- Mardi 24 novembre 2009
- Mercredi 25 novembre 2009
- Loi de finances pour 2010 - Mission « Travail et emploi » - Examen du rapport pour avis
- Loi de finances pour 2010 - Mission « Santé » - Examen du rapport pour avis
- Loi de finances pour 2010 - Mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation » - Examen du rapport pour avis
- Comité de suivi des orientations de la mission commune d'information sur les départements d'outre-mer - Désignation du représentant de la commission
- Loi de finances pour 2010 - Audition de M. Benoist Apparu, secrétaire d'Etat chargé du logement et de l'urbanisme
- Jeudi 26 novembre 2009
Mardi 24 novembre 2009
- Présidence de Mme Muguette Dini, présidente -Loi de finances pour 2010 - Audition de M. Martin Hirsch, haut commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté, haut commissaire à la jeunesse
La commission a procédé à l'audition de M. Martin Hirsch, haut commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté, haut commissaire à la jeunesse.
M. Martin Hirsch, haut commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté, haut commissaire à la jeunesse, a présenté les crédits du programme 304 « Lutte contre la pauvreté, revenu de solidarité active et expérimentations sociales » qui mobilisera en 2010 un peu plus de 1,68 milliard d'euros, à comparer aux 580 millions inscrits en loi de finances initiale (LFI) pour 2009. Ces montants sont à rapprocher du coût global du RSA soit, en vitesse de croisière, 10 milliards d'euros, assumé à parité par les départements pour le « RSA socle » et par l'Etat pour le « RSA activité ».
La part « Etat » est financée grâce au redéploiement des crédits destinés à l'ancienne allocation de parent isolé (API), désormais transférée aux départements et intégrée au RSA, aux produits de la nouvelle taxe additionnelle de 1,1 % sur les revenus des placements et du patrimoine et à la subvention que l'Etat verse au fonds national des solidarités actives (FNSA) pour en assurer l'équilibre. Parallèlement, l'Etat s'est engagé à compenser les dépenses transférées aux conseils généraux sur la base des charges effectivement constatées, au titre de l'API, en fin d'exercice dans les comptes administratifs, avec une clause de rendez-vous à la fin de 2010 et de 2011. Il est heureux qu'après un large débat, les ressources nécessaires aient pu être dégagées pour garantir le financement sécurisé de cette réforme.
Les craintes exprimées sur la pérennité des recettes affectées au FNSA et au risque d'afflux massifs de demandes peuvent être apaisées :
- d'abord, la dotation de l'Etat est calculée sur la base d'hypothèses prudentes et de telle sorte que l'équilibre du fonds soit assuré ;
- ensuite, ainsi qu'on l'observe pour la contribution sociale généralisée (CSG), les produits de la contribution additionnelle sur les revenus du capital ne sont sensibles à la conjoncture que sur une petite partie de l'assiette (25 % à 30 %). Dans le contexte actuel de crise, la diminution de la valeur des placements devrait entraîner une baisse des recettes attendues de l'ordre de 300 millions à 400 millions d'euros seulement ;
- par ailleurs, pour faire face à l'afflux des nouveaux prestataires dans les caisses d'allocations familiales, 100 millions d'euros ont été consacrés au recrutement et à la formation d'environ 1 600 personnes en CDI pour traiter les demandes et de quelques personnes supplémentaires en CDD pour la mise en place du RSA.
On observe en réalité que, comme pour les autres prestations (RMI, allocation personnalisée d'autonomie [Apa],...), la montée en charge est progressive, le fonctionnement en rythme de croisière n'intervenant qu'à partir de la deuxième ou troisième année. Ainsi, sur les quatre premiers mois, le « RSA activité » a été versé à près de 400 000 nouveaux allocataires.
L'objectif du Gouvernement est que 90 % des bénéficiaires potentiels aient fait valoir leurs droits d'ici au mois de juillet 2010, soit un an après l'entrée en vigueur de la loi. Les prévisions budgétaires ont néanmoins été établies sur la base d'une entrée immédiate dans le dispositif de tous les allocataires potentiels, afin de faire face aux risques d'à-coups de la généralisation en année pleine et d'éviter des correctifs en cours d'année.
Trois modifications ont été apportées au texte initial du budget pour 2010 :
- lors de son examen par l'Assemblée nationale, le Gouvernement a présenté un amendement visant à ouvrir, sous certaines conditions, le RSA aux jeunes âgés de moins de vingt-cinq ans et sans charge de famille. Cette mesure est une réponse à l'interpellation de la commission des affaires sociales du Sénat lors de l'examen du projet de loi généralisant le RSA à l'automne dernier. Elle résulte d'un consensus trouvé dans le cadre de la commission de concertation mise en place en 2009 et réunissant des représentants des jeunes, des partenaires sociaux et à laquelle ont participé les sénateurs Virginie Klès et Christian Demuynck.
Elle permettra de régler deux situations sensibles : d'une part, celle des jeunes ayant déjà travaillé et qui, à la suite d'une période de chômage, ont épuisé leurs droits et se retrouvent sans ressources ; d'autre part, celle des jeunes qui ont démarré très tôt dans la vie active et qui perçoivent des revenus modestes sans pouvoir toucher le RSA, alors que d'autres, plus âgés, y ont droit.
L'admission au bénéfice du RSA sera conditionnée à l'exigence de deux ans d'activité au cours des trois dernières années : 160 000 jeunes devraient y satisfaire ce qui permettra de lever le tabou de la question de l'accès des moins de vingt-cinq ans à cette prestation, en l'autorisant selon des modalités contrôlées. Ce dispositif sera évalué pour apprécier l'opportunité d'une évolution des conditions d'attribution. Etant donné les marges de manoeuvre budgétaires disponibles, cette nouvelle dépense, estimée à 250 millions d'euros, sera intégralement prise en charge par le FNSA, y compris la part qui relève des conseils généraux ;
- la deuxième modification résulte d'un amendement, adopté en seconde délibération à l'Assemblée nationale, qui a pour effet de diminuer de 82,6 millions d'euros la dotation de l'Etat au FNSA ;
- enfin, il a été décidé le versement aux bénéficiaires de minima sociaux (RSA, allocation de solidarité spécifique [ASS], allocation équivalent retraite [AER]) d'une prime de Noël dont le coût global s'élève à 400 millions d'euros. Près de 340 millions concernent les seuls bénéficiaires du RSA - y compris les ex-allocataires de l'API qui percevront cette prime pour la première fois - et seront donc prélevés sur les ressources du FNSA au titre de l'exercice de 2009. Cette mesure fera l'objet d'une disposition spécifique dans la loi de finances rectificative.
M. Paul Blanc, rapporteur pour avis de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances », s'est interrogé sur les raisons des retards observés dans la montée en charge du RSA en 2009 et l'écart qui en résulte par rapport aux prévisions initiales de dépenses. N'aurait-il pas fallu que les prévisions de dépenses pour 2010 soient révisées en conséquence, celles-ci apparaissant dès lors très largement surestimées ?
Il a également souhaité savoir comment sera financée la prime de Noël car cette dépense ne devrait pouvoir théoriquement être prélevée sur le FNSA, juridiquement dédié au financement du RSA.
Concernant l'ouverture du RSA aux jeunes âgés de moins de vingt-cinq ans, il a regretté que la rédaction proposée par le Gouvernement renvoie à un décret et ne traduise pas plus clairement les intentions du Président de la République d'en limiter le bénéfice aux seuls jeunes ayant travaillé pendant vingt-quatre mois au cours des trois dernières années.
Au sujet de la montée en charge progressive du RSA, M. Martin Hirsch a d'abord fait valoir que cette relative lenteur n'est pas imputable à un quelconque retard dans l'application de la loi du 1er décembre 2008 : l'intégralité des mesures réglementaires ont été prises dans les délais, le dernier décret paru devant permettre la mise en place du contrat unique d'insertion (CUI) au 1er janvier 2010.
Mme Muguette Dini, présidente, a confirmé avoir signalé la célérité des services en la matière, dans la communication présentée à la commission sur l'application des lois.
M. Martin Hirsch a ensuite rappelé que le budget pour 2009 prévoyait initialement un excédent de 362 millions d'euros sur le FNSA. Finalement, malgré des dépenses inférieures aux prévisions et en tenant compte de la diminution prévisible des rendements attendus de la contribution additionnelle de 1,1 %, du versement de la prime de Noël aux bénéficiaires du RSA et de l'annulation de crédits adoptée à l'Assemblée nationale, cet excédent devrait s'établir à un niveau légèrement supérieur, de l'ordre de 410 millions d'euros.
Enfin, au regard du rythme de montée en charge observé pour d'autres prestations telles que l'Apa ou la CMU, celui du RSA est parfaitement dans la norme, avec 400 000 nouveaux bénéficiaires sur les quelque 1,6 million de foyers potentiellement concernés. En effet, aucune prestation n'atteint son rythme de croisière dès la première année. Il faut laisser à la population le temps d'apprivoiser la réforme, même si un effort considérable de communication a été, en l'occurrence, réalisé. Une communication plus ciblée, en passant par l'employeur, aurait sûrement été plus efficace, mais elle a été écartée au motif qu'elle aurait pu inciter les entreprises à réduire en conséquence les salaires. En revanche, il est envisagé d'y associer les bailleurs sociaux, qui pourraient prévenir des expulsions locatives en faisant valoir les droits au RSA des personnes éligibles qui n'en ont pas encore fait la demande.
Selon les dernières données mensuelles, 75 000 nouveaux bénéficiaires ont été enregistrés mais, dans le même temps, certains allocataires ont vu leur allocation suspendue parce que, peu familiarisés à cette nouvelle procédure, ils n'ont pas renvoyé leur déclaration trimestrielle de ressources. Certains sénateurs avaient souhaité que l'on puisse calculer chaque mois le montant du RSA en fonction des ressources mensuelles mais cette formule nécessiterait le recours à la télédéclaration, ce qui demeure une opération complexe.
Concernant le financement de la prime de Noël, dès lors que l'exercice n'est pas clos, il est juridiquement possible de prélever les sommes nécessaires sur le FNSA. Cela revient en fait à corriger le montant de la dotation d'Etat inscrite en début d'exercice. Le versement de cette prime constituera une mesure positive pour le pouvoir d'achat des personnes les plus démunies, en offrant un complément de revenu de 150 euros pour une personne seule, par exemple.
Pendant longtemps, on a critiqué les politiques qui visaient à rapprocher le RMI du niveau du Smic, au motif qu'elles avaient un effet désincitatif à la reprise d'une activité. Le RSA permet de sortir de cette problématique en permettant à la fois de soutenir le pouvoir d'achat des personnes disposant de revenus modestes et d'inciter au retour à l'emploi. Il subsiste toutefois des anomalies dans le dispositif que le Gouvernement souhaite corriger : auparavant, un allocataire du RMI reprenant un emploi en contrat aidé ne percevait plus le RMI, le montant de la prestation devant être versé sous forme d'aide à l'employeur. A l'inverse, une personne qui reprenait un emploi à temps partiel en contrat de droit commun pouvait bénéficier de l'intéressement à la reprise d'activité et cumuler ses revenus d'activité et son minimum social.
La loi généralisant le RSA a corrigé cette situation en maintenant le bénéfice du RSA aux personnes qui reprennent une activité en contrat aidé. En revanche, il subsiste un effet pervers dû à la réforme des droits connexes, qui ne sont plus accordés désormais en raison du statut mais en fonction des revenus. Or, certains anciens allocataires du RMI, titulaires d'un contrat aidé, bénéficiaient jusqu'à présent d'allocations logement à taux plein et de la CMU-c, du fait de leur statut d'allocataire, puisqu'ils étaient alors considérés comme tels même s'ils ne percevaient plus le RMI. Au seul titre de leurs revenus, ils ne peuvent désormais plus bénéficier de ces avantages. Pour rectifier cette anomalie qui conduit à une perte de revenus nette pour ces personnes, le Gouvernement prévoit de déposer un amendement au projet de loi de finances rectificative pour 2009, pour maintenir le bénéfice des droits connexes à leur profit.
S'agissant de l'ouverture du RSA aux jeunes, les conditions d'éligibilité liées à l'activité des potentiels bénéficiaires seront définies par décret. Il faut en effet envisager plusieurs cas de figure selon que le demandeur était salarié, exploitant agricole ou chef d'entreprise. Ce nouveau dispositif fera l'objet d'une évaluation et d'éventuelles modifications si nécessaire.
Mme Annie Jarraud-Vergnolle s'est demandé dans quelle mesure une telle catégorisation des jeunes n'est pas discriminatoire, regrettant que finalement peu de jeunes pourront en réalité bénéficier du nouveau dispositif. D'autres questions se posent sur les modalités d'application de cette mesure : la condition de vingt-quatre mois d'activité vaut-elle pour un temps plein comme pour un temps partiel ? Un dispositif d'accompagnement a-t-il été prévu afin que les jeunes ne s'installent pas durablement dans le RSA ? Enfin, les financements prévus par l'Etat sont-ils suffisants pour assurer la pérennité du dispositif, notamment pour les départements ?
M. Martin Hirsch a fait valoir que si l'on modifie les critères d'âge au profit des plus jeunes, la création d'une condition liée à l'exercice préalable d'une activité n'est pas contraire au principe constitutionnel d'égalité. L'encadrement du dispositif vise à éviter qu'un jeune demande le RSA au sortir de l'école. En réalité, les politiques mises en oeuvre par le Gouvernement permettent d'offrir un soutien à l'ensemble des jeunes :
- les jeunes ayant déjà travaillé sont éligibles au RSA ;
- ceux qui ont des difficultés d'insertion peuvent bénéficier du contrat d'insertion dans la vie sociale (Civis), pour lequel l'Etat a apporté 80 millions d'euros supplémentaires, auxquels s'ajoutent 40 millions destinés aux missions locales, chargées d'orienter les jeunes vers ce dispositif ;
- enfin, les étudiants bénéficieront d'un dixième mois de bourse.
Par ailleurs, un amendement du Gouvernement, adopté lors de l'examen du projet de loi de finances à l'Assemblée nationale, devrait permettre d'expérimenter une dotation d'autonomie ainsi qu'une allocation contractualisée d'autonomie sur de petits effectifs. Le moment venu, il pourrait être envisagé de généraliser ces deux dispositifs en opérant un redéploiement des aides diverses perçues par les familles.
Concernant les modalités de décompte de la durée d'activité requise pour être éligible au RSA, il ne faut pas forcément se référer à la nature du contrat. Le décret définira des équivalences sur la base d'une activité à temps plein sur vingt-quatre mois. Ainsi, trois années d'activité à temps partiel seraient une condition suffisante. La responsabilité de l'accompagnement reviendra aux missions locales.
Enfin, sur la compensation des dépenses des départements au titre du « RSA socle », la loi a prévu plusieurs clauses qui sécurisent le dispositif de financement et a également clairement distingué le « RSA activité » financé par l'Etat et le « RSA socle » assumé par les départements.
M. René Teulade a demandé des précisions sur la gestion des fonds de solidarité, regrettant que ces fonds un peu « fourre-tout » soient mobilisés pour financer de trop nombreuses aides. L'expérience récente de l'Apa fait craindre un transfert massif des charges vers les départements, sans compensation.
M. Martin Hirsch a regretté que la commission des finances du Sénat ait adopté un amendement réduisant les crédits du FNSA de 500 millions d'euros.
Au sujet de la compensation des dépenses transférées aux départements, il a estimé que, tirant les leçons des expériences passées, les départements ont obtenu des garanties dans la loi. De plus, le fonds de mobilisation départemental pour l'insertion (FMDI), constitué en 2005 pour compléter, à raison de 500 millions par an, les compensations versées par l'Etat au titre du RMI, sera reconduit en 2010.
Au nom d'Anne-Marie Payet, Mme Muguette Dini, présidente, s'est enquise du calendrier prévu pour l'entrée en vigueur du RSA dans les départements d'outre-mer (Dom).
M. Martin Hirsch a signalé que la mise en oeuvre anticipée du RSA dans les Dom a été proposée aux représentants de ces collectivités qui lui ont préféré le RSTA, lequel présente l'avantage d'être forfaitaire pour un coût estimé à 250 millions d'euros, soit un montant équivalent au coût de l'extension du RSA en année pleine. En outre, le député René-Paul Victoria a été nommé parlementaire en mission pour établir une évaluation comparative des deux dispositifs et permettre au Gouvernement de prendre l'ordonnance prévue par la loi avant le 1er janvier 2011.
Mme Raymonde Le Texier a dénoncé le caractère intrusif et la trop grande complexité des formulaires de demande du RSA, qui comportent par exemple des questions relatives aux sommes éventuellement placées sur un livret A. Dès lors, certains bénéficiaires potentiels renonceraient à faire valoir leurs droits. Elle a également souhaité connaître la date de mise en oeuvre effective du RSA jeunes et du dixième mois de bourse.
M. Martin Hirsch s'est voulu rassurant sur le versement effectif du dixième mois de bourse, expliquant que l'arbitrage ayant été rendu le 28 septembre, le dispositif n'a pu être intégré au budget 2010. Cette mesure fera l'objet d'une loi de finances rectificative en cours d'année après que la direction générale des universités se sera assurée que la durée effective des cours est partout de dix mois.
Concernant le formulaire, il est convenu des maladresses commises au démarrage, en particulier au sujet de l'information des candidats sur l'obligation alimentaire qui incombe à leurs parents. Un nouveau formulaire a été diffusé depuis, qui comporte en effet des questions relatives aux dépôts sur le livret A, dont le rendement est pris en compte, comme c'était le cas pour le RMI, dans les ressources du bénéficiaire. La minoration de l'allocation qui en résulte est en réalité très faible.
M. Jean Desessard a déploré un contrôle excessivement tatillon.
Mme Gisèle Printz a souhaité savoir si le fait d'être propriétaire de son logement a également une incidence sur le montant du RSA.
M. Martin Hirsch a précisé que les revenus locatifs sont comptabilisés dans les ressources si le logement est loué. S'il est habité par l'allocataire, une somme forfaitaire de 40 euros est retirée du montant de l'allocation.
A Mme Annie Jarraud-Vergnolle, qui souhaitait obtenir des précisions sur le partenariat signé avec Total, M. Martin Hirsch a indiqué que ce partenariat s'inscrit dans le cadre des actions financées par le fonds d'expérimentations pour les jeunes. L'entreprise Total, à hauteur de 50 millions d'euros, mais aussi l'union des industries et des métiers de la métallurgie (UIMM), à raison de 30 millions, contribueront à plusieurs actions en faveur de l'insertion professionnelle des jeunes (permis de conduire, aide à la création d'entreprise, etc.).
