Travaux de la commission des affaires économiques
- Mardi 29 juin 2004
- Aviation - Transports - Modification de la loi n° 2003-322 relative aux entreprises de transport aérien et notamment à la société Air France
- Organismes internationaux - XIe CNUCED - Brésil du 10 au 16 juin 2004
- Agriculture - Réforme de la PAC - Audition de M. Hervé Gaymard, ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales
- Aviation - Transports - Modification de la loi n° 2003-322 relative aux entreprises de transport aérien et notamment à la société Air France
- Mercredi 30 juin 2004
Mardi 29 juin 2004
- Présidence de M. Jean-Paul Emorine, président, puis présidence conjointe de M. Jean-Paul Emorine, président et de M. Hubert Haenel, Président de la délégation du Sénat pour l'Union européenne.
Aviation - Transports - Modification de la loi n° 2003-322 relative aux entreprises de transport aérien et notamment à la société Air France
La commission a tout d'abord examiné le rapport de M. Jean-François Le Grand sur le projet de loi n° 281 (2003-2004) modifiant la loi n° 2003-322 du 9 avril 2003 relative aux entreprises de transport aérien et notamment à la société Air France.
M. Jean-François Le Grand, rapporteur, a indiqué, en préambule, que ce projet de loi était un texte de portée essentiellement technique visant à adapter le dispositif de la loi du 9 avril 2003 relative aux entreprises de transport aérien et notamment à la société Air France à la situation nouvelle créée par l'absorption de KLM par Air France au mois de mai 2004. Il a souhaité rappeler que ce texte marquait l'aboutissement du processus législatif de privatisation d'Air France ouvert onze ans plus tôt par la loi du 19 juillet 1993. Il s'est félicité de l'achèvement de ce long chantier qui n'avait pas été remis en cause au cours des alternances politiques successives.
Il a fait valoir que le dispositif de la loi du 9 avril 2003 avait été conçu pour des entreprises cotées qui seraient directement les titulaires de licences de transporteur aérien. Or, la fusion d'Air France avec KLM devait déboucher, à partir du mois de septembre 2004, sur la mise en place d'une structure composée d'une société holding (Air France-KLM) et de deux filiales opérationnelles, Air France d'un côté et KLM de l'autre. Le problème venait de ce que la holding Air France-KLM serait cotée en bourse, et non sa filiale opérationnelle, qui est le véritable transporteur aérien. Il en a conclu qu'il convenait donc de prévoir que le dispositif adopté par le Parlement il y a un peu plus d'un an s'applique non seulement aux sociétés de transport aérien cotées, comme c'était déjà le cas, mais aussi aux sociétés qui auront pour objet de contrôler le capital de sociétés de transport aérien. Il a indiqué que cinq des six articles du projet de loi avaient pour objet cette adaptation du dispositif de 2003 à la nouvelle structure en holding du groupe Air France-KLM.
Il a ensuite abordé l'article 3 bis du projet de loi, introduit par les députés lors de leur examen du texte au mois d'avril. Il a précisé que cet article concernait l'âge de cessation d'activité des personnels navigants commerciaux (PNC). Il a souligné qu'il s'agissait de maintenir inchangée la situation actuelle, les PNC cessant aujourd'hui leur activité en vol à 55 ans, en vertu du statut d'Air France. Il a fait valoir que cela se justifiait au regard des tâches de sécurité exigeant éventuellement d'importants efforts physiques de la part de ces personnels. Le retour d'Air France dans le droit commun du travail aurait interdit toute possibilité pour l'employeur de prendre l'initiative d'une mise à la retraite après avoir constaté la cessation d'activité. Les PNC y auraient alors perdu d'importants avantages sociaux. Il a estimé que l'ajout de l'Assemblée nationale, dont il a salué la pertinence, s'inscrivait dans l'effort continu du Gouvernement et du Parlement pour garantir la situation individuelle des personnels de la compagnie. Il a précisé que les syndicats de personnels qu'il avait auditionnés s'étaient déclarés très favorables à cette mesure.
Il s'est félicité, enfin, du renforcement de la position d'Air France sur le marché européen, sur le plan mondial et au sein de l'alliance SkyTeam, qui bénéficiait elle-même beaucoup de l'opération.
M. Daniel Raoul ayant souhaité savoir sur qui reposerait le financement du dispositif de cessation d'activité prévu par l'article 3 bis, M. Jean-François Le Grand, rapporteur, lui a répondu que celui-ci incomberait à la filiale opérationnelle Air France.
M. Daniel Reiner a regretté que le projet de loi ne soit, en quelque sorte, que la validation d'une situation déjà acquise, dans la mesure où Air France détenait la majorité du capital de KLM depuis le mois de mai 2004. Il a souhaité savoir quelles conséquences cette opération aurait sur l'aménagement du territoire et sur la desserte aérienne de l'outre-mer. Il s'est également interrogé sur le rôle exact de la holding et sur la représentation des salariés en son sein. M. Jean-François Le Grand, rapporteur, a rappelé, tout d'abord, que le législateur avait été à l'origine du processus de privatisation en votant la loi du 19 juillet 1993 et celle du 9 avril 2003. Il a souligné l'apport de cette opération pour Air France, dont les perspectives de développement étaient fortement accrues.
Concernant les lignes d'aménagement du territoire, il a rappelé que la fusion d'Air France et de KLM ne changeait rien à la situation actuelle, ces dessertes devant, en tout état de cause, faire l'objet d'appels d'offres ouverts. Il a également fait valoir qu'il était de l'intérêt même d'Air France, du fait de sa stratégie de hub, de desservir de nombreuses destinations radiales de court et moyen courriers. Quant à la desserte de l'outre-mer, il a indiqué que les crédits relatifs au soutien de ces lignes seraient, l'an prochain, intégrés au budget général de l'Etat, comme l'avait demandé le Sénat à l'occasion de l'examen du précédent projet de loi de finances, ce qui permettrait de les identifier plus clairement et de mesurer concrètement l'effort de la Nation dans ce domaine.
En réponse à la seconde partie de l'interrogation de M. Daniel Reiner, il a précisé que la holding aurait uniquement pour fonction le pilotage stratégique et financier, qu'elle ne compterait que quelques dizaines de personnes et n'aurait pas vocation à gérer le personnel. Cela expliquait que la représentation du personnel se fasse au niveau des filiales opérationnelles.
Mme Odette Terrade a déploré, au nom du groupe communiste républicain et citoyen, la privatisation d'Air France qui résultait de la fusion avec KLM. Elle a également fait part de sa vigilance quant à la situation de la Caisse de retraite des personnels navigants (CRPN).
M. Daniel Raoul ayant souhaité connaître la raison de la différence entre le délai de deux ans laissé pour la négociation d'un accord collectif et celui de trois ans prévu pour l'évolution de la structure du groupe, M. Jean-François Le Grand, rapporteur, lui a précisé qu'il n'y avait pas de lien entre ces deux éléments : d'un côté, la loi du 9 avril 2003 avait prévu un délai de négociation de deux ans pour permettre l'aboutissement d'un accord collectif, de l'autre, la structure transitoire prévue pour trois ans pour l'organisation du groupe Air France-KLM se justifiait par la nécessité de préserver pendant cette période les droits de trafic de KLM, en attendant une modification de la clause de nationalité au niveau européen.
Il a indiqué, en conclusion, qu'il proposait l'adoption conforme du projet de loi.
La commission a ensuite adopté le rapport qui lui était soumis, les groupes socialiste et communiste républicain et citoyen s'abstenant.
Organismes internationaux - XIe CNUCED - Brésil du 10 au 16 juin 2004
La commission a ensuite examiné le rapport d'information de la délégation s'étant rendue au Brésil du 10 au 16 juin 2004 pour participer à la XIe Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement (CNUCED) et à la réunion interparlementaire organisée à cette occasion.
Rappelant que quatre membres de la commission des affaires économiques, Mme Odette Terrade, MM. Christian Gaudin, Daniel Raoul et lui-même s'étaient rendus à São Paulo, au Brésil, du 10 au 16 juin dernier, M. Jean Bizet, rapporteur, a expliqué que cette mission répondait à l'invitation qu'avait adressée au Sénat français l'Union interparlementaire, qui avait souhaité réunir à São Paulo, les 11 et 12 juin, l'ensemble des parlements, à l'occasion de la onzième CNUCED, qui se tenait dans la même ville du 13 au 18 juin.
Il a jugé qu'il était important de répondre positivement à cette invitation pour trois raisons : marquer par la participation du Sénat la place qu'il souhaitait donner aux représentants de la Nation dans la mondialisation ; percevoir l'état d'esprit des Etats participant à cette CNUCED, réunissant les pays du Sud à un moment-clef des négociations OMC, actuellement dans l'impasse ; prendre des contacts avec le Brésil, fer de lance des pourparlers actuels entre l'Union européenne et le Mercosur.
Il a annoncé qu'il aborderait d'abord les enseignements retirés de cette participation à la CNUCED et à la réunion parlementaire organisée à cette occasion, et qu'il présenterait ensuite les données recueillies sur le pays hôte, le Brésil, pilier du Mercosur, et son appréciation des négociations en cours entre l'Union européenne et le Mercosur.
Il a rappelé que la CNUCED était un organe subsidiaire de l'Assemblée générale des Nations unies, créé en 1964 et rassemblant 192 Etats, et qu'elle était le seul organe de l'ONU compétent en matière de commerce et de développement. Il a expliqué qu'à ce titre, la CNUCED jouait un rôle complémentaire à celui de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) sur trois plans, celui de l'analyse, celui du dialogue et celui de la mise en oeuvre : l'analyse, apportée essentiellement par le biais de trois rapports annuels de référence de la CNUCED sur le commerce et le développement, sur les pays les moins avancés, et sur l'investissement dans le monde ; le dialogue, la CNUCED faisant office de forum Nord/Sud permettant des échanges constructifs ; la mise en oeuvre, grâce à la coopération technique apportée par la CNUCED aux pays en développement pour les accompagner dans la mise en oeuvre des politiques et des accords commerciaux.
Il a précisé que deux semaines auparavant, la CNUCED célébrait son quarantième anniversaire en même temps qu'elle tenait sa onzième conférence quadriennale à São Paulo, agglomération de 18 millions d'habitants qui fêtait, quant à elle, son 450e anniversaire. Il a estimé que cette onzième CNUCED était d'une importance stratégique particulière en ce que, succédant à la dixième, tenue à Bangkok en 2000, qui s'était fixée comme priorité d'améliorer l'intégration effective de tous les pays dans le système commercial international, la réunion de la CNUCED à São Paulo devait contribuer à restaurer la confiance entre pays développés et pays en développement, neuf mois après l'échec de la conférence ministérielle de l'OMC tenue à Cancùn en septembre 2003.
