Mercredi 29 janvier 2014
- Présidence de Mme Catherine Troendlé, présidente -Audition de responsables d'associations d'éducation populaire
La mission procède d'abord à l'audition de M. Éric Favey, Secrétaire général adjoint et M. Arnaud Tiercelin, responsable Éducation de la Ligue de l'enseignement, M. Jean-Luc Cazaillon, Président, et Mme Marie-Claude Cortial du Collectif des associations pour l'école (CAPE), M. Jean-Michel Sautreau, Président de L'Union sportive de l'enseignement du premier degré (USEP), Mme Véronique Moreira, Inspectrice de l'Éducation nationale, vice-Présidente de l'USEP, Mme Mary-Laure Davy, Vice-Présidente et Mme Anne Carayon, Secrétaire Générale de Jeunesse au plein air (JPA).
Mme Catherine Troendlé, présidente. - Nous poursuivons nos auditions dans le cadre d'une table ronde avec plusieurs responsables d'associations d'éducation populaire. Nous recevons ainsi M. Éric Favey, Secrétaire général adjoint et M. Arnaud Tiercelin, responsable Éducation de la Ligue de l'enseignement, M. Jean-Luc Cazaillon, Président, et Mme Marie-Claude Cortial du Collectif des associations pour l'école (CAPE), M. Jean-Michel Sautreau, Président de L'Union sportive de l'enseignement du premier degré (USEP), Mme Véronique Moreira, Inspectrice de l'Éducation nationale, vice-Présidente de l'USEP, Mme Mary-Laure Davy, Vice-Présidente et Mme Anne Carayon, Secrétaire Générale de Jeunesse au plein air (JPA).
Mme Marie-Claude Cortial, Collectif des associations pour l'école. - Le CAPE, qui regroupe une vingtaine d'associations et d'acteurs du monde pédagogique, a été associé dès 2010 à la consultation sur les rythmes scolaires et le temps éducatif et a ainsi posé les jalons d'une réflexion qui se retrouve dans la loi Peillon. Le CAPE soutient ainsi cette loi qui vise à transformer en profondeur le système éducatif national pour répondre aux enjeux du XXIème siècle.
S'agissant des rythmes éducatifs, nous jugeons essentiel de maintenir un cadre national, ce qu'a fait le décret de 2013. Par ailleurs, il importe de prendre en considération les temps d'apprentissage et d'éducation qui se déroulent en dehors de l'école pour définir un cadre cohérent favorable à la croissance de l'enfant. Il faut, à cet égard, rappeler que les parents sont les premiers éducateurs et reconnaître une diversité des temps d'éducation et d'apprentissage qui participent à une éducation partagée.
En tant que membre du comité de suivi des rythmes scolaires, le CAPE suit ainsi l'application du décret de février 2013 sur le terrain. Cette réforme a pour objectif de transformer le système éducatif, obéissant en cela à des objectifs politiques qui visent une meilleure réussite des élèves, aussi bien dans les apprentissages que dans leur construction personnelle. Elle entend également lutter contre les inégalités en garantissant l'accès des enfants à des savoirs larges et épanouissants. Un tel projet global implique d'être évalué dans la durée.
Cette réforme s'apparente, pour le CAPE, à une révolution copernicienne dont la communauté éducative sur un territoire donné est l'un des rouages essentiels. Pour preuve, la réflexion commune débutée au printemps 2013 associant aux collectivités territoriales qui ont opté pour l'application de la réforme des rythmes scolaires dès cette année, les enseignants et les animateurs. La démarche d'organiser les temps d'activité périéducative (TAP) de manière distincte selon les territoires s'est d'ailleurs avérée un succès en raison du dialogue des acteurs mobilisés.
Le CAPE a constaté la capillarité entre les différents temps éducatifs et péri-éducatifs qui va entraîner une transformation des pratiques pédagogiques et une complémentarité des approches éducatives. Le socle commun revisité fournit d'ailleurs l'une des bases de la réflexion commune autour des rythmes scolaires.
En particulier, il conviendra de réfléchir à l'instance de régulation de ce nouveau mode de gouvernance territoriale autour de l'éducation partagée. De ce fait, il faut repenser le projet d'école qui doit se préoccuper de l'ensemble des temps éducatifs et s'articuler autour des autres institutions éducatives. À ce titre, la continuité avec le Bulletin officiel de l'éducation nationale qui précisait, dès 1990, qu'il fallait donner comme mission au cadre national de placer l'enfant au centre du système éducatif, tout en prenant en compte la diversité des situations dans lesquelles il évolue, nous paraît manifeste.
C'est pourquoi nous pensons que le projet d'école ne peut se réaliser pleinement que s'il est placé dans son environnement socio-culturel et économique, en englobant également les rythmes scolaires, les conditions de vie dans l'école et enfin les activités périscolaires et complémentaires de l'école.
M. Jean-Luc Cazaillon, Président du Collectif des associations pour l'école (CAPE). - Je souhaite revenir sur les projets éducatifs de territoire (PEDT) qui s'inscrivent nécessairement dans une histoire et un contexte spécifiques. Mais la réussite de ces PEDT implique de relever plusieurs enjeux. D'une part, assurer une plus grande lisibilité et une meilleure articulation des ministères, que ce soit au niveau central ou déconcentré. D'autre part, assurer la convergence des différents projets de territoire pour éviter qu'ils ne soient trop centrés sur la vie scolaire et pour définir les critères d'une évaluation qui prennent en compte les spécificités locales du projet. En phase d'installation, l'évaluation est importante car les projets doivent parfois être construits rapidement.
Un autre enjeu nous paraît résider dans la formation des animateurs qui sont souvent formés à la hâte pour répondre aux besoins et dont le niveau doit aller au-delà du brevet d'aptitude aux fonctions d'animateur en accueils collectifs de mineurs (BAFA). Il importe de proposer des formations qui soient adaptées à chaque projet éducatif de territoire.
Enfin, la formation des personnels enseignants est importante pour le CAPE. En effet, la loi Peillon rend nécessaire l'inscription de la culture de l'approche éducative dans la formation initiale ou continue des enseignants. Cette formation doit ainsi être pluri-professionnelle et permettre de créer des complémentarités entre les différentes filières.
Mme Anne Carayon, secrétaire générale de Jeunesse au plein air. - Notre association partage la même philosophie que celle du CAPE et milite, de longue date, pour l'égal accès des enfants à des activités lors du temps extra-scolaire, qui d'ailleurs présente de fortes inégalités. 20 % des enfants âgés de 5 à 12 ans fréquentent les centres de loisirs. C'est pourquoi Jeunesse au plein air considère les projets éducatifs de territoires comme une avancée qui permet d'inscrire le temps périscolaire comme un temps propre à l'enfant. L'apprentissage de la mobilité géographique est, à cet égard, important et notre association oeuvre en sa faveur, dans un contexte où trois millions d'enfants ne partent jamais en vacances. J'aborderai un certain nombre de points.
Les municipalités nous paraissent essentielles pour l'organisation du temps périscolaire et celles qui avaient déjà, dans les projets éducatifs locaux (PEL), reconnu comme priorité ce temps spécifique proposent des projets éducatifs de territoires de qualité.
S'agissant de la formation des animateurs, celle-ci ne saurait se limiter au BAFA. D'ailleurs, se pose la question de la portée de la dérogation au taux d'encadrement pour le temps périscolaire ou extrascolaire qui avait déjà été soulevée en son temps par le rapport Ménard.
Un point positif est l'accueil et l'intégration des enfants en situation de handicap dans le temps péri et extra-scolaire qui profite également de la complémentarité entre l'école et les loisirs et conduit au changement du regard des autres enfants sur le handicap.
