaction de coordination n° 18 est adoptée.
L'article 21 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.
Article 23
Mesures de précaution
restreignant l'utilisation de produits phytopharmaceutiques,
réglementation de l'activité de conseil et mise en place d'un
suivi de la distribution des produits phytopharmaceutiques
M. Gérard César, sénateur. - L'article 23 concerne la protection des riverains et du monde agricole face aux produits phytosanitaires. Les agriculteurs et les viticulteurs sont déjà impliqués dans une démarche de protection lorsqu'ils utilisent des produits phytosanitaires - je ne parle pas de pesticides, car le mot fait peur. Ils se sont engagés à améliorer les pratiques pour parvenir à une agriculture raisonnée. Un accident s'est produit en Gironde : il s'agissait d'une erreur. Elle ne remet pas en cause la volonté des viticulteurs. On ne traite pas à proximité des écoles, des maisons de retraite, des hôpitaux. Si nous votons l'article 23 dans la rédaction actuelle, le risque de contentieux sera élevé. La proposition de rédaction n° 19 supprime les mots « en particulier lorsque la zone à traiter est située à proximité d'un bâtiment d'habitation ». Et je remercie le président Daniel Raoul de présenter la même proposition.
M. Daniel Raoul, sénateur, président. - Le droit actuel permet déjà d'encadrer les conditions d'utilisation des produits phytosanitaires.
M. Germinal Peiro, député, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - L'époque des pesticides dangereux pour la santé est derrière nous. Les choses ont évolué. Tous les produits phytosanitaires ne sont pas à proscrire, du reste les préparations naturelles peu préoccupantes (PNPP) en font partie.
Je suis persuadé que nous verrons dans l'avenir la disparition des pesticides dangereux. La loi issue du Grenelle de l'environnement prévoit de réduire de moitié l'utilisation des produits phytosanitaires d'ici à 2018. Les professionnels ont pris des engagements importants de réduction. L'agro-écologie est au centre de ce projet de loi, qui poursuit l'objectif de produire mieux, tant pour la compétitivité que pour la santé des agriculteurs, des consommateurs et pour l'environnement. La loi introduit des mesures pour mieux contrôler l'usage des produits phytosanitaires : l'obligation du conseil, l'interdiction de la publicité, l'encouragement au développement des organismes de biocontrôle. La question des PNPP, solution alternative aux pesticides, a été réglée.
S'agissant de la protection des maisons d'habitation, je ne voterais pas la proposition de rédaction n° 19 si le droit actuel ne la satisfaisait pas déjà. L'article 2 de l'arrêté du 12 septembre 2006 dispose que « Quelle que soit l'évolution des conditions météorologiques durant l'utilisation des produits, des moyens appropriés doivent être mis en oeuvre pour éviter leur entraînement hors de la parcelle ou de la zone traitée ». Ce serait un mauvais signal envoyé à la population que de dire que le Parlement n'a pas pris en compte la protection des habitations.
M. Antoine Herth, député. - La loi ne doit pas être bavarde, elle doit être simple pour être comprise. La proposition de rédaction clarifie et simplifie la rédaction ; et elle éteint une polémique inutile, dangereuse. Nous allons vers un mieux disant environnemental, une marche en avant est enclenchée. La stratégie de la rupture serait contre-productive. Restons dans cette dynamique de progrès marquée par des avancées en matière de recherche, par la mise en oeuvre de nouvelles techniques, et par une prise de conscience environnementale. Je me félicite de la rédaction adoptée par le Sénat aux alinéas suivants.
M. Jacques Lamblin, député. - Je voterai moi aussi cette proposition de rédaction. Non seulement la rédaction du Sénat à cet alinéa n'apporte rien au droit actuel, mais elle crée des problèmes. La notion de « proximité » est élastique et source de conflits. N'ouvrons pas la boîte de Pandore !
Mme Annie Genevard, députée. - Je suis favorable à cette proposition de rédaction. Le texte du Sénat entre en contradiction avec des mesures qui, dans ce projet de loi même, aboutissent à accroître la proximité des zones agricoles et des zones bâties : changement de destination des bâtiments agricoles pour créer des habitations, encouragement à l'agriculture péri-urbaine. De plus cette rédaction stigmatise l'agriculteur comme pollueur, idée qui déjà monte dans l'opinion publique. Or on attend beaucoup des agriculteurs.
