Mercredi 1er juillet 2009
- Présidence de M. Josselin de Rohan, président -Loi de programmation militaire pour les années 2009-2014 - Examen du rapport et du texte proposé par la commission
La commission a procédé à l'examen du rapport de M. Josselin de Rohan sur le projet de loi n° 462 (2008-2009) relatif à la programmation militaire pour les années 2009 à 2014 et portant diverses dispositions concernant la défense.
M. Josselin de Rohan, président, et rapporteur du projet de loi, a proposé de procéder à un bref débat général permettant à chacun de formuler ses observations d'ensemble sur la loi de programmation militaire (LPM), avant d'aborder l'examen des articles et des amendements.
Il a rappelé que depuis la présentation du Livre blanc, il y a un an, il avait été possible d'analyser de manière approfondie le nouveau cadre de la politique de défense, ainsi que les principales caractéristiques de la LPM qui le met en oeuvre.
Il a souligné que la loi de programmation était le fruit d'une double ambition visant à adapter l'outil de défense français aux évolutions du contexte stratégique, tout en inscrivant sa modernisation dans un cadre financièrement soutenable.
Il a relevé que le cadrage stratégique de la politique française de défense méritait d'être réactualisé. Les évolutions et les perspectives de la défense européenne devaient également être prises en compte, en recherchant une articulation cohérente avec l'Alliance atlantique à laquelle appartiennent vingt de nos partenaires de l'Union européenne.
Il a estimé que la précédente LPM avait été essentiellement une loi de redressement.
Ainsi, les crédits prévus ont été effectivement mis en place et consommés à près de 98 %, et, pour les quatre derniers exercices, les dépenses d'équipement ont représenté 15,5 milliards d'euros par an, soit 30 % de plus qu'au cours de la période 1998-2001.
Parallèlement, la professionnalisation a été consolidée et la capacité opérationnelle des armées a été attestée sur tous les théâtres d'opérations où elles ont été engagées.
Pour autant, cette LPM n'a pas permis de revenir à la réalisation du modèle et l'écart a continué de se creuser entre les objectifs et l'avancement des programmes d'équipement.
Il a précisé que les principales causes de cette situation tenaient à un surcoût important de l'entretien des matériels et de plusieurs programmes, dont certains avaient été sous-évalués, ainsi qu'à des difficultés industrielles sur d'autres.
Le glissement des programmes et la réévaluation des coûts d'acquisition et d'entretien rendaient inévitable une remise à plat. C'est l'exercice qui a été mené avec le Livre blanc, en vue de réévaluer les besoins au regard de l'environnement de sécurité et des hypothèses financières, et en veillant à préserver la cohérence d'ensemble de l'outil de défense.
Il s'est félicité que le projet de LPM 2009-2014 engage la première étape de cette adaptation axée sur de grands objectifs opérationnels et de capacités susceptibles d'être régulièrement réactualisés. Cette LPM, qui couvre six années, doit être révisée au bout de quatre ans, et entre temps, en 2010, un point d'étape sera effectué lors de la préparation de la prochaine loi triennale de programmation des finances publiques.
La première caractéristique de ce projet de LPM réside dans la volonté d'accroître les ressources allouées à la défense.
Ainsi, il prévoit une augmentation du budget de la mission « Défense », auxquels s'ajoutent en outre les crédits du plan de relance et les recettes exceptionnelles provenant de cessions immobilières et de fréquences hertziennes. Au total, c'est une annuité moyenne de 31 milliards d'euros, hors pensions, qui est prévue, soit 4,5 % de plus que l'annuité 2008.
La deuxième caractéristique réside dans le profond redéploiement de crédits qui s'opèrera au sein de cette enveloppe en progression.
En effet, le ministère de la défense n'a cessé de se réformer depuis la professionnalisation, mais l'effort doit être poursuivi et porter prioritairement sur les structures d'administration générale et de soutien, qui représenteront 75 % des réductions d'effectifs. Durant la période de programmation, la part des dépenses de personnel et de fonctionnement passera de 50 à 43 % des ressources hors pensions et la part du budget d'équipement augmentera en conséquence.
Les crédits d'équipement représenteront en moyenne 17 milliards d'euros par an, soit 10 % de plus que le niveau atteint en 2008. Les gains réalisés permettront de poursuivre l'amélioration de la condition des personnels, tant militaires que civils, grâce à de nouvelles grilles indiciaires et à des mesures indemnitaires.
Parallèlement, le provisionnement des Opex sera porté à 630 millions d'euros en 2011, avec appel à la réserve interministérielle pour financer le complément éventuel.
La troisième caractéristique tient aux nouveaux équilibres qui s'établiront au sein de la défense. En effet, les choix effectués par cette LPM permettent à la France de conserver l'éventail de capacités qui en font un acteur militaire majeur, en accord avec ses responsabilités internationales, même si c'est dans le cadre d'un format resserré et concentré.
Avec le maintien des moyens de la dissuasion et l'accentuation des capacités liées à la fonction « connaissance et anticipation », notamment le budget spatial militaire qui passera de 500 à 800 millions d'euros, ce projet de LPM montre que la France maintient, et même accentue, les moyens de son autonomie stratégique, qui fait sa spécificité en Europe.
C'est sur les capacités d'intervention que les incidences de la contraction du format seront les plus sensibles, sur les moyens liés au combat terrestre de haute intensité et sur la flotte de surface, avec la diminution du nombre de frégates et le report à 2011/2012 de la décision sur un éventuel second porte-avions.
Les dotations pour l'entretien des matériels seront majorées.
Les moyens de la recherche sont consolidés. Une véritable mutualisation de la recherche européenne doit être développée dans le cadre de l'Agence européenne de défense (AED) ou de projets bilatéraux ou multilatéraux.