Mme Mary-Laure Davy, Vice-Présidente de Jeunesse au plein air. - La mise en place de la réforme n'a pu que réjouir les mouvements laïcs. Notre association est engagée aux côtés des collectivités territoriales dans la mise en oeuvre et l'évaluation des projets éducatifs de territoire depuis l'année dernière. La mise en place des rythmes scolaires a ainsi suscité une grande satisfaction parmi les usagers, mais elle ne fonctionne qu'à la condition que les municipalités relaient, au niveau local, l'ambition portée par la loi à l'échelle nationale.
Jeunesse au plein air considère que la réforme va au-delà des rythmes scolaires et concerne les rythmes éducatifs et familiaux, tout en impliquant nécessairement les parents qui demeurent les premiers éducateurs de leurs enfants.
Il nous faut accompagner les collectivités dont les éducateurs, ou les animateurs, se voient attribuer des temps partiels subis. Le temps morcelé ne permet pas de leur proposer une formation qui réponde à leurs besoins et leur permettent de se sentir pleinement investis dans leurs missions. Mais, dans un contexte pré-électoral, les demandes dans ce domaine semblent quelque peu figées... Il faudra certainement attendre la fin de la séquence électorale pour que des demandes de formation soient à nouveau exprimées.
La mise en oeuvre de la réforme se heurte également aux inégalités territoriales et aux difficultés que connaissent certains territoires, notamment les plus ruraux. Si notre association préconise la mutualisation des moyens, il faut cependant reconnaître que les municipalités demeurent le coeur des projets éducatifs de territoire.
Je m'interroge également sur les conséquences des dérogations au taux d'encadrement accordées pour les activités périscolaires : sera-t-il encore possible de conduire des activités pédagogiques de qualité ?
En outre, notre association considère que les départs en vacances permettent l'émancipation des enfants. À ce titre, la réforme actuellement conduite pourrait inspirer le projet de refondation des colonies de vacances actuellement porté par Mme Valérie Fourneyron, ministre des sports.
Certaines inquiétudes se font également jour au sein des collectivités. Ainsi, la mise en oeuvre de la réforme implique de redéfinir les accueils de loisirs auparavant fixés au cours de la journée du mercredi et dont les modalités de financement par les caisses d'allocations familiales (CAF) doivent encore être précisées. La diversité des territoires suscite également des craintes quant à l'égal accès de tous les enfants aux dispositifs définis, au niveau national, par la loi.
M. Eric Favey, Secrétaire général adjoint de la Ligue de l'enseignement. - La réforme a été mise en oeuvre depuis maintenant un an, et ce délai permet d'en tirer des premiers enseignements à l'échelle d'au moins mille collectivités locales et inter-collectivités. S'il est vrai que la réforme permet enfin de faire prévaloir les intérêts de l'enfant sur ceux des adultes, encore faut-il l'améliorer sur au moins cinq points.
Premièrement, il importe de mieux articuler les nouveaux rythmes d'apprentissage avec l'objectif de réduire les inégalités. Cette démarche doit ainsi participer à la réalisation d'une nouvelle ambition pour l'éducation, dont les collectivités sont devenues les rouages essentiels et dont l'investissement doit être accru.
Deuxièmement, la méthode suivie doit combiner la fixation, au niveau national, d'un cadre général et la reconnaissance de l'autonomie au niveau local. Gardons-nous d'un excès de normes et privilégions la souplesse du dispositif ! Je rappelle que tout ce qui n'est pas interdit par la loi est autorisé.
Troisièmement, la mise en oeuvre de la réforme conduira, en toute logique, à la redéfinition du temps d'apprentissage scolaire dans les collèges et lycées.
Quatrièmement, cette réforme implique de redéfinir les modalités du financement de l'éducation en France en respectant les principes de continuité et d'équité territoriales. Avec près de 130 milliards d'euros dépensés chaque année pour l'éducation en France, la réflexion sur l'investissement éducatif devra définir comment dépenser plus et mieux.
Cinquièmement, le niveau intercommunal ne nous semble pas assez reconnu : la mise en oeuvre de la réforme devrait veiller à conférer aux intercommunalités la compétence éducative afin d'assurer la mutualisation des moyens dans le cadre des projets éducatifs de territoire.
En outre, la diminution des dépenses en matière éducative actuellement constatée suscite notre inquiétude : les acteurs locaux vont devoir mettre en oeuvre des dispositifs sans en avoir les moyens. Faute d'une volonté politique de sortir de cette logique comptable, les inégalités actuellement constatées risquent de s'accroître ! Sinon, on peut toujours essayer l'ignorance...
M. Arnaud Tiercelin, responsable Éducation de la Ligue de l'enseignement. - Nous partageons l'avis émis précédemment de la nécessité d'un socle commun, mais il faut sortir de la vision, parfois caricaturale, qui affecte les métiers et notamment celui d'animateur. Le temps partiel subi explique d'ailleurs les difficultés éprouvées pour recruter des animateurs dont la formation doit être améliorée, s'agissant notamment de ceux qui ont vocation à organiser des activités sportives, culturelles et artistiques.
L'éducation nous semble devoir aller au-delà de la simple formation professionnelle à un emploi. Elle a comme enjeux la cohésion sociale et la confiance des habitants dans leurs institutions.
Enfin, la mise en oeuvre de la réforme implique que soit désormais reconnue la diversité des formes d'engagement volontaire, comme celle des bénévoles retraités, qui participe à la cohésion culturelle et sociale des territoires.
M. Jean-Michel Sautreau, Président de l'Union sportive de l'enseignement du premier degré (USEP). - L'USEP soutient la cohérence de ce projet, en évitant toutefois qu'elle n'entraîne une sorte de « co-errance » des acteurs, notamment mobilisés pour l'organisation des activités péri-scolaires, si ceux-ci ne disposent pas d'un espace cohérent. L'intérêt de l'enfant doit ainsi être préservé et il importe d'assurer la convergence des acteurs à partir de l'école, qui reste le premier lieu de l'égalité républicaine, où les activités physiques et sportives sont proposées aux enfants sans distinction aucune. Il convient, en ce sens, de définir l'espace éducatif de chaque enfant.
Les ressources ne sont pas partout les mêmes, mais il nous faut pourtant trouver cette cohérence au nom de ces principes républicains.
C'est la raison pour laquelle, à la suite d'une convention signée le 18 septembre dernier, nous avons défini un parcours sportif de l'enfant, avec une entrée, que nous concevons comme originale, celle de l'éducation physique et sportive à l'école. Celle-ci est destinée aux acteurs que sont les clubs sportifs, les collectivités territoriales, les familles et, dans un espace beaucoup plus large, ce qui relève du spectacle sportif : un certain nombre d'enfants de notre pays y ayant fort heureusement accès !
Dans un espace se voulant éducatif, le spectacle sportif auquel nous participons doit être efficient. Nous constatons tous un certain nombre de dérives. Ces espaces créés par la loi sur la refondation de l'école et les rythmes scolaires permettent une ouverture sur des activités physiques et sportives diversifiées, le spectacle sportif en fait donc partie pour les citoyens éclairés !
J'insiste : le point de départ pour regrouper tous les enfants doit être l'éducation physique et sportive. Dans le cadre des programmes à venir, il nous semblerait inopportun que l'éducation physique et sportive n'occupe pas a minima la même position qu'aujourd'hui ; nous aimerions même qu'elle gagne encore quelques places, car elle nous semble porteuse d'avenir pour chaque enfant de ce pays !
Mme Véronique Moreira, Inspectrice de l'Éducation nationale, vice-Présidente de l'USEP. - Le parcours sportif de l'enfant donne lieu à une application Internet créée et utilisée pour les enfants et qui s'inscrit pleinement dans le cadre de l'école du numérique. J'évacue tout de suite les questions de confidentialité : l'enfant sera muni d'un identifiant et d'un code d'accès ; il s'inscrira pour la première fois accompagné de son enseignant, et chaque enfant aura accès à sa page personnelle. Les enseignants auront accès aux pages de leurs élèves, alors que les autres institutions et partenaires auront accès à des pages anonymisées.
