Travaux de la délégation aux droits des femmes



DÉLÉGATION DU SÉNAT AUX DROITS DES FEMMES ET À L'ÉGALITÉ DES CHANCES ENTRE LES HOMMES ET LES FEMMES

Mardi 28 juin 2005

- Présidence de Mme Gisèle Gautier, présidente.

Parité - Emploi - Egalité salariale entre les femmes et les hommes - Examen du rapport d'information

La délégation a tout d'abord examiné le rapport d'information de Mme Gisèle Gautier, présidente, rapporteure, sur le projet de loi n° 343 (2004-2005), adopté par l'Assemblée nationale, relatif à l'égalité salariale entre les femmes et les hommes.

Mme Gisèle Gautier, présidente, après avoir rappelé que la mission essentielle de la délégation est de se prononcer sur la conformité du projet de loi au principe d'égalité des chances, a indiqué que ce projet de loi se situait dans la lignée de la « loi Roudy » du 13 juillet 1983 relative à l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes et de la « loi Génisson » du 9 mai 2001 relative à l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes.

Elle a noté que, lors de l'annonce du présent projet, certaines voix s'étaient élevées pour critiquer l'excès de législation en matière d'égalité  des rémunérations. Elle a cependant indiqué que le texte soumis à l'examen du Sénat consolidait le droit existant et comportait des avancées positives. Puis Mme Gisèle Gautier, rapporteure, a fait observer que Mme Esther Sittler, rapporteure de la commission des affaires sociales sur ce texte, avait à juste titre estimé prudent que le projet ne définisse pas immédiatement des pénalités dissuasives pour faire respecter l'obligation de négocier sur l'égalité des rémunérations afin de ne pas risquer de dissuader certaines entreprises d'embaucher des femmes.

Elle a également indiqué que le projet initial comportait 15 articles et le texte adopté par l'Assemblée nationale 25, ce qui traduit l'intérêt suscité par le sujet ; Mme Gisèle Gautier a précisé en particulier que l'Assemblée nationale avait adopté une série d'amendements présentés par Mme Marie Jo Zimmermann qui visent à féminiser les conseils d'administration, les comités d'entreprise et les délégués du personnel des entreprises publiques et privées.

Elle a ensuite résumé les grands axes de son rapport, en rappelant tout d'abord que le constat essentiel était celui de la stagnation des écarts de rémunération entre hommes et femmes depuis 1995, malgré le perfectionnement du droit.

Après avoir noté que le présent projet de loi se présentait comme un complément de la loi « Génisson » du 9 mai 2001 dont elle a souligné l'utilité, Mme Gisèle Gautier, rapporteure, a observé que dans le respect de l'impératif de stabilité des normes, le projet de loi s'appuyait largement sur le droit en vigueur, sans introduire un degré de complexité supplémentaire dans le code du travail.

Elle a ajouté qu'outre la stagnation des écarts de salaires, une seconde raison justifiait une nouvelle impulsion législative ; comme l'a mis en évidence le sondage réalisé à l'initiative de la délégation, les négociations obligatoires sur l'égalité professionnelle ne sont organisées que dans une minorité d'entreprises. La rapporteure s'est félicitée de ce que les difficultés mises en lumière par ce sondage trouvent une réponse dans ce projet de loi, de même qu'un certain nombre de recommandations formulées par la délégation au cours de ces dernières années.

Mme Gisèle Gautier, rapporteure, a indiqué que ce diagnostic général, peu satisfaisant en matière d'application de la loi, ne devait pas faire oublier le cas de quelques entreprises pionnières en matière d'égalité professionnelle. Elle a cité en exemple le cas paradoxal de certains groupes qui, sans avoir nécessairement analysé en détail le dispositif issu de la « Loi Génisson », conduisaient une politique très volontariste d'égalité entre les hommes et les femmes. Elle a souhaité que le présent projet de loi contribue, entre autres, à éveiller les consciences sur le droit en vigueur.

Elle a ensuite présenté la seconde partie de son rapport, qui analyse la manière dont le présent projet de loi donne un nouvel élan à la négociation collective dans le domaine le plus emblématique et le plus « révélateur » des discriminations entre femmes et hommes : celui des rémunérations.

