Mercredi 24 octobre 2007
- Présidence de M. Claude Birraux, député, premier vice-président.Nanotechnologies - Présentation de l'étude de faisabilité du rapport
L'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques a été saisi le 19 décembre 2006 par le Bureau du Sénat, en application de l'article 6 ter de l'ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958, sur l'actualisation du rapport établi le 8 avril 2003 relatif à l'évolution du secteur des semi-conducteurs et ses liens avec les micro et nanotechnologies.
Tout d'abord, M. Claude Saunier, sénateur, rapporteur, a rappelé que trois rapports avaient déjà été publiés par l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques sur le secteur des semi-conducteurs en raison du caractère stratégique - en matière scientifique et technologique comme en matière économique et sociale - de ce secteur d'activité.
Puis M. Claude Saunier, rapporteur, a présenté les caractéristiques du secteur des semi-conducteurs.
Il a tout d'abord souligné l'omniprésence des semi-conducteurs dans la vie quotidienne et a expliqué que la « pervasion » de la microélectronique était liée à une miniaturisation poussée et à un coût de production exponentiellement décroissant.
Ensuite, M. Claude Saunier, rapporteur, a constaté le poids économique croissant du secteur des semi-conducteurs : alors que son chiffre d'affaires mondial était d'1,5 milliard de $ en 1965, il est de 265 milliards de $ en 2006, soit plus que le chiffre d'affaires du transport aérien.
M. Claude Saunier, rapporteur, a également souligné l'effet de levier que représentent les semi-conducteurs à partir des chiffres suivants : avec 265 milliards de $ de chiffre d'affaires au niveau mondial (environ 3 millions d'emplois), le secteur des semi-conducteurs contribue à générer plus de 1.300 milliards de $ de chiffre d'affaires dans les industries électroniques (environ 18 millions d'emplois) et 5.000 milliards de $ dans le secteur des services (100 millions d'emplois).
Ensuite, M. Claude Saunier, rapporteur, s'est félicité du leadership de l'industrie européenne dans plusieurs secteurs. Il a indiqué que l'Europe comptait deux entreprises parmi les dix premières mondiales, à savoir ST Microélectronics et NXP (anciennement Philips Semiconductors). Puis il a cité ASML, devenu le numéro 1 mondial dans le domaine de la lithographie avec une part de marché de plus de 50 % et SOITEC, société française qui s'est créé une situation de quasi-monopole en tant que fournisseur de l'industrie microélectronique avec le développement et l'industrialisation d'un matériau innovant : le SOI (silicium sur isolant).
Il a insisté sur l'importance stratégique de la R&D et de la maîtrise des technologies clés et a constaté que le pourcentage de chiffre d'affaires directement réinvesti dans la recherche-développement par le secteur des semi-conducteurs est de l'ordre de 18 %, ce qui en fait un des plus élevés de toute l'industrie.
Puis il a mentionné Dresde et Crolles comme les deux grands pôles européens des semi-conducteurs.
M. Claude Saunier, rapporteur, a ensuite présenté les bouleversements constatés depuis 2002 dans ce secteur. En ce qui concerne les bouleversements scientifiques, il a constaté que la microélectronique était déjà passée à l'échelle nanométrique : depuis septembre 2006, la résolution des circuits intégrés est de 65 nm et au début de l'année 2008, elle devrait passer à 45 nm pour des microprocesseurs très rapides. Parallèlement, les résolutions à 32 nm et 22 nm sont déjà en préparation.
Il a expliqué que la poursuite de la miniaturisation avait pour conséquence la complexification des procédés de fabrication et des architectures.
Puis M. Claude Saunier, rapporteur, a rappelé que pour faire face à l'inflation des coûts qui en résulte, les industries du secteur des semi-conducteurs étaient amenées à lier des alliances stratégiques dans le domaine de la R&D et de la production. Il a alors expliqué que l'alliance « Crolles 2 » signée entre Motorola (devenu Freescale), Philips Semiconductors (devenu NXP) et ST Microelectronics en 2002 ne serait pas reconduite à la fin de l'année et que ST Microelectronics avait choisi de rejoindre le cluster piloté par IBM à East Fishkill aux Etats-Unis pour développer la technologie de résolution en 32 nm.
