Jeudi 9 mars 2006
- Présidence de M. Jean Arthuis, président.Union européenne - Conseil ECOFIN du 14 mars 2006 - Audition de M. Thierry Breton, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie
La commission des finances et les délégations pour l'Union européenne du Sénat et de l'Assemblée nationale ont procédé conjointement à l'audition de M. Thierry Breton, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, sur le Conseil ECOFIN, qui doit se tenir le 14 mars 2006.
M. Hubert Haenel, président de la délégation du Sénat pour l'Union européenne, a souligné qu'il s'agissait de la première réunion conjointe, au Sénat, de la délégation pour l'Union européenne de l'Assemblée Nationale, de la délégation pour l'Union européenne du Sénat et de la commission des finances. Il a précisé que si, lors de la réunion précédente tenue à l'Assemblée nationale, le Conseil ECOFIN avait eu lieu avant la réunion, cette fois-ci il se réunirait après, afin que le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie puisse entendre les points de vue des parlementaires avant de se rendre à Bruxelles.
M. Thierry Breton a indiqué que le Conseil ECOFIN du 14 mars 2006 serait précédé la veille d'une réunion de l'Eurogroupe, dont l'ordre du jour comprenait l'examen de la situation économique de la zone euro, de la situation du marché immobilier et des programmes de stabilité de sept parmi les douze Etats ayant adopté l'euro. Il a ajouté que le Conseil ECOFIN précité devait préparer le Conseil européen des 26 et 27 mars 2006, essentiellement consacré aux politiques de l'énergie et de la recherche.
Il a affirmé que le gouvernement procédait à des échanges constants avec M. Jean-Claude Trichet, président du conseil des gouverneurs de la Banque centrale européenne. Il a indiqué que l'analyse de la Banque centrale européenne faisait, de la reprise de l'activité économique dans la zone euro, le principal argument pour une augmentation des taux d'intérêt. Il a estimé que cela allait dans le sens de la prévision de croissance de l'économie française avancée par le gouvernement pour l'année 2006, comprise entre 2 % et 2,5 %, qui était par ailleurs compatible avec les prévisions de la plupart des conjoncturistes. Il a souligné que l'inflation restait modérée au sein de la zone euro, malgré l'augmentation du prix du pétrole. Il a souligné que la Banque centrale européenne avait confirmé qu'elle n'avait pas décidé a priori de poursuivre l'augmentation de ses taux d'intérêt, mais se réservait la possibilité de les accroître à nouveau ou non, selon l'évolution de la situation économique. Il a considéré que le ralentissement de l'augmentation des prix de l'immobilier ne remettait pas en cause les perspectives de reprise économique. Il a confirmé sa volonté de réduire le déficit des administrations publiques, considérant qu'il s'agissait d'un élément essentiel du rétablissement de la confiance des acteurs économiques, et a déclaré qu'il s'était efforcé de faire partager cette préoccupation par ses collègues.
MM. Jean-Jacques Jégou et Charles-Amédée de Courson, député, ont estimé que si le gouvernement avait effectivement fait un effort de pédagogie à ce sujet, il n'avait pas pris les mesures nécessaires pour assurer une résorption effective du déficit public.
M. Thierry Breton a rappelé que le gouvernement avait organisé, le 11 janvier dernier, une « conférence nationale des finances publiques », ce qui constituait une première. Il a précisé que cette conférence réunissait des représentants de l'ensemble des catégories d'administrations publiques. Il a indiqué que le Premier ministre souhaitait organiser au mois de juin prochain, au Parlement, un débat relatif à la réduction du déficit public et de la dette.
Il a estimé que les informations les plus récentes dont disposait le gouvernement étaient compatibles avec un déficit public de 3 % du PIB en 2005, même s'il subsistait encore une marge d'incertitude. Il a précisé que la Commission européenne partageait cette analyse. Il a ajouté que les résultats définitifs seraient connus le 1er avril prochain, date de la notification officielle à la Commission européenne.
Il a rappelé que, lors de sa nomination comme ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, le 25 février 2005, les comptes publics se dirigeaient vers un déficit public de l'ordre de 3,5 % du PIB en 2005, et que le déficit public avait été réduit, depuis, d'environ 0,5 point de PIB. Il a souligné que cela n'avait pas été facile, en particulier parce que la croissance du PIB en 2005, qui aurait dû être de 2,5 % selon la prévision associée au projet de loi de finances pour 2005, avait été de seulement 1,4 %, selon les chiffres provisoires publiés par l'INSEE.
M. Thierry Breton a confirmé que l'objectif du gouvernement était de ramener le déficit public à 2,9 % du PIB en 2006, malgré la disparition de la « soulte » des industries électriques et gazières, qui avait permis de réduire le déficit public de 0,5 point de PIB en 2005. Il a estimé que le gouvernement y parviendrait, du fait en particulier d'une croissance du PIB plus forte qu'en 2005 et au respect des engagements de dépenses pris devant le Parlement grâce notamment à l'entrée en vigueur de la LOLF. A moyen terme, il a déclaré compter sur le soutien du Parlement pour l'aider à mieux maîtriser les dépenses publiques, c'est-à-dire, outre celles de l'Etat, celles des organismes de protection sociale et des collectivités territoriales, dans le cadre du programme de stabilité 2007-2009 discuté lors de la conférence nationale des finances publiques.
Il a estimé que le programme de stabilité 2007-2009 prenait en compte la plupart des préconisations du rapport qui lui avait été remis en décembre 2005 par la commission présidée par M. Michel Pébereau, « Rompre avec les facilités de la dette publique ». Il a indiqué que l'objectif du gouvernement était de ramener les comptes publics à l'équilibre et l'endettement public à 60 % du PIB à l'horizon 2010.
Il a estimé que le mémorandum français sur la politique de l'énergie, qui avait été diffusé au sein du Conseil ECOFIN et du G8, avait été bien accueilli par les partenaires de la France.
Un débat s'est ouvert.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, après s'être félicité d'une telle audition conjointe, a souhaité savoir si l'ordre du jour « officieux » du prochain Conseil ECOFIN comprenait la question des offres publiques d'acquisition (OPA) en cours et des remous suscités par le « patriotisme économique » de la France. Il s'est interrogé sur le montant exact du déficit public de la France en 2005. Il a demandé ce que le gouvernement comptait faire pour que le solde des administrations publiques locales soit effectivement de + 0,4 point du PIB en 2009, comme le prévoyait le programme de stabilité 2007-2009, alors que ce solde avait été de - 0,1 point de PIB en 2005. Il a souligné que cet objectif constituait la principale différence entre la programmation pluriannuelle des finances publiques annexée au projet de loi de finances pour 2006 et le programme de stabilité 2007-2009, la première prévoyant un solde des administrations publiques locales de seulement - 0,1 point de PIB en 2009. Il a exprimé sa perplexité quant à l'objectif de croissance des dépenses des administrations de sécurité sociale, qui devait revenir, en termes réels, de près de 2,5 % par an au cours des dix dernières années à 0,9 % de 2007 à 2009. Il s'est interrogé sur le réalisme d'un programme tendant à réduire le déficit public par la seule maîtrise de la dépense, rappelant que la majeure partie des mesures prévues par le programme de stabilité 2007-2009 de l'Allemagne correspondaient à des augmentations de recettes, comme la TVA, dans une perspective de « TVA sociale » notamment.
En réponse, M. Thierry Breton a considéré que le prochain Conseil ECOFIN serait probablement l'occasion de parler, de façon informelle, des mouvements de concentration en cours. Il a estimé que, lorsque l'on avait affaire à des OPA hostiles et que celles-ci pouvaient avoir un impact sur l'activité économique, il était légitime que les parties prenantes s'expriment dans le cadre de leurs droits et pouvoirs, notamment pour connaître la nature des projets industriels et pour mesurer l'impact de la fusion sur l'emploi ou la recherche. Il a affirmé que le gouvernement n'était ni pour ni contre l'OPA de Mittal sur Arcelor, mais souhaitait permettre aux actionnaires de prendre position en pleine connaissance de cause, alors que, deux mois après le début de l'opération, l'on ne connaissait toujours pas le contenu du projet industriel. Il a considéré que cette attitude, responsable, n'était pas propre au gouvernement français, mais était aussi celle du gouvernement des Etats-Unis dans le cas de l'OPA hostile d'une entreprise chinoise sur l'entreprise californienne Unocal, ou du gouvernement britannique dans celui de l'OPA hostile engagée par l'entreprise russe Gazprom sur Centrica, sous le contrôle de British Gas. Il a estimé que le rapprochement actuellement en cours entre Suez et Gaz de France s'inscrivait dans le cadre de l'accélération des concentrations dans le domaine de l'énergie, à laquelle on assistait depuis peu en Europe et dans le monde, notamment du fait de la flambée des cours du pétrole et de la nécessité pour les opérateurs de « peser » pour signer des contrats à long terme avec une stabilité des prix des livraisons. Il a affirmé que les dirigeants de Suez et Gaz de France lui avaient fait part, dès le mois d'octobre 2005, de l'éventualité d'un rapprochement entre leurs deux entreprises, et que la rumeur d'une OPA hostile d'Enel sur Suez, parue le 21 février dernier dans la presse italienne, et non démentie le lendemain par le président d'Enel, n'avait fait qu'accélérer ce processus. Il a déclaré que si le Premier ministre avait décidé d'annoncer lui-même ce rapprochement, c'était tout simplement parce qu'il n'était possible qu'avec l'accord de l'actionnaire majoritaire de GDF, l'Etat, et qu'il supposait une modification de la loi n° 2004-803 du 9 août 2004 relative au service public de l'électricité et du gaz et aux entreprises électriques et gazières. Il a considéré que cette démarche ne traduisait aucun protectionnisme.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, a considéré que les Etats ne pouvaient pas se désintéresser de leur autonomie en matière énergétique, et a rappelé que M. Aymeri de Montesquiou devait prochainement publier un rapport d'information à ce sujet, dans le cadre de la délégation pour l'Union européenne du Sénat. Il s'est interrogé sur l'existence, au niveau européen, d'une réflexion collective sur la stratégie à conduire dans le domaine de l'énergie.