Même si dans sa méthode, le dispositif proposé repose largement sur la « confiance » à l'égard des entreprises et la capacité de négocier des partenaires sociaux, la rapporteure a souligné que le présent projet de loi comporte également des mécanismes incitatifs assez puissants, comme le refus d'extension qui sera systématiquement prononcé lorsqu'une convention de branche, conclue au niveau national, ne comportera pas de stipulation relative à la suppression des écarts de salaire entre les femmes et les hommes prévue à l'article 3.II.

Mme Gisèle Gautier, rapporteure, a indiqué que l'objectif essentiel du projet de loi s'exprimait à travers les dispositifs prévus dans ses articles 3 et 4 : les négociations salariales annuelles obligatoires, au niveau de la branche comme de l'entreprise, doivent intégrer des mesures permettant de supprimer les écarts de rémunérations entre les femmes et les hommes d'ici 2010. Analysant les mécanismes prévus par le projet de loi pour donner une impulsion à ces négociations, elle a souligné qu'à titre de sanction, la convention collective de branche ne peut pas être étendue si elle ne contient pas de mesures visant à la suppression des écarts de rémunération. En outre, dans les entreprises, les accords collectifs sur les salaires effectifs ne pourront être validés auprès de l'autorité administrative compétente, que s'ils sont accompagnés d'un procès-verbal d'ouverture des négociations sur les écarts de rémunération.

Puis la rapporteure a donné un aperçu de l'ensemble des autres dispositions du projet de loi, en insistant plus particulièrement sur certains articles.

Au titre premier du projet relatif à la suppression des écarts de rémunération, elle a précisé que l'article 1er visait à compenser les effets de la maternité sur la rémunération. Rappelant qu'aujourd'hui les femmes en congé de maternité bénéficient d'ores et déjà d'une garantie de retour à l'emploi et des augmentations générales accordées par l'entreprise, elle a indiqué que selon le correctif prévu par l'article 1er du projet de loi, la majoration à laquelle peut prétendre le salarié à son retour de congé se fondera sur la « moyenne des augmentations individuelles », soit des salariés de la même catégorie, soit de l'ensemble des salariés de l'entreprise. Mme Gisèle Gautier, rapporteure, a proposé à la délégation de marquer son approbation à ce dispositif.

A propos de l'article 4 qui prévoit un dispositif en deux étapes, au niveau des entreprises, pour pallier l'éventualité d'une absence de négociation, elle a indiqué que, dans le prolongement de la modification adoptée à l'article 3 relatif aux négociations de branche, l'Assemblée nationale avait précisé que la négociation devait s'engager au sein de l'entreprise « sérieusement et loyalement ». En outre, dans le souci de s'assurer de l'efficacité du bilan à mi-parcours prévu par ce texte, l'Assemblée nationale a décidé de confier au Conseil supérieur de l'égalité professionnelle, responsable d'un rapport d'évaluation à mi-parcours, « l'élaboration d'outils méthodologiques permettant de mesurer les écarts de rémunération et de les recenser, en tenant compte des différents parcours professionnels et secteurs d'activité ». Insistant sur l'importance de ces outils pour permettre aux entreprises et aux branches d'établir un diagnostic partagé, Mme Gisèle Gautier, rapporteure, a déploré le manque de suivi et de contrôle de l'application de la « Loi Génisson ».

La rapporteure a enfin indiqué que le II de l'article 4 prévoit qu'au vu du bilan effectué à mi-parcours par la conférence nationale sur l'égalité salariale entre les femmes et les hommes, sur la base d'un rapport élaboré par le Conseil supérieur de l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, le Gouvernement pourrait présenter au Parlement, si nécessaire, un projet de loi instituant une contribution assise sur les salaires applicables aux entreprises ne satisfaisant pas à l'obligation d'engager les négociations.