En ce qui concerne les évolutions économiques, M. Claude Saunier, rapporteur, a souligné l'explosion des coûts de R&D, de design, de logiciels et de production. Il a illustré ses propos en notant que le prix d'une unité de production avait doublé depuis 2002, passant d'1,5 à 3 milliards de $.
Il s'est ensuite inquiété du poids croissant des pays émergents dans la microélectronique, à la fois comme clients et comme producteurs et a estimé qu'à moyen terme, la Chine (en incluant Taiwan et Singapour) et l'Asie/Pacifique devraient contribuer pour 75 % à la croissance mondiale du secteur des semi-conducteurs.
Il a alors présenté les trois modèles industriels qui se profilent :
- les fabricants de mémoires et de produits standard tels que les diodes de protection et les microprocesseurs, qui ont de gros volumes de production. Il a indiqué qu'entraient dans cette catégorie des fabricants comme Intel, Samsung, Qimonda ;
- les fabricants de produits logiques utilisant les procédés CMOS standard. Le nombre de procédés de fabrication est réduit, mais une multitude de produits est fabriquée, nécessitant un jeu de masques considérable. Il a précisé qu'il s'agissait des grands fondeurs taiwanais TSMC et UMC, qui ont construit des usines gigantesques capables de produire 60.000 plaquettes par mois sur du 300 mm ;
- les fabricants de produits dédiés et de procédés « more than Moore ». Ces entreprises utilisent plusieurs procédés de fabrication en parallèle tout en fabriquant un nombre de produits différents élevés. Les procédés sont adaptés à chaque produit et les interactions entre la conception des architectures et la fabrication sont stratégiques. Il a estimé que c'était le modèle industriel que les entreprises européennes devaient privilégier.
Puis M. Claude Saunier, rapporteur, a souligné que le secteur des semi-conducteurs soulevait de nombreuses interrogations éthiques. Il a rappelé le débat sur les RFID (Radio Frequency Identification Devices).
Il a jugé que les questions éthiques soulevées par les nanotechnologies récapitulaient en grande partie les préoccupations déjà apparues aux étapes précédentes du développement des technologies de l'information et concernant la gestion de l'information et la protection des données personnelles. Il a ajouté que la nouveauté tenait à l'intensification de ces questions à chaque création des nouveaux artefacts capables de collecter davantage d'informations à des niveaux inaccessibles auparavant.
En conclusion, M. Claude Saunier, rapporteur, a estimé qu'une étude de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques sur ce sujet était pleinement justifiée et a proposé comme formulation, s'agissant des termes et du champ de la saisine : « L'évolution du secteur de la micro/nanoélectronique ».
M. Claude Birraux, député, premier vice-président, après avoir souligné l'intérêt que représenterait une visite de l'université de Louvain, qui regroupe industriels et scientifiques sur un même site, a insisté sur la nécessité de prendre en compte, dans le cadre du rapport, les aspects sociétaux du développement des nanotechnologies.
Rappelant que l'audition publique organisée par l'Office l'année dernière avait mis en lumière diverses inquiétudes sur ce point et que le Grenelle de l'environnement avait également abordé les risques liés aux nanotechnologies, il a estimé que si la recherche avançait très vite, la société se montrait de plus en plus réservée quant aux usages des résultats de la recherche et que le Parlement devait contribuer à apporter des réponses à ces interrogations.
M. Claude Saunier, sénateur, rapporteur, ayant accepté de prendre en charge cette dimension, M. Claude Birraux, député, premier vice-président, a également évoqué les questions éthiques suscitées par la convergence des nanotechnologies, des biotechnologies et de l'informatique.
M. Daniel Raoul, sénateur, a indiqué que le champ des nanotechnologies recouvrait deux problématiques différentes, l'une liée à une approche « bottom up », l'autre relative à une démarche « top down », celle de la miniaturisation.
Puis il a posé une question sur les limites physiques de cette miniaturisation.
