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DÉLÉGATION DU SÉNAT POUR LA PLANIFICATION

Mardi 29 mai 2001

- Présidence de M. Joël Bourdin, président.

Les perspectives de retour au plein emploi - Examen du rapport d'information

La délégation a procédé à l'examen du rapport d'information de M. Joël Bourdin sur les perspectives de retour au plein emploi.

M. Joël Bourdin, rapporteur,
s'est tout d'abord efforcé de définir le plein emploi. Il a estimé que celui-ci supposait notamment un taux de chômage proche du taux de chômage frictionnel (c'est-à-dire correspondant à des personnes recherchant brièvement un emploi) et un taux d'emploi élevé. Il a souligné, à cet égard, que le taux d'emploi français était inférieur à la moyenne de l'OCDE. Il a considéré que d'autres critères, notamment qualitatifs, pouvaient être inclus dans la définition du plein emploi.

Il a ensuite présenté les principaux types de chômage. Il a indiqué que les économistes distinguaient deux grands types de chômage : le chômage conjoncturel, susceptible de disparaître si la croissance reste durablement élevée, et le chômage structurel, qu'une croissance durablement élevée ne suffirait pas à résorber. Il a estimé que le chômage structurel comprenait lui-même trois composantes : le chômage frictionnel, le chômage classique (correspondant à des personnes dont la productivité serait trop faible par rapport à ce qu'elles coûteraient à leur employeur) et le chômage volontaire (correspondant à des personnes qui ne souhaitent pas travailler, à cause d'un gain de revenu potentiel jugé insuffisant). Il a indiqué que les évaluations du taux de chômage structurel étaient généralement comprises entre 8 et 10 %, tout en estimant que ces résultats devaient être considérés avec prudence. Il a également jugé que les tentatives de décomposition du chômage structurel entre ses différentes composantes n'avaient pas jusqu'à présent abouti à des résultats incontestables.

M. Joël Bourdin, rapporteur, s'est alors interrogé sur ce que pourraient être les grandes lignes d'une politique économique destinée à favoriser la réduction du taux de chômage. S'appuyant notamment sur des travaux de simulation réalisés pour la délégation par le centre d'observation économique de la Chambre de commerce et d'industrie de Paris, il a estimé que le retour à un taux de chômage de l'ordre de 5 %, d'ici la fin de la décennie, n'allait pas de soi. Il a considéré qu'un tel objectif supposait soit une croissance de 3 % en moyenne sur 10 ans, soit le maintien d'une croissance riche en emplois. Il a jugé que le premier scénario était optimiste, d'autant plus qu'une augmentation de la croissance potentielle du fait de la « nouvelle économie » réduirait le contenu de la croissance en emplois. Il a par ailleurs considéré que le maintien d'une croissance riche en emplois, c'est-à-dire d'une faible croissance de la productivité du travail, était susceptible d'être néfaste à la diminution du taux de chômage structurel. Il a précisé que la perspective d'un retour à un taux de chômage de 5 % en l'an 2010 s'éloignerait davantage si la population active augmentait, au lieu de se stabiliser, à partir de 2006.

M. Joël Bourdin, rapporteur, a ensuite examiné les instruments pouvant être mis en oeuvre par la politique de l'emploi.

Il a estimé que le chômage classique pouvait être réduit par un meilleur accompagnement des chômeurs, comprenant si nécessaire une action de formation. Il a également considéré qu'il pourrait en outre être utile de renforcer le dispositif de réduction du coût du travail peu qualifié (à condition de réduire les dépenses publiques d'un montant correspondant), éventuellement par l'instauration d'un revenu minimum d'activité. En revanche, il a jugé qu'un durcissement des conditions de licenciement ne serait vraisemblablement pas efficace pour accélérer la diminution du taux de chômage.

M. Joël Bourdin, rapporteur, a estimé que la réduction du chômage volontaire était plus délicate. Il a indiqué que les études réalisées à ce sujet suggéraient que l'impact du crédit d'impôt (et en particulier de la prime pour l'emploi) serait modeste. Il a considéré qu'une réduction de la durée d'indemnisation du chômage ou l'instauration d'une conditionnalité de l'aide seraient peut-être plus efficaces, mais il a jugé que ces mesures étaient socialement discutables, même si elles étaient mises en oeuvre dans certains pays.

M. Joël Bourdin, rapporteur, a affirmé que diverses politiques permettraient d'accroître le taux d'activité (c'est-à-dire la proportion de personnes travaillant ou cherchant un emploi parmi celles en âge de travailler). Il a estimé que le crédit d'impôt, comme la prime pour l'emploi, ne pouvait vraisemblablement créer qu'un nombre d'emplois relativement modique, de l'ordre de quelques dizaines de milliers. Il a jugé qu'il serait peut-être plus efficace de réduire les facteurs institutionnels incitant à la non-activité les personnes de plus de 55 ans, dont le taux d'activité est en France l'un des plus faibles de l'OCDE.

Mme Odette Terrade, M. Henri Le Breton et M. Georges Mouly se sont interrogés sur l'ampleur des plans sociaux et sur l'effet que pourrait avoir un durcissement des conditions de licenciement économique. En réponse, M. Joël Bourdin a indiqué que des conditions de licenciement strictes, au sein de l'OCDE, ne semblaient pas associées à une diminution rapide du taux de chômage.

La délégation a alors adopté le rapport d'information présenté par M. Joël Bourdin sur lesperspectives de retour au plein emploi et autorisé sa publication.