M. Jean Bizet, rapporteur, a considéré que la réunion interparlementaire, à laquelle avaient assisté les membres de la mission, leur avait permis de constater la mobilisation des parlements des pays en développement sur les questions de commerce et de développement, alors que manquaient à l'appel des représentants de nombreux pays industrialisés, dont les Etats-Unis, grands absents. Il a fait observer que la présence française était bienvenue, notamment vis-à-vis de la communauté francophone, et relevé que seuls quelques rares pays du Nord étaient aussi représentés : le Canada, l'Islande et la Suisse, hormis six autres membres de l'Union européenne -l'Allemagne, la Belgique, la Lettonie, la Pologne, le Portugal et le Royaume-Uni-.
Il a jugé que la réunion parlementaire avait laissé entendre que les pays en développement, représentés par leurs parlementaires, cherchaient sans doute d'abord dans la CNUCED le moyen d'obtenir des marges de manoeuvre pour la mise en oeuvre de leurs politiques économiques. En apportant la preuve que l'ouverture commerciale n'enclenchait pas mécaniquement le développement, il a estimé que les pays en développement avaient exprimé le souhait de trouver un « espace politique » national -concept de « policy space »- pour s'affranchir des contraintes imposées par les grandes institutions économiques internationales.
Convenant de la nécessité de compenser les imperfections des politiques de développement économique et déplorant que les conséquences de ces politiques n'aient pas toujours été celles attendues, il a notamment fait observer que les Nations unies recensaient aujourd'hui en Amérique latine 20 millions de pauvres de plus qu'en 1997, comme l'avait souligné, lors de la réunion parlementaire, le secrétaire général de la CNUCED, M. Rubens Ricupero.
Jugeant de ce fait légitime la revendication d'une plus grande cohérence entre les politiques de développement à l'intérieur et les engagements internationaux pris à l'extérieur, il a estimé que cette revendication rejoignait d'ailleurs le souhait exprimé par les parlements représentés à São Paulo d'être plus proches des gouvernements et des institutions internationales au sein desquelles les exécutifs prenaient des engagements, certains élus présents ayant même imaginé une saisine systématique du Parlement pour procéder à une étude d'impact social et économique avant chaque accord commercial. Il a estimé que ce souhait traduisait le besoin, communément répandu sur la planète, de débats de proximité sur les orientations internationales retenues par les gouvernements.
Il a toutefois précisé que le risque d'une référence trop explicite à la notion de « policy space » était de donner par ce biais un blanc-seing aux pays en développement pour ne pas appliquer les accords négociés à l'OMC, auxquels le groupe de travail qu'il avait l'honneur de présider portait une grande attention au sein de la commission. Il a notamment souligné que la création de l'OMC avait rendu multilatéraux, c'est-à-dire applicables à tous, différents standards (accords SPS relatifs aux normes sanitaires, accords TBT relatifs aux obstacles techniques au commerce, accords ADPIC sur les droits de propriété intellectuelle) et que, depuis, de nombreux pays en développement critiquaient l'harmonisation de ces standards et le coût de leur mise en oeuvre, assurée par le mécanisme de règlement des différends, et réclamaient d'ajuster ces standards à leur situation particulière.
M. Jean Bizet, rapporteur, a déclaré que la CNUCED n'avait pas institutionnalisé la notion de « policy space » jusqu'à affranchir les PED des engagements pris à l'OMC, mais que ces pays avaient clairement réclamé de reprendre en main leur destin. Réceptifs à cette revendication, les membres de la mission, a-t-il indiqué, ont proposé un amendement au projet de déclaration, amendement que tous les parlementaires ont retenu par consensus en adoptant la phrase suivante : « les pays en développement doivent, dans leur propre intérêt, accepter une plus grande responsabilité, notamment en adoptant des politiques publiques appropriées, pour ne pas être les victimes de la mondialisation et être les acteurs de leur croissance et de leur développement ». Il a aussi reconnu que d'autres amendements proposés par la délégation française, avec le soutien de la délégation marocaine, n'avaient pas été acceptés. Il a présenté les suggestions qu'il avait faites à ce titre au nom de la délégation française :
- affirmer la nécessité de poursuivre l'ouverture des services -sauf de santé, d'éducation et de culture-, les services n'étant nulle part évoqués dans le texte ;
- allonger la durée de mise en oeuvre des règles d'accès au marché en recourant au traitement spécial et différencié, qui paraissait répondre en partie aux difficultés que rencontrent les pays du Sud pour la mise en oeuvre des accords OMC ;
- mieux protéger l'identité et la typicité des productions agricoles au travers des indications géographiques, qui valorisent l'origine des produits, au bénéfice de tous les pays producteurs, du Nord comme du Sud.
A ce sujet, M. Jean Bizet, rapporteur, a rappelé qu'il avait été chargé par le Premier ministre d'une mission sur les indications géographiques, et qu'il avait constaté avec une grande déception, et même une incompréhension, le peu d'écho que cette notion rencontrait parmi les pays en développement, qui semblaient refuser de considérer le gain que permettrait d'espérer une différenciation des produits. Il a estimé qu'il s'agissait pourtant d'une piste qui contribuerait à empêcher que mondialisation rime avec uniformisation.
Evoquant la participation des membres de la mission à la CNUCED proprement dite, conférence strictement intergouvernementale, il a indiqué qu'elle n'avait évidemment pas pu être aussi active. Il a rapporté que la revendication des élus des pays du Sud, entre nostalgie et combat, avait été relayée par les chefs d'Etat et de gouvernement et que chacun avait fait part des attentes qu'avait créées le lancement du nouveau round de négociations OMC, qui avait, pour la première fois, déclaré prioritaire l'intérêt des pays en développement en s'intitulant « cycle du développement », mais qui était dans l'impasse depuis Cancùn. Or, citant la Banque mondiale, il a souligné que celle-ci estimait que la mise en oeuvre de l'accord de Doha diminuerait de 250 millions le nombre de pauvres dans le monde et accroîtrait de 5 milliards de dollars le PIB mondial.
M. Jean Bizet, rapporteur, a noté que, tout en appelant à la conclusion du cycle de Doha, les pays du G77, qui compte en fait 132 pays dont la Chine, s'étaient montrés solidaires, sous l'impulsion du Brésil, pays hôte de l'événement mais aussi pays d'origine du secrétaire général de la CNUCED, M. Ricupero, et terre d'élection du président Lula, qui avait annoncé une « nouvelle géographie du commerce mondial ». Il a indiqué que, déçus par le multilatéralisme, ayant le sentiment que les pays du Nord reprenaient d'une main (par des subventions aux exportations) ce qu'ils donnaient de l'autre (par une franchise de droits de douane pour les produits des pays les moins avancés), les pays du Sud s'étaient engagés à São Paulo dans une relance des échanges entre eux.
A cet égard, il a remarqué que, d'ores et déjà, le commerce Sud/Sud avait progressé à un rythme deux fois plus rapide que le commerce mondial pendant les années 1990 et que les échanges entre pays en développement représentaient près de 40 % de l'ensemble de leurs échanges extérieurs. Il a jugé que ce mouvement devrait s'accélérer, les pays du Sud ayant décidé à São Paulo d'ouvrir un nouveau cycle de négociations avant novembre prochain, censé se conclure deux ans plus tard et visant à réactiver entre pays en développement le système global de préférences commerciales, créé en 1988 et autorisant des concessions commerciales susceptibles d'être refusées aux pays industrialisés. Il a estimé que ceci renforcerait les gains commerciaux et les liens économiques des pays du Sud, d'autant que 70 % des tarifs supportés par les PED à l'export étaient appliqués par d'autres pays en développement. Il a cité M. Kofi Annan, secrétaire général de l'ONU, selon lequel un développement de la coopération Sud/Sud amenant à diviser par deux les droits de douane entre pays du Sud augmenterait de 15,5 milliards de dollars la valeur des échanges commerciaux.
Parallèlement, il a rappelé que les négociations se poursuivaient à l'OMC, de manière complémentaire plutôt qu'alternative. Il a considéré que, si l'OMC avait besoin du succès de la CNUCED pour créer la confiance dans un système international cohérent, il n'était pas sûr que le succès de la CNUCED suffise à assurer celui du cycle engagé à l'OMC. Il a précisé que des contacts informels avaient eu lieu à São Paulo entre Pascal Lamy et ses homologues américain et brésilien, notamment, le Brésil jouant un rôle essentiel au sein du G20, et que l'objectif affiché était d'aboutir à un accord sur le volet agricole du cycle de l'OMC avant la fin du mois de juillet prochain, dans la mesure où la campagne présidentielle américaine risquait de geler toute avancée par la suite. Il a également évoqué l'initiative prise par les commissaires européens Fischler et Lamy, en mai dernier, qui avait fait une fois de plus la preuve de la flexibilité de l'Union européenne, laquelle, pourtant, avait déjà réformé deux fois la PAC récemment. Il a expliqué que les commissaires s'étaient alors dits prêts à faire des concessions sur les subventions aux exportations, à deux conditions :
- que soit respecté un « strict parallélisme » dans les subventions aux exportations, donc qu'y soient inclus toutes les formes de ces subventions (les crédits publics aux exportations, l'aide alimentaire américaine, les entreprises commerciales d'Etat ayant le monopole des échanges agricoles dans plusieurs pays du groupe de Cairns...) ;
- que des progrès soient faits par nos partenaires pour faciliter l'accès au marché et diminuer le soutien interne à l'agriculture.
Relevant que M. Supatchai Panitchpadki, directeur général de l'OMC, avait, lors de son intervention à São Paulo, qualifié « d'historique » cette offre de l'Union européenne, il a souligné qu'il y a quelques années, une simple réduction des subventions européennes aux exportations était difficile à envisager et que la proposition de les éliminer était une révolution, qu'il s'agisse ou non d'une erreur tactique. Or, a-t-il déploré, aucun signe de flexibilité chez nos partenaires n'est apparu ouvertement, même si le commissaire Lamy a déclaré que le huis clos de São Paulo permettait de considérer comme acquis le parallélisme à l'égard des subventions à l'exportation. Il a jugé nécessaire de confirmer cela avec lui le 6 juillet, lors de son passage au Sénat, et de lui rappeler que l'objectif d'un accord équilibré primait sur l'objectif de calendrier.
M. Jean Bizet, rapporteur, a ensuite évoqué rapidement le pays qui avait reçu la mission, à savoir le Brésil, pilier du Mercosur et fer de lance des négociations avec l'Union européenne.