M. Claude Birraux, député, premier vice-président, a alors suggéré que le rapporteur présente, au cours de son étude, une communication d'étape, au vu de laquelle la désignation d'un second rapporteur pourrait être envisagée, pour examiner les différents aspects de la convergence.
M. François Goulard a souhaité obtenir des précisions sur le champ d'application de l'étude, le mot « nanotechnologies » suscitant certaines confusions.
Il a observé que, soit l'approche retenue s'intéressait au recueil, au traitement et à la conservation de l'information, avec des technologies de plus en plus performantes et une diffusion de plus en plus large, et qu'alors elle devrait s'étendre à l'informatique quantique, soit il s'agissait de traiter des nanotechnologies, lesquelles ne se limitent pas au traitement de l'information, mais s'étendent aux secteurs de la chimie, de la biologie, des matériaux.
Mme Bérengère Poletti, députée, s'est inquiétée du non-respect des normes de sécurité par certains Etats asiatiques tels que la Chine, alors qu'ils sont amenés à être les principaux producteurs dans le domaine de l'électronique à moyen terme.
En réponse, M. Claude Saunier, rapporteur, a indiqué que Louvain faisait partie des sites qu'il comptait visiter en Europe. Puis, il a fait remarquer que si la miniaturisation avait une limite ultime de caractère physique, les limites annoncées régulièrement étaient toujours dépassées. Il a par ailleurs insisté sur le fait que son rapport ne traiterait que des nanotechnologies appliquées au domaine de la microélectronique, laquelle peut être utilisée dans le domaine de la biologie, avec notamment la mise au point de biopuces.
Enfin, il a estimé que l'essor des pays asiatiques dans le domaine de la microélectronique soulevait surtout des questions en matière d'impact environnemental et de respect des règles de concurrence, dans la mesure où ces pays attribuaient des subventions importantes à leurs industriels.
Après que M. Claude Birraux, député, premier vice-président, eut souligné l'intérêt de constituer un comité de pilotage, les conclusions de l'étude de faisabilité sur « l'évolution du secteur de la micro/nanoélectronique » ont été adoptées et l'Office a approuvé la préparation d'une étude devant aboutir à la rédaction d'un rapport sur ce sujet.
Sécurité des barrages - Présentation de l'étude de faisabilité du rapport
L'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques a été saisi, le 18 juillet 2007, par la Commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire de l'Assemblée nationale, en application de l'article 6 ter de l'ordonnance n°58-1100 du 17 novembre 1958, sur l'amélioration de la sécurité des barrages hydrauliques.
Présentant son étude de faisabilité sur l'amélioration de la sécurité des barrages hydrauliques, M. Christian Kert, député, rapporteur, a observé que l'objet de la saisine de la Commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire de l'Assemblée nationale s'intégrait parfaitement dans le champ des compétences de l'OPECST, dont plusieurs rapports ont déjà été consacrés à la prévention du risque.
Cette saisine fut suscitée par la publication dans la presse, au printemps dernier, des conclusions d'un rapport censé être confidentiel, qui affirmait qu'une centaine de barrages présentaient de sérieux problèmes de sécurité.
M. Christian Kert, député, rapporteur, a indiqué que les premières auditions auxquelles il avait procédé l'avaient amené à s'interroger sur l'opportunité d'une telle étude.
La préparation de mesures réglementaires renforçant la sécurité des barrages, qui devraient être publiées à la fin du mois, les assurances données par le principal concessionnaire sur le dispositif de sécurité mis en place, les dernières études techniques parues, qui contredisent les conclusions du rapport ayant alarmé l'opinion publique, plaidaient pour un rejet de la demande d'étude.
Cependant, d'autres éléments d'information, tels le lourd bilan humain de la catastrophe du barrage de Malpasset en 1959, le constat de divers dysfonctionnements, la répétition de plusieurs incidents, certes mineurs, ainsi qu'une conscience du risque non généralisée auprès de l'ensemble des concessionnaires, exploitants ou propriétaires, l'hétérogénéité des méthodes de contrôle et l'insuffisante formation de certains personnels, mais aussi l'importance et le vieillissement du parc français de barrages et d'ouvrages militent en faveur de la poursuite de l'étude. Ils démontrent la pertinence de la demande visant à ce que cette étude soit conduite.
