Mardi 24 juin 2008
- Présidence de M. Claude Birraux, député, président. -Nouvelles technologies - Semi-conducteurs - Actualisation du rapport 2003
L'Office a entendu une communication de M. Claude Saunier, rapporteur, actualisant le rapport présenté en 2003 sur l'évolution du secteur des semi-conducteurs et ses liens avec les micro et nanotechnologies.
En introduction, M. Claude Saunier, rapporteur, a rappelé qu'il avait déjà réalisé une étude sur les semi-conducteurs en 2002, mais que les mutations rapides observées dans ce secteur avaient justifié son actualisation. Puis il a insisté sur le caractère stratégique du secteur de la microélectronique en expliquant qu'avec 265 milliards de dollars de chiffre d'affaires au niveau mondial, le secteur des semi-conducteurs contribuait à générer plus de 1.300 milliards de dollars de chiffre d'affaires dans les industries électroniques et 5.000 milliards de dollars dans le secteur des services, soit 10 % du PIB mondial.
En outre, M. Claude Saunier, rapporteur, a estimé que ce secteur déterminait la compétitivité des entreprises, dans la mesure où la microélectronique est répandue dans tous les domaines d'activité et qu'elle est le principal moteur de l'innovation technologique et industrielle.
Ensuite, M. Claude Saunier, rapporteur, a fait remarquer que l'industrie de la microélectronique était confrontée à un triple défi, à savoir l'explosion des coûts de recherche et de développement (R&D), de design, de logiciels et de production, la réduction du cycle de vie des produits et l'arrivée à maturité du marché des semi-conducteurs, ce qui engendre des taux de croissance moins élevés.
Il a ajouté que face à ces mutations, les entreprises devaient adapter constamment leur stratégie afin de rester rentables. Il a ainsi constaté que le modèle classique de l'intégration verticale avait été partiellement remis en cause avec l'apparition de deux nouveaux types d'entreprises : les « fabless », qui n'ont pas de capacité de production, et les fonderies, spécialisées dans la production en volume de semi-conducteurs.
Par ailleurs, il a insisté sur la nécessité pour les sociétés intégrées de nouer des alliances précompétitives afin de partager les coûts de développement des nouvelles technologies.
M. Claude Saunier, rapporteur, a ensuite présenté les perspectives scientifiques de la microélectronique en remarquant que trois voies de recherche étaient privilégiées : la poursuite de la miniaturisation des composants électroniques (« more Moore ») qui a conduit au basculement de la microélectronique dans la nanoélectronique en 2003 avec le passage de l'épaisseur du trait de gravure à 90 nm ; l'explosion du « more than Moore », à savoir l'intégration de plusieurs fonctions sur une puce ; enfin, le rôle des nanosciences pour le développement de la nanoélectronique du futur. A cet égard, il a fait remarquer que si de nombreuses pistes étaient explorées, il n'existait actuellement aucune alternative crédible techniquement et économiquement à la technologie CMOS (complementary metal oxyde semiconductor).
Puis M. Claude Saunier, rapporteur, a estimé que le secteur de la microélectronique pouvait jouer un rôle crucial pour surmonter les défis sociétaux du XXIe siècle, tels que l'explosion des dépenses de santé, les coûts liés au vieillissement de la population, la maîtrise de la consommation d'énergie, la gestion du trafic routier afin de limiter les embouteillages et les accidents de la route, ou encore le renforcement de la sécurité des biens et des personnes.
Il a néanmoins ajouté que la microélectronique posait de réels problèmes en matière d'environnement et de protection des données à caractère privé. Il a ainsi fait remarquer qu'il s'agissait d'une industrie très consommatrice en ressources naturelles (électricité, eau, matériaux rares) et fortement productrice de déchets. Il a également affirmé qu'étant amenée à faire de plus en plus appel aux nanomatériaux, elle serait directement concernée par les risques sanitaires et environnementaux liés au développement de ces derniers.
M. Claude Saunier, rapporteur, a donc encouragé le développement d'une « électronique verte » plus respectueuse de l'environnement.
Par ailleurs, il s'est inquiété des menaces qui pèsent sur la protection des données à caractère privé. Il a rappelé que la loi du 6 janvier 1978 modifiée relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, qui a créé la commission nationale de l'informatique et des libertés, avait instauré le principe du développement de l'informatique dans le respect de la vie privée et des libertés individuelles. Néanmoins, il a jugé ce principe de plus en plus fragilisé par l'amélioration et la diffusion des technologies de marquage et de traçabilité quasi invisibles.
