Mardi 21 mars 2006
- Présidence de M. Henri Revol, sénateur, présidentM. Henri Revol, sénateur, président, a tout d'abord informé l'Office du déroulement de la première session du partenariat « parlementaires-scientifiques ».
Union européenne - Emploi de la langue française - Protocole de Londres - Echange de vues
Puis l'Office a approuvé la demande présentée par M. Claude Birraux, député, premier vice-président, d'organisation d'une audition publique sur le protocole de Londres concernant les brevets.
Ecologie - Fabrication des éthers de glycol - Emissions des polluants des produits de grande consommation - Examen de l'étude de faisabilité
L'Office a enfin procédé à l'examen de l'étude préalable sur les problèmes de fabrication des éthers de glycol et l'évaluation scientifique des émissions de polluants des produits de grande consommation.
Mme Marie-Christine Blandin, sénateur, rapporteur, a d'abord justifié la connexité réelle des deux thèmes de saisine, confirmée par la vingtaine d'auditions menées au cours de ces derniers mois, qui conduit à proposer à l'Office de réunir ces deux saisines en un seul rapport.
Après avoir rappelé qu'il existe une grande diversité de solvants répartis en quatre familles, dont les éthers de glycol ne constituent qu'un des éléments de l'une d'entre elles, le rapporteur a proposé de limiter les investigations de l'Office à seulement quelques substances polluantes présentes dans l'air intérieur parmi les milliers qui existent.
Pour resituer l'origine de la saisine sur les éthers de glycol, Mme Marie-Christine Blandin, sénateur, rapporteur, a évoqué les multiples courriers adressés par l'Association des victimes des éthers de glycol (AVEG) aux parlementaires des deux assemblées et, singulièrement, au président de chacune d'entre elles, qui venaient s'ajouter aux articles, aux émissions ou aux fictions plus ou moins alarmants sur le thème des dangers des éthers de glycol. Le rapporteur a observé qu'après le drame de l'amiante, l'OPECST se devait de tout mettre en oeuvre pour tenter, dans la mesure de ses moyens, de contribuer à prévenir tout drame analogue, sans pour autant renoncer à distinguer les dangers réels des risques supposés des substances chimiques.
Mme Marie-Christine Blandin, sénateur, rapporteur, a ensuite rappelé que les éthers de glycol présents dans de larges gammes de produits de consommation courante ont pour caractéristique de se mêler aussi bien à la graisse qu'à l'eau. Or, le corps humain étant significativement composé d'eau et de lipides, les éthers de glycol y pénètrent avec une extrême facilité et sans déclencher aucune perception, ce qui est particulièrement dangereux lorsque ces éthers sont nocifs.
A ce jour, sur les quelque 80 éthers de glycol, une quarantaine sont actuellement exploités et, pour l'instant, seule une dizaine d'entre eux a été considérée à des degrés divers comme dangereuse pour la santé ; il importe donc de rassembler les connaissances sur les mécanismes ayant conduit à des limitations ou à des interdictions et d'être informé sur les recherches en cours. L'actualisation récente de l'expertise collective menée par l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM) en 1999 vient d'y contribuer. Il est à noter que tous les effets desdits éthers de glycol dangereux ne sont peut-être pas connus à ce jour avec certitude et que, de plus, des effets nocifs d'éthers de glycol considérés jusque là comme anodins pourraient apparaître au fur et à mesure des recherches. Sans accroître l'alarmisme ambiant, il importe donc de prendre en considération les dangers de certaines substances pour la santé humaine.
Par ailleurs, cette étude pourrait être l'occasion d'une évaluation de l'Agence française de sécurité sanitaire et environnementale (AFSSE) qui est devenue l'Agence française de sécurité sanitaire de l'environnement et du travail (AFSSET) à la suite de l'extension de ses compétences en 2005.
Quant à la saisine relative à l'évaluation scientifique des émissions de polluants des produits de grande consommation, son champ se limite aux polluants utilisés par les particuliers. Mais l'étude de cette question pourrait s'appuyer sur l'utilisation professionnelle des polluants. En effet, l'histoire a montré que les premiers symptômes des dangers de certains matériaux ou produits chimiques se manifestent d'abord chez les travailleurs au contact intensif de ces produits. Le terrain de l'observation professionnelle reste donc un moyen d'alerte privilégié alors que les études sur les pathologies liées à l'air intérieur sont encore balbutiantes.
Le rapporteur a insisté sur la nécessité de considérer l'être humain dans son ensemble. Car celui-ci peut cumuler les doses de substances nocives absorbées au cours de sa journée de travail et celles reçues à son domicile, pendant ses trajets ou durant ses loisirs. C'est pourquoi l'air intérieur, souvent plus pollué que l'air extérieur, et dont l'être humain absorbe 100 % des composants, est un milieu qui illustre bien les dangers de polluants d'usage courant pour la santé (formaldéhyde, phtalates, fumée de tabac environnementale, pesticides, sans oublier les mélanges de substances et les particules).
