Table des matières
- Mercredi 29 janvier 2003
- Prévention des risques technologiques et naturels - Examen du rapport
- Audition de M. Louis Gallois, président du conseil d'administration de la SNCF
Mercredi 29 janvier 2003
- Présidence de M. Pierre Hérisson, vice-président, puis de M. Gérard Larcher, président. -
Prévention des risques technologiques et naturels - Examen du rapport
Au cours d'une première séance tenue dans la matinée, la commission a tout d'abord examiné le rapport de M. Yves Détraigne sur le projet de loi n° 116 (2002-2003) relatif à la prévention des risques technologiques et naturels et à la réparation des dommages.
M. Yves Détraigne, rapporteur, a souligné que ce projet de loi, tendant à renforcer les moyens de prévention et de protection contre les conséquences des risques technologiques et naturels, visait à atteindre quatre objectifs pour sa partie consacrée à la prévention des risques technologiques.
Il a noté tout d'abord qu'il visait à garantir une meilleure information du public et à développer une véritable conscience du risque au sein de la population, qui fait souvent défaut dans les zones d'exposition aux risques.
Dans cette perspective, le projet de loi propose de rendre obligatoire l'organisation d'une réunion publique d'information dans le cas des enquêtes publiques portant sur l'implantation d'une installation classée « Seveso seuil haut » ou de créer un comité local d'information et de concertation autour de chaque bassin ou sites industriels à risques.
Il a également indiqué que, selon les termes de l'article 14, les exploitants devraient désormais réaliser une étude portant sur la probabilité d'occurrence des accidents et le chiffrage des dommages matériels potentiels qui pourraient en résulter.
Il a enfin précisé que de nouvelles informations devraient être insérées dans le rapport annuel des sociétés exploitant des installations à risques.
M. Yves Détraigne, rapporteur, a ensuite abordé le deuxième volet de la loi tendant à mettre en place, dans un délai de cinq ans à compter de la date de publication de la loi, des plans de prévention des risques technologiques (PPRT).
Relevant que ces plans devront constituer l'outil principal de prévention et de protection de la population face aux risques technologiques, il a précisé qu'il couvrirait tous les établissements « Seveso seuil haut », dont un grand nombre sont souvent regroupés sur un même site industriel, les stockages souterrains de produits dangereux, ce qui impliquera la mise en place d'environ 200 PPRT sur tout le territoire français. Il a noté que les prescriptions pouvant être contenues dans les PPRT vaudraient servitude d'utilité publique.
Détaillant les mesures pouvant être contenues dans les PPRT, il a expliqué que ces plans pourraient instituer des zones dans lesquelles la construction et l'occupation des sols sera, soit interdite, soit subordonnée au respect de prescriptions, et que les communes et leurs groupements pourront dans ces zones faire usage du droit de préemption.
Par ailleurs, afin de reconquérir les zones urbanisées les plus proches des installations à risques, ces plans pourront instituer des zones dans lesquelles les propriétaires pourraient faire usage du droit de délaissement et céder leur habitation à la commune. Enfin, dans les zones où l'exposition au risque est la plus forte, l'Etat aura la possibilité de déclarer d'utilité publique l'expropriation.
Il a ensuite décrit le mode de financement des terrains faisant l'objet du droit de délaissement et d'expropriation, soulignant que l'Etat et les exploitants pourraient conclure une convention avec les communes et leurs groupements pour fixer les contributions respectives de chacun. Le principe du financement tripartite de ces mesures est donc inscrit dans la loi.
Il a également indiqué que pour la gestion des terrains concernés par ces mesures d'urbanisme, les collectivités et les industriels devront, dans un délai d'un an à compter de la publication du PPRT, signer une convention précisant les conditions d'aménagement de ces terrains.
Enfin, dans un souci de protection des habitants, il a relevé que les PPRT pourraient prescrire des travaux de renforcement des constructions aux propriétaires d'habitations situées dans les périmètres couverts par les PPRT.
S'agissant de la partie relative au droit du travail, il a indiqué que la commission avait, sur ces articles, donné une délégation de compétence au fond à la commission des affaires sociales, saisie pour avis sur ce projet de loi.
Abordant le dernier volet du titre I relatif à l'assurance des victimes de catastrophe technologique, il a souligné que le projet de loi, reprenant ainsi le dispositif existant en cas de catastrophe naturelle, assurait les particuliers d'être indemnisés dans les trois mois par les compagnies d'assurance auprès desquelles ces derniers auraient contracté une assurance-dommages.
Il a enfin indiqué que les personnes non couvertes par un contrat d'assurance-dommages pour leur habitation pourraient bénéficier du fonds de garantie contre les accidents de la circulation et de la chasse.
Abordant le volet de la loi tendant à renforcer les moyens de prévention contre les effets des risques naturels, il a précisé que le dispositif s'inspirait de rapports parlementaires sur la prévention des inondations, notamment celui de M. Marcel Deneux, rédigé après les inondations de la Somme en 2001.
Il a, au passage, relevé que le ministère de l'écologie et du développement durable mettait en oeuvre une réforme en profondeur des services d'annonce de crues, pour les transformer en services de prévision de crues, afin de diffuser une meilleure information auprès des collectivités territoriales et des populations et que le Gouvernement avait décidé de mettre en oeuvre un plan de soutien aux initiatives locales en matière de lutte contre les inondations, pour réguler les têtes de bassin en amont des zones urbanisées, doté de 130 millions d'euros sur quatre ans.
Il a, en outre, noté que le projet de loi créait de nouveaux outils juridiques pour permettre aux collectivités territoriales de mieux exercer leurs compétences de prévention des risques naturels.