Puis M. Claude Saunier, rapporteur, a abordé la place de l'Europe et de la France dans le secteur des semi-conducteurs et les risques qui pèsent sur cette industrie.
Il a d'abord évoqué quelques données du marché mondial et constaté que l'Asie dominait ce marché aussi bien au niveau de la demande (67,3 % des ventes globales en incluant le Japon) que de la production (69 % de la production mondiale). Il a en outre souligné, au-delà des diversités économiques, démographiques et politiques des pays d'Asie, qu'il existait un « modèle » asiatique caractérisé par une politique industrielle volontariste assortie de moyens financiers considérables.
Il a également mentionné le poids des Etats-Unis qui restent également un acteur majeur dans le secteur des semi-conducteurs, malgré l'érosion de leur part de marché dans la production mondiale. Il a illustré ses propos en constatant que si le territoire américain n'accueillait plus que 17 % des capacités de production, 49 % de la production provenaient d'entreprises américaines, témoignant ainsi du « leadership » américain.
Concernant l'industrie de la microélectronique en Europe, M. Claude Saunier, rapporteur, a d'abord insisté sur les atouts non négligeables de cette dernière. Il a rappelé qu'elle disposait de « leaders » industriels à la fois dans le secteur de la microélectronique (Soitec, ASML) et dans leurs principaux domaines d'application (l'automobile, l'éclairage, le photovoltaïque). Il a par ailleurs souligné l'existence de centres de recherche reconnus mondialement (Laboratoire d'électronique et de technologies de l'information-LETI, Interuniversity Microelectronics Center-IMEC) et s'est félicité de la création de « clusters » ayant une vraie masse critique, tels que celui de Dresde ou de Grenoble. Enfin, il a estimé que les programmes européens de recherche ont été efficaces et ont permis la création de réseaux de collaborations internationales.
Toutefois, M. Claude Saunier, rapporteur, a fait remarquer que les industriels européens étaient confrontés à plusieurs handicaps. Il s'est inquiété de ce que leur compétitivité soit dangereusement remise en cause par la dépréciation du dollar. Ensuite, il a regretté qu'ils soient pénalisés par des règles de concurrence au sein de l'Union européenne trop strictes au regard de la pratique mondiale. Par ailleurs, il a mis en avant le poids encore marginal de l'industrie européenne (14,1 % des ventes mondiales) par rapport à ses concurrents asiatiques (44,6 %) et américains (41,3 %). Enfin, il a critiqué la méconnaissance par les politiques des enjeux stratégiques liés à la microélectronique qui entraîne un désintérêt relatif pour ce secteur et empêche l'instauration d'une stratégie industrielle efficace.
Puis M. Claude Saunier, rapporteur, a dressé le bilan de l'industrie de la microélectronique en France. Il a rappelé que deux mesures avaient été adoptées récemment qui soutenaient indirectement, mais efficacement le secteur de la microélectronique. D'une part, il s'agit de la création des pôles de compétitivité qui a permis la naissance de trois pôles mondiaux dans ce secteur : le pôle Systematic en Île-de-France sur les logiciels et les systèmes embarqués, le pôle Solutions communicantes sécurisées en Provence-Alpes-Côte d'Azur et le pôle Minalogic à Grenoble. D'autre part, il a mentionné la réforme récente du crédit d'impôt recherche, particulièrement intéressante pour les grandes entreprises qui consacrent des sommes importantes en R&D, telles les entreprises de la microélectronique.
Toutefois, M. Claude Saunier, rapporteur, a regretté l'absence de stratégie industrielle en France. Il s'est référé aux modèles asiatique et américain, estimant que l'essor d'entreprises « leaders » dans de nouveaux secteurs industriels était le fruit d'un volontarisme politique qui exige une sélection des secteurs jugés prioritaires accompagnée d'un soutien financier massif et durable.
En outre, il a déploré une lisibilité de la recherche publique insuffisante et a fait remarquer que de nombreux laboratoires travaillaient sur les mêmes thématiques sans que soit vérifiée la complémentarité de leurs recherches. Enfin, il a évoqué la question de la pérennité du site de Crolles, les entreprises Freescale et NXP ayant mis un terme à leur alliance avec STMicroelectronics.
M. Claude Saunier, rapporteur, a alors rappelé les enjeux de l'industrie de la microélectronique. Il a souligné que ce secteur, avec celui du logiciel, était responsable de 90 % des innovations réalisées dans des marchés aussi porteurs que l'automobile, la médecine, la logistique et l'énergie. Il a donc estimé que sans une industrie de la microélectronique française et européenne forte et indépendante, la compétitivité de secteurs entiers de l'économie serait remise en cause et durablement affaiblie au profit de nos concurrents asiatiques et américains.
