Mardi 6 novembre 2007
- Présidence de M. Jean François-Poncet, vice-président, et de M. Hubert Haenel, président de la Délégation pour l'Union européenneUnion européenne - Traité simplifié - Audition de M. Pierre Sellal, représentant permanent de la France auprès de l'Union européenne
Conjointement avec la Délégation pour l'Union européenne, la commission a entendu M. Pierre Sellal, Ambassadeur, représentant permanent de la France auprès de l'Union européenne.
M. Pierre Sellal a tout d'abord rappelé que lors de sa dernière audition, une situation de crise prévalait après l'échec du référendum. La situation actuelle était profondément différente grâce à l'accord réalisé autour du traité simplifié.
Il a relevé que ce traité, dit modificatif, était très proche du traité simplifié proposé par Nicolas Sarkozy, alors candidat à l'élection présidentielle, en septembre 2006. Tous les observateurs bruxellois ont été frappés par la rapidité de cette sortie de crise qui ne sera cependant achevée qu'après la ratification du traité par les 27 Etats membres et son entrée en vigueur, si possible, au 1er janvier 2009.
Il a souligné que le « Traité simplifié » ne signifiait pas « simplicité ». C'est un traité qui reflète la complexité d'un système institutionnel régissant l'exercice quasi fédéral de certaines compétences centralisées en impliquant plusieurs institutions dans le cadre d'une répartition des pouvoirs entre des Etats souverains et l'Union.
Il a rappelé que la simplicité institutionnelle n'était d'ailleurs pas un objectif en soi et qu'il importait avant tout que le système soit capable de prendre des décisions efficaces, fondées, explicables et légitimes. Pour autant, le traité reste un traité simplifié au sens de la démarche retenue par le Conseil européen en juin et confirmée depuis par l'accord politique d'octobre. Fondamentalement, il s'est agi de tirer les leçons de l'échec, en 2005, de la démarche constitutionnelle et de revenir à une forme plus traditionnelle d'adaptation des institutions et de modification des traités.
Cette démarche constitutionnelle consistait en effet à refonder les traités européens, à réécrire dans un seul instrument juridique tous les traités qui s'étaient succédé depuis le traité de Rome et à donner à cette refondation juridique un caractère aussi ambitieux que possible pour conférer à l'ensemble européen une entité politique pouvant conduire à un Etat unitaire.
Il a souligné que le nouveau traité revenait à la méthode traditionnelle qui consiste à apporter des modifications aux traités en vigueur, sans en changer l'organisation générale, ni même la numérotation. Le nouveau traité ne cherche pas à redéfinir les grands objectifs de l'Union. Il modifie simplement certaines règles à raison des leçons de l'expérience et des besoins fonctionnels dans le contexte d'une Europe élargie. Le traité constitutionnel avait une autre ampleur - ne serait-ce qu'en nombre de pages - parce qu'il intégrait la Charte des droits fondamentaux et les politiques de la troisième partie qu'il décrivait dans le détail.
Ce traité s'inscrit ainsi dans la ligne des précédents traités modificateurs, comme ceux d'Amsterdam ou de Nice. Seul, le traité de Maastricht avait apporté des modifications de fond au traité de Rome. Le traité constitutionnel lui-même n'apportait pas de changements aussi profonds en termes de compétences ou de fonctionnement que le traité de Maastricht.
M. Pierre Sellal a indiqué que cette simplicité ne se faisait cependant pas au détriment du contenu, notamment des modifications institutionnelles et procédurales qui avaient été imaginées par la Convention et retenues par la Conférence intergouvernementale, parfois avec un ajustement de vocabulaire, comme pour le ministre des affaires étrangères, dont le titre sera finalement celui de Haut représentant. Avec l'instauration de nouveaux délais, comme pour l'application du mécanisme de la double majorité, qui est reportée jusqu'en 2014 à la demande de la Pologne. Les autres novations institutionnelles significatives se retrouvent néanmoins dans le nouveau traité, comme la présidence stable du Conseil européen pendant deux ans et demi ou la présidence du Conseil Relations extérieures par le Haut représentant.
Il a noté que d'autres modifications relevaient aussi de préoccupations et d'initiatives françaises.