En réponse, M. Thierry Breton a considéré qu'il n'existait pas de vision européenne en matière d'énergie, et que c'était pour cette raison que la France avait publié un mémorandum sur le sujet. Il a considéré que l'essentiel était que l'Europe permette à ses entreprises d'atteindre des tailles suffisantes pour faire face à la concurrence d'entreprises de pays tiers. Il a indiqué qu'il y aurait un débat sur l'énergie au Parlement, du fait de la nécessité de modifier la loi n° 2004-803 du 9 août 2004 précitée.
M. Hubert Haenel, président de la délégation du Sénat pour l'Union européenne, a souhaité connaître la date de ce débat.
En réponse, M. Thierry Breton a indiqué qu'il était trop tôt pour le savoir, notamment parce qu'il avait engagé une concertation avec les organisations syndicales, ajoutant qu'il était de l'intérêt de la France d'engager ce débat dans les semaines prochaines pour le mener avant l'été.
M. Pierre Lequiller, président de la délégation pour l'Union européenne de l'Assemblée nationale, s'est inquiété du déroulement des négociations relatives aux perspectives financières 2007-2013 de l'Union européenne et a déploré la proposition du Conseil européen de réduire, notamment, les crédits de la culture. Il s'est interrogé sur les perspectives d'adoption de l'euro, au 1er janvier prochain, par l'Estonie et la Lituanie, alors que ces Etats avaient un taux d'inflation élevé. Il a considéré que la relance d'une Europe en crise devrait venir de l'Eurogroupe, notamment dans le domaine industriel.
Faisant allusion à l'audition de MM. Bertrand de Mazières et Benoît Coeuré, respectivement directeur général et directeur général adjoint de l'Agence France-Trésor, à laquelle la commission des finances avait procédé la veille, M. Aymeri de Montesquiou s'est demandé dans quel délai la France pourrait rééquilibrer ses finances publiques.
M. Denis Badré a considéré que les négociations sur les perspectives financières 2007-2013 de l'Union européenne ne pourraient aboutir à un résultat satisfaisant si les Etats membres ne retrouvaient pas le sens de l'intérêt commun et a souhaité que la France prenne une initiative en ce sens. Il a considéré que la contribution nette de la France devait être réduite, que le rabais accordé au Royaume-Uni devait être supprimé, et qu'il n'était pas possible de continuer avec un budget dont les recettes étaient votées par les Parlements nationaux et les dépenses votées par le Parlement européen.
M. Jean-Jacques Jégou a souhaité savoir si le gouvernement avait l'intention de se conformer à la demande, faite le 22 février 2006 par la Commission européenne dans son avis sur le programme de stabilité 2007-2009 de la France, que la France « prenne des mesures additionnelles en 2006 de plus de 0,25 point de PIB ».
Résumant ses précédentes questions posées au ministre, M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, s'est interrogé sur la crédibilité du programme de stabilité 2007-2009.
En réponse, M. Thierry Breton a considéré que le respect de la norme de progression des dépenses publiques fixée par le programme de stabilité 2007-2009 dépendait non seulement de l'Etat, mais aussi des autres administrations publiques. Il a rappelé à cet égard qu'il avait été le premier ministre de l'économie, des finances et de l'industrie à organiser une « conférence nationale des finances publiques », réunissant l'ensemble des acteurs concernés.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, a considéré que la consultation des collectivités territoriales avait été plutôt formelle.
En réponse, M. Thierry Breton a confirmé son intention de débattre au Parlement au mois de juin des modalités de réduction du déficit public, afin que cette politique engage l'ensemble des acteurs publics. Il a souhaité qu'à cette occasion le Parlement vote un programme de réduction pluriannuel des déficits publics. Il a jugé que la réduction de la dette publique permettrait aux acteurs économiques d'avoir davantage confiance en l'avenir et aux ménages de réduire leur épargne de précaution.
Il a considéré qu'il fallait aller vers une disparition du rabais du Royaume-Uni, ce que prévoyait l'accord trouvé en décembre dernier, et qu'une réforme d'ensemble du budget de l'Union européenne était souhaitable à terme, mais il a estimé que la victoire du « non » au référendum du 29 mai 2005, relatif à la ratification du traité établissant une Constitution pour l'Europe, n'avait pas renforcé la position de la France pour remettre en question le système budgétaire européen.
Il a considéré que si la Slovénie pourrait rapidement adopter l'euro, à titre personnel, il estimait que la situation n'était pas encore mûre pour les deux autres candidats.
Il a jugé que le point de vue de la Commission européenne, selon lequel la France devrait réaliser en 2006 un effort de consolidation budgétaire supplémentaire à hauteur de 0,25 point de PIB, venait du fait que la prévision de croissance du PIB de la Commission européenne était excessivement pessimiste.
M. Hubert Haenel, président de la délégation du Sénat pour l'Union européenne, a proposé de continuer à entendre, alternativement au Sénat et à l'Assemblée nationale, le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, avant les Conseils ECOFIN.
Mardi 14 mars 2006
- Présidence de M. Jean Arthuis, président.Loi de finances - Sécurité sanitaire - Exécution du budget 2006 - Décret d'avance - Communication
La commission a examiné, sur le rapport de M. Philippe Marini, rapporteur général, le projet de décret d'avance portant annulation et ouverture de crédits, ayant pour objet de financer, d'une part, le plan du gouvernement mis en oeuvre pour faire face à l'épidémie de chikungunya, d'autre part, les mesures d'urgence relatives à l'épizootie de grippe aviaire.
M. Jean Arthuis, président, a indiqué que l'objet de la réunion de la commission était, pour ainsi dire, « historique », puisqu'il s'agissait, pour la première fois, de se prononcer, conformément aux dispositions de l'article 13 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF), sur un projet de décret d'avance. Il a précisé que le présent projet de décret portant ouverture et annulation de crédits avait été transmis aux commissions des finances de chaque assemblée dans la soirée du vendredi 10 mars 2006 et qu'il avait donc décidé de réunir la commission dans les meilleurs délais. Il a rappelé qu'il avait diffusé, dès le samedi 11 mars 2006, le projet de décret à l'ensemble des membres de la commission.
M. Philippe Marini, rapporteur général, a rappelé, dans un premier temps, que l'article 13 de la LOLF disposait que des crédits supplémentaires pouvaient être ouverts par décrets d'avance, dans le respect des conditions de procédure suivantes : recueil de l'avis du Conseil d'Etat et de celui des commissions chargées des finances de l'Assemblée nationale et du Sénat. Il a précisé que le décret d'avance portait ouverture et annulation de crédits, pour un montant de 140.820.000 euros. Il a également indiqué que l'avis des commissions des finances des deux assemblées devait être transmis au Premier ministre dans un délai de sept jours à compter de la notification du projet de décret.
Remarquant que la commission des finances était saisie avant que l'avis du Conseil d'Etat ne fut rendu, M. Philippe Marini, rapporteur général, a précisé que cette séquence avait sans doute paru nécessaire au gouvernement, pour permettre au Conseil d'Etat d'examiner un projet de décret d'avance tenant éventuellement compte de l'avis des commissions des finances des deux assemblées.
Il a également relevé que le rapport de motivation associé au projet de décret d'avance était substantiel et constituait un élément d'information indispensable pour apprécier les conditions de fond posées par l'article 13 de la LOLF.
M. Philippe Marini, rapporteur général, s'est ensuite intéressé au respect des prescriptions prévues par la LOLF. Il a indiqué que, s'agissant des ouvertures de crédits, deux conditions de fond devaient être respectées. D'abord, il a rappelé que le montant cumulé des crédits ouverts par le décret d'avance ne pouvait excéder 1 % des crédits autorisés par la loi de finances de l'année et remarqué, qu'en l'espèce, ce plafond de crédits n'avait pas été atteint par le décret d'avance.
Ensuite, il a souligné que le projet de décret d'avance devait respecter la condition d'urgence posée par l'article 13 de la LOLF. Il a estimé qu'une situation d'urgence correspondait à une situation qu'il n'était pas possible de prévoir au moment de la préparation et du vote de la loi de finances initiale. Il a donc constaté, s'agissant du décret d'avance qui était aujourd'hui soumis à la commission des finances, que la condition d'urgence était respectée. Il a, en effet, rappelé que le décret d'avance tendait à financer des mesures visant à lutter, soit contre l'épidémie de chikungunya qui touche l'île de la Réunion, à concurrence de 72,82 millions d'euros, soit contre l'épizootie de grippe aviaire, à hauteur de 68 millions d'euros, ainsi qu'à accompagner les acteurs économiques touchés par les deux crises sanitaires. Il a souligné que ni l'ampleur, ni les conséquences économiques de ces deux crises ne pouvaient être connues au moment de l'examen du projet de loi de finances pour 2006.