En conclusion, M. Claude Saunier, rapporteur, a présenté ses 21 recommandations visant d'une part à soutenir le secteur de la microélectronique et, d'autre part, à concilier l'essor de ce dernier avec le respect des données privées et de l'environnement.
Un large débat s'est alors ouvert.
M. Claude Birraux, député, président, a souligné l'importance de la microélectronique dans le développement de la domotique et des nouvelles pratiques médicales. Il a également insisté sur le rôle des normes dans la compétition internationale. Après avoir présenté le modèle de l'IMEC fondé sur une coopération internationale et le partage des résultats de la recherche, il s'est interrogé sur l'opportunité de relancer les programmes mobilisateurs créés par la loi sur la recherche de 1982. Enfin, il a insisté sur les réflexions éthiques que soulevait le développement des nanotechnologies. Enfin, il s'est interrogé sur une éventuelle pénurie en silicium à moyen terme.
Mme Geneviève Fioraso, députée, a défendu le modèle intégré visant à maintenir une partie de la production en interne. Elle a fait remarquer que si la France n'était pas capable de maintenir des unités de production sur son territoire, à moyen terme, les activités de recherche et de développement ainsi que de design seraient également délocalisées. Puis elle a insisté sur le caractère diffusant de la microélectronique dont les technologies sont utilisées dans bien d'autres branches industrielles, comme la mécanique ou le textile intelligent. Elle a donc estimé que ce secteur devrait faire l'objet de subventions spécifiques qui bénéficieraient in fine à d'autres domaines industriels.
A propos de la coopération entre l'IMEC et le LETI, Mme Geneviève Fioraso, députée, a constaté qu'elle était rendue difficile par le fait que ces deux instituts de recherche avaient des modèles de vente différents. Concernant l'avenir de Crolles, elle a rappelé que l'alliance signée entre STMicroelectronics, NXP et Freescale avait atteint tous ses objectifs en matière de création d'emplois et d'investissements. Elle a plaidé pour le maintien de STMicroelectronics sur ce site à long terme tout en estimant que l'aide que pourront apporter l'Etat et les collectivités territoriales jouera un rôle important dans la prise de décision. Elle a conclu en soulignant l'intérêt de mener des recherches sur la toxicité et de poursuivre les réflexions sur les technologies propres.
M. Henri Revol, sénateur, premier vice-président, s'est interrogé sur les raisons qui poussaient les entreprises à poursuivre la course à la miniaturisation compte tenu des investissements énormes que cette dernière entraînait.
Mme Marie-Christine Blandin, sénatrice, a constaté que l'efficience énergétique serait certainement un des futurs marchés porteurs de la microélectronique. Puis, elle a insisté sur la nécessité de dresser une nomenclature des nanomatériaux pour mieux appréhender leur toxicologie.
M. Alain Vasselle, sénateur, a regretté que le rapport examiné ne traite pas des conséquences en matière de santé publique de l'utilisation du téléphone portable ou de la multiplication des bornes wifi.
En réponse, M. Claude Saunier, rapporteur, a rappelé que lors de l'examen de l'étude de faisabilité, le champ d'investigation du rapport avait été délibérément limité aux semi-conducteurs, excluant de facto les problématiques liées aux nanosciences et aux nanotechnologies. Tout en reconnaissant la légitimité des interrogations que ces domaines pouvaient susciter, il a estimé que les sujets évoqués par ses collègues, tels que l'impact de l'utilisation des téléphones portables sur la santé ou encore les risques environnementaux et sanitaires liés aux nanomatériaux, méritaient un rapport spécifique.
A cet égard, M. Henri Revol, sénateur, premier vice-président, a rappelé que MM. Jean-Louis Lorrain et Daniel Raoul avaient remis en 2002 un rapport sur l'incidence éventuelle de la téléphonie mobile sur la santé. Néanmoins, à l'époque, les études épidémiologiques étaient trop récentes et trop peu nombreuses pour formuler un avis définitif sur la question. Par ailleurs, il a fait remarquer que l'Office avait été saisi par la commission des affaires économiques du Sénat sur les effets sur la santé et l'environnement des champs électromagnétiques produits par les lignes à haute et très haute tension et que le rapporteur serait désigné la semaine prochaine.
Après avoir ajouté une dernière recommandation au rapport visant à augmenter les moyens financiers consacrés à la réalisation d'études toxicologiques sur les risques liés aux nanoparticules, l'Office a adopté le rapport à l'unanimité.