M. Josselin de Rohan, président, a enfin évoqué les défis auxquels sera confrontée la mise en oeuvre de cette LPM. Le premier tient à la dégradation du contexte économique et financier, et au risque qui en résulte pour l'augmentation programmée des ressources allouées à la défense. Toutefois, grâce au plan de relance, le Gouvernement a choisi d'accélérer la mise en oeuvre de la LPM.
Il a souhaité que, si d'autres mesures de soutien à l'économie venaient à être envisagées, le secteur de la défense en soit destinataire, en veillant à ne pas le pénaliser lorsque les conditions économiques s'amélioreront ; ainsi, l'échelonnement du remboursement des avances obtenues dans le plan de relance ne devra pas être remis en cause.
Puis M. Josselin de Rohan, président, a considéré que le deuxième défi résidait dans les recettes exceptionnelles. Pour l'immobilier, si plus de 220 millions d'euros ont été encaissés au début de 2009, cela est loin des 972 millions attendus.
S'agissant des cessions de fréquences hertziennes, M. Josselin de Rohan, président, a souhaité que le ministre précise la teneur exacte des engagements portant sur une avance de trésorerie des 600 millions d'euros prévus pour 2009, alors que les cessions n'interviendront au mieux qu'en 2010.
M. Josselin de Rohan, président, a considéré que le troisième défi consistait en la réussite de la réorganisation du ministère et de la déflation de ses effectifs. En effet, la LPM se fonde sur l'utilisation des marges dégagées par cette opération, qui s'avère délicate, non seulement parce qu'elle implique des déflations d'effectifs, mais également parce que ces déflations doivent principalement résulter de la réorganisation de l'administration et du soutien.
Le quatrième défi consistera à maîtriser les surcoûts éventuels qui pourraient survenir et déséquilibrer l'exécution de la LPM. En dehors des programmes d'armement comme le Rafale ou les frégates multimissions (FREMM), dont les cibles et les cadences retenues rendent l'équilibre économique dépendant des exportations, le programme de l'avion de transport A400M, le maintien en condition opérationnelle des matériels et la pleine participation à la structure de commandement de l'OTAN constituent des risques de surcoût.
Enfin, lors de la dernière LPM, la défense avait été déchargée des coûts de démantèlement des usines de matières fissiles de Marcoule et de Pierrelatte, désormais prises en charge par un fonds spécifique : ce fonds devra être pérennisé.
M. Josselin de Rohan, président, a estimé que les orientations générales de ce texte méritaient d'être approuvées, tout en sachant que la mise en oeuvre de la LPM exigera beaucoup d'efforts et de vigilance, mais qu'elle est très attendue par la communauté militaire et le monde de la défense, car elle consacre les engagements pris dans le Livre blanc. En conclusion, il a recommandé l'adoption du projet de loi.
M. Didier Boulaud a souhaité, à titre liminaire, exposer la position du groupe socialiste sur les conditions d'examen du projet de loi de programmation militaire 2009-2014.
Il a rappelé que ce projet de loi avait été déposé en octobre 2008 pour une application à compter du 1er janvier 2009, et considéré que le décalage sensible de ce calendrier initial, alors même que la situation financière, économique et sociale de la France s'était dégradée, rendait ce texte caduc dans ses références et dans son équilibre financier.
Il a rappelé que la réintégration dans le commandement militaire de l'OTAN, sans aucune condition préalable, banalisait la position de la France et constituait un coup sévère porté à la politique européenne de défense qui n'occupe qu'une place insignifiante dans le projet de loi.
Puis il s'est insurgé contre la mise en commun des notions de sécurité intérieure et de défense nationale, conformément à ce que proposait le Livre blanc, estimant qu'il s'agissait là d'une confusion nuisible, notamment parce qu'elle conduit à élargir, avec d'autres dispositions du projet de loi, les pouvoirs conférés au Président de la République, entraînant un élargissement sensible du domaine réservé.
Il a estimé que ce projet était insincère dans son architecture budgétaire, notamment en raison du caractère aléatoire des ressources exceptionnelles (immobilier et ventes des fréquences), et que sa réalisation serait compromise par l'héritage catastrophique laissé par l'exécution de la loi de programmation 2003-2008.
Il a regretté que les décisions prises dans le cadre de la Révision générale des politiques publiques (RGPP) se traduisent par la mise en oeuvre d'un grand plan social. 54 000 emplois seront supprimés d'ici à 2014 au sein du ministère de la défense, et une nouvelle carte militaire conduira à la suppression de nombreuses implantations de défense sur le territoire français. Il a déploré que les équipements militaires prévus dans ce projet de loi soient financés sur ces économies, qui conduisent d'ores et déjà au départ prématuré de l'armée de personnels en plus grand nombre que prévu, ce qui révèle une certaine démoralisation.
Il a estimé que l'impact de l'ensemble de ces éléments sur les compétences de nos armées conduirait la France à ne jouer à l'avenir qu'un rôle de supplétif au sein de l'OTAN.
Il a également dénoncé le processus de privatisation des sociétés DCNS et SNPE (Société nationale des poudres et explosifs). Il a émis le souhait qu'un rapport annuel au Parlement soit présenté sur l'exécution de la LPM, notamment en ce qui concerne la politique industrielle et la situation de l'emploi du secteur de la défense. Un tel engagement avait été pris pour la loi 2003-2008, mais n'a jamais été tenu.
Il a précisé que les amendements présentés par le Groupe socialiste visaient à combattre l'ensemble de ces dérives, en particulier l'adjonction de dispositions comme celles relatives au secret défense qui n'avaient pas leur place dans ce projet de LPM, et il a estimé que la probable adoption sans modification par le Sénat de ce projet de loi de programmation ne serait pas de nature à renforcer la démocratie parlementaire.
M. Jean-Pierre Chevènement a observé que les lois de programmation permettaient d'assurer au secteur de la défense un calendrier précis d'allocation de crédits et de personnels. Il a considéré que le présent projet était cependant altéré par l'incertitude pesant sur les financements tirés de produits de cessions immobilières et de fréquences, puis il a évoqué quatre sources de perplexité.