Le but de cet outil est double, voire triple. Il s'agit de rendre explicite la continuité éducative en termes d'activités, mais aussi de répondre à un objectif de santé et de bien-être en favorisant la pratique physique et en luttant contre la sédentarité.
L'enfant va donc renseigner les activités qu'il accomplit dans le cadre de l'éducation physique et sportive à l'école, dans le domaine périscolaire, mais également dans celui des rencontres sportives avec l'USEP ou des activités menées en club sportif, avec sa famille, durant ses loisirs et pendant ses vacances. Comme le disait Jean-Michel Sautreau, une page est par ailleurs consacrée au spectacle sportif et à son rôle de spectateur. L'enfant n'est pas uniquement un acteur sportif. Il peut être aussi arbitre, organisateur, et ainsi remplir différents rôles dans le cadre de ses activités sportives.
Cet outil n'est pas uniquement destiné à l'enfant ; il s'agit aussi d'un outil de cohésion du partenariat, au sens où il implique tous les partenaires. Le temps scolaire permet d'impliquer les enseignants. Pour sa part, le temps périscolaire d'associer, non seulement les acteurs des collectivités territoriales, mais aussi ceux des fédérations sportives et les parents. Tous ces acteurs auront accès au parcours de l'enfant. Cet outil autorise une cohésion des acteurs du partenariat et une articulation des différents temps de l'enfant.
L'idée est d'impulser une dynamique territoriale, les acteurs de la collectivité pouvant avoir accès aux données renseignées par les enfants. Le diagnostic territorial permettra d'envisager le développement de la pratique sportive dans une collectivité, dans une optique plus équitable.
Grâce à ce diagnostic, l'élève pourra consulter ou imprimer une synthèse pour calculer son volume horaire de pratique physique, les enseignants pouvant aussi consulter ou imprimer la synthèse des élèves pour réajuster leur programmation d'éducation physique et sportive, et les articuler avec les autres temps et les autres activités. Les collectivités, quant à elles, pourront obtenir la synthèse de fiches anonymisées pour constater le nombre et la répartition entre filles et garçons, les équipements utilisés, les activités préférées des enfants, etc.
C'est la collectivité qui pourra décider de rendre accessibles des indicateurs d'évaluation aux clubs locaux ou à d'autres partenaires éventuels, dans un souci de dynamique territoriale, d'articulation, et de meilleure cohérence entre les différents acteurs, assurant ainsi la continuité éducative.
Les familles pourront connaître le niveau de pratique de leur enfant, en volume, en qualité et en intérêt. L'offre sportive sera ainsi en adéquation avec l'intérêt de l'enfant, ou lui permettra de découvrir une nouvelle activité.
On peut imaginer que cet outil soit interactif, et puisse valoriser les activités des élèves. La ville pourra également, par cet intermédiaire, proposer des valorisations en lien avec les activités préférées des enfants et leur proposer des tarifs préférentiels pour accéder à certaines installations, ou encore autoriser des accès privilégiés à certaines activités.
M. Jean-Michel Sautreau. - Je parlais des acteurs sportifs qui veulent, à juste titre, investir ce temps. Pourquoi pas ? Aujourd'hui, nous sommes encore sur des impressions. Il semble à un certain nombre d'acteurs du mouvement sportif que ce temps est intéressant, en particulier pour les fédérations sportives. Il faut donc l'investir, mais d'autres commencent à évaluer un certain nombre d'effets et estiment qu'ils perdent des licenciés, la pratique des activités sportives sur le temps périscolaire ne profitant pas aux clubs.
L'outil que nous proposons, qui se veut pratique, doit être centré sur l'acteur principal qu'est l'enfant, mais servir également à tous ceux qui investissent ce temps, au plein sens du terme, pour les aider dans la définition des politiques qu'ils mettent en oeuvre au service des enfants.
Mme Françoise Cartron, rapporteure. - Madame Cortial, à quel rythme le Comité de suivi des rythmes scolaires se réunit-il ? Quelles sont les inflexions ou les ajustements que vous avez préconisés ?
Ce type de comité s'est-il ou non mis en place dans un certain nombre de communes ? 80 % des communes devant appliquer la réforme à la rentrée prochaine, peut-être est-il nécessaire de constituer des comités d'accompagnement, afin de les aider à ajuster leur approche ?...
Par ailleurs, un fil rouge se dégage de toutes vos présentations, autour de la qualité et de la formation. Vous parlez beaucoup d'« animateurs ». Je préfère le mot d'« intervenants ». Comment faire en sorte que, dans un certain nombre de communes rurales, certaines personnes particulièrement investies puissent transmettre aux enfants l'ouverture et la connaissance qui est visée dans l'aménagement des temps scolaires et périscolaires ? Comment concilier une exigence de qualité avec l'utilisation des ressources humaines qui peuvent exister dans tel ou tel territoire ?
D'autre part, qui pourrait organiser des formations communes en direction d'acteurs issus de milieux aussi différents, voire hétéroclites ?
La CNAF a également été évoquée au sujet des financements ; nous l'avons déjà auditionnée une première fois ; je pense que nous allons l'entendre à nouveau... Il s'agit, en effet, d'envisager également les temps de vacances et d'étudier comment l'ensemble s'inscrit dans un projet éducatif territorial.
À votre connaissance, combien existe-t-il aujourd'hui de PEDT ? Écrire et concevoir un projet éducatif territorial effraye quelque peu les collectivités et les autres partenaires. Les projets dont vous avez connaissance se situent-ils dans les grandes ou les petites villes ? Un accompagnement des communes dans la conception, la réflexion et l'écriture d'un tel projet vous paraît-il nécessaire ?
Enfin, je pense qu'il ne faut pas voir dans la réforme des rythmes scolaires et dans la notion de parcours artistique, éducatif ou sportif, l'abandon de l'éducation physique ou artistique à l'école. La question a été posée six fois au ministre : ce sont deux choses différentes. Comment l'USEP s'inscrit-elle dans l'aménagement du temps de l'enfant ? Avez-vous participé à un certain nombre des expériences qui se déroulent aujourd'hui ?
Enfin, je suis quelque peu dubitative quant à l'outil que vous avez évoqué. En tant qu'ancienne élue locale, je ne sais si ces remontées seront facilement utilisables et très fiables... L'enjeu d'un projet éducatif territorial consiste à réunir des personnes autour d'une table afin qu'elles échangent et construisent quelque chose ensemble, pour que l'enfant puisse vivre le maximum d'expériences après le temps scolaire, qui est très codifié.
Mme Catherine Troendlé, présidente. - Madame Cortial, vous avez parlé de la nécessité de créer une instance de régulation. Pouvez-vous nous en dire plus ?
Ne peut-on pas envisager une baisse du taux d'encadrement, comme le réclament les élus, pour l'accueil des enfants ?
Mme Marie-Claude Cortial. - Le Comité de suivi évoqué par Mme la rapporteure se réunit tous les mois ; nous avons présenté deux rapports au ministre : un premier en septembre et l'autre en décembre.
La première inflexion concernait les maternelles. Tout le monde en a parlé, et les échos reçus ont été très négatifs. Le Comité de suivi s'en est très vite préoccupé et, en novembre, avec l'aide de la Direction générale de l'enseignement scolaire, une note a été adressée à tous les acteurs de terrain pour leur expliquer ce qu'il convenait de faire. On peut espérer qu'ils se sont rendus compte des quelques erreurs qu'ils ont pu commettre. Des ajustements ont été opérés, et l'on peut penser que le bon sens a prévalu.