S'agissant des dispositions du titre III sur l'accès des femmes à des instances délibératives et juridictionnelles, elle a commenté :

- l'article 13 qui vise à assurer une représentation équilibrée des femmes et des hommes dans les conseils d'administration des entreprises publiques ;

- l'article 13 bis nouveau introduit par l'Assemblée nationale, qui se situe dans la ligne du précédent article et qui vise à promouvoir une meilleure représentation des femmes dans les conseils d'administration des sociétés anonymes, où elle est particulièrement faible. Mme Gisèle Gautier a noté que l'Assemblée nationale avait introduit ce dispositif « audacieux et volontaire » dans le texte contre l'avis du Gouvernement ;

- l'article 13 ter nouveau, dont l'objet est de faire progresser, dans un délai de cinq ans, le nombre de femmes élues parmi les délégués du personnel en respectant la proportion d'hommes et de femmes de chaque collège électoral. Elle a noté que la délégation s'était, à plusieurs reprises, préoccupée de cette question, et évoqué son témoignage personnel pour en illustrer la nécessité pratique ;

- l'article 13 quater nouveau, adopté dans les mêmes conditions, qui introduit la même règle pour les comités d'entreprise et vise à faire progresser, dans un délai de cinq ans, le nombre de femmes élues aux comités d'entreprise en respectant la proportion d'hommes et de femmes de chaque collège électoral. Puis elle a évoqué l'article 14 relatif à l'effort de féminisation des instances prud'homales.

Elle s'est enfin félicitée de l'engagement solennel de la ministre de la parité et de l'égalité professionnelle qui a indiqué, à l'Assemblée nationale, au cours de la séance du mercredi 11 mai 2005 consacrée à l'examen du présent projet de loi, que la question du temps partiel serait examinée dans le cadre d'une conférence qui se déroulera prochainement et à laquelle les parlementaires seront associés ; Mmes Gisèle Printz etAnnie David ont souligné la nécessité primordiale de traiter du temps partiel et de la précarité en matière de travail des femmes, et Mme Esther Sittler a confirmé que le Gouvernement se prépare à prendre des initiatives sur ce thème.

Au cours du débat qui s'est instauré sur l'exposé de Mme Gisèle Gautier, Mme Esther Sittler a estimé nécessaire de différer, comme le prévoit le projet de loi, la mise en place d'éventuelles sanctions à l'obligation de négocier l'égalité salariale entre hommes et femmes. Après avoir souhaité que la conjoncture économique favorise le rééquilibrage des salaires, elle a évoqué la nécessité de tenir compte du risque de fuite des entrepreneurs et des décisions d'implantation d'entreprises à l'étranger.

Mme Gisèle Printz a déploré que les débats sur l'embauche et la rémunération des femmes se rattachent trop exclusivement à des périodes où se manifeste un besoin conjoncturel de main-d'oeuvre.

Mme Annie David a regretté que le projet de loi se concentre sur l'égalité des rémunérations sans évoquer directement l'égalité des qualifications. Elle a cité un certain nombre de situations où les femmes sont moins bien rémunérées que les hommes, à qualification égale, Mme Esther Sittler faisant observer qu'au niveau local certains agents publics font office de secrétaire de mairie sans pouvoir prétendre, en raison de leur insuffisance de diplômes, à la rémunération afférente à ces fonctions.

Mme Janine Rozier a souligné la nécessité de mieux former les femmes à la négociation salariale, en particulier au niveau individuel, pour surmonter une certaine « auto-limitation » qui les conduit parfois à ne pas « oser demander une augmentation ».

Mme Monique Cerisier-ben Guiga, après avoir constaté que l'urgence n'était pas déclarée sur ce projet de loi, a manifesté sa vive inquiétude à l'égard de la tendance grandissante du Sénat à adopter conformes les textes issus des travaux de l'Assemblée nationale, en se privant ainsi de la possibilité d'introduire des modifications. Elle a précisé que 42,4 % des textes, hors conventions internationales, ont été votés conformes par le Sénat depuis le 1er octobre 2004.

Mme Esther Sittler a indiqué qu'elle avait réfléchi, en tant que rapporteur du texte pour la commission des affaires sociales, à simplifier la rédaction :

- de l'article 4 du projet relatif aux négociations sur l'égalité salariale dans l'entreprise, qui comporte une mention introduite par l'Assemblée nationale sur le caractère loyal et sérieux des négociations salariales ;

- et de l'article 13 bis nouveau qui tend à prévoir une meilleure représentation des femmes dans les conseils d'administration des sociétés anonymes. A ce titre, elle a manifesté le souhait de fixer un objectif de rééquilibrage en évitant d'introduire un indicateur chiffré.

Mmes Jacqueline Alquier et Annie David ont regretté de ne pas pouvoir disposer de l'analyse du texte fait par la commission des affaires sociales.