Il a qualifié le Brésil de « grand pays émergent », se situant, selon l'évolution du taux de change, entre le 10e et le 15e rang du classement mondial des économies selon le PIB. Notant qu'à l'OMC, il continuait à jouer la carte des pays en développement, il a relevé aussi que le Brésil revendiquait un siège au Conseil de sécurité de l'ONU et s'affirmait en même temps sur la scène mondiale comme un acteur économique de premier plan : premier ou second producteur ou exportateur mondial pour de nombreux produits agricoles -sucre, café, soja, viande de boeuf, poulet, jus d'orange-, mais aussi grande nation industrielle -4e puissance aéronautique mondiale, 5e sidérurgiste, en pleine expansion dans les secteurs de la téléphonie et de l'informatique, bientôt autosuffisant en pétrole, puissance spatiale, aspirant en outre à développer les technologies nucléaires-... Sans s'attarder, il a également attiré l'attention de ses collègues sur le grand succès des biocarburants au Brésil, qui mobilisent déjà la moitié de son industrie sucrière. A l'heure du développement durable, il a jugé que l'avantage environnemental de l'alcool carburant offrait des perspectives très prometteuses à l'industrie du sucre au Brésil, la plus compétitive du monde et capable d'augmenter de 40 % les surfaces de culture de la canne à sucre.
M. Jean Bizet, rapporteur, a indiqué que le président Lula était parvenu en 2003 à reconquérir la confiance des marchés en améliorant la situation financière du Brésil, qui restait entachée par une dette publique égale à 57 % du PIB et des taux d'intérêt élevés, et que le défi pour 2004 était de poursuivre la maîtrise de l'inflation mais d'enclencher aussi le cercle vertueux d'une croissance pérenne et plus juste socialement, pour remplir l'objectif « Faim zéro».
Notant que le marché brésilien était aujourd'hui une terre d'accueil pour les investissements étrangers, notamment français, bien plus qu'un simple débouché pour l'exportation, il a toutefois fait observer que le gouvernement brésilien voulait développer les échanges extérieurs pour asseoir une croissance économique durable.
Or, il a remarqué que, de l'accord de tous les instituts d'études internationales rencontrés là-bas, l'âme du Brésil était beaucoup plus proche de la France que ne l'étaient sans doute l'Inde, la Chine, voire la Russie. Il a considéré que l'intérêt de notre pays, qui était aussi le souhait du Brésil, était que ce pays ne tombe pas dans les filets américains de la Zone de libre-échange des Amériques (ZLEA). Il a d'ailleurs relevé que ce point était celui sur lequel avaient insisté les milieux d'affaire français rencontrés à São Paulo autour d'un petit-déjeuner organisé par M. Renaud Muselier, secrétaire d'Etat aux affaires étrangères. C'est pourquoi il a conclu qu'il était extrêmement important de parvenir à conclure l'accord d'association entre l'Union européenne et le Mercosur, dont la négociation a démarré il y a cinq ans et qui comprend trois volets : politique, coopération et commerce, et économie.
Il a présenté le Brésil comme le pilier du Mercosur, l'Argentine, le Paraguay et l'Uruguay, les trois autres membres de cette zone de libre-échange ne représentant qu'un quart du PIB global du Mercosur. Précisant que, d'ores et déjà, l'Union européenne était le premier partenaire commercial du Mercosur et représentait 25% de l'ensemble des échanges du groupe régional, il a notamment observé qu'elle absorbait environ la moitié de toutes les exportations agricoles du Mercosur. Il a indiqué que des divergences fortes persistaient aujourd'hui, malgré les rencontres de Guadalajara en mai et de Buenos Aires en juin : demandes du Mercosur pour un accès plus large de ses produits agricoles au marché européen, contre demandes européennes portant sur les biens industriels, les services et les marchés publics.
Il a estimé que ce sujet exigeait lui aussi d'appeler à la vigilance le commissaire Lamy, qui avait également tenté à São Paulo de débloquer les négociations avec les pays du Mercosur. Il a exprimé sa crainte qu'au prix d'efforts modestes, le Mercosur s'appuie sur la volonté affirmée de la Commission de conclure d'ici octobre pour arracher un accord dans lequel nos concessions agricoles trouveraient peu de contreparties.
Concluant sur l'excellent moment de convivialité qu'avait constitué ce déplacement au Brésil, auquel des représentants de quatre groupes politiques avaient pu participer, il a informé ses collègues du fait que 2005 serait l'année du Brésil en France.
M. François Gerbaud s'est interrogé sur le destin qu'avait connu le projet d'aérotrain dont il avait été à l'initiative en 1971 et dont il avait entendu dire qu'il avait été exporté au Brésil.
M. Daniel Raoul a insisté sur l'importance pour la France d'être présente dans ces pays de culture latine. Il s'est par ailleurs félicité du remarquable accord survenu entre la délégation française et les délégations des pays francophones sur les amendements proposés d'un commun accord, par les quatre sénateurs français, au projet de déclaration élaboré par l'Union interparlementaire. S'agissant de la notion d'indications géographiques, il a jugé que le peu d'écho qu'elle avait rencontré tenait sans doute à la mauvaise compréhension qu'en avaient les pays en développement. Il a par ailleurs relevé que ces pays, et particulièrement ceux d'Amérique du Sud, avaient fait observer qu'il n'existait pas de relation directe entre commerce, croissance et développement. Revenant sur l'idée de mener, au sein du Parlement, une étude d'impact social avant tout accord commercial, il a jugé qu'elle pourrait utilement être « réimportée sans droit de douane » en France. Enfin, il a déclaré que le Brésil avait tout d'un grand pays en raison de sa puissance économique mais qu'il se positionnait en même temps comme leader du G20 et a déploré cette ambiguïté. Il a souligné que le Président du Brésil, M. Luiz Inacio Lula da Silva, disposait d'une marge de manoeuvre très étroite, dans la mesure où le service de la dette absorbait 45 % du budget de l'Etat. Il a conclu en insistant sur la très grande envie du Brésil d'établir une relation unilatérale avec l'Union européenne et sur les conséquences, notamment en matière agricole, d'une telle relation.
Mme Odette Herviaux a considéré que le rapport présenté par M. Jean Bizet confirmait ses craintes. Consciente de la nécessité de conclure un accord avec le Mercosur, elle a demandé si cet accord n'allait pas se faire au prix de la faillite de l'agriculture française et de l'aménagement du territoire. Revenant sur la question des indications géographiques, elle a insisté sur son caractère fondamental et sur la nécessité de l'expliquer aux pays en développement.
M. Max Marest, évoquant le voyage qu'il avait fait au Brésil il y a vingt ans, a souligné les très grandes différences que le rapport de M. Jean Bizet laissait transparaître entre le Brésil d'hier et le Brésil d'aujourd'hui. Il a souhaité savoir si les membres de la mission avaient pu établir des contacts avec les industriels sur place.
M. Jean-François Le Grand, reprenant à son compte les inquiétudes exprimées par Mme Odette Herviaux, s'est interrogé sur le risque que l'avenir de notre agriculture se trouve compromis par des accords commerciaux trop généreux.
M. Christian Gaudin a fait valoir l'utilité de la participation française à la réunion organisée par l'Union interparlementaire ainsi qu'à la XIe CNUCED. Il a également évoqué les contacts que la mission avait pu avoir avec le monde économique français au Brésil. Faisant observer que le Brésil, où il s'était rendu dix ans auparavant, était un pays particulier, il a jugé important que l'Union européenne mène une politique dynamique afin d'asseoir ses contacts avec les pays latins.
Mme Odette Terrade a souligné que l'un des enseignements manifestes de cette mission était la volonté exprimée par les pays les moins avancés d'être traités à égalité avec les grands pays. Relevant que ces pays étaient toujours plus pauvres, ce qui alimentait d'ailleurs leur contestation envers le Fonds monétaire international et la Banque mondiale, elle a déclaré que la réussite de ces pays était de la responsabilité et de l'intérêt de la France.
M. Gérard César s'est interrogé sur la qualité des contrôles sanitaires auxquels étaient soumises les viandes blanches et rouges que le Brésil exportait.
En réponse à ces diverses interventions, M. Jean Bizet, rapporteur, s'est engagé à fournir à M. François Gerbaud les informations qu'il souhaitait sur le devenir de l'aéro-train au Brésil. Il est convenu avec M. Daniel Raoul que le Brésil jouait un jeu ambigu, s'autoproclamant pays en développement à l'OMC alors qu'il est exportateur net dans de nombreux domaines, ce qui avait d'ailleurs provoqué des tensions ayant contribué à l'échec des négociations à Cancùn. A la question de savoir pourquoi le Brésil tenait à établir une relation avec l'Union européenne, il a répondu en mettant en avant le caractère large et solvable du marché européen, qui compte 450 millions d'habitants, ainsi que la volonté brésilienne de tenir la dragée haute aux Etats-Unis et de ne pas s'aligner sur le modèle mexicain. Répondant à Mme Odette Herviaux et à M. Jean-François Le Grand, il a souligné que les échanges agricoles ne représentaient que 10 % des échanges mondiaux, ce qui expliquait qu'il était tentant de les utiliser comme une monnaie d'échange alors même que l'agriculture avait des implications en matière sociale, environnementale et d'aménagement du territoire.
Revenant sur la question des indications géographiques, il a précisé qu'elles concernaient aujourd'hui 20 à 22 % des produits agricoles français mais que ce taux pourrait être porté à 30 %. Il a souligné l'intérêt que représentait la production sous signe de qualité, dans la mesure où elle n'était ni « opéable », ni délocalisable. Après avoir déploré que les pays d'Europe du Nord soient hostiles aux indications géographiques, il a jugé qu'elles apportaient pourtant une solution permettant de faire rimer mondialisation avec diversité. Il a informé ses collègues des contacts industriels que la mission avait pu avoir avec les milieux d'affaires français implantés au Brésil : aucun de ces industriels ne regrettait son implantation au Brésil mais tous déploraient le manque de pérennité de la législation.
En écho à la remarque de Mme Odette Terrade, il s'est lui aussi félicité de la relance du dialogue Sud/Sud. En réponse à la préoccupation exprimée par M. Gérard César, il a confirmé l'existence de contrôles sanitaires au Brésil et a rappelé qu'en tout état de cause, une saisine de l'organe de règlement des différends de l'OMC restait possible en cas de violation des règles fixées par les accords SPS.