Mme Bernadette Bourzai, sénatrice. - Je souhaite que la rédaction du Sénat, que j'appelais de mes voeux, soit maintenue, malgré l'arrêté de 2006. La mission d'information du Sénat sur les pesticides, dont le rapport fait désormais référence, a bien montré les dangers de la diffusion lors des épandages. La notion de pesticides fait peur, Gérard César ? Mais la peur n'évite pas le danger. Voyez l'incident survenu dans le vignoble bordelais, il n'avait rien d'anodin...
M. Gérard César, sénateur. - C'était du bio, de surcroît !
Mme Bernadette Bourzai, sénatrice. - A plus forte raison : même des produits censés ne pas être dangereux peuvent l'être ! Dans la pommeraie limousine, il y a des conflits car des habitations sont directement touchées. Le préfet ne parvient pas à faire appliquer le code de bonne pratique pourtant négocié entre les agriculteurs et les riverains car ce code n'est pas assez précis. C'est pourquoi il est nécessaire d'indiquer qu'au-delà des établissements qui accueillent des personnes vulnérables, chaque être humain est vulnérable.
Mme Renée Nicoux, sénatrice. - Je partage l'avis de Bernadette Bourzai. Il y a des problèmes dans le Limousin...
M. Gérard César, sénateur. - Ce texte vaut pour toute la France.
Mme Renée Nicoux, sénatrice. - Il y en a aussi dans le vignoble bordelais ! Quand on traite le vignoble, les riverains en pâtissent...
M. Gérard César. - Que faire ?
Mme Renée Nicoux. - Prendre des précautions. Les vignerons sont du reste les premières victimes des produits phytosanitaires.
M. Gérard César. - Je n'en connais pas qui le soient.
Mme Renée Nicoux. - J'en connais, moi, en Champagne notamment. La rédaction du Sénat est de bon sens. Il faut, non pas interdire, mais exiger des précautions lors des épandages à proximité des habitations.
M. Dominique Potier, député. - Si l'on évoque les habitations, il faudrait aussi évoquer les cultures voisines, les ruisseaux, les nappes phréatiques, etc. Inutile de se lancer dans un inventaire à la Prévert. Tout l'écosystème est concerné. Tout est dans l'arrêté du 12 septembre 2006. Appliquons-le. Le gouvernement m'a confié le soin de rédiger une nouvelle version du plan Ecophyto qui établira une distinction entre les bonnes et les mauvaises pratiques en matière d'utilisation des produits phytosanitaires. N'agitons pas de chiffons rouges à ce stade et continuons notre combat en faveur de l'agro-écologie.
Mme Brigitte Allain, députée. - L'ère des pesticides n'est pas derrière nous comme semble le croire Germinal Peiro. Je salue les avancées obtenues grâce aux rapporteurs, notamment sur les préparations naturelles peu préoccupantes. Les produits phytosanitaires sont dangereux pour l'environnement et la santé. Il faut que les textes imposent aux agriculteurs d'être encore plus attentifs à proximité des habitations. Monsieur César, bien sûr que l'on traite à côté des écoles ou des hôpitaux ! Il faut faire respecter la loi.
Le Sénat a adopté une rédaction très en retrait de celle du Gouvernement également, en remplaçant l'expression « dispositifs anti-dérive » par « équipements pour le traitement » : tous les agriculteurs sont équipés ! Cela ne veut rien dire ! Le texte du gouvernement était clair et visait des dispositifs contre la pollution de l'air. Je regrette l'absence de proposition de rédaction sur ce point.
Mme Pascale Got, députée. - Rien ne sert de débattre pour se faire peur. Le droit en vigueur est clair. Sachons raison garder. En Gironde, nous avons réuni tous les professionnels. Les viticulteurs sont des gens responsables, non des tueurs. Des accidents se sont produits mais ce sont des cas isolés, la prise de conscience est générale.
M. Joël Labbé, sénateur. - Je suis d'accord avec Brigitte Allain, l'expression « équipements pour le traitement » est floue. Le texte vise à protéger les personnes vulnérables en établissement. Mais on cherche de plus en plus à favoriser leur maintien à domicile : il faut bien protéger les habitations ! L'agriculture péri-urbaine sera un facteur d'accélération des évolutions. Il faut l'encourager.
M. Thierry Benoit, député. - On a beaucoup affolé les citoyens avec cet accident dû à une erreur. Il est arrivé au mauvais moment. Le texte n'en parvient pas moins à un bon équilibre. La proposition de rédaction est raisonnable.