Puis M. Christian Kert, député, rapporteur, a rappelé que les barrages remplissaient plusieurs fonctions et que, sur le plan matériel, chaque barrage était un cas particulier, même si, généralement, on les classe dans deux ou trois catégories.
Le parc français est considérable, avec 744 ouvrages de plus de 10 mètres de haut et plusieurs milliers d'ouvrages de taille inférieure. Parmi les 296 barrages de plus de 20 mètres, 99 ouvrages, dont 25 non hydroélectriques, ont une capacité de stockage supérieure à 15 millions de mètres cubes.
Si la probabilité de rupture peut être considérée comme faible, ce risque ne saurait être négligé, compte tenu des conséquences d'un tel événement.
Le renforcement et l'extension de la réglementation relative à la sécurité de ce type d'ouvrages sont en cours. Il faut toutefois souligner que la base du régime réglementaire est constituée par un texte ancien datant de 1919. Le nouveau décret en préparation réaménage ce régime en introduisant une nouvelle classification des ouvrages et prévoit un dispositif d'agrément des bureaux d'études auxquels les maîtres d'ouvrage et les exploitants devront recourir pour la réalisation des prestations d'assistance technique, essentielles pour garantir une sécurité à long terme.
Au niveau de l'Etat, les moyens affectés au contrôle de la sécurité des ouvrages hydrauliques, DRIRE et service de police de l'eau, sont modestes et dispersés. La formation assurée aux personnels concernés est insuffisante, d'autant que les procédés de contrôle ont évolué, comme par exemple l'utilisation de caméras qui permet d'éviter la vidange totale de l'ouvrage.
La situation est préoccupante, sans être grave. Il convient donc d'examiner les éléments fondamentaux d'une politique générale et cohérente de surveillance et de contrôle et les moyens qu'il est nécessaire de mobiliser.
Le changement climatique, qui pourrait être responsable d'une surcharge en eau, conduit par ailleurs à s'interroger sur la résistance des matériaux.
L'étude doit ainsi porter à la fois sur l'état des compétences techniques car, avec l'arrêt des constructions de barrages, un savoir-faire s'est éteint, et sur le développement de recherches sur les matériaux utilisés qui ont vieilli, ainsi que sur les matériaux nouveaux susceptibles de remplacer ceux devenus obsolètes.
En outre, M. Christian Kert, député, rapporteur, a proposé d'étendre l'étude aux digues de protection soumises à un contrôle plus léger et, en conséquence, de retenir « l'amélioration de la sécurité des barrages et ouvrages hydrauliques » comme objet de l'étude.
M. François Goulard, député, a jugé l'analyse du rapporteur à la fois intéressante et inquiétante.
L'étude se justifie car, d'une part, si des assurances ont été données, elles doivent être vérifiées et, d'autre part, l'étude doit être menée dès lors que le premier examen du dispositif de sécurité auquel s'est livré le rapporteur ne lui a pas donné toutes les garanties nécessaires.
L'absence de nouvelles constructions en France a conduit à une perte du savoir-faire, alors que les compétences requises n'existent plus au sein des administrations concernées, lesquelles n'ont plus vocation à réaliser de telles constructions.
En outre, au sein de l'organisation administrative française, ce sont les personnels du génie rural qui se trouvent chargés du contrôle, en raison des compétences confiées aux directions départementales chargées de la police de l'eau, plutôt que les personnels relevant des Ponts et Chaussées, mieux formés pour exercer un contrôle sur ce type d'ouvrages. Ainsi, on peut considérer que si les compétences existent en France, elles ne sont pas forcément utilisées pour assurer le contrôle des barrages.
Le vieillissement des ouvrages est également une source d'inquiétude. Le phénomène du « cancer du béton », les risques liés à la perte de résistance des matériaux utilisés dans les années cinquante ou soixante, conduisent à s'intéresser à l'état des recherches effectuées dans ces domaines et à leurs résultats.