La commission a ensuite adopté le rapport présenté par M. Jean Bizet au nom de la délégation qui s'était rendue au Brésil du 10 au 16 juin 2004 pour participer à la XIe CNUCED et à la réunion interparlementaire organisée à cette occasion.
Agriculture - Réforme de la PAC - Audition de M. Hervé Gaymard, ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales
Puis la commission a procédé, conjointement avec la délégation du Sénat pour l'Union européenne, à l'audition de M. Hervé Gaymard, ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales, sur la mise en oeuvre de la réforme de la politique agricole commune (PAC).
Après que M. Jean-Paul Emorine, président, eut rappelé les préoccupations de la commission des affaires économiques et de la délégation pour l'Union européenne ayant conduit à l'organisation de l'audition, M. Hervé Gaymard, ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales, a salué le moment choisi par la commission et par la délégation pour faire le point sur la réforme de la PAC et sur les négociations à l'Organisation mondiale du commerce (OMC).
S'agissant de la PAC, il a souhaité retracer le chemin parcouru depuis deux ans. Il a rappelé qu'à son arrivée, en mai 2002, l'agenda agricole était particulièrement chargé : d'une part, à court terme, en raison de la revue à mi-parcours de la PAC, décidée à Berlin en 1999 dans le cadre de l'Agenda 2000 et prévue entre l'été 2002 et le début de l'année 2003, et en raison des négociations budgétaires imposées par le blocage sur le volet agricole de l'élargissement de l'Union et ayant abouti au sommet de Bruxelles d'octobre 2002 ; d'autre part, à moyen terme, en raison de la révision des perspectives financières européennes et en raison de la renégociation de la PAC qui se profilait à l'horizon 2006.
Il a fait observer que la stratégie de négociation finalement retenue avait consisté à troquer l'allongement des perspectives budgétaires jusqu'à 2013 contre une réforme anticipée de la PAC, ce qui offre désormais dix années de visibilité tant en matière budgétaire, pour le paquet agricole, qu'en matière politique, grâce à l'accord de Luxembourg en juin 2003. Il a souligné que rien de tout cela n'aurait été possible sans un accord franco-allemand. Après avoir rappelé que rien n'était encore acquis au printemps 2002, il a insisté sur l'importance de l'accord obtenu à Bruxelles le 15 octobre 2002, dont le chemin avait été tracé par l'accord entre MM. Jacques Chirac et Gerhard Schröder survenu quelques heures plus tôt.
Dressant un bilan de la réforme de la PAC, il a jugé que les intérêts vitaux de notre pays avaient été sauvegardés. Rappelant que la France ne disposait pas d'un droit de veto à Bruxelles en matière agricole, les décisions se prenant à la majorité qualifiée, il a reconnu qu'une part importante de son travail avait été d'éviter que la France ne soit isolée et qu'elle soit en mesure de peser sur cette négociation. Il s'est félicité que les lignes rouges que s'était fixé notre pays n'aient pas été franchies dans le cadre de l'accord de Luxembourg signé il y a un an :
- obtention de la consolidation budgétaire, le découplage des aides n'ayant par ailleurs été que partiel ;
- prolongation des quotas laitiers jusqu'en 2015, alors même que leur disparition était probable en 2008 du fait de l'accord de Berlin ;
- absence de baisse de prix supplémentaire, hormis pour les prix d'intervention sur le beurre, baisse ayant d'ailleurs été compensée à 82 % ;
- obtention d'un « crédit-carbone » supplémentaire, s'accompagnant du maintien de la jachère énergétique, que la Commission européenne voulait supprimer ;
- premiers jalons pour un mécanisme de gestion de crise, posés dans une des annexes de l'accord de Luxembourg, qui enjoint la Commission européenne de faire, avant fin 2004, des propositions pour mettre en place un tel mécanisme, particulièrement nécessaire pour les secteurs ne bénéficiant pas d'aides directes tels que le porc, la volaille et les fruits et légumes.
M. Hervé Gaymard, ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales, a estimé qu'en outre, le travail accompli depuis un an avait permis de donner des réponses sur un certain nombre de sujets.
Le premier est relatif aux distorsions possibles de concurrence résultant de l'option dont disposent les Etats membres quant à la distribution des aides découplées, un pays comme l'Allemagne ayant par exemple choisi la régionalisation du dispositif au niveau des Länder, par le calcul d'une prime unique à l'hectare (« Kombi-Modell »). Le ministre a indiqué que la question était favorablement réglée en ce qui concerne le veau, puisque la solution retenue sera la même chez tous les pays producteurs, ainsi qu'en matière de fruits et légumes, puisque des plafonds de production ont été imposés aux pays choisissant la régionalisation et que la Commission européenne exercera une vigilance soutenue pour prévenir les éventuelles distorsions de concurrence dans les filières.
Le deuxième grand sujet vise à éviter que le nouveau système d'aides pénalise l'installation des jeunes agriculteurs et favorise la spéculation. Après avoir indiqué que la France avait obtenu la sécurisation juridique des transactions jusqu'au 15 mai 2004, M. Hervé Gaymard a présenté les mécanismes prévus dans le cadre du régime de croisière :
- s'agissant des échanges de droits sans terre, un taux de prélèvement de 50 % a été institué pour décourager les mouvements spéculatifs, une observation sur plusieurs années devant permettre de vérifier la pertinence de ce taux au regard de l'objectif poursuivi ;
- en ce qui concerne les échanges de droits avec terre, la fixation d'un montant moyen de prélèvement de 3 % s'accompagnera d'une exception à 0 % pour l'installation des jeunes et d'une autre à 10 % pour décourager les agrandissements excessifs et les effets d'aubaine.
Le ministre a ajouté que le seuil de déclenchement du taux de 10 % sera fixé dans chaque département, après avis de la CDOA, que le produit des prélèvements sera affecté à la réserve nationale destinée au soutien à l'installation des jeunes agriculteurs et que le système, dont la complexité indéniable est la contrepartie de la meilleure prise en compte possible des intérêts de chacun, serait opérationnel à compter de 2006, l'année 2005 étant consacrée à une simulation destinée à anticiper les éventuelles difficultés de gestion.
Quant au troisième sujet, relatif aux mesures de bonnes pratiques agricoles et environnementales, M. Hervé Gaymard a indiqué que la reprise des dispositions d'éco-conditionnalité figurant dans 19 directives européennes serait définitivement arrêtée à la fin du mois de juillet, soulignant en particulier les difficultés posées par la question des bandes enherbées (de 3 %) dans la jachère (de 10 %) et par le statut des prairies permanentes, la Commission européenne refusant jusqu'ici d'envisager la réversibilité du dispositif à laquelle tient la France.
En conclusion de son intervention sur la PAC, le ministre a relevé que de nombreux sujets demeuraient en suspens et nécessitaient la poursuite des négociations :
- la gestion des situations de crise de filière, la France devant envoyer, dans les semaines à venir, un mémorandum à la Commission, laquelle devrait faire des propositions d'ici au mois de décembre prochain ;
- la réforme de l'organisation commune de marché (OCM) sucre, à partir de propositions que fera la Commission le 14 juillet pour ouvrir d'importantes négociations devant se dérouler jusqu'à la fin 2005 ;
- les améliorations à apporter aux OCM viti-vinicole et fruits et légumes ;
- la gestion de l'OCM bananes dans le cadre du passage, décidé en 2001, d'un système de quotas à un système uniquement tarifaire le 1er janvier 2006, la nécessité d'adaptations étant absolument primordiale pour l'avenir des départements de la Guadeloupe et de la Martinique.
Puis M. Hervé Gaymard, ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales, a abordé l'état des négociations agricoles dans le cadre de l'Organisation mondiale du commerce (OMC), ainsi que l'accord en cours de formalisation avec le Mercosur.
Après avoir brièvement rappelé l'historique des discussions commerciales de Seattle (1999) à Cancùn (2003) et souligné que l'échec de la dernière Conférence ministérielle tenait à d'autres motifs que les problèmes agricoles, il a recensé les trois sujets agricoles placés au coeur des négociations :
- la question des tarifs, le ministre observant que les baisses enregistrées lors du cycle d'Uruguay limitaient les marges de manoeuvre et focalisaient désormais les oppositions sur les pics tarifaires ;
- la question des soutiens internes, M. Hervé Gaymard soulignant que la discipline budgétaire à laquelle s'était soumise l'Union européenne, au contraire de certains de ses partenaires, tels notamment les Etats-Unis, devait lui permettre de l'aborder de manière sereine, dès lors que la réforme de Luxembourg faisait passer une partie significative des aides de la « boîte bleue » (aides directes compensatoires liées à la production et accordées en contrepartie de sa maîtrise) vers la « boîte verte » ;
- la question des subventions à l'exportation, devenue la principale pierre d'achoppement. Là encore, le ministre a estimé que tant l'importante diminution de ces aides enregistrée depuis dix ans (revenues de 30 % à 5 % du budget de la PAC, soit une division par six) que le mécanisme sélectif de leur attribution devaient placer l'Union européenne dans une bonne position de négociation. Il a relevé qu'au contraire, le dispositif américain des « marketing loans » était peu clair, qu'il fonctionnait aussi bien en soutien interne qu'en soutien externe et qu'il était destructeur pour l'agriculture des pays en développement. Soulignant que le Canada et l'Australie n'étaient pas en reste avec leurs monopoles à l'exportation, il a indiqué que l'Union européenne accepterait de discuter de cette question à la condition que l'accord à venir soit équilibré, c'est-à-dire que des efforts comparables et simultanés soient engagés par les autres pays producteurs.
Observant à cet égard que l'issue du rendez-vous prévu fin juillet pour examiner les propositions que le négociateur agricole de l'OMC devrait présenter à Genève entre le 7 et le 10 juillet prochain était incertaine, d'autant que le mode de décision de l'OMC est fondé sur la nécessité de parvenir à un consensus, M. Hervé Gaymard a considéré qu'il n'existait pas de tyrannie du calendrier, un bon calendrier étant de son point de vue celui qui permettrait de parvenir à un bon accord.
Sur ce point, il a regretté la vision étroitement juridique des négociations commerciales internationales, qui, selon lui, ne prennent nullement en compte le développement agricole des pays les plus pauvres. S'il a rendu hommage à l'action de la FAO (organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture), il a en revanche souligné que l'action du Fonds monétaire international (FMI) et de la Banque mondiale, tout comme la préoccupation exclusivement commerciale de l'OMC, n'intègrent pas les spécificités de l'agriculture des pays en développement ni l'indispensable régulation des prix agricoles. Il a estimé qu'en ne se référant qu'aux principes du libre échange intégral, ces organisations faisaient le jeu d'un agro-business qui tire les prix mondiaux vers le bas, exploite la main d'oeuvre agricole et empêche une part importante de l'humanité de s'engager sur la voie du développement. Il s'est déclaré préoccupé par cette situation, regrettant vivement que les propositions du Président de la République devant les chefs d'Etat africains en 2002, reprises à leur compte par l'Union européenne n'aient pas été acceptées par le G8.