Mme Catherine Troendlé, présidente. - Que préconisait cette note ?
Mme Marie-Claude Cortial. - Elle conseillait de respecter une alternance équilibrée entre les temps d'activité et les temps de calme et de repos des enfants, d'aider les enfants à se repérer dans les lieux de l'école et à identifier les adultes de l'école, d'organiser avec un soin particulier la transition entre le scolaire et le périscolaire et, enfin, d'adapter les activités aux besoins des jeunes enfants.
Quant aux comités de suivi départementaux et académiques, ils ont été très souvent mis en place à l'initiative des services de l'État, mais également avec la CAF ou les différentes fédérations. On voit bien qu'il y a là un souci réel des institutions de suivre la mise en place des rythmes scolaires sur le terrain.
Il existe aussi des initiatives locales. La ville de Val-de-Reuil, dont je suis originaire, a ainsi mis en place un comité de suivi. Lorsqu'on élabore une réflexion commune, cela semble essentiel. Le double suivi est donc intéressant. Il me semble que cette prise de participation citoyenne est nouvelle, ce qui est, selon moi, le plus important.
Pour ce qui est de l'instance de régulation, nous avançons en marchant. En effet, elle varie suivant les régions et les secteurs. Tout cela sera affiné. On peut faire confiance à l'action locale. Je suis issue d'une région rurale, où le problème ne vient pas tant des transports scolaires que du fait que les intercommunalités ont rarement la compétence éducative ou péri-éducative. Or, on ne peut laisser une commune de 240 habitants comme la mienne gérer les rythmes scolaires... Il me semble donc que les élus doivent prendre conscience de l'intercommunalité à tous les échelons du territoire. Elle révélera alors ses qualités.
Par ailleurs, en zone rurale, le bénévolat est important et on doit le prendre en compte. On ne peut alors pas leurrer l'autre sur ses compétences. Chacun se connaît, et il ne faut pas redouter ce genre de choses, car on ne pourra peut-être pas tout financer. C'est ce que j'appelle la prise en charge citoyenne. Il y a là encore des éléments positifs à envisager.
Mme Marie-Laure Davy. - S'agissant des comités de suivi locaux, la fédération Léo Lagrange et les autres acteurs directs ont vu nombre de collectivités se rapprocher d'eux. Nous avons donc constitué des comités de pilotage. En période électorale, faire appel à des acteurs éducatifs professionnels a permis d'éviter certains malentendus.
De tels comités ont permis de réunir autour de la table l'Éducation nationale, les directeurs d'école, les professeurs volontaires, les parents d'élèves, le secteur associatif et les professionnels du secteur.
Cette observation me permet de faire le lien avec vos questions sur les animateurs et les professionnels de la formation. La question des intervenants des métiers de l'animation ayant des temps partiels subis est importante et nous préoccupe, car nous devons, nous aussi, être attentifs à nos professionnels.
Pour autant, il ne faut pas se fermer à l'engagement citoyen. Beaucoup de retraités postulent par exemple pour participer au temps d'activité péri-éducatif, et la fédération Léo Lagrange réfléchit donc à un accompagnement autour de thèmes comme les activités physiques et sportives ou culturelles, le vivre ensemble, la citoyenneté, etc.
La modification des taux d'encadrement est-elle grave ? Pas tant que cela, ceux-ci étant jusqu'alors dérogatoires. Ce changement doit permettre aux collectivités de se lancer dans la réforme. Cette position est partagée par la Jeunesse en plein air. Lorsque les groupes d'enfants sont restreints, on peut mieux les accompagner, notamment dans les maternelles.
Les associations qui siègent au sein de la Jeunesse en plein air seront très attentives à l'évolution des taux d'encadrement, mais nous souhaiterions tout d'abord savoir ce qu'il en est de l'application de cette dérogation. Comment les intervenants la vivent-ils ? Dans un premier temps, la qualité éducative passe par un taux d'encadrement raisonnable et raisonné...
M. Jean-Luc Cazayon. - Je voudrais revenir sur la question de l'engagement et du taux d'encadrement. Je pense que tout engagement est, par essence, citoyen. Il existe plusieurs formes d'engagement : bénévolat, volontariat et salariat.
Ce qui est en jeu aujourd'hui, c'est le fait qu'en touchant au taux d'encadrement, on déroge à une large réglementation qui n'a pas été conçue que pour la question des activités périscolaires ou extra-scolaires.
Sans vouloir politiser le débat, je crois qu'il y a là un enjeu politique majeur pour le Gouvernement, notamment en matière d'animation. C'est un des rares champs du volontariat à souffrir d'un manque de clarté, ce qui motive une vigilance accrue de notre part. Je crains que le débat ne soit déjà clos, alors que l'on voit le service civique apparaître comme la panacée. Je pense que l'on risque ainsi de mettre à mal tout un pan de l'animation et de l'engagement citoyen, alors que 300 000 jeunes s'engagent chaque année dans l'animation volontaire.
Qui peut s'engager dans les formations pluri-acteurs ? Nous, entre autres ! Nos associations sont déjà pluri-acteurs. Les militants de nos mouvements associatifs sont des acteurs de l'éducation aux origines très diverses.
Par ailleurs, nos projets associatifs posent ces questions de longue date : réforme des rythmes, réussite éducative, complémentarité des espaces et des temps sont consubstantielles de nos histoires respectives. Il ne s'agit pas d'une approche unique, univoque, corporatiste de l'éducation, mais d'une approche plurielle... La coéducation et l'approche globale des temps éducatifs font partie de notre histoire et de nos projets.
On peut donc avoir la compétence nécessaire pour accompagner les collectivités à construire une démarche et une dynamique communes, celle du projet éducatif territorial. Nous avons déjà accompagné un nombre important de petites et moyennes collectivités, voire des plus grandes, sur le territoire.
En matière de formations pluri-acteurs, nous sommes capables de travailler sur de nouveaux dispositifs permettant de créer cette culture commune, afin que les personnes se connaissent et apprennent à travailler ensemble. Ceci ne nous est bien sûr pas exclusif, et d'autres structures peuvent le faire.
M. Éric Favey. - La question du nombre de projets éducatifs territoriaux est un piège. Si on veut savoir combien il en existe, il suffit de comptabiliser les formulaires CERFA ! Mais c'est au regard de leur contenu que l'on peut savoir s'il s'agit ou non de vrais projets.
Il existe aujourd'hui des communes qui n'ont pas de projets éducatifs territoriaux, mais des projets éducatifs locaux qui vont bien au-delà ! Le ministère les a estimés à 1 500, 22 % des communes s'étant engagées en 2013.
Les choses bougent cependant tous les jours, et nous souhaitons qu'un maximum de communes se dotent de politiques éducatives locales traduites par des projets éducatifs territoriaux. Ce n'est pas obligatoire, il faut le rappeler : la loi n'oblige aucune commune à se doter d'un projet éducatif territorial, ni à mettre en oeuvre des activités périscolaires qui complètent le temps scolaire. Il existe une incitation très forte et des financements, constituant ainsi un cadre, mais on en reste au stade du volontariat.
Pourquoi insistons-nous sur cette dimension qualitative du projet, et non sur son aspect quantitatif ? Derrière tout cela, apparaissent un certain nombre d'objectifs autour des politiques éducatives de territoire.
Nous appréhendons la question de manière quelque peu différente par rapport à ce qui figure dans la loi, non parce que la loi n'y fait pas référence, mais parce qu'il existe, depuis vingt ans, des collectivités qui ont élaboré des politiques éducatives locales, et des mouvements associatifs qui les ont accompagnées. Ce sont des acteurs importants de cette construction qui continuent, aujourd'hui encore, à intervenir au quotidien.