S'agissant de la recommandation tendant à concilier la mobilité professionnelle avec le souci de rapprochement des couples, Mme Catherine Troendle a indiqué que le problème se posait également pour la fonction publique et cité le cas de certains enseignants. Mme Monique Cerisier-ben Guiga a pour sa part illustré les difficultés du rapprochement des conjoints pour les personnels relevant du ministère des affaires étrangères, Mme Muguette Dini exprimant son scepticisme sur la portée effective d'une recommandation spécifique à ce sujet.

Se prononçant sur une éventuelle recommandation visant à subordonner l'accès aux marchés publics au respect de la législation sur l'égalité des rémunérations entre les sexes, Mmes Esther Sittler et Catherine Troendle ont fait part de leurs réserves à cet égard, fondée sur le souci d'éviter d'introduire des complications pratiques dans la passation des marchés.

Mme Hélène Luc a souhaité que la délégation souligne explicitement que la « Loi Génisson » était à l'heure actuelle insuffisamment appliquée.

En réponse aux divers intervenants, Mme Gisèle Gautier, rapporteure, a tout d'abord souligné que le présent projet de loi s'appuyait sur les acquis de la loi dite, « loi Génisson », du 9 mai 2001 et a rendu hommage aux avancées introduites par cette législation.

Elle a ensuite constaté la réalité des besoins de main-d'oeuvre que va susciter l'évolution démographique, en notant que l'augmentation des taux d'activité des femmes constituait à long terme un facteur de rééquilibrage des inégalités de pensions de retraite entre les genres.

Mme Gisèle Gautier, rapporteure, a précisé que certaines entreprises consentaient des efforts considérables en matière de rapprochement des couples expatriés ; elle a jugé nécessaire d'inciter les employeurs à intégrer de manière plus systématique la dimension du couple dans les décisions relatives à la mobilité géographique de leurs salariés.

Puis la délégation a adopté, par 9 voix pour et 6 abstentions, les recommandations suivantes :

Comme en témoigne le sondage réalisé à l'initiative de la Délégation, l'équité des rémunérations entre les hommes et les femmes est insuffisamment négociée et appliquée aujourd'hui en France : la loi est mal appliquée. Or, il s'agit là, pour notre pays, non seulement d'un facteur de justice sociale, mais aussi d'une contribution indirecte à la généralisation de l'activité féminine, qui favorise la croissance économique et la régulation des grands équilibres.

Aussi bien la délégation approuve-t-elle le projet de loi soumis à son examen, qui incorpore de nombreuses avancées introduites dans le texte en première lecture par l'Assemblée nationale.

Elle se félicite tout d'abord de la définition d'un objectif à 5 ans en matière d'égalité des rémunérations : parfaitement identifiable par les partenaires sociaux, cette logique de résultat permet d'éviter d'introduire un degré supplémentaire de complexité dans le code du travail.

La délégation observe que le présent projet repose largement sur la « confiance » à l'égard des entreprises et sur la capacité à négocier de l'ensemble des partenaires sociaux. Toutefois, ce texte comporte également des mécanismes incitatifs assez puissants, comme le refus d'extension, qui sera systématiquement prononcé lorsqu'une convention de branche, conclue au niveau national, ne comportera pas de stipulation relative à la suppression des écarts de salaire entre les femmes et les hommes.

La délégation approuve la méthode qui consiste à tout mettre en oeuvre pour favoriser le dialogue social sur l'égalité des rémunérations et à suivre attentivement ses résultats avant de définir d'éventuelles pénalités financières.

Un certain nombre de données démontrent que les entreprises les plus innovantes en matière sociale et les plus performantes sur le plan financier sont celles qui comptent le plus de femmes dans leurs équipes dirigeantes : c'est notamment pour cette raison que la délégation approuve les dispositions du projet de loi tendant à féminiser les conseils d'administration ainsi que les instances représentatives des salariés. En outre, elle souligne tout particulièrement le rôle exemplaire qui doit être conféré au secteur public dans ce domaine.

A titre complémentaire, la délégation présente les recommandations suivantes :

I. Favoriser la diffusion des « bonnes pratiques » en matière d'égalité professionnelle :

1. Généraliser, au sein des entreprises, la présence d'une interlocutrice à l'écoute des salariées pour améliorer les possibilités de médiation et de dialogue.