Il a indiqué qu'il s'agissait tout d'abord de maîtriser le risque en travaillant en amont des zones urbanisées, tout en respectant les milieux naturels en permettant par exemple la construction de petits ouvrages de régulation des débits en tête de bassin ou en créant une servitude de sur-inondation sur des terrains d'expansion des crues.
Il a également souligné qu'il serait institué une servitude de mobilité du cours d'eau, donnant lieu à indemnisation et ouvrant la possibilité aux propriétaires de faire usage du droit de délaissement dans cette zone.
Afin de lutter contre l'érosion des sols, il a noté qu'il était prévu de définir, en concertation avec la profession agricole, des « bonnes pratiques », pouvant être rendues obligatoires soit en cas d'échec de la concertation, soit pour les généraliser à l'échelle d'un territoire pertinent.
Soulignant que le projet de loi entendait développer la conscience du risque dans les populations les plus exposées, il a indiqué que seraient prévues la pose obligatoire de repères de crues, l'obligation d'information des populations dans les communes les plus exposées et la mention obligatoire du risque lors d'une transaction, qu'il s'agisse d'une location ou d'une vente.
Il a enfin précisé que le projet de loi cherchait à réduire la vulnérabilité des personnes et des biens situés dans les zones urbaines notamment en mobilisant le fonds de prévention des catastrophes naturelles dit « fonds Barnier » pour contribuer au financement des travaux de prévention prescrits par un plan de prévision des risques naturels ou intervenir, en complément des indemnisations versées par les assureurs, afin de financer l'achat d'un terrain hors de la zone dangereuse s'agissant des propriétaires d'habitations ou de petites entreprises sinistrées à plus de 50 % de leur valeur.
M. Yves Détraigne, rapporteur, a indiqué qu'il partageait l'approche innovante de ce texte qui récuse l'idée certes réconfortante, mais totalement irréaliste, du risque zéro tout en estimant nécessaire de prendre en compte la part de risque indispensable pour permettre la créativité et le progrès de toute société.
Il a, en revanche, relevé que la réduction du risque devait être recherchée et que la mise en jeu du principe de précaution, loin d'interdire toute décision, obligeait tout au contraire à agir en fonction d'une grille de choix raisonnés et adaptés au risque identifié, la réduction du risque passant également par la responsabilisation de tous les acteurs concernés, entreprises, collectivités et citoyens.
Il a surtout insisté sur le fait que ce texte n'avait pas pour objet de jeter le discrédit sur un secteur d'activité ou une profession et qu'il était indispensable d'encourager un secteur industriel dynamique et créateur d'emplois et que la profession agricole était un partenaire incontournable dans la mise en oeuvre des mesures proposées pour prévenir l'érosion des sols.
Présentant ensuite ses propositions d'amendements sur la partie « risques technologiques », M. Yves Détraigne, rapporteur, a indiqué que ces dernières portaient sur :
- la nécessité de faire apparaître dans la loi une définition relative à la méthodologie des études de danger ;
- la clarification du mode de financement des mesures d'urbanisme prévues dans les PPRT ;
- la limitation des nouvelles mentions qui devront figurer dans le rapport annuel ;
- la création d'un crédit d'impôt pour encourager les propriétaires à réaliser les travaux qui pourront leur être prescrits par les PPRT.
S'agissant de la prévention des risques naturels, il a indiqué que ses propositions visaient à :
- mieux définir les responsabilités des différentes autorités publiques y compris l'Etat, notamment en matière de prévision des crues ;
- préciser le champ d'application de certaines dispositions, afin de conforter les droits des propriétaires et des exploitants ;
- encourager la réalisation de travaux par les collectivités territoriales ;
- favoriser la définition de périmètres pertinents pour les plans de prévention des risques naturels ;
- mieux définir les obligations d'information en matière de risques naturels ou technologiques mises à la charge d'un vendeur ou d'un bailleur, afin que le dispositif soit effectivement applicable.
A l'issue de cette présentation une discussion s'est engagée.
M. Daniel Reiner précisant que ce texte constituait une reprise partielle d'un projet de loi déposé par le gouvernement précédent a indiqué que le groupe socialiste émettait un avis globalement positif sur ce projet. Il s'est néanmoins interrogé sur la manière dont les compétences des comités locaux d'information et de concertation (CLIC) s'articuleraient avec celles des secrétariats permanents de prévention des pollutions industrielles (SPPPI) et, concernant l'extension des servitudes d'utilité publique en cas de modification ou de nouvelle installation sur un site existant, sur le régime applicable en la matière pour les installations existantes. Enfin, il a relevé -pour le regretter- que les collectivités locales devraient participer au financement des mesures d'urbanisme des PPRT alors qu'avant 1982 elles n'étaient pas maîtresses du développement de l'urbanisation, l'Etat délivrant jusqu'à cette date les permis de construire.
M. Jean-Pierre Vial a insisté sur la nécessité de donner aux collectivités locales les moyens de pouvoir réaliser des contre-expertises sur les études réalisées par les exploitants et l'administration portant sur les dangers présentés par les installations industrielles, soulignant que cette expertise devait avoir lieu au cours de la procédure de délivrance des autorisations afin de pouvoir, le cas échéant, la contester. Il a par ailleurs souligné que les établissements publics de coopération intercommunale devaient être associés à la démarche de prévention des risques.
M. Henri Revol a déploré que ce texte ait été élaboré sous le coup de l'émotion. Soulignant à partir d'un exemple concret les inconvénients de procédures trop contraignantes sur l'emploi, il a indiqué que l'évaluation des risques technologiques découlant d'une installation industrielle étaient un exercice difficile et que souvent, les moyens administratifs mis en oeuvre pour la réaliser n'étaient pas à la hauteur des exigences.