Il s'est tout d'abord interrogé sur la pertinence du concept de sécurité nationale, qui est source d'ambiguïtés. Défense nationale et sécurité intérieure doivent en effet rester distinctes et il y a plus d'inconvénients à les confondre qu'à les distinguer. Cette notion n'est-elle pas inconstitutionnelle puisque, aux termes de l'article 15 de la Constitution, le Président de la République préside les conseils et les comités supérieurs de la défense, et non de la sécurité nationale ? Le concept de sécurité nationale tend à confondre action militaire et action policière. Si des domaines de recouvrement existent, comme la lutte contre le terrorisme, le risque d'un glissement visant à substituer l'ennemi intérieur à l'ennemi tout court est important. Il a déploré que cette idée de sécurité nationale mette notre pays « à la remorque » de la politique des Etats-Unis d'Amérique, ce qui constituerait un dangereux suivisme, de nature à nuire à la sécurité intérieure française. Ce concept reflète en effet l'évolution des concepts stratégiques de l'OTAN dont il déplore que la France se soit rapprochée sans négociation et sans conditions.
Il s'est montré très réservé sur la privatisation de la SNPE et de DCNS alors que ces sociétés devraient rester nationales afin de préserver la maîtrise des pouvoirs publics sur l'industrie de défense.
Il a enfin émis la crainte que le concept de sécurité nationale ne nuise à la nécessaire adhésion de la nation à notre politique de défense. Il a souhaité le rétablissement d'un service civique obligatoire, gage de cette adhésion.
Mme Michelle Demessine a indiqué que ce projet de loi était la traduction budgétaire des orientations stratégiques définies par le Livre blanc, mais qu'il traduisait aussi la logique comptable de la RGPP avec la suppression de 54 000 emplois. Sans remettre en cause la pertinence des analyses du Livre blanc, elle a manifesté son opposition à la réorientation stratégique fondamentale que constituait la réintégration de la France dans le commandement militaire de l'OTAN sans conditions, ni avancées dans la politique européenne de sécurité et de défense.
Elle a estimé que la modification du code de la défense, afin de l'adapter au nouveau concept de « stratégie de sécurité nationale », aboutissait à concentrer tous les pouvoirs entre les mains du Président de la République et créait un déséquilibre institutionnel.
Mme Michelle Demessine a évoqué la question du secret défense, qui ne serait plus seulement réservé aux documents, mais qui pourrait être étendu à certains lieux. Cette évolution lui a semblé dangereuse, dans la mesure où elle modifierait l'équilibre des pouvoirs entre l'exécutif et le judiciaire et faisait craindre aux magistrats une restriction de leurs pouvoirs d'enquête. Mme Michelle Demessine a ensuite estimé que le financement de la loi, tel qu'il était prévu, n'était pas acceptable, car faisant trop appel aux suppressions de postes et aux recettes exceptionnelles. Sans remettre en cause la nécessité des programmes d'équipement, elle a jugé trop importante la part faite au nucléaire.
Enfin, Mme Michelle Demessine a déploré un manque de perspective cohérente en matière de politique industrielle de défense comme en témoigne la privatisation de DCNS et de la SNPE.
En réponse, M. Hervé Morin, ministre de la défense, a apporté les précisions suivantes :
- la lettre plafond que vient d'envoyer le Premier ministre pour le cadrage du projet de budget pour 2010 est conforme aux ressources prévues par le projet de la LPM ;
- les recettes exceptionnelles tirées de la vente de biens immobiliers du ministère de la défense seront mises en place à partir de l'automne 2009, et un décret d'avance d'un montant de 245 millions d'euros permettra de faire la jonction avec ces futurs recettes ;
- les recettes tirées des ventes de fréquences, d'un montant estimé à 600 millions d'euros, devraient être encaissées au cours du deuxième semestre 2010, mais le Premier ministre a rendu un arbitrage permettant de disposer de ressources de trésorerie spécifiques dans l'intervalle ;
- la redéfinition des conditions de réalisation des FREMM n'est pas de nature à remettre en cause l'équilibre économique du programme, ni l'exécution financière de la programmation ;
- en revanche, le programme Rafale est effectivement étroitement conditionné par des perspectives à l'exportation ; si un contrat à l'exportation était obtenu d'ici la fin 2009, il serait envisageable de réduire le nombre de commandes pour la France, ce qui ne serait pas incohérent étant donné les difficultés persistantes de maintenance dues à une gestion erratique des commandes de pièces détachées, notamment pour le moteur ;
- la récente réunion des ministres de la défense, tenue à Séville en Espagne, a permis de déterminer les positions des pays partenaires du projet A400M ; une solution permettant au Royaume-Uni de rester dans le programme tout en dégageant des financements lui permettant de répondre à le besoin capacitaire immédiat est en cours d'élaboration;
- les surcoûts entraînés par la participation accrue de notre pays à la structure de commandement de l'OTAN nécessiteront probablement un complément de crédits de fonctionnement dont la discussion est en cours ;
- c'est en 2001, M. Alain Richard étant alors ministre de la défense, qu'a été prise la décision salutaire de transformer DCNS en société anonyme de droit privé. DCNS engrange aujourd'hui de bons résultats, dispose d'un carnet de commandes équivalent à quatre années de chiffre d'affaires, et peut donc constituer le pivot d'une nécessaire restructuration européenne. Le projet de loi lui donne les moyens d'y participer pleinement ;
- en revanche, la SNPE a perdu jusqu'à 10 % de son chiffre d'affaires par an ces dernières années, et il est donc nécessaire d'engager une restructuration qui permette de préserver et redresser les différents pôles du groupe, propulsion, poudres et explosifs, et chimie civile, à travers des partenariats adaptés. Il convient d'éviter de se retrouver dans la situation très dégradée qu'a connue GIAT Industries ;
- le concept de sécurité nationale répond à une approche globale en matière de sécurité, cohérente avec la globalité des menaces. Ces menaces pèsent autant sur la sécurité extérieure qu'intérieure de notre pays. L'ensemble des moyens qui concourent à la sécurité doivent être mis en matrice sans pour autant remettre en cause la distinction des missions assignées aux armées et à la police.