2. Dans le prolongement direct du projet de loi, faciliter la diffusion des expériences réussies en s'efforçant, tout particulièrement, de lever les obstacles juridiques à la « mise en ligne » des accords d'égalité professionnelle.

3. Veiller, dans la gestion des ressources humaines des entreprises et des collectivités publiques, à mieux articuler la mobilité professionnelle avec le souci de rapprochement des conjoints.

II. Mesurer les effets directs et induits du rééquilibrage des rémunérations.

4. Chiffrer l'effort financier consenti par les entreprises pour combler les écarts de rémunération entre les hommes et les femmes. En particulier, recenser les résultats concrets du réexamen des grilles de qualification pour garantir, à compétences équivalentes, une rémunération égale.

5. Etudier simultanément les retombées positives, pour les entreprises, en termes d'image et de résultats, de la « labellisation » ou des bonnes pratiques en matière d'égalité professionnelle.

III. Impliquer les pouvoirs publics.

6. Inclure les déléguées régionales dans les processus de discussion et sensibiliser les inspecteurs du travail au thème de l'égalité salariale.

7. Faire de la fonction publique et du secteur public un « laboratoire » de l'égalité salariale et de la représentation des femmes dans les équipes de direction.

La délégation souligne enfin que ce projet de loi se définit comme la composante d'une stratégie plus globale tendant à combattre les facteurs structurels de l'inégalité professionnelle entre femmes et hommes. Elle regrette que les questions de précarité et de travail à temps partiel ne soient pas prises en compte par le présent texte et insiste pour que ces sujets fassent très prochainement l'objet d'un projet de loi complémentaire.

Union européenne - Situation des droits des femmes dans les dix nouveaux Etats membres de l'Union européenne - Examen du rapport d'activité 2004-2005

La délégation a ensuite procédé àl'examen du rapport d'activité 2004-2005 portant, notamment, sur la situation des droits des femmes dans les dix nouveaux Etats membres de l'Union européenne.

Mme Gisèle Gautier, présidente, a rappelé que le rapport d'activité de la délégation s'articulait en deux parties, la première retraçant l'ensemble des travaux de la délégation, en particulier l'examen des textes, projets ou propositions de loi dont elle a été saisie, ainsi que son activité nationale et internationale, la seconde consacrée à la situation des droits des femmes dans les dix nouveaux Etats membres de l'Union européenne.

Elle a noté que la délégation avait poursuivi ses travaux sur la mixité, et qu'elle avait par ailleurs commandé à l'IFOP un sondage sur la situation professionnelle des femmes et le bilan de l'application de la loi du 9 mai 2001, dite « Loi Génisson », relative à l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, dont les résultats ont été largement repris par les médias.

Elle a indiqué que la délégation avait également adopté deux rapports portant sur des propositions et projets de loi :

- le rapport de M. Jean-Guy Branger sur les propositions de loi relatives à la lutte contre les violences au sein des couples, qui a permis à la délégation d'adopter à l'unanimité 18 recommandations ; à cet égard, elle a formé le voeu que les conclusions de la commission des lois adoptées par le Sénat soient prochainement inscrites à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale ;

- le rapport sur le projet de loi relatif à l'égalité salariale.

Mme Gisèle Gautier, présidente, a présenté l'activité internationale de la délégation et a cité :

- la participation aux conférences des commissions parlementaires pour l'égalité des chances entre les femmes et les hommes de l'Union européenne : la 9e a eu lieu à Bruxelles, en avril 2004, et portait sur le suivi des travaux sur l'égalité des sexes en Europe ; la 10e conférence s'est tenue, en novembre dernier, à La Haye, où la présidente s'est rendue avec Mmes Janine Rozier et Gisèle Printz, et était consacrée au thème de l'indépendance économique des femmes, en particulier celles issues de l'immigration et des minorités ethniques ;

- la célébration en séance publique de la Journée internationale pour l'élimination de la violence à l'égard des femmes, le 25 novembre 2004 ; elle a profité de cette occasion pour remercier une nouvelle fois le Président Christian Poncelet qui a signé, en séance, la charte « Zéro violence » des hommes contre la violence faite aux femmes ;

- la célébration du 20e anniversaire de la Réunion des femmes parlementaires, dans le cadre de l'Union interparlementaire (UIP), à Manille ;

- un déplacement effectué en Afghanistan, au titre d'une mission de la commission des affaires étrangères, en compagnie, notamment, de Mme Hélène Luc.