La première vocation d'un projet éducatif territorial, nous semble-t-il, est de permettre aux enfants et aux jeunes d'élargir leur culture. Un grand quotidien du soir l'évoquait la semaine passée : 75 % de la population de notre pays considère qu'il faut se méfier des autres, lorsqu'on est dans l'obligation de s'adresser à eux ! Ceci traduit un vrai problème de compréhension réciproque ! Travaillons donc à l'élargissement permanent des représentations...
En second lieu, il convient de donner du sens aux savoirs scolaires ; on ne trouve pas du sens que dans l'école : on peut aussi prendre appui sur ce que l'on apprend à l'extérieur. Cette remarque est d'ordre dialectique...
Par ailleurs, pour que les enfants sentent qu'ils ont une place sur un territoire, il faut qu'ils soient concernés par leur pratique, qu'ils y croient ! Dans le cas contraire, nos valeurs républicaines et démocratiques risquent d'être discréditées !
Enfin, il faut apprendre à faire le meilleur usage des nouveaux rythmes scolaires, des territoires et de leurs ressources. Il est bon qu'un enfant découvre qu'il peut s'appuyer sur des institutions, des personnes ou des associations pour effectuer des choix personnels, professionnels, puis plus tard citoyens. C'est une expérience dont il fera le meilleur usage sur le plan de l'éducation et de la formation tout au long de la vie. Sur un petit territoire local, l'enfant éprouve le monde. C'est ce qu'il faut arriver à réaliser, et la question des rythmes scolaire ne prend sens que dans ce cadre.
Nous le constatons à travers l'engagement associatif local : il faut insister sur la question des talents à mobiliser, dans un pays qui vit une certaine crise de confiance. Réunir la population autour d'un enjeu éducatif, c'est l'amener à se prendre en charge !
Aucun territoire n'est dépourvu de talents, mais la manière de les combiner n'est pas partout la même, en particulier en matière d'accueil. On ne peut pas demander à un boucher passionné, qui transmet son art dans un atelier pendant six semaines, de seulement assurer la permanence de l'accueil des enfants dans une structure de loisirs. Il faut donc combiner les talents que l'on trouve sur les territoires avec la nécessité d'organiser l'accueil des enfants sur le temps périscolaire.
M. Jean-Michel Sautreau. - Nous sommes satisfaits à chaque fois que l'on réaffirme l'importance et l'intérêt de l'éducation physique et sportive à l'école. Il n'a pas échappé à Mme la rapporteure que, dans un rapport de 2008, un certain nombre d'enseignants considéraient qu'il y avait trop d'éducation physique et sportive à l'école, estimant même, pour certains, qu'il serait mieux qu'il n'y en ait plus ! Ceci nous avait interpellés : autant souligner les choses !
Mme Françoise Cartron, rapporteure. - Qui a dit cela ? Les enseignants eux-mêmes ?
M. Jean-Michel Sautreau. - Certains enseignants... Cela apparaît dans le rapport, dont une inspectrice de Gironde était cosignataire.
Mme Françoise Cartron, rapporteure. - Cela ne m'étonne pas du tout en tant qu'élue locale, pour avoir vu des gymnases désespérément vides, malgré les plages horaires attribuées !
M. Jean-Michel Sautreau. - C'est une volonté du terrain, et nous gardons les pieds sur terre, en bons sportifs que nous sommes - tout en étant enseignants !
L'USEP a un gros avantage : elle a un pied dans l'école et un autre en dehors, grâce à ses différents statuts. Quand on ouvre cette nouvelle plage de temps périscolaire, autant apporter ce que nous savons faire à d'autres acteurs porteurs de compétences -dont notre connaissance de l'école en particulier. Toutefois, ces acteurs ne connaissent pas forcément le monde de l'école, qui n'a pas toujours été complètement ouvert. Un certain nombre de choses restent donc à conquérir. Nous prônons quant à nous le principe d'une école ouverte sur la vie, et nous avons fait émerger des services par le biais d'un travail que nous sommes encore en train de mener avec la Fondation du sport français Henri Sérandour, afin de faire émerger un certain nombre de projets, déjà effectifs depuis la rentrée 2013, qui mettent en évidence le principe de lien avec le projet d'école, au regard de ce que les clubs sportifs peuvent apporter, en lien avec la collectivité territoriale et les USEP locales.
À cette heure, un nombre conséquent de dossiers est revenu dans nos bureaux ; ils montrent que là où on a compris que le lien était source de progrès et de réussite, les choses pouvaient souvent avancer. Nous mettrons très rapidement à votre disposition le résultat de cette démarche...
Quant au parcours sportif sur internet, même s'il peut paraître complexe a priori, il présente néanmoins deux intérêts, dont celui de mettre en évidence le lien entre les acteurs. Il y a une vingtaine d'années, nous étions bien plus dans le papier et le crayon qu'aujourd'hui. L'USEP avait à l'époque mis au point un livret du jeune citoyen sportif. L'enfant écrivait, dessinait, suivant son âge, au fur à mesure de son parcours, ce qu'il vivait dans les activités sportives. Aujourd'hui, l'outil informatique étant plus développé, il ne faut pas reproduire la même chose, mais aller plus loin. Grâce aux compétences à acquérir dans le cadre de l'école dans le domaine de l'informatique, il nous a semblé que nous avions là une belle possibilité de mettre les acteurs en cohérence. Si l'on investit, on ne sait en effet pas toujours analyser ce qu'amène cet investissement ! Les fédérations sportives clament haut et fort qu'il faut créer des passerelles entre l'école et le mouvement sportif. Grâce à l'utilisation d'un tel outil, on verra que ces passerelles existent déjà ou sont à construire ! Les collectivités ont sûrement un intérêt à aller plus loin dans cet investissement qui est le leur et qui est conséquent.
M. Gilbert Roger. - Vos associations participent depuis très longtemps et de très près à la vie de l'école, sous des formes diverses.
J'ai été, durant plus de 17 ans, maire de Bondy, l'une des communes à l'origine de la création des circulaires Calmat-Chevènement. La France est loin d'être au premier rang, d'un point de vue international, en termes de réussite éducative.
Selon vous, quels éléments positifs apportent les nouveaux rythmes ? Comment convaincre ceux de nos collègues qui y sont, aujourd'hui encore, quelque peu réticents ? Un rond-point coûte 200 000 euros. Faut-il investir cette somme dans un rond-point ou dans l'éducation des enfants ? Lorsque j'étais maire, je préférais choisir l'éducation des enfants !
Mme Marie-Annick Duchêne. - Mme Carayon s'est tout à l'heure demandé s'il fallait ou non légiférer au sujet du temps périscolaire. Selon moi, les choses se sont mises en place très difficilement entre les enseignants et les animateurs, mais la situation s'améliore. Il me semble qu'il ne faut pas légiférer si l'on veut conserver la dynamique citoyenne que beaucoup d'entre vous ont évoquée...
M. Michel Le Scouarnec. - Tout le monde semble favorable à la réforme des rythmes scolaires. Il ne reste plus qu'à la réussir, même si des difficultés demeurent, le financement n'étant pas assuré de manière pérenne, sans parler des réductions des dotations aux collectivités territoriales...
Par ailleurs, on a dit qu'en termes de formation, le BAFA n'était pas suffisant. Quel niveau prévoir dans ce cas ? Peut-être est-il possible de faire preuve de souplesse...
Pour ce qui est du temps partiel subi, je ne vois pas comment y remédier. On peut toujours essayer d'en réduire l'importance. Il faut travailler sur cette question, mais prévoir un temps complet pour tous les intervenants me paraît impossible.
D'autre part, je ne suis pas favorable à ce que la compétence éducative soit assurée par l'intercommunalité. Elle peut être optionnelle dans les toutes petites communautés, mais je préfère des conventions entre les petites communes qui sont proches et qui peuvent, parfois à deux ou trois, résoudre les problèmes d'encadrement.