La commission a ensuite procédé à l'examen des articles du projet de loi.
M. Josselin de Rohan, président, a précisé les raisons pour lesquelles il demanderait à la commission d'adopter le projet de loi sans modification.
Il a souligné que cette programmation militaire reposait sur deux éléments essentiels, à savoir une enveloppe financière et un niveau d'effectifs pour les six prochaines années, qui ne lui paraissaient pas devoir être remis en cause.
Il s'est déclaré en accord avec les principales dispositions du projet de loi :
- l'assouplissement des conditions de création de filiales par DCNS, qui correspond à une nécessité pour cette société et ses perspectives de développement ;
- le principe de l'inscription de la SNPE au rang des entreprises privatisables, qui doit permettre son évolution en consolidant ses activités dans le domaine essentiel de la propulsion et dans celui des poudres et explosifs ;
- les dispositions sur le secret défense, qui visent à permettre, et non à limiter, les perquisitions pouvant toucher au secret défense en leur donnant un cadre juridique calqué sur une procédure satisfaisante : celle de la déclassification après intervention de la commission consultative du secret de la défense nationale (CCSDN).
M. Josselin de Rohan, président, a observé, sur ce dernier point, que le texte aurait pu être amélioré en mettant mieux en évidence le rôle clef du Président de la CCSDN dans la procédure. Toutefois, il a lui semblé préférable de s'en tenir à l'équilibre trouvé par l'Assemblée nationale.
M. Josselin de Rohan, président, a estimé que des modifications ponctuelles prolongeraient inutilement la navette alors que l'adoption définitive du projet de loi est fortement attendue par la communauté militaire et le monde de la défense, qui souhaitent la confirmation des engagements pris à leur égard par le Livre blanc.
M. Josselin de Rohan, président, a indiqué que la commission devait dorénavant procéder à l'examen des amendements selon de nouvelles modalités. En application du nouveau règlement du Sénat et des décisions du Conseil constitutionnel, un examen a priori de la recevabilité des amendements au regard de l'article 40 a été opéré, et après consultation du président de la commission des Finances, il apparaît que les amendements 1, 56 et 57 de M. Jean-Pierre Chevènement, et l'amendement 118 de Mme Dominique Voynet, sont financièrement irrecevables. Il en est de même de l'amendement 89 de Mme Dominique Voynet qui n'a pas été gagé. Ces amendements ne seront donc pas examinés par la commission. Il a enfin proposé que la discussion sur l'article 2 (rapport annexé) soit reportée in fine.
Article 1er |
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Auteur |
N° |
Objet |
Sort de l'amendement |
D. Boulaud et les membres du groupe Socialiste |
64 |
Report à 2010 du début de la programmation |
M. Didier Boulaud a estimé que le retard pris par l'examen du projet de loi, alors que la seconde moitié de l'exercice 2009 était déjà entamée, justifiait que la programmation démarre en 2010.
Article 3 |
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Auteur |
N° |
Objet |
Sort de l'amendement |
D. Boulaud et les membres du groupe Socialiste |
66 |
Report à 2010 du début de la programmation |
Rejeté |
M. Daniel Reiner, présentant l'amendement de suppression n° 69, a estimé que l'article 5 requérait une discussion spécifique car il induisait de nombreux changements, dont une excessive concentration des pouvoirs au profit du Président de la République et un glissement vers le ministère de l'intérieur auquel la gendarmerie a été rattachée. Cet article 5 constitue une validation du Livre blanc qui n'a fait l'objet que d'une discussion très simplifiée au Sénat et à l'Assemblée nationale. Il a déploré la confusion introduite dans les notions de sécurité et de défense.
M. Jean-Pierre Chevènement a regretté que le souhait du rapporteur d'adopter sans modification le texte de l'Assemblée nationale aboutisse à priver le Sénat de l'exercice de son droit d'amendement. Présentant ses amendements n° 2 à 9, il a estimé nécessaire de distinguer la politique de défense et la politique de sécurité, faute de quoi l'on s'orienterait vers le modèle nord-américain de la sécurité nationale. Une confusion entre les deux notions risque de créer des dérives, avec des conséquences dangereuses pour la sécurité intérieure.
En réponse, M. Josselin de Rohan, président, a rappelé que, au cours des vingt dernières années, le Sénat avait émis un vote conforme sur toutes les LPM, à l'exception de celle portant sur la période 1990-1993, présentée par M. Jean-Pierre Chevènement, alors ministre de la défense, qu'il avait rejetée. Cette loi avait d'ailleurs été considérée comme adoptée, sans vote, par l'Assemblée nationale, en application de l'article 49-3 de la Constitution.
S'agissant de l'article 5 du projet de loi, il a rappelé que le Président de la République est et demeure, depuis 1958, le chef des armées, la Constitution lui conférant en ce domaine des responsabilités éminentes ; il n'y a donc aucune dérive dans ce texte.
Il a indiqué que la notion de défense et de sécurité nationale, prenait en compte tous les risques et menaces pouvant porter atteinte à la vie de la nation. La sécurité quotidienne des personnes et des biens n'entre en aucun cas dans le champ de la sécurité nationale. En revanche, certaines menaces se situent à la limite du civil et du militaire, et ce nouveau concept répond donc de façon adéquate à ces questions. La sécurité nationale n'est pas la sécurité intérieure.