Puis M. Philippe Marini, rapporteur général, a insisté sur le fait que l'équilibre budgétaire voté par le Parlement pour la loi de finances initiale pour 2006 était respecté, puisque le montant des crédits qu'il était prévu d'annuler pour 2006 était égal à celui qu'il était prévu d'ouvrir, à titre d'avance, soit 140.820.000 euros. En outre, il a constaté que les crédits annulés n'étaient plus disponibles, conformément à l'exposé général des motifs du projet de loi de finances initiale pour 2006, qui avait effectivement annoncé que 5,5 milliards d'euros seraient mis en réserve en cours d'exécution, soit un taux global de mise en réserve de 2 % sur le total des crédits dont l'ouverture avait été demandée dans le projet de loi de finances initiale pour 2006.
Il a fait savoir que les annulations prévues par le projet de décret d'avance représenteraient, selon le gouvernement, un abattement général de 3,9 % sur les mises en réserve hors titre 2, applicable aux programmes non bénéficiaires d'ouvertures de crédits, sauf dépenses « quasi obligatoires », sous réserve des aménagements particuliers demandés par les ministères pour certaines répartitions entre programmes. Enfin, il a noté que le montant cumulé des annulations ne dépassait pas le plafond de 1,5 % des crédits de la loi de finances initiale pour 2006, fixé par l'article 14 de la LOLF.
Dans ces conditions, M. Philippe Marini, rapporteur général, a proposé à la commission des finances d'émettre un avis favorable sur le projet de décret d'avance portant ouverture et annulation de 140.820.000 euros, notifié le 10 mars 2006 par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
M. Philippe Marini, rapporteur général, a ensuite souhaité faire part à la commission des finances de ses observations sur les mouvements de crédits affectant les différentes missions du budget général.
En matière d'ouvertures de crédits, il a indiqué que le projet de décret d'avance prévoyait, s'agissant de la mission interministérielle « Sécurité sanitaire », une ouverture de crédits, pour 2006, de 24,82 millions d'euros, et a noté, en revanche, que ce projet de décret d'avance ne prévoyait aucune annulation de crédits sur cette mission pour 2006. Il a précisé que ces ouvertures de crédits comprenaient une ouverture de crédits à hauteur de 16 millions d'euros sur le programme « Sécurité et qualité sanitaires de l'alimentation » et une ouverture de crédits à hauteur de 8,82 millions d'euros sur le programme « Veille et sécurité sanitaires ».
M. Philippe Marini, rapporteur général, a annoncé que le projet de décret d'avance envisageait l'ouverture, pour 2006, de 52 millions d'euros de crédits, applicable au programme « Valorisation des produits, orientation et régulation des marchés » de la mission « Agriculture, pêche, forêt et affaires rurales ». Il a signalé que cette enveloppe de 52 millions d'euros recouvrait, notamment, une aide de 20 millions d'euros en faveur des éleveurs professionnels de la filière avicole, comprenant trois types de mesures : l'indemnisation des « vides sanitaires » des éleveurs, un soutien particulier apporté aux éleveurs de volailles situés dans le périmètre de protection défini autour du foyer découvert dans le département de l'Ain, enfin, une mesure de soutien spécifique aux éleveurs de volailles en plein air, engagés dans les filières de qualité. Enfin, il a précisé que l'enveloppe de 52 millions d'euros permettrait de financer une aide de 30 millions d'euros en faveur des entreprises de la filière avicole spécialisées dans l'abattage et la transformation de volailles de chair ainsi qu'une campagne d'information et de communication relative à la consommation de viandes de volaille, pour un montant de 2 millions d'euros.
Il a également relevé que la mission « Outre-mer » bénéficierait d'ouvertures de crédits en partie compensées par des annulations et que, sur 78,82 millions d'euros prévus afin de mettre en oeuvre le plan du gouvernement face à l'épidémie de chikungunya, seuls, 30 millions d'euros seraient gérés par le ministère de l'outre-mer. Il a précisé que ces crédits étaient destinés à soutenir les entreprises locales non éligibles au Fonds d'intervention pour les services, l'artisanat et le commerce (FISAC), c'est-à-dire les entreprises qui réalisent un chiffre d'affaires de plus de 800.000 euros par an. Il a fait remarquer que, si l'on additionnait les crédits du FISAC et les crédits de la mission « Outre-mer », 59,55 millions d'euros étaient prévus pour soutenir les entreprises affectées.
En ce qui concerne la mission « Ecologie et développement durable », M. Philippe Marini, rapporteur général, a précisé qu'elle bénéficierait de crédits supplémentaires à hauteur de 1,5 million d'euros, inscrits sur le programme « Prévention des risques et lutte contre les pollutions », action 04 « Gestion des déchets et évaluation des produits ».
Ensuite, il a fait observer que les crédits de 30 millions d'euros ouverts au titre de la mission « Développement et régulation économiques » correspondaient aux annonces faites par le Premier ministre au cours de sa récente visite sur l'île de la Réunion en faveur de l'économie locale, affectée par l'épidémie de chikungunya. Il a précisé que ces fonds, affectés au programme « Développement des entreprises », seraient gérés par le Fonds d'intervention pour les services, l'artisanat et le commerce (FISAC). Il a également souligné que les premières estimations laissaient supposer qu'environ 35.000 entreprises réunionnaises pourraient être éligibles à ces aides et que le montant de 30 millions d'euros devrait permettre de tenir plus de trois mois, sauf si l'épidémie devait encore s'aggraver.
S'agissant de la mission « Recherche et enseignement supérieur », il a rappelé qu'au cours de sa visite sur l'île de la Réunion, le Premier ministre avait annoncé la mobilisation de 9 millions d'euros en faveur de la recherche pour lutter contre l'épidémie de chikungunya et que, sur ce total, 6,5 millions d'euros correspondaient à des redéploiements de crédits, tandis que le solde de 2,5 millions d'euros provenait des ouvertures de crédits prévues par le projet de décret d'avance.
Enfin, M. Philippe Marini, rapporteur général, a relevé que la mission « Politique des territoires » bénéficiait, dans le projet de décret d'avance, d'une ouverture de 450.000 euros, imputés sur le programme n° 223 « Tourisme », permettant de financer une campagne de promotion de la destination réunionnaise, ainsi que le développement des données économiques sur la Réunion.
Puis M. Philippe Marini, rapporteur général, a fait état des annulations de crédits prévues par le projet de décret d'avance en rappelant qu'elles représenteraient, selon le gouvernement, un abattement général de près de 3,9 % sur les mises en réserve hors titre 2, applicable aux programmes non bénéficiaires d'ouvertures de crédits, sauf dépenses « quasi obligatoires », sous réserve des aménagements particuliers demandés par les ministères pour certaines répartitions entre programmes.
Il a d'abord fait le point sur les redéploiements de crédits au sein de missions bénéficiant d'ouvertures de crédits.
Au sujet de la mission « Agriculture, pêche, forêt et affaires rurales », il a fait mention d'une annulation de crédits de 2.591.453 euros, applicable aux programmes « Forêt », « Conduite et pilotage des politiques de l'agriculture » et « Gestion durable de l'agriculture, de la pêche et développement rural ».
Puis il a signalé que la mission « Développement et régulation économiques » était affectée par des annulations de crédits d'un montant de 1,4 million d'euros, que la mission « Ecologie et développement durable » connaîtrait des annulations de crédits à hauteur de 383.579 euros et que 726.000 euros seraient annulés sur le programme « Conditions de vie outre-mer » de la mission « Outre-mer », qui serait toutefois affectée par une proportion de crédits annulée très inférieure à la règle générale appliquée par le gouvernement. Il a également précisé que la mission « Politique des territoires » ferait l'objet d'une annulation de crédits de 1,042 million d'euros et, enfin, qu'il en serait de même de la mission « Recherche et enseignement supérieur », pour un montant de 10,9 millions d'euros.
S'agissant des missions « purement contributrices », M. Philippe Marini, rapporteur général, a précisé qu'au sein de la mission « Action extérieure de l'Etat », les annulations de crédits proposées s'élevaient à 3,95 % des crédits hors titre 2 mis en réserve, soit 2.715.094 euros. Il a également relevé que la mission « Administration générale et territoriale de l'Etat » ferait l'objet d'une annulation de crédits de 1.233.589 euros, soit 0,0558 % de ses crédits et que cette annulation correspondait, également, à 3,95 % des crédits mis en réserve pour la mission, par la loi de finances initiale hors titre 2. En ce qui concerne les annulations de crédits sur la mission « Aide publique au développement », il a précisé qu'elles portaient sur les deux programmes de la mission, à savoir le programme « Aide économique et financière au développement » et le programme « Solidarité à l'égard des pays en développement » pour un total de 3,19 millions d'euros, soit 2,47 % des crédits mis en réserve. Il a souligné que la part des annulations sur la mise en réserve était inférieure à 3,9 %, dans la mesure où la mission « Aide publique au développement » comporte une part significative de dépenses obligatoires.
