Mardi 6 février 2007
- Présidence de M. Henri Revol, sénateur, président. -Renouvellement du Conseil scientifique - Désignation de nouveaux membres
L'Office a, tout d'abord, complété la désignation de son Conseil scientifique en nommant membres :
- M. Michel Caboche, Directeur de recherche à l'Institut national de recherche agronomique (INRA),
- M. Jean-Marie Danion, Directeur de l'unité Physiopathologie clinique et expérimentale de la schizophrénie de l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM),
- et M. Jean Jouzel, Directeur de recherche du département des sciences du climat au Commissariat à l'énergie atomique (CEA).
Nomination d'un rapporteur
Puis l'Office a nommé, à l'unanimité des présents, M. Claude Saunier, sénateur, rapporteur de la saisine du Bureau du Sénat sur l'actualisation de l'étude portant sur « L'évolution du secteur des semi-conducteurs et ses liens avec les micro et nanotechnologies ».
Aéronautique et espace - Politique spatiale du futur - Examen du rapport
L'Office a ensuite procédé à l'examen du rapport de M. Christian Cabal, député, et de M. Henri Revol, sénateur, président, sur « les grands domaines programmatiques de la politique spatiale du futur».
M. Henri Revol, sénateur, rapporteur, a indiqué que l'objet de la saisine de la commission des affaires économiques du Sénat est d'établir une prospective du spatial des vingt prochaines années.
M. Christian Cabal, député, rapporteur, a précisé que le précédent rapport de l'Office, publié en 2001, dont les recommandations ont été mises en oeuvre par les gouvernements successifs, a naturellement représenté une référence et une base de départ pour répondre à la nouvelle saisine.
L'un des faits majeurs de l'évolution du spatial depuis 2001 est le renforcement de la compétition mondiale dans ce secteur. Les Etats-Unis investissent 17 milliards de dollars dans le spatial civil, soit quatre fois plus que l'Europe, et allouent un budget de 20 à 25 milliards de dollars au spatial militaire, soit vingt fois plus que l'Europe, une forte hausse étant par ailleurs prévue dans les prochaines années. Après la période noire du début des années 1990, la Russie augmente fortement ses investissements spatiaux qui sont à parité avec ceux de l'Europe et vont encore augmenter dans l'avenir. La Chine manifeste de grandes ambitions, dans le spatial militaire et dans le civil, comme en attestent ses capacités récemment démontrées de destruction de satellite en orbite et ses avancées dans le positionnement et la navigation. En progression encore plus rapide, l'Inde développe ses propres technologies, tout en coopérant avec de nouveaux pays dont ceux de l'Union européenne. Enfin, de nouvelles puissances spatiales apparaissent, comme Israël, le Brésil ou l'Iran. Dans ce contexte, on peut légitimement craindre que les efforts européens ne soient largement dépassés.
M. Henri Revol, sénateur, rapporteur, a ensuite souligné la multiplication des projets de retour sur la Lune. Décidé en 2004 par le Président Bush et se traduisant déjà dans la pratique par la mise à l'étude de nouveaux lanceurs et d'un nouveau vaisseau spatial, le programme américain Constellation de retour sur la Lune en 2020 est irréversible car une éventuelle prochaine administration démocrate le poursuivra. La Russie projette une station lunaire en 2025. Le Japon, la Chine et l'Inde ont également décidé différents programmes qui permettront à terme des vols habités vers la Lune.
Pour réagir à cette concurrence forte, la France doit élaborer sa propre vision à long terme du spatial et engager l'Europe à en faire de même.
Après que M. Christian Cabal, député, rapporteur, eut exposé les éléments fondamentaux d'une vision française et européenne de l'espace, rappelé que dans les autres pays les décisions dans le domaine spatial relèvent des plus hautes autorités politiques et souligné la nécessité d'accroître le budget alloué au Centre national d'études spatiales (CNES), M. Henri Revol, sénateur, rapporteur, a abordé la question de la gouvernance européenne du spatial. Dotée d'un processus de décision interne réformé dans le sens d'une majorité qualifiée, l'European Space Agency (ESA) doit se voir reconnaître la responsabilité de la mise en oeuvre de la politique spatiale européenne. Enfin, les programmes spatiaux doivent bénéficier de l'ensemble des financements de l'Union européenne en raison de leur contribution aux politiques communes.
M. Christian Cabal, député, rapporteur, a exposé la situation du système européen de positionnement - navigation Galileo. La complexité du montage juridique, les difficultés du partenariat public-privé et l'ambition technologique du projet ont entraîné un retard qu'il convient de combler, en raison de la concurrence du système GPS modernisé et de celle des systèmes russe Glonass et bientôt chinois Beidu. Revêtant une importance déterminante dans le cadre de la lutte contre le changement climatique et du développement durable, le programme GMES (Global Monitoring of Environment and Security), qui fait de l'Europe le leader de la fédération mondiale des programmes de ce type doit être accéléré dans le cadre de structures simplifiées par rapport à Galileo, où Eumetsat (organisation européenne pour l'exploitation de satellites météorologiques) devrait jouer un rôle d'opérateur des infrastructures spatiales.