Leur répondant, M. Yves Détraigne, rapporteur, a apporté les précisions suivantes :
- il faut veiller à ne pas ajouter de nouvelles structures administratives, mais, dans le cas des SPPPI, ces organismes ont une assise géographique et des compétences plus larges que les CLIC ;
- des propositions sont faites pour associer systématiquement l'Etat au financement des mesures d'urbanisme ;
- les PPRT seront réalisés en concertation, notamment avec les élus locaux, et l'administration a déjà la possibilité de recourir à la tierce-expertise. Par ailleurs, l'introduction dans la loi d'une définition de la méthodologie des études de dangers doit faciliter leur harmonisation sur le territoire ;
- le gouvernement prévoit une augmentation de 400 du nombre d'inspecteurs des installations classées d'ici à 2007.
M. Philippe Leroy a fait part des inquiétudes que lui inspirait, pour les installations industrielles du pays, l'alourdissement réglementaire qui pourrait résulter de l'adoption de ce projet de loi, élaboré à la suite de l'émotion suscitée par un accident dramatique. Il a notamment souligné que l'obligation d'organiser une réunion publique en cas d'enquête publique portant sur une installation classée « Seveso seuil haut » posait problème et a indiqué qu'il en proposerait la suppression lors du débat. Sur le droit de délaissement, il a regretté que ne soit pas prévue la création d'un fonds de mutualisation pour participer au financement des biens et terrains en faisant l'objet. Il a enfin déploré que les personnes dont l'habitation est située en zone de risque minier ne puissent pas bénéficier tant du droit de délaissement que des procédures d'indemnisation rapide en cas de sinistre prévus par le texte.
Il a fait valoir le déséquilibre flagrant entre les deux régimes et a souligné la légitime incompréhension de la population concernée par le risque minier si cette inégalité venait à être confirmée par la loi. Il a, en conséquence, informé la commission de son intention de déposer un amendement visant à harmoniser le régime des risques industriels et des risques miniers.
M. Claude Saunier a insisté sur la nécessité de préciser les niveaux de responsabilité, en matière de prévention des risques, entre les maires et les présidents des établissements publics de coopération intercommunale. Il a également noté qu'il faudrait clarifier les nouvelles servitudes devant être intégrées dans les plans locaux de l'urbanisme (PLU). Il a approuvé les mentions obligatoires des risques en cas de transaction immobilière tout en soulignant que les agences immobilières devaient déjà faire face à de nombreuses obligations. Il a enfin soulevé l'éventualité de conflits d'intérêts dans les travaux à réaliser en matière de prévention, en souhaitant que l'Etat, dans de telles situations, joue son rôle d'arbitrage.
M. Yves Coquelle a souligné que ce texte allait dans le bon sens mais nécessitait quelques éclaircissements, notamment en ce qui concerne l'encadrement de la sous-traitance et de l'élargissement des missions du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions du travail (CHSCT), précisant que les salariés des entreprises extérieures appelés à intervenir sur les sites à risques ne bénéficiaient souvent d'aucune formation à la sécurité. Il s'est enfin interrogé sur les moyens de financement des mesures d'urbanisme contenues dans les PPRT.
En réponse, M. Yves Détraigne, rapporteur, a indiqué que :
- l'extension des servitudes d'utilité publique instituées par l'article 3 couvre déjà les installations existantes ;
- la France a signé la convention d'Aahrus l'obligeant à prévoir la participation des citoyens aux processus décisionnels concernant l'environnement et l'organisation de réunions publiques d'information est un moyen approprié pour dédramatiser les enjeux relatifs à l'installation des sites à risques ;
- l'exposition aux risques miniers constitue une question importante qui mérite d'être soulevée au cours du débat ;
- le projet de loi prévoit l'inscription des prescriptions des PPRT en annexe des PLU ;
Puis la commission a procédé à l'examen des articles du projet de loi.
La commission a adopté l'article premier (article L. 123-9 du code de l'environnement) (organisation d'une réunion d'information publique lors de l'enquête publique relative à l'installation d'un établissement industriel à risques) sans modification.
La commission a adopté l'article 2 (article L. 125-2 du code de l'environnement) (création d'un Comité local d'information et de concertation autour des bassins industriels comportant des établissements à risques) sans modification.
La commission a adopté l'article 3 (article L. 515-8 du code de l'environnement) (possibilité d'instituer des servitudes d'utilité publique en cas d'installation nouvelle sur un site existant ou de modification d'une installation existante) sans modification.
Après un débat au cours duquel est intervenue Mme Marie-France Beaufils qui a indiqué qu'il était nécessaire de préciser et hiérarchiser les éléments à prendre en compte pour l'élaboration des études de dangers, M. Yves Détraigne, rapporteur, lui répondant que la loi ne pouvait, en la matière entrer plus dans le détail et qu'un travail d'harmonisation des méthodologies des études de dangers était actuellement réalisé par le Conseil supérieur des installations classées (CSIC), la commission a adopté un article additionnel avant l'article 4 tendant à préciser la méthodologie des études de dangers.
A l'article 4 (articles L. 515-15 à L. 515-24 (nouveaux) du code de l'environnement) (création et mise en oeuvre des plans de prévention des risques technologiques), la commission a adopté huit amendements :
A l'article L. 515-16 du code de l'environnement (mesures contenues dans les PPRT), elle a adopté, outre un amendement rédactionnel, un amendement précisant la liste des installations situées dans les zones couvertes par un PPRT dont la construction pourrait être interdite ou subordonnée à des prescriptions relatives à la construction.
A l'article L. 515-17 du code de l'environnement (cession des terrains ayant fait l'objet des mesures de reconquête de l'urbanisme aux exploitants des installations à risques), la commission a adopté un amendement de suppression afin de déplacer cet article à un endroit plus pertinent du code.