Puis M. Philippe Marini, rapporteur général, a relevé que la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation » subirait une annulation de crédits de 3,14 millions d'euros, que la mission « Conseil et contrôle de l'Etat » ferait l'objet d'une annulation de crédit de 124.290 euros, tandis que les annulations de crédits de la mission « Culture » s'élèveraient à plus de 2,35 millions d'euros pour représenter 4,7 % des crédits mis en réserve et que les annulations de crédits de la mission « Défense » se monteraient à plus de 35,6 millions d'euros pour atteindre 4,38 % des crédits mis en réserve, et 0,1 % des crédits de paiement totaux ouverts en loi de finances pour 2006. Il a également précisé que la mission « Direction de l'action du gouvernement » ferait l'objet d'une annulation de crédits de 587.071 euros, que la mission « Gestion et contrôle des finances publiques » serait affectée par des annulations de crédits de 3,25 millions d'euros, que la mission « Justice » ferait l'objet d'une annulation de crédit de 4,46 millions d'euros, soit 3,95 % des crédits mis en réserve, hors titre 2, et que la mission « Santé » connaîtrait des annulations de crédits de 704.871 euros, soit un peu moins de 4 % des crédits mis en réserve.
S'agissant de la mission interministérielle « Sécurité », M. Philippe Marini, rapporteur général, a relevé qu'elle ferait l'objet d'une annulation de crédits de près de 4,3 millions d'euros, soit 3,95 % des crédits mis en réserve, hors titre 2, et a précisé que l'effort serait également réparti entre les deux programmes de la mission. Il a également souligné que la mission « Sécurité civile » serait concernée par l'annulation de 532.215 euros et que la mission « Solidarité et intégration » connaîtrait des annulations de crédits à hauteur de plus de 15,7 millions d'euros, dont plus de 13,7 millions d'euros sur le programme « Handicap et dépendance ».
Enfin, M. Philippe Marini, rapporteur général, a noté que la mission « Sport, jeunesse et vie associative » ferait l'objet d'annulations à hauteur de 3,95 % des crédits mis en réserve, hors titre 2, que la mission « Stratégie économique et pilotage des finances publiques » serait affectée par des annulations de crédits à hauteur de 554.239 euros, la mission « Transports » par des annulations de plus de 7,8 millions d'euros et que deux des quatre programmes de la mission « Ville et logement » connaîtraient des annulations pour un montant total de près de 3,4 millions d'euros. A cet égard, il a toutefois précisé qu'au sein de cette mission, les deux autres programmes, « Aide à l'accès au logement » constitués des crédits des aides personnelles au logement, et « Rénovation urbaine » regroupant les crédits de l'Agence nationale de rénovation urbaine (ANRU), avaient été écartés des mesures d'annulation qui ne représentaient, en conséquence, que 0,95 % des crédits mis en réserve au début de l'exercice budgétaire.
M. Jean Arthuis, président, a ensuite remercié le rapporteur général pour la qualité et la clarté de sa présentation. Il a précisé que le Conseil d'Etat pourrait donner son avis après celui formulé par la commission des finances de chaque assemblée. Il a, en outre, insisté sur le fait que les conditions de forme associées à la procédure de décret d'avance avaient été respectées.
Puis un large débat s'est instauré.
Mme Nicole Bricq, en sa qualité de rapporteur spécial de la mission « Sécurité sanitaire », a d'abord estimé que, sur la forme, les critères relatifs au caractère d'urgence de l'ouverture des crédits par le projet de décret d'avance n'avaient pas été respectés dans la mesure où la commission des finances du Sénat, avait, à l'occasion du rapport spécial qu'elle avait présenté sur le budget de la mission « Sécurité sanitaire » pour 2006, alerté le gouvernement au moment de l'examen du projet de loi de finances initiale pour 2006 de la sous-évaluation des hypothèses budgétaires concernant la survenance du risque d'épizootie aviaire sur le territoire national. Elle a, en outre, rappelé qu'elle avait défendu au Sénat, au nom de la commission des finances, lors de l'examen de la mission « Sécurité sanitaire », un amendement tendant à transférer un montant de 15 millions d'euros du programme « Veille et sécurité sanitaires » vers le programme « Sécurité et qualité sanitaires de l'alimentation » accueillant les crédits destinés à la prévention et à la lutte contre l'influenza aviaire. Elle a précisé que le projet gouvernemental de décret d'avance prévoyait, aujourd'hui, l'ouverture de 16 millions d'euros sur ce même programme, ce qui confirmait, a posteriori, l'analyse alors formulée par la commission des finances. En outre, elle a indiqué qu'il était plus pertinent de parler aujourd'hui de panzootie, plutôt que d'épizootie, dans la mesure où l'influenza aviaire était présente simultanément sur plusieurs continents.
S'agissant de l'épidémie de chikungunya, Mme Nicole Bricq a également souligné que les alertes sur l'île de la Réunion dataient de la fin de l'année 2005. Pour conclure, elle a affirmé qu'il était donc inexact d'invoquer le caractère d'urgence s'agissant de l'ouverture de crédits sur la mission « Sécurité sanitaire ».
Puis M. Eric Doligé, faisant savoir qu'il intervenait en tant que rapporteur spécial des crédits de la mission « Développement et régulation économiques », s'est félicité de la prise en compte, par le projet de décret d'avance, des difficultés des petites et moyennes entreprises. Il a indiqué comprendre la nécessité d'ouvrir des crédits supplémentaires, même s'il n'était pas certain qu'ils seraient suffisants. En outre, il a précisé que ces crédits ouverts seraient gérés par le FISAC et s'est interrogé sur l'efficacité de la gestion de ces crédits par ce fonds. A cet égard, il a rappelé que la commission des finances procèderait le mercredi 15 mars à l'audition pour suite à donner à l'enquête de la Cour des comptes relative au FISAC. Il a estimé qu'une réforme des conditions de mise à disposition des crédits gérés par le FISAC aux entreprises serait sans doute nécessaire et a souligné que l'octroi des aides aux entreprises de la Réunion serait l'occasion de vérifier concrètement l'efficacité de la gestion du FISAC.
M. Michel Charasse est ensuite intervenu en tant que rapporteur spécial de la mission « Aide publique au développement ». Il a d'abord indiqué faire siennes les observations de Mme Nicole Bricq relatives au manque d'anticipation du gouvernement dans la gestion de l'épizootie aviaire. Puis il a indiqué que la procédure avait manifestement été respectée par le gouvernement et remarqué que l'interprétation de la notion d'urgence était la même sous l'empire de l'ordonnance organique de 1959 et sous l'empire de la LOLF. Il a également souligné l'intérêt qu'il y aurait à publier le rapport de motivation accompagnant le décret d'avance et regretté l'absence d'éléments, dans ce rapport de motivation, sur les annulations de crédits prévues par le projet de décret d'avance.
En ce qui concerne plus spécifiquement la mission « Aide publique au développement », M. Michel Charasse a précisé que la proportion des annulations de crédits était inférieure à la moyenne générale retenue pour l'ensemble des missions du budget général en raison de la part des contributions obligatoires au sein de cette mission. Enfin, il s'est inquiété de l'étendue de l'épizootie d'influenza aviaire en Afrique et a regretté que le ministère des affaires étrangères n'ait pu bénéficier d'une ouverture de crédits de 7 millions d'euros au titre de la lutte contre la grippe aviaire en Afrique.
M. Marc Massion a souligné l'imprévoyance du gouvernement s'agissant de l'épidémie de chikungunya sur l'île de la Réunion. Il a rappelé que sa collègue Mme Gélita Hoarau avait alerté le gouvernement sur cette question au mois de janvier 2006 et que la réponse du ministre de la santé et des solidarités avait été de débloquer 62.000 euros en faveur de la lutte contre cette épidémie. Au sujet des annulations de crédits prévues par le projet de décret d'avance, il a remarqué que certains programmes visés constituaient des priorités affichées du gouvernement, tels le retour à l'emploi, le sport, la jeunesse et la vie associative, ou l'enseignement.
M. Jean Arthuis, président, a tenu à rappeler que le gouvernement ne disposait pas d'éléments lui permettant d'anticiper l'ampleur de l'épidémie de chikungunya au moment du vote de la loi de finances initiale pour 2006.
En réponse à Mme Nicole Bricq, M. Philippe Marini, rapporteur général, a précisé qu'il rappellerait, dans son rapport écrit, que la commission des finances avait attiré l'attention du gouvernement, lors de l'examen de la mission « Sécurité sanitaire » pour 2006, sur la nécessité de tenir compte de la possible survenance d'une épizootie d'influenza aviaire, en proposant un redéploiement de crédits de 15 millions d'euros, dont il a reconnu qu'il aurait toutefois été insuffisant pour faire face à l'ampleur non prévisible de la crise actuelle, notamment en raison de son impact sur la filière avicole.