Article 8 |
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Auteur |
N° |
Objet |
Sort de l'amendement |
M. Boutant et les membres du groupe Socialiste |
73 |
Consultation prioritaire des organismes d'HLM lors des cessions d'immeubles de la défense |
M. Michel Boutant a indiqué que l'amendement n° 73 proposait que les organismes d'HLM soient préalablement consultés sur les projets de cessions immobilières du ministère de la défense afin de leur permettre de se porter acquéreurs.
M. Hervé Morin, ministre de la défense, a précisé que le ministère de la défense était d'ores et déjà en contact avec les bailleurs sociaux. Ainsi, la ville de Paris a indiqué qu'elle était intéressée par plusieurs emprises pour y réaliser des logements sociaux. Toutefois, une consultation systématique ferait perdre du temps, notamment pour des emprises immobilières manifestement inadaptées à la construction de logements sociaux.
M. Michel Boutant a estimé que son amendement, qui prévoit une consultation directe des bailleurs sociaux, pouvait permettre de dépasser les blocages que l'on constate dans certaines communes ne voulant pas honorer leurs obligations en matière de nombre de logements sociaux.
M. Yves Pozzo di Borgo a souligné que l'ajout de telles contraintes n'était pas opportun en cette période de marché atone.
Mme Dominique Voynet a proposé, par son amendement n° 88, de supprimer l'article 9 qui risque de mettre en difficulté les acquéreurs potentiels lorsque les coûts de dépollution réels s'avèreront supérieurs à ceux estimés lors de la vente. Elle a estimé que les collectivités territoriales ne disposaient pas des sommes nécessaires à la dépollution des terrains militaires qu'elles sont susceptibles d'acquérir.
M. Hervé Morin, ministre de la défense, a rappelé que la législation actuelle prévoyait la prise en charge du surplus des coûts de dépollution par l'Etat lorsque ceux-ci s'avéraient supérieurs à ceux estimés lors de la vente et déduits du coût d'acquisition. Cette obligation a été inscrite dans le code général de la propriété publique. Il est souhaitable que, grâce à ces dispositions, le ministère de la défense, propriétaire d'un vaste patrimoine, en partie pollué, qu'il souhaite mettre en vente, puisse trouver plus rapidement des acquéreurs à un juste prix.
Article 10 |
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Auteur |
N° |
Objet |
Sort de l'amendement |
J.P. Chevènement |
11 |
Suppression de l'article |
Rejeté |
D. Boulaud et les membres du groupe Socialiste |
74 |
Suppression de l'article |
M. Jean-Pierre Chevènement, présentant son amendement n° 11, a estimé que l'Etat devait continuer à exercer le contrôle les industries de défense, ou du moins de leurs activités essentielles, des exceptions étant envisageables, par exemple pour la maintenance. S'agissant de DCNS, il a indiqué que si la création de filiales avec participation minoritaire s'avérait indispensable, par exemple pour contribuer à des regroupements européens, rien n'empêchait de procéder par voie législative. Il a mis en garde contre l'argument tendant à diluer le contrôle de l'Etat, au nom de la réalisation d'alliances avec des partenaires privés européens, au risque d'affaiblir le coeur des capacités industrielles et technologiques de défense. Il a donc proposé de supprimer l'article 10.
M. Daniel Reiner, à l'appui de l'amendement de suppression n° 74, a estimé lui aussi qu'il était primordial de pérenniser la base industrielle française de défense.
M. Hervé Morin, ministre de la défense, a insisté sur l'enjeu que constituait pour DCNS la possibilité d'alliance avec des partenaires européens. Il a cité le projet de constitution d'un groupe européen dans le domaine des torpilles, avec les Italiens. De même, la création en France d'une filière industrielle de démantèlement des navires de guerre, aujourd'hui inexistante, pourrait passer par un partenariat entre DCNS et d'autres acteurs spécialisés. Par ailleurs, l'article ne remet pas en cause le caractère public de DCNS.
Mme Nathalie Goulet s'est interrogée sur la possibilité ouverte par l'article d'engager DCNS dans des constructions en pleine mer (off-shore).
M. Josselin de Rohan, président, a rappelé l'échec des expériences tentées dans ce domaine, il y a une dizaine d'années.
M. Jean-Pierre Chevènement a souligné la nécessité de maintenir sous le contrôle de l'Etat la fabrication des matériaux indispensables à la propulsion des missiles stratégiques.
En réponse, M. Hervé Morin, ministre de la défense, a rappelé que de nombreuses sociétés privées concouraient déjà très largement aux différentes composantes de la dissuasion française. Il a souligné l'extrême complexité de l'organisation industrielle qui préside à la réalisation de chacun des trois étages de propulsion du missile M51, et il a indiqué que sa rationalisation était une préoccupation ancienne, y compris de M. Alain Richard, lorsqu'il était ministre de la défense, à l'origine du projet « Héraklès ». La privatisation prévue par l'article 11 n'exclura pas un contrôle étroit de l'État.
M. Daniel Reiner s'est déclaré dubitatif sur les arguments avancés en faveur de la privatisation de la SNPE et a jugé préférable, dans le doute, de supprimer l'article 11.
M. Xavier Pintat a rappelé la spécificité de la société SNPE et de ses savoir-faire, et la nécessité de clarifier son projet industriel pour l'avenir du groupe. Il a également souligné l'importance d'une adhésion des personnels à ce projet et jugé indispensable de mieux les informer des évolutions envisagées.
M. Daniel Reiner a retiré l'amendement n° 76 après que M. Josselin de Rohan, président, a précisé que les orientations de la politique industrielle figuraient parmi les éléments devant figurer dans le rapport annuel d'exécution prévu par le projet de loi.
Article 12 |
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Auteur |
N° |
Objet |
Sort de l'amendement |
J.P. Chevènement |
13 |
Définition limitative des lieux abritant ordinairement des éléments couverts par le secret de la défense nationale |
M. Jean-Pierre Chevènement a indiqué que son amendement n° 13 visait à simplifier la procédure complexe résultant des longs débats de l'Assemblée nationale, en proposant un dispositif clair, limité aux lieux qui touchent réellement au coeur de la sécurité de l'Etat, à savoir les cabinets du Président de la République, du Premier ministre, des ministres de la défense et de l'intérieur, et les services de renseignement.