Quant à l'USEP, elle ne se charge pas de tous les sports. Il faut que les instituteurs appliquent également les horaires prévus pour l'éducation physique et que la collectivité mette la piscine et les salles de sport à disposition !
Enfin, la Jeunesse en plein air, qui s'occupe plus particulièrement des classes de découverte et des colonies de vacances, participe grandement à la réussite des enfants. Bravo !
M. André Gattolin. - M. Favey a rappelé que la question des rythmes scolaires ne se pose pas seulement à la maternelle et en primaire, mais également au collège et au lycée. On travaille ici sur le rythme scolaire de la journée et de la semaine, mais celui qui concerne l'année scolaire est aussi un sujet important qui nécessite que l'on s'y penche.
La vraie difficulté réside dans la relative pénurie de personnels qualifiés dans le domaine périscolaire. Je ne vois pas comment différer plus longtemps l'application de la réforme des rythmes scolaires au collège, la rupture entre le primaire et le secondaire risquant de s'avérer dramatique.
Enfin, quels sont vos besoins en tant qu'acteurs de la vie associative ? Cette réforme implique en effet des effectifs et une certaine coordination. Si tout le monde organise les activités périscolaires l'après-midi, le travail à temps partiel se multipliera. Si l'on n'étale pas la durée scolaire tout au long de l'année, il risque même d'être saisonnier. Quelles sont vos positions à ce sujet ?
M. Arnaud Tiercelin. - La réflexion sur les projets éducatifs territoriaux est ancienne. On peut en tirer un certain nombre d'enseignements... La réforme actuelle amène-elle ou non une amélioration ? Je serai tenté de dire qu'elle est trop récente pour produire ce qui, sur certains territoires, résulte d'années de mobilisation.
Un projet éducatif territorial, partenarial, participatif, où l'on croise véritablement les pratiques nécessite du temps, mais la réforme a été bénéfique sur deux points. En premier lieu, l'ensemble des territoires est saisi de cette question, alors que les dispositifs contractuels entre l'État et les collectivités n'ont jusqu'à présent concerné qu'une petite part de collectivités très volontaristes.
En second lieu, l'éducation nationale s'est pleinement investie dans ce débat, alors qu'elle était en repli sur d'autres dispositifs, comme les contrats éducatifs locaux - même si les textes prévoyaient que les conseils d'école puissent donner leur avis en matière de périscolaire. C'était là un vecteur important d'inégalités à l'école...
Cette réforme a eu le mérite d'inviter tous les acteurs à se pencher à nouveau sur ces questions, en s'appuyant, si nécessaire, dans certains endroits, sur des démarches anciennes.
Il faut cependant rester vigilant sur le fait qu'un projet éducatif territorial est un processus long, qui suppose une certaine évaluation, une régulation et une transformation du regard, des représentations et des pratiques des acteurs. Nous sommes au tout début d'un processus, sauf dans certains territoires, et penser qu'il suffit de juxtaposer les dispositifs d'accueil pour régler la question constituerait un défaut d'ambition manifeste.
M. Jean-Michel Sautreau. - Si l'on considère que les activités physiques et sportives organisées pour les enfants sont une chance pour eux, parce qu'elle les aide à bien grandir, alors cette réforme est une bonne réforme !
Il est cependant nécessaire de poser certaines conditions. La première impose que ce temps d'activité physique et sportive ne doublonne pas le temps d'EPS à l'école ou en club, mais soit une création, voire traduise l'invention d'un temps nouveau. La seconde condition est que ce temps nouveau soit d'abord considéré comme un temps éducatif. Le sport doit être mis au service de l'éducation, et non l'inverse !
Si l'on accorde une place au sport scolaire pour assurer le lien entre les acteurs, l'USEP est volontaire pour assurer ce rôle !
M. Éric Favey. - Je ne suis pas sûr que l'on puisse établir un tableau à deux colonnes en reprenant, au bout de quelques mois, les avantages et les inconvénients de cette réforme.
Globalement, nous n'y voyons cependant pas de point négatif majeur. La réforme n'a pas créé dans le pays de dépression éducative majeure, mais a plutôt donné un élan local nouveau, parfois conflictuel, sur les questions à la fois scolaires et éducatives. Nous pensons qu'il faut corriger les choses progressivement, et tenir compte des divers enseignements, afin de ne pas répéter les erreurs - même s'il est très compliqué de dupliquer les choses d'un territoire à un autre. Il existe cependant des lignes de force...
Une condition est indispensable : assurer la pérennité du dispositif. Ne changeons plus le cadre général dans les dix ans à venir ! La productivité, en matière d'école, est à dix ans au minimum ; en matière éducative, nous ne le savons pas précisément. On ne mesure que des effets aléatoires. On prend souvent l'école pour une société qui n'existe déjà plus. Soyons donc modestes... Quelques indicateurs se dégageront cependant assez rapidement, notamment pour mesurer la confiance des acteurs entre eux et celle qu'auront les enfants dans l'école et dans les adultes qui les aident à grandir.
En second lieu, il faut étendre le chantier aux collèges et aux lycées, mais également travailler sur la question de l'année scolaire. Ceux qui ont participé à la concertation durant l'été 2012 pensaient que ce projet était prêt. Même les acteurs économiques, que l'on accuse parfois à tort d'être les seuls responsables de l'impossibilité d'ouvrir le débat sur cette question, étaient quasiment prêts à faire un certain nombre d'efforts et d'ajustements. Le projet a été retiré parce qu'il fallait gérer cette première période, mais, pour plus de souplesse et de possibilités, il faut bien évidemment poser la question de l'année scolaire !
Enfin, s'agissant des ressources, il faut tenir compte de la question de la professionnalisation. Nous sommes le pays de l'OCDE qui réserve le plus triste sort à sa jeunesse, notamment en termes de professionnalisation. Il y a sans doute là un gisement d'emplois non négligeable, à condition de travailler correctement à faire reculer la précarité de l'emploi et à imaginer d'autres emplois, comme l'articulation entre animateurs, responsables de projets locaux, etc. Prenons appui sur les communes dotées depuis vingt ans de projets éducatifs locaux !
Il va falloir tous faire preuve d'inventivité et d'imagination, et croiser les enjeux. La question de l'utilité sociale des retraités se pose chaque jour ; l'intergénérationnel ne consiste pas à utiliser les retraités pour remplacer les professionnels quand on n'a pas d'argent ; elle permet de répondre à un besoin culturel et social déterminant !
Le mécénat d'engagement, qui consiste à prendre une heure dans la semaine sur son temps de travail pour faire partager une passion, privée ou professionnelle, se développe doucement dans notre pays, de manière encadrée, la France ayant la chance de disposer d'un cadre laïque pour l'école ou pour tout projet éducatif.
La communauté scolaire travaille également à un projet de mobilisation de lycéens auprès des écoles primaires à proximité des établissements de second degré. On sait en effet tout l'intérêt qui existe à créer des liens d'éducation et d'enseignement mutuels. Les lycéens, qui ont un grand savoir-faire en matière de culture numérique, moyennant une formation complémentaire sur le droit à l'image, peuvent accompagner des groupes de deux ou trois élèves, avec des animateurs permanents, autour de cette question. C'est une expérience très profitable que l'engagement ! Elle permettrait à l'institution scolaire de reconnaître dans les acquis des élèves autre chose que les savoirs scolaires - engagement, savoir pratique - par la validation des acquis de l'expérience, dans le cadre de leur parcours professionnel et personnel.
Mme Marie-Laure Davy. - Je souscris totalement à ce que vient de dire M. Favey.
