M. Claude BELOT, rapporteur spécial

II. UNE ANNÉE 2012 DIFFICILE, MARQUÉE PAR DES RESSOURCES PUBLICITAIRES PLUS FAIBLES QU'ESCOMPTÉES

A. UNE ANNÉE MARQUÉE PAR DES RESSOURCES INFÉRIEURES AUX PRÉVISIONS

1. Une diminution des ressources publiques en cours de gestion

Malgré la hausse du budget public de France Télévisions dans le projet de loi de finances pour 2012, l'entreprise a été sollicitée dans le cadre de la réduction des déficits publics .

Ainsi, le plan de retour à l'équilibre des finances publiques du gouvernement précédent a réduit la dotation du groupe de 15 millions d'euros en loi de finances initiale pour 2012. Cette dernière a par ailleurs placé sur la réserve de précaution 6 % des crédits de l'action 1 « France Télévisions » du programme 313 « Contribution à l'audiovisuel et à la diversité radiophonique » doté de 423,9 millions d'euros.

Dans un second temps, la loi n° 2012-354 du 14 mars 2012 de finances rectificative pour 2012 a abouti à une annulation de 6 millions d'euros de crédits supplémentaires. La dotation totale de France Télévisions était donc, alors, de 2 532,4 millions d'euros.

Enfin, à l'été 2012, 6 millions d'euros de plus ont été placés sur la réserve de précaution.

2. Des ressources publicitaires qui ne sont pas à la hauteur des attentes

De surcroît, d'après les informations transmises à votre rapporteur spécial, les prévisions de recettes de publicité et de parrainage accuseront en 2013 un recul très significatif de 66,5 millions d'euros par rapport aux prévisions du budget 2012, alors même que le montant des recettes prévu en 2012 ne sera pas atteint. Cette évolution s'explique notamment par le tassement du marché publicitaire constaté depuis le dernier trimestre 2011, en lien avec la dégradation de la conjoncture économique.

Evolution des ressources publicitaires de France Télévisions depuis 2009

(en millions d'euros)

2009 (réalisé)

2010 (réalisé)

2011 (réalisé)

2012 (prévisions)

2013 (prévisions)

Recettes de publicité et de parrainage

404,9

441,3

423,7

425

358,5

Evolution

+ 9,0 %

- 4,0 %

+ 0,3 %

- 15,6 %

Source : réponses au questionnaire budgétaire de votre rapporteur spécial.

Le tableau ci-dessus fait clairement apparaître le retournement de conjoncture. La situation risque de ne pas s'améliorer, avec l'arrivée de D 8 depuis le mois d'octobre, puis de six nouvelles chaînes gratuites sur la TNT à partir du mois de décembre.

3. Les conséquences de ces évolutions sur le résultat 2012 de France Télévisions

Face à ces évolutions, France Télévisions est parvenue à réaliser un plan d'économies de 30 millions d'euros, qui a par exemple permis de diminuer le coût de grille de 19,2 millions d'euros et les coûts techniques de diffusion de 3,2 millions d'euros. Sur le fondement des informations disponibles en octobre 2012, le résultat d'exploitation de l'entreprise s'établirait à -21,4 millions d'euros, inférieur de 27,1 millions d'euros par rapport à la prévision. Le résultat financier serait quant à lui en ligne avec le budget, et le résultat net, après prise en compte des résultats financiers, exceptionnel et de l'impôt, s'élèverait à - 25,9 millions d'euros, soit -25,5 millions d'euros par rapport au budget.

4. Quel financement pour France Télévisions ?

Les évolutions constatées en 2012 appellent une réflexion plus générale sur le financement de l'entreprise, dans un contexte de plus en plus contraint.

Votre rapporteur spécial relève par ailleurs que la taxe télécoms, créée pour abonder le budget de l'Etat dans le cadre de la compensation de la suppression de la publicité après 20h00 pour France Télévisions, pourrait être annulée prochainement par la Cour de justice européenne, ce qui fait peser un risque budgétaire significatif . Il convient donc dès maintenant de s'interroger sur une ressource pérenne à même de se substituer à cette taxe.