M. Josselin de Rohan, président, a estimé que les lieux abritant des éléments classifiés, pour lesquels une procédure particulière de perquisition était nécessaire, étaient beaucoup plus nombreux que ceux visés par l'amendement n° 13.
M. Hubert Haenel a estimé indispensable qu'un magistrat soit accompagné d'une personne de garantie pour effectuer des perquisitions dans des lieux abritant des éléments protégés par le secret de la défense nationale. Il a fait état de fuites intolérables de documents protégés, en principe couverts par le secret de l'instruction, et a considéré que, grâce aux modifications apportées par l'Assemblée nationale, l'article 12 garantissait l'accomplissement des perquisitions légitimes tout en donnant un caractère évolutif à la liste des lieux protégés.
M. Jean-Pierre Chevènement a estimé que cet objectif du projet de loi n'était pas clairement défini. L'essentiel était à ses yeux de préserver la séparation des pouvoirs, en évitant que des prérogatives essentielles de l'exécutif en matière de sécurité nationale ne soient mises en cause. L'application de règles uniformes à tous les lieux abritant des éléments classifiés, du sommet de l'Etat jusqu'aux sous-préfectures, ne lui paraissait pas justifiée.
M. François Pillet, rapporteur pour avis de la commission des lois, a estimé que les articles 12 à 14 visaient à rechercher un difficile équilibre entre la préservation des intérêts essentiels de l'Etat et les prérogatives juridictionnelles. Il a précisé que, au cours des auditions auxquelles il avait procédé, il avait pu constater, auprès des organisations professionnelles des magistrats instructeurs ou des avocats, qu'un certain nombre de craintes avaient été apaisées après les travaux de l'Assemblée nationale. Il a indiqué que la liste des lieux abritant des éléments classifiés, qu'il ne fallait pas confondre avec celle des lieux classifiés, était beaucoup plus large que le champ visé par l'amendement n° 13 et ne pouvait être déterminée par la loi, la formule de l'arrêté étant plus adaptée. Revenant sur le caractère, à ses yeux équilibré, du dispositif proposé, il a estimé qu'il n'était sans doute pas figé et pourrait évoluer au vu de sa mise en oeuvre et des réformes qui affecteront les procédures d'instruction.
M. Robert Badinter, présentant l'amendement n° 85, a souhaité que la Commission consultative du secret de la défense nationale (CCSDN) donne un avis conforme sur l'établissement de la liste des lieux abritant des éléments classifiés. Il s'est inquiété du caractère extensif de la définition prévue par le projet de loi, rappelant, en outre, qu'elle peut s'appliquer à des entreprises et pas seulement à des services de l'Etat.
M. Jean-Pierre Chevènement a indiqué que l'intervention de la CCSDN dans la procédure, que son avis soit conforme ou consultatif, ne changeait rien quant au fond. Les lieux visés par une procédure spécifique ne peuvent être que ceux justifiant une protection particulière au regard de la préservation de la séparation des pouvoirs.
M. Josselin de Rohan, président, a souligné qu'un avis conforme modifierait la nature même de la CCSDN, dont le rôle est par définition consultatif. Par ailleurs, la liste établie résulte d'éléments objectifs. La CCSDN ne peut avoir d'avis sur les lieux dans lesquels l'exécutif détient des éléments classifiés.
M. Jean-Pierre Chevènement a proposé, par son amendement n° 14, de supprimer les dispositions spécifiques aux lieux classifiés.
M. Robert Badinter a considéré que les lieux classifiés étaient, de fait, sanctuarisés et qu'il était dangereux de définir des lieux dans lesquels les magistrats ne peuvent pas se rendre. Comme la déclassification dépend aussi de l'exécutif, le risque pour un magistrat de ne pas voir aboutir sa demande de perquisition est important.
M. Josselin de Rohan, président, a répondu que, aux termes des dispositions législatives et règlementaires existantes, le seul fait de pénétrer dans certains lieux constitue une compromission, car il donne déjà accès, visuellement, à des informations qui relèvent du secret de la défense nationale. Le juge ne peut aujourd'hui accéder à ce type de lieux. Le projet de loi présente le mérite d'en prévoir la définition limitative et de mettre en place une procédure y permettant les perquisitions.
M. François Pillet, rapporteur pour avis de la commission des lois, a rappelé que, dans son avis du 5 avril 2007, le Conseil d'Etat avait souligné la compromission qui pouvait résulter de la seule présence du juge dans une zone protégée. La définition par la loi d'un régime des lieux classifiés répond donc à une invitation du Conseil d'Etat. Il lui a par ailleurs semblé que les deux amendements de suppression de MM. Jean-Pierre Chevènement et Robert Badinter relevaient de philosophie différentes : dans le premier cas, par cohérence avec l'amendement n°13, il s'agit de garantir la protection de lieux relevant de l'exercice de l'autorité de l'Etat ; dans le second, de poser pour principe le libre accès du juge en tout lieu.
M. Hervé Morin, ministre de la défense, a confirmé que cette initiative législative découlait de l'avis émis par la plus haute juridiction administrative française. Il a confirmé que la liste des lieux classifiés répondait à des critères extrêmement restrictifs et que dix-neuf sites à caractère technique ou opérationnel avaient été répertoriés comme susceptibles d'y figurer.
M. Robert Badinter a de nouveau souligné le risque qu'il y aurait à laisser l'exécutif seul la possibilité de définir les lieux où il peut s'opposer au déroulement de perquisitions judiciaires.
M. Robert Badinter a indiqué que l'amendement n° 82 visait à soumettre aux nouvelles dispositions de l'article 13 de la Constitution les nominations par le Président de la République des membres de la CCSDN.