A l'article L. 515-18 du code de l'environnement (mise en oeuvre proportionnée des mesures du PPRT), après un débat au cours duquel sont intervenus MM. Daniel Reiner, Henri Revol, Yves Coquelle, Claude Saunier, Hilaire Flandre, Dominique Braye, Paul Raoult et Philippe Leroy, la commission a adopté à la majorité un amendement rédactionnel sur la mise en oeuvre progressive des mesures incluses dans les PPRT.
A l'article L. 515-19 du code de l'environnement (financement et gestion des terrains ayant fait l'objet des mesures d'urbanisme), après un débat dans lequel sont intervenus Mme Marie-France Beaufils, MM. Philippe Leroy, Yves Coquelle, Daniel Reiner, Hilaire Flandre, Dominique Braye, Philippe Arnaud souhaitant voir préciser les responsabilités des différents acteurs en matière de financement des mesures d'urbanisme, examiner la création d'un fonds de mutualisation, sur le modèle des établissements publics fonciers pour contribuer à ces dépenses nouvelles et la mise en place de nouvelles obligations en matière de dépollution pour les industries, la commission a adopté un amendement prévoyant d'associer systématiquement l'Etat au financement des biens et terrains faisant l'objet du droit de délaissement et d'expropriation.
M. Gérard Larcher, président, a indiqué que le dispositif proposé par le rapporteur pourrait être amélioré au cours de la navette.
La commission a ensuite adopté un amendement tendant à réinsérer l'article L. 515-17, précédemment supprimé, après l'article L. 515-17.
A l'article L. 515-23 du code de l'environnement (sanctions et constatation des infractions en cas de non-respect des prescriptions du PPRT), la commission a adopté, outre un amendement rédactionnel, un amendement tendant à donner la possibilité aux tribunaux de statuer sur la destruction des ouvrages qui seraient réalisés en contradiction avec les prescriptions contenues dans les PPRT.
L'examen des articles 5 à 11 du projet de loi sont renvoyés à la commission des affaires sociales saisie pour avis.
A l'article 12 (articles L. 128-1 à L. 128-3 (nouveaux) du code des assurances) (création d'une garantie pour les contrats d'assurance couvrant les dommages à des biens ou aux véhicules en cas de catastrophe technologique), la commission a adopté un amendement de clarification du deuxième alinéa de l'article L. 128-3 afin de préciser la distinction entre les montants effectivement versés aux victimes d'accidents technologiques, ouvrant droit à subrogation, et les montants pouvant être opposés aux responsables de l'accident, sans expertise préalable.
La commission a adopté l'article 13 (article L. 421-16 (nouveau) du code des assurances) (conditions d'indemnisation des personnes non couvertes par une assurance-dommages) sans modification.
La commission a ensuite examiné un amendement du rapporteur portant sur l'article 14 (article L. 515-25 du code de l'environnement) (obligation pour les industriels de réaliser une évaluation de la probabilité d'accident et du coût des dommages potentiels) tendant à préciser que cette évaluation ne pouvait être opposable aux responsables de l'accident.
M. Henri Revol a fait part des doutes que lui inspirait le dispositif du projet de loi et s'est interrogé sur les moyens dont pourrait disposer l'exploitant pour financer de telles études.
M. Dominique Braye a déploré que l'on institue une contrainte supplémentaire pour ces industries, mettant en garde contre les risques de délocalisation induits.
M. Hilaire Flandre s'est interrogé sur la manière d'évaluer avec précision un risque potentiel et a fait part d'un certain scepticisme quant à l'utilité de la procédure proposée.
M. Jean-Paul Emin a souligné que le résultat des évaluations demandées pouvait différer en fonction des experts qui les réalisaient et que ces résultats pouvaient parfois être excessifs.
M. Philippe Arnaud a indiqué que ces analyses revêtaient toujours un caractère subjectif.
Mme Marie-France Beaufils a, quant à elle, fait remarquer que l'évaluation de la probabilité d'occurrence était déjà demandée aux industriels et que seul le chiffrage des dommages constituait une nouveauté.
M. Yves Coquelle a noté que les industriels respectant à la lettre la réglementation accueillaient favorablement ce texte.
M. Philippe Leroy a souligné que la réglementation existante était déjà très complète et assurait ainsi un bon niveau de sécurité.
Au vu de ces observations et des réserves formulées à l'égard du dispositif examiné, la commission a alors adopté un amendement de suppression de l'article 14.
A l'article 15 (assujettissement des stockages souterrains de produits dangereux aux PPRT et à l'obligation de l'article 14), la commission a adopté un amendement consistant à réécrire cet article de manière à prendre en compte la promulgation de la loi n° 2003-8 du 3 janvier 2003 relative aux marchés du gaz et de l'électricité et au service public de l'énergie.
A l'article 16 (article L. 225-102-2 du code du commerce) (informations devant figurer dans le rapport annuel des sociétés), la commission a adopté un amendement de suppression du quatrième alinéa de cet article (obligation pour les sociétés d'informer les actionnaires des moyens prévus pour la gestion de l'indemnisation des sinistres), ce dispositif s'avérant inopérant compte tenu des dispositions du projet de loi relatives aux conditions d'indemnisation des victimes de catastrophes technologiques.
La commission a ensuite adopté un amendement tendant à insérer un article additionnel après l'article 16, instaurant un crédit d'impôt pour les particuliers réalisant des travaux prescrits par les PPRT.
La commission a adopté l'article 17 (article L. 125-2 du code de l'environnement) (information des populations) sans modification.
A l'article 18 (article L. 563-3 (nouveau) du code de l'environnement) (schéma directeur de prévision des crues), la commission a adopté un amendement tendant à une réécriture de cet article, afin de préciser que l'Etat est responsable de l'organisation, de la surveillance et de la prévision des crues.
A l'article 19 (article L. 563-3 (nouveau) du code de l'environnement) (repères de crues), la commission a adopté un amendement précisant que c'est à la commune qu'il revient de matérialiser et d'entretenir les repères de crues.