Mercredi 25 juin 2008
- Présidence de M. Claude Birraux, député, président. -Gouvernance de l'Internet - Audition des membres du Board de l'Internet Corporation for Assigned Names and Numbers (ICANN), ainsi que de représentants de l'Association française pour le nommage Internet en coopération (AFNIC)
L'Office a procédé à l'audition d'une délégation du Board de l'Internet Corporation for Assigned Names and Numbers (ICANN), accompagnée de représentants de l'Association française pour le nommage Internet en coopération (AFNIC).
M. Claude Birraux, député, président, après avoir accueilli les représentants de l'ICANN et de l'AFNIC, puis présenté l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques, a rappelé que celui-ci avait organisé, en décembre 2005, à la suite du sommet mondial sur la société de l'information, qui s'était tenu à Tunis, une audition publique ouverte à la presse sur « la gouvernance mondiale de l'Internet ».
M. Peter Dengate Thrush, président du Board de l'ICANN, a rappelé les conditions dans lesquelles l'ICANN avait été créée en 1998, en insistant sur le rôle joué par le gouvernement américain, qui avait financé le développement de l'Internet et assumé les responsabilités de l'attribution des noms de domaines. L'organisation complexe mise en place, dont les principes ont été acceptés par l'ensemble de la communauté Internet, répondait à un double objectif, confier la gestion technique de l'Internet à un organisme international regroupant toutes les parties prenantes et assurer la stabilité du système.
M. Claude Birraux, député, président, a demandé quels avaient été les progrès réalisés depuis le sommet de Tunis, en notant que lors de l'audition publique organisée par l'OPECST en 2005, plusieurs critiques avaient été adressées au mode de gestion de l'Internet, notamment une sécurité insuffisante, l'absence de multilinguisme, un déséquilibre dans l'affectation régionale des noms de domaine, à plus de 70 % américains, et la place occupée par la société américaine VeriSign.
Dr Paul Twomey, Chief executive officer et président de l'ICANN, a observé que la question de la sécurité de l'Internet était rendue complexe par l'existence de trois couches successives, la première assurant le transit, la deuxième le routage et l'adressage, relevant de la responsabilité de l'ICANN et permettant aux 250 000 réseaux de la première couche de communiquer entre eux, et la troisième, chargée des applications. La plupart des problèmes de sécurité concernent cette couche logicielle, qui n'est pas du ressort de l'ICANN. L'ICANN, pour sa part, fait des efforts pour améliorer les résistances aux nombreuses attaques portant atteinte à la sécurité du routage et de l'adressage, qui ne constitue qu'un élément de la sécurité globale de l'Internet, laquelle ne peut être assurée que si toutes les parties concernées travaillent ensemble.
M. Roberto Gaetano, vice-président du Board de l'ICANN, a observé qu'en ce qui concerne la prédominance de l'anglais sur l'Internet, il fallait distinguer le contenu et l'infrastructure, les responsabilités de l'ICANN se limitant à cette dernière. Au niveau de l'infrastructure, des progrès ont été réalisés, en particulier sur les caractères utilisés qui peuvent constituer une barrière à l'accès à l'Internet. L'internationalisation des noms de domaines constitue un point sensible de l'agenda de la réunion qui se tient actuellement à Paris. Les effets d'une introduction de caractères autres que latins, tels que des caractères japonais, chinois ou arabes, pour les noms de domaines de premier niveau, se répercuteront sur les niveaux suivants, ce qui permettra au marché d'évoluer, de faciliter l'accès au Web et l'utilisation d'adresses e-mail propres à chaque langue. Par ailleurs, il convient de tenir compte de la gestion des noms de domaines des pays (ccTLD - country code Top Level Domain) qui offrent des espaces propres à chaque pays. S'agissant des contenus, le rôle des gouvernements des Etats est essentiel, comme en témoigne l'action engagée par la France pour promouvoir le français et la francophonie. Le rôle de l'ICANN est, pour sa part, de développer les infrastructures nécessaires, autorisant l'accès à l'Internet des différentes langues et écritures.
En ce qui concerne la position dominante de la société VeriSign, M. Roberto Gaetano a rappelé qu'avant la création de l'ICANN, une société, rachetée par VeriSign, occupait déjà une position de monopole sur trois domaines génériques de premier niveau (gTLD - generic Top Level Domain), « .org », « .com » et « .net », les noms de domaines étant alors vendus 35$, auxquels s'ajoutaient 15$ de taxe destinée à financer les infrastructures. Face à cette situation, l'ICANN a pris plusieurs mesures pour libéraliser le marché : dissociation des fonctions de gestion des bases de données et d'enregistrement, création de nouveaux noms de domaines de premier niveau, comme par exemple le « .biz », mise en concurrence pour l'attribution du « .org ». Ces mesures ont permis de faire baisser sensiblement les prix et de réduire la part de marché de la société dominante. L'introduction de noms de domaines avec des langues et caractères diversifiés offrira une nouvelle opportunité pour des opérateurs locaux.
