Table des matières
- Mercredi 18 décembre 2002
- Ecologie - Création d'une zone de protection écologique - Examen du rapport
Mercredi 18 décembre 2002
- Présidence de M. Gérard César, vice-président. -
Ecologie - Création d'une zone de protection écologique - Examen du rapport
Au cours d'une première séance tenue dans la matinée, la commission a procédé à l'examen du rapport de M. Jean-Paul Alduy sur le projet de loi n° 261 (2001-2002) relatif à la création d'une zone de protection écologique au large des côtes du territoire de la République.
M. Jean-Paul Alduy, rapporteur, a d'abord indiqué que la convention des Nations unies de 1982, dite de Montego Bay, sur le droit de la mer, avait consacré l'essentiel du droit international sur le sujet, et notamment la « zone économique exclusive », dans laquelle l'Etat côtier jouit de droits souverains et exclusifs sur les ressources vivantes et minérales des eaux, du sol et du sous-sol et dispose de droits de juridiction dans le domaine de la pollution des mers et en matière de recherche scientifique.
Sur un plan historique, a-t-il rappelé, ce sont les pays d'Amérique latine, qui, dans les années ayant suivi la deuxième guerre mondiale, ont imposé cette notion de « zone économique » d'une largeur de 200 milles.
Le rapporteur a précisé que la France disposait d'une « zone économique » dans l'Atlantique, dans la Manche et outre-mer, en occupant le troisième ou quatrième rang dans le monde à cet égard.
Depuis une trentaine d'années, a-t-il poursuivi, d'autres conventions majeures ont été signées dans le cadre de l'organisation maritime internationale, notamment sur trois dossiers :
- la sécurité maritime ;
- la prévention de la pollution ;
- la responsabilité et l'indemnisation des dommages.
En matière de prévention de la pollution, il a souligné l'importance de la convention internationale de 1973 pour la prévention de la pollution par les navires, dite convention MARPOL.
Cette convention tend à réprimer toutes les formes de pollution survenues à l'occasion de l'exploitation des navires, c'est-à-dire non seulement la pollution par les hydrocarbures, mais encore celles provenant des ordures des eaux usées, des produits chimiques et d'autres substances nuisibles.
En ce qui concerne la pollution par hydrocarbures, elle réglemente rigoureusement les rejets, interdits dans certaines zones et soumis à des conditions très strictes ailleurs. Elle comporte en outre des prescriptions techniques relatives à la construction et à l'exploitation des pétroliers, prévoyant par exemple la présence d'équipements techniques destinés à prévenir la pollution.
Le rapporteur a encore cité la convention de Bruxelles de 1969 sur le droit d'intervention en haute mer qui autorise l'Etat riverain à intervenir en haute mer en cas d'accident entraînant ou pouvant entraîner une pollution par les hydrocarbures.
En matière de responsabilité et d'indemnisation des dommages causés par la pollution des hydrocarbures, M. Jean-Paul Alduy, rapporteur, a évoqué deux conventions internationales :
- la convention internationale sur la responsabilité civile pour les dommages dus à la pollution par les hydrocarbures de 1969 ; ce texte institue le principe de la responsabilité du propriétaire du navire pétrolier pour les dommages, consécutifs à la pollution par les hydrocarbures, survenus dans les eaux territoriales de l'Etat riverain ;
- la convention de 1971 créant un fonds international d'indemnisation pour les dommages dus à la pollution par les hydrocarbures (FIPOL).
Il a ajouté que d'importants protocoles à ces deux conventions avaient été signés en 1992 et étaient entrés en vigueur en 1996 ; ils ont eu notamment pour objet d'augmenter les plafonds de responsabilité.
Puis le rapporteur a rappelé que la France avait été à l'origine, en 1982, de la signature du « mémorandum de Paris » qui lie aujourd'hui dix-huit pays (les treize de l'Union européenne qui ont un littoral, la Norvège, la Pologne, le Canada, la Russie et la Croatie) et permet d'effectuer des contrôles opérationnels en s'appuyant sur les dispositions prévues par l'organisation maritime internationale : l'objectif étant d'effectuer un contrôle sur 25 % des navires de commerce entrés dans les ports.
Le rapporteur a relevé que, faute de moyens humains suffisants, le taux de contrôle français était actuellement de l'ordre de 12 %, taux qui demeure, toutefois, supérieur à la moyenne des pays membres signataires du mémorandum.