A l'issue de cet exposé, un large débat s'est engagé.
M. Hubert Haenel, président de la délégation du Sénat pour l'Union européenne, a interrogé le ministre sur les conséquences à attendre du nouveau mode de décision en matière agricole, qui confère au Parlement européen un pouvoir de co-décision en matière de législation agricole européenne, ainsi que sur la fin de la discrimination, à l'intérieur du budget européen, entre les dépenses obligatoires, qui étaient largement représentées par les dépenses agricoles, et les dépenses non obligatoires.
M. Gérard César a posé au ministre plusieurs questions : de quelles marges de manoeuvre disposait la France en matière de gestion des aides découplées, et quels étaient les niveaux envisagés ? Les simulations effectuées en 2005 pourraient-elles éventuellement permettre un réajustement des revenus des agriculteurs en 2006 ? La nouvelle présidence hollandaise allait-elle toujours accorder une priorité à la sécurité alimentaire ? Quelle serait l'influence des PECO sur la détermination de la PAC ? Les offres de l'Union européenne au Mercosur n'étaient-elles pas trop « généreuses », et la fin prochaine du mandat de l'actuelle Commission ne rendait-elle pas les négociations trop délicates ?
M. Charles Revet, après avoir souhaité obtenir quelques explications complémentaires sur le passage du système des quotas au système tarifaire s'agissant de l'OCM bananes, s'est inquiété des graves conséquences environnementales résultant de la gestion des aides aux surfaces en prairies, observant que l'intérêt de ces surfaces pour contenir l'érosion n'était pas suffisamment reconnu.
En réponse, M. Hervé Gaymard, ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales, a tout d'abord souligné le rôle éminent qu'avait joué le Parlement européen ces deux dernières années en faveur de l'agriculture et de la pêche, indiquant qu'en tant que ministre, il avait tenu à rencontrer les parlementaires européens pour leur exposer ses positions. Reconnaissant que la procédure de co-décision allait à l'évidence compliquer le système et rendre les décisions plus difficiles et longues à prendre, il a toutefois estimé que le plus grand pouvoir reconnu au Parlement européen n'allait pas nécessairement affaiblir les intérêts français au sein de l'Union. A cet égard, il a indiqué que la négociation sur l'OCM sucre allait constituer le premier véritable test, 21 des 25 Etats membres étant producteurs.
S'agissant des aides découplées, après avoir observé qu'en théorie, plusieurs options étaient envisageables entre le découplage total et des découplages partiels selon des taux différents, il a détaillé les choix retenus par la France en matière d'aides à l'élevage et d'aides aux grandes cultures. Il a ajouté que certains pays pouvaient, à l'instar de l'Allemagne, choisir un dispositif régionalisé attribuant les aides à l'hectare (« Kombi-Modell »). Il a conclu qu'en moyenne, pour la France, une part substantielle des aides du premier pilier devrait rester couplée, sachant qu'aucune des aides du deuxième pilier n'était concernée.
En ce qui concerne les simulations effectuées en 2005, le ministre a précisé qu'elles n'avaient d'autre but que d'informer les agriculteurs sur ce que serait leur situation si le nouveau système de calcul était immédiatement applicable.
Après avoir supposé que la présidence hollandaise serait vigilante en matière de sécurité alimentaire, M. Hervé Gaymard a relevé que le récent élargissement s'apparentait, en ce qui concerne le volet agricole, à celui qui avait accueilli au sein de l'Union l'Espagne, le Portugal et la Grèce, tout en observant que tous les PECO n'étaient pas logés à la même enseigne en ce qui concerne tant le poids de l'agriculture dans leur économie que la force intrinsèque de ce secteur.
Puis abordant les négociations en cours avec le Mercosur, il a fait valoir qu'elles auraient dû aboutir après la Conférence de Cancùn, l'échec de celle-ci conduisant à un télescopage des calendriers. Soulignant la nécessité d'accorder la priorité aux relations multilatérales dans le cadre de l'OMC, de préférence aux relations bilatérales, il a estimé qu'un accord ne devait pas être recherché à n'importe quel prix, prenant comme exemples d'inquiétude l'éthanol et la viande bovine.
Ensuite, ayant rappelé dans quelles conditions avait été créée l'OCM bananes et son importance pour l'économie agricole des Antilles, comme des pays africains, le ministre a mis en évidence l'importance des négociations à venir pour éviter que le système dit du « tariff only » ne conduise, à compter de 2006, à l'éviction de ces produits du marché face à la concurrence de la « banane dollar » produite en Amérique latine par des intérêts nord-américains.
S'agissant de la prairie, il a justifié l'opposition française à l'irréversibilité de la gestion des sols prônée par la Commission européenne, rappelé qu'il avait décidé l'an dernier d'augmenter de 70 % le montant de la prime herbagère agro-environnementale, et reconnu l'importance s'attachant à un examen attentif des moyens susceptibles de favoriser le maintien des prairies comme outil de lutte contre l'érosion des sols.
M. Gérard Le Cam a souhaité savoir si la hausse annuelle de 1 % de la modulation des aides dépendait d'une décision nationale ou de prescriptions européennes, à quelle date devait se tenir la prochaine Conférence des prix et quelle serait sa philosophie, dans quelles conditions pratiques devrait fonctionner le mécanisme de gestion des crises, et quels assouplissements allaient être apportés au dispositif de soutien à l'installation des jeunes agriculteurs.
Après avoir exprimé la crainte que toute concession supplémentaire aux pays du Mercosur, allant au-delà de l'accord du 26 juin, n'entraîne d'importantes difficultés sociales, M. Jean Bizet est intervenu sur la gestion laitière, s'interrogeant sur l'uniformité territoriale de la répartition entre partie fixe et partie flexible, et sur l'intérêt qu'il pourrait y avoir à focaliser cette dernière sur les régions productrices de beurre.
Ayant estimé que toutes les organisations agricoles n'étaient pas favorables aux positions de la France dans la négociation de la PAC, M. Louis Le Pensec a considéré que la complexité administrative des nouveaux dispositifs de soutien était difficilement supportable : s'interrogeant sur le devenir de la Commission de la simplification installée par le ministre, il s'est aussi inquiété de la diminution des effectifs des directions départementales de l'agriculture et de la forêt (DDAF) au regard de leurs capacités à aider les agriculteurs dans l'accomplissement de leurs formalités. Il a par ailleurs déploré les effets pervers des droits à paiement unique, dont les conséquences devraient, selon lui, avantager les propriétaires et les rentiers au détriment des jeunes agriculteurs, et favoriser le maintien des disparités régionales actuelles, où 80 % des aides bénéficient à 20 départements seulement. Il a également appelé à la rapide institution de mécanismes de gestion des crises sectorielles, s'interrogeant sur les moyens effectifs dont disposera la puissance publique pour soutenir les agriculteurs. Enfin, à propos du dossier de la banane, il a souhaité la cohésion de toutes les forces politiques nationales pour amener à l'automne la Commission et l'OMC à adopter un dispositif ne portant pas atteinte à l'existence même de l'économie des deux départements antillais.
Enfin, Mme Odette Herviaux s'est alarmée des distorsions de concurrence subies par la filière laitière biologique française, observant que la baisse du prix du lait avait été avancée par rapport à la date prévue du 1er juillet 2004 et que divers Etats membres accordaient des subventions spécifiques à leur propre filière. De même, évoquant les difficultés des entreprises exportatrices de viande incapables, du fait de la concurrence internationale, de répercuter sur leurs prix de vente les coûts supplémentaires résultant de la taxe d'abattage, elle a demandé si un dispositif particulier de soutien ne pouvait être institué à leur profit.
En réponse, M. Hervé Gaymard, ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales, a indiqué que des consultations étaient menées avec toutes les organisations professionnelles avant de décider à quelles actions serait affecté le produit de la modulation : mécanisme de gestion des crises, comme le prévoyait explicitement l'accord de Luxembourg, mise aux normes des bâtiments, mesures agro-environnementales... S'agissant de la gestion de la réserve des droits à paiement, il a souligné qu'une même démarche consultative était suivie afin d'établir, au plan national ou au niveau départemental, un dispositif aussi simple et équitable à la fois que possible. A cet égard, il a fait valoir que la complexité souvent dénoncée résultait notamment pour beaucoup de l'attention portée, à la demande même des représentants agricoles, aux intérêts des jeunes agriculteurs et à leurs conditions d'installation.
En ce qui concerne la filière laitière, le ministre a rappelé le calendrier des décisions prises, depuis le Sommet de Berlin en 1999 jusqu'à l'Accord de Luxembourg en 2003, ayant permis, conformément aux souhaits des producteurs français, de sauvegarder le régime des quotas jusqu'en 2015 et de consolider au plan juridique le dispositif de gestion propre à la France. Il a par ailleurs relevé que le niveau des prix du lait résultait d'un mécanisme interprofessionnel, ayant été remis en cause en décembre 2003 après avoir correctement fonctionné entre 1997 et 2001, dans lequel le ministère de l'agriculture n'intervenait pas. Observant qu'un nouvel accord était en cours de finalisation et qu'il devrait être effectif à la fin du mois de juillet prochain, M. Hervé Gaymard, après avoir souligné qu'il ne souhaitait pas que la prime compensatoire bénéficie à d'autres acteurs que les producteurs, a considéré que l'économie laitière allait nécessairement évoluer du fait même de l'innovation constituée par la prime laitière, la filière étant désormais comparable sur ce point à la filière céréalière ou à la filière « viande rouge ». S'estimant incapable de préjuger des effets positifs ou négatifs de cette évolution, il a indiqué qu'une table ronde laitière serait organisée au ministère au mois de juillet afin d'évoquer cette question avec tous les professionnels concernés.
Puis ayant observé que la question des parts fixes et flexibles était lourde d'enjeux organisationnels et politiques, le ministre a abordé la situation de la filière biologique. Constatant que divers Etats membres accordaient effectivement, en sus des aides à l'investissement, des soutiens au maintien, ce que le PDRN français ne prévoit pas et ce que l'état des moyens budgétaires n'autoriserait au demeurant pas dans les conditions actuelles, il a estimé qu'il serait logique qu'une telle aide soit décidée au niveau communautaire. A défaut, il a indiqué qu'un réexamen du PDRN pourrait être envisagé.