La question du transfert des connaissances vers les administrations chargées du contrôle et de la sécurité devra également être posée dans le cadre de cette étude, dont l'objet se révèle particulièrement intéressant.
M. Claude Birraux, député, premier vice-président, a suggéré que l'étude ne se limite pas à l'organisation des services de contrôle, mais s'étende aux nouvelles technologies de sécurité utilisées, ainsi qu'aux activités de recherche consacrées à la sécurité des matériaux.
Après que M. Claude Birraux, député, premier vice-président, eut souligné l'intérêt de constituer un comité de pilotage pour assister le rapporteur, les conclusions de l'étude de faisabilité sur « l'amélioration de la sécurité des barrages et ouvrages hydrauliques » ont été adoptées et l'Office a approuvé la préparation d'une étude devant aboutir à la rédaction d'un rapport sur ce sujet.
Technologies de compensation du handicap - Présentation de l'étude de faisabilité du rapport
L'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques a été saisi, le 30 juillet 2007, par la Commission des Affaires culturelles, familiales et sociales de l'Assemblée nationale, en application de l'article 6 ter de l'ordonnance n°58-1100 du 17 novembre 1958, sur les apports de la science et de la technologie à la compensation du handicap.
Présentant son étude de faisabilité sur les apports de la science et de la technologie à la compensation du handicap, Mme Bérengère Poletti, députée, rapporteure, a tout d'abord observé que ce sujet, malgré sa dimension politique et humaine, était peu traité et généralement abordé sous l'angle de l'accessibilité des lieux publics.
Dans ce domaine, le retard de la France est flagrant, tant en matière d'information sur les outils disponibles qu'en ce qui concerne l'organisation de lieux de conseil, essentiels pour adapter les dispositifs à chaque type de handicap, le mode de financement permettant de faire accéder les personnes handicapées aux nouvelles technologies, le développement industriel, voire les activités de recherche, étant rappelé qu'un observatoire de la recherche sur le handicap a été créé en avril dernier.
Selon Mme Bérengère Poletti, député, rapporteure, cette situation donne déjà matière à réflexion, alors que la mise en oeuvre de la loi de 2005 sur le handicap et la croissance des pathologies liées au vieillissement confrontent les pouvoirs publics à des thématiques nombreuses et complexes.
Pourtant, le développement de l'informatique, l'émergence des nanotechnologies et de la domotique, l'essor de la microélectronique, la conception de nouveaux matériaux offrent de nouvelles opportunités. Des prototypes de prothèses étonnants, capables de compenser des déficits moteurs, sensoriels, voire mentaux sont mis au point dans les laboratoires.
Cet écart entre, d'une part, les potentialités offertes tant par la recherche fondamentale que par les produits mis d'ores et déjà sur le marché, mais qui ne sont pas destinés spécifiquement aux personnes handicapées, comme le téléphone portable ou l'ordinateur, et, d'autre part, la situation actuelle pose le problème de la diffusion du progrès technique auprès des personnes handicapées.
La norme ISO 9999 définit les aides techniques comme « tout produit, instrument, équipement ou système technique utilisé par une personne atteinte d'un handicap ou d'un désavantage social, fabriqué spécialement ou existant sur le marché, destiné à prévenir, compenser, soulager ou neutraliser la déficience, l'incapacité ou le handicap ». Cette notion, très vaste, inclut les aides des plus simples aux plus sophistiquées, et couvre de nombreux domaines, de la mécanique aux technologies de l'information et de la communication. L'industrie classique, celle des téléphones portables ou de la micro-informatique, par exemple, est susceptible de fournir aux personnes handicapées des outils efficaces, dès lors qu'en amont les industriels songent à concevoir les équipements de telle sorte que des adaptations coûteuses puissent être évitées.