Les propositions identiques de rédaction n° 19 et 30 sont adoptées.
L'article 23 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.
L'article 24 est adopté dans la rédaction du Sénat.
Article 26
Modernisation de l'enseignement et de
la formation professionnelle agricoles
M. Germinal Peiro, député, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - La proposition de rédaction n° 20 rectifiée revient, par souci de simplicité, à la rédaction de l'Assemblée nationale.
La proposition de rédaction de coordination n° 20 rectifiée est adoptée.
L'article 26 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.
Article 26 bis A
Rapport au Parlement
sur l'harmonisation du statut du personnel de l'enseignement agricole avec
celui des autres corps de l'enseignement
M. Germinal Peiro, député, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - La proposition de rédaction n° 21 revient au texte de l'Assemblée nationale. Je connais la vigilance de votre commission sur les demandes de rapports. Sachez que nous en avons supprimé en très grand nombre ! Certains, cependant, sont utiles.
M. Daniel Raoul, sénateur, président. - J'en conviens.
Mme Annie Genevard, députée. - Pour avoir suivi les débats relatifs à l'Éducation nationale, j'ai vu combien elle aurait à apprendre de l'enseignement agricole, innovant et efficace. Un rapprochement dans ce sens serait souhaitable.
M. Daniel Raoul, sénateur, président. - Vous devriez être satisfaite par cette proposition de rédaction.
Mme Annie Genevard, députée. - Je n'en suis pas si sûre.
La proposition de rédaction n° 21 est adoptée.
L'article 26 bis A est adopté dans la rédaction issue des travaux de la Commission mixte paritaire.
Article 26 ter
Protocole de gouvernance
des établissements d'enseignement agricole
M. Didier Guillaume, sénateur, rapporteur pour le Sénat. - Je vais essayer de convaincre notre collègue Jean-Jacques Lasserre, peut-être avec l'aide de Thierry Benoît, de voter notre proposition de rédaction n° 22. Les dispositions de l'article 26 ter, sur lesquelles l'avis de la commission n'a pas été suivi en séance, compliquent inutilement la gestion des établissements d'enseignement agricole en les obligeant à négocier des protocoles de gouvernance avec le conseil régional et le représentant de l'État, ainsi que des conventions d'objectifs et de moyens pour les fermes pédagogiques et des chartes de partenariat avec la profession. Quel bazar ! Ils peuvent d'ores et déjà conclure de tels accords mais ne les y obligeons pas, ne les enfermons pas dans un carcan, ne compliquons pas tout. L'enseignement agricole est formidable, c'est un joyau. Voilà pourquoi Germinal Peiro et moi-même souhaitons supprimer cet article.
M. Jean-Jacques Lasserre, sénateur. - Je ne voterai pas votre proposition, même si je comprends vos arguments. Compléter n'est pas compliquer. Je m'en remets à la sagesse de cette commission mixte paritaire.
M. Thierry Benoît, député. - Je suis ravi de l'entendre. Issu de cet enseignement et en particulier des maisons familiales rurales, je suis partisan de laisser respirer le système, notamment sur le terrain de l'éducation.
La proposition de rédaction n° 22 est adoptée.
L'article 26 ter est en conséquence supprimé.
Article 27
Modernisation de l'enseignement
supérieur agricole et vétérinaire et création de
l'Institut agronomique, vétérinaire et forestier de
France
La proposition de rédaction n° 23 de coordination est adoptée.
L'article 27 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.
Article 29
Adaptation des missions et de la
gouvernance de la politique forestière.
Encadrement de la
conservation des ressources génétiques forestières.
Création d'un fonds stratégique de la forêt et du
bois
M. François Brottes, député, vice-président. - M. le président du conseil général de la Drôme, Didier Guillaume connaît bien le massif du Vercors, que nous partageons, mais peut-être pas aussi bien que moi la Chartreuse et le massif de Belledonne, avec leurs routes de montagnes trop sollicitées par les transports de grumes, et qui doivent régulièrement être fermées pour réfection. La collecte de bois est alors compromise.
Notre forêt est sous-exploitée. Avec la proposition de rédaction n° 24, le conseil général déterminera chaque année des itinéraires dédiés à travers un schéma annuel d'accès à la ressource forestière, ouvrant la voie à une meilleure maintenance des routes. C'est du bon sens.