Enfin, il a précisé que le RSA jeunes devrait entrer en vigueur entre juillet et septembre 2010.
Loi de finances pour 2010 - Audition de Mme Nadine Morano, secrétaire d'Etat chargée de la famille et de la solidarité
Puis elle a procédé à l'audition de Mme Nadine Morano, secrétaire d'Etat chargée de la famille et de la solidarité.
Mme Nadine Morano, secrétaire d'Etat chargée de la famille et de la solidarité, a présenté les crédits des trois programmes dont elle a la charge : le programme 157 « Handicap et dépendance », le programme 137 « Egalité entre les hommes et les femmes » et le programme 106 « Actions en faveur des familles vulnérables ». Dans un contexte économique et budgétaire difficile, le projet de loi de finances pour 2010 atteste de la volonté du Gouvernement de soutenir les personnes les plus fragiles.
Avec un budget de 9,1 milliards d'euros, en hausse de 15,6 %, le programme 157 « Handicap et dépendance » permet la mise en oeuvre des engagements du Président de la République en faveur des personnes handicapées. L'effort global de la Nation pour la politique du handicap s'élèvera à 39 milliards en 2010.
L'allocation aux adultes handicapés (AAH) est dotée à hauteur de 6,5 milliards, soit une progression de 6,5 % par rapport à 2009, qui permet de tenir la promesse présidentielle de revaloriser le montant de cette allocation de 25 % d'ici à 2012. En 2010, la hausse sera de 4,4 % après une augmentation de 9,7 % depuis 2008 ; sur cinq ans, cela représente un effort exceptionnel de 1,4 milliard.
En outre, 2,5 milliards d'euros seront consacrés aux établissements et services d'aide par le travail (Esat) : 1,4 milliard pour financer les 117 400 places existantes ainsi que la création de 1 400 places nouvelles et 1,1 milliard accordé à ces établissements au titre des aides aux postes correspondantes.
Par ailleurs, la dotation de 14 millions d'euros que l'Etat apporte chaque année aux maisons départementales des personnes handicapées (MDPH), en sa qualité de membre du groupement d'intérêt public (Gip), est reconduite en 2010. Elle est complétée par 7,1 millions afin de compenser les postes que l'Etat n'a pu mettre à disposition. Cet effort supplémentaire représente une augmentation de 54 % des crédits inscrits en loi de finances initiale (LFI) pour 2010. En 2009, 16,5 millions ont été versés à ce titre aux MDPH en complément des crédits en provenance de la CNSA, qui ont atteint 60 millions, dont 15 en compensation des missions nouvelles qui résultent de la réforme de l'AAH et de la mise en place de la prestation de compensation pour les enfants. Mme Nadine Morano a dit travailler à l'élaboration d'une solution qui permette à la fois de garantir la participation de l'Etat au financement des MDPH et de préserver la gouvernance actuelle qui associe étroitement l'Etat, les conseils généraux, les caisses de sécurité sociale et les associations représentatives des personnes handicapées.
Pour ce qui concerne le programme 137, « Egalité entre les hommes et les femmes », des crédits de 29,5 millions d'euros, en légère hausse, permettront de mettre en oeuvre les politiques nécessaires à la reconnaissance des droits des femmes.
En matière d'égalité professionnelle, une discussion avec les partenaires sociaux, membres de la commission nationale de la négociation collective, a été engagée sur la base d'un document d'orientation définissant les axes retenus par le Gouvernement dans ce domaine. Les conclusions en sont attendues pour le 30 novembre 2009.
La politique de lutte contre les stéréotypes sera également poursuivie en partenariat avec l'éducation nationale et aussi dans le cadre de la commission « Image des femmes », qui travaille sur les représentations véhiculées par les médias.
Le volet concernant l'égalité en droit et en dignité porte prioritairement sur la mise en oeuvre du second plan interministériel de lutte contre les violences faites aux femmes (2008-2010), auquel le Gouvernement souhaite donner une nouvelle impulsion à l'occasion de la journée internationale de lutte contre les violences faites aux femmes et dans le cadre d'une détermination commune européenne.
Enfin, le programme 106 « Actions en faveur des familles vulnérables » bénéficiera de 14,6 millions d'euros, consacrés à l'accompagnement des familles dans leur rôle de parents. Ils permettront de financer des aides en faveur de la parentalité et soixante-seize maisons des adolescents, où les jeunes en difficulté trouvent une prise en charge éducative, sociale, juridique et médicale.
Par ailleurs, le soutien des familles monoparentales mobilisera encore en 2010 164,2 millions d'euros, ces crédits devant progressivement s'éteindre avec la généralisation du RSA depuis le 1er juin 2009, qui a intégré l'allocation parent isolé (API), supprimée en tant que prestation distincte.
Enfin, la protection de l'enfance et des familles bénéficiera de 228,8 millions d'euros dont 222,2 millions pour financer 190 000 mesures de protection juridique des majeurs, la subvention versée à l'agence française pour l'adoption (Afa) et la contribution de l'Etat de 2,1 millions au groupement d'intérêt public « Enfance en danger » (Giped).
M. Paul Blanc, rapporteur pour avis de la mission « Solidarité, insertion, égalité des chances », a souhaité connaître le montant des crédits manquants au titre de la compensation des personnels non mis à disposition des MDPH par l'Etat. Il a également regretté que l'amendement qu'il a présenté sur la première partie du projet de loi de finances pour exonérer les MDPH de la taxe sur les salaires n'ait pas été adopté, après avoir reçu un avis défavorable du Gouvernement.
Mme Nadine Morano s'est engagée à apporter les crédits nécessaires au bon fonctionnement des MDPH, sur la base de l'étude réalisée par la caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA). Les difficultés rencontrées par les MDPH pourraient être résolues par le dépôt d'une proposition de loi réglant notamment les problèmes liés au statut des personnels conformément aux conclusions du rapport d'information récemment présenté par Paul Blanc et Annie Jarraud-Vergnolle.
Enfin, les crédits inscrits pour 2010 ajoutés aux concours de la CNSA devraient permettre de couvrir les engagements de l'Etat vis-à-vis des MDPH. Une étude récemment engagée doit estimer leur montant.
Mme Annie Jarraud-Vergnolle a mentionné une étude de l'association des directeurs de MDPH, parue en octobre, évaluant à 34,3 millions d'euros les montants dus par l'Etat au titre des postes non mis à disposition des maisons départementales depuis leur création. Certaines ont bénéficié de la mise à disposition de fonctionnaires territoriaux supplémentaires par le conseil général, d'autres ont dû embaucher des personnels contractuels ou vacataires pour pourvoir les postes vacants. Des difficultés sont certes liées aux statuts des personnels mais les financements manquants menacent la pérennité de certaines MDPH, par exemple celle des Pyrénées-Atlantiques à laquelle l'Etat doit 1 million d'euros, que le conseil général ne sera pas en mesure de compenser par une avance.
Mme Nadine Morano a souligné la nécessité d'une étude contradictoire des besoins réels à financer qui sera menée conjointement par l'inspection générale des affaires sociales (Igas), l'inspection générale des finances (IGF) et l'inspection générale de l'administration (Iga) et dont les conclusions seront rendues dans les meilleurs délais.
M. Paul Blanc, rapporteur pour avis, a regretté la suppression, en commission mixte paritaire, de la disposition adoptée par le Sénat dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale, permettant de redéployer les excédents de trésorerie accumulés au titre de la PCH par certains départements au profit de ceux dont les dépenses ont excédé les concours de la CNSA entre 2006 et 2010.
Mme Nadine Morano a fait observer que cette mesure, susceptible de déstabiliser les budgets des départements, ne relève à son sens ni d'une loi de financement de la sécurité sociale, ni d'une loi de finances, mais pourrait faire l'objet d'une proposition de loi.
M. Paul Blanc, rapporteur pour avis, a fait valoir que cette disposition aurait néanmoins permis d'apaiser les départements.
Mme Nadine Morano s'est dite déterminée à prendre les mesures qui s'imposent pour mettre en ordre de marche les MDPH sur l'ensemble du territoire. Sur la base des constats et des conclusions du rapport sénatorial et de l'étude demandée, une concertation sera engagée sur ce sujet, qui pourrait aboutir à une proposition de loi à examiner au début de 2010.
M. Paul Blanc, rapporteur pour avis, a émis le voeu que l'Afa, constituée sous la forme d'un Gip, ne connaisse pas les mêmes difficultés que les MDPH. Puis il a souhaité connaître les raisons du retard pris dans la mise en oeuvre de la réforme de l'allocation aux adultes handicapés (AAH) ainsi que la date de son application effective.
Concernant l'examen systématique de la reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé lors de toute demande ou renouvellement d'AAH, Mme Nadine Morano a rappelé qu'une mission de préfiguration a été confiée à plusieurs experts sur les critères qui devront être retenus pour évaluer l'employabilité des bénéficiaires de l'AAH, ce rapport devant être remis le 28 novembre prochain.
Puis M. Paul Blanc, rapporteur pour avis, a signalé l'apparition de problèmes entre l'association de gestion du fonds pour l'insertion professionnelle des handicapés (Agefiph) et les Cap emploi qui ont été exclus de certains appels à projet concernant l'accompagnement vers l'emploi de personnes handicapées en capacité de travailler. Ces organismes ont pourtant démontré leur compétence, avec des résultats exemplaires en matière d'insertion professionnelle de ces publics spécifiques, et leur rôle dans ce domaine a été consacré par la loi. Dès lors, quel avenir l'Etat entend-il leur réserver alors que l'Agefiph a tendance à recourir, plus qu'auparavant, aux organismes de placement privés tels qu'Adecco, qui n'offrent pourtant pas les mêmes garanties de compétences que les Cap emploi ?
Mme Nadine Morano s'est défendue de remettre en cause l'action des Cap emploi, affirmant au contraire son intention d'en renforcer le rôle. Deux défis majeurs doivent être relevés pour réduire le taux de chômage des personnes handicapées qui s'élève à 19,3 %, soit le double du taux de chômage global :
- améliorer la formation des personnes handicapées, 83 % ayant un niveau inférieur ou égal au BEP. Cela suppose une réflexion de fond sur les conditions d'orientation des jeunes handicapés qui ont tendance à s'autocensurer et à privilégier les études courtes ;
- mobiliser les entreprises en faveur de l'insertion professionnelle des personnes handicapées. Une charte a été signée avec les entreprises du Cac 40 qui associe notamment Pôle emploi et le réseau Cap emploi, mais aussi les centres d'information et d'orientation qui devront diffuser auprès des jeunes des informations relatives aux carrières qui s'offrent aux personnes handicapées.
Les efforts entrepris commencent d'ailleurs à porter leurs fruits, puisque 40 % des entreprises assujetties ont atteint le seuil de 6 % de salariés handicapés requis par la loi et que le taux de recrutement avoisine 4,4 % dans la fonction publique. Les ministères de la solidarité et de la défense font même figure d'exemple avec un taux d'emploi de travailleurs handicapés supérieur à 6 %. Les actions favorisant le maintien des personnes handicapées dans l'emploi sont également essentielles, certaines aides pouvant être mobilisées pour adapter le poste de travail de personnes qui ont été touchées par un accident de la vie. Enfin, il faut souligner le succès de l'initiative du Crédit agricole qui a lancé un « tour de France des compétences » et de la campagne en faveur de l'emploi des personnes handicapées, qui permettent de changer le regard de la société sur le handicap.
Après avoir rappelé que c'est à son initiative que le Crédit agricole a pu recruter plus de 1 200 personnes de niveau bac + 2 après la mise en place d'une action de formation spécifique, M. Paul Blanc, rapporteur pour avis, a souligné l'importance de la formation, parfois trop négligée dans les prestations ou aides proposées par l'Agefiph, tandis que les régions, qui en ont la compétence, n'offrent pas suffisamment de programmes adaptés aux personnes handicapées. Il a souhaité que l'Etat réaffirme le rôle des Cap emploi et de l'Agefiph vis-à-vis des personnes handicapées. Enfin, il a salué les progrès réalisés par le fonds pour l'insertion des personnes handicapées dans la fonction publique (FIPHFP), déplorant en revanche les résultats plus mitigés de l'Agefiph.
Par ailleurs, il s'est enquis des suites que le Gouvernement entend donner aux recours formulés par plusieurs associations contre deux décrets se rapportant à la loi du 5 mars 2007 sur la protection juridique des majeurs : l'un encadrant l'exercice libéral de la profession de mandataire judiciaire, l'autre fixant les sommes susceptibles d'être prélevées sur les ressources de la personne protégée.
Pour ces deux décrets du 31 décembre 2008, Mme Nadine Morano a précisé que :
- le premier, relatif à l'exercice à titre individuel de l'activité de mandataire judiciaire, devrait être maintenu, le Gouvernement n'étant aucunement lié pour fixer la durée de l'agrément et encadrer le niveau d'activité de ces mandataires. Cela n'empêche néanmoins pas les préfets ou les directions départementales de l'action sanitaire et sociale (Ddass) d'effectuer des contrôles tandis que, comme c'est le cas dans l'ensemble du champ social et médico-social, les organismes gestionnaires de services tutélaires sont soumis à une évaluation régulière ;
- le second, relatif aux modalités de participation des personnes protégées au financement des mesures de protection, appelle en revanche des modifications afin que le montant de la participation financière des personnes protégées prévu par le texte soit cohérent avec les charges réellement supportées par le mandataire judiciaire, ce qui suppose une révision du barème de la participation.
M. Paul Blanc, rapporteur pour avis, s'est inquiété de l'avenir que l'Etat entend réserver au fonds national de protection de l'enfance (FNPE) dont la création était prévue par la loi du 5 mars 2007.
Mme Nadine Morano a expliqué que la mise en place du FNPE pose des problèmes juridiques, la Cnaf n'étant pas habilitée à gérer ce fonds. Toutefois, dans le respect des dispositions de la loi du 5 mars 2007 et à la suite de la décision du Président de la République d'organiser, au premier semestre de 2010, des états généraux de la protection de l'enfance, elle a souhaité que le fonds soit abondé et mis en place, en l'orientant davantage vers le soutien de l'enfance fragilisée, en partenariat avec les départements et les associations.
A Mme Gisèle Printz qui demandait que les entreprises qui n'embauchent pas de travailleurs handicapés soient davantage sanctionnées, M. Paul Blanc, rapporteur pour avis, a indiqué que la loi Handicap a déjà renforcé les sanctions applicables.
Mme Gisèle Printz a également déploré les conditions dans lesquelles les femmes victimes de violence sont accueillies dans les commissariats. Enfin, elle s'est inquiétée des difficultés persistantes d'accès aux lieux publics pour les personnes handicapées.
M. Paul Blanc, rapporteur pour avis, a rappelé que la date butoir pour la mise en accessibilité a été fixée à 2015.
Mme Nadine Morano a confirmé que les entreprises assujetties à l'obligation d'emploi de travailleurs handicapés (OETH) mais qui ne respectent pas l'objectif de 6 % fixé par la loi doivent s'acquitter d'une cotisation à l'Agefiph, qui sera augmentée à partir du 1er janvier 2010 pour celles qui n'ont encore pris aucune mesure. Les entreprises peuvent en effet s'acquitter de l'OETH de différentes manières, par l'embauche de stagiaires dans la limite de 2 % de leurs effectifs ou par le recours à la sous-traitance auprès des Esat, par exemple.
Sur l'accessibilité, l'échéance a bien été fixée à 2015 pour la mise en conformité. La création annoncée d'un observatoire de l'accessibilité pour accompagner les collectivités concernées devrait permettre de respecter cette date. Ce nouvel organisme assurera une mission de conseil et d'audit ; il formulera, si nécessaire, des recommandations de bonnes pratiques, en particulier pour que tous les types de handicap soient pris en compte, y compris le handicap sensoriel, souvent oublié. Les bailleurs sociaux et les services de transport seront associés à cette démarche.
Pour les femmes victimes de violence, la mise en oeuvre du plan triennal précédemment engagé sera poursuivie. Dans les tout prochains jours, un clip de prévention sera diffusé, mettant en scène des enfants, les violences étant malheureusement le plus souvent commises en leur présence, ce qui accroît le risque qu'ils reproduisent ce genre de comportement une fois adultes.
Des efforts ont été accomplis pour apporter une aide aux femmes victimes de violences, en particulier lorsqu'elles sont accueillies dans un commissariat. Plus de cent cinquante points d'accueil ont déjà été mis en place dans les commissariats dans le cadre du plan interministériel de prévention de la délinquance et il est prévu d'en créer cent supplémentaires. Outre le renforcement de la formation des agents, il est, à son sens, nécessaire que la violence psychologique soit reconnue par la loi.
Mme Annie Jarraud-Vergnolle s'est inquiétée des disparités constatées d'un département à l'autre, la part des financements accordés par l'Etat aux MDPH pouvant varier de 12 % à 67 %. Elle a également souhaité savoir à quelle date sera mis en place le comité interministériel du handicap, créé par un décret du 6 novembre 2009, et quelles seront ses missions. Puis elle s'est interrogée sur la participation du FIPHFP au financement du réseau Cap emploi et des centres de formation des personnels du secteur public. Enfin, elle a demandé si le dispositif d'apprentissage spécialisé proposé, pour une durée illimitée en fonction de leurs besoins, aux jeunes handicapés mentaux sera maintenu, voire développé, et si des mesures spécifiques seront prises en faveur de l'insertion professionnelle, l'accompagnement et le maintien dans l'emploi des personnes atteintes d'un handicap psychique.
Mme Nadine Morano a indiqué avoir souhaité la création d'un comité interministériel du handicap en remplacement du délégué interministériel aux personnes handicapées afin d'impliquer davantage les acteurs et associations représentatives et assurer une plus grande transversalité des politiques menées. Cette transversalité est nécessaire pour traiter des sujets - formation, accompagnement des personnes atteintes d'un handicap psychique,... - qui impliquent plusieurs ministères et pour lesquels le ministère chargé du handicap ne peut agir seul. Le comité devrait se réunir avant la fin de l'année, peut-être même le 3 décembre si la date est confirmée.