Lors des réunions de concertation préalables à la mise en place de la réforme, beaucoup d'enseignants auxquels nous avons pu présenter nos projets éducatifs et pédagogiques ont été favorablement impressionnés, alors que nos métiers d'animateurs souffraient jusqu'à présent d'un certain déficit d'image auprès d'eux. C'est déjà une grande étape qui a été franchie...
Par ailleurs, dans les grandes villes universitaires, on peine de plus en plus à trouver des étudiants disponibles pour des actions de proximité, les emplois du temps ayant beaucoup évolué ces dernières années. Ceci va donc bien au-delà des collèges et des lycées... Il faut continuer à travailler sur ce sujet.
Audition de responsables du Groupement de défense des idées des directeurs (GDID)
La mission procède enfin à l'audition de responsables du Groupement de défense des idées des directeurs (GDID).
Mme Catherine Troendlé, présidente. - Nous poursuivons nos auditions en recevant MM. Alain Rei, président du Groupement de défense des idées des directeurs (GDID) et ses collègues Pierre Lombard et Samuel Auxerre. Je vous donne la parole, M. Rei, pour un exposé liminaire avant que vous ne répondiez aux questions de mes collègues.
M. Alain Rei, président du Groupement de défense des idées des directeurs (GDID). - Nous vous remercions pour votre invitation qui nous donne l'occasion de nous exprimer sur la réforme des rythmes scolaires, qui est révélatrice des tensions et des blocages qui traversent l'école, ainsi que des difficultés à la faire évoluer.
Le GDID est l'association nationale des directrices et directeurs d'école qui a pour objectif la reconnaissance du métier de directeur d'école, puisqu'aujourd'hui celui-ci n'existe pas dans un cadre juridique précis.
Le constat est celui formulé par nombre de rapports, au premier rang desquels l'enquête PISA (Programme international pour le suivi des acquis des élèves) et la quasi-totalité des organisations du secteur éducatif qui avaient signé l'appel de Bobigny : le retour à cinq matinées d'enseignement permettrait un étalement plus propice des apprentissages. Il faut aussi tenir compte des situations locales, et tel est le sens des projets éducatifs territoriaux (PEDT).
Si le constat est partagé, les blocages sont arrivés très vite avec une intensité surprenante de la part d'acteurs qui tentent de freiner la mise en application de la réforme. Pour notre part, nous nous inscrivons dans une perspective légaliste pour que celle-ci soit mise en oeuvre.
Si l'on cite les textes, il est précisé dans une circulaire du 6 février 2013 que « les conseils d'école peuvent proposer des projets d'organisation des temps scolaires. L'inspecteur de l'Éducation nationale (IEN) chargé de la circonscription d'enseignement du premier degré formule un avis sur ces projets et les transmet au directeur académique des services de l'Éducation Nationale (DASEN). Les communes ou les EPCI compétents peuvent également proposer des projets d'organisation des temps scolaires des écoles situées sur leur territoire ». A cet égard, nous exprimons un regret : nous aurions préféré que le conseil d'école soit porteur des projets, alors que la rédaction de la circulaire ouvre la possibilité d'une mise en concurrence des conseils d'écoles et des IEN qui devraient pourtant travailler en commun pour construire un projet pertinent. Nos adhérents nous ont fait savoir que la plupart des projets sont venus des IEN et n'ont pas été portés par les conseils d'école, ce qui peut, selon nous, expliquer certaines crispations sur une série de sujets : le partage des locaux scolaires, la cohabitation d'activités dans un même lieu et le passage entre les temps scolaires et périscolaires.
Pour nous, le directeur d'école joue un rôle majeur qui le place au coeur du système. Il est le garant du projet d'école, le responsable de son organisation et la personne qui l'incarne aux yeux des parents et des autres acteurs.
Le dialogue local entre partenaires est la base essentielle d'une construction cohérente, non seulement des temps d'apprentissage scolaire, mais plus globalement du temps éducatif de l'enfant. Ce traitement local nécessite une concertation entre tous les acteurs : partenaires municipaux, famille, éducation nationale. Le directeur se situe au croisement de leurs différents intérêts, en vue d'une évaluation des dispositifs qui en garantit la pertinence.
Mme Catherine Troendlé, présidente. - Merci pour votre exposé très clair. La parole est maintenant à Mme la rapporteure.
Mme Françoise Cartron, rapporteure. - Vous avez terminé votre propos en exprimant votre souhait d'une autonomie accrue dans le rôle du directeur d'école : dans quel cadre doit s'exercer ce rôle ?
Sans doute la réforme a-t-elle accru votre charge de travail. Au-delà de la reconnaissance de ce travail supplémentaire, y voyez-vous la nécessité d'une relation hiérarchique avec les enseignants ?
Enfin, si l'on souhaite faire du conseil d'école une force de propositions, il faudra aussi réfléchir à l'évolution de son fonctionnement, ce qui ne semble aujourd'hui guère envisageable.
M. Alain Rei. - L'autonomie n'est pas synonyme de liberté absolue. Elle implique une autonomie de fonctionnement et la capacité de décider sur les choix de mise en oeuvre du PEDT qui est la déclinaison d'objectifs nationaux.
Par ailleurs, il faut réfléchir à ce que l'on met derrière la notion de métier. Une réflexion de fond est nécessaire sur le recrutement des directeurs d'école : il existe aujourd'hui une grande pénurie et tous ceux qui souhaitent devenir directeur d'école peuvent l'être. Une grande déficience porte également sur la formation, aujourd'hui limitée à trois semaines.
Pour nous, le niveau hiérarchique du directeur d'école n'est pas un sujet en soi. Nous sommes déjà dans des positions hiérarchiques, par exemple lorsque nous signons les autorisations de sortie scolaire. Au-delà des relations hiérarchiques, certaines compétences et responsabilités ne sont plus celles de l'instituteur ordinaire. Il faut mettre les textes en cohérence avec la réalité.
S'agissant du conseil d'école, le texte fondateur de 1989 a été un peu oublié : le conseil d'école devrait être un cadre de réflexion et de projets. Nous voulons revenir au fondement de la loi.
M. Samuel Auxerre. - Les trois représentants du GDID ici présents sont tous directeurs d'école. Pour ma part, je suis directeur dans un regroupement pédagogique intercommunal (RPI) constitué de deux communes, Pérignat-sur-Allier et Saint-Bonnet-les-Allier, comptant respectivement 1 500 et 400 habitants, et constitué de cinq classes d'école élémentaire et trois classes de maternelle. La réforme a exigé beaucoup de temps, d'énergie et d'investissement et a mis en exergue le rôle central du directeur d'école. Une réflexion s'est engagée au sein de l'équipe enseignante dès la publication du décret, ce qui a permis la mise en oeuvre des nouveaux rythmes à partir de la rentrée 2013. Le projet a fait l'objet d'un suivi tout au long des conseils d'école de l'année et a donné à un conseil d'école extraordinaire, ce qui a permis d'associer l'ensemble des acteurs locaux. La vraie concertation qui s'est ainsi engagée représente un cas d'espèce idéal où il a été possible de répondre aux interrogations des associations. Mais je comprends également les difficultés qu'ont pu ressentir certains collègues qui, s'étant pareillement investis, ont formulé des propositions qui n'ont pas reçu d'écho.
Mme Françoise Cartron, rapporteure. - Nous comprenons bien que vous avez su construire une situation idéale, mais au prix d'un grand investissement en temps et en énergie.
M. Dominique de Legge. - Très concrètement, qu'attendez-vous des élus dans cette affaire ? En d'autres termes, quelle coordination doit être effectuée entre les temps scolaires et périscolaires, le périscolaire étant placé sous la responsabilité de la commune et le PEDT forcément perçu comme un projet d'école ?