M. Didier Guillaume, sénateur, rapporteur pour le Sénat. - Je souhaiterais modifier cette proposition de rédaction, pour laisser la latitude aux conseils généraux de rédiger un tel schéma non pas chaque année, mais de manière pluriannuelle. Nous avons le même massif, les mêmes camions, les mêmes grumiers mais pas, semble-t-il, les mêmes problématiques. Il ne faut pas forcément changer tous les ans les itinéraires de desserte.
M. Daniel Raoul, sénateur, président. - Vous proposez donc de retirer de la proposition de rédaction les mots « chaque année » ?
Mme Bernadette Bourzai, sénatrice. - François Brottes pose une vraie question. Nous le savons tous : le tonnage des camions n'est pas respecté, ce qui a un effet catastrophique sur les routes. Pour autant, un schéma départemental chaque année n'est pas possible ; la pluriannualité est préférable. J'en parle d'autant plus facilement que cela se pratique en Haute-Corrèze : le sous-préfet a été chargé de négocier des itinéraires avec les professionnels et les collectivités. Encore faut-il se donner les moyens d'appliquer ensuite le schéma !
M. Daniel Raoul, sénateur, président. - Vous soutenez donc la proposition du rapporteur Didier Guillaume, celle d'un schéma pluriannuel.
M. Philippe Leroy, sénateur, rapporteur pour le Sénat sur le titre V. - J'avais demandé au Sénat de supprimer cette disposition, satisfaite par le projet de loi, puisque des schémas de desserte seront prévus par les programmes régionaux de la forêt et du bois (PRFB). La proposition de rédaction complique les choses. Président de conseil général durant vingt ans, je n'aurais pas aimé que l'on m'impose un tel schéma. Celui-ci comportera-t-il une obligation de résultat ? Faudra-t-il garantir l'ouverture de toutes les voies au passage des grumiers ? Ces difficultés ne sont pas seulement liées à la montagne : il peut y avoir des sols fragiles dans les plaines.
Soyons conscients des enjeux : dans quelques années, ni les communes ni les départements ne pourront plus réparer toutes leurs voiries, à tel point qu'il faudra réexaminer la densité des réseaux. En Allemagne et ailleurs, ce ne sont pas des routes forestières qui desservent tous les massifs, mais des pistes, et les solutions de débardage sont adaptées à la nature des sols. N'imposons pas de contrainte aux collectivités, qui ne pourront pas donner accès à toutes les parcelles.
M. Jacques Lamblin, député. - Nous pourrions ajouter que le conseil général agit « quand il le juge nécessaire ».
M. François Brottes, député, vice-président. - Alors autant ne pas voter l'amendement ! L'obligation de desservir chaque parcelle ne figure pas dans ma proposition. Il n'y a nulle contrainte : la collectivité, de sa propre initiative - pas suite à celle des grumiers - dira à ces derniers : cette année, vous passez ici l'année prochaine, là. Elle peut reconduire le schéma d'une année sur l'autre si aucun changement n'est nécessaire. Mais nous devons retrouver des chemins d'accès, parce qu'en dépit des hivers rigoureux, l'entretien des routes n'a pas été anticipé. L'actualisation annuelle, même à la marge, est ce qui rend ma proposition intéressante. Donnons un meilleur accès aux exploitants des forêts, aujourd'hui entravés !
M. Germinal Peiro, député, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - Je partage tout à fait la position du président Brottes.
La proposition de rédaction n° 24 est adoptée.
L'article 29 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.
Article 30
Favoriser la constitution de
groupements d'intérêt économique et environnemental
forestier. Compenser les défrichements.
M. Jean-Yves Caullet, député. - La proposition de rédaction n° 25 restreint à trois ans le délai dont disposent les propriétaires forestiers pour procéder à leurs coupes sans avoir à présenter de justification. C'est une façon de les inciter à mobiliser la ressource. Un plan simple de gestion est prévu pour dix ans : un délai d'ajustement de cinq ans est trop long.
M. Philippe Leroy, sénateur, rapporteur pour le Sénat. - Cette question ne mérite pas un long débat. Les communes forestières, disposent d'un délai de cinq ans, qui se justifie de l'avis de tous les techniciens. Pourquoi le réduire à trois ans pour les forêts privées ? Les difficultés sont les mêmes dans les deux cas. Mieux vaudrait accroître la durée du plan simple de gestion, ce qui relève du domaine réglementaire.