Il a d'abord évoqué la concurrence, qui n'est plus un objectif, mais simplement un moyen de l'Union, soulignant que cette modification a été souvent mal interprétée. Elle ne visait pas à priver l'Union de toute politique de concurrence, mais à définir la concurrence comme un instrument pour poursuivre des objectifs plus généraux : la croissance, l'emploi, la prospérité. Cette nuance aura nécessairement un impact lorsque la Cour de Justice sera amenée à se prononcer dans des cas d'espèce.
Par ailleurs, a poursuivi M. Pierre Sellal, un protocole sur les services publics a été annexé au traité à l'initiative des Néerlandais, soutenus par les Français. Ce protocole, de même valeur que le traité, comporte et donne des garanties que l'organisation des services publics et leur financement par les Etats membres seront compatibles avec les règles du marché intérieur et la politique de la concurrence.
Le traité contient en outre un thème nouveau : celui de la protection des citoyens européens qui marque la reconnaissance du fait que les Européens attendent de l'Union qu'elle défende leurs intérêts face à des comportements déloyaux ou illicites. Elle figure parmi les objectifs, constituant ainsi une réponse au message envoyé par la majorité du peuple français lors du référendum de 2005.
M. Pierre Sellal a noté que le changement le plus important apporté par le nouveau traité tenait certainement aux conditions faites au Royaume-Uni, le référendum français s'étant traduit, de façon paradoxale, par des exigences britanniques de dérogations supplémentaires. Le renoncement à la démarche constitutionnelle, la confirmation de l'exclusion du Royaume-Uni de la monnaie unique et de Schengen, l'absence pour lui de contraintes dans la mise en oeuvre des coopérations policières et judiciaires et la non-application juridique de la Charte des droits fondamentaux devant les tribunaux britanniques sont les conditions exigées par les Britanniques pour éviter une consultation référendaire.
Il a considéré que ce statut d'exception n'était pas une victoire pour les Anglais, comme certains l'avaient estimé un peu superficiellement. Ce statut dérogatoire n'empêche pas les autres pays d'engager les politiques qu'ils veulent mener. Un tiers du mandat de la Conférence intergouvernementale portait d'ailleurs sur des exceptions sollicitées par les Britanniques, apportant la preuve qu'ils se situaient en dehors d'un système qu'ils ne pouvaient influencer.
S'agissant du processus de ratification en France, il a souligné l'importance du choix de la voie parlementaire et de son annonce précoce, dès octobre 2006, par le candidat à l'élection présidentielle. Ce choix a permis de convaincre tous ceux qui restaient très attachés à la Constitution - notamment ceux qui l'avaient déjà ratifiée à l'issue d'un processus de consultation référendaire. La condition exprimée par les partenaires de la France pour s'engager dans un nouveau processus d'élaboration d'un traité était la garantie que notre pays - devenu pour eux imprévisible depuis l'échec du référendum - ne manquerait pas cette fois à sa signature, surtout dès lors qu'il était lui-même à l'origine d'un nouveau processus.
Evoquant la phase des ratifications, M. Pierre Sellal a rappelé qu'avait été fixé l'objectif d'achèvement des vingt-sept ratifications au 31 décembre 2008, pour une entrée en vigueur du traité au 1er janvier 2009. Il a estimé que ce calendrier était plausible parce que de nombreux pays avaient déjà adopté la précédente Constitution, qu'il existe par ailleurs une volonté générale d'en terminer avec cet exercice institutionnel en cours depuis plus d'une dizaine d'années et qu'un seul pays devrait procéder par voie référendaire, l'Irlande.
Il a souligné qu'après la levée de cette hypothèque institutionnelle, la présidence française du second semestre 2008 interviendrait à un moment charnière, celui du dernier semestre complet de législature du Parlement européen, et, compte tenu de l'importance de la codécision entre le Conseil et le Parlement, celui du dernier semestre utile, et aussi celui du dernier semestre plein de la Commission présidée par José Manuel Barroso. Dès le mois de février 2009, le Parlement interrompra ses travaux avant les élections européennes du printemps 2009 et une nouvelle Commission entrera en fonction en novembre 2009. La présidence française va ainsi se dérouler à la fin d'un cycle politique. Elle aura le souci d'achever le processus législatif entamé et de régler un certain nombre de dossiers qui se sont accumulés ou ont été retardés du fait de l'échec du projet de Constitution.