M. Josselin de Rohan, président, a précisé que, sur les cinq membres de la CCSDN, deux sont des parlementaires désignés par le Président de leur Assemblée, les trois autres étant désignés par le Président de la République sur une liste de six noms établie par les chefs des trois plus hautes juridictions françaises. La procédure de l'article 13 de la Constitution ne lui a pas paru appropriée à ce type de nomination pour lequel le pouvoir discrétionnaire du Président de la République est déjà très encadré.
Article 14 |
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Auteur |
N° |
Objet |
Sort de l'amendement |
R. Badinter et les membres du groupe Socialiste |
84 |
Consultation de la CCSDN sur la déclassification des lieux classifiés |
Rejeté |
La commission a ensuite examiné l'article 2, précédemment réservé, et les amendements portant sur le rapport annexé au projet de loi.
Article 2 |
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Auteur |
N° |
Objet |
Sort de l'amendement |
D. Boulaud et les membres du groupe Socialiste |
65 |
Remplacement du dispositif par la présentation projet de loi d'orientation pour la période 2010-2014 |
M. Didier Boulaud a estimé que la recherche d'un consensus national sur les questions de défense était nécessaire, et a proposé de remplacer le dispositif du rapport annexé par la présentation d'un projet de loi d'orientation relative à la politique de défense et à ses moyens portant sur la période 2010-2014.
Mme Dominique Voynet, présentant son amendement n° 90, a considéré que la dissuasion nucléaire était une stratégie qui s'expliquait dans le contexte de la guerre froide, mais que, aujourd'hui, les menaces étant plus diffuses, la dissuasion ne constituait plus une réponse adéquate.
M. Josselin de Rohan, président, a estimé qu'il s'agissait d'une question de fond, mais que la dissuasion demeurait une garantie fondamentale de la sécurité de la France.
M. Hervé Morin, ministre de la défense, a souligné que cette discussion, légitime, méritait d'être menée, mais que la France ne pouvait agir de manière unilatérale.
Article 2 - Rapport annexé |
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1 - La politique de défense dans la stratégie de défense de la France |
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J.P. Chevènement |
17 |
Distinction entre la politique de défense et la politique de sécurité |
M. Jean-Pierre Chevènement a estimé que les notions de défense et de sécurité nationale devaient être distinguées, car elles obéissaient à des objectifs différents.
M. Jean-Pierre Chevènement a souligné que la mondialisation, qui a fait l'objet de longues analyses dans le Livre blanc, constituait un concept fourre-tout sur lequel une politique de défense ne pouvait être fondée. Il a proposé, par ces amendements n° 18 et 19, de se fonder sur la réalité des Etats.
Article 2 - Rapport annexé |
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1-1 La mondialisation et la nouvelle stratégie de sécurité nationale |
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D. Voynet |
93 |
Incitation au développement du pouvoir de médiation et de prévention de l'Union européenne |
Mme Dominique Voynet a évoqué la nécessité de coordonner les démarches de prévention des crises et de médiation au sein même de l'Union européenne.
M. Josselin de Rohan, président, a estimé que ces fonctions étaient trop vagues et qu'une autre partie du rapport annexé soulignait le rôle majeur de l'Union européenne.
M. Jean-Pierre Chevènement a souligné la nécessité de fixer les priorités stratégiques de la France de façon plus cohérente, en privilégiant l'Europe, puis le continent africain. Il a jugé la notion « d'arc de crise » sujette à caution, car trop directement inspirée des priorités américaines sur le Grand Moyen-Orient.
En réponse, M. Josselin de Rohan, président, a souligné qu'il était difficile de ne pas considérer le Proche-Orient comme un foyer majeur d'instabilité.
M. Didier Boulaud a contesté la singularisation de la menace djihadiste. Il a estimé que la présence de cette mention dans le projet de loi était révélatrice d'un certain tropisme qui avait inspiré les travaux du Livre blanc.
Mme Dominique Voynet a relevé que d'autres menaces terroristes visaient plus directement le territoire national. Par ailleurs, elle a estimé que d'autres risques majeurs étaient omis, comme ceux liés aux approvisionnements en eau ou en énergie.
M. Josselin de Rohan, président, a répondu que le terrorisme d'origine djihadiste était bien une réalité.
M. Hervé Morin, ministre de la défense, a souligné que ses informations lui permettaient d'affirmer qu'il s'agit de la principale menace contre la France.
M. Jean-Pierre Chevènement a estimé nécessaire d'inscrire les opérations de stabilisation dans le cadre d'un mandat de l'ONU et il a rappelé que cela n'avait pas été le cas lors du conflit du Kosovo.
M. Josselin de Rohan, président, a rappelé que le respect de la légalité internationale est l'un des sept principes directeurs posés par le Livre blanc pour les engagements extérieurs.
M. Jean-Pierre Chevènement, présentant son amendement n° 27, a souligné que l'état-major de l'Union européenne ne disposait à l'heure actuelle que de faibles moyens, ce qui rendait les opérations européennes totalement dépendantes de l'état-major de l'OTAN.
M. Didier Boulaud a relevé que l'absence de tout progrès sur les capacités de commandement de l'Union européenne constituait un échec majeur de la présidence française, la France ayant ainsi rejoint le commandement intégré de l'OTAN sans obtenir la moindre contrepartie.
M. Josselin de Rohan, président, a rappelé qu'aucune loi française ne pouvait contraindre nos alliés européens. C'est la raison pour laquelle, si l'objectif poursuivi est bien de renforcer l'état-major européen, la décision n'incombe pas à la France seule.
M. Jean-Pierre Chevènement a précisé que l'amendement n° 28 visait à souligner que le renforcement de la politique de sécurité et de défense était l'une des conditions de la rénovation de l'OTAN, l'amendement n° 29 insistant sur la nécessaire autonomie de la France dans la définition de ses concepts doctrinaux, qui pourrait être compromise par l'entrée dans le commandement intégré de l'OTAN.
