- Mercredi 15 mars 2006
- Union européenne - Collectivités territoriales - Audition de Mme Claude Marcori, chargée de mission à la Délégation interministérielle à l'aménagement et à la compétitivité des territoires (DIACT)
- Union européenne - Collectivités territoriales - Audition de M. Raymond Forni, président de la commission « Europe » de l'Association des régions de France (ARF)
Mercredi 15 mars 2006
- Présidence de M. Jean François-Poncet, président.Union européenne - Collectivités territoriales - Audition de Mme Claude Marcori, chargée de mission à la Délégation interministérielle à l'aménagement et à la compétitivité des territoires (DIACT)
La délégation a procédé à l'audition de Mme Claude Marcori, chargée de mission à la Délégation interministérielle à l'aménagement et à la compétitivité des territoires (DIACT).
En introduction, M. Jean François-Poncet, président, s'est interrogé sur la manière dont serait géré le futur Fonds européen agricole de développement rural (FEADER).
Mme Claude Marcori, chargée de mission à la Délégation interministérielle à l'aménagement et à la compétitivité des territoires (DIACT), a indiqué que le FEADER ferait l'objet d'un plan stratégique national de développement rural, destiné à être mis en oeuvre de manière déconcentrée par les préfets de région. Elle a rappelé que dans le cadre de la prochaine programmation des fonds européens, chaque programme ne mettrait désormais en oeuvre que les crédits d'un seul fonds.
En réponse à M. Aymeri de Montesquiou, qui l'interrogeait sur les financements possibles pour les pôles d'excellence rurale, Mme Claude Marcori a assuré que des crédits du Fonds européen de développement régional (FEDER) resteraient disponibles pour les espaces ruraux.
M. Jean François-Poncet, président, a souhaité savoir quel bilan pouvait être tiré du fonctionnement de l'initiative communautaire INTERREG.
Après avoir indiqué qu'un bilan global avait été dressé dans le cadre du programme « Interact », Mme Claude Marcori a émis un jugement positif sur cette initiative, soulignant notamment que la dernière programmation avait, en imposant la désignation d'une autorité de gestion unique dans chaque espace de coopération (transfrontalier, transnational ou interrégional), favorisé le développement d'une approche intégrée et contraint les partenaires à dialoguer. Elle a rappelé que sur la période 2000-2006, la France était impliquée au titre d'INTERREG dans dix programmes transfrontaliers, sept programmes transnationaux et deux programmes interrégionaux.
M. Jean François-Poncet, président, s'étant interrogé sur la possibilité de faire financer par INTERREG des projets de développement rural portés par des entités au niveau départemental, Mme Claude Marcori a indiqué que si tel était surtout le cas dans le volet transfrontalier, c'était également possible dans le cadre de programmes transnationaux comme l'illustrait l'exemple de la coopération de conseils généraux dans le cadre de l'Arc latin. Concernant les crédits consacrés à l'initiative INTERREG, elle a précisé qu'ils devraient passer de 5,7 milliards d'euros sur la programmation 2000-2006 à 7,5 milliards d'euros sur 2007-2013, l'enveloppe destinée à la France passant quant à elle de 403 à 749 millions d'euros (au titre des volets transfrontalier et transnational, le volet interrégional n'étant pas réparti entre Etats membres). Elle a souligné, à cet égard, que grâce à un mode de calcul favorable, la France percevrait ainsi sur la prochaine programmation la plus importante dotation au titre d'INTERREG. Elle a expliqué qu'il appartenait à chaque Etat membre de répartir lui-même l'enveloppe perçue dans le cadre de l'objectif 3 entre les différents programmes le concernant, les dotations nationales ainsi constituées étant ensuite mises en commun sur un compte unique pour chaque programme de coopération.