Concernant le développement de l'apprentissage au profit des personnes atteintes d'un handicap mental, elle s'est dite favorable à la prolongation de la durée des études et des formations si nécessaire. En réponse à Annie Jarraud-Vergnolle, qui demandait si les contrats signés pour deux ans pourraient être prolongés d'une année, elle a répondu par l'affirmative, ajoutant que la limite d'âge pour accéder à ce type de contrat est supprimée depuis le 1er janvier 2009. De façon générale, elle a souhaité que des mesures soient prises en partenariat avec les ministères de l'éducation nationale et de l'université pour favoriser l'accès des personnes handicapées à des études supérieures plus longues, afin de répondre aux demandes des entreprises.
A ce sujet, M. Paul Blanc, rapporteur pour avis, a évoqué le développement des expériences dites « Esat hors les murs » qui permettent aux travailleurs handicapés d'exercer une activité en milieu ordinaire tout en continuant à bénéficier d'un accompagnement professionnel et médico-social.
Mme Raymonde Le Texier s'est dite frappée de constater que, par un phénomène d'autocensure, les personnes handicapées s'interdisent de suivre des formations longues. Cette attitude résulte, à son sens, des difficultés persistantes qu'elles rencontrent pour accéder à l'école ordinaire. Elle a également souhaité que les familles d'enfants touchés par une infirmité motrice cérébrale, ou même par une simple dyslexie, puissent bénéficier d'un aménagement des conditions de passage des examens (temps supplémentaire ou accompagnement).
Concernant l'égalité professionnelle et la lutte contre la violence faite aux femmes, il est regrettable que les crédits qui y sont consacrés demeurent faibles et soient même, pour certains, en baisse. Il reste pourtant beaucoup à faire pour permettre qu'à niveau de qualification égal, les femmes perçoivent des rémunérations équivalentes à celles des hommes et puissent suivre les mêmes carrières. Redoutant que la génération actuelle soit encore sacrifiée, sans pouvoir obtenir gain de cause, elle a appelé de ses voeux des mesures d'ampleur dans ce domaine. Sur cet aspect des choses, la disposition récemment adoptée dans le projet de loi de financement pour 2010, qui permet d'accorder aux pères le bénéfice de la seconde année de majoration de durée d'assurance liée à la présence d'enfant, constitue une régression pour les mères.
Enfin, elle a souhaité que des solutions de logement soient proposées aux femmes victimes de violences conjugales, qui sont souvent contraintes de quitter leur domicile pour se protéger de leur conjoint. Aux solutions actuelles d'hébergement en foyer, peu satisfaisantes, il serait préférable de leur offrir celle d'un logement autonome, situé si possible près des lieux de vie des enfants et du lieu de travail. D'autres pays ne prévoient-ils pas des dispositions légales d'éloignement du conjoint violent ?
Mme Muguette Dini, présidente, s'est dite scandalisée que les femmes victimes de violences soient contraintes de quitter le domicile familial pour se protéger de leur conjoint alors que ce dernier devrait faire l'objet d'une mesure d'éloignement.
Mme Janine Rozier a indiqué que la loi sur le divorce prévoit qu'en cas de violence, le conjoint qui en est victime conserve la jouissance du logement familial - le cas échéant avec les enfants -, le conjoint violent devant faire l'objet d'une mesure d'éloignement très rapide.
Mme Muguette Dini, présidente, a toutefois fait valoir que les mesures d'éloignement du conjoint violent sont très difficiles à obtenir dans des délais rapides, ce qui contraint la femme victime à quitter son domicile pour se protéger.
En réponse aux interrogations sur la scolarisation des enfants handicapés, Mme Nadine Morano a souligné les progrès réalisés : près de 180 000 enfants ont été accueillis en milieu ordinaire à la rentrée de 2009, soit 30 % de plus qu'en 2005, ce qui représente un effort financier de l'Etat de l'ordre de 540 millions d'euros. En outre, la présence des élèves handicapés contribue à changer le regard sur le handicap, en particulier celui de leurs camarades de classe.
S'agissant de l'égalité professionnelle, elle a déploré que subsistent des écarts moyens de salaires qui atteignent jusqu'à 27 % et que les lois ne soient pas appliquées. Elle s'est dite favorable à la mise en oeuvre de mesures plus coercitives pour que les objectifs fixés au niveau européen soient respectés et que les entreprises en défaut transmettent les rapports de situation comparée qui leur ont été demandés et signent les accords requis sur la parité et l'égalité salariale. Cela suppose une simplification des modalités de négociation des accords au niveau des entreprises, les sujets de la parité et de l'égalité salariale pouvant faire l'objet d'une négociation commune.
Il est évident que les inégalités professionnelles trouvent leur origine dans les stéréotypes véhiculés dès le plus jeune âge, en particulier au travers des activités et des jeux proposés aux enfants. L'orientation professionnelle devrait être définie sur la base des compétences, et non en fonction du sexe des personnes : il faut que les jeunes femmes soient davantage incitées à embrasser des carrières d'ingénieur, par exemple, plutôt que de s'orienter vers les professions médico-sociales si cela ne correspond pas à leur goût. Cela suppose notamment une modification des représentations figurant sur les emballages des jouets et l'organisation des rayons des supermarchés qui séparent ceux réservés aux filles et aux garçons. Une plus grande mixité dans ce domaine aurait aussi, par la suite, une influence sur la répartition des tâches ménagères au sein du couple, les femmes continuant d'y consacrer beaucoup plus de temps que les hommes. Enfin, les partenaires sociaux rendront prochainement leur avis sur le document d'orientation sur l'égalité salariale. Pour sa part, elle s'est déclarée favorable à des mesures coercitives telles que les quotas dans les conseils d'administration.
S'agissant des actions de lutte contre les violences faites aux femmes, la France fera l'expérimentation prochaine de deux dispositifs déjà en vigueur en Espagne :
- le bracelet électronique qui permet de contrôler l'éloignement effectif du conjoint violent, une alerte étant donnée dès lors qu'il s'approche du domicile familial ;
- un téléphone d'urgence social équipé d'un moyen d'enregistrement et d'un GPS qui associe un dispositif d'alerte et d'accompagnement, la personne victime de violences étant appelée régulièrement - au moins deux fois par mois - par le centre d'appel.
En Espagne toujours, il existe également une aide au déménagement, qui permet à la femme victime de violences de changer de ville ou de région pour reconstruire sa vie loin de son ex-conjoint.
M. André Lardeux a mentionné le rapport critique de la Cour des comptes sur le dispositif national de protection de l'enfance. Quelles suites le Gouvernement entend-il donner à ces observations qui appellent, semble-t-il, des mesures réglementaires ?
Il s'est également interrogé sur les raisons des dysfonctionnements observés sur la prise en charge des appels reçus au numéro d'urgence 119 pour l'enfance en danger.
Puis, évoquant un récent arrêt du tribunal d'Angers, il a souhaité connaître la position du Gouvernement sur l'accouchement sous X, la France restant le dernier pays en Europe à avoir maintenu ce principe dans sa législation. Or, la situation qui en résulte est, humainement, difficilement acceptable pour les enfants concernés.
Enfin, il s'est ému des conclusions du tribunal administratif de Besançon qui, en permettant à un couple homosexuel d'adopter un enfant, a dans le même temps admis le principe d'un droit à l'enfant, qui n'est pas en accord avec les conventions internationales signées par la France sur les droits de l'enfant.
Mme Nadine Morano a rappelé que le service national d'accueil téléphonique de l'enfance en danger (Snated) prend chaque année en charge plus de 655 000 appels. Les missions de ce service ont vocation à être élargies aux familles en détresse, pour répondre aux cas, de plus en plus nombreux, d'infanticides et d'homicides conjugaux, ces derniers s'étant élevé à 157 l'an dernier, soit près de 20 % des meurtres commis en France.
S'agissant des appels reçus au 119, les observations formulées par la Cour des comptes seront prises en compte et des améliorations seront apportées, en particulier à la formation des personnels. Une campagne de communication sera d'ailleurs lancée pour que le 119 soit aussi connu que le numéro des pompiers ou du Samu et qu'il permette à des parents ou enfants en détresse psychique de trouver un soutien plutôt que de passer à l'acte.
Concernant l'accouchement sous X, elle a marqué sa préférence pour un accouchement protégé, permettant de maintenir la possibilité de l'abandon, sans lien de filiation, avec un accompagnement renforcé de la mère. Mais il faut parallèlement renforcer le droit existant des enfants d'accéder à leurs origines personnelles en s'appuyant sur le conseil national d'accès aux origines des personnes (Cnaop), en veillant à la conservation des données médicales (groupe sanguin, pathologies familiales...) et en permettant, le cas échéant, la levée du secret médical. Dans le cadre de l'accouchement protégé, l'enfant aura le droit de connaître ses origines, ce qui suppose une préparation psychologique de la mère à l'éventualité que son enfant veuille, un jour, entrer en contact avec elle, sachant que celui-ci ne pourrait alors revendiquer une filiation juridique et les droits qui y sont liés.
Concernant l'arrêt qui a été rendu sur l'adoption, elle a rappelé les conclusions du rapport de la mission d'information, dont elle était alors membre, conduite par l'Assemblée nationale en 2006, sur les droits de l'enfant et de la famille : un enfant a le droit de grandir avec un père et une mère. La logique aurait alors voulu que la possibilité d'adopter accordée aux personnes célibataires ait été remise en cause, d'autant que, en l'absence d'information sur l'orientation sexuelle des candidats à l'adoption, chacun sait qu'en réalité, de nombreux couples homosexuels adoptent ainsi des enfants. Ce sujet mérite un débat sans tabou, portant sur l'ensemble des questions suivantes : quel est l'intérêt supérieur de l'enfant ? Quel est le projet parental ? Quelle est la situation réelle des familles ?
Selon l'institut national des études démographiques (Ined), près de 3,5 millions d'enfants vivent dans des familles monoparentales, 2,5 millions dans une famille recomposée et au moins 30 000 sont élevés par deux adultes de même sexe. Dès lors que ces situations existent, la société ne doit-elle pas se préoccuper du statut juridique de ces enfants et de leur protection ? Il faut alors se poser la question de l'opportunité d'ouvrir aux couples homosexuels l'adoption simple. La même interrogation concerne le statut juridique des enfants nés de mères françaises, inséminées en Belgique, et qui sont élevés ensuite par leur mère et sa compagne. Dans la mesure où la loi française ne reconnaît pas cette situation, sans pour autant l'interdire, cela soulève le problème de la sécurité juridique et du statut de l'enfant.
M. Paul Blanc, rapporteur pour avis, a rappelé que la disposition permettant aux personnes célibataires d'adopter à été votée dans un contexte émotionnel particulier, celui du décès accidentel des parents de cinq enfants que souhaitait adopter leur tante, célibataire.
M. Louis Pinton s'est dit pour sa part réservé sur l'opportunité de légiférer pour résoudre des problèmes particuliers, préférant que la loi fixe les grands principes sans porter de jugement de valeur sur certaines situations particulières.
Mme Muguette Dini, présidente, a estimé que ce sujet pourrait faire l'objet d'un débat plus approfondi en commission.
Mme Nadine Morano a ensuite ajouté que, concernant les violences faites aux femmes, l'éloignement du conjoint violent devrait également concerner les conjoints pacsés et concubins.
Mme Muguette Dini, présidente, a fait observer que le principe de l'accouchement sous X pose également la question de l'anonymat des dons de gamètes. Enfin, il faut savoir que de nombreuses jeunes femmes maghrébines ont recours à l'accouchement sous X, contre leur gré, pour se protéger des réactions de leurs familles ; il serait préoccupant que le droit d'accès aux origines personnelles de l'enfant, dix-huit ans après, ne vienne perturber la vie familiale de ces femmes avec d'éventuelles conséquences dramatiques.
M. Alain Vasselle s'est enquis des risques encourus par les collectivités en cas de retard dans l'établissement de leur diagnostic d'accessibilité, qui doit être réalisé avant le 31 décembre prochain.
Puis il a signalé une nouvelle fois, pour la sixième année consécutive, le problème posé par l'élection de personnes handicapées mentales à la présidence des conseils de vie sociale de certains foyers occupationnels résultant de la règle suivant laquelle cette présidence doit être assurée par un résident du foyer. Bien que des dispositions réglementaires et une circulaire prohibent ces pratiques, l'union nationale des associations de parents et des amis des personnes handicapées mentales (Unapei) et l'association départementale des associations de parents et amis des personnes handicapées mentales (Adapei) de l'Oise persistent à le faire, ce qui pose évidemment des difficultés considérables dans le fonctionnement de ces conseils.
Par ailleurs, le reste à vivre, qui correspond à un montant équivalent à 30 % de l'AAH, est insuffisant au regard de l'augmentation continue de la contribution demandée par les conseils généraux pour le prix de journée, qui atteint 10 à 11 euros désormais. Si l'on ajoute l'acquittement de la cotisation maladie complémentaire, les charges fixes s'élèvent à 350 euros par mois. Le reste à vivre est alors souvent insuffisant pour couvrir les frais d'habillement, souvent élevés pour les personnes handicapées mentales en raison de leur comportement, les frais de transport, etc.
Enfin, il a dénoncé les pratiques de certains établissements qui ne reversent une fraction de l'allocation compensatrice pour tierce personne (ACTP) à la personne handicapée que lorsque celle-ci s'absente pour une durée minimale de huit jours. Il en résulte que les week-ends en famille ne sont pas praticables, ou diversement selon les règles en vigueur dans les départements. Ces mesures, qui empêchent les personnes handicapées de voir régulièrement leurs familles, relèvent de la maltraitance telle que l'avait dénoncée, voici six ans, le rapport de la commission sénatoriale d'enquête sur la maltraitance envers les personnes handicapées dont les préconisations n'ont toujours pas été suivies d'effet.
Concernant l'établissement du diagnostic d'accessibilité, Mme Nadine Morano a rappelé que l'observatoire récemment mis en place a vocation à accompagner les collectivités concernées pour tenir l'échéance de 2015.
Sur l'élection des résidents à la tête des conseils de vie sociale des établissements de personnes handicapées mentales, Mme Nadine Morano a indiqué qu'elle veillerait à ce que ces pratiques, contraires aux textes, cessent.
Au sujet du reste à vivre, elle a rappelé qu'à l'initiative de la commission des affaires sociales du Sénat, un article du projet de loi de financement pour 2010 vise à neutraliser les effets de l'augmentation du forfait hospitalier journalier.
Enfin, pour combattre les pratiques illégales de certains établissements visant à restreindre les séjours des personnes handicapées dans leur famille, elle a promis de transmettre une nouvelle fois des recommandations claires aux établissements. Ce genre d'attitude montre seulement qu'ils ne conçoivent pas leur budget avec assez de précision pour prendre en compte les courts séjours en famille. En acceptant l'invitation que lui faisait M. Alain Vasselle, elle a pris l'engagement de se rendre dès que possible dans l'Oise, afin de constater avec lui la réalité de cette situation.
Mercredi 25 novembre 2009
- Présidence de Mme Muguette Dini, présidente -Loi de finances pour 2010 - Mission « Travail et emploi » - Examen du rapport pour avis
La commission a tout d'abord procédé à l'examen du rapport pour avis de M. Alain Gournac sur le projet de loi de finances pour 2010 (mission « Travail et emploi » et les articles 61, 62 et 63 rattachés).
M. Alain Gournac, rapporteur pour avis, a souligné que le chômage a progressé de 25 % en un an, sous l'effet de la grave récession qu'a connue l'économie française. Si l'ampleur des problèmes à résoudre invite chacun à la modestie, elle ne doit pas conduire à céder au pessimisme : la France a en effet mieux résisté à la crise que d'autres pays développés et on discerne quelques signes encourageants de reprise.
En 2009, les pouvoirs publics ont mobilisé tous les outils de la politique de l'emploi pour atténuer la montée du chômage ; il leur faut poursuivre cet effort et préparer la sortie de crise, en veillant tout particulièrement à éviter que les personnes qui ont perdu leur emploi ne soient victimes du chômage de longue durée.
Les crédits de la mission s'élèvent à 11,2 milliards d'euros, auxquels il faut ajouter, si l'on veut avoir une vision globale de l'effort consenti en faveur de l'emploi, 1,4 milliard d'euros de crédits figurant dans la mission « Plan de relance de l'économie », 11 milliards d'euros de dépenses fiscales et près de 30 milliards d'euros d'exonérations de cotisations sociales. L'ensemble des moyens affectés au travail et à l'emploi est donc supérieur à 52 milliards d'euros.
Ces moyens servent d'abord à financer le service public de l'emploi, qui est actuellement très sollicité.
Pôle emploi, l'opérateur issu de la fusion de l'ANPE et des Assedic, a eu du mal à faire face, pendant le premier semestre de l'année, à l'afflux des demandeurs d'emploi, qui est intervenu à un moment où il était dans une phase de réorganisation interne. Il a cependant réussi à surmonter ces difficultés en recrutant, en cours d'année, plus de 2 800 personnes qui sont venues renforcer ses équipes, et en lançant un appel d'offres pour confier le placement de certains demandeurs d'emploi à des opérateurs privés.
La fusion s'est poursuivie, sur le plan opérationnel, à un rythme soutenu : le nombre de sites mixtes, rassemblant les services de l'ANPE et des Assedic, devrait atteindre 850 à la fin de l'année ; 16 000 agents ont reçu une formation pour devenir plus polyvalents ; enfin, la négociation de la nouvelle convention collective qui va s'appliquer aux salariés de droit privé de Pôle emploi a été menée à son terme. Il faut saluer l'ampleur du travail accompli par la direction et les salariés de Pôle emploi et souligner la pertinence du choix de la fusion. En 2010, la subvention de l'Etat à Pôle emploi s'élèvera à 1,36 milliard d'euros, complétée par une dotation de 3 milliards versée par l'assurance chômage.
La situation financière de l'Unedic s'est dégradée du fait de la crise : l'augmentation du nombre de demandeurs d'emploi indemnisés combinée à la baisse des recettes a produit un déficit de 900 millions en 2009. La dette cumulée par l'assurance chômage s'élève désormais à 5,9 milliards d'euros et devrait atteindre 9,5 milliards l'an prochain.