En réponse à M. Michel Charasse, il a précisé que le décret d'avance devrait, à sa connaissance, être publié avec le rapport de motivation rédigé par le gouvernement, tout en s'engageant à le demander explicitement dans l'avis transmis au Premier ministre. En outre, il a souligné que l'absence d'ouverture de crédits en faveur de la lutte contre la grippe aviaire en Afrique serait abordée dans le rapport écrit. Toutefois, il a indiqué qu'il n'appartenait pas à la commission des finances de s'immiscer dans les arbitrages budgétaires interministériels.
Enfin, en réponse à M. Marc Massion, M. Philippe Marini, rapporteur général, a précisé que le niveau de déficit prévisionnel prévu par la loi de finances initiale pour 2006 était déjà considérable et qu'il n'était pas possible de l'aggraver, d'où la nécessité de procéder à des annulations de crédits pour équilibrer les ouvertures prévues par le décret d'avance.
En conclusion, M. Jean Arthuis, président, a remercié le rapporteur général pour la qualité de son intervention et s'est félicité du caractère novateur de la procédure appliquée par le gouvernement, en application de l'article 13 de la LOLF.
La commission des finances a alors émis, par 9 voix pour et 7 abstentions du groupe socialiste, un avis favorable sur le projet de décret d'avance portant ouverture et annulation de crédits. Elle s'est ensuite prononcée en faveur de la publication de la communication de M. Philippe Marini, rapporteur général, sous la forme d'un rapport d'information.
Mercredi 15 mars 2006
- Présidence de M. Jean Arthuis, président.Cour des comptes - Commerce et artisanat - Fonds d'intervention pour les services, l'artisanat et le commerce (FISAC) - Audition de M. Bertrand Fragonard, président de la 2e chambre de la Cour des comptes, de MM. Jean-Loup Arnaud, président de section, Patrick Bouquet, conseiller maître, de MM. Laurent Fleuriot, directeur de cabinet du ministre des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l'artisanat et des professions libérales, Jean-Frédérick Lepers, conseiller technique, et Laurent Moquin, sous-directeur chargé des affaires économiques au ministère des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l'artisanat et des professions libérales, de MM. Guilhem Blondy, conseiller technique au cabinet du ministre délégué au budget et à la réforme de l'Etat, et Frédéric Guin, sous-directeur à la direction du budget
La commission a procédé à l'audition de MM. Bertrand Fragonard, président de la 2e chambre de la Cour des comptes, Jean-Loup Arnaud, président de section, Patrick Bouquet, conseiller maître, Laurent Fleuriot, directeur de cabinet du ministre des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l'artisanat et des professions libérales, Jean-Frédérick Lepers, conseiller technique, Laurent Moquin, sous-directeur chargé des affaires économiques de la direction du commerce, de l'artisanat, des services et des professions libérales, Guilhem Blondy, conseiller technique au cabinet du ministre délégué au budget et à la réforme de l'Etat, et Frédéric Guin, sous-directeur de la direction de la direction du budget, pour suite à donner à l'enquête de la Cour des comptes relative au fonds d'intervention pour les services, l'artisanat et le commerce (FISAC).
M. Jean Arthuis, président, a tout d'abord rappelé que le Fonds d'intervention pour les services, l'artisanat et le commerce (FISAC) avait été créé en 1989 pour répondre aux menaces pesant sur l'existence de l'offre commerciale et artisanale de proximité. Il a relevé que le FISAC se prononçait sur environ un millier de dossiers par an, chiffre en sensible augmentation ces dernières années, et disposait de crédits s'élevant à 80 millions d'euros pour l'année 2006.
Après avoir déclaré qu'en tant qu'élus locaux, de nombreux membres de la commission avaient eu une expérience concrète du FISAC, il a expliqué que c'est en croisant leurs expériences d'élus de terrain que les commissaires avaient été amenés à s'interroger sur le fonctionnement de ce fonds et sur ses critères de hiérarchisation des dossiers. Ce sont principalement ces interrogations qui avaient conduit la commission, à la demande de son rapporteur spécial compétent, à solliciter de la Cour des comptes, le 1er mars 2005, une enquête sur le FISAC en application de l'article 58-2° de la LOLF, enquête qui lui avait été transmise le 2 décembre 2005.
Puis M. Jean Arthuis, président, a souligné que cette audition avait pour objet principal de faire en sorte que les travaux de contrôle réalisés et les rapports publiés connaissent une suite effective, ce dont les membres de la commission souhaitaient s'assurer. Après avoir remarqué que cette préoccupation, s'agissant du FISAC, était commune aux commissions des finances et des affaires économiques, il a en particulier salué M. Gérard Cornu, rapporteur pour avis au nom de la commission des affaires économiques pour la mission « Développement et régulation économiques », dont relève le FISAC, se réjouissant du développement d'une étroite coopération entre les deux commissions.
Afin de préserver une possibilité effective de dialogue et de débat, M. Jean Arthuis, président, a invité les intervenants à se limiter aux observations principales dans leurs propos liminaires, expliquant qu'à l'issue de ces interventions, il donnerait la parole à M. Eric Doligé, rapporteur spécial pour la mission « Développement et régulation économiques », puis à M. Gérard Cornu, rapporteur pour avis au nom de la commission des affaires économiques pour cette mission, chaque commissaire de ces deux commissions pouvant ensuite poser, bien évidemment, librement ses questions.
Enfin, après avoir rappelé aux membres de la commission qu'ils auraient, à l'issue de l'audition, à prendre une décision concernant la publication de l'enquête de la Cour des comptes au sein d'un rapport d'information, il a donné la parole à M. Bertrand Fragonard, président de la 2e chambre de la Cour des comptes pour qu'il présente les principaux points de l'enquête.
M. Bertrand Fragonard a tout d'abord remercié M. Jean Arthuis, président, pour l'organisation de cette audition. Il a rappelé que cette enquête avait été réalisée conformément aux dispositions de l'article 58-2° de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF), se réjouissant du respect par la Cour des comptes du délai de remise de l'enquête prescrit par cette loi organique. Il s'est également félicité des bonnes conditions dans lesquelles l'enquête avaient pu être conduite, soulignant la très bonne coopération de l'administration concernée.
Puis M. Jean-Loup Arnaud a relevé que le champ d'intervention du FISAC avait été fortement étendu au fil du temps, en particulier en 2003. Après avoir décrit l'augmentation des crédits du FISAC, passés de 53 millions d'euros en 2001 à plus de 100 millions d'euros en 2004, il a remarqué que le nombre de décisions prises avait suivi la même évolution. Il a déclaré qu'à l'heure actuelle, en une année, un peu plus de 600 décisions sont prises pour des opérations en milieu rural, plus de 200 décisions sont prises pour des opérations en milieu urbain, ainsi qu'environ 125 décisions pour des opérations de développement économiques et des « aides diverses », cette dernière catégorie représentant 46 % du total des aides accordées par le FISAC.
M. Jean-Loup Arnaud a ensuite présenté les principales observations de la Cour des comptes à l'issue de son enquête.
En premier lieu, après avoir observé que la très grande majorité des aides accordées par le FISAC étaient co-financées, généralement par des collectivités territoriales ou par des chambres de commerce et d'industrie, il a regretté que ces co-financements n'apparaissent pas dans les fichiers du FISAC, l'empêchant ainsi d'avoir une vue globale du financement des opérations qu'il soutient.
Il a ensuite exprimé des doutes quant à la régularité de certains types d'aides octroyées par le fonds.
Puis revenant sur l'extension progressive des missions du FISAC, il a estimé souhaitable un certain recentrage des actions de ce fonds.
Au sujet de la gestion administrative du fonds, il a simplement relevé des problèmes de compatibilité entre les systèmes informatiques de la direction du commerce, de l'artisanat, des services et des professions libérales (DCASPL) et de l'Organisation autonome nationale de l'industrie et du commerce (ORGANIC), gestionnaire du FISAC, qui seraient en voie de résolution.
Il a ensuite estimé que, dans la mesure où le processus de décision d'octroi des aides est conduit principalement à l'échelon local, l'administration centrale est probablement trop étoffée.
Enfin, M. Jean-Loup Arnaud a regretté que les rapports d'évaluation de l'aide apportée à chaque projet ne soient pas faits systématiquement. De surcroît, une proportion significative des rapports réalisés sont en pratique peu exploitables. Il a cependant indiqué qu'une enquête avait été lancée en 2005 en zone rurale, afin de valider l'indicateur de performance prévu pour le FISAC dans le cadre de la LOLF, qualifiant cette entreprise de « difficile, mais nécessaire. »
Il a conclu sur les perspectives d'évolution du FISAC, expliquant que la Cour des comptes estimait que ce fonds pourrait peut-être servir d'expérimentation pour les délégations de compétences aux régions, au vu du caractère local de l'impact de la plupart des aides octroyées par le FISAC. Il a jugé, en tout état de cause, qu'il convenait de réduire les effectifs de l'administration centrale.
M. Jean Arthuis, président, a remercié les magistrats de la Cour des comptes, puis a invité les représentants du ministère des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l'artisanat et des professions libérales à s'exprimer.
M. Laurent Fleuriot a tout d'abord tenu à remercier M. Jean Arthuis, président, pour avoir organisé cette audition qui devait permettre à chacun de débattre en toute transparence du FISAC, et qui illustrait parfaitement les conditions dans lesquelles, selon lui, devait s'exercer le contrôle de l'action publique.