Mme Bérengère Poletti, députée, rapporteure, a indiqué que toutes les personnes qu'elle avait rencontrées s'accordaient sur la nécessité de placer la personne handicapée au centre du dispositif, d'analyser ses besoins et d'évaluer l'apport des aides techniques qui doivent s'inscrire dans le cadre d'un projet de vie car chaque personne handicapée à des besoins spécifiques, en particulier en matière d'insertion sociale.
La première difficulté pour le patient et ses soignants est donc d'identifier l'aide technique optimale eu égard aux besoins. Il est particulièrement difficile aujourd'hui, pour une personne, de trouver le réseau de compétence ou le dispositif d'action lui permettant de disposer d'une réponse structurée et cohérente dans le domaine des aides techniques. Ceci est particulièrement vrai en milieu rural. La mise en place des maisons départementales du handicap constitue sans doute une première réponse qu'il conviendra d'évaluer. Le recours à Internet offre un intérêt limité, car il n'est guère possible de procéder à des achats en ligne de matériels sans essai préalable, cela est vrai pour à peu près tous les types de prothèses.
Il est très probable que de nombreux patients n'ont pas connaissance des aides techniques qui pourraient faciliter leur insertion.
Pourtant, les technologies de l'information et de la communication, l'accès à Internet, le bras robotique articulé sont des outils précieux pour les handicapés, ils améliorent grandement leur situation en leur fournissant des outils efficaces de compensation et d'insertion.
L'examen des conditions dans lesquelles les personnes handicapées peuvent accéder aux technologies et matériels disponibles sur le marché conduit à étudier les différents obstacles rencontrés par les personnes handicapées en matière d'information, de financement, d'essai et de validation des matériels, de commercialisation et de procédures administratives.
Mme Bérengère Poletti, députée, rapporteure, a estimé que la dimension culturelle ne devait pas être non plus négligée. Elle a observé qu'il existait en France une certaine réticence vis-à-vis de la robotique, ainsi qu'une difficulté pour les personnes à s'approprier les outils dont elles disposent, et souligné qu'un réflexe identitaire de la part de certaines associations les conduisaient à voir dans les politiques de développement des aides techniques une volonté de négation du handicap.
Puis elle a insisté sur la nécessité de définir une politique globale dans le domaine des aides techniques au handicap, s'appuyant sur une information structurée, sur la recherche, sur une politique industrielle cohérente (étant observé que le clivage entre produits grand public et produits spécifiques d'aide au handicap s'estompe), et sur des circuits de distribution plus performants et un système de financement rénové.
Dans ces différents domaines des efforts importants sont nécessaires. La recherche appliquée semble très insuffisante et les transferts technologiques sont rares. Le marché est occupé par des sociétés étrangères et les entreprises françaises sont menacées. La recherche privée est pratiquement absente. Les centres de recherche rencontrent des difficultés pour mobiliser les industriels sur la question des aides techniques aux handicaps, du fait de la difficulté de trouver un marché important et solvable. En Europe, les prises en charge entre les différents pays se situent à des niveaux très différents et il semble que les industriels « se calent » sur les tarifs de remboursement. Le développement des aides techniques dépend largement des prises en charge de l'assurance maladie et des actions conduites par la caisse nationale de solidarité pour l'autonomie.
Mme Bérengère Poletti, députée, rapporteure, a proposé à l'Office d'approuver la poursuite de l'étude.
M. François Goulard, député, a souligné le paradoxe de la France, très en retard en matière d'aides techniques apportées aux personnes handicapées, alors que les compétences médicales et techniques sont d'un bon niveau, en se demandant si la cause d'une telle situation ne résidait pas dans l'état, franchement mauvais, des relations existant, dans le domaine du handicap, entre les professions médicales et les nouvelles technologies.
Il a jugé cruciale la question du financement. A cet égard, les pratiques bureaucratiques de la Caisse nationale d'assurance maladie, en matière de remboursement, sont une source de blocages. Rembourser un appareil dix ans après sa mise sur le marché entrave le fonctionnement et le développement de celui-ci.
Observant que le milieu médical français faisait preuve d'un intérêt très relatif pour ce type de sujet et que peu de membres du corps médical s'impliquaient, il a estimé qu'existait une fracture culturelle entre la technologie et la médecine, même si, fort heureusement, les technologies s'imposent progressivement dans le milieu médical.