B. QUEL BILAN DE LA PREMIÈRE ANNÉE DE MISE EN oeUVRE DU NOUVEAU COM 2011-2015 ?

Pour mémoire, le COM 2011-2015 a pour ambition de « renforcer l'identité des différentes chaînes du groupe et de développer une offre numérique complète (1), pour fédérer les différents publics autour d'une programmation ambitieuse, portée par la recherche de l'innovation et de la création (2), dans le cadre d'une gestion responsable et efficace 12 ( * ) (3) ».

1. Fédérer tous les publics grâce à une offre diversifiée

La part de l'offre régionale dans l'offre de France 3 a diminué entre 2010 et 2011, mais le coût horaire des programmes régionaux baisse de près de 20 % par rapport à 2010, le volume de programmes diffusés ayant augmenté nettement plus que le coût de grille. De plus, en un an, la part des programmes spécifiques dans les grilles Outremer a augmenté de façon spectaculaire (de 20 % à 76 %).

S'agissant du déploiement de la stratégie numérique, la fréquentation des sites Internet du groupe a fortement progressé. De plus, France Télévisions est parvenue à renforcer sa présence sur la télévision connectée .

En revanche, la part d'audience du groupe a diminué entre 2010 et 2011 , bien que France Télévisions demeure le premier groupe audiovisuel français. Si votre rapporteur spécial relève la bonne performance de France 4 (+ 25 % d'audience par rapport à 2010) et de France 5 (+ 3,3 %), il déplore les résultats décevants de France 2 et France 3 , dont la part d'audience diminue respectivement de 1,2 et de 1 point.

2. Développer une offre de programmes de service public, moderne et renouvelée

En 2011, le niveau de soutien à la création a dépassé les objectifs assignés par le COM . En particulier, 416 millions d'euros ont été investis dans la création audiovisuelle française et européenne, pour une cible de 395 millions d'euros.

De plus, les dépenses d'écriture et de développement ont représenté 2,7 % de ce poste, contre 2 % en 2010.

Votre rapporteur spécial salue également l'effort réalisé sur l'accessibilité des programmes aux personnes aveugles et malvoyantes (91 programmes audio-décrits en 2011, contre 12 en 2010 et un objectif initial de 52).

3. Faire de l'entreprise unique un modèle d'organisation efficace et responsable

S'agissant des ressources humaines, France Télévisions n'a pas respecté la limite de 18 % d'effectifs non permanent dans l'emploi total, avec un taux de 19,1 % .

De plus, les charges opérationnelles ont progressé plus rapidement que le coût de grille. La hausse de celui-ci suit le plan d'affaires du COM, ce qui permet au groupe de respecter l'objectif assigné par le contrat d'objectifs et de moyens (84,8 %) concernant la part du coût de grille dans les frais totaux du groupe. La part des charges de personnel dans les charges opérationnelles, à hauteur de 34,8 %, s'est quant à elle avérée inférieure à la cible (35,6 %).

Par ailleurs, les recettes de publicité liées aux supports numériques, bien qu'en progression, demeurent inférieures à la prévision du plan d'affaires. Enfin, le résultat d'exploitation de France Télévisions Distribution (FTC) est déficitaire à hauteur de - 1,3 million d'euros, montant plus faible que celui de la prévision.

C. LES CRITIQUES ÉMISES PAR LA COUR DES COMPTES DANS SON RAPPORT PUBLIC ANNUEL 2012

Le rapport public annuel de la Cour des comptes publié en février 2012 comprend une insertion relative au suivi des recommandations émises dans le cadre de son rapport public thématique de 2009, intitulée « France Télévisions au milieu du gué », où elle se félicite de la mise en oeuvre de certaines de ses précédentes recommandations, tout en insistant également sur des faiblesses persistantes.

Dans ce document, la Cour critique notamment le caractère fragile des hypothèses retenues dans le nouveau COM , recommandant d'accorder une vigilance particulière à la préservation de l'équilibre financier de France Télévisions.

En outre, la Cour constate les difficultés de l'entreprise pour négocier un accord d'entreprise unique, ainsi que pour achever le projet d'entreprise commune. A cet égard, elle relève en particulier que la convergence des systèmes d'information n'a pas encore été effectuée.

La Cour regrette par ailleurs que le secteur de l'information et des rédactions demeure encore trop isolé des réformes.

Enfin, elle estime que les relations entre France Télévisions et les sociétés de production indépendantes sont déséquilibrées en faveur des secondes .


* 12 Source : réponses au questionnaire budgétaire de votre rapporteur spécial.