Il a indiqué que le FISAC constituait un outil au service de la politique du gouvernement en matière commerciale et artisanale. Il a précisé que sa souplesse de gestion en faisait un instrument fin de politique économique. Ses effets rejoignaient aussi bien les préoccupations d'aménagement du territoire, comme dans le cas des interventions du fonds en milieu rural, que les « soucis sécuritaires » des Français, citant en exemple les interventions urbaines visant à maintenir le commerce de proximité, y compris au coeur des banlieues.
Il a déclaré qu'entre 1992 et fin 2005, le FISAC avait ainsi apporté son aide à 9.869 opérations concernant le commerce, l'artisanat et les services, ce qui montre à quel point ce dispositif a trouvé sa place et reste sollicité par l'ensemble des acteurs locaux professionnels.
M. Laurent Fleuriot a souligné que le mode de fonctionnement du FISAC n'était pas fondé sur la ventilation d'enveloppes de crédits avant même de connaître les besoins, mais partait des besoins réels exprimés, opération par opération, pour accorder les subventions au vu des dossiers présentés. Il a estimé que la qualité et la cohérence de chacun des dossiers étaient ainsi mieux garanties.
Il a observé que, pour le ministre des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l'artisanat et des professions libérales, le FISAC était un instrument nécessaire à plusieurs titres, citant en premier lieu sa contribution essentielle à la cohésion de nos territoires. Il a précisé qu'il y avait plus de 200.000 commerces de détail en France hormis les grandes surfaces, que certains ne connaissaient pas de difficultés et étaient même en croissance. En revanche, il a souligné que le secteur des commerces alimentaires, malgré une légère reprise depuis 2 ans, était très fragile et devait faire l'objet d'une attention particulière car il était essentiel à nos concitoyens, notamment les plus âgés, et pour l'animation de la vie locale. Il a donc estimé nécessaire une politique visant à préserver, à moderniser et à faciliter la transmission des commerces de détail. Il a indiqué que les mesures fiscales récemment prises concernant le régime des plus-values immobilières, la création d'un droit de préemption, très encadré sur les baux, la création de la « prime de transmission accompagnée », sans compter les mesures antérieures sur la protection du conjoint collaborateur et la création d'entreprise, étaient autant de signes de cet effort en faveur du commerce.
M. Laurent Fleuriot a concédé que le FISAC n'avait pas fait l'objet d'une évaluation globale depuis 1992, comme le soulignait la Cour des comptes, ajoutant cependant que les évaluations partielles tendaient à démontrer une bonne efficacité, qu'il s'agisse des opérations rurales individuelles qui montraient un taux de survie excellent à 4 ans (94,1 %) ou des opérations rurales collectives (ORAC) qui doublaient le taux d'embauche (60 % au lieu de 27 %) et faisaient augmenter le chiffre d'affaires de 63 % contre 49 %.
Il a ensuite rappelé que le FISAC bénéficiait en priorité au monde rural, conformément au souhait du ministre. Ainsi, la part des opérations individuelles ou des opérations collectives rurales, représentait, en 2005, 30 % des sommes versées par le FISAC « territorial », contre 27 % en 2003.
Puis il a évoqué les opérations exceptionnelles de soutien faisant suite à des catastrophes naturelles. Il a concédé que la régularité de ce type d'aides pouvait faire l'objet d'un débat juridique, comme le soulignait la Cour des comptes, ajoutant toutefois qu'il serait dommage de se priver d'un dispositif aussi rapide et efficace.
M. Laurent Fleuriot a précisé qu'il avait bien noté les constatations de la Cour des comptes, notamment celles qui concernaient les questions de décentralisation- déconcentration ou de ciblage du dispositif. En réponse, il a souhaité souligner deux points.
Au sujet de ce que la Cour des comptes appelle « une certaine banalisation du FISAC », du fait de l'extension de son champ d'intervention, il a estimé que, malgré la diversité apparente des aides collectives, individuelles ou bien des aides rurales ou urbaines, ce n'était pas de « banalisation » qu'il fallait parler, mais plutôt d'un maillage serré et cohérent qui permettait d'inclure des préoccupations d'aménagement du territoire et de prendre en compte les besoins, par nature différents, des collectivités selon qu'elles étaient situées en milieu rural ou urbain, ainsi que les besoins individuels.
S'agissant de la rigueur budgétaire, évoquée par le rapport de la Cour des comptes qui souligne que « les crédits du FISAC n'ont pas échappé aux contraintes ayant affecté l'ensemble des crédits du secteur », il a indiqué que la politique du ministre avait été de participer à l'effort de réduction des dépenses. Ainsi, les crédits globaux du ministère avaient été réduits en 2003, 2004 et 2005. Quant au FISAC, ses crédits étaient passés de 69,3 millions d'euros en 2001 à 71 millions d'euros en 2004 ; seule une dotation exceptionnelle de 29 millions d'euros pour l'année 2005, destinée à accompagner la réforme de la loi Galland et votée en loi de finances rectificative pour 2004, a fait varier sensiblement les crédits du FISAC pendant cette période. Il a observé que pour l'année 2006, après cette dotation exceptionnelle, le montant des crédits du FISAC s'était rapproché de ses niveaux antérieurs.
M. Jean Arthuis, président, après avoir remercié M. Laurent Fleuriot pour son intervention, l'a interrogé sur la présomption d'excès de centralisation du FISAC.
M. Laurent Fleuriot a précisé que le FISAC présentait la double particularité, d'une part, de ne pas être organisé comme un dispositif créant automatiquement des droits pour des bénéficiaires dès lors qu'ils rempliraient un certain nombre de critères, d'autre part de devoir gérer des crédits relativement limités. Il a fait valoir que dès lors, un dispositif centralisé était le plus à même d'assurer une politique active et cohérente sur l'ensemble du territoire national, ajoutant qu'en cas de décentralisation, déterminer des enveloppes idoines pour chaque région serait un exercice très ardu. En outre, remarquant que, rapportées à un niveau régional, ces enveloppes seraient très modiques, il a douté du maintien, par chaque région et dans ces conditions, d'une politique d'aide au commerce local.
M. Jean Arthuis, président, a ensuite invité les représentants du ministère chargé du budget à exprimer leur point de vue.
M. Guilhem Blondy, après avoir remercié la commission pour l'organisation de cette audition et la Cour des comptes pour son enquête, a tenu à faire part de deux remarques.
Tout d'abord, il a partagé les constats de la Cour des comptes sur l'efficacité de la gestion du FISAC par l'ORGANIC, tout en faisant remarquer que ce mode de gestion était dérogatoire de la pratique budgétaire, même s'il avait un fondement légal. Il a souligné que son ministère veillait à ce que les crédits du FISAC restent bien dans la limite des lettres-plafond annuelles. En outre, il s'est dit partisan de la création d'un indicateur d'efficience, portant sur le coût de gestion du fonds.
Puis il a évoqué le problème de l'évaluation du FISAC. Après avoir observé que le ministère des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l'artisanat et des professions libérales palliait l'absence de contrôle systématique par des enquêtes à caractère général, il a néanmoins jugé ce mode de contrôle intéressant, mais insuffisant. Il a estimé que l'indicateur de performance relatif au FISAC figurant dans les documents budgétaires, qui rapproche le taux de survie à 3 ans des entreprises aidées par le FISAC en milieu rural à celui de l'ensemble des entreprises comparables, était pertinent tout en remarquant qu'il n'était toujours pas rempli, à ce jour. Il a également déclaré que d'autres indicateurs pourraient utilement compléter l'information du législateur sur la performance du FISAC, citant le taux de croissance relatif des entreprises soutenues par le fonds, et l'effet de ces aides sur l'emploi.
M. Guilhem Blondy a enfin suggéré que le FISAC octroie des avances remboursables pour certaines opérations, ce qu'il a le droit de faire, estimant que le niveau de remboursement des aides constituerait un bon indicateur de réussite des entreprises soutenues.
M. Eric Doligé, rapporteur spécial pour la mission « Développement et régulation économiques », a remercié le président pour cette audition et la Cour des comptes pour son enquête, observant que la plupart des sénateurs étaient des praticiens du FISAC.
Remarquant en premier lieu que la Cour des comptes jugeait incertain le fondement juridique de certains types d'aides accordés par le FISAC, notamment pour faire face aux calamités, il a demandé au ministère s'il lui paraissait nécessaire de modifier la loi afin de sécuriser ce processus.
Il s'est ensuite interrogé sur la centralisation du FISAC, s'appuyant sur le contenu de l'enquête de la Cour des comptes, qui parle de gestion « au fil de l'eau » pour l'octroi des financements du FISAC. En outre, revenant sur les propos de M. Laurent Fleuriot, il a décrit une situation où la modicité de l'enveloppe du fonds contraindrait à le centraliser, se demandant s'il n'y aurait finalement pas une relation de cause à effet entre la centralisation et la relative faiblesse du montant des crédits du FISAC. Il a demandé au ministère si une décentralisation du fonds lui semblait, dès lors, véritablement inopportune.