Aujourd'hui, les technologies de l'information et de la communication, les nouveaux matériaux, offrent de nouvelles perspectives très prometteuses pour les personnes handicapées. Les réponses industrielles tardent cependant à venir, sauf sur les gros marchés des prothèses auditives ou des lunettes compensant des handicaps légers.
Cette situation conduit à envisager une plus forte implication du réseau hospitalier et de la recherche publique.
Les résultats décevants de la France dans ce domaine montrent que le système de recherche et de valorisation y est très mal organisé.
Estimant le sujet à la fois passionnant et très difficile, M. François Goulard, député, a conclu que l'étude, en dressant un constat de la situation et en proposant des solutions, notamment en matière de prise en charge par l'assurance maladie, permettra de défricher un domaine laissé en déshérence.
Mme Bérengère Poletti, députée, rapporteure, a reconnnu qu'en France l'attention des pouvoirs publics s'était focalisée sur les aides humaines et l'accessibilité des lieux publics, sans se préoccuper des solutions offertes par la technique et des conditions d'accès aux nouvelles technologies.
Les premières auditions ont montré que le sujet n'a pas été traité et reste méconnu, y compris par beaucoup de médecins, à la différence d'autres pays où, grâce aux financements mis en place, un secteur industriel et commercial s'est développé, créant un cercle vertueux, dont les personnes handicapées ont profité.
La difficulté du sujet réside aussi dans l'imprécision des définitions, qui rend malaisée une délimitation consensuelle du domaine d'étude consacré aux handicaps.
M. Claude Saunier, sénateur, a souhaité ouvrir deux pistes de réflexion.
D'une part, le vieillissement n'est pas assimilable à un handicap, mais il génère des incapacités et des handicaps. Dès lors, ce qui peut être fait, sur le plan scientifique et technologique, au profit des personnes handicapées, bénéficie à l'ensemble de la société.
D'autre part, la technologie recèle de multiples bienfaits, mais le concept d' « humanité augmentée » conduit à nous interroger sur les limites qu'il convient peut-être de poser à ce qui peut être fait.
M. Claude Birraux, député, premier vice-président, a suggéré que le rapport soit structuré à partir du sujet retenu, à savoir l'apport de la science et de la technologie à la compensation du handicap, ce qui permettra de mettre en évidence les solutions techniques actuellement disponibles, ainsi que les perspectives nouvelles offertes par la science et la technologie, puis de s'interroger sur les moyens susceptibles d'être mis en oeuvre pour les diffuser, au nombre desquels devrait probablement figurer la recherche coopérative européenne.
Puis, observant que deux membres, flamand et allemand, du réseau européen de l'EPTA ont effectué des travaux sur des sujets voisins - les technologies au service de l'assistance aux personnes handicapées et les perspectives des nouvelles technologies pour assister les personnes handicapées au travail - M. Claude Birraux, député, premier vice-président, a estimé qu'il serait utile d'en faire état dans le rapport.
M. Daniel Raoul, sénateur, après avoir également suggéré de recentrer le rapport sur les aspects scientifiques et techniques, tout en analysant les conditions dans lesquelles les transferts s'effectuent et les solutions envisageables pour que les personnes handicapées puissent se les approprier, a indiqué que, dans le cadre du rapport qu'il avait présenté à l'Office en 2004, intitulé « nanosciences et progrès médical », la question de la frontière entre « l'homme réparé » et « l'homme augmenté » avait été évoquée, eu égard aux progrès réalisés en matière d'implants nanométriques, lesquels pourraient être utilisés pour diriger des outils à distance.
Après que M. Claude Birraux, député, premier vice-président, eut souligné l'intérêt de constituer un comité de pilotage pour assister la rapporteure, les conclusions de l'étude de faisabilité sur « les apports de la science et de la technologie à la compensation du handicap » ont été adoptées et l'Office a approuvé la préparation d'une étude devant aboutir à la rédaction d'un rapport sur ce sujet.