M. Rémy Pointereau. - Vous avez évoqué les blocages lors de la mise en place de la réforme, de la part des enseignants, des directeurs d'école, des parents d'élèves et des élus. Les enseignants et les directeurs d'école ont pointé les problèmes d'horaires. Les parents d'élèves ont dû modifier leurs habitudes, par exemple pour telle mère de famille qui se libérait le mercredi pour emmener ses enfants à telle activité. Les élus se sont vus transférer des compétences autrefois dévolues à l'Etat. Enfin, des problèmes de concertation se sont posés, les représentants du ministère n'ayant pas toujours été adroits dans la présentation de la réforme.
Vous citez votre expérience du Puy-de-Dôme qui a été une réussite. Mais ne craignez-vous pas une école à deux vitesses, entre le milieu rural où les activités pourraient se limiter à de la garderie faute des moyens nécessaires et de réseaux de transports, et le milieu urbain, où toute une gamme d'activités sportives et culturelles peuvent être proposées ?
Vous avez déclaré vouloir plus d'autonomie, mais c'est impossible sans l'aval du conseil d'école et des élus ! Si l'on parle d'autonomie, celle-ci doit être partagée : le directeur d'école ne peut pas décider seul.
M. Alain Rei. - Les textes sont clairs : le PEDT est différent du projet d'école. Le projet d'école correspond à la déclinaison locale du projet national en termes de programmes, alors que le PEDT correspond à un projet éducatif adapté aux réalités locales. Le PEDT met des ressources en adéquation en vue de permettre aux enfants d'un territoire d'atteindre des objectifs nationaux. Le projet d'école est un des constituants des PEDT. Nous, directeurs d'école, souhaitons, sinon être pilotes, du moins être associés aux projets d'école.
S'agissant des coûts, cette question a été centrale au dernier congrès de l'Association des maires de France (AMF), auquel j'étais présent, ce qui est normal. Au demeurant, les enseignants continuent à faire le même nombre d'heures et les coûts de fonctionnement restent à la charge des communes. Le PEDT pourrait être propice à l'engagement d'une réflexion globale sur les ressources dont dispose un territoire, qu'il s'agisse du parler provençal ou breton ou du jardinage. Il est possible d'opérer des transferts de connaissances à peu de frais, en faisant preuve d'inventivité, afin de recréer du lien social. La question du coût réel a pu être un facteur de démobilisation. Mais qui mieux que le directeur d'école sait que le père du petit Pierre est un passionné d'astronomie et qu'il pourrait faire partager cet intérêt une fois par semaine, dans un club d'astronomie ? Le portail de l'école est la nouvelle agora, ce que ne peuvent ignorer les élus.
M. Pierre Lombard. - L'autonomie ne signifie en aucun cas faire tout ce que l'on souhaite. Il s'agit de prendre du pouvoir à l'échelon supérieur pour le redistribuer et agir localement. Les blocages ont été la conséquence de deux ruptures : d'une part, entre les enseignants et les ministères, qui ont multiplié les structures intermédiaires au rythme des changements de titulaires du portefeuille ministériel, alors même que la politique des cycles de 1989 reste encore à accomplir ; le projet d'école et le conseil d'école ont représenté un premier pas vers l'autonomie locale ; d'autre part, il y a eu une rupture du contrat implicite entre la Nation et les enseignants du primaire, jadis les hussards noirs de la République, aujourd'hui en voie de déclassement ; la contrepartie de cette évolution a été, d'une certaine manière, de pouvoir disposer de vacances plus longues, et les enseignants se disent que même cela est remis en cause. La communication ministérielle a souligné que le nombre d'heures n'était pas modifié. Pourtant, la réforme a impliqué un déplacement de plus par semaine, ce qui a un impact sur l'organisation sociale d'un métier fortement féminisé.
Il est aujourd'hui essentiel de rétablir de l'horizontalité dans la gouvernance et d'expérimenter l'autonomie des écoles qui ont un statut d'établissement. Quand un maire se pose des questions sur les rythmes scolaires, il lui est plus facile de discuter avec le directeur d'école qu'avec l'IEN.
La concertation a été réelle, notamment pour la préparation du projet de loi pour la refondation de l'école. Le dialogue entre le ministère et les syndicats est constant. Les blocages ont plus porté sur les non-dits de la concertation. Au demeurant, certains acteurs, comme les DASEN, n'ont pas la culture du consensus et des maladresses ont été commises.
Mme Catherine Troendlé, présidente. - La question de la méthode et des maladresses commises revient comme un fil rouge au cours des auditions.
M. Samuel Auxerre. - L'autonomie est nécessaire pour assurer la réussite des élèves au niveau local. Le directeur d'école n'est qu'un représentant, qui ne peut en aucun agir contre l'avis des municipalités. Le conseil d'école représente l'instance idéale pour assurer une synergie entre les différents acteurs. En tant que président du conseil d'école, j'ai été invité par le président de mon centre de loisirs associatifs pour savoir comment il pourrait accompagner la réforme des rythmes.
Vous avez parlé d'une école à deux vitesses, mais il y a autant de situations différentes que d'écoles. Les différences de moyens peuvent être comprises entre 1 et 50. Dans ma commune, nous ne disposons ni de cars de transport, ni de grands équipements sportifs. Mais le centre de loisirs et la commune ont su développer une vraie politique éducative malgré ces handicaps, en nous appuyant sur ce qui existait déjà.
M. Pierre Lombard. - Nous partons du constat d'une école à deux vitesses qui creuse les inégalités et accentue les déterminismes. Or, au regard de l'investissement éducatif très élevé d'une commune comme Paris, les élèves parisiens n'ont pas des résultats supérieurs aux autres. Cet exemple montre que le travail en commun pour assurer une plus grande cohérence des projets est un vecteur de réussite.
Mme Catherine Troendlé, présidente. - MM. Rei et Lombard, vos communes ne se sont pas encore engagées dans la réforme. Où en êtes-vous ?
M. Pierre Lombard. - Notre commune s'y est presque engagée puisque le sujet a été évoqué dès le conseil d'école de la rentrée 2012. Je suis directeur d'école maternelle à Cap-d'Ail dans la communauté de communes de Nice. Nous ne sommes pas passés à la réforme en 2013 pour des raisons techniques, mais nous serons prêts en 2014 sur la base du travail déjà accompli. Nous avons évité l'écueil de lister des animations, comme si le tennis et l'équitation étaient des activités plus nobles que la confection de colliers de perles et le jardinage.
M. Alain Rei. - Je suis directeur d'une école élémentaire de onze classes à Roquefort La Bédoule près de Marseille. Des discussions ont commencé très tôt avec l'ensemble des acteurs et nous serons prêts à la rentrée 2014. La scolarité, qui se termine aujourd'hui à 16h30, prendra fin à 15h30 le lundi et à 15h00 le mardi, le jeudi et le vendredi, les temps de récréation et la pause méridienne ayant été réduits. La journée libérée pour les cours aura lieu le mercredi.
M. Samuel Auxerre. - Le fait d'être passé aux nouveaux rythmes n'exclut pas une réflexion sur une possible adaptation à la rentrée 2014, comme c'est le cas dans ma région pour la commune de Cournon-d'Auvergne.
M. Alain Rei. - En conclusion, je dirais que nous sommes enthousiastes à l'idée de nous saisir de la refondation de l'école pour repenser les pratiques et les activités d'enseignement autour de l'enfant. Si parfois des rendez-vous ont été manqués, partout où la discussion a permis l'élaboration de projets pertinents, la réussite a été au rendez-vous. Ce constat conforte l'idée d'une nécessaire reconnaissance du métier de directeur d'école, dans l'intérêt des élèves, et tel est le sens du GDID.
Mme Catherine Troendlé, présidente. - Merci pour votre message que nous relaierons. Le métier de directeur d'école doit être reconnu. Je vous remercie aussi pour la sincérité de vos propos.