M. Henri Revol, sénateur, rapporteur, a ensuite exposé la situation mondiale du secteur des lanceurs. L'arrêt irrévocable en 2010 de la navette américaine et la perte de compétitivité des lanceurs Atlas-5 et Delta-4 conduisent les Etats-Unis à revoir de fond en comble leur politique. Simultanément, les lanceurs russes ou ukrainiens voient leurs coûts augmenter et leur fiabilité diminuer. La position de leader mondial d'Ariane-5 est donc, pour le moment, renforcée. Mais, aux Etats-Unis, l'appel à de nouvelles initiatives privées ainsi que le programme Constellation de retour sur la Lune constituent de puissants soutiens à l'industrie. Il faut donc impérativement continuer le programme Soyuz au CSG (Centre spatial guyanais), achever la mise au point du lanceur Vega et continuer le développement d'Ariane-5, avec notamment la mise au point d'un moteur de 3e étage réallumable et la qualification « vols habités » du lanceur.
Pivot des armées modernes, en raison de son apport essentiel pour les télécommunications, l'observation, l'écoute électromagnétique et l'alerte avancée, le spatial de défense doit être renforcé en France, avec notamment la commande immédiate de Syracuse-3C et d'Hélios-3. L'effort de l'Europe, qui plafonne à moins d'un milliard d'euros en cumulant les investissements nationaux, à comparer aux 20 milliards de dollars des Etats-Unis, doit être doublé pour couvrir a minima ses besoins de sécurité les plus immédiats.
M. Christian Cabal, député, rapporteur, a souligné qu'avec le retour ou l'arrivée inexorable sur la Lune d'astronautes américains, chinois et indiens, l'Europe peut d'autant moins être absente des vols habités qu'elle possède les briques technologiques essentielles que sont le lanceur Ariane-5, le cargo de fret spatial ATV (Automated Transfer Vehicle) et la capsule récupérable ARD (Atmospheric Reentry Demonstrator).
M. Henri Revol, sénateur, rapporteur, a ensuite présenté les 50 recommandations du rapport, qui tendent toutes à créer une nouvelle dynamique spatiale, seule à même de permettre le recrutement de jeunes ingénieurs indispensable pour la survie du secteur.
M Claude Birraux, député, président, a félicité les rapporteurs pour leur enquête approfondie sur les projets des puissances spatiales, anciennes ou nouvelles, et d'avoir formalisé une nouvelle vision, qui relaie celle formulée en 2001 par l'Office. Il s'est également interrogé sur la coordination européenne des efforts de recherche spatiale.
En réponse, M. Henri Revol, sénateur, rapporteur, a expliqué que l'ESA coordonne les efforts européens en matière de science spatiale.
M. Pierre Cohen, député, a regretté de ne pas avoir été associé à l'élaboration du rapport, tout en approuvant la plupart des analyses et recommandations. Une relance du financement public est indispensable, en France, à la fois pour la stratégie spatiale nationale et pour entraîner l'Europe. Compte tenu de son importance pour la lutte contre le changement climatique, le programme GMES doit devenir une priorité absolue et, pour ce faire, être intégré au discours politique. Celui-ci devrait insister sur le rôle du spatial pour lutter contre les risques naturels et industriels qui menacent notre planète, et promouvoir une nouvelle citoyenneté, avec notamment le multimédia et les télécommunications. Quant aux vols habités dont le rapport souligne l'importance avec insistance, il ne faut pas mésestimer leur coût financier, ni les enjeux des projets concernant l'exploration martienne. Il faut en outre donner une compétence spatiale à l'Europe, comme le prévoit le projet de constitution européenne.
M. Pierre Laffitte, sénateur, a félicité les rapporteurs pour la qualité de leur rapport et l'intérêt de la vision prospective qu'il propose. Les besoins de financement du secteur spatial européen justifient encore davantage sa proposition de grand emprunt européen de 150 milliards d'euros en faveur de l'innovation qui rencontre de plus en plus d'intérêt en Europe, notamment auprès de la BEI (Banque européenne d'investissement). Au demeurant, les Européens doivent être mieux sensibilisés aux enjeux spatiaux, non seulement grâce aux vols habités, mais aussi grâce à des applications toujours plus nombreuses dans la vie quotidienne.
M. Christian Cabal, député, rapporteur, a souligné que l'Europe ne peut être absente des vols habités et que le spatial de défense doit y être développé rapidement.
M. Claude Saunier, sénateur, a félicité les rapporteurs, exprimé son accord avec les recommandations et souhaité qu'elles soient hiérarchisées, le développement du spatial au service du développement durable devant recevoir la priorité numéro un.
Mme Marie-Christine Blandin, sénatrice, a souligné sa préférence pour un secteur spatial au service de la sécurité au sens large plutôt qu'à celui de la défense et, après les précisions des rapporteurs, a exprimé son accord avec leurs propositions.
M. Claude Birraux, député, président, a ensuite proposé d'approuver le rapport, qui a été adopté à l'unanimité des présents, M. Pierre Cohen déclarant s'abstenir.
Tuberculose - Demande d'organisation d'une audition publique
Enfin, l'Office a approuvé la demande d'organisation d'une audition publique sur la tuberculose présentée par Mme Marie-Christine Blandin, sénateur, et M. Jean-Pierre Door, député.