M. Jean-Paul Alduy, rapporteur, a encore déclaré qu'à la suite des catastrophes (Amoco Cadiz en 1977, Erika en 1999) qui ont directement et gravement affecté le littoral européen, l'Europe communautaire avait été conduite à se doter de règles de protection spécifiques contre les pollutions et singulièrement les pollutions par hydrocarbures.
Il a rappelé deux dispositifs récents :
- le « Paquet Erika I », entré en vigueur en juin 2002 et qui comprend plusieurs aspects :
. le renforcement des contrôles dans les ports ;
. l'amélioration du contrôle des activités des sociétés de classification ;
. l'interdiction des pétroliers à simple coque au plus tard en 2015, selon un calendrier d'élimination progressive.
- le « Paquet Erika II », qui doit entrer en vigueur en 2003, et qui prévoit :
. la mise en place d'une agence européenne de sécurité maritime ;
. l'amélioration du signalement et du suivi des navires ;
. la création d'un fonds complémentaire de compensation des dommages de pollution.
Le rapporteur a souligné que les décisions adoptées tardaient cependant à être mises en oeuvre.
Il a relevé que le 26 novembre dernier, au cours du sommet annuel franco-espagnol qui s'est tenu à Malaga, le Président de la République et le Premier ministre espagnol, M. José Maria Aznar, avaient souhaité reprendre l'initiative pour que l'Union européenne mette en application rapidement les mesures décidées en commun.
Sur le plan national, le rapporteur a rappelé que c'est une loi du 16 juillet 1976 qui a consacré, en France, la « zone économique au large des côtes du territoire de la République ».
En 1983, a été mis en place dans le code de l'environnement un dispositif répressif (récemment modifié en 2001) s'appliquant tant aux navires français qu'aux navires étrangers tant dans les eaux territoriales que dans les « zones économiques » de la Manche, de l'Atlantique et d'Outre-mer.
M. Jean-Paul Alduy, rapporteur, a rappelé que l'efficacité de ces dispositions était évidemment subordonnée aux moyens légers et lourds de surveillance, de contrôle et de dissuasion disponibles, c'est-à-dire les personnels, les bateaux, les hélicoptères et les avions relevant de la marine nationale et de la gendarmerie (défense), de la direction des affaires maritimes (équipement) et des douanes (finances). Il a relevé qu'une récente circulaire du 4 avril 2002 s'était efforcée d'améliorer la coordination, notamment entre les actions sur terre et sur mer.
Puis le rapporteur a déclaré que l'objet du présent projet de loi était de créer, en Méditerranée, une « zone de protection écologique » (ZPE), dans les conditions apparemment autorisées par la convention sur le droit de la mer de Montego Bay dans sa cinquième partie, en appliquant dans un nouveau « zonage » (où la France ne revendique pas de « zone économique exclusive » pour des raisons de bon voisinage liées notamment à la pêche) les dispositions coercitives qui ne sont applicables que dans la zone économique.
La France, a-t-il ajouté, fera ici oeuvre innovatrice, même si le Royaume-Uni a déjà créé au large de ses côtes une zone de même type dénommée « special area », tandis que l'Espagne s'est dotée d'une « zone de protection halieutique ».
M. Jean-Paul Alduy, rapporteur, a indiqué que la négociation sur la délimitation de la ZPE en Méditerranée avait déjà commencé, les négociations avec l'Italie et l'Espagne ne paraissant pas poser de difficultés.
Il a souhaité que le projet de loi s'inscrive dans une dynamique visant à prendre « à bras le corps » un dossier majeur.
C'est en tout cas, a-t-il poursuivi, la volonté politique que deux grands responsables européens -le Président de la République française et le Premier ministre espagnol- ont exprimé à Malaga en se fixant pour objectif rien de moins que d'interdire la circulation maritime aux navires suspects dans les zones soumises à nos droits de juridictions.
Il a aussi souligné que le repérage, l'identification et l'éloignement forcé des navires au « comportement délinquant » qui procèdent à des dé-ballastages (parfois qualifiés de « dégazages ») de résidus de cargaisons d'hydrocarbures (le cas échéant, 100 tonnes par navire) étaient tout aussi nécessaires que le repérage, l'identification et l'éloignement des navires qui présentent un danger ou une menace.