M. Eric Doligé, rapporteur spécial pour la mission « Développement et régulation économiques », a ensuite abordé le sujet de l'évaluation. Il a expliqué que les utilisateurs effectuaient, à leur niveau, de nombreuses évaluations sur l'impact des aides au niveau local et sur l'emploi, tout d'abord en amont, avant le bouclage du dossier, puis après la réalisation du projet soutenu. Dans la mesure où l'information existe sur le terrain, il s'est déclaré surpris qu'une évaluation rapide et précise ne soit pas faite au niveau national.
Il a ensuite souligné la complexité de la demande d'aide au FISAC pour des collectivités, souvent petites, qui doivent s'engager dans un processus lourd tout en n'ayant pas de certitude quant à l'issue de la procédure ou ses délais.
Puis il a observé que le FISAC ne limitait pas son action à l'aide aux commerces, mais participait, parfois, à des projets d'aménagement de villes ou de villages, se demandant si de telles opérations entraient véritablement dans le champ de sa mission.
Enfin, M. Eric Doligé, rapporteur spécial pour la mission « Développement et régulation économiques », a indiqué que le FISAC sera sollicité pour aider les commerces réunionnais dont l'activité est affectée par l'épidémie de chikungunya. Remarquant qu'il disposera, à cette fin, d'un budget de 30 millions d'euros pour environ 35.000 sociétés potentiellement éligibles à ces aides, il a demandé au ministère comment le fonds allait s'organiser pour répondre à cette crise et comment serait ensuite mesuré l'impact du soutien apporté par le FISAC.
M. Laurent Fleuriot, répondant tout d'abord au problème juridique que peuvent poser notamment les aides faisant suite à des catastrophes naturelles, a convenu qu'une évolution législative était souhaitable et a déclaré que le Parlement aurait, sans doute, à en connaître prochainement.
Abordant, ensuite, le sujet de l'actuelle crise réunionnaise, il a confirmé que le ministère construisait dans l'urgence un dispositif de soutien, effectivement doté de 30 millions d'euros. Il a expliqué que ce dispositif serait entièrement déconcentré autour du préfet et du trésorier-payeur-général, qui seront habilités à prendre des décisions dès lors que les entreprises pourront justifier des pertes d'exploitation. Il a souligné que l'ORGANIC serait en mesure d'effectuer des paiements dans des délais de 8 à 10 jours après une décision positive. Il a précisé que le préfet serait tenu de faire régulièrement rapport de ses décisions au ministre.
Puis, revenant sur l'expression de « gestion au fil de l'eau », employée par la Cour des comptes et reprise par M. Eric Doligé, il a insisté sur le fait que le fonctionnement du FISAC était délibérément basé sur l'expression de besoins réels, exprimés localement et instruits localement, l'échelon parisien n'intervenant qu'en fin de processus pour vérification. Il a relevé qu'environ un quart des dossiers voyaient leur montant réduit lors de cette dernière étape, signe de son utilité. Il a toutefois jugé que des progrès restaient à faire au niveau régional pour aboutir à une plus grande cohérence des procédures et des modes d'examen, précisant qu'une circulaire, à ce sujet, était en préparation au ministère.
M. Laurent Fleuriot a ensuite précisé que les opérations d'aménagement de ville n'entraient effectivement pas dans le coeur des missions du FISAC et avaient donc vocation à voir leurs montants de crédits être réduits de même que les opérations du FISAC « national », dont les résultats sont difficiles à évaluer et pas toujours à la hauteur des investissements consentis. En revanche, il a souligné que, dans l'esprit de M. Renaud Dutreil, ministre des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l'artisanat et des professions libérales, les opérations de soutien au commerce en milieu rural étaient essentielles et que les montants qui leur étaient consacrés seraient donc augmentés.
Enfin, au sujet de l'évaluation, il a insisté sur la difficulté de conduire des études efficaces, du fait notamment du fort effet de levier des aides du FISAC.
Puis M. Jean Arthuis, président, a donné la parole au rapporteur pour avis au nom de la commission des affaires économiques.
M. Gérard Cornu, rapporteur pour avis au nom de la commission des affaires économiques pour la mission « Développement et régulation économiques », a souhaité limiter son intervention au FISAC « rural ». Il a exprimé son opposition à toute idée de décentralisation du fonds, expliquant que, dans un tel schéma, les aides croisées Etat - collectivités territoriales, indispensables au financement de nombreuses opérations, disparaîtraient vraisemblablement. En outre, faisant écho aux propos de M. Laurent Fleuriot, il a souligné que la faiblesse des crédits du FISAC rendait inopérante leur délégation à un niveau régional.
Par ailleurs, il a défendu la « gestion au fil de l'eau » des dossiers du FISAC, y voyant une condition nécessaire à l'indispensable réactivité que doit avoir ce fonds, relevant que la question des délais était cruciale en matière commerciale.
M. Gérard Cornu, rapporteur pour avis au nom de la commission des affaires économiques pour la mission « Développement et régulation économiques », a conclu en insistant sur les difficultés rencontrées par les petites communes, aux structures légères par définition, pour remplir un dossier d'aide par le FISAC, qualifiant l'ensemble de la procédure d'instruction de « parcours du combattant » pour ces collectivités. Soulignant la lourdeur de l'enjeu d'un dossier de ce type pour une commune rurale, il a plaidé pour une simplification des démarches à suivre, dont la contrepartie devrait être un renforcement des contrôles a posteriori.
M. Laurent Fleuriot, revenant tout d'abord sur la question de la décentralisation, a fait part de ses réserves, au motif principal que le souci du ministre était de s'assurer que l'ensemble du territoire bénéficie d'un dispositif cohérent de soutien au commerce de proximité.
Puis il est revenu, au sujet de la nécessité pour le FISAC d'être réactif, sur les retards soulignés par l'enquête de la Cour des comptes au titre de l'année 2004. Il a expliqué qu'il s'agissait d'un incident ponctuel, dû à un afflux de dossiers dont la cause était précisément l'éventualité de la délégation des compétences du FISAC au niveau des régions, dans le cadre de la décentralisation conduite par le gouvernement de M. Jean-Pierre Raffarin. Il a précisé qu'au 31 janvier 2006, le FISAC comptait 200 dossiers « en stock », dont 152 au titre de l'année 2005 et 48 au titre de l'année 2006, chiffres qui lui semblaient très raisonnables.
Enfin, en réponse aux préoccupations exprimées par M. Gérard Cornu quant à la complexité du montage d'un dossier d'aide par le FISAC, il a souligné que des progrès avaient été récemment accomplis en ce sens, mettant en exergue l'allègement du formulaire de demande, à présent réduit à 2 pages. Il a redit la volonté du ministère de généraliser une procédure simplifiée.
M. Jean Arthuis, président, a demandé des précisions sur le coût moyen de l'instruction d'un dossier par le FISAC et sur le montant moyen des financements accordés.
M. Laurent Moquin a indiqué que le montant moyen des aides, dans le cas des opérations rurales individuelles, s'élevait entre 6.000 et 7.000 euros par dossier et que le coût moyen de l'instruction était de l'ordre d'1 % des montants octroyés, en excluant le coût de l'instruction au niveau local.
M. Bertrand Fragonard a souligné que le coût moyen de l'instruction d'un dossier du FISAC s'élevait à environ 1.600 euros, ce chiffre demeurant très partiel, puisqu'il ne tient compte que de l'échelon national.
M. Laurent Moquin a estimé qu'il fallait rapporter ce chiffre non seulement aux opérations rurales individuelles, mais aussi aux opérations rurales collectives, dont le montant moyen s'élève à 160.000 euros, et aux opérations urbaines collectives, dont le montant moyen s'élève à 115.000 euros. Il a jugé qu'en moyenne pondérée, le coût d'instruction au niveau national s'élevait bien à environ 1 % des montants accordés.
M. Jean Arthuis, président, a ensuite souhaité connaître le niveau des interventions du FISAC dans les opérations urbaines.
M. Laurent Moquin a indiqué que le FISAC avait une quote-part maximale autorisée, pour ce type d'opérations, de 50 % des frais de fonctionnement et de 20 % des frais d'investissement, estimant à 15 % le montant moyen de participation du fonds.
M. Jean Arthuis, président, a jugé cette proportion insuffisante pour que le FISAC puisse avoir une réelle force d'impulsion.
M. Jean-Jacques Jégou s'est interrogé sur l'utilité et le coût de la gestion du FISAC par l'ORGANIC.
M. Laurent Fleuriot, après avoir remarqué qu'après l'intégration du FISAC dans le budget de l'Etat en 2003, le législateur avait souhaité conserver cette délégation de gestion, a justifié ce choix par la qualité du contrôle de gestion de l'ORGANIC et par « l'incomparable » souplesse et rapidité de gestion de cet organisme.
Mme Nicole Bricq a estimé que la LOLF donnait à présent une grande liberté aux gestionnaires de programmes. Puis elle s'est demandé si l'enquête de la Cour des comptes portait également sur le FISAC « national ». Enfin, elle s'est interrogée sur la pertinence du choix d'un indicateur de performance du FISAC portant sur le taux de survie des entreprises aidées au bout de 3 ans, alors même que le 3e anniversaire d'une entreprise est souvent considéré comme une période critique de son existence.
M. Bertrand Fragonard a rappelé que l'enquête de la Cour des comptes avait été conduite, en application de l'article 58-2 de la LOLF, sur la base de la saisine de la Cour des comptes par la commission des finances du Sénat et des échanges informels qui ont suivi pour en préciser le champ. Il a indiqué que le FISAC « national » en faisait partie.