Puis la commission a adopté un article additionnel après l'article 19 (obstacles entrant dans le cône d'action des radars hydrométéorologiques) facilitant les interventions d'entretien dans le périmètre des radars hydrométéorologiques.
A l'article 20 (article L. 211-12 (nouveau) du code de l'environnement) (instauration de servitudes) la commission a adopté dix amendements :
- au paragraphe II de l'article L. 211-12 (nouveau) du code de l'environnement, après les interventions de Mmes Marie-France Beaufils et Evelyne Didier, MM. Hilaire Flandre, Georges Gruillot, Paul Raoult et Philippe Arnaud, souhaitant voir limiter le champ d'application des servitudes publiques, la commission a adopté un amendement précisant que les servitudes instaurées pour créer ou restaurer une zone de mobilité d'un cours d'eau s'inscrivent en tête de bassin et ont pour objet exclusif la préservation des caractères hydrologiques et géomorphologiques essentiels du cours d'eau ;
- au paragraphe IV de l'article L. 211-12 (nouveau) du code de l'environnement, outre un amendement rédactionnel, elle a adopté un amendement fixant à trois mois le délai pendant lequel le préfet peut s'opposer à l'exécution de travaux ou prescrire les modifications nécessaires dans les zones couvertes par une servitude de rétention temporaire des eaux ;
- au paragraphe V de l'article L. 211-12 (nouveau) du code de l'environnement, outre un amendement rédactionnel, la commission a adopté deux amendements alignant les pouvoirs d'intervention du préfet à l'occasion de travaux réalisés dans une zone grevée d'une servitude pour mobilité d'un cours d'eau sur les règles fixées dans le cas d'une servitude de rétention temporaire des eaux ;
- au paragraphe VIII de l'article L. 211-12 (nouveau) du code de l'environnement, la commission a adopté un amendement prévoyant la compétence du juge de l'expropriation en cas de contentieux sur l'indemnisation des servitudes instaurées pour rétention temporaire des eaux ou pour mobilité d'un cours d'eau ;
- au paragraphe IX de l'article L. 211-12 (nouveau) du code de l'environnement, outre un amendement rédactionnel, la commission a adopté un amendement portant à dix ans le délai pendant lequel un propriétaire d'une parcelle de terrain grevée par une servitude peut en requérir l'acquisition partielle ou totale par la collectivité publique ayant demandé l'institution de la servitude. Elle a également prévu la compétence du juge de l'expropriation à défaut d'accord amiable entre le propriétaire et la collectivité publique sur le prix d'acquisition.
A l'article 21 (lutte contre l'érosion des sols et bonnes pratiques agricoles), la commission a adopté un amendement rédactionnel.
La commission a adopté l'article 22 (article L. 511-3 du code rural) (mise à jour des recueils de coutumes et usages locaux) sans modification.
A l'article 23 (article L. 411-2 du code rural) (non-application du statut de fermage) après les interventions de MM. Bruno Sido, Philippe Arnaud, Jean Boyer, Gérard Larcher, président, et Hilaire Flandre, s'interrogeant sur la nécessité d'introduire une telle exception et la difficulté de mise en oeuvre du dispositif, la commission a adopté un amendement tendant à restreindre les cas d'exclusion du statut du fermage aux seuls terrains appartenant aux collectivités publiques et grevés d'une servitude prévue à l'article L 211-12 du code de l'environnement, le rapporteur indiquant qu'il examinerait les conditions juridiques d'une mise en oeuvre du droit d'option suggéré par M. Philippe Arnaud.
A l'article 24 (travaux contre les risques naturels entrepris par les collectivités territoriales), la commission a adopté un amendement tendant à dispenser d'enquête publique les travaux portant sur un cours d'eau, couvert par un schéma d'aménagement et de gestion des eaux, directement liés à une inondation et réalisés dans les trois ans qui suivent celle-ci.
La commission a adopté l'article 25 (article L. 561-1 du code de l'environnement) (mesures de sauvegarde des populations menacées par certains risques naturels majeurs) sans modification.
A l'article 26 (article L. 561-3 du code de l'environnement) (champ d'intervention du fonds de prévention des risques naturels majeurs), la commission a adopté un amendement tendant à préciser que le fonds d'intervention pour la prévention des risques majeurs peut contribuer au financement d'études ou de travaux de prévention sur des biens d'entreprises agricoles.
La commission a adopté un article additionnel après l'article 26 (article L. 562-1 du code de l'environnement) (périmètre d'un PPR) précisant que le périmètre d'un plan de protection des risques naturels peut être défini à l'échelle d'un bassin ou d'un cours d'eau.
Après les interventions de Mme Marie-France Beaufils, de MM. Philippe Arnaud et Daniel Reiner, la commission a adopté un second article additionnel après l'article 26 article L. 562-3 du code de l'environnement) (procédure d'élaboration du PPR) tendant à préciser les règles de concertation à respecter pour l'élaboration d'un plan de protection des risques naturels.
La commission a adopté l'article 27 (article L. 142-1 du code de l'urbanisme) (prise en compte de la prévention des inondations dans les politiques départementales des espaces naturels sensibles) sans modification.
La commission a adopté l'article 28 (article L. 125-6 du code des assurances) (élargissement des conditions de saisine du Bureau central de tarification) sans modification.
La commission a adopté un article additionnel après l'article 28 (article L. 125-6 du code des assurances) prenant en compte la codification dans le code de l'environnement de la loi n° 87-565 du 22 juillet 1987.
A l'article 29 (missions confiées à l'Office national des forêts), la commission a adopté un amendement précisant les règles de financement des interventions de l'Office national des forêts sur les dunes littorales du domaine privé de l'Etat.