Il a rappelé que la présidence française serait aussi le moment de tracer des perspectives et d'ouvrir des pistes pour la période suivante sur la politique agricole commune (PAC) pour laquelle la Commission vient d'engager l'exercice du « bilan de santé » qui devrait déboucher sur des propositions au printemps 2008, ainsi que sur la révision à mi-parcours du cadre financier 2007-2013 établi fin 2005. Il ne s'agira pas de se lancer de manière prématurée dans une nouvelle négociation budgétaire, mais de poser des jalons pour l'avenir pour l'après 2013 sans être contraint par les enjeux immédiats d'une négociation en cours.
M. Pierre Sellal a rappelé que la présidence était d'abord une fonction essentielle de l'Union exercée par un Etat membre, dont la première responsabilité était de faire fonctionner le système institutionnel, exercice de plus en plus difficile dans une Europe nombreuse, diverse et dans une architecture complexe. L'exercice sera d'autant plus important que la présidence française sera la dernière ou l'une des toutes dernières de plein exercice. En effet, dès l'entrée en vigueur du nouveau traité sous présidence tchèque, la présidence sera partagée entre la présidence tournante - qui subsistera dans la plupart des domaines -, la présidence stable du Conseil européen et la présidence du Haut représentant pour le Conseil affaires étrangères.
Il a souligné que la présidence devait couvrir l'ensemble des politiques européennes, ce qui rendait plus difficile la sélection des priorités.
Quatre priorités fondamentales ont déjà été exprimées par le Président de la République. D'abord la croissance et l'emploi à partir d'actions inspirées de la stratégie de Lisbonne : économie de la connaissance et de l'innovation, dimension externe (notamment par la défense de nos intérêts et l'exigence de réciprocité dans les négociations internationales). Ensuite l'énergie et le changement climatique qui, dans les prochaines années, vont constituer une part essentielle de la production législative européenne : il s'agit de traduire en termes de normes et d'objectifs internationaux le cadre arrêté en juin dernier par le Conseil européen. Par ailleurs, la politique de gestion des flux migratoires : relations avec les pays tiers d'origine et de transit, construction d'une politique d'asile commune, progrès des politiques d'intégration dans les Etats membres, lutte contre l'immigration illégale. Enfin, la politique de défense européenne.
En conclusion, M. Pierre Sellal a souligné que, compte tenu de la réunion du Conseil européen avant la mi-décembre 2008, la présidence française serait courte. Un Conseil européen à mi-parcours aura lieu en octobre. En fonction des ordres du jour de ces deux Conseils européens, une programmation des conseils des ministres et des 220 groupes de travail est déjà engagée. La présidence française suivante n'intervenant qu'en 2022, la tâche était d'autant plus exaltante.
Evoquant les ratifications, M. Jean François-Poncet s'est inquiété d'une possible tentation de la République tchèque de retarder sa ratification pour pouvoir profiter d'une présidence de plein exercice. Il a estimé que le Président tchèque, adversaire résolu de Bruxelles, voudrait sans doute profiter de sa présidence pour donner des leçons. Il a souhaité savoir quelles seraient les relations entre le futur président stable du Conseil européen et le Président de la Commission désigné par le Parlement européen. Il s'est interrogé sur l'attitude à adopter par la présidence française, ses partenaires attendant certainement une certaine retenue. Enfin, il s'est interrogé sur le fait que les Britanniques participent pleinement à la définition des politiques pour les infléchir, mais s'en exonèrent finalement et n'y participent pas.
M. Pierre Sellal a apporté les éléments de réponse suivants :
- la première présidence à appliquer les stipulations du nouveau traité pourrait estimer que son champ de responsabilité est un peu réduit, mais en réalité, elle aura la tâche très lourde de faire vivre pour la première fois ces dispositions nouvelles. Si ce n'est pas la République tchèque, ce sera la Suède. La situation politique complexe à Prague peut justifier une certaine vigilance. Mais la France travaille d'ores et déjà avec ses partenaires tchèque et suédois à la coordination des présidences successives. Mais il n'est pas possible de contraindre juridiquement un Etat membre à terminer son processus de ratification dans un délai donné. La question se pose également pour la Belgique, où le processus exige le vote de sept assemblées parlementaires.