M. Jean-Pierre Chevènement a contesté la notion de contrats opérationnels, que son amendement n° 32 visait à supprimer. Il s'est étonné de ce que le ministre de la défense envisage de conclure des contrats avec les armées. Il a également proposé de supprimer, par son amendement n° 34, la notion de résilience. Enfin, il s'est inquiété de la diminution du dispositif prépositionné en Afrique, qui se réduirait à deux bases seulement. Il s'est notamment demandé comment une seule base pourrait suffire à couvrir l'ensemble de la façade occidentale de l'Afrique.
M. Daniel Reiner s'est également inquiété de la réduction du dispositif militaire français en Afrique de l'Ouest. Il a déploré le manque de clarté sur les projets d'évolution des forces prépositionnées.
M. Josselin de Rohan, président, a souligné que les déploiements hors métropole étaient aujourd'hui excessivement dispersés. La contraction du dispositif prépositionné en Afrique lui a paru d'autant plus justifiée que la France a ouvert une base aux Emirats Arabes Unis, dans une région où ses intérêts sont également importants.
M. Hervé Morin, ministre de la défense, a rappelé les raisons qui militent pour une évolution du dispositif prépositionné. Il a également précisé que la présence militaire française ne se réduisait pas aux seules bases permanentes. Il n'est pas exclu de conserver certains points d'appui. La France peut être militairement présente autrement que par une base permanente, comme en témoigne son implication au Tchad au travers de l'opération Epervier.
M. Jean-Pierre Chevènement, à propos de son amendement n° 36, a jugé inopportun de mentionner un chiffre précis pour l'allonge des moyens de projection, dans la mesure où cela peut donner le sentiment de désigner un adversaire.
Mme Dominique Voynet a indiqué que son amendement n° 101 visait à supprimer la référence à l'avion A400M en raison des incertitudes actuelles sur l'avenir de ce programme.
M. Jean-Pierre Chevènement a souligné qu'en indiquant qu'elle disposerait de moins de 300 têtes nucléaires, la France se référait à la totalité de son arsenal, alors que les Etats-Unis et la Russie, qui ont signé en 2002 un traité de réduction de leurs arsenaux au niveau de 1 700 à 2 200 têtes nucléaires, désignent uniquement les têtes opérationnellement déployées, ce qui ne comptabilise pas les têtes conservées en réserve ou en attente de démantèlement. Il a indiqué que la France disposait en permanence d'une centaine seulement de têtes nucléaires déployées. Il a ajouté que son amendement n° 41 visait à le préciser, afin qu'il n'y ait discordance entre les références utilisées par les deux grandes puissances nucléaires, au moment où elles vont peut-être engager une nouvelle réduction de leur arsenal, et celles utilisées par la France.
M. Jean-Pierre Chevènement a jugé que l'Etat devait conserver l'entière maîtrise de ses réseaux de transmission militaires et il a proposé, par son amendement n° 48, de supprimer la possibilité de les exploiter dans le cadre d'un partenariat public-privé.
Appuyant l'amendement n° 51 de M. Jean-Pierre Chevènement, M. Didier Boulaud s'est inquiété que les transmissions militaires par satellites puissent être confiées au secteur privé.
Mme Dominique Voynet a considéré que le recours aux décorations constituait un mauvais substitut à la nécessaire amélioration des conditions de vie et de statut du personnel militaire.
Article 2 - Rapport annexé (6 - Les ressources) |
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Auteur |
N° |
Objet |
Sort de l'amendement |
J.P. Chevènement |
58 |
Suppression de la référence à la notion de contrats opérationnels |
M. Jean-Pierre Chevènement a estimé que le changement de dénomination des conseillers de défense en conseillers de sécurité nationale entraînerait des débats au sein des conseils municipaux et serait nuisible à l'esprit de défense de la nation.
Aux termes de la discussion, M. Daniel Reiner a interrogé le ministre sur le statut exact du Livre blanc.
En réponse, M. Hervé Morin, ministre de la défense, a précisé que ce document définissait la politique de la défense et les orientations stratégiques de la France sous l'autorité du Président de la République. De tels documents, dépourvus de valeur normative, ont précédemment été établis en 1972 et 1994.
La commission a adopté sans modification l'ensemble du projet de loi et le rapport annexé.
Nomination de rapporteurs
La commission a ensuite nommé rapporteurs :
- M. Michel Boutant sur le projet de loi n° 459 (2008-2009) autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Maurice relatif au séjour et à la migration circulaire de professionnels ;
- Mme Joëlle Garriaud-Maylam sur le projet de loi n° 1731 (AN - XIIIe législature) autorisant la ratification de la convention sur les armes à sous-munitions ;
- M. Christian Cambon sur le projet de loi n° 1732 (AN - XIIIe législature) autorisant la ratification de la convention d'extradition entre la République française et le Royaume du Maroc ;
- M. Christian Cambon sur le projet de loi n° 1733 (AN - XIIIe législature) autorisant l'approbation de la convention d'entraide judiciaire en matière pénale entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume du Maroc.
Gendarmerie nationale - Désignation de candidats appelés à faire partie de l'éventuelle commission mixte paritaire
Puis la commission a procédé à la désignation de sept candidats titulaires et de sept candidats suppléants appelés à faire partie de l'éventuelle commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif à la gendarmerie nationale.
Ont été désignés comme candidats titulaires : MM. Josselin de Rohan, Jean Faure, Jean-Patrick Courtois, Joseph Kergueris, Jean-Louis Carrère, Daniel Reiner et Mme Michelle Demessine, et comme candidats suppléants : MM. Hubert Haenel, Charles Pasqua, André Dulait, André Trillard, Didier Boulaud, Philippe Madrelle et Jean-Pierre Chevènement.