A l'article additionnel après l'article 29 (encadrement juridique des interventions du service RTM), la commission a adopté un amendement définissant les possibilités d'intervention du service de restauration des terrains en montagne en matière d'urbanisme et de prévention des risques.
A l'article 30 (article L. 125-5 du code de l'environnement), la commission a adopté un amendement tendant à réserver l'obligation d'information sur l'existence d'un risque prévisible aux seules transactions immobilières réalisées dans une zone couverte par un plan de protection des risques naturels ou un plan de protection des risques technologiques.
La commission a adopté l'article 31 (article L. 211-1 du code de l'urbanisme) (coordination avec le code de l'urbanisme) sans modification.
La commission a adopté l'article 32 (article 1585C du code général des impôts et article L. 142-2 du code de l'urbanisme) (exonération des travaux de prévention des taxes d'urbanisme) sans modification.
La commission a adopté l'article 33 (dispositions transitoires) sans modification.
Lors des explications de vote, M. Dominique Braye, après avoir donné lecture d'un courrier exposant les difficultés des coopératives agricoles pour réaliser les investissements nécessaires à la mise aux normes des silos, a déclaré s'abstenir sur l'adoption du projet de loi.
M. Gérard Larcher, président, a souligné les réelles difficultés rencontrées par les installations de stockage de céréales, s'agissant de la mise aux normes des silos, du fait notamment d'un contexte économique défavorable.
M. Philippe Arnaud a déclaré partager les objectifs et la plupart des propositions contenues dans le projet de loi mais s'est inquiété de leur mise en oeuvre sur le terrain, dénonçant les risques d'interprétations abusives ou divergentes par les services de l'Etat.
MM. Hilaire Flandre et Jean-Paul Emin ont considéré que l'Etat devait encourager une meilleure coordination de ses services en désignant, si possible, un chef de file au niveau régional, Mme Evelyne Didier ajoutant que l'arbitrage du préfet était indispensable en cas de désaccord entre les collectivités publiques intéressées par la définition des travaux de prévention à entreprendre.
M. Paul Raoult a souligné, pour le déplorer, que l'application de la réglementation par les directions régionales de l'industrie et de la recherche (DRIRE) était très variable d'une région à l'autre et que l'accumulation de textes réglementant l'activité des entreprises en matière de prévention des risques technologiques ou les interventions des collectivités territoriales en matière de prévention des risques naturels, compromettait gravement leur bonne application.
Puis, M. Daniel Reiner a fait valoir que si les orientations générales du texte apparaissaient satisfaisantes, elles ne pouvaient conduire son groupe à l'approuver et que, dans ces conditions, il s'abstiendrait.
Mme Evelyne Didier a déclaré que son groupe adopterait une position identique pour des raisons similaires.
M. Georges Gruillot s'est déclaré opposé à la philosophie du projet de loi estimant qu'il impliquait un surcroît de réglementation tant pour les entreprises que pour les collectivités territoriales et a exposé les raisons qui l'amèneront à s'abstenir.
M. Philippe Leroy, soutenu par M. Daniel Reiner et Mme Evelyne Didier, a souhaité que des propositions soient faites concernant l'indemnisation des victimes d'effondrement minier.
La commission a ensuite adopté l'ensemble du projet de loi ainsi amendé, les groupes socialiste, communiste républicain et citoyen s'abstenant ainsi que la majorité des commissaires des groupes composant la majorité sénatoriale.
Présidence de M. Gérard Larcher, président. -
Audition de M. Louis Gallois, président du conseil d'administration de la SNCF
Au cours d'une seconde séance, tenue dans l'après-midi, la commission a procédé à l'audition de M. Louis Gallois, président du conseil d'administration de la SNCF.
M. Gérard Larcher, président, a tout d'abord rappelé que la régionalisation des services régionaux de voyageurs avait tout juste un an et qu'il convenait d'en faire une analyse. Il a ensuite souhaité obtenir des précisions sur l'évolution du fret ferroviaire, le financement des retraites -les sommes dépensées à cet égard avoisinant le montant des investissements- ainsi que sur les moyens d'une meilleure régulation dans l'univers concurrentiel qui est désormais celui de la SNCF.
M. Louis Gallois a déclaré que l'année 2002 avait été très difficile pour la SNCF en raison de la faible croissance économique (1 % au lieu des 2,5 % prévus). Si les pertes de recettes ont été importantes, les trafics ont néanmoins enregistré des progressions supérieures à celles des autres pays européens.
Il a ajouté que le fret ferroviaire avait été du même niveau que celui de l'année 2001, le trafic routier enregistrant, pour sa part, une légère baisse au second semestre. Au second semestre, au total, a-t-il souligné, le résultat courant de l'année 2002 a été très en deçà des prévisions même si le résultat net a été positif du fait des plus-values de cessions.
L'endettement de la SNCF, a, quant à lui, légèrement diminué, tandis que les filiales du groupe pouvaient se prévaloir d'être globalement à l'équilibre.
M. Louis Gallois a déclaré que l'exercice de l'année 2003 pourrait être également difficile en raison de la faible probabilité d'une reprise économique rapide. Il a indiqué que les hypothèses de trafic demeuraient néanmoins ambitieuses, avec une « politique de volume » nécessaire à l'amortissement des frais fixes.
Le résultat courant devrait être encore déficitaire de 140 millions d'euros, l'objectif étant néanmoins d'atteindre l'équilibre en 2004 et un bénéfice courant de l'ordre de 140 millions d'euros en 2005.
Le président de la SNCF a encore fait observer que toutes choses égales par ailleurs (c'est-à-dire hors augmentation des péages et réduction du temps de travail), les comptes de la SNCF s'étaient améliorés de quelque 500 millions d'euros entre 1998 et 2002.