M. Claude Birraux, député, président, a posé deux questions sur le risque de pénurie d'adresses IP (Internet Protocol) à l'horizon 2010 et sur l'Internet des objets.
Concernant le risque de pénurie des adresses Internet, M. Peter Dengate Thrush, président du Board de l'ICANN, a rappelé que la version initiale autorisait 4 milliards d'adresses, qui seront épuisées d'ici à 2010 en raison du développement de l'Internet. La communauté technique de l'Internet a mis au point une nouvelle version, l'IPv6, qui offre des possibilités pratiquement illimitées, équivalant à 750 adresses IP pour chaque nanomètre carré de la surface de la Terre. Les deux versions coexisteront pendant un certain temps, puis le système d'adressage actuel ne pourra plus communiquer avec IPv6. C'est pourquoi l'ICANN encourage toutes les parties concernées à adopter la nouvelle version, M. Eric Besson, secrétaire d'Etat chargé de la prospective, de l'évaluation des politiques publiques et du développement de l'économie numérique, auprès du Premier ministre, ayant donné des assurances sur ce point pour la France.
S'agissant de l'Internet des objets, Dr Paul Twomey, CEO et président de l'ICANN, a observé que l'évolution d'Internet vers la communication des objets suscitait beaucoup de discussions en Europe, alors que d'une part, l'Internet est déjà utilisé par les constructeurs aéronautiques, pour assurer le suivi des pièces embarquées dans les avions, ou par d'autres industriels pour contrôler leur chaîne d'approvisionnement, et d'autre part, la technologie sous-jacente est commune à l'Internet des objets et à l'Internet des personnes.
Abordant la question du déséquilibre entre les Etats, M. Peter Dengate Thrush a souligné que la plupart d'entre eux étaient impliqués, notamment grâce aux codes des pays et au sein du comité consultatif des gouvernements, 120 à 130 organisations de consommateurs étant par ailleurs associées. Différentes nationalités sont, en outre, représentées parmi les membres de l'ICANN, comme au sein de son conseil d'administration. Par ailleurs, l'ICANN a pris diverses initiatives pour encourager les pays où Internet n'est pas bien implanté à travailler avec elle ; en particulier, un programme de bourses bénéficiant aux pays en développement a été mis en place.
A une question posée sur la capacité de l'ONU à prendre en charge la régulation de l'Internet, M. Roberto Gaetano, vice-président du Board de l'ICANN, a répondu que l'infrastructure technologique de l'Internet était très originale et reposait sur une plate-forme distribuée où tous les acteurs se coordonnent de façon concertée. La gouvernance de l'Internet s'inspire des mêmes principes, sans aucune centralisation, faisant coopérer toutes les parties prenantes, utilisateurs, entreprises, opérateurs, société civile, distributeurs d'adresses, pour rechercher le consensus qui donne la légitimité au système. Cette procédure est une garantie pour que l'Internet fonctionne et qu'il fonctionne dans l'intérêt de tous.
M. Jean-Jacques Subrenat, directeur du Board, a rappelé que la mission de l'ICANN était de nature technique, mais que l'extension du réseau et le développement de l'Internet suscitaient diverses revendications en matière de gouvernance. Si une évolution institutionnelle n'est pas exclue à l'avenir, les exigences concernant la gouvernance devraient être prises en charge par les structures actuelles, notamment à partir de septembre 2009.
M. Peter Dengate Thrush, après avoir rappelé le rôle joué par le gouvernement des Etats-Unis dans le développement et le financement de l'Internet, comme dans la création de l'ICANN, a indiqué que le document contractuel liant celle-ci au gouvernement américain arriverait à échéance en septembre 2009, et que des discussions étaient engagées au sein de la communauté Internet pour examiner les évolutions qui s'ensuivraient. Parallèlement, l'ICANN négocie avec le gouvernement américain et VeriSign pour transférer à l'ICANN une partie des compétences techniques exercées par VeriSign sur les serveurs racines.
M. Claude Birraux, député, président, après avoir remercié les représentants de l'ICANN et de l'AFNIC, a souligné la nécessité d'associer les parlementaires des différents Etats aux réflexions de l'ICANN et à la gouvernance d'Internet, afin de donner une légitimité démocratique aux décisions prises.