M. Jean-Yves Caullet, député. - Ce qui justifie des délais différents ? Les forêts publiques couvrent 25 % du territoire ; elles fournissent pourtant 40 % de la ressource en bois. Il est bien difficile de mobiliser les propriétaires privés. Si trois ans ne vous agréent pas, je propose quatre ans comme modus vivendi.
M. Daniel Raoul, sénateur, président. - Ce sera la proposition de rédaction n° 25 rectifiée.
M. Philippe Leroy, sénateur, rapporteur pour le Sénat. - Plus on met de contraintes dans la loi, plus on aura d'ennuis. Mais enfin, j'accepte de transiger à quatre ans.
La proposition de rédaction n° 25 rectifiée est adoptée.
La commission mixte paritaire adopte l'article 30 dans la rédaction issue de ses travaux.
L'article 30 bis est adopté dans la rédaction du Sénat.
Article 34
Pilotage de la politique agricole et
agro-alimentaire outre-mer
La proposition de rédaction n° 26 est retirée.
L'article 34 est adopté dans la rédaction du Sénat.
Article 36
Adaptation aux outre-mer des
dispositions des titres Ier à IV du projet de loi d'avenir et
homologation de peines
La proposition de rédaction n° 27 de coordination est adoptée.
La commission mixte paritaire adopte l'article 36 dans la rédaction issue de ses travaux.
L'article 38 est adopté dans la rédaction du Sénat.
Article 39
Dispositions
transitoires
La proposition de rédaction n° 28 de coordination est adoptée.
M. Jean-Yves Caullet, député. - La proposition de rédaction n° 29 est le résultat d'une longue évolution. Initialement, le Gouvernement souhaitait supprimer purement et simplement le code des bonnes pratiques sylvicoles (CBPS), l'estimant insuffisant pour caractériser une gestion durable. Au fil des lectures, nous l'avons complété par un programme de coupes et de travaux, tout en prévoyant l'extinction à terme de ce régime, initialement en 2020, puis, au Sénat, en 2024. Cette date me semble un peu éloignée. Revenons à 2020.
M. Philippe Leroy, sénateur, rapporteur pour le Sénat. - La forêt privée est mal entretenue ; il n'empêche, nous ne pouvons pas obliger les propriétaires forestiers à gérer leurs biens. Trois millions de personnes se partagent trois millions d'hectares, beaucoup ne sont plus sur place et ignorent même où se trouvent leurs parcelles. La seule solution est de s'armer de patience et de chercher à les convaincre par la douceur.
Messieurs les députés, vous avez fait du bon travail avec le code des bonnes pratiques sylvicoles.
M. François Brottes, député, président. - Merci de nous rendre hommage !
M. Philippe Leroy, sénateur, rapporteur pour le Sénat. - Ne le saccagez pas en accordant seulement dix ans de mise en pratique. Laissez du temps au temps.
M. François Brottes, député, président. - Le CDPS, dont je suis le père, date de 2001. Nous sommes en 2014. Nous n'allons pas attendre un siècle...
M. Philippe Leroy, sénateur, rapporteur pour le Sénat. - L'argument ne tient pas : les propriétaires peuvent ne rien faire, la loi ne les contraint pas. On pourrait imaginer des mesures fiscales attachées au respect du code des bonnes pratiques.
M. François Brottes, député, président. - Elles existent !
M. Jean-Yves Caullet, député. - Coupons la poire en deux entre 2020 et 2024 !
M. Daniel Raoul, sénateur, président. - Si je comprends bien, vous proposez 2022. Ce serait la proposition n° 29 rectifiée.
M. Joël Labbé, sénateur. - La promotion du code des bonnes pratiques sylvicoles, ces cinq dernières années, a coûté 150 millions d'euros par an. Je souhaite le maintien à 2020.
M. Daniel Raoul, sénateur, président. - Je vous propose de retenir le 1er janvier 2022.
La proposition de rédaction n° 29 ainsi rectifiée est adoptée.
L'article 39 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.
*
* *
M. Antoine Herth, député. - Ce projet de loi est intéressant mais il témoigne d'un manque de coordination au sein du Gouvernement : d'autres lois contiennent des dispositions concurrentes ! Y manquent, également, des mesures encourageant les agriculteurs à se faire entrepreneurs. Nous voterons donc contre.
La commission mixte paritaire adopte, ainsi rédigées, les dispositions restant en discussion du projet de loi d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt.
La réunion est levée à 12 h 35.