Puis M. Alain Gournac, rapporteur pour avis, a expliqué que le Gouvernement a mobilisé une grande variété d'outils pour lutter contre le chômage :
- le recours au chômage partiel a été facilité : le nombre d'heures indemnisables a été porté à 1 000 heures dans l'année et leur indemnisation a été améliorée ; les dépenses d'indemnisation ont, par conséquent, fortement augmenté et absorbé 300 millions d'euros de crédits ; pour 2010, une dotation plus modeste - 60 millions d'euros - est prévue ; il serait d'ailleurs souhaitable que le Gouvernement précise quelles sont ses intentions dans le cas où cette dotation se révèlerait insuffisante ;
- le Gouvernement s'est donné pour objectif la conclusion, en 2009, de 380 000 contrats aidés dans le secteur non marchand et de 100 000 contrats dans le secteur marchand ; en 2010, la dotation inscrite dans le projet de loi de finances, un peu supérieure à 1 milliard d'euros, permettra de financer 360 000 contrats uniques d'insertion (CUI) dans le secteur non marchand et 50 000 dans le secteur marchand ;
- le nombre de conventions de reclassement personnalisé (CRP) et de contrats de transition professionnelle (CTP), qui visent à sécuriser les parcours professionnels, a été fortement accru ; créé à l'origine, à titre expérimental, dans seulement six bassins d'emploi, le CTP s'appliquera prochainement dans quarante bassins d'emploi touchés par la crise ; plus de 110 millions d'euros sont inscrits dans le projet de budget pour financer ces dispositifs en 2010 ;
- dans le cadre du « plan d'urgence pour l'emploi des jeunes », des mesures ont été prises pour soutenir les formations en alternance : l'embauche d'un jeune en contrat de professionnalisation ou en apprentissage ouvre droit à une prime et un dispositif « zéro charge » s'applique en cas de recrutement d'un apprenti dans une entreprise de plus de dix salariés ; plus de 200 millions d'euros sont inscrits sur les crédits de la mission « plan de relance de l'économie » pour financer ces mesures en 2010.
Le Gouvernement a su, en revanche, résister à la tentation d'avoir recours plus largement aux dispositifs de préretraites, qui ne sont ni efficaces pour lutter contre le chômage, ni compatibles avec la situation financière des caisses de retraite. Face aux difficultés rencontrées par les seniors pour retrouver un emploi, il a cependant rétabli, à titre exceptionnel, l'allocation équivalent retraite (AER) en 2009.
A l'avenir, il est nécessaire que de nouvelles pistes soient explorées, par exemple dans le domaine du télétravail, des groupements d'employeurs ou du prêt de main-d'oeuvre, afin qu'aucun gisement de créations d'emplois ne soit négligé.
M. Alain Gournac, rapporteur pour avis, a ensuite rappelé que la politique de l'emploi repose également sur de nombreuses mesures d'exonérations fiscales et sociales : d'abord, l'allègement général de cotisations sociales, dont le montant devrait être supérieur à 22 milliards d'euros l'an prochain ; ensuite l'exonération applicable aux heures supplémentaires qui a coûté, en 2008, environ 3 milliards d'euros sachant que le nombre d'heures supplémentaires devrait diminuer en 2009 sous l'effet de la récession ; enfin, diverses mesures d'exonération applicables à certains territoires ou à certains secteurs. Sur ce point, l'année 2009 a été marquée par la décision de ramener à 5,5 % le taux de TVA dans la restauration, ce qui occasionne un manque à gagner pour les finances publiques de 2,8 milliards d'euros. En contrepartie, l'aide à l'emploi qui avait été instaurée en 2004 a été supprimée et la profession a conclu un « contrat d'avenir » avec l'Etat, qui prévoit des baisses de prix, des investissements, 40 000 recrutements entre 2009 et 2011 et l'ouverture de négociations sur les salaires, la protection sociale et la formation.
Evidemment, il ne serait pas acceptable que les efforts considérables déployés au niveau européen pour obtenir cette baisse de la TVA ne se traduisent par aucune avancée significative en matière de prix ou de création d'emplois. S'il est encore trop tôt pour dresser le bilan définitif d'une mesure qui est entrée en vigueur au mois de juillet, il importe de rester vigilant et exigeant à l'égard des restaurateurs.
Par ailleurs, dans le cadre du plan de relance, une mesure exceptionnelle d'aide aux TPE a été décidée : les entreprises de moins de dix salariés perçoivent ainsi une aide en cas d'embauche d'un salarié, dont le montant est maximal pour un salarié payé au Smic (185 euros) puis décroît pour s'annuler à 1,6 Smic. En septembre, 500 000 embauches avaient déjà donné lieu au versement de cette aide, ce qui a incité le Gouvernement à prolonger la mesure jusqu'au 30 juin 2010.
Enfin, deux dispositifs d'aide aux créateurs d'entreprise - l'encouragement au développement d'entreprises nouvelles (Eden) et les chèques conseils - ont fusionné, en 2009, pour créer le « nouvel accompagnement pour la création et la reprise d'entreprise » (Nacre). Le Nacre, auxquels sont consacrés 40 millions d'euros de crédits, permet aux créateurs d'entreprise de bénéficier d'un accompagnement au moment du lancement de leur projet et dans les trois années qui suivent et donne également accès à des prêts à taux zéro.
Pour conclure, M. Alain Gournac, rapporteur pour avis, a présenté les trois articles rattachés aux crédits de la mission :
- l'article 61 majore, en 2009, le taux maximal de prise en charge des CUI conclus par un atelier ou un chantier d'insertion, afin de le porter de 95 % à 105 % du Smic ; cette mesure est de nature à aider les chantiers et ateliers d'insertion à traverser la crise, dans l'attente de la réforme de leur financement qui devrait intervenir en 2011 ;
- l'article 62 précise qui peut bénéficier de mesures d'aide à la création d'entreprise, en indiquant qu'il s'agit de « personnes éloignées de l'emploi », point sur lequel il proposera un amendement au vote de la commission ;
- l'article 63, enfin, étend aux régies de quartier l'agrément prévu pour les associations de services à la personne, ce qui leur permettrait de bénéficier de dispositions fiscales et sociales avantageuses.
Mme Janine Rozier s'est émue du grand nombre de dispositifs et de contrats existants dans le domaine de l'emploi. Elle s'est par ailleurs interrogée sur l'efficacité des services chargés d'aider les demandeurs d'emploi, si l'on en juge par les résultats très positifs obtenus par certaines émissions de radio ou de télévision qui proposent, avec succès, de faciliter la rencontre entre employeurs et demandeurs d'emploi. Elle a ensuite déploré que de trop nombreux jeunes enchaînent des stages qui ne débouchent sur aucun emploi, alors que les entreprises du bâtiment peinent à recruter, en particulier pour les travaux de second oeuvre.
Mme Isabelle Debré a regretté la diabolisation du télétravail alors qu'il peut être utile, par exemple pour permettre à des personnes à mobilité réduite d'exercer une activité professionnelle. Elle a ensuite indiqué qu'elle accueille en stage deux ou trois jeunes, chaque année, et suggéré à tous ses collègues d'en faire de même.
Sans nier l'utilité des actions mises en oeuvre pour l'emploi, M. Gérard Dériot s'est demandé s'il ne serait finalement pas plus efficace de diminuer les charges des entreprises plutôt que de continuer à financer tous ces dispositifs. Par ailleurs, si les formations en alternance sont un moyen efficace de former les futurs salariés, elles le sont aussi pour les futurs chefs d'entreprise, dans la mesure où le jeune apprenti peut se familiariser avec les problèmes de gestion au contact de son maître d'apprentissage.
Mme Raymonde Le Texier a fait part de son admiration devant la capacité du rapporteur à présenter un rapport optimiste alors que la situation est si dramatique. Elle a rappelé que les parlementaires de son groupe avaient émis des réserves concernant le calendrier de mise en oeuvre de la fusion de l'ANPE et des Assedic, qui leur paraissait trop précipité. Or, les agents de Pôle emploi manquent incontestablement de la formation nécessaire pour orienter efficacement l'ensemble des demandeurs d'emploi.
En ce qui concerne les restaurateurs, les rodomontades des politiques ne les impressionnent à l'évidence guère : ils ont utilisé la baisse de la TVA pour augmenter leurs marges, sans revaloriser les salaires ni améliorer les conditions de travail. Dans la mesure où le Président de la République a d'ores et déjà décidé qu'il ne reviendrait en aucun cas sur la baisse de la TVA, de quels moyens l'Etat dispose-t-il pour faire pression sur les restaurateurs et quel rôle reconnaît-on encore au Parlement dans ce cadre ?
Les jeunes rencontrent, par ailleurs, d'énormes difficultés pour trouver une entreprise disposée à les accueillir en apprentissage, au point qu'un grand nombre d'entre eux sont contraints d'interrompre leur formation, tandis que les seniors continuent d'être licenciés dès l'âge de cinquante ans.
Si le nombre de créations d'entreprise est en progression, il faut rappeler que 40 % seulement des auto-entrepreneurs déclarent un chiffre d'affaires : les autres n'ont pas de réelle activité.
Elle s'est ensuite étonnée de l'affirmation d'Isabelle Debré selon laquelle le télétravail aurait été diabolisé : peut-être a-t-elle voulu faire référence à la proposition du député Frédéric Lefebvre d'autoriser les personnes en arrêt maladie à travailler chez elles, qui a suscité effectivement une légitime opposition ?
Mme Gisèle Printz a dénoncé l'absence de revalorisation, depuis plusieurs années, des crédits destinés aux entreprises d'insertion, qui a conduit une entreprise de son département à se séparer d'une dizaine de ses collaborateurs. Elle a appelé de ses voeux un contrôle des aides versées aux entreprises, afin de s'assurer que les exonérations dont elles bénéficient ont bien une contrepartie en termes d'emploi.
Mme Annie Jarraud-Vergnolle a rappelé que la ministre de l'économie, de l'emploi et de l'industrie s'était engagée à ce que chaque conseiller de Pôle emploi suive, à terme, soixante demandeurs d'emploi ; or, dans de nombreux départements dont le sien, les Pyrénées-Atlantiques, ce ratio est actuellement de 1 pour 120. Les recrutements auxquels a procédé Pôle emploi pour renforcer ses équipes sont donc manifestement insuffisants.
Elle a ensuite demandé à quelle date sera effectif le transfert du recouvrement des cotisations d'assurance chômage aux Urssaf.
Elle a souhaité savoir pour quelles raisons le dispositif « zéro charges », mentionné par le rapporteur, ne s'applique qu'aux entreprises de plus de dix salariés, alors que ce sont souvent les plus petites entreprises qui recrutent des apprentis.
Concernant le parcours Nacre, enfin, elle a demandé si les créateurs d'entreprises continuent à bénéficier de prestations d'accompagnement pour le développement commercial ou d'appui à la gestion auxquelles ils pouvaient accéder autrefois grâce aux chèques conseils.
M. Yves Daudigny a fait observer qu'il existe en France des emplois non pourvus, alors que le nombre de demandeurs d'emploi est élevé. On invoque traditionnellement la faiblesse des salaires ou les mauvaises conditions de travail pour comprendre cette situation, mais ces explications paraissent aujourd'hui insuffisantes : c'est donc à une véritable revalorisation de certains métiers qu'il faut désormais procéder.
Il a insisté sur la gravité de la crise de l'emploi, qui frappe en particulier l'industrie. Dans le département de l'Aisne, dont il est l'élu, une usine très performante de fabrication de fils de cuivre va bientôt fermer ses portes, entraînant la disparition de deux cents emplois, parce qu'il est possible d'acheter ces fils moins cher auprès de fournisseurs étrangers. Il ne sert à rien d'avoir une politique de l'emploi si l'on n'a pas, en même temps, une politique industrielle et si l'on ne change pas les stratégies des grands groupes dont la seule préoccupation semble être d'offrir une rémunération à deux chiffres à leurs actionnaires.
A son tour, M. Alain Vasselle a souligné la difficulté persistante que rencontrent les jeunes pour trouver un stage en entreprise. Il a ensuite fait observer que le dispositif des zones franches urbaines a parfois pour effet de pénaliser des territoires qui se trouvent en périphérie de la zone que l'on souhaite avantager : dans son département de l'Oise, il a observé que des entreprises, auparavant implantées dans de petites communes rurales, se sont installées dans un quartier difficile de Beauvais pour y bénéficier d'avantages fiscaux et sociaux. Ne faudrait-il pas limiter le bénéfice de ces avantages aux entreprises nouvellement créées, afin d'éviter ces phénomènes de délocalisation ?
M. Alain Gournac, rapporteur pour avis, a répondu à Janine Rozier que toutes les initiatives destinées à favoriser la rencontre entre employeurs et demandeurs d'emploi méritent d'être encouragées. Il a ensuite regretté le caractère encore trop théorique de certaines formations dispensées par Pôle emploi et insisté sur l'« intelligence de la main » et sur la nécessité de revaloriser l'image de métiers qui cherchent à recruter mais ne trouvent pas de candidats.
En réponse à Isabelle Debré, il a estimé que plus que le télétravail, c'est le travail lui-même qui est diabolisé par certains. En ce qui concerne le télétravail, le problème qui se pose est celui du manque de contacts humains dont souffrent les salariés qui le pratiquent. Il peut néanmoins constituer effectivement une réponse adaptée aux problèmes de mobilité des travailleurs handicapés.
Répondant à Raymonde Le Texier, il a d'abord insisté sur le fait que la France a mieux résisté à la crise que d'autres pays. Au sujet de Pôle emploi, la direction a l'intention de proposer, l'an prochain, des formations complémentaires aux agents qui rencontrent des difficultés pour exercer leurs nouvelles fonctions. Par ailleurs, le comportement des entreprises à l'égard des seniors est en train de changer. Enfin, il faut se réjouir du succès du statut de l'auto-entrepreneur, même s'il est vrai que toutes les entreprises nouvellement créées ne pourront pas perdurer.
En réponse à Gisèle Printz, il a indiqué que les exonérations dont bénéficient les entreprises ne sont pas conditionnées à des engagements d'embauches mais visent à créer un environnement favorable à la création d'emplois. Il s'est engagé à examiner le problème qu'elle a soulevé relatif au montant des aides aux entreprises d'insertion.
Répondant à Annie Jarraud-Vergnolle, il a indiqué qu'effectivement, le nombre de demandeurs d'emploi suivis par chaque conseiller de Pôle emploi a augmenté sous l'effet de la crise et est aujourd'hui trop élevé. Si le dispositif « zéro charge » s'applique seulement aux entreprises de plus de dix salariés, c'est parce que les entreprises qui sont en dessous de ce seuil sont déjà exonérées de cotisations sociales patronales en cas d'embauche d'un apprenti. Dans le parcours Nacre, une offre de services d'accompagnement est organisée sur l'ensemble du territoire ; il est possible d'y avoir recours pour le montage du projet, son démarrage et pour soutenir le développement de l'entreprise pendant les trois années suivant sa création.
Comme l'a signalé Yves Daudigny, des emplois sont effectivement non pourvus et un grand nombre de suppressions d'emplois résultent de la concurrence internationale.
Ainsi que l'a indiqué Alain Vasselle, il est exact que le dispositif des zones franches peut avoir des effets pervers, ce qui justifierait que l'on examine de quelle manière on pourrait éviter les délocalisations qu'il a évoquées.
A Mme Raymonde Le Texier qui demandait les raisons qui expliquent l'augmentation de 24 % des crédits de l'action « Dialogue social et démocratie sociale » en 2010, M. Alain Gournac, rapporteur pour avis, a répondu que cette augmentation résulte, en grande partie, du lancement du projet Mars (mesure de l'audience de la représentativité syndicale), qui est une conséquence de la réforme de la représentativité syndicale adoptée en 2008.
La commission a ensuite examiné l'amendement présenté par le rapporteur sur les articles rattachés à la mission.
Elle a adopté l'article 61 (adaptation des dispositions relatives au financement du contrat unique d'insertion pour certains publics) sans modification.
A l'article 62 (public bénéficiaire du nouvel accompagnement pour la création et la reprise d'entreprise), elle a adopté un amendement tendant à élargir le champ des bénéficiaires des aides à la création d'entreprise.
Elle a adopté l'article 63 (extension aux régies de quartier du régime d'agrément des associations de service à la personne) sans modification.
Elle a enfin donné un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Travail et emploi ».
Loi de finances pour 2010 - Mission « Santé » - Examen du rapport pour avis
La commission a ensuite examiné le rapport pour avis de M. Alain Milon sur le projet de loi de finances pour 2010 (mission « Santé » et articles 59, 59 bis et 59 ter rattachés).
A titre liminaire, M. Alain Milon, rapporteur pour avis, a souligné la modestie du montant des crédits de la mission « Santé » pour 2010 - 1,2 milliard d'euros, auxquels s'ajoutent quelque 4,8 milliards de dépenses fiscales - au regard de celui de l'objectif de dépenses de la branche maladie, maternité et décès, fixé à près de 180 milliards d'euros par le projet de loi de financement de la sécurité sociale.
Trois programmes composent la mission :
- le programme 171 « Offre de soins et qualité du système de soins », relatif à l'hôpital, est celui dont les crédits sont les moins importants : 125 millions d'euros, à rapprocher des 75 milliards de dépenses d'assurance maladie dans le secteur de l'hôpital l'an prochain. Les crédits de ce programme financent, pour l'essentiel, les stages extrahospitaliers dans le cadre de la formation des futurs médecins ;
- le programme 183 « Protection maladie » est, en revanche, le mieux doté, avec 585 millions d'euros. Il recouvre principalement les dépenses de l'aide médicale d'Etat (AME) dont bénéficient les personnes qui ne peuvent être affiliées à l'assurance maladie, c'est-à-dire essentiellement les immigrés clandestins. Les dépenses de l'AME connaissent la plus forte progression qui explique, pour une bonne part, l'augmentation de 4,4 % des crédits totaux de la mission « Santé » pour 2010.
Cette hausse répond en fait à un effort de sincérité budgétaire : la commission des affaires sociales, comme celle des finances, ont en effet dénoncé, depuis de nombreuses années, l'insuffisance permanente de la dotation de l'AME prévue par le budget de l'Etat dont a résulté, depuis 2007, une dette de près de 230 millions d'euros auprès de l'assurance maladie. L'augmentation des crédits de 45 millions prévue en 2010 vise donc à prévenir la formation de nouvelles dettes, sans qu'il soit certain qu'elle suffise car elle est fondée sur une dynamique assez faible des dépenses attendues d'AME, avec le risque que les bénéficiaires de cette aide aient un comportement de renonciation aux soins ;
- enfin, le programme 204 « Prévention et sécurité sanitaire », qui est le seul à être centré sur la santé publique, connaît une progression modeste de l'ordre de 1 %, l'augmentation de 13 millions de l'action « Prévention des risques infectieux et des risques liés aux soins » venant plus que compenser la baisse de la plupart des autres postes. Cette augmentation est la conséquence de la recentralisation des compétences en matière de dépistage des cancers, de vaccination, de lutte contre la tuberculose, la lèpre, le Sida et les infections sexuellement transmissibles, auxquelles plusieurs départements ont choisi de renoncer.