- une des tâches de la présidence française sera de travailler à la mise en place des nouvelles structures issues du traité, notamment le nouveau Haut représentant pour la politique étrangère qui sera à la fois le président du Conseil des affaires étrangères - à ce titre mandataire du Conseil et des Etats membres - et le vice-président de la Commission en charge de la coordination de l'action extérieure. L'institution du Haut représentant est un bon compromis entre le maintien du rôle des Etats dans la politique étrangère et le non-amoindrissement des pouvoirs de la Commission. Mais, dans la pratique, sa fonction à la fois de mandataire des Etats et de représentant de la Commission sera difficile à ajuster. Il disposera d'un service d'action extérieure commun composé à la fois de fonctionnaires de la Commission, du Conseil et de diplomates nationaux. Mais il reste à préciser le périmètre de ce service et à organiser son fonctionnement ;
- les relations entre la présidence tournante, qui continuera à exister, et les présidences fixes du Conseil européen et du Conseil des affaires étrangères, les relations entre ces présidences, le rôle du Premier ministre de la présidence tournante, les relations entre le Président du Conseil européen et le président de la Commission désigné après les élections au Parlement européen, l'articulation entre le Président du Conseil européen et le Haut représentant dans leurs relations avec les pays tiers sont autant de questions sur le fonctionnement des nouvelles institutions ; il faut maintenant définir dès son entrée en vigueur les procédures et les mécanismes qui permettront de faire fonctionner harmonieusement le traité dès son entrée en vigueur. Ce travail de clarification et d'organisation sera indispensable et d'autant plus délicat que se dérouleront parallèlement les procédures de ratification du traité. Ce sont des questions sensibles au Royaume-Uni, au Danemark, en Irlande et dans d'autres Etats membres.
- la stratégie du Royaume-Uni peut rappeler un certain tropisme de l'ancienne diplomatie britannique, qui consistait à savoir rester en dehors tout en empêchant le continent de s'organiser. Les modalités techniques des dérogations britanniques permettent au Royaume-Uni d'appliquer le traité s'il le décide, tout en faisant en sorte qu'il prenne sa décision suffisamment tôt pour qu'il ne puisse empêcher les autres Etats de mener les négociations à leur guise et d'avancer sans lui ;
- une présidence doit faire preuve à la fois d'influence et d'écoute. Ce seront les clés de son influence et de son autorité. C'est le contraire de l'exaltation des revendications et des pulsions nationales. Tout comportement qui ne serait pas suffisamment à l'écoute des autres serait tout simplement inefficace.
M. Jacques Blanc s'est interrogé sur la possibilité de concilier les objectifs de la présidence et de faire avancer certains thèmes sur lesquels la France et le Président de la République se sont engagés, comme par exemple l'Union méditerranéenne, et sur l'articulation entre l'Union européenne, la démarche euroméditerranéenne et la politique européenne de voisinage, les travaux de la présidence et l'action de la France. Il a souhaité savoir comment la présidence pouvait prendre en compte les travaux du groupe des Sages souhaité par le Président de la République et quelle était la perception par nos partenaires du souci manifesté par la France de mise en oeuvre de la préférence communautaire. Enfin, il s'est interrogé sur l'exercice de la nouvelle compétence communautaire sur la cohésion territoriale.
M. Pierre Fauchon a considéré que la complexité conduisait souvent à l'impuissance, comme en témoigne le fonctionnement actuel de la Commission depuis l'élargissement et où, de ce fait, la Commission n'est plus en état d'exercer la direction de l'Union. Il a appelé de ses voeux un renforcement de la position de retrait du Royaume-Uni qui conduirait peut-être, un jour, les Européens à lui demander de se mettre définitivement et totalement à l'écart des coopérations renforcées, comme la monnaie ou le casier judiciaire.
Mme Gisèle Gautier, tout en partageant le regard porté sur l'attitude britannique, a considéré que les Anglais restent des partenaires qu'on ne pouvait pas écarter. Elle a souhaité des précisions sur la suppression de l'organisation en piliers.
M. Robert Bret a considéré que le nouveau traité était illisible, y compris pour les parlementaires compétents en matière européenne. Il s'est interrogé sur la capacité des peuples et des citoyens à s'enthousiasmer pour ce nouveau traité. Il a exprimé des doutes sur la capacité de ce texte à relancer le projet politique européen, alors même que l'intérêt des Etats l'avait emporté, lors de sa préparation, sur l'intérêt général de l'Europe. Le traité comportant des compromis et des dérogations pour de nombreux pays comme la Pologne, le Royaume-Uni, l'Irlande ou l'Italie, il a estimé qu'une Europe à plusieurs vitesses avait été officialisée. Il a enfin noté que si le Traité était paré de tant de qualités, il n'était pas cohérent de priver les peuples de s'exprimer à son sujet.