En réponse à M. Jean François-Poncet, président, qui l'interrogeait sur les changements induits en la matière par la réforme en cours de la politique européenne de cohésion, Mme Claude Marcori a indiqué que le volet transfrontalier continuerait à fonctionner de la même manière, alors que les projets financés par le volet transnational devraient désormais s'inscrire dans l'un des trois thèmes retenus pour la mise en oeuvre de l'objectif 2 des fonds structurels (innovation et économie de la connaissance ; environnement et prévention des risques ; accessibilité) et comporter une dimension urbaine. En outre, a-t-elle poursuivi, le volet interrégional devrait à l'avenir faire l'objet d'un seul programme de coopération confié à une autorité unique de gestion, au lieu de quatre actuellement. Elle a précisé que 77 % des crédits d'INTERREG (soit 579 millions d'euros en France) seraient désormais affectés au volet transfrontalier, chaque Etat membre pouvant toutefois décider de transférer 10 % de la dotation de ce dernier au volet transnational. Elle a également souligné que dans le cadre d'INTERREG, les programmes pourront à l'avenir être cofinancés par le FEDER à hauteur de 75 %, contre 50 % actuellement. Enfin, elle a précisé que dans le cadre des politiques de coopération avec les pays tiers, un nouvel instrument de voisinage et de partenariat (IEVP) permettrait d'abonder un programme de coopération avec les régions méditerranéennes voisines, en complément d'un programme transnational au titre de l'objectif 3 de la politique de cohésion.
M. Jean François-Poncet, président, ayant souhaité obtenir des précisions sur le futur groupement européen de coopération territoriale (GECT), Mme Claude Marcori a expliqué que la création de ce nouvel instrument juridique, très soutenu par la France, visait à remédier à la grande hétérogénéité des statuts juridiques applicables aux autorités de gestion des programmes de coopération INTERREG selon les Etats membres, en dotant chacun de ces programmes d'un groupement ayant une personnalité juridique reconnue à l'échelle européenne. Elle a souligné que de nombreux Etats membres n'étaient toutefois pas favorables à ce groupement européen de coopération territoriale, notamment pour des raisons de compatibilité avec leur droit interne.
Relevant qu'en matière de coopération européenne, le cadre de référence stratégique national (CRSN) préconisait « d'intégrer les dispositifs d'ingénierie territoriale à la mise en oeuvre des programmes », M. Jean François-Poncet, président, a demandé des précisions sur la manière dont cet objectif pourrait être atteint.
Mme Claude Marcori a expliqué qu'il s'agissait de favoriser l'intervention d'organismes partenaires susceptibles d'accompagner les projets au-delà de leur phase préparatoire. Revenant, pour conclure, sur les principaux obstacles rencontrés dans l'application d'INTERREG en France, elle a évoqué l'absence de réglementation européenne particulière, qui avait obligé les acteurs à adopter, en les adaptant, les procédures prévues pour les programmes nationaux. Elle a aussi constaté qu'après une forte mobilisation au moment du lancement des projets, les élus s'impliquaient insuffisamment dans leur mise en oeuvre.
Mme Jacqueline Alquier ayant rappelé que les élus locaux de sa région s'étaient fortement investis dans le soutien aux opérations intégrées de développement (OID) dans les années 1980, Mme Claude Marcori a fait observer qu'à cette époque, antérieure à la réforme des fonds structurels de 1988, les exigences en matière de gestion et de contrôle étaient beaucoup plus limitées.
Union européenne - Collectivités territoriales - Audition de M. Raymond Forni, président de la commission « Europe » de l'Association des régions de France (ARF)
Puis la délégation a procédé à l'audition de M. Raymond Forni, président de la commission « Europe » de l'Association des régions de France (ARF).
M. Raymond Forni, président de la commission « Europe » de l'Association des régions de France » (ARF) a tout d'abord dressé un bilan positif de la programmation 2000-2006 des fonds structurels européens, soulignant qu'elle avait permis aux collectivités territoriales, en particulier aux régions, de lancer des projets qui n'auraient sans doute pas été mis en oeuvre en l'absence de soutien européen. Il a émis la crainte, à cet égard que, pour pallier la diminution attendue des crédits sur la période 2007-2013, les autres collectivités territoriales ne se tournent vers les conseils régionaux pour solliciter en compensation des cofinancements que ces derniers ne seront pas en mesure de leur apporter.
M. Jean François-Poncet, président, a considéré que la baisse de 25 % des crédits européens destinés à la France serait finalement moins importante que ce qu'on avait initialement craint. Il a fait observer que par le passé, les crédits certes abondants n'avaient pas toujours été utilisés à bon escient.