A l'issue de cette présentation budgétaire, M. Alain Milon, rapporteur pour avis, a souhaité approfondir trois points : la rationalisation du système des agences sanitaires, la mise en oeuvre du plan cancer II et la nécessité de préparer une loi de santé mentale.
Le système des agences sanitaires appartient, depuis l'année dernière, au périmètre de la mission « Santé ». Ce système englobe des organismes de nature diverse : la Haute Autorité de santé (HAS) est une autorité publique indépendante, l'agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps) dispose d'un pouvoir de décision dans le domaine du médicament, l'agence française de sécurité sanitaire des aliments (Afssa) et l'agence française de sécurité sanitaire de l'environnement et du travail (Afsset) sont des agences d'expertise.
La première difficulté à laquelle ces agences risquent d'être confrontées est leur positionnement par rapport aux ARS, les agences régionales de santé récemment créées par la loi HPST. En effet, de nombreuses agences sanitaires disposent à la fois d'une compétence nationale et de réseaux territoriaux, et il convient de s'assurer qu'elles parviendront à travailler avec les ARS.
Un second sujet concerne la fusion de l'Afssa et l'Afsset, prévue par l'article 115 de la loi HPST sur amendement du Gouvernement proposant, de façon d'ailleurs regrettable, d'y procéder par ordonnance. L'intérêt de cette fusion est évident du point de vue de la rationalisation des structures : l'Afssa et l'Afsset traitent de sujets très proches et, surtout, la future organisation aura la taille critique suffisante pour compter au niveau européen, et donc espérer peser sur la détermination des normes sanitaires communautaires.
Pour autant, le rapprochement des deux agences ne doit pas se faire à n'importe quel prix. L'Afsset est une structure légère, de cent cinquante agents ; elle est tournée vers la société et les ressources scientifiques externes, et elle s'attache à faire émerger des points de consensus entre experts. L'Afssa est une entité beaucoup plus importante : mille deux cents agents, dont huit cents scientifiques, travaillent dans ses laboratoires. Elle est donc par nature plus tournée vers son expertise interne.
Il existe donc un double risque : d'une part, celui de voir les moyens consacrés par l'Afsset à sa mission propre sur la santé au travail absorbés par les besoins de financement des laboratoires qui se consacrent principalement aux questions de qualité des produits agricoles ; d'autre part, et surtout sachant que l'Afssa comporte, en son sein, une agence du médicament vétérinaire, celui de mélanger compétences de gestion et compétences d'expertise, ce qui présenterait un risque en matière d'éthique et même de crédibilité. Il faudrait donc que la future entité fusionnée se consacre à l'expertise, puis rattacher à l'Afssaps l'agence du médicament vétérinaire et intégrer les laboratoires de l'Afssa à l'institut national de la recherche agronomique (Inra) : le mandat d'expertise de la future agence serait ainsi clair et incontestable.
A propos du plan cancer II, présenté à Marseille le 2 novembre dernier par le Président de la République, M. Alain Milon, rapporteur pour avis, a soutenu l'effort qu'il engage en faveur de la prise en charge spécifique des jeunes atteints d'un cancer : 1 700 enfants de moins de quinze ans sont diagnostiqués chaque année.
Le dépistage progresse aussi : plus de 50 % des femmes participent au dépistage annuel du cancer du sein, ce qui signifie aussi que l'objectif de parvenir à un taux de 100 % en 2013 n'est qu'à moitié atteint.
Se pose, alors, la question de l'évaluation car on se contente trop souvent d'attendre l'échéance d'un plan pour y procéder avant d'élaborer un nouveau plan qui ne sera à son tour évalué qu'à son terme. Il peut en résulter un manque de continuité dans l'action publique et il serait préférable de disposer d'indicateurs qualitatifs pérennes qui permettent d'avoir une vision sur la durée. Cette démarche pourrait utilement constituer un chantier de l'action gouvernementale, au moment où l'on parle de mettre en place des indicateurs de qualité de vie.
En ce qui concerne l'institut national du cancer (INCa), créé en 2004, il faut reconnaître que cet organisme a fait ses preuves en permettant une articulation dynamique entre recherche et qualité des soins. Peut-être aurait-il fallu procéder de manière analogue pour le plan Alzheimer, dont le pilotage a été confié à un comité interministériel pour ne pas ajouter à la complexité du système sanitaire.
Enfin, abordant la question de la santé mentale, M. Alain Milon, rapporteur pour avis, a rappelé que l'office parlementaire d'évaluation des politiques de santé (Opeps) a consacré son dernier rapport, l'an dernier, à un état des lieux de la psychiatrie en France, lequel a conclu à la nécessité d'un véritable engagement de l'Etat dans ce domaine. Lors de l'examen de la loi HPST, le Sénat avait également conclu à la nécessité d'élaborer une loi de santé mentale. On peut donc regretter que la ministre de la santé paraisse réticente sur cette question : on en reste à une « politique des petits pas » et à une focalisation excessive sur la question des malades dangereux, les seules lois où il est question de santé mentale relevant du garde des sceaux et non du ministre de la santé. Le programme de mise en place des unités hospitalières spécialement aménagées, destinées à fournir des soins aux prisonniers atteints de troubles mentaux, pose également de nombreuses questions.
Il est, à son avis, nécessaire d'aborder la question de la santé mentale de manière large. La prise en charge des troubles mentaux dans notre pays est encore trop faible et impose de réfléchir à l'adaptation des structures existantes aux besoins.
Pour conclure, M. Alain Milon, rapporteur pour avis, a présenté les trois articles rattachés à la mission « Santé ». Les deux premiers ne posent pas de difficultés :
- l'article 59 propose de proroger d'un an la taxe assurant le financement du centre national de gestion des essais des produits de santé ;
- l'article 59 bis prévoit le doublement de l'aide au paiement d'une assurance complémentaire de santé pour les jeunes âgés de seize à vingt-quatre ans.
En revanche, l'article 59 ter, qui prévoit une contribution exceptionnelle des assurances complémentaires de santé à l'établissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaires (Eprus), contredit la position du Parlement sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale en matière de prise en charge de la pandémie grippale et devrait donc être supprimé par voie d'amendement.
Enfin, un amendement sera proposé à la commission tendant à compléter les ressources de l'Afssaps grâce à l'instauration d'une taxe sur les produits cosmétiques, soumis depuis 2007 à son contrôle.
M. Paul Blanc s'est inquiété des conséquences des délais de mise en place des ARS et d'élaboration des nouveaux schémas d'organisation médico-sociale sur la réalisation des projets de création ou d'extension d'établissements qui seront soumis aux comités régionaux d'organisation sociale et médico-sociale (Crosm) jusqu'au mois de juin 2010. Il a annoncé qu'il déposerait, pour résoudre ce problème, un amendement au projet de loi de finances, reprenant un amendement au projet de loi de financement de la sécurité sociale dont le Gouvernement avait estimé qu'il n'entrait pas dans le cadre de ce texte.
Il s'est ensuite interrogé sur le financement des antennes régionales de la HAS et sur le statut de l'INCa, constitué en groupement d'intérêt public pérenne, formule qui pourrait être plus largement utilisée.
Enfin, il a également souhaité l'élaboration d'une loi de santé mentale, d'une part, pour résoudre le problème que pose la présence en prison de personnes qui ont de graves problèmes psychiatriques, d'autre part, pour prévoir les structures de suivi qui permettraient à beaucoup de personnes à handicap psychique de s'insérer dans la vie active lorsqu'elles sont en mesure de travailler.
M. Marc Laménie a demandé des précisions sur les crédits de l'aide médicale d'Etat et, s'associant aux propos du rapporteur pour avis et de Paul Blanc, a insisté sur la nécessité de tracer plus clairement la frontière entre les questions qui relèvent du ministère de la justice et celles qui relèvent de la psychiatrie.
Mme Raymonde Le Texier a salué le travail de fond et d'analyse critique du rapporteur pour avis, qui propose une « feuille de route » susceptible d'orienter les réflexions de la commission. Quelles sont les actions qui lui paraissent prioritaires ?
M. Alain Vasselle a dit partager le souci de mieux coordonner l'action des différentes agences et les interrogations que lui inspire l'articulation de leur action avec celle des ARS.
A propos de l'AME, il s'est également inquiété du risque de « renonciation aux soins » des bénéficiaires de cette aide.
En ce qui concerne les évaluations, il serait souhaitable que, dans le cadre de l'application de la réforme constitutionnelle, les parlementaires puissent mener de véritables travaux de contrôle et d'évaluation dont ils rendraient compte en séance publique, plutôt que de participer à des séances diverses de questions qui ne permettent pas une réflexion de fond.
Il a soutenu l'amendement annoncé pour assurer la cohérence entre le projet de loi de finances et le projet de loi de financement de la sécurité sociale sur la question de la contribution des organismes d'assurance maladie complémentaire au financement de la lutte contre la pandémie grippale.
Enfin, revenant sur l'article 59 bis qui prévoit un doublement, au bénéfice des jeunes, de l'aide à l'accès à une assurance complémentaire santé, il a estimé que ce doublement devrait également bénéficier aux personnes handicapées, dont le reste à vivre est lourdement affecté par le paiement d'une complémentaire.
Mme Muguette Dini, présidente, a suggéré à Alain Vasselle de faire part, en Conférence des Présidents, de ses vues sur le développement des travaux de contrôle et d'évaluation parlementaire, ce dont il est convenu.
Mme Marie-Thérèse Hermange s'est à son tour interrogée sur l'accès aux soins des personnes relevant de l'AME : on constate en effet sur le terrain, par exemple dans les hôpitaux de l'est parisien, que tous ceux qui demandent des soins sont accueillis, quelle que soit leur situation. Existe-t-il des indicateurs qui font état d'un éventuel phénomène de renonciation aux soins ?
Elle a par ailleurs observé que les instances sanitaires semblent effectivement avoir tendance à développer au niveau régional des réseaux qui sont générateurs de dépenses, l'agence de biomédecine faisant figure d'exception en la matière.
Enfin, à propos de l'article 59 relatif au financement du centre national de gestion des essais des produits de santé, elle a demandé, faisant état d'informations récentes sur des travaux de recherche qui semblent se situer hors du cadre législatif posé par les lois de bioéthique, des précisions sur les essais qui sont menés dans le domaine des produits issus du corps humain.
Mme Annie Jarraud-Vergnolle a déclaré partager le regret que l'on se focalise, en matière de santé mentale, sur le problème des malades dangereux, ce qui conduit à considérer que ce problème relève du ministère de la justice et non pas du ministère de la santé. Elle s'est interrogée, à ce sujet, sur la différence existant entre des centres comme celui de Cadillac, qui accueille des malades mentaux ayant commis des actes délictueux, et les UHSA.
Elle s'est enfin associée aux propos d'Alain Vasselle sur l'aide aux complémentaires santé, soulignant que le même problème se pose pour l'accès à l'assurance complémentaire des titulaires de l'allocation vieillesse.
Mme Sylvie Desmarescaux s'est inquiétée des conditions de la collaboration entre les hospitaliers et l'administration pénitentiaire pour la mise en place des UHSA.
Elle a par ailleurs souhaité connaître l'évolution des crédits consacrés à l'offre de soins et sur les conséquences, pour les consommateurs, de la taxe sur le chiffre d'affaires de l'industrie cosmétique que le rapporteur pour avis propose d'instituer par voie d'amendement.
Après s'être associé aux propos d'Alain Vasselle sur le développement des pouvoirs de contrôle du Sénat, M. Alain Gournac a évoqué le problème de santé très grave que pose le développement de la consommation d'alcools forts par les jeunes, qui affecte aussi les zones rurales. Il a également souhaité que soit trouvée une solution à la présence en prison de malades mentaux qui ne devraient pas y être et n'y reçoivent pas les soins nécessaires.
Mme Gisèle Printz a estimé nécessaire que le plan cancer II engage des campagnes d'information sur la prévention en direction des jeunes dans les établissements scolaires, soulignant en particulier l'intérêt d'informer les jeunes filles sur la vaccination contre les infections à papillomavirus.
Mme Anne-Marie Payet a rappelé que la ministre de la santé avait annoncé, au printemps 2008, un plan santé pour l'Outre-mer. Or, les crédits correspondants, qui ne figurent pas dans la mission « Outre-mer », ne semblent pas être inscrits non plus dans la mission « Santé ». D'après les éléments dont elle dispose, le financement de ce plan serait prévu mais pour un montant non encore déterminé.
M. André Villiers s'est enquis des incidences budgétaires de la fusion de l'Afssa et de l'Afsset et de l'évolution des moyens de ces agences, difficilement retraçable dans les documents budgétaires.
Mme Isabelle Debré a demandé des précisions sur la politique de prévention du Sida, qu'il paraît nécessaire de réactiver, beaucoup de jeunes semblant ne plus prendre les précautions nécessaires pour se prémunir contre une maladie qui est loin d'être éradiquée.
En réponse, M. Alain Milon, rapporteur pour avis, a apporté les précisions suivantes :
- l'INCa est en effet organisé sous la forme d'un groupement d'intérêt public (Gip) pérenne, statut qui est aussi celui des services départementaux d'incendie et de secours (Sdis) ;
- le fonctionnement des associations régionales qui constituent le réseau territorial de la HAS, dont les membres sont des médecins, est financé par elle, les caisses primaires d'assurance maladie participant également à leur action ;
- la dernière loi de santé mentale remonte à 1960. On assiste aujourd'hui à une stigmatisation des maladies psychiatriques à tous les niveaux de la population. Il est donc grand temps de se doter d'une législation moderne, réclamée par les psychiatres, dont la nécessité est bien perçue par les politiques et a été soulignée par de nombreux rapports, celui de l'Opeps comme le rapport Couty ou d'autres encore. Il paraît cependant difficile de parvenir à un accord sur son contenu entre les différents « courants » de la psychiatrie. On peut donc s'interroger sur les délais d'élaboration d'un projet de loi et une initiative parlementaire pourrait être envisagée ;
- les crédits de l'AME pour 2010 s'élèveront à 535 millions d'euros ;
- il ne serait pas illégitime d'opérer un certain rééquilibrage entre les crédits dédiés à la recherche sur le cancer et ceux octroyés à la recherche sur la santé mentale : il y a vingt fois plus de personnes concernées par les maladies mentales que par le cancer, et vingt fois moins de recherche dans le domaine de la santé mentale. Or, celle-ci est nécessaire notamment dans le domaine génétique, car certains travaux montrent que les maladies psychologiques ne sont pas dues uniquement à des causes « impalpables » mais peuvent tenir aussi à des réalités physiologiques ou chimiques ;
- le problème de la coordination entre les ARS et les autres instances sanitaires a déjà été soulevé lors des débats sur le projet de loi HPST et débattu au sein de la commission. Du reste, les questions que la commission avait alors pointées sont bien celles qui se posent et il est difficile de regrouper, dans un comité de coordination, des instances dont les représentants peuvent avoir des visions différentes ;
- le problème de l'accès aux soins dans le cadre de l'AME n'est pas le fait des personnes qui dispensent les soins mais relève plutôt du comportement des populations qui ont vocation à en bénéficier. On peut le déceler à travers le taux d'augmentation des dépenses de l'AME, 1 % par an, qui est nettement inférieur au taux d'évolution global des dépenses de santé, qui est de 3,7 %. On peut donc penser que tous ceux qui pourraient bénéficier de l'AME n'y ont pas recours, ou le moins possible, car il n'y a aucun raison que leurs besoins soient inférieurs à ceux de l'ensemble de la population ;
- il serait très positif que le Parlement développe une politique d'évaluation, et notamment de l'évaluation de l'application des lois. On peut penser en particulier à la loi HPST qui exigera quelque 190 textes d'application : il semble que l'élaboration, en particulier, des décrets sur la gouvernance de l'hôpital soit assez difficile ;
- aucun essai clinique n'implique, conformément à la loi, de cellules souches embryonnaires ;
- le problème de la stigmatisation des maladies mentales est réel : or, contrairement à ce que l'on croit, la proportion d'actes criminels commis par la population des personnes atteintes de schizophrénie est bien moindre que celle constatée dans l'ensemble de la population ;
- la première UHSA, celle de Lyon, semble se mettre en place dans un climat de bonne coopération entre les partenaires : l'hôpital assure les soins, l'administration pénitentiaire assure la sécurité. Dans ces conditions, les UHSA sont une bonne solution, encore que coûteuse pour l'assurance maladie. Mais il semble qu'ailleurs, la coopération entre les hôpitaux et l'administration pénitentiaire ne se déroule pas aussi bien et que l'administration de la justice ait tendance à vouloir prendre la direction des opérations.
Mme Muguette Dini, présidente, a fait observer, à cet égard, que la structure pavillonnaire de l'hôpital accueillant l'UHSA de Lyon a sans doute favorisé sa mise en place dans de bonnes conditions.
M. Alain Milon, rapporteur pour avis, a ajouté que :
- l'établissement de Cadillac est un établissement pénitentiaire accueillant des détenus qui ont besoin de soins psychiatriques. Les UHSA ont une vocation différente : ce sont des structures hospitalières qui accueillent les détenus pour des traitements en période de crise, mais ceux-ci réintègrent ensuite l'établissement pénitentiaire ;
- les crédits consacrés à la modernisation du système de soins sont en baisse de 61 % en raison du transfert de la dotation attribuée aux anciennes agences régionales de l'hospitalisation aux ARS ;
- l'incidence de la taxe proposée sur les prix des produits cosmétiques devrait être modérée ; par ailleurs, cette taxe ne concernerait pas les petites entreprises ;
- les problèmes d'alcoolisme, et d'addiction en général, relèvent plutôt du ressort de l'action « Mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie », incluse dans la mission « Direction de l'action du Gouvernement » et sur laquelle Gilbert Barbier a présenté la semaine dernière un rapport pour avis. Mais certaines des mesures adoptées dans le cadre de la loi HPST pour lutter contre l'alcoolisme des jeunes - interdiction de vente aux mineurs, suppression des open-bars - pourront être efficaces si elles sont bien appliquées ;
- il faut effectivement informer les jeunes sur la prévention du cancer, sans se limiter d'ailleurs à la vaccination contre le cancer du col de l'utérus, même si cette vaccination est utile dès lors qu'elle réduirait les risques d'environ 70 % ;
- il conviendra effectivement d'interroger le Gouvernement, lors du débat budgétaire, sur le financement du plan santé pour l'Outre-mer ;
- la fusion de l'Afssa et de l'Afsset se fera probablement à coûts budgétaires croissants, mais il faut insister pour que les laboratoires soient plutôt rattachés à l'Inra pour clarifier les compétences et le rôle d'expertise des agences. Le financement des deux agences provient de plusieurs ministères - parmi lesquels ceux chargés de l'agriculture, du travail ou de l'environnement, ce qui ne facilite par la lisibilité de l'évolution de ce financement ;
- il faut effectivement poursuivre l'effort de prévention du Sida, qui semble d'ailleurs commencer à produire ses effets si l'on en juge par la baisse assez nette, au niveau mondial (7 % à 8 % par an), du nombre des nouveaux malades dans les deux dernières années. A cet égard, il ne faut pas seulement agir au niveau national, mais aussi au niveau local : les actions que peuvent développer les communes à l'occasion, par exemple, de la journée du Sida, ou auprès de la population scolaire, peuvent aussi être très efficaces.