M. Hubert Haenel, président de la Délégation pour l'Union européenne, a rappelé que pour une entrée en vigueur du nouveau traité au 1er janvier 2009, le Haut représentant devait être désigné avant cette date. Il a souhaité savoir si la présidence française comptait inscrire au calendrier de l'Union la création et la mise en place du service d'action extérieure.
M. Pierre Sellal a apporté les éléments de réponse suivants :
- le groupe des Sages et l'Union méditerranéenne sont deux questions importantes qui n'entrent cependant pas directement dans les objectifs de la présidence.
Le groupe des Sages doit s'interroger sur l'avenir de l'Europe à l'horizon 2020 ou 2030. Une des grandes leçons des référendums de 2005 est qu'il faut redéfinir un projet européen qui a perdu en lisibilité et en crédibilité. C'est le rôle de ce groupe des Sages proposé par le Président de la République, qui ne sera pas composé de représentants gouvernementaux et devrait être constitué dès le Conseil européen de décembre prochain, pour travailler pendant deux ans.
L'Union méditerranéenne répond à une conviction profonde du Président de la République. Elle ne constitue pas à proprement parler un objectif de la présidence française. Comme le Président Nicolas Sarkozy l'a confirmé dans son discours de Tanger, il y a une nécessaire complémentarité entre l'Union méditerranéenne et le processus euro-méditerranéen de Barcelone et, de manière générale, l'action de l'Union en direction du Sud. L'un des résultats de cette impulsion nouvelle est qu'on parle maintenant de plus en plus à Bruxelles de la Méditerranée dans le cadre de la politique de voisinage. Le premier sommet, destiné à lancer le processus avant le début de la présidence française, devrait avoir lieu en juin 2008, pour tous les pays de la rive Nord et de la rive Sud de la Méditerranée. Parallèlement, un important programme de réunions ministérielles Euromed est prévu au second semestre 2008, qui permettra de souligner la complémentarité entre ces deux processus ;
- la préférence communautaire est un concept fort. Il marque nettement l'identité européenne et traduit bien le souci de défendre les intérêts européens. Faut-il l'afficher comme un postulat ou en faire une résultante et une référence de l'action à mener ? Ne pas utiliser le terme ne signifie pas renoncer au concept et à ses effets ;
- la cohésion territoriale est un concept neuf et important du traité. Le comité des régions va pouvoir travailler sur l'application territoriale des règles européennes. Cette problématique de l'application dans les territoires est actuellement insuffisamment prise en compte au stade de la négociation. Ce thème de la cohésion territoriale pourra être traité sous différentes formes pendant la présidence française ;
- la possibilité de décider à la majorité qualifiée est un antidote à l'impuissance. L'Acte unique a marqué un changement profond de ce point de vue. Les procédures à vingt-sept en codécision sont certes plus compliquées qu'avant l'Acte unique, mais le temps de la décision s'est néanmoins accéléré par rapport à cette période. La généralisation de la codécision n'a pas, bien au contraire, ralenti le processus décisionnel européen. En revanche, il est exact que la Commission à vingt-sept a beaucoup plus de difficultés qu'autrefois pour traduire l'intérêt général européen. Elle est moins collégiale. Elle est plus présidentielle. Les commissaires sont beaucoup plus autonomes dans leurs domaines de compétence. Mais pour autant, la Commission vote peu ;
- il y a des domaines d'action en Europe - politique étrangère, défense, lutte contre le terrorisme - qui ne sont pas concevables ou seraient moins dynamiques sans la participation des Britanniques. C'est l'accord de Saint-Malo qui a permis ces cinq dernières années les progrès en matière de politique de sécurité et de défense commune. Sous présidence britannique, des progrès importants ont eu lieu en matière de coopération policière ;
- les piliers étaient incompréhensibles pour le public. Il n'y a plus qu'une Union dans le traité modifié qui décrit son fonctionnement et son organisation. Néanmoins, toutes les politiques ne sont pas alignées sur les mêmes procédures. Il subsiste quelques traces des anciens piliers, par exemple en matière de politique étrangère où la Commission n'aura pas le monopole de l'initiative comme dans les autres domaines et où la Cour de Justice n'aura pas les mêmes pouvoirs ;
- à lui seul, ce traité ne pourra naturellement pas convaincre les citoyens que le projet européen est remis sur les rails. De même qu'il était excessif de dire, après l'échec de la Constitution, que le système européen s'était effondré, de même il serait abusif de dire aujourd'hui qu'avec le nouveau traité, l'Europe est sauvée et qu'elle a définitivement convaincu l'opinion de la justesse du projet européen et du bien fondé de toutes les politiques de l'Union. Pour autant, le traité lève une hypothèque. C'était un préalable. Il fallait sortir de cette situation d'impasse institutionnelle, non pas parce que le Conseil et l'Union étaient paralysés, mais parce que cet échec traduisait l'incapacité de l'Europe à dégager des compromis et à trouver des voies d'accord ;
- la mise en place du service d'action extérieure fait bien partie du mandat de la présidence française. Sa montée en puissance avec plusieurs dizaines, voire à terme plusieurs centaines de diplomates nationaux, sera nécessairement très progressive. Mais il faudra que les bases, les structures et les procédures soient posées. Quant au Président du Conseil européen, il disposera de services et de moyens provenant de l'actuel secrétariat général du Conseil.