Au-delà de l'évaluation des risques et des dangers des éthers de glycol ou autres substances, le rapporteur a souhaité mener, dans son étude, une réflexion sur les notions d'expertise, de veille et d'alerte relatives aux substances chimiques et à leurs effets sur la santé humaine.
Cette étude compléterait la mise en place du système REACH (« Registration, Evaluation & Authorization of Chemicals ») au niveau de l'Union européenne qui, en dépit de son ambition, risque de ne pouvoir répondre à la demande d'évaluation des substances chimiques actuellement en circulation. A cet effet, le rapport de l'Office devra, au-delà du cas français, analyser les exemples européens (bonnes pratiques d'Etats voisins et articulations diverses des niveaux d'expertise et de réglementation).
A ce propos, le rapporteur a insisté sur les dizaines de milliers d'analyses de substances chimiques, exigées moins par le système REACH que par leur présence dans l'environnement quotidien ; ce qui suppose l'existence et la disponibilité de milliers de toxicologues à travers l'Europe, alors que, à en juger par le cas français, il y a pénurie d'experts dans ce domaine. En outre, le rapporteur a attiré l'attention de l'Office sur la paupérisation croissante des centres antipoison et de toxicovigilance qui jouent un rôle important et ne seront peut-être pas en mesure de continuer à l'assumer.
En conclusion, Mme Marie-Christine Blandin, sénateur, rapporteur, a proposé que les deux saisines ne donnent lieu qu'à un seul rapport, les éthers de glycol étant traités au sein des autres polluants comme un exemple particulièrement intéressant et éclairant, et d'aborder les émissions polluantes des produits de grande consommation à travers quelques polluants significatifs présents dans l'air intérieur sélectionnés à l'intérieur de trois « placards » à inventorier, à savoir, le « placard sous l'évier », le « placard du bricoleur » et le « placard du jardinier amateur ».
M. Henri Revol, sénateur, président, a souhaité avoir un exemple de quelques produits aux effets polluants mal connus. Mme Marie-Christine Blandin, sénateur, rapporteur, a cité les colliers anti-puces pour animaux domestiques qui peuvent entraîner des contaminations graves pour les enfants qui caressent ces animaux et se lèchent les doigts ; elle a également évoqué les dangers de la forte réaction chlorée provoquée par le mélange d'eau de Javel et de nettoyant pour WC ; elle a, enfin, insisté sur les émanations de formaldéhyde à l'intérieur des locaux.
M. Henri Revol, sénateur, président, s'est, également, interrogé sur l'étendue des contrôles précédant la commercialisation des divers produits. Mme Marie-Christine Blandin, sénateur, rapporteur, a relevé qu'il existait, à cet égard, une grande disparité : par exemple, chaque bombe aérosol est testée individuellement, mais pour beaucoup de produits, force est de s'en remettre au dossier fourni par les industriels sans qu'il y ait parfois de réel contrôle avant la mise sur le marché. En cas de danger, celui-ci n'est alors signalé que par les alertes épidémiologiques survenues a posteriori.
M. Henri Revol, sénateur, président, a ensuite souhaité connaître l'étendue réelle de la gravité des dangers des éthers de glycol.
Mme Marie-Christine Blandin, sénateur, rapporteur, a insisté sur la diversité de la quarantaine d'éthers de glycol exploités, qu'il fallait impérativement analyser un à un et non écarter en bloc. De ces analyses, il résulte que certains sont particulièrement toxiques, voire reprotoxiques, pouvant, par exemple, entraîner des malformations physiques de type bec-de-lièvre chez les enfants des mères exposées à ces dits éthers, ou encore altérer la fertilité masculine. Des études ont été menées par l'INSERM sur ce dernier sujet.
M. Henri Revol, sénateur, président, a demandé au rapporteur de préciser l'intitulé proposé pour le rapport de l'Office qui résultera de la fusion des thèmes des deux saisines.
En réponse, Mme Marie-Christine Blandin, sénateur, rapporteur, a proposé l'intitulé suivant : « Risques et dangers pour la santé humaine de substances chimiques d'usage courant : éthers de glycol et polluants de l'air intérieur. Évaluation de l'expertise publique et des choix opérés ».
Sur ce dernier aspect qui conduit à examiner le rôle des organismes en charge, à un titre ou à un autre, des produits chimiques et de la santé humaine, Mme Marie-Christine Blandin, sénateur, rapporteur, a souligné leur multiplicité excessive et indiqué qu'une réflexion serait à mener sur les chevauchements éventuels des compétences de ces diverses instances.
Enfin, elle a relevé que nombre d'expertises relatives à des produits polluants consistaient surtout à rassembler la littérature scientifique sur un thème, au détriment peut-être de nouvelles expertises de terrain.
En conclusion, l'Office a approuvé à l'unanimité la fusion des thèmes des deux saisines en un seul rapport, l'intitulé proposé par le rapporteur et la poursuite de l'étude sur ces bases.