A l'issue de ce débat, la commission, suivant la proposition de son rapporteur pour avis, a émis un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Santé » inscrits dans le projet de loi de finances pour 2010.
Elle a ensuite :
- donné un avis favorable à l'adoption des articles 59 et 59 bis rattachés ;
- adopté un amendement tendant à insérer un article additionnel après l'article 59 bis prévoyant l'instauration, au profit de l'Afssaps, d'une taxe annuelle de 0,25 % assise sur le chiffre d'affaires des producteurs ou importateurs de produits cosmétiques dont les ventes excèdent un montant hors taxes de 763 000 euros ;
- adopté un amendement de suppression de l'article 59 ter rattaché.
Loi de finances pour 2010 - Mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation » - Examen du rapport pour avis
Puis la commission a procédé à l'examen du rapport pour avis de Mme Janine Rozier sur le projet de loi de finances pour 2010 (mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation » et l'article 51 rattaché).
Mme Janine Rozier, rapporteur pour avis, a rappelé que la mission comporte trois programmes d'importance budgétaire égale : le premier, qui absorbe près de 93 % des crédits, marque la reconnaissance de la Nation aux anciens combattants au travers notamment des pensions et secours qui leur sont servis et intègre à ce titre les subventions versées aux deux opérateurs - office national des anciens combattants (Onac) et institution nationale des invalides (Ini) ; le deuxième vise à promouvoir l'esprit de défense au sein de la population et retrace les crédits dévolus à l'organisation de la journée d'appel de préparation à la défense (JAPD) ainsi qu'à la politique de mémoire (4,4 % des crédits) ; le dernier, placé sous la responsabilité du Premier ministre mais rattaché à la mission, recouvre les dispositifs d'indemnisation des victimes de spoliations, de persécutions ou d'actes de barbarie commis pendant la Seconde Guerre mondiale (2,8 %).
Cette année encore, la comparaison des sommes mobilisées entre 2009 et 2010 pourrait laisser penser, en première analyse, que l'effort de la Nation en faveur de ses anciens combattants se relâche : les crédits de la mission sont en baisse de 1,15 %, moins que l'an dernier mais en ligne avec les exigences de la programmation triennale 2009-2011.
Toutefois, les chiffres ne doivent se lire qu'à l'aune de la baisse inexorable du nombre de bénéficiaires : 16 000 extinctions attendues en 2010 au titre des pensions d'invalidité et 55 000 pour la retraite du combattant. Or, le budget global, qui s'élève à plus de 3,85 milliards d'euros si l'on inclut les dépenses fiscales, ne diminue pas en proportion de cette réalité démographique. Il mobilise les marges de manoeuvre rendues disponibles au service de mesures nouvelles : revalorisation de la retraite du combattant, relèvement du montant de l'allocation différentielle pour les conjoints survivants ou des majorations spéciales des veuves des plus grands invalides de guerre ou mise en place d'une indemnisation en faveur des victimes des essais nucléaires.
Pour ce qui relève du programme 169 « Mémoire, reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant », la baisse mesurée des dépenses affectées aux pensions militaires d'invalidité (52 millions d'euros, soit moins de 1 % d'une enveloppe de 1,79 milliard) n'intègre qu'une partie de l'économie liée à la baisse des effectifs (97 millions) et préserve ainsi les droits de ceux qui ont été touchés dans leur chair : 19 millions supplémentaires sont provisionnés pour financer les revalorisations du point d'indice qui interviendront en 2009 et 2010 en application du rapport constant établi entre les pensions et les rémunérations publiques ; 8 millions abondent l'enveloppe consacrée à la retraite du combattant en vertu du même mécanisme.
Les droits liés aux pensions d'invalidité affichent une baisse de 4,2 % due exclusivement à la réduction du nombre de bénéficiaires mais corrigée pour tenir compte de la hausse générale des dépenses de santé. L'enveloppe « appareillages » est stabilisée afin d'assurer des prestations rendues plus chères du fait du vieillissement de la population, de l'amélioration des techniques et de la hausse des coûts de fabrication, celle consacrée aux réductions de transport s'aligne sur la hausse des coûts de transport et les crédits « soins médicaux » sont abondés de 7,45 millions pour permettre le transfert de leur gestion à la caisse nationale militaire de la sécurité sociale (CNMSS) dans le cadre de la réforme du ministère.
Les crédits affectés à la retraite du combattant progressent de 35 millions d'euros, la dynamique démographique étant plus que compensée par l'impact des revalorisations successives du montant de la retraite intervenues depuis 2006. Alors qu'il était resté inchangé depuis 1978, l'indice est passé progressivement de 33 à 41 points, l'effort budgétaire correspondant atteignant près de 159,2 millions sur la période 2006-2009.
Annoncée comme « la première priorité budgétaire pour 2010 », la revalorisation se poursuit avec une majoration supplémentaire de deux points à compter du 1er juillet 2010. La mesure est inscrite, pour la première fois, dans le projet de loi initial sans qu'il ait fallu attendre l'adoption d'un amendement en cours de discussion budgétaire comme cela avait été le cas jusqu'à présent.
Outre les 28 millions inscrits pour assurer l'extension en année pleine des 41 points obtenus au 1er juillet dernier, 9,5 millions sont provisionnés dès cette année pour le passage aux 43 points. Au total, si l'on intègre les effets du rapport constant sur la valeur du point, la retraite du combattant aura progressé de 36,9 % entre 2005 et 2010. Au-delà, l'objectif du secrétaire d'Etat est d'obtenir l'inversion des niveaux d'augmentation prévus, soit trois points au lieu de deux en 2011 et deux points au lieu de trois en 2012, le coût cumulé de ces deux revalorisations étant évalué à 50 millions d'euros. L'engagement du Président de la République de porter l'indice à 48 points, soit l'équivalent d'une pension indemnisant une invalidité au taux de 10 %, est donc en passe d'être tenu.
Puis Mme Janine Rozier, rapporteur pour avis, est revenue sur la décristallisation des « prestations du feu » versées aux anciens combattants d'outre-mer, dont le montant avait été « cristallisé » lors de l'accession à la souveraineté de leur pays. Cette mesure d'équité, mise en oeuvre en 2002 et complétée en 2007 sur la base d'une parité en euros avec les retraites servies aux ressortissants français, fait l'objet depuis l'an dernier d'une reconduction automatique d'un budget sur l'autre : ainsi, 104 millions d'euros auront été versés en 2008 à plus de 77 000 pensionnés d'outre-mer, le surcoût directement lié à la décristallisation avoisinant les 87 millions.
Certaines différences de traitement subsistent cependant : sont notamment exclues les pensions civiles et militaires de retraite des anciens fonctionnaires et militaires et leur réversion. Or, deux jugements du tribunal administratif de Bordeaux du 8 octobre 2008 ont imposé la revalorisation complète de la pension militaire de retraite d'un ressortissant marocain résidant en France au motif que l'accord euro-méditerranéen interdit « toute discrimination fondée sur la nationalité » en la matière. Si le ministre du budget a donné des directives à ses services en faveur de mesures de décristallisation partielle ou totale pour les demandeurs résidant en France ou dans un autre Etat de l'Union européenne, aucune garantie n'a été apportée quant à la généralisation de cette jurisprudence aux ressortissants des pays du Maghreb, ni aucune estimation du surcoût potentiel.
Les dépenses fiscales en faveur des anciens combattants recouvrent pour l'essentiel l'exonération d'impôt sur le revenu des retraites, pour 200 millions d'euros, la demi-part supplémentaire pour les contribuables de plus de soixante-quinze ans titulaires de la carte du combattant et leurs veuves, pour 190 millions, et les déductions d'impôt des versements effectués pour la retraite mutualiste, pour 30 millions supplémentaires. Ces chiffres, que les associations oublient souvent d'inclure dans leur présentation du budget, participent de la cohérence des politiques publiques à destination du monde combattant.
Les crédits de solidarité augmentent pour leur part de 7,8 %. Ils concernent principalement les majorations des rentes mutualistes et les subventions versées à l'Onac et l'Ini.
Versées à plus de 421 000 pensionnés, les majorations constituent une dépense dynamique (+ 3,3 % pour 2010 après 6,86 % en 2009). La souscription d'une rente mutualiste s'accompagne, en plus de la majoration légale attachée à toute rente viagère, d'une majoration spécifique versée par l'État au titre du droit à réparation qui varie de 12,5 % à 60 % selon le titre détenu et sa date d'obtention. Elle bénéficie en outre d'un régime fiscal particulièrement favorable puisque les versements effectués en vue de sa constitution sont déductibles du revenu imposable et que la rente, une fois constituée, est exonérée d'impôt sur le revenu pour sa part inférieure au plafond légal. En conséquence, Mme Janine Rozier, rapporteur pour avis, a fait part de son scepticisme face à la demande des associations de voir le plafond majorable relevé à 130 points d'indice, surtout lorsque l'on sait que seuls 20 % des bénéficiaires atteignent aujourd'hui ce plafond, établi à 1 693,75 euros au 1er janvier 2009. La baisse des effectifs concernés sera mesurée en 2010, l'arrivée progressive de ressortissants issus de la quatrième génération du feu (Opex) compensant en grande partie les sorties attendues.
Consacré dans son rôle de guichet unique de proximité au service des anciens combattants, l'Onac voit sa dotation pour charges de service public progresser de plus de 13 millions d'euros pour atteindre près de 53 millions, afin d'assurer la reprise, dans les meilleures conditions, des missions précédemment exercées par la direction des statuts, des pensions et de la réinsertion sociale (DSPRS) qui a vocation à disparaître à l'horizon 2011. Ainsi 280 emplois lui seront transférés avec les moyens de fonctionnement correspondants, ce qui lui permettra, entre autres, de poursuivre le développement de ses capacités informatiques. La commission aura l'occasion de dresser un premier bilan de la réforme au cours du contrôle budgétaire qu'elle mènera conjointement avec la commission des finances sur ce sujet l'an prochain. Mme Janine Rozier, rapporteur pour avis, a assuré de sa vigilance sur la préservation de la qualité du service rendu à l'usager et, plus généralement, de son attachement pour cette « maison du combattant ».
La subvention d'action sociale de l'office augmente de 500 000 euros pour répondre aux besoins croissants en matière d'aide ménagère et de maintien à domicile. Les crédits destinés à financer l'allocation différentielle versée aux conjoints survivants sont par ailleurs reconduits et devraient même être sanctuarisés, à l'avenir, dans le budget social de l'Onac ; conformément aux souhaits de la commission, le revenu mensuel minimum garanti, d'abord fixé à 550 euros, a été relevé successivement à 681 euros en 2007 puis à 750 euros en 2008 alors que, dans le même temps, l'aide personnalisée au logement était exclue des ressources prises en compte pour son calcul. L'allocation sera portée à 800 euros au 1er janvier 2010 puis à 817 euros en cours de gestion, l'ambition consistant à la porter, à terme, au niveau du seuil de pauvreté (887 euros).
La subvention versée à l'Ini, en hausse de plus de 3 millions d'euros, doit lui permettre de poursuivre sa modernisation tout en se voyant rattaché le centre d'études et de recherches sur l'appareillage des handicapés (Cerah).
Enfin, le programme 169 intègre désormais une nouvelle action, provisionnée à hauteur de 10 millions d'euros, correspondant à l'indemnisation des victimes des essais nucléaires. Cette mesure de réparation, attendue par les associations et qui sera versée sous forme de capital, est particulièrement bienvenue. Ayant reçu du ministre l'assurance que ces sommes ne seraient pas prélevées sur d'autres actions de la mission, Mme Janine Rozier, rapporteur pour avis, a proposé que la nomenclature budgétaire prenne acte de la modification du titre du projet de loi en passe d'être adopté définitivement, en visant la « reconnaissance et l'indemnisation des victimes » plutôt que la « réparation des conséquences sanitaires » des essais nucléaires.
Les crédits de la politique de mémoire figurant au programme 167 « Liens entre la Nation et son armée » progressent de 6,1 %, la période 2009-2018 s'annonçant particulièrement riche sur le plan des commémorations. Pour 2010, les célébrations s'articuleront principalement autour de l'appel du 18 juin et des premiers temps de la France libre.
Malgré la polémique née l'an dernier à l'issue des travaux de la commission Kaspi qui proposait de ne conserver que trois dates au titre des célébrations nationales, la plupart des conclusions du rapport restent valables : il importe de trouver des formes nouvelles de commémoration, attrayantes à l'égard des jeunes générations et élaborées en lien avec les établissements scolaires, et d'associer davantage encore les collectivités à la politique mémorielle.
De même, la création, désormais imminente, de la fondation pour la mémoire de la guerre d'Algérie et des combats en Tunisie et au Maroc est une bonne nouvelle. Son budget est bouclé et le nom de son futur président, Claude Bébéar, est connu.
L'enveloppe consacrée à l'entretien des sépultures de guerre et des hauts lieux de mémoire, qui relève du programme 169, est par ailleurs reconduite, la baisse apparente de 66 % s'expliquant uniquement par des transferts de crédits vers l'Onac.
Pour ce qui concerne le programme 158 relatif à l'indemnisation des orphelins et des victimes de spoliation de la Seconde Guerre mondiale, la baisse des crédits s'explique essentiellement par la décrue du nombre de nouvelles demandes ainsi que par la réduction du stock de dossiers à traiter. Jusqu'à présent, ces mesures auront concerné plus de 72 600 personnes et mobilisé plus de 1,4 milliard d'euros.
Au vu des préconisations du rapport du préfet Audouin, une commission de concertation a été mise en place afin d'étudier l'opportunité d'étendre le droit à réparation à tous les orphelins de guerre. Les parlementaires devront être pleinement associés à cette réflexion sachant que, selon le périmètre et les modalités de réparation retenus, les implications financières peuvent être considérables.
Enfin, revenant à la situation des veuves, Mme Janine Rozier, rapporteur pour avis, a jugé bienvenue la hausse de 50 points, décidée à l'Assemblée nationale, des majorations accordées aux veuves des grands invalides qui ont renoncé à travailler pour s'occuper de leur conjoint. Il serait cependant nécessaire de faire le point sur l'ensemble des dispositifs, qu'il s'agisse de l'allocation différentielle, des pensions attribuées aux veuves de guerre ou de la réversion des pensions d'invalidité et de leurs majorations, afin de mieux prendre en considération les veuves en situation précaire sans le faire au détriment des anciens combattants aux revenus les plus modestes.
Mme Françoise Henneron a regretté la rigidité de la règle des quatre mois de présence pour l'attribution de la carte du combattant aux anciens combattants d'Afrique du Nord, notamment à l'égard de ceux à qui il ne manque que quelques jours pour en bénéficier.
M. Alain Gournac a considéré qu'au moment où les derniers témoins directs des événements nous quittent progressivement, l'esprit de mémoire est plus que jamais indispensable et que cet effort de transmission passe notamment par la présence des jeunes générations lors des commémorations. C'est tout à l'honneur de notre pays que d'avoir mis en place des dispositifs d'indemnisation en faveur des victimes de spoliation ou, plus récemment, de celles des essais nucléaires.
M. Marc Laménie a voulu savoir si des actions de sensibilisation à l'esprit de défense sont menées en dehors de la JAPD et a déploré la participation insuffisante des jeunes aux cérémonies.
Après avoir rappelé la situation financière délicate dans laquelle se retrouvent souvent les veuves des grands invalides de guerre à la mort de leur mari, Mme Gisèle Printz a souhaité qu'à l'instar de ce qui s'est fait pour les incorporés de force dans les formations paramilitaires allemandes, la question de l'indemnisation des anciens combattants alsaciens-mosellans emprisonnés dans les camps soviétiques situés à l'ouest de la « ligne Curzon » soit enfin traitée. Les manuels d'histoire doivent par ailleurs faire une place à la tragédie particulière vécue par l'Alsace et la Moselle.
Considérant que le devoir de mémoire s'étend aussi aux pages les plus sombres de notre histoire, M. André Villiers s'est interrogé sur les délais de mise à disposition des archives du ministère de la défense et a rappelé que certaines familles sont toujours dans l'attente de la conclusion de leur dossier d'indemnisation.
Mme Sylvie Desmarescaux s'est félicitée de la majoration à 43 points de la retraite du combattant et des améliorations apportées à la situation des veuves. La sensibilisation de la communauté éducative aux actions de mémoire a permis, selon elle, d'attirer davantage de jeunes aux célébrations.
M. Yves Daudigny a souhaité recevoir des assurances quant à la pérennité de l'Onac. En ce qui concerne le devoir de mémoire, quelles mesures concrètes peut-on prendre pour assurer la présence des élèves aux manifestations ? Les dates des célébrations nationales comme le 11 novembre ou le 8 mai devraient être considérées comme des jours de commémoration et pas seulement de loisirs, ce qui justifierait d'y associer les établissements scolaires. Enfin, il faut constater, pour le déplorer, que certains hauts lieux de sépultures de guerre sont parfois laissés à l'abandon.
M. Alain Milon est convenu de la difficulté à mobiliser nos concitoyens lors des journées nationales commémoratives. Concernant la situation précaire des veuves, la réversion devrait sans doute assurer un niveau de ressources au moins équivalent au minimum vieillesse.