Elle a rappelé que la délégation avait également procédé à des auditions sur la situation des femmes en Birmanie et en Afghanistan. A cet égard, elle a indiqué avoir envoyé un fax à Mme Aung San Suu Kyi, à l'occasion de son 60e anniversaire. Elle a ajouté qu'elle avait reçu, dans le cadre d'un déjeuner de travail, une délégation de députés libanais qui effectuaient une visite d'étude au Sénat. Elle a ajouté que, le 7 mars dernier, en compagnie de Mmes Paulette Brisepierre, Janine Rozier, Gisèle Printz et Joëlle Garriaud-Maylam, et MM. Jean-Guy Branger et Yannick Bodin, elle avait été associée, par le Président Christian Poncelet, à l'audience accordée à une délégation de femmes d'Afghanistan, de Colombie, du Maroc, de République démocratique du Congo et de Russie sur le thème des violences envers les femmes, qui touchent toutes les sociétés, sans distinction de religions.

Elle a également indiqué avoir participé à plusieurs colloques sur le thème des droits des femmes et a souligné le succès des Etats généraux de la démocratie locale et de la parité, organisés par le Sénat le 7 mars dernier, qui ont réuni de très nombreuses femmes maires.

Mme Gisèle Gautier, présidente, a ensuite abordé le thème annuel de réflexion de la délégation, qui porte sur la situation des droits des femmes dans les dix nouveaux Etats membres de l'Union européenne.

Elle a insisté sur l'hétérogénéité des nouveaux Etats membres, en particulier d'un point de vue géographique et démographique, Malte comptant à peine 400.000 habitants et la Pologne plus de 38 millions, et rappelé que les pays candidats devaient arrêter un programme national d'adoption de l'acquis communautaire, répertorié en 31 chapitres couvrant l'ensemble des politiques européennes, dont les droits des femmes.

Elle a fait observer que, dans cinq nouveaux Etats membres, il n'existe aucune disposition constitutionnelle spécifique aux droits des femmes : la Lettonie, l'Estonie, Chypre, la République tchèque et la Pologne. Elle a ajouté que la participation des femmes au processus électoral était relativement ancienne dans la majorité des nouveaux Etats membres, six ayant accordé le droit de vote aux femmes avant la France, seulement en 1960 à Chypre.

Elle a noté que, si la plupart des nouveaux Etats membres comptent des femmes au sein de leur gouvernement, à l'exception de Chypre et de la Slovaquie, les portefeuilles ministériels n'échappaient pas à la répartition sexuée des compétences, les femmes occupant des ministères « naturellement » féminins, l'éducation et les affaires sociales en particulier. Elle a fait observer que les femmes étaient très inégalement présentes au sein des Parlements des nouveaux Etats membres, cette proportion étant comprise entre 9,1 % en Hongrie et 22 % en Lituanie, et a indiqué que, même si les femmes restaient largement sous-représentées au Parlement, leur part avait néanmoins globalement progressé, en particulier en Pologne, en République tchèque, en Lituanie et à Chypre.

Mme Gisèle Gautier, présidente, a fait observer que les femmes, dans les nouveaux Etats membres, étaient les premières à souffrir des difficultés économiques et sociales, ce qui constitue un paradoxe compte tenu de l'amélioration des droits dont elles bénéficient, liée notamment à l'adhésion à l'Union européenne, et a relevé l'existence d'un décalage entre les normes affichées et la pratique quotidienne.