Par ailleurs, après avoir remarqué qu'aucune organisation n'envisageait de sacrifier sur l'autel de la simplification les divers dispositifs de gestion et de soutien actuellement applicables, M. Hervé Gaymard a exprimé son souci constant de ne pas complexifier les situations, dont témoignait notamment le fonctionnement permanent du Comité de simplification, régulièrement saisi en amont de la production normative. Puis ayant souligné que la plupart des aides faisaient désormais l'objet de formulaires pré-remplis, il a observé que les fonctionnaires des DDAF étaient mobilisés pour aider les agriculteurs dans leurs démarches et obligations administratives.
S'agissant du découplage des aides, le ministre a réitéré son opposition au découplage total, rappelant que le principal soutien du commissaire Fischler au sein du collège des commissaires était M. Pascal Lamy, commissaire européen chargé du commerce, et qu'une simulation réalisée par l'INRA avait démontré que sa mise en oeuvre conduirait à la désertification d'une partie du territoire français.
Enfin, en ce qui concerne les disparités régionales, M. Hervé Gaymard a rappelé que la PAC a été construite au regard des filières et non des régions, et qu'après consultation des organisations agricoles, il ne lui avait pas paru pertinent de s'orienter, comme l'a fait l'Allemagne, vers à une répartition des aides réalisée en fonction des surfaces.
M. Jean-Paul Emorine, président, a conclu la réunion en soulignant l'importance des enjeux économiques de la réforme engagée.
Mercredi 30 juin 2004
- Présidence de M. Bernard Piras, vice-président puis de M. Gérard César, vice-président.
Mission d'information à l'étranger - Roumanie-Bulgarie (avril 2004) - Examen du rapport d'information
La commission a tout d'abord examiné le rapport d'information de la mission s'étant rendue en Roumanie et en Bulgarie en avril 2004. Après avoir précisé qu'il ne différait pas substantiellement des grandes lignes présentées à la commission au retour de la délégation, M. Gérard César, président de la mission, a d'abord dressé un constat général faisant apparaître les importantes avancées réalisées par ces pays en matière politico-économique.
Se félicitant à ce titre de leur stabilisation politique, il a indiqué que celle-ci apparaissait à trois niveaux :
- à l'échelle internationale, avec l'adhésion quasi-simultanée à l'OTAN et la volonté récemment réaffirmée de jouer un rôle stabilisateur dans la région, en servant d'interface entre l'Occident et l'Orient ;
- à l'échelle européenne, à travers le processus d'adhésion à l'Union, confirmé récemment, qui devrait se conclure par leur intégration au 1er janvier 2007 ;
- à l'échelle nationale, enfin, ces pays ayant adopté une nouvelle constitution au début des années 90, rénové leurs institutions, stabilisé le jeu des forces démocratiques et accompli de très importants progrès vers la constitution de véritables Etats de droit.
Au point de vue économique, il a indiqué que les indicateurs généraux faisaient ressortir une évolution positive en termes de croissance, confortée par la mise en place de structures propres à une économie de marché et facilitée par la valorisation de nombreux avantages comparatifs.
Estimant que ces indéniables avancées étaient sources d'un optimisme objectif et fondé, il a néanmoins souligné que la Roumanie et la Bulgarie devraient encore accomplir des progrès majeurs en vue de leur adhésion. Sur le plan politique et social, il a ainsi jugé que d'importants efforts devraient être réalisés en vue de réformer l'administration et de réduire les pratiques de corruption continuant d'exister en son sein, que le dispositif existant en matière de coopération policière et douanière devrait être largement renforcé afin d'éviter que les problèmes que connaissent ces pays dans la gestion de leurs minorités ne s'étendent en s'amplifiant sur le territoire des actuels pays membres et que des mesures impérieuses devraient également être prises pour endiguer l'accroissement des problèmes sanitaires et sociaux, et gérer le vieillissement et la diminution de la population.
Sur le plan économique, il a considéré comme indispensable la restructuration, dans le respect des principes actuels en matière de développement durable, des secteurs de l'agriculture, de l'énergie et de l'industrie, ajoutant que s'ils avaient autrefois fait la force de ces pays, ils souffraient aujourd'hui de la vétusté de leurs infrastructures et de la concurrence des pays émergents.
Abordant ensuite le problème des délocalisations, qu'il a jugé particulièrement préoccupant pour un pays comme la France, il en a détaillé trois modèles distincts :
- les délocalisations négatives ou opportunistes, qui consistent à implanter un site de production dans l'un de ces pays pour y profiter de la faiblesse des salaires et de la souplesse des réglementations sociale, sanitaire ou environnementale : il a souligné que cette façon de contourner la législation française était d'autant plus condamnable qu'elle s'accompagnait de la destruction d'emplois sur notre territoire, et demain sur les territoires roumains et bulgares au profit de pays plus à l'Est ou au Sud ;
- les délocalisations guidées par le principe du « moindre mal », où le transfert des activités dans des pays où les coûts de production sont moindres constitue la seule alternative à la fermeture d'une usine : il a indiqué que les « dommages » étaient dans ce cas limités dans la mesure où demeuraient généralement sur le territoire français les tâches de conception et de direction, seules étant délocalisées les activités d'exécution pures ;
- les délocalisations obéissant à une stratégie de conquête de nouveaux marchés : qualifiant ces délocalisations d'« offensives », il a expliqué qu'elles consistaient à implanter - ou racheter - de nouveaux sites de production à l'étranger sans pour autant fermer ceux situés sur le territoire national dans le but de satisfaire une nouvelle demande. Il a estimé qu'il s'agissait d'un jeu « gagnant-gagnant » pour les pays de base et d'accueil, en permettant aux premiers de laisser leurs entreprises s'internationaliser en trouvant des relais de croissance, et en offrant aux seconds l'opportunité de créer des emplois bénéficiant d'ailleurs de conditions de travail et de rémunération privilégiées.
Reconnaissant que certains types de délocalisations pouvaient s'avérer positifs, il a néanmoins insisté sur les menaces qu'elles induisaient pour notre pays et invité à une réflexion plus approfondie sur le sujet, en se référant notamment au rapport d'information élaboré par la commission sur la « délocalisation des industries de main-d'oeuvre ».
Considérant toutefois qu'il était du devoir et de l'intérêt de la France de soutenir une double adhésion simultanée de la Roumanie et de la Bulgarie à l'horizon 2007, il a rappelé que notre pays s'était déjà clairement engagé en ce sens à plusieurs reprises par la voix des membres du Gouvernement et du Président de la République. Il a insisté pour que soit réaffirmée cette position dans la période nous séparant de la date d'adhésion, en évoquant successivement deux éléments plaidant en ce sens :
- en premier lieu, le caractère politiquement viable et économiquement réaliste de l'objectif d'adhésion. Reconnaissant que la Roumanie et la Bulgarie se situaient à des niveaux différents dans l'avancement de leurs négociations d'adhésion, puisque six chapitres restaient encore à conclure pour la première tandis qu'ils étaient tous fermés pour la seconde, il a souligné que la très grande majorité des observateurs communautaires et nationaux s'accordait à faire preuve d'un réel optimisme quant à la capacité de ces pays à être prêts pour le rendez-vous de 2007. A cet égard, il a indiqué que le dernier Conseil européen en date, qui s'est tenu à Bruxelles à la mi-juin, avait confirmé le bon avancement des travaux et la forte probabilité de voir le calendrier d'adhésion respecté ;
- en second lieu, les excellentes opportunités existant en Roumanie et en Bulgarie pour les investisseurs français, qui peuvent en effet y profiter d'une situation géographique privilégiée, d'une grande proximité culturelle, d'une main-d'oeuvre qualifiée et compétitive, et de marchés intérieurs et régionaux conséquents.
Il a insisté ensuite sur le fait que le soutien français à l'adhésion de la Roumanie et de la Bulgarie devrait s'accompagner d'un renforcement de la présence française dans ces pays, tant celle-ci y est inégale, et le plus souvent insuffisante. Afin d'illustrer son propos, il a observé que malgré sa prééminence en termes d'investissement en Roumanie, la France y restait loin de l'Italie, de l'Allemagne et de la Russie en termes de parts de marché. Quant à la Bulgarie, il a indiqué que la France n'y était que le treizième investisseur et le sixième partenaire commercial.
Jugeant que cet accroissement de la présence française dans ces pays était indispensable pour répondre aux demandes tant françaises que roumaines et bulgares, il a énuméré un certain nombre de moyens par lesquels il pourrait s'opérer : coopération administrative, transfert de technologies, organisation d'événements médiatiques, mobilisation des institutions spécialisées, recours accru à la francophonie ...
Il a estimé pour finir que notre pays s'honorerait et servirait ses propres intérêts en soutenant l'adhésion simultanée de la Roumanie et de la Bulgarie au 1er janvier 2007. Reconnaissant que les efforts en vue d'un accroissement significatif de la présence française en Roumanie et Bulgarie auraient un coût, il les a néanmoins considérés comme indispensables pour que notre pays puisse y figurer aux premières places lors de leur adhésion. A cet égard, il a appelé à prendre conscience du fait que le très important capital de sympathie dont bénéficie la France dans ces pays constituait un atout incomparable que l'on se rendrait coupable de ne pas exploiter pleinement.
M. Daniel Reiner s'est pleinement associé aux conclusions du rapport, dont il a dit partager les principes généraux. Insistant sur la nécessaire unanimité quant au soutien à apporter à ces deux pays dans leur marche vers l'adhésion, il a souligné que la France en retirerait plus d'avantages que d'inconvénients, du fait notamment de leur francophonie, et même si des divergences de point de vue pouvaient être apparues sur le dossier de l'OTAN.
Estimant que le rapport traduisait fidèlement les travaux de la mission, Mme Odette Terrade a émis une restriction personnelle concernant la mention du volontarisme insuffisant des pouvoirs publics nationaux en matière de soutien aux investisseurs.
Se félicitant de la qualité du rapport et remerciant le président pour l'efficacité et le dynamisme avec lesquels il avait conduit la délégation, M. Jean-Paul Emin a fait part du sentiment de forte proximité entre ces pays et la France qu'il avait ressenti tout au long de la mission, ajoutant par ailleurs qu'il ne fallait pas se montrer excessivement « frileux » vis-à-vis de délocalisations dont une majorité présentait des aspects positifs pour notre pays.