Mme Janine Rozier, rapporteur pour avis, a apporté les éléments de réponse suivants :
- l'attribution de la carte du combattant pour les anciens combattants d'Afrique du Nord a déjà été prorogée jusqu'au 2 juillet 1962 et un effet de seuil est malheureusement inévitable ;
- tous les élus sont confrontés à la désaffection à l'égard des manifestations commémoratives qu'ils organisent. Alors que la pratique s'était perdue, il semble toutefois que les directeurs d'école associent davantage leurs élèves aux commémorations depuis quelques années ;
- l'indemnisation des souffrances causées par les essais nucléaires était attendue et la provision de 10 millions d'euros sera abondée, le cas échant, en cours d'année pour faire face aux demandes ;
- il est effectivement nécessaire de promouvoir l'esprit de défense dans un contexte où les facteurs de menace existent ;
- plusieurs statuts de veuves doivent être distingués : les veuves de guerre qui ont perdu leur mari très jeunes et qui ont été contraintes de subvenir seules aux besoins de leurs enfants, parfois en bas-âge ; celles qui, à la mort de leur conjoint retraité, sont éligibles à l'allocation différentielle ; celles, enfin, de grands invalides qui bénéficient de majorations spéciales selon la durée du mariage et des soins prodigués. L'équité devrait être recherchée dans le règlement de ces situations ;
- les termes du problème des anciens combattants internés du « mauvais côté » de la ligne Curzon sont connus et l'histoire particulière de l'Alsace et de la Moselle doit figurer en bonne place dans les manuels scolaires. Quant à la gestion des archives, elle relève du ministère de la défense ;
- la reprise, par l'Onac, des missions précédemment exercées par la direction des statuts, des pensions et de la réinsertion sociale (DSPRS) s'accompagnera du transfert des 280 emplois correspondants et le programme de rénovation des sépultures de guerre se poursuivra en 2010.
En conclusion, Mme Janine Rozier, rapporteur pour avis, est revenue sur les mesures nouvelles présentées dans le projet de budget dont elle a salué le caractère positif : revalorisation de la retraite du combattant et des autres prestations en vertu du rapport constant, indemnisation des victimes d'essais nucléaires.
La commission a ensuite examiné les amendements présentés par son rapporteur. Elle a adopté un amendement à l'article 35, état B, tendant à modifier l'intitulé de l'action 6 du programme 169 afin de le mettre en conformité avec le titre du projet de loi relatif à la « reconnaissance et à l'indemnisation des victimes » des essais nucléaires.
Après l'article 51, elle a adopté un amendement portant article additionnel et demandant au Gouvernement la remise d'un rapport d'évaluation des dispositifs actuels de prise en charge des veuves.
Enfin, la commission a émis un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation » pour 2010 ainsi qu'à l'article 51 rattaché.
Comité de suivi des orientations de la mission commune d'information sur les départements d'outre-mer - Désignation du représentant de la commission
Mme Muguette Dini, présidente, a indiqué que, à la suite de la création du comité de suivi de la mise en oeuvre des préconisations de la mission commune d'information sur la situation des départements d'outre-mer, le président du Sénat, Gérard Larcher, a demandé la désignation, dans chaque commission, d'un correspondant assurant la veille législative des problématiques ultra-marines.
La commission a donc chargé Mme Anne-Marie Payet, rapporteur pour avis de la mission « Outre-mer » des projets de loi de finances, d'assurer cette mission.
Loi de finances pour 2010 - Audition de M. Benoist Apparu, secrétaire d'Etat chargé du logement et de l'urbanisme
Au cours d'une seconde réunion tenue dans l'après-midi, la commission a procédé à l'audition de M. Benoist Apparu, secrétaire d'Etat chargé du logement et de l'urbanisme.
M. Benoist Apparu, secrétaire d'Etat chargé du logement et de l'urbanisme, a tout d'abord indiqué que, globalement, la part des crédits de la mission « Ville et logement » consacrée au logement et à l'hébergement connaît une progression de 7 % en 2010, essentiellement en raison de la très forte hausse du budget des aides personnelles au logement qui, pour accompagner les Français en période de crise, augmentera de 9 % pour atteindre 5,4 milliards d'euros.
Un effort significatif est réalisé, en outre, en direction des personnes en situation d'exclusion, puisque 1,1 milliard d'euros seront consacrés à la prévention de la précarité et de l'exclusion, dont 990 millions pour l'accueil, l'hébergement et le logement adapté des personnes sans abri. La veille sociale bénéficie de cette progression pour favoriser davantage le passage de la rue à l'hébergement pour les plus exclus. De même, les centres d'hébergement et de réinsertion sociale (CHRS) sont fortement dotés en 2010 pour passer d'une logique d'urgence à une logique d'insertion. Enfin, le budget de l'aide à la gestion locative double quasiment afin de développer le logement adapté et faciliter, là aussi, les sorties d'hébergement.
La réforme de la prise en charge des personnes sans domicile, préparée et présentée avec le monde associatif le 9 novembre dernier, s'appuiera sur trois leviers prioritaires :
- un système unifié d'accueil et d'orientation dans chaque département. Aujourd'hui, il n'existe pas de coordination entre les différentes structures ; à l'avenir, un opérateur unique, certainement associatif, sera désigné pour gérer, à l'entrée dans le dispositif, l'ensemble des ressources disponibles, y compris les maraudes. Il ne s'agit pas de fusionner les structures, mais d'en assurer la coordination. A Paris par exemple, le 115 ne connaît les disponibilités que pour 30 % des places d'accueil d'urgence, ce qui est naturellement insuffisant ;
- une planification territoriale de l'offre dans chaque département, grâce à des appels à projets pour répondre à des besoins clairement identifiés ;
- une harmonisation des prestations et des coûts des structures d'hébergement par l'établissement d'un référentiel. Il s'agit de mieux identifier les missions des CHRS, pour renforcer la transparence de leur financement.
Ces trois orientations se déclinent dans vingt propositions dont l'objet est partagé avec les associations. Elles se traduisent également par la poursuite de la politique d'humanisation des centres d'hébergement et s'accompagnent d'une politique toujours volontariste dans le domaine du logement.
2009 est une année historique pour le logement, avec le plus haut niveau de financement de construction de logements sociaux depuis trente ans : grâce à l'ensemble des acteurs, collectivités territoriales et bailleurs sociaux notamment, 120 000 à 130 000 logements seront financés, soit trois fois plus qu'en 2000, dont 24 500 logements très sociaux financés en prêts locatifs sociaux d'intégration (PLAI), cinq fois plus qu'en 2000.
En 2010, les objectifs sont du même ordre, avec 93 000 prêts locatifs à usage social (Plus ou PLAI) et 53 000 prêts locatifs sociaux (PLS). Ceci étant, il importe aussi de favoriser la construction dans les zones tendues où, en réalité, seulement 25 % des logements locatifs sociaux sont construits. Toutefois, la zone B, qui correspond à une zone moyennement tendue, est divisée en deux parties : le B1 est assez tendu et se rapproche de la zone A ; le B2 est faiblement tendu. La production se répartit, dans les faits, entre 40 % en zone tendue et 60 % en zone moyennement ou faiblement tendue. Elle doit donc être partiellement réorientée, tant dans le social que dans le privé. Par exemple, en 2008, en considérant tout type de logement, on a construit un logement pour 150 habitants en Auvergne et un pour 299 en Ile-de-France, où les tensions sont naturellement plus fortes. Il arrive même fréquemment que le niveau des loyers, en sortie d'opération, soit le même entre le secteur privé et le secteur social. De plus, dans beaucoup de villes, le taux de vacance dans le locatif social est important, alors même que des opérations continuent d'être financées et de se réaliser.
Le secteur de la construction sera également fortement soutenu en 2010. Au premier semestre, le montant du prêt à taux zéro pour l'accession populaire à la propriété, doublé en 2009 dans le cadre du plan de relance, sera maintenu et il sera encore majoré de 50 % au second semestre. De plus, grâce à l'adaptation des dispositifs de défiscalisation, la profession sera accompagnée dans l'objectif de construire, en 2013, les bâtiments résidentiels en basse consommation énergétique (BBC).
Enfin, la réforme du 1 % logement se poursuivra en 2010, notamment avec la réorganisation des organismes collecteurs, dont le nombre devrait être ramené de 103 à 21 dans le courant de l'année. Or, en tant qu'actionnaire important des sociétés anonymes d'HLM, le 1 % est un acteur essentiel de la production de logements en France et dispose d'un stock d'environ un million de logements.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur pour avis pour la mission « Ville et logement », a fait valoir que la région Ile-de-France n'est pas comparable aux autres régions françaises, notamment en termes de centres d'hébergement. De plus, on constatera toujours un déficit de places si la population accueillie n'est pas mieux ciblée et définie juridiquement. Il a ensuite posé les quatre séries de questions suivantes :
- à l'initiative de la commission des affaires sociales du Sénat, la loi de finances rectificative pour 2008 a donné une nouvelle impulsion à la garantie universelle des risques locatifs (GRL), qui facilite les assurances contre les impayés de loyers. Ce dispositif nécessite cependant un décret pour entrer en application. Quel est le calendrier de son adoption et celui de l'extension de la GRL ?
- le programme 177 « Prévention de l'exclusion et insertion des personnes vulnérables », qui finance notamment l'aide en faveur des plus vulnérables au travers des CHRS, de l'hébergement d'urgence ou de l'aide alimentaire, présente tous les ans une sous-budgétisation manifeste. Qu'en est-il pour l'année 2010 ?
- la même sous-budgétisation est observée pour le programme 109 « Aide à l'accès au logement », qui connaît ainsi un report de charges persistant d'un exercice sur l'autre. La contribution de l'Etat au fonds national d'aide au logement (Fnal) progresse cependant de 8,6 % entre 2009 et 2010. Quel sera le montant de la dette de l'Etat à l'égard du fonds, à la fin de 2009 ? Quelles sont les perspectives pour 2010 ?
- le comité de suivi de la mise en oeuvre du droit au logement opposable (Dalo) a remis, fin octobre, son troisième rapport annuel, qui pointe notamment le « non-respect » de la loi et les « graves insuffisances » du dispositif. Ce rapport met également l'accent sur le cas tout à fait spécifique de la région Ile-de-France, qui regroupe les deux tiers des recours : au 30 juin dernier, au moins 7 250 ménages désignés prioritaires pour un logement par les commissions de médiation, dont 6 500 Franciliens (5 500 à Paris), n'avaient pas reçu d'offre dans le délai légal. Quelles réponses apporter à ce rapport alarmant ?
M. Thierry Repentin, rapporteur pour avis de la mission « Ville et logement » pour la commission de l'économie, du développement durable et de l'aménagement du territoire, a souhaité savoir pourquoi les crédits consacrés, d'une part, aux rapatriés, d'autre part, aux personnes âgées et handicapées sans domicile baissent autant dans le budget pour 2010. Globalement, les crédits de la mission augmentent, lorsqu'ils sont agrégés, mais cette hausse provient en fait de l'explosion des aides personnelles au logement. 70 % des nouveaux ménages entrant dans le parc locatif social ont des revenus inférieurs à 860 euros mensuels. Quelles raisons expliquent cette hausse du budget des aides au logement : le nombre d'allocataires, la crise économique ?
Enfin, en marge de la loi de finances, il a annoncé le dépôt d'un amendement au projet de loi de finances rectificative pour préserver la possibilité, dont les préfets disposaient encore il y a quelques mois, de déroger aux règles d'accessibilité des constructions aux personnes handicapées, sous certaines conditions et dans certains territoires, par exemple en montagne ou outre-mer.
Sur ce dernier point, M. Benoist Apparu a indiqué que le Gouvernement donnerait un avis favorable à un amendement de ce genre. Il a par ailleurs confirmé que l'Ile-de-France connaît une situation atypique, puisqu'elle concentre 50 % des besoins d'hébergement. Avant de parler d'un éventuel manque de places, il est nécessaire d'établir un état des lieux et une planification par département. De plus, l'hébergement ne peut plus être considéré comme une fin en soi : la priorité doit porter sur le parcours vers un logement, éventuellement un logement adapté.
En ce qui concerne la GRL, des négociations avec les partenaires sociaux et les sociétés d'assurance ont eu lieu en 2009 pour aboutir à un produit unifié et simple ; le décret d'application a été transmis au Conseil d'Etat, qui devrait l'examiner au début du mois de décembre.
Par ailleurs, en raison de l'incapacité d'évaluer les besoins du terrain, la budgétisation du programme 177 souffre d'une absence de transparence, renforcée par le déficit de connaissances sur les prestations et les coûts des structures.
Il est également difficile d'évaluer à leur juste niveau les aides personnelles au logement, parce que ce sont des dépenses contraintes. La contribution de l'Etat dépend par exemple du dynamisme de la cotisation des employeurs et de la situation de l'emploi. D'ailleurs, elle est annuellement « rebasée » pour coller à l'évolution économique.
Au sujet du Dalo, il est exagéré de parler de non-respect de la loi, car celle-ci prévoit une obligation et des pénalités financières. Pour autant, ses conditions d'application ne sont pas satisfaisantes dans quelques départements, principalement en Ile-de-France qui concentre les deux tiers des recours. Dans cette région, seuls 25 % des dossiers ont permis un accès au logement : les 17 000 décisions favorables ne se sont traduites que par 4 000 relogements. Deux améliorations peuvent être apportées à cette situation :
- la mobilisation du contingent préfectoral, justifiée par la participation de l'Etat aux deux tiers de l'effort national en faveur du logement social et qui est depuis très longtemps en déshérence en Ile-de-France ;
- la mobilisation partielle du contingent du 1 % logement, prévue par la loi du 25 mars 2009 de mobilisation pour le logement et la lutte contre l'exclusion et qui permettrait de dégager, comme pour le contingent préfectoral, environ 5 000 logements.
La diminution des crédits destinés aux rapatriés s'explique par l'achèvement, en 2009, de la procédure prévue par le décret du 4 juin 1999 pour le désendettement des rapatriés réinstallés et par le versement, effectué sur les deux années 2008 et 2009, de l'allocation aux orphelins d'anciens supplétifs. L'année 2010 ne finance donc que le report ou le reliquat de quelques dossiers.
En ce qui concerne les allocations versées aux personnes âgées et handicapées sans domicile, la baisse s'explique par la fin du plan de cohésion sociale, par le recentrage des compétences de l'Etat et par le transfert vers d'autres organismes, collectivités territoriales ou Pôle emploi.
M. Yves Daudigny a évoqué la difficulté à concilier la construction de logements sociaux, au moindre coût pour obtenir des loyers bas, et les impératifs d'économie d'énergie qui, eux, pèsent sur les coûts. Certes, ces économies permettent de diminuer à terme les charges locatives mais le bouclage financier de certaines opérations est rendu difficile au moment de l'investissement.
Mme Isabelle Debré a souhaité avoir des précisions sur le statut et le mode de désignation du futur opérateur unique de l'accueil des personnes sans abri.
Au sujet du Dalo, Mme Colette Giudicelli a estimé que le contingent préfectoral, qui bénéficie déjà aux fonctionnaires mutés et aux familles prioritaires, ne peut pas être utilisé à l'infini. Ses capacités ne vont pas augmenter significativement. De plus, toutes les familles ne s'engagent pas dans les procédures du Dalo, même si elles sont prioritaires.
Rappelant que 80 % de la population sont éligibles au logement social à La Réunion, Mme Anne-Marie Payet s'est réjouie de l'annonce, faite sur place par la ministre en charge de l'outre-mer, de la mise à disposition de réserves foncières de l'Etat pour les bailleurs sociaux, qui pourrait aller jusqu'à 40 hectares sur 156 parcelles. Cependant, des réticences administratives apparaissent, par exemple en ce qui concerne l'emplacement de l'ancienne prison Juliette-Dodu à Saint-Denis, où existe un projet de foyer pour jeunes travailleurs. Par ailleurs, le secteur du BTP est quasiment à l'arrêt, dans l'attente notamment de la sortie des décrets d'application de la loi pour le développement économique des outre-mer : quel est, en conséquence, le calendrier de leur publication ?
M. Guy Fischer s'est interrogé sur l'existence d'une volonté gouvernementale de procéder à une concertation entre les bailleurs sociaux, comme cela est en cours de réalisation pour les organismes collecteurs du 1 % logement. En matière d'hébergement des plus défavorisés, le parcours résidentiel doit être fluidifié et l'augmentation du nombre de places n'est pas la seule solution à apporter ; il est également important de donner suffisamment de moyens au budget de fonctionnement des centres pour répondre, dans des conditions correctes, aux besoins humains.
M. Marc Laménie a évoqué la contradiction récurrente entre le nombre important de personnes à la recherche d'un logement et celui des logements vacants, que ce soit en zone urbaine ou en zone rurale. De plus, les opérations programmées d'amélioration de l'habitat, qui se sont développées ces dernières années, rencontrent parfois des difficultés au moment de la location des biens, notamment en zone rurale. Enfin, les aides de l'Etat sont maintenant rares pour la rénovation des logements locatifs communaux.
Prenant l'exemple de familles devenues moins nombreuses à la suite du départ des enfants et qui souhaitent s'installer dans un logement plus petit, M. Alain Gournac a regretté que cette mobilité, pourtant intéressante pour le bailleur, soit freinée par le niveau des loyers, qui sont parfois aussi élevés pour un petit appartement que pour un grand. Par ailleurs, l'accompagnement dans les centres d'hébergement est en effet essentiel, mais il est rendu complexe par la difficulté à identifier les personnels s'occupant réellement des personnes au quotidien.
M. Alain Vasselle s'est interrogé sur le projet de la Caisse des dépôts et consignations de modifier les modalités de son financement lors des opérations de rachat de logements à des personnes surendettées qui ne peuvent plus payer leur emprunt. Or, ces procédures présentent l'intérêt social évident de permettre à ces familles de rester chez elles, voire, à terme, de racheter leur logement, ce qui est motivant pour elles. Si la Caisse interrompt son action en ce domaine, ce type d'opérations ne pourra plus être financé, ce qui serait regrettable. Par ailleurs, en raison de la politique menée pour maintenir les personnes âgées à leur domicile, de nombreux foyers-logements ne sont aujourd'hui occupés que très partiellement et connaissent en conséquence des difficultés financières importantes. Leur reconversion nécessite, d'une part, un changement de destination de l'immeuble, d'autre part, des aides spécifiques pour procéder à une restructuration lourde du bâti. Enfin, quel fondement doit-on accorder à la rumeur selon laquelle le Gouvernement souhaite la fusion des organismes de logements sociaux qui gèrent moins de 10 000 logements ?
M. Benoist Apparu a formellement démenti cette rumeur. La simple taille d'un organisme ne permet pas d'apprécier sa viabilité ou sa pertinence ; cela dépend du département ou de la zone dans laquelle il intervient.