M. Pierre Bernard-Reymond s'est interrogé sur la perception par nos partenaires de la situation économique et budgétaire de la France. Il a considéré que la campagne référendaire avait lancé plusieurs messages : la nécessité de rénover le projet politique, mais aussi la nécessité de progresser de manière pragmatique. Il a estimé qu'il ne serait pas souhaitable de donner des contours définitifs à l'Europe à l'occasion du mandat du groupe des Sages. Enfin, il s'est interrogé sur les conséquences de l'ordre dans lequel vont avoir lieu les ratifications du traité, souhaitant qu'une concertation entre les Etats intervienne pour faire passer en dernier les pays les plus réticents.
M. Pierre Sellal a précisé les points suivants :
- une présidence qui aurait de mauvais résultats nationaux ou qui serait en infraction par rapport aux règles européennes serait privée d'une part de sa crédibilité et de son autorité. Les résultats économiques, le dynamisme politique et le souci de se conformer aux obligations définies par les disciplines communes font partie des éléments qui fondent l'audience d'une présidence ;
- s'agissant du groupe des Sages, le Président de la République a toujours pensé que la question de l'adhésion de la Turquie ne pouvait être isolée d'une réflexion sur les frontières de l'Europe. Sans dresser la carte définitive de l'Europe, il ne faut pas non plus éluder la question de ses contours, dont l'absence a créé un malaise dans l'opinion au moment du référendum. Il faut un minimum d'identité et de lisibilité de l'ensemble européen pour en rénover le projet ;
- lors de la ratification de la Constitution, il avait été tenté de faire converger les calendriers nationaux en fonction des procédures et des situations internes. Mais les situations sont très différentes d'un pays à l'autre. L'ordre des ratifications n'est cependant pas neutre. C'est la raison pour laquelle la France, qui a eu une certaine responsabilité dans le blocage du processus, mais aussi qui a rendu possible sa relance, aurait tout intérêt, à la veille de sa présidence, à être parmi les tout premiers pays à ratifier le nouveau traité. C'est bien l'intention du Président de la République.
Mercredi 7 novembre 2007
- Présidence de M. Jacques Blanc, vice-président.PJLF pour 2008 - Mission « sécurité » - Programme Gendarmerie - Examen du rapport pour avis
La commission a examiné le rapport pour avis de M. Jean Faure, rapporteur pour avis, sur les crédits inscrits dans le projet de loi de finances pour 2008, pour le programme « Gendarmerie nationale » dans la mission interministérielle « Sécurité ».
M. Jean Faure, rapporteur pour avis, a d'abord présenté les grandes lignes du budget de la gendarmerie pour 2008.
M. Jean Faure, rapporteur pour avis, a indiqué que l'année 2008 devrait être une année de transition pour le budget de la gendarmerie, puisqu'elle s'insère entre la fin d'exécution de la loi d'orientation et de programmation pour la sécurité intérieure (LOPSI) du 29 août 2002 et la future loi d'orientation et de performance pour la sécurité intérieure (LOPPSI), annoncée par le Premier ministre dans son discours de politique générale.
Comme l'avait indiqué le général Guy Parayre, directeur général