A cet effet, a-t-il ajouté, la France a besoin de moyens matériels et de moyens juridiques : le présent projet de loi renforce, de ce point de vue, nos capacités d'action.
M. Jean-Paul Alduy, rapporteur, a ensuite exprimé le souhait que le droit international, ou même le droit communautaire, ne justifient plus un certain « immobilisme » dans le domaine de la sécurité maritime.
Il a déclaré que le présent projet de loi entendait principalement compléter le code de l'environnement (articles 3 à 7 du projet de loi), la loi du 16 juillet 1976 relative à la zone économique (article 1er du projet de loi), ainsi qu'à titre de coordination, la loi du 11 juillet 1986 relative à la recherche scientifique maritime (article 2 du projet de loi).
Il a indiqué que le texte était, en soi, difficilement amendable, puisqu'il se bornait à codifier et à porter différentes coordinations législatives.
Il a souhaité toutefois poursuivre sa réflexion en estimant que trois ou quatre semaines ne seraient pas de trop pour analyser la situation nouvelle née de toutes les initiatives actuelles, procéder à quelques consultations supplémentaires et formuler, le cas échéant, quelques propositions utiles au débat.
M. Roland Courteau a souligné que l'institution d'une « zone de protection écologique » était très attendue en Méditerranée, en raison de l'importance du trafic de pétrole et de substances dangereuses. Il a précisé que les trois quarts des faits de pollution étaient localisés en dehors des eaux territoriales. Il s'est inquiété de la capacité d'intervention du fonds international d'indemnisation pour les dommages dus à la pollution par les hydrocarbures (FIPOL) dans la zone nouvellement créée avant de s'enquérir des délais envisagés de la négociation diplomatique en vue de la création de la ZPE.
Après s'être interrogé sur la possibilité d'installer des sites « éoliens » en Méditerranée en application de la réforme, il a appelé de ses voeux la disparition définitive des « navires-poubelle ».
M. Jean-Paul Emin s'est demandé pourquoi la France ne créait pas de « zone économique » en Méditerranée.
M. Bruno Sido a mis l'accent sur la souplesse et la relative efficacité du dispositif de remorquage existant, avant de faire observer que les pollutions chimiques étaient plus durables que les pollutions par hydrocarbures.
M. Gérard César, président, s'est demandé s'il ne serait pas utile de faire déclarer l'urgence sur le projet de loi.
En réponse aux orateurs, M. Jean-Paul Alduy, rapporteur, a notamment précisé que :
- la création par décret de la « zone de protection écologique » pourrait intervenir, compte tenu de la négociation diplomatique, dans un délai d'un à deux ans à compter de la publication du présent projet de loi ;
- le FIPOL sera, évidemment, appelé à intervenir en cas de sinistre dans la nouvelle « zone de protection écologique » en Méditerranée ;
- l'absence d'une « zone économique » française en Méditerranée s'explique par la situation délicate du « partage des souverainetés » dans l'exploitation des ressources des fonds marins ;
- la lenteur de la mise en oeuvre du droit européen en matière de lutte contre les pollutions est regrettable, dès lors que c'est à ce niveau que les mesures les plus efficaces peuvent être prises ;
- la mer Méditerranée, tout comme la mer Baltique, sont particulièrement fragiles, au regard des pollutions, en raison de la faiblesse des courants et des marées.
Enfin, sur proposition du rapporteur, la commission a adopté le présent projet de loi, sous réserve d'éventuelles propositions qu'il pourrait être conduit à lui soumettre avant la discussion du texte en séance publique.
Présidence de M. Gérard Larcher, président. - Au cours d'une seconde séance tenue dans l'après-midi, la commission a procédé à l'audition de M. Renaud Dutreil, secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation.
Ont participé à cette réunion les sénateurs de la commission, ceux d'autres commissions ayant accompli un stage en entreprise au cours des derniers mois et les entrepreneurs ayant accueilli des sénateurs durant cette période. M. Renaud Dutreil a présenté les orientations de la politique du Gouvernement en faveur des entreprises et il a répondu aux questions posées par les participants, qu'ils soient sénateurs ou entrepreneurs.
L'ensemble de la réunion a fait l'objet d'un enregistrement audiovisuel.