Revenant sur la considération selon laquelle 30 % seulement de l'offre d'accueil en hébergement d'urgence seraient coordonnés, Mme Muguette Dini, présidente, a rappelé que les moyens juridiques pour assurer la gestion coordonnée de l'ensemble des capacités d'accueil existent : à l'initiative de la commission, la loi de mobilisation pour le logement de mars dernier a en effet prévu, dans chaque département, la mise en place d'un dispositif de veille sociale, sous l'autorité du représentant de l'Etat, pour accueillir les personnes sans abri ou en détresse, procéder à une première évaluation de leur situation médicale, psychique et sociale et les orienter vers les structures ou services qu'appelle leur état. La loi précise même qu'en Ile-de-France, un dispositif unique de veille sociale peut être institué à la demande et sous l'autorité du préfet de région. Pour quelles raisons ce dispositif n'a-t-il pas été mis en oeuvre et comment y remédier ? Par ailleurs, alors que les aides personnalisées au logement sont souvent versées pendant une grande partie de la vie des allocataires, ne pourraient-elles être utilisées pour permettre l'accession sociale à la propriété ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur pour avis, a souhaité connaître les intentions du Gouvernement pour taxer plus lourdement les « marchands de sommeil ».
M. Benoist Apparu a précisé que le surcoût d'un logement basse consommation est estimé à 7 % ou 8 % du coût de construction actuel, l'écart étant amené à s'estomper avec le développement des capacités et des outils. Dans le Grenelle II, des possibilités nouvelles sont offertes aux bailleurs pour vendre de l'énergie, par exemple à partir de panneaux photovoltaïques, et pour être éligibles aux certificats d'économie d'énergie qui peuvent leur apporter des ressources nouvelles. Le moindre niveau des charges consécutif à cet investissement initial se retrouve par ailleurs dans l'amortissement de l'opération. De plus, les travaux de réhabilitation peuvent bénéficier d'un prêt de la Caisse de dépôts et consignations à un taux de 1,9 % et un récent décret permet au propriétaire bailleur de profiter de l'économie de charges qui résulte des travaux de la même manière que son locataire.
Interrogée par Mme Sylvie Desmarescaux sur les modalités de calcul de ce partage, M. Benoist Apparu a précisé la liste des travaux éligibles à ce dispositif, proche de celle de l'éco-prêt à taux zéro, et mentionné la possibilité de réaliser un audit énergétique pour mesurer le gain effectif en termes de charges.
Mme Isabelle Debré a fait valoir que les travaux sont, selon le choix fiscal du propriétaire, déductibles des revenus fonciers ou de l'imposition sur le revenu.
En matière d'accueil pour l'hébergement d'urgence, M. Benoist Apparu a indiqué que les futurs opérateurs départementaux, chargés de la coordination, seront désignés par l'Etat sur des appels à projets. Le tissu associatif sera certainement le mieux à même de répondre à ces appels en raison de son expertise, mais il n'en aura pas l'exclusivité.
Par ailleurs, il n'est pas envisagé de modifier les règles du contingent préfectoral, qui s'applique sur 30 % des attributions, soit 5 % pour les fonctionnaires et 25 % pour les familles prioritaires. Mais, dans les faits, ce contingent ne s'élève qu'à environ 12 % en Ile-de-France ; il s'agit donc de mieux le mobiliser pour que le préfet puisse attribuer plus de logements.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur pour avis, a objecté que cette mobilisation s'opèrerait donc au détriment des collectivités territoriales.
M. Alain Gournac a insisté sur la nécessité de préserver la mixité dans les quartiers, dont l'équilibre ne doit pas être déstabilisé par les mesures envisagées.
M. Benoist Apparu a exprimé son accord, tout en rappelant les impératifs de la loi : loger les personnes prioritaires. Or, on sait bien que des collectivités territoriales refusent parfois certains publics.
Par ailleurs, les réticences qui apparaissent lors de mises à disposition de terrains, par exemple outre-mer, révèlent la schizophrénie traditionnelle de l'Etat, tiraillé entre le ministère du logement, qui souhaite utiliser ces terrains pour construire et le ministère des finances, qui souhaite vendre au meilleur prix. Concernant l'outre-mer, un décret d'application des dispositions relatives au logement figurant dans la récente loi pour le développement économique de ces territoires devrait être transmis dans les prochains jours au Conseil d'Etat.
Au sujet des bailleurs sociaux, il est nécessaire de distinguer les offices publics de l'habitat, expression de la volonté politique des collectivités territoriales, et les sociétés anonymes. L'Etat n'a pas à s'immiscer dans les premières, même si certaines situations sont parfois ubuesques. En revanche, pour les sociétés anonymes, leur restructuration est liée à celle des organismes collecteurs du 1 % et elle se justifie pour mutualiser, au sein d'un même groupe, les opérations réalisées en zones tendues et celles réalisées ailleurs. De même, la vente de logements sociaux est un outil en faveur de l'accession à la propriété, de la mixité et du financement des sociétés, car elle apporte des fonds propres permettant de nouvelles constructions. Ainsi, la vente de 1 % du parc des logements HLM rapporterait 2 milliards d'euros, soit environ quatre fois plus que le montant annuel des aides à la pierre.
En ce qui concerne les CHRS, les différences de coûts varient de un à cinq, ce qui est clairement excessif. Il est donc important de se doter d'un référentiel de coûts qui tienne compte des missions exercées par chaque centre.
La question des logements vacants se pose également en milieu rural, où existent aussi des zones tendues et non tendues. Pour résoudre ce problème, des objectifs de construction doivent être fixés précisément ; il est, à cet égard, contreproductif de construire dans des zones dont la population diminue.
La situation des familles où les enfants s'émancipent est révélatrice de l'absence de politique des loyers dans le secteur locatif social. Alors que le Gouvernement et les bailleurs sont naturellement favorables à la mobilité et à la libération des grands appartements sous-occupés, le niveau du loyer peut bloquer cette mobilité, car il est fixé, non pas par rapport au logement lui-même comme dans le parc privé, mais par rapport au plan de financement initial de l'opération qui s'amortit sur trente ans. Une réflexion doit être menée sur cette question, mais elle nécessitera un travail de longue haleine. Cependant, la loi de mars dernier donne enfin une base juridique pour demander aux personnes qui occupent un logement manifestement sous-occupé de le libérer.
Sur les foyers logements qui ont un taux de vacance élevé, des dispositifs existent pour aider à la transformation des bâtiments, par exemple en maisons relais, selon le conventionnement de l'opération. Plus généralement, les bailleurs ne peuvent pas en permanence réclamer des crédits à l'Etat, tout en souhaitant qu'il n'intervienne pas. Un organisme bien géré produit des fonds propres et il peut aussi vendre des biens pour construire de nouveaux logements ou réhabiliter son parc.
En ce qui concerne la connaissance du nombre de places en hébergement d'urgence, elle reste insuffisante ; par exemple, le 115 à Paris gère seulement un tiers des places d'hébergement disponibles ; les autres sont directement gérées par les associations dont elles relèvent, lesquelles sont parfois réticentes à la mutualisation. Il est temps de mieux coordonner la répartition des places et la loi de mars dernier permettra, à partir du 1er décembre prochain, de mettre cette mutualisation en place à Paris.
La possibilité de percevoir l'aide personnalisée au logement (APL) en cas d'accession sociale à la propriété existe d'ores et déjà et une mission a été confiée au président de l'union nationale de la propriété immobilière (Unpi) pour étudier les conditions d'une éventuelle transposition, dans le secteur privé, du dispositif d'accession qui fonctionne dans le secteur social : comment solvabiliser le locataire auquel le propriétaire vend le logement ?
Enfin, obliger les « marchands de sommeil » à procéder à des travaux de réhabilitation est, aujourd'hui, une procédure beaucoup trop lourde et lente à appliquer sur le terrain. Il pourrait être envisagé de raccourcir ces délais, par exemple en fixant une contrainte, sous forme d'astreinte, lorsque le maire ou le préfet demande des travaux au propriétaire et qu'il ne les réalise pas dans une période donnée.
Jeudi 26 novembre 2009
- Présidence de Mme Muguette Dini, présidente -Loi de finances pour 2010 - Mission « Régimes sociaux et de retraite » - Examen du rapport pour avis
La commission a procédé à l'examen du rapport pour avis de M. Dominique Leclerc sur le projet de loi de finances pour 2010 (mission « Régimes sociaux et de retraite »).
M. Dominique Leclerc, rapporteur pour avis, a rappelé que la mission « Régimes sociaux et de retraite » retrace les subventions versées par l'Etat pour équilibrer les comptes de plusieurs régimes spéciaux de retraite : les uns assurent la couverture vieillesse d'entreprises (SNCF, RATP) ou d'une profession (marins) ; les autres correspondent à des régimes en voie d'extinction (régimes des mines, de la Seita, des chemins de fer d'Afrique, etc.). La mission regroupe également les crédits finançant les dispositifs spécifiques aux conducteurs routiers destinés à compenser la pénibilité de leurs conditions de travail (congé de fin d'activité, complément de pension). Les régimes concernés représentent un total d'environ 860 000 pensionnés.
Cette mission budgétaire comporte d'importants enjeux financiers car les régimes spéciaux sont tous, depuis des années, structurellement déficitaires. Le nombre insuffisant de cotisants ne permet pas de couvrir la totalité des dépenses de pensions. Pour assurer le service des prestations vieillesse dues, l'Etat est dès lors contraint de leur verser des subventions d'équilibre. Ces régimes ne doivent donc leur survie qu'à la solidarité nationale.
Il en résulte une augmentation des subventions budgétaires versées : entre 2009 et 2010, les crédits progressent de 10 % pour s'élever à 5,7 milliards d'euros. Cette tendance s'explique à la fois par l'évolution à la hausse des dépenses des régimes, notamment en raison du « papy-boom », et par le mouvement à la baisse de leurs ressources, ce qui crée un « effet de ciseaux ».
Les ressources des régimes diminuent pour deux raisons : d'une part, le rendement des recettes de cotisations tend à décroître du fait de l'extinction progressive de certains régimes, comme les mines ou la Seita, ou de la réduction des effectifs, par exemple à la SNCF ; d'autre part, les transferts au titre de la « surcompensation » entre régimes spéciaux ne cessent de chuter puisqu'il est mis progressivement fin à ce dispositif. Aux termes de la loi du 21 août 2003, la « surcompensation » doit en effet disparaître à l'horizon 2012.
En conséquence, les subventions de l'Etat représentent une part de plus en plus importante dans le budget de ces régimes. Ainsi, la dotation d'équilibre couvre près de 60 % du budget des caisses de retraite de la SNCF et de la RATP, 73 % du budget du régime des marins et 83 % de celui des retraités de la Seita.
Inévitablement, le besoin de financement de ces régimes va continuer à progresser dans les prochaines années. Les dotations de l'Etat, qui jouent le rôle de variable d'ajustement, sont donc appelées à augmenter. Or, rien ne garantit qu'elles seront en mesure de suivre l'évolution des besoins. Dans un contexte budgétaire contraint, il est à craindre que l'abondement de la mission soit, à terme, insuffisant.
L'évolution des crédits pour 2010 met en lumière quatre éléments principaux. Le premier est la hausse relativement contenue (2,5 %) de la dotation à la caisse autonome de retraite de la SNCF, qui s'établit à 3,12 milliards d'euros, dans la continuité de la tendance observée ces dernières années.
Le deuxième a trait à la dotation à la caisse autonome de retraite de la RATP qui est plus conforme à la sincérité budgétaire, après avoir été largement sous-budgétisée lors des exercices précédents. Elle s'élève à 527 millions, soit une augmentation de 5,1 % par rapport à 2009.
Le troisième est la croissance de 6 % de la subvention d'équilibre accordée au régime des marins - soit 792,5 millions en 2010 - qui s'explique par l'érosion continue de leur masse salariale.
Enfin, le dernier élément porte sur la très forte progression (65 %) de la subvention versée au régime des mines qui atteint 971,6 millions. Cette évolution est la conséquence de la diminution des transferts au titre de la surcompensation et du moindre rendement des actifs immobilier du régime.
Puis M. Dominique Leclerc, rapporteur pour avis, a évoqué la réforme des régimes spéciaux engagée en 2007 par les pouvoirs publics et entrée en vigueur le 1er juillet 2008. En harmonisant progressivement les règles en vigueur dans les régimes spéciaux avec celles applicables dans les régimes de la fonction publique, cette réforme poursuit deux objectifs : rétablir davantage d'équité entre les assurés sociaux et garantir la viabilité financière de ces régimes sur le long terme.
L'adoption de la réforme des régimes spéciaux a été subordonnée à l'instauration de mesures salariales d'accompagnement, notamment à la SNCF et à la RATP (création d'échelons supplémentaires d'ancienneté, déblocage de la grille des salaires, possibilité de rachat d'années d'études, suppression de la condition d'âge pour l'affiliation au régime spécial). Le principe de la spécificité des droits des assurés de ces régimes a donc été préservé.
S'il était nécessaire de conduire cette réforme dans un souci de dialogue social, les contreparties accordées pourraient toutefois la vider d'une partie de sa substance. Il semble en effet que l'octroi de mesures de compensation aux salariés soit porteur d'un fort potentiel de dépenses supplémentaires. La SNCF, par exemple, a revu à la hausse le coût des mesures d'accompagnement : initialement évalué à 109 millions d'euros pour 2009, il serait finalement de 125 millions ; estimé à 116 millions pour 2010, il s'élèverait en fait à 146 millions ; en 2012, il atteindrait 171 millions au lieu des 120 millions envisagés l'année dernière.
Ces dépenses supplémentaires viennent « grever » les économies attendues de la réforme. A la SNCF, les gains engrangés jusqu'en 2020 (de l'ordre de 300 à 500 millions d'euros par an) chuteraient à partir de cette date à un niveau inférieur (150 millions) au coût des mesures d'accompagnement (200 millions). A la RATP, la réforme engendrerait un surcoût jusqu'en 2015 (d'environ deux millions supplémentaires par an) en raison des contreparties accordées, puis dégagerait de faibles économies (23 millions en 2020).
En définitive, les gains résultant de la réforme des régimes spéciaux pourraient, à terme, s'avérer beaucoup plus faibles pour la collectivité que ce que les prévisions initiales, particulièrement optimistes, ne le laissaient à penser. Pour autant, les crédits de la mission pour 2010 doivent être adoptés car ils sont indispensables à la survie de ces régimes de retraite.
M. André Lardeux a souligné l'intérêt du propos, qui a le mérite d'alerter sur les évolutions à venir. Ce rapport montre en particulier que la réforme du régime spécial de la RATP a des résultats limités et que celle de la SNCF produit des économies plus faibles que celles escomptées initialement. Il a demandé si l'on dispose de projections sur le coût de la réforme des régimes spéciaux de retraite pour les dix années qui viennent.
M. Dominique Leclerc, rapporteur pour avis, a confirmé que les mesures accordées aux salariés de ces entreprises, en contrepartie de l'allongement de la durée de cotisation, coûtent plus cher que prévu. En revanche, la réforme des régimes spéciaux a aussi des conséquences positives : on constate en effet que les cheminots ont tendance à retarder leur départ en retraite depuis le 1er juillet 2008.
Il n'est évidemment pas question de gommer les spécificités de certains régimes de retraite qui sont le fruit de l'histoire. Toutefois, il est indispensable de tendre vers une harmonisation des règles relatives au taux et à la durée de cotisation, afin qu'elles soient les mêmes pour tous les corps sociaux.
M. Guy Fischer a rappelé que la spécificité de chaque régime est le reflet des acquis sociaux qu'il convient de préserver.
En matière de retraite, le problème fondamental est celui de la dégradation continue du taux de remplacement. Il est intolérable que de plus en plus de retraités, notamment des femmes, vivent dans une situation de très grande précarité.
Aussi, il y a un risque que l'Etat soit confronté à des revendications toujours plus fortes de la part des retraités. Tout indique que le débat de l'année prochaine sera un des plus difficiles. A cette occasion, tous les paramètres du système actuel devront être mis sur la table : la durée de cotisation, l'âge de départ à la retraite et le taux de remplacement.
M. Dominique Leclerc, rapporteur pour avis, a relevé que la dégradation du rapport démographique, sans être toujours aussi importante qu'à la SNCF, est une question à laquelle sont confrontés tous les régimes de retraite.
Le rendez-vous de 2010 devra impérativement déboucher sur des mesures de court terme comme l'augmentation de la durée de cotisation ou le report de l'âge légal de départ à la retraite. Mais il faudra aussi que soient posés les grands principes d'une réforme plus profonde du système de retraite.
La méthode de réforme a son importance. Le système de retraite relevant d'un choix de société, il est nécessaire que tous les Français puissent participer à ce débat. A ce propos, on évoque souvent l'idée d'un « Grenelle » des retraites : quel que soit le jugement que l'on porte sur cette nouvelle méthode de négociation, elle a au moins le mérite d'impliquer l'ensemble de la société civile.
Le vrai problème aujourd'hui est de savoir quelles sont les limites de la solidarité. S'il faut ajouter chaque année 10 milliards d'euros aux recettes des régimes de retraite, il faut savoir que ces 10 milliards seront financés par l'emprunt et donc par les générations suivantes. Jusqu'où doit aller la solidarité entre les générations et à l'intérieur du corps social ? C'est sur ce sujet qu'il faudra que porte le débat.
Enfin, si l'on ne peut pas effacer du jour au lendemain les spécificités des régimes qui procèdent d'une longue histoire, il n'est pas contestable que les disparités de taux de cotisations deviennent de plus en plus insupportables.
Mme Muguette Dini, présidente, a indiqué que le président du comité d'orientation sur les retraites (Cor) lui a fait part de son souhait de présenter à la commission le rapport que le Cor doit remettre en février 2010 au Parlement, en application d'une disposition de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2009 adoptée à l'initiative de Dominique Leclerc. Ce rapport a pour objet d'étudier quelles pourraient être les modalités techniques de remplacement du calcul actuel des pensions soit par un régime par points, soit par un régime de comptes notionnels si l'on devait procéder à un changement de cette nature.
M. Dominique Leclerc, rapporteur pour avis, a rappelé que ce rapport doit permettre d'expertiser certaines expériences étrangères susceptibles d'apporter un éclairage utile sur la réflexion qui va s'engager au niveau national.
Mme Muguette Dini, présidente, a estimé qu'il serait souhaitable que ce rapport puisse être présenté à la commission au cours d'une audition ouverte à tous les sénateurs.
A l'issue de ce débat, la commission, suivant les propositions de son rapporteur pour avis, a donné un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Régimes sociaux et de retraite » inscrits dans le projet de loi de finances pour 2010.