Elle a noté que le marché du travail présentait, dans les nouveaux Etats membres, en particulier ceux issus de l'ancien bloc de l'Est, des aspects ségrégatifs à l'égard des femmes. Elle a notamment indiqué qu'en matière de chômage des femmes, la situation était plus dégradée à l'Est qu'à l'Ouest, les femmes, dans les nouveaux Etats membres, présentant un taux de chômage moyen de 15 %, nettement plus élevé que celui des 25 (10 %) et surtout que celui des 15 (8,9 %). Elle a également souligné le faible recours au travail à temps partiel pour les femmes dans les nouveaux Etats membres, qui constitue une spécificité par rapport aux 15 : alors que 25,9 % des femmes travaillent à temps partiel dans l'Union européenne, et près de 30 % chez les 15, elles ne sont que 5,3 % dans ce cas chez les 10. Elle a également mis en évidence l'importance des disparités salariales, l'écart des rémunérations entre les hommes et les femmes, au détriment de ces dernières, s'étant établi à 15 % en 2003 dans l'ensemble de l'Union européenne, alors que six nouveaux États membres se situent au-dessus, parfois dans une proportion relativement importante : la Slovaquie (23 %), l'Estonie (24 %) et Chypre (25 %).

Elle s'est inquiétée de la chute du taux de fécondité dans les nouveaux Etats membres, qui traduit les difficultés économiques et sociales auxquelles sont confrontées les femmes.

Mme Gisèle Gautier, présidente, a noté que les nouveaux Etats membres bénéficiaient d'un atout important qui tient à la place des femmes dans la prise de décisions, les statistiques de la Commission européenne illustrant une situation plutôt favorable pour les femmes des nouveaux Etats membres de l'Union, qu'il s'agisse de la fonction publique ou du secteur privé.

Enfin, elle a relevé qu'un des aspects préoccupants de la situation des femmes dans les pays issus de l'ancien bloc de l'Est résidait dans le développement, depuis la chute du Mur de Berlin, du commerce du sexe et de la traite des êtres humains, qui est particulièrement importante dans certains pays.

Un débat s'est ensuite engagé.

Mme Gisèle Gautier, présidente, s'est demandé si, après avoir dressé un constat sur la situation des droits des femmes dans les dix nouveaux Etats membres de l'Union européenne, la délégation ne devrait pas reprendre les éléments essentiels du rapport afin, notamment, de dresser une comparaison avec la situation française, son souci étant de donner des suites concrètes à ce travail.

Mme Gisèle Printz a fait part de son souhait de poursuivre les travaux sur des sujets européens et a évoqué la possibilité d'une étude sur l'opinion des femmes sur la construction européenne.

Mme Annie David, estimant elle aussi que la délégation devrait poursuivre sa réflexion sur les problèmes rencontrés par les femmes dans les dix nouveaux Etats membres de l'Union européenne, a centré son propos sur la manière d'améliorer la vie quotidienne de ces femmes, ce qui serait, selon elle, la condition d'une construction européenne progressiste. A ce titre, elle a évoqué « la traite des femmes et des enfants en Europe » comme possible piste de travail.

Mme Gisèle Printz a jugé que les femmes des nouveaux Etats membres avaient sans doute une vision spécifique de la construction européenne.

Mme Gisèle Gautier, présidente, a noté que les dix nouveaux Etats membres avaient comblé leur retard très rapidement grâce à une réelle volonté politique, et a fait observer que certains des Quinze ne paraissaient guère, en la matière, de « bons élèves ». Elle a souhaité que la délégation retienne le principe d'approfondir certaines pistes de réflexion abordées dans le présent rapport.

Mme Jacqueline Alquier s'est interrogée sur la possibilité d'aborder le sujet des perspectives, pour les femmes, de l'apparition de nouveaux métiers.

Puis la délégation a adopté le rapport annuel d'activité 2004-2005.

Rapport annuel d'activité - Choix du sujet pour l'année parlementaire 2005-2006 - Echanges de vues

La délégation a ensuite procédé à un échange de vues sur le sujet du rapport d'activité 2005-2006.

Mme Gisèle Gautier, présidente, a proposé que la délégation consacre son prochain rapport d'activité au thème des familles monoparentales et des familles recomposées.

Mme Hélène Luc a estimé que le choix de ce sujet pourrait donner l'occasion d'auditionner M. Jean-Louis Borloo, ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement.

Cette proposition a été approuvée par la délégation.

Mme Gisèle Gautier, présidente, a suggéré que la délégation procède, à la rentrée, à l'audition de Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité, ainsi qu'à celle de Mme Françoise Vilain, présidente de la délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre hommes et femmes du Conseil économique et social.

Mme Annie David a souhaité que le directeur de l'enseignement scolaire du ministère de l'éducation nationale soit également auditionné sur le sujet de l'intégration de la problématique de l'égalité des sexes dans les programmes.