Exprimant à son tour sa satisfaction quant au contenu du rapport, à la qualité de la présidence de la mission et à l'atmosphère de bonne intelligence dans laquelle elle s'était déroulée, M. Max Marest a insisté sur le nécessaire renforcement des contrôles aux frontières de ces pays, soulignant qu'elles deviendraient d'ici peu les frontières extérieures de l'Union européenne et que la mobilisation d'un corps européen de police y serait indispensable pour éviter que n'y transitent des trafics de tout type.
Remerciant ses collègues, M. Gérard César s'est félicité du bon déroulement de la mission et de la masse d'enseignements recueillis sur ces deux pays en une seule semaine. Précisant que le renforcement des contrôles aux nouvelles frontières de l'Union européenne, évoqué par M. Max Marest, faisait l'objet de développements dans le rapport, il a proposé que le titre de ce dernier soit « Roumanie et Bulgarie : aux Marches de l'Europe ».
M. Max Marest a tenu à préciser qu'il n'existait qu'un seul pont sur le Danube reliant la Roumanie à la Bulgarie, ce qui aurait pour conséquence d'en faire un point de passage privilégié en provenance des Balkans vers l'actuelle Union européenne lorsque les deux pays auront adhéré.
La commission a alors adopté à l'unanimité le rapport ainsi intitulé.
Energie - Service public de l'électricité et du gaz et entreprises électriques et gazières - Examen du rapport
La commission a ensuite examiné le rapport de M. Ladislas Poniatowski sur le projet de loi n° 383 (2003-2004), adopté par l'Assemblée nationale, après déclaration d'urgence, relatif au service public de l'électricité et du gaz et aux entreprises électriques et gazières.
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur, a tout d'abord estimé que le processus d'ouverture des marchés énergétiques avait atteint, en Europe, un point de non retour et considéré que la France ne pouvait plus prendre du retard dans la transposition des directives qui prévoient l'ouverture aux clients « professionnels » (boulangers, artisans...) au 1er juillet 2004, sans risquer d'encourir des mesures de rétorsion de ses partenaires.
Considérant que le premier bilan de la démonopolisation des marchés du gaz et de l'électricité est contrasté puisque le prix de l'électricité n'a cessé de croître, le rapporteur a imputé ce mouvement qui caractérise la période transitoire entre monopole et marché ouvert à la combinaison d'un accroissement tendanciel de la consommation, d'une part, et d'une limitation des sources de productions nouvelles, d'autre part. Il a considéré, après avoir évoqué les pannes survenues en Californie, en Italie et en Grande-Bretagne, que les pouvoirs publics devaient s'attacher aussi bien à préserver l'existence d'une capacité de production autochtone suffisante, qu'à encourager les investissements sur le réseau de transport et la création d'interconnexions avec les pays étrangers.
Puis il a jugé souhaitable de donner à EDF et à GDF les moyens financiers de leur développement, rappelant que cette question était posée depuis la fin des années 1990, même si le Gouvernement de M. Lionel Jospin avait choisi d'y surseoir pour Gaz de France. En ce qui concerne EDF, a-t-il ajouté, l'Etat actionnaire n'a jamais affronté la question de son financement au cours des vingt dernières années, ce qui le met aujourd'hui au pied du mur pour procéder à sa recapitalisation et à l'ouverture de son capital.
Rappelant que l'application, à compter du 1er janvier 2005, des normes dites « IAS » (International Accounting Standards) aurait pour effet d'obliger EDF et GDF à provisionner les retraites de leurs agents, il a souligné que la Commission européenne exigeait, au surplus, la suppression de la garantie de l'Etat pour ces deux établissements publics, considérant que celle-ci constituait une aide d'Etat de nature à fausser la concurrence.
Le rapporteur s'est ensuite déclaré attaché au modèle original que constitue l'entreprise intégrée qui réunit dans une seule structure les « services communs » à EDF et à GDF. Il s'est déclaré favorable à une séparation des activités de production, de transport et de distribution compatible avec l'unicité du statut du personnel des industries électriques et gazières (IEG), avant d'indiquer que le projet n'envisageait nullement une privatisation de ces deux sociétés dont l'Etat ne pourra détenir moins de 70 % du capital.
Concluant son propos, le rapporteur a indiqué qu'il souhaitait transposer les dispositions de la directive relative à l'accès aux stockages de gaz naturel et qu'il présenterait divers amendements à cette fin.
M. François Gerbaud s'est interrogé, au sujet des stocks gaziers français, sur la durée d'autonomie que procuraient ces capacités de stockage.
En réponse, M. Ladislas Poniatowski, rapporteur, a précisé que cette durée était au moins égale à six mois à la veille de l'hiver mais qu'il suffisait que la consommation hivernale soit plus intense que d'ordinaire pour que ces stockages se révèlent insuffisants.
M. Daniel Reiner a fait part de l'opposition totale de son groupe à un texte présenté comme une nécessité de façon abusive. Celui-ci, a-t-il ajouté, est bien loin de ne revêtir qu'un caractère technique même s'il procède, pour partie, à la transposition des directives. Il a estimé que si ce projet réaffirmait les valeurs du service public de façon redondante, il ouvrait la porte à une privatisation d'entreprises qui constituent le fleuron de l'industrie nationale et dont les résultats sont satisfaisants tant au plan industriel qu'en ce qui concerne les services aux usagers. Il a enfin considéré que cette opposition à un texte idéologique constituait un symbole fort.
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur, a souligné, en réponse, la nécessiter d'armer les deux entreprises pour qu'elles aient les moyens de conquérir des parts de marché dans les pays européens, avant de rappeler que ces questions étaient débattues depuis la fin des années 1990 et d'insister sur le fait que le projet de loi ne procédait à aucune privatisation et qu'il prévoyait l'existence d'une société commune de distribution qui pourrait parfaitement offrir une réponse performante aux usagers, tout en sous-traitant, le cas échéant, certaines activités comme le fait actuellement EDF, qui obtient le meilleur taux de réponse en termes de coupures de courant en Europe.
Mme Marie-France Beaufils a souligné son profond désaccord avec ce texte avant de rappeler que la mise en oeuvre des directives s'effectuait en Europe de façon très diverse, nos voisins allemands ayant, par exemple, choisi d'ouvrir symboliquement leurs marchés. Elle a souligné que ces deux entreprises performantes constituaient un outil utile au développement de l'activité économique de la France, y compris dans le cadre de leur statut d'établissement public industriel et commercial. Elle a considéré que ce texte marquait un recul par rapport à l'expérience antérieure, recul déjà sanctionné par une interprétation restrictive donnée au principe de spécialité d'EDF au début des années 1990.
En réponse, le rapporteur a insisté sur le fait qu'il n'était pas question de privatisation, avant de convenir que l'attitude des Allemands sur ce dossier était digne de « tricheurs » qui défendent leur pré carré, tout en observant que l'ouverture du marché avait toutefois permis à EDF d'acquérir une importante filiale outre-Rhin.
Après avoir félicité le rapporteur pour la clarté et la qualité de sa présentation, M. Philippe Arnaud s'est fait l'écho des inquiétudes des salariés des entreprises EDF et GDF, soulignant que ces derniers estimaient que le changement de la forme juridique entraînerait une hausse des prix de l'énergie. Or, a-t-il ajouté, une telle progression n'est pas liée à la transformation de ces entreprises en sociétés anonymes, mais à la croissance de la demande énergétique. En outre, concernant la nouvelle société chargée de la gestion du réseau de transport prévue à l'article 8 du projet de loi, il a relevé que cette dernière bénéficierait de l'apport des réseaux de transport à titre onéreux, soulignant que cette disposition différait, dans ses modalités, de celle prévue pour le transfert des réseaux de distribution, qui seront déclassés du domaine public des collectivités locales. Il s'est, en conséquence, interrogé sur la justification de cette différence de traitement. Enfin, rappelant que le Gouvernement avait pris l'engagement de maintenir le statut et les avantages des agents des industries électriques et gazières, il s'est demandé si, à l'avenir, l'ensemble des entreprises de ce secteur serait tenu de garantir ce statut à leurs agents.
M. Jean Pépin s'est déclaré préoccupé du sort des réseaux des collectivités locales avant de souligner l'importance qui s'attache à soutenir Gaz de France dans ses efforts pour se développer.
M. Daniel Raoul, tout en ayant indiqué qu'il avait apprécié la présentation du rapporteur, a fait part de son désaccord de fond sur les dispositions du projet de loi. Il s'est notamment interrogé sur l'opportunité de proposer, par voie d'amendement dans ce texte, l'instauration d'un schéma de politique visant à promouvoir l'indépendance énergétique au niveau européen.
M. Henri Revol a, quant à lui, rappelé qu'une commission d'enquête du Sénat sur la politique énergétique de la France avait, dès 1998, recommandé, face aux transformations du marché, une modification du statut d'EDF afin d'en faire une société anonyme à capitaux d'Etat. Il a déclaré que cette transformation n'empêchait nullement la puissance publique d'encourager les investissements de production d'énergie, notamment dans le cadre de la programmation pluriannuelle de ceux-ci que le projet de loi d'orientation sur l'énergie prévoyait notamment d'accroître. Il a enfin estimé qu'il y avait urgence à faire évoluer la forme juridique d'EDF et de GDF du fait de l'ouverture du marché à 3,5 millions de clients éligibles à compter du 1er juillet 2004. Le rapporteur a souscrit à l'ensemble de ses observations.
M. Charles Revet a également adressé ses félicitations au rapporteur pour la simplicité et la précision de son exposé. Il s'est interrogé sur la réalité de l'opposition qui pouvait exister entre les missions de service public et la forme juridique des entreprises. Il s'est notamment demandé s'il était possible que la loi aménage le statut public des entreprises pour répondre aux enjeux du secteur électrique et gazier.
M. François Gerbaud a souligné que la réforme du statut des entreprises ne portait pas préjudice à la notion de service d'intérêt général avant de rappeler l'importance des interconnexions et de constater que tous les industriels s'accordaient pour observer une augmentation des prix.
En réponse, M. Ladislas Poniatowski, rapporteur, a indiqué qu'il portait un intérêt tout particulier au volet consacré au service public par le projet de loi avant de souscrire aux précédentes observations sur l'évolution des prix et de déclarer qu'il considérait que la question des interconnexions se posait au niveau européen.
Tout en ayant relevé que les prix de l'électricité avaient fortement augmenté depuis l'ouverture du marché à la concurrence, le rapporteur a indiqué qu'une partie de son rapport était consacrée à l'analyse de cette évolution. Sur la propriété des réseaux, il a noté que le projet de loi comportait des dispositions, résultant d'un accord entre l'État, EDF et les autorités concédantes, prévoyant la répartition des ouvrages de transport et de distribution en fonction d'un critère de tension qu'il a jugé plus souple. Après avoir souligné que les acteurs concernés étaient satisfaits de ce compromis, il a ajouté que l'article 30 du projet de loi donnait compétence au ministre pour déroger, par décret, à ces règles de classement.