Puis il a souligné, s'exprimant sur la question des indicateurs, que leur interprétation n'était pas chose aisée. Il a estimé que leurs résultats pouvaient, par nature, être biaisés par un phénomène « d'effet d'aubaine ». Il a expliqué que, dans l'esprit de la Cour des comptes, la réelle valeur ajoutée de l'administration centrale devait se situer principalement au niveau du contrôle et du suivi des résultats de dispositifs tels que le FISAC.
M. Laurent Fleuriot, après avoir indiqué que les durées de 3 et 5 ans étaient les plus classiquement utilisées pour les indicateurs de taux de survie d'entreprises, a rappelé que, dans le cas présent, l'indicateur comparait le taux des entreprises aidées par le FISAC à un taux moyen. Il a jugé qu'en conséquence, la performance relative du fonds pouvait être mesurée de façon pertinente par l'indicateur choisi.
Puis Mme Nicole Bricq a souhaité savoir comment s'était traduite l'extension du champ d'intervention du FISAC en 2003.
M. Jean-Loup Arnaud a constaté que cet élargissement avait rendu plus difficile l'évaluation du FISAC et a rappelé, pour cette raison, les réserves exprimées, à ce sujet, par la Cour des comptes.
M. Eric Doligé, rapporteur spécial pour la mission « Développement et régulation économiques », a constaté que, si les résultats des actions du FISAC étaient appréciés dans les départements, il fallait « avoir la foi » pour se lancer dans une telle opération. Il a particulièrement insisté sur le nombre considérable d'intervenants, à tous les niveaux, dans ce processus. Le jugeant excessivement complexe eu égard à la relative modicité des sommes octroyées, il s'est interrogé sur le rapport entre le coût et l'efficacité de ces opérations. Il s'est demandé si la décentralisation du FISAC ne serait pas une réponse adaptée au problème de l'empilement des échelons. Prenant l'exemple de précédentes dévolutions de compétences aux collectivités territoriales, il a jugé que celles-ci avaient montré qu'elles savaient prendre leurs responsabilités. Il a contesté l'argumentation du ministère sur les risques d'abandon de toute politique de soutien au commerce local dans certaines régions, en cas de décentralisation du FISAC.
M. Gérard Cornu, rapporteur pour avis au nom de la commission des affaires économiques pour la mission « Développement et régulation économiques », a estimé qu'on ne pouvait pas comparer des activités comme le sport ou la culture avec la sauvegarde du commerce car celle-ci s'adresse, par définition, au secteur privé. Il a donc de nouveau exprimé sa grande réserve quant à une éventuelle décentralisation du FISAC. D'autre part, il a insisté sur le rôle d'aménagement du territoire de ce fonds, indiquant que cette compétence devait revenir à l'Etat.
M. Philippe Dallier s'est étonné des chiffres figurant dans le tableau annexé à l'enquête de la Cour des comptes, remarquant en particulier que la Seine-Saint-Denis n'avait reçu, sur la période 1992-2004, que 4,4 millions d'euros d'aides du FISAC quand un département comme l'Ille-et-Vilaine en a reçu 12,4 millions d'euros. Jugeant un tel écart « catastrophique », au vu des problèmes rencontrés par les commerçants de Seine-Saint-Denis, il a émis l'hypothèse que son origine se trouvait, sans doute, dans le manque d'information du public concerné dans les banlieues franciliennes.
M. Jean Arthuis, président, et Mme Nicole Bricq ont partagé les préoccupations de M. Philippe Dallier quant à la répartition géographique des aides du FISAC.
M. Laurent Moquin a expliqué l'écart relevé par M. Philippe Dallier par le « dynamisme des pays bretons », la forte structuration des collectivités territoriales dans cette région permettant de monter efficacement des opérations de ce type, alors qu'en milieu urbain, les municipalités sont souvent plus isolées.
M. Laurent Fleuriot a souligné que le taux d'intervention du FISAC dans les zones urbaines sensibles pouvait atteindre 80 % des dépenses de fonctionnement et 50 % des dépenses d'investissement. Il a ensuite déclaré que, depuis 2003, le FISAC peut financer les dépenses de sécurité des entreprises. Enfin, il a insisté sur le rôle spécifique de l'Établissement public national d'aménagement et de restructuration des espaces commerciaux et artisanaux (EPARECA), dont le nombre d'opérations devrait doubler dans les 3 années à venir.
M. Laurent Moquin a ensuite indiqué que le comité interministériel des villes, qui s'est tenu le 9 mars 2006, avait pris de nouvelles mesures, comme la suppression de l'obligation de co-financement par les collectivités territoriales des opérations soutenues par le FISAC ou l'augmentation du plafond, de 20 % à 40 %, des aides individuelles de l'Etat pour les entreprises s'inscrivant dans le cadre d'une opération collective.
M. François Marc s'est interrogé sur l'échelon pertinent d'élaboration d'une opération de soutien par le FISAC, se demandant, en particulier, s'il ne s'agissait pas d'une compétence pouvant relever d'une intercommunalité.
M. Laurent Fleuriot, tout en précisant qu'une intercommunalité était tout à fait fondée à intervenir dans un tel processus, a remarqué qu'en pratique, les communes étaient les acteurs principaux.
M. Gérard Cornu, rapporteur pour avis au nom de la commission des affaires économiques pour la mission « Développement et régulation économiques », a relevé que, dans le cas de sa commune, qui appartient à une intercommunalité, l'aide au commerce de proximité ne faisait pas partie du champ de compétence de cette dernière.
M. Jean Arthuis, président, a jugé utiles l'enquête de la Cour des comptes et l'audition qui avait suivi, indiquant que celle-ci avait bien montré « le dynamisme et l'opiniâtreté » des bénéficiaires d'aides du FISAC. Il a rappelé que, notamment en zone rurale, le commerce était moins une affaire d'argent que de commerçants, et que les vocations manquaient.
Il a souligné la nécessité, pour un fonds tel que le FISAC, d'avoir un champ de missions précisément défini et de représenter une part significative du financement des projets soutenus, sous peine de se réduire à « un guichet qu'on actionne au lieu de constituer une force d'impulsion ». Il a plus largement regretté le phénomène trop répandu de « chasse aux aides » auprès de nombreuses administrations, certes susceptible de développer des « partenariats » au plan local, mais peu optimal en termes d'efficience administrative.
M. Jean-Jacques Jégou a fait état d'un financement du FISAC pour un projet de restructuration de marché couvert et de construction de parking souterrain. Il a indiqué que, dans le cas visé, l'aide du fonds s'était élevée à 400.000 euros pour un projet d'un montant total de 8 millions d'euros. S'il a estimé que le FISAC n'aurait su constituer un facteur déclenchent, il a jugé utile sa contribution.
D'autre part, revenant sur les propos de M. Philippe Dallier, il a déclaré partager son sentiment selon lequel l'ignorance de l'existence même du FISAC était la principale explication du faible montant des aides accordées par le fonds aux départements franciliens.
M. Jean Arthuis, président, regrettant une nouvelle fois l'empilement des structures, nuisible à la bonne compréhension des mécanismes par les bénéficiaires, s'est interrogé sur le mode de fonctionnement des directions régionales du commerce.
M. Laurent Fleuriot a précisé que M. Renaud Dutreil partageait ces préoccupations. A titre d'illustration, il a indiqué qu'il présentait, ce jour même, un décret en Conseil des ministres visant à rendre plus lisible et plus qualitative l'action des chambres de commerce et d'industrie, dont le réseau devrait être concentré.
M. Jean Arthuis, président, a de nouveau souligné l'importance d'agir de façon significative, et non à la marge, afin d'avoir une plus grande efficacité. Il a, d'autre part, souligné qu'il convenait de simplifier l'architecture étatique, dont la lourdeur et la complexité expliquent, pour partie, le niveau actuel des prélèvements obligatoires.
Puis il s'est interrogé, revenant sur le rôle particulier dévolu au FISAC en cas de crise, sur l'origine des 30 millions d'euros débloqués pour que le FISAC puisse aider les commerces réunionnais affectés par l'épidémie de chikungunya.
M. Guilhem Blondy a expliqué que cette somme viendrait de redéploiements budgétaires, toutes les missions devant y contribuer.
M. Jean Arthuis, président, a espéré que cet effort ne remettrait pas en cause les missions traditionnelles du FISAC. Il s'est demandé combien de sociétés réunionnaises étaient susceptibles d'être aidées par le fonds.
M. Laurent Fleuriot a estimé ce nombre à 35.000.
M. Jean Arthuis, président, a remarqué que la somme débloquée ne représentait, en moyenne, que 1.000 euros par entreprise.
M. Laurent Fleuriot en a convenu, mais a indiqué qu'en fin de processus, toutes les entreprises éligibles ne seraient pas soutenues, et que la somme débloquée permettrait à l'économie réunionnaise de faire face à la crise pendant quelques mois.
M. Jean Arthuis, président, a remercié l'ensemble des intervenants.
La commission a alors décidé, à l'unanimité, d'autoriser la publication de l'enquête de la Cour des comptes ainsi que le compte rendu de la présente audition, au sein d'un rapport d'information.