Après avoir reconnu que des projets non structurants, comme des salles des fêtes, avaient souvent été financés grâce aux fonds européens, M. Raymond Forni a relevé que la baisse de 25 % était une moyenne nationale qui ne devait pas occulter une diminution plus forte dans certaines régions. Ainsi, a-t-il précisé, la région Franche-Comté enregistre une baisse de 34 % des crédits qu'elle perçoit dans le cadre de l'objectif 2, correspondant à une réduction de 30 % des crédits du Fonds européen de développement régional (FEDER) et de 40 % des crédits du Fonds social européen (FSE).
Mme Yolande Boyer a indiqué que l'enveloppe affectée à la région Bretagne diminuait quant à elle de 30 %.
M. Jean François-Poncet, président, a fait valoir que d'autres régions devaient par conséquent sortir gagnantes de la répartition et s'est interrogé sur la nature des critères retenus pour procéder à celle-ci.
M. Raymond Forni a estimé que ces critères n'étaient pas satisfaisants, dans la mesure où ils ne tenaient pas compte des mutations économiques en cours dans les régions. Il a plaidé, par exemple, en faveur d'un critère permettant d'appréhender l'importance de l'emploi industriel régional. Mettant en cause par ailleurs une « renationalisation » de la gestion des crédits européens, il a regretté que le Gouvernement ait annoncé, lors du comité interministériel à l'aménagement et à la compétitivité des territoires (CIACT) du 6 mars dernier, son intention de ne pas poursuivre les expérimentations de décentralisation de gestion des fonds structurels, sauf au profit de la région Alsace. Il a également dénoncé le manque de concertation réelle avec l'Etat, au sein des partenariats régionaux, compte tenu de l'attitude de certains préfets, mais aussi au niveau national, comme par exemple à l'occasion de l'élaboration du cadre de référence stratégique national (CRSN) qui, a-t-il souligné, ne tenait en définitive compte que des priorités de l'Etat. Enfin, il a expliqué que par son approche très étatique et sa volonté de limiter le rôle de ses régions, la France apparaissait au niveau européen en complet décalage avec les autres Etats membres.
M. Jean François-Poncet, président, a considéré que la réticence des collectivités territoriales à afficher la part des cofinancements européens dans les projets qu'elles financent n'était pas de nature à améliorer la lisibilité des politiques européennes. Revenant sur la prochaine programmation de fonds structurels, il s'est dit inquiet de la réduction de la place conférée au développement rural.
M. Raymond Forni a expliqué que la prise en charge des actuels crédits du Fonds européen d'orientation et de garantie agricole (FEOGA) consacrés au développement rural par un Fonds européen agricole de développement rural (FEADER) ne relevant plus de la politique de cohésion et la suppression du zonage se traduiraient par une diminution des crédits destinés à l'espace rural et par un risque de saupoudrage. Il a estimé que les pôles d'excellence rurale, dispositif mis en place par le Gouvernement pour remédier à cette situation, étaient encore mal définis et insuffisamment dotés, soulignant à cet égard que les régions n'auront pas les moyens de contribuer à leur financement.
M. Jean François-Poncet, président, s'est dit pour sa part favorable aux pôles d'excellence rurale, tout en admettant le caractère limité des financements auxquels ils pourront donner lieu.
M. Raymond Forni a précisé que les crédits destinés à abonder ces pôles seraient gérés par l'Etat dans le cadre du programme national du FEADER piloté par le ministère de l'agriculture. Il a considéré que l'incapacité de notre pays à simplifier l'architecture des collectivités au niveau local avait rendu encore plus forte la tendance à la « renationalisation » des politiques au niveau de l'Etat. Enfin, rappelant que le Gouvernement avait décidé de ne pas prolonger l'exécution de l'actuelle génération de contrats de plan Etat-régions au-delà du 31 décembre 2006, il s'est dit inquiet du peu de temps dont disposeraient les collectivités territoriales pour élaborer en concertation avec l'Etat la prochaine génération de contrats dont la durée sera alignée sur celle de la prochaine programmation de fonds européens.