Il a déclaré que le déficit des trains « Corail » était d'un ordre comparable à celui du fret ferroviaire, avant de préciser que la SNCF envisageait de réduire ses effectifs de quelque 1.270 agents (hors emplois jeunes) en 2003, en relevant que cette réduction concernait, pour l'essentiel, les directions nationales et régionales.
M. Louis Gallois a ensuite insisté sur « l'incroyable dynamisme » (croissance d'environ 3 à 4 % par an) du trafic des transports express régionaux (TER) après un an de régionalisation. Il a précisé que les régions avaient commandé, depuis 1997, plus de 3,5 milliards d'euros de nouveaux matériels soit plus qu'en vingt ou trente ans ; par ailleurs, 500 gares ont été rénovées, des centaines de dessertes nouvelles ont été créées tandis qu'aucune fermeture de ligne n'était enregistrée.
Il a encore relevé que la régionalisation avait permis une « mise au clair » du rôle de chacun : la région, devenue « autorité organisatrice », étant désormais chargée de définir la mission de service public puis de la faire exécuter par la SNCF dans le cadre d'un contrat.
M. Louis Gallois a par ailleurs souligné que les cheminots s'étaient massivement ralliés à la régionalisation des services régionaux de voyageurs.
Il a cependant indiqué que la mise en oeuvre de la régionalisation faisait encore débat sur quelques points :
- en dépit de l'audit effectué pour le compte de l'association des régions de France sur les comptes régionaux de la SNCF, un débat subsiste parfois sur la transparence des comptes de la SNCF à travers la comptabilité analytique du TER ;
- la manière dont le service est exécuté peut faire l'objet de controverses entre la région et la SNCF, malgré les objectifs de qualité clairement affichés dans le contrat (s'agissant par exemple des horaires d'ouverture d'une gare ou de la mise en place d'un distributeur automatique de billets) ;
- un débat existe sur le point de savoir si la communication commerciale doit être plutôt le fait de la région ou celui de la SNCF ;
- des accords doivent être trouvés sur la fixation des objectifs de recettes dès lors qu'il existe, à cet égard, un partage des risques entre la SNCF et la région ;
- une bonne articulation doit être trouvée entre les dessertes de grandes lignes qui sont du ressort de la SNCF et celles des TER qui sont du ressort des régions ; sur ce point, M. Louis Gallois a souligné que les régions se sentaient souvent dans l'obligation de compenser la suppression d'une desserte « grandes lignes » par la création d'une desserte régionale ;
- un débat devra s'engager sur la question des trains « Corail » qui enregistrent un déficit très important et qui assurent de plus en plus des dessertes d'aménagement du territoire à caractère interrégional ;
- enfin, une concurrence existe à l'évidence entre les TER (5.000 trains par jour souvent concentrés dans les « étoiles » des grandes agglomérations) et les trains de fret qui doivent pouvoir circuler notamment dans les régions de transit que sont par exemple l'Alsace, le Centre ou la région lyonnaise.
M. Louis Gallois a toutefois estimé que ces difficultés étaient surmontables dès lors qu'elles étaient suffisamment traitées par une concertation avec la Région.
M. Bernard Joly a fait observer que le transport ferroviaire lié au tourisme paraissait connaître un grand essor avant de regretter les fréquentes pannes de locomotives de la ligne Paris-Bâle. Il a, en conséquence, interrogé le président de la SNCF sur le programme de renouvellement des matériels.
M. Jean-Pierre Vial s'est demandé si la SNCF avait une véritable « volonté » en matière de fret avant de s'inquiéter de la position de l'entreprise sur le projet transalpin « Lyon-Turin ». Il s'est aussi interrogé sur l'avenir des « petites roues » pour les trains de marchandises.
M. Michel Teston a fait observer qu'en 2002, le fret ferroviaire n'avait pas reculé en France contrairement à l'Allemagne en soulignant que la SNCF avait acquis, cette année, des matériels nouveaux (notamment des locomotives électriques) qui ont pesé sur ses comptes. Il s'est, ensuite, interrogé sur une éventuelle fusion entre l'activité fret de la SNCF et celle de la Deutsche Bahn.
En ce qui concerne le transport de voyageurs, M. Michel Teston a insisté sur l'importance des lignes ferroviaires transversales pour l'aménagement du territoire, notamment pour le désenclavement du Massif central (en particulier la ligne Lyon-Bordeaux, pour laquelle il a estimé que le développement des rames à « turbines à gaz » était seul véritablement fiable sur le long terme).
M. Daniel Percheron a tout d'abord rendu hommage à la manière dont la direction de la SNCF assumait les mutations actuelles avant de regretter que l'Etat n'ait pas résolu la question de l'endettement ferroviaire.
Soulignant que la SNCF était un acteur majeur de la décentralisation, il a ajouté que cette dernière ne devait pas hypothéquer le développement des TER. Il s'est enfin interrogé sur le rôle des péages versés à Réseau ferré de France dans les grands équilibres de la SNCF.
M. Dominique Braye a mis l'accent sur les difficultés du transport ferroviaire en banlieue parisienne. Il a déclaré que la SNCF ne pourrait échapper à une réflexion sur le rapport prix-qualité du service rendu. Après avoir exprimé des réserves sur la pratique des cessions immobilières qui pouvait faire apparaître un résultat net bénéficiaire, il s'est demandé si la SNCF allait résorber le déficit du fret en s'efforçant de développer ce secteur ou au contraire en se « recentrant » sur ses activités rentables.
En réponse aux intervenants, M. Louis Gallois a notamment apporté les précisions suivantes :
- le parc diesel (utilisé notamment sur la ligne Paris-Bâle) a quelque 37 ans d'âge. Aussi, 125 nouvelles locomotives diesel devraient être livrées à partir de 2004-2005 ;
- en dépit des difficultés, la SNCF peut revendiquer une des premières places en Europe (derrière la Suisse, l'Autriche et la Suède) en ce qui concerne la part du ferroviaire dans le trafic de fret (20 % du trafic sur les parcours de plus de cent kilomètres contre 17 % pour l'Allemagne ou 6 % pour la Grande-Bretagne). Il a cependant souligné les avantages considérables dont bénéficie la route, principal concurrent du fer, en termes de coût et notamment de coûts sociaux.