En réponse à la question de M. Philippe Arnaud sur le statut des personnels des industries électriques et gazières, M. Ladislas Poniatowski, rapporteur, a précisé que les salariés des nouveaux entrants sur le marché devraient bénéficier des mêmes avantages statutaires afin que ces entreprises exercent leurs activités sur un pied d'égalité.
Tout en précisant qu'un schéma énergétique européen recueillait son accord de principe mais ne trouvait pas sa place dans ce projet de loi, le rapporteur a souligné que la France devait convaincre ses partenaires européens de l'importance de cette question et promouvoir cette idée au plan européen.
La commission a ensuite procédé à l'examen des amendements du rapporteur.
A l'article 1er A (loi n° 2000-108 du 10 février 2000) (définition de la mission de développement et d'exploitation des réseaux publics de transport et de distribution d'électricité), la commission a adopté un amendement de suppression.
A l'article 1er (missions et obligations de service public d'EDF, GDF et des entreprises chargées d'un réseau de transport), elle a adopté, outre trois amendements rédactionnels et un amendement de coordination, trois amendements tendant à :
- prévoir la consultation du conseil d'administration d'EDF ou de GDF, préalablement à la signature du contrat de service public ;
- regrouper dans un alinéa unique les dispositions relatives à l'information du Parlement ;
- et fixer, dans le cadre du contrat de service public d'EDF, les objectifs pluriannuels en matière d'enfouissement des réseaux publics de distribution d'électricité.
Puis elle a adopté l'article 2 (constitution de services communs à EDF et GDF) sans modification.
A l'article 2 bis (article 4-I de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000) (tarification spéciale de services liés à la fourniture d'électricité pour les consommateurs les plus modestes), elle a adopté un amendement de clarification rédactionnelle.
A l'article 2 ter (article 15-III de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000) (mise à disposition de la puissance non utilisée disponible au gestionnaire du réseau), outre un amendement rédactionnel, la commission a adopté un amendement prévoyant des sanctions à l'encontre des producteurs d'électricité qui ne respectent pas l'obligation de mise à disposition définie à cet article.
A l'article 3 (indépendance de la gestion des réseaux de transport d'électricité ou de gaz), elle a adopté, outre un amendement rédactionnel, un amendement de précision.
A l'article 4 (indépendance des gestionnaires de réseaux de transport d'électricité ou de gaz), outre cinq amendements rédactionnels, la commission a adopté un amendement qui supprime la référence à un décret qui énumèrerait les motifs susceptibles de fonder la révocation de la personne assurant la direction générale d'un réseau de transport.
A l'article 5 (création d'une société gestionnaire du réseau de transport d'électricité), la commission a, après les interventions de MM. Henri Revol, Gérard César, président, Max Marest, Daniel Reiner et du rapporteur, adopté trois amendements pour prévoir :
- de ne soumettre à l'accord du ministre chargé de l'énergie que la nomination du directeur général ou du président du directoire de la société gestionnaire du réseau de transport d'électricité ;
- d'éviter de priver les organes sociaux de cette société et, notamment son assemblée générale, du pouvoir d'élaborer les statuts de celle-ci ;
- et de fixer l'entrée en vigueur des statuts à la date de la réalisation de l'apport d'actifs qui matérialisera la constitution effective de la société.
L'article 6 (missions de la société gestionnaire du Réseau de Transport d'Electricité (RTE)) a été adopté sans modification.
A l'article 7 (transfert des droits et obligations relatifs au RTE), elle a adopté, outre un amendement de coordination, un amendement pour préciser que la transcription comptable des apports s'effectuera à la valeur nette comptable.
A l'article 8 (transfert des ouvrages relevant du RTE mais n'appartenant pas à EDF), elle a adopté un amendement de clarification rédactionnelle.
A l'article 9 (exercice des activités de construction ou d'exploitation d'un réseau de gaz en France), la commission a adopté un amendement de précision.
A l'article 10 (modalités des transferts d'actifs aux gestionnaires de réseaux de transport de gaz), outre deux amendements rédactionnels, elle a adopté un amendement de coordination.
La commission a ensuite adopté sans modification l'article 11 (obligation de constituer un service indépendant chargé de la gestion du réseau de distribution) et l'article 12 (signature des contrats de concession).
A l'article 13 (garanties destinées à assurer l'indépendance des gestionnaires du réseau), après un large échange de vues auquel ont participé MM. François Gerbaud, Bernard Piras, Daniel Raoul, Mme Marie-France Beaufils et M. Ladislas Poniatowski, rapporteur, la commission a adopté un amendement rédactionnel et un amendement obligeant les gestionnaires de réseaux de distribution à transmettre à la Commission de régulation de l'énergie les codes de bonne conduite.
Puis elle a adopté sans modification, les articles : 22 (modification de la structure juridique d'EDF et de GDF), 23 (continuité des personnes morales d'EDF et GDF), 24 (applicabilité des dispositions sur la participation des salariés aux agents des services communs à EDF et à GDF), 25 (création de nouveaux plans d'épargne entreprise par EDF et GDF), 26 (adaptation des institutions représentatives du personnel), 27 (règles de territorialité applicables aux distributeurs non nationalisés (DNN) et aux distributeurs publics gaziers agréés).
A l'article 28 A (droit des collectivités locales à ne pas faire jouer leur éligibilité), la commission a, après les interventions de MM. François Gerbaud et Bernard Piras et de Mme Marie-France Beaufils, adopté un amendement tendant à préciser que les dispositions du nouveau code des marchés publics ne s'appliquent pas dans les cas où l'Etat, ses établissements publics, les collectivités territoriales et leurs groupements, décident de ne pas exercer leur droit à l'éligibilité.
Elle a ensuite adopté sans modification l'article 28 (validation des transactions conclues par EDF et GDF).
A l'article 29 (mise en cohérence de la loi n° 46-628 du 8 avril 1946 avec les évolutions statutaires d'EDF et GDF), elle a adopté un amendement de coordination.
A l'article 30 (mise en cohérence de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 avec les dispositions du projet de loi), la commission a adopté cinq amendements tendant à :
- rendre facultative la consultation des commissions régionales de développement et d'aménagement du territoire sur la planification des réseaux de transport et de distribution d'électricité ;
- supprimer l'obligation de publicité des comptes séparés qui s'applique aux entreprises du secteur électrique ;
- corriger une erreur de référence ;
- maintenir les dispositions de la loi du 10 février 2000 relative à la confidentialité des informations d'ordre économique, commercial, industriel, financier ou technique dont disposent les gestionnaires de réseaux de transport ;
- interdire les contrats de fourniture d'électricité « au forfait » pour favoriser les économies d'énergie.
A l'article 31 (mise en cohérence de la loi n° 2003-8 du 3 janvier 2003 avec les dispositions du projet de loi), elle a adopté un amendement qui vise à définir la liste des points de cession du gaz.
A l'article 32 (article L. 2224-31 du code général des collectivités territoriales - adaptation du régime de concession de la distribution publique d'électricité et de gaz), elle a adopté un amendement permettant la création de concessions de distribution aux services publics en Corse pour les réseaux de haute tension.
A l'article 33 (régime de propriété des ouvrages classés dans le réseau d'alimentation générale), la commission a adopté un amendement de suppression du dernier alinéa du III qui prévoit que la Commission de régulation de l'énergie (CRE) approuve les règles comptables instituées pour la reprise par EDF de ses provisions pour renouvellement des ouvrages de distribution.
La commission a adopté l'article 34 (classement des ouvrages relevant d'une concession de distribution d'électricité aux services publics) sans modification.
Après l'article 34 (valorisation des capacités d'effacement des consommateurs industriels), elle a adopté un amendement portant article additionnel tendant à alléger la charge pesant sur le réseau de transport d'électricité.
Après l'article 34 (accès des tiers aux stockages de gaz naturel), la commission a adopté une division additionnelle insérant un titre VI bis pour introduire dans le projet de loi des articles contenant des dispositions relatives à l'accès des tiers aux stockages de gaz naturel. Elle a, en conséquence, adopté huit articles additionnels après l'article 34 qui tendent à :
- déterminer les usages prioritaires des stockages gaziers et la liste des clients qui doivent bénéficier de la continuité de fourniture de gaz en toutes circonstances ;
- créer une obligation de constitution de stocks de gaz naturel et d'information sur l'état de ces stocks ;
- instituer un accès négocié des tiers aux stockages, c'est-à-dire sur la base de prestations commerciales librement proposées par les opérateurs dans des conditions transparentes et non discriminatoires ;
- définir les cas dans lesquels un refus d'accès aux installations de stockages peut être opposé et les procédures de recours en cas de refus ;
- ne pas assujettir les services auxiliaires et les cuves de gaz naturel liquéfié à l'obligation d'accès des tiers ;
- organiser un accès des tiers aux stockages en conduite ;
- prévoir la possibilité d'accorder des exemptions au principe d'accès des tiers à toutes les infrastructures, pour renforcer la sécurité d'approvisionnement de la France et favoriser la construction de nouvelles infrastructures.
Puis elle a adopté sans modification l'article 35 (règles comptables s'appliquant aux sociétés EDF et GDF).
A l'article 36 (modalités d'élaboration des statuts d'EDF et de GDF et poursuite du mandat des administrateurs de ces sociétés), la commission a adopté un amendement rédactionnel.
A l'article 37 (conditions de création de la société de gestion du réseau de transport d'électricité ou de gaz), elle a adopté un amendement de coordination.
La commission a ensuite adopté sans modification l'article 37 bis (mesures transitoires relatives aux demandes d'arbitrage en cours d'instance devant le Conseil supérieur de l'électricité et du gaz (CSEG).
Après l'article 37 bis (validation législative des textes soumis à la consultation du CSEG), elle a adopté un amendement tendant à insérer un article additionnel visant à donner un fondement légal aux textes réglementaires ayant fait l'objet d'une consultation devant le Conseil supérieur de l'électricité et du gaz.
Elle a adopté l'article 38 (application de dispositions du projet de loi à Mayotte) sans modification.
A l'article 39 (abrogations diverses), outre un amendement rédactionnel, la commission a adopté un amendement supprimant le dernier alinéa de l'article 36 de la loi du 8 avril 1946.
Enfin, la commission a adopté le texte ainsi amendé, le groupe socialiste s'abstenant sur le rapport et le groupe communiste républicain et citoyen votant contre le projet de loi.