Il a encore insisté sur l'effort très important consenti par la SNCF avec notamment l'acquisition de 600 locomotives fret dans le cadre d'une politique tendant à réorganiser la production, à améliorer la qualité du service et à réduire les coûts.
Après avoir souligné la nécessité de mettre en place rapidement des infrastructures dédiées prioritairement au fret ainsi que d'accélérer les programmes visant à contourner les « étoiles » des villes (Lyon, Nîmes-Montpellier, Metz...), M. Louis Gallois a fait observer qu'un véritable rééquilibrage modal supposera probablement, en définitive, un renchérissement global du coût du transport en particulier routier ;
- le projet de liaison transalpine Lyon-Turin est un programme dont l'ampleur « dépasse » la SNCF. De l'aboutissement de ce projet dépendra pour partie le « déplacement » du centre économique de l'Italie soit vers la Vénétie soit vers l'Europe de l'Ouest ;
- la SNCF demeure réservée quant à la technique des « petites roues » pour le transport de marchandises, en raison de leur usure et de la fréquence des déraillements sur les aiguillages ;
- la Commission européenne ne pourrait que manifester son opposition si elle était envisagée à tout projet de fusion entre les activités fret de la SNCF et celles de la Deutsche-Bahn en faisant valoir la situation monopolistique de l'entité qui serait ainsi créée ;
- la SNCF souhaite qu'une pause soit observée dans l'augmentation des péages versés à Réseau ferré de France : d'un montant d'environ 2 milliards d'euros, ils ont progressé de 430 millions d'euros (hors TGV Méditerranée) entre 1998 et 2002. Il a ensuite fait observer que le niveau de ces péages était, par rapport aux autres pays, très élevé pour les lignes nouvelles TGV et en Île-de-France, et en dessous de la moyenne pour le fret et les TER ;
- la ponctualité des trains est effectivement peu satisfaisante en Île-de-France, même si elle a progressé en 2002. Si 40 % des causes d'irrégularité sont externes, les infrastructures vieillissantes ont leur part de responsabilité dans les dysfonctionnements constatés.
M. Daniel Reiner a estimé que le développement du fret ferroviaire supposait des sillons supplémentaires et la mise en oeuvre de tarifs compétitifs. Il s'est demandé dans quel cadre d'alliances et de partenariat la SNCF se préparait à l'ouverture européenne du fret.
En ce qui concerne les réductions d'emplois, il a fait valoir la nécessité de maintenir des effectifs suffisants de conducteur.
M. Gérard Delfau a déclaré que la France était plutôt dans le peloton de tête mondial dans le domaine ferroviaire. Il a néanmoins estimé que s'agissant du fret, « la partie n'était pas gagnée » en s'interrogeant sur l'évolution de la part du trafic voyageurs détenue par le transport aérien.
Il a, enfin, souligné qu'il revenait au Gouvernement de prendre en charge le problème du contournement ferroviaire d'un certain nombre d'agglomérations telles que Nîmes-Montpellier.
M. Alain Fouché s'est demandé comment une meilleure communication pourrait améliorer « l'image » du fret ferroviaire.
M. Jean-Paul Emin a fait observer que l'on était passé, dans le domaine ferroviaire, d'une « économie de production » à une « économie de distribution ».
Il a regretté l'insuffisante concertation, fréquemment constatée, entre les acteurs ferroviaires et les élus locaux.
Mme Evelyne Didier s'est demandé si les dessertes TGV ne pourraient pas participer au désenclavement de certains territoires, notamment en Lorraine.
Mme Marie-France Beaufils s'est inquiétée de l'évolution du transport combiné avant de faire observer que le niveau de l'endettement ferroviaire expliquait en partie le coût des péages demandés à la SNCF.
Elle a ensuite appelé de ses voeux des moyens humains supplémentaires pour réduire l'insécurité dans les trains de banlieue.
En réponse aux orateurs, M. Louis Gallois a notamment apporté les précisions suivantes :
- en 2003, année de l'ouverture du fret à la concurrence européenne, la SNCF s'efforcera d'améliorer la compétitivité du transport ferroviaire international de marchandises, notamment par une politique d'alliances et de coopération (il a cité à cet égard une importante opération « d'interopérabilité » avec la Deutsche Bahn entre Woippy et Manheim) ;
- grâce au TGV Méditerranée, les parts respectives des transports ferroviaire et aérien se sont inversées (60 % en faveur du train et 40 % pour l'aérien aujourd'hui). Il a cependant souligné que les compagnies aériennes à bas coûts étaient désormais, sur certaines destinations, de vrais concurrents ;
- l'« image » du fret ferroviaire nécessite, en effet, d'être améliorée mais la tâche est ardue car le transport routier offre une très grande qualité de service ;
- donner aux lignes TGV un rôle en matière de désenclavement de certains territoires en difficulté supposerait de trouver des financements car les coûts peuvent être considérables ;
- le transport combiné assure 25 % du trafic fret de la SNCF mais seulement 12 % de la recette. Pour autant, il représente, à l'évidence, le moyen de transfert le plus direct de la route vers le rail ;
- 200 agents supplémentaires ont été affectés aux trains de banlieue de la région parisienne.
En conclusion, M. Gérard Larcher, président, a exprimé le souhait qu'en dépit des lourds problèmes auxquels elle est confrontée, la SNCF fasse preuve de plus de « réactivité » en simplifiant notamment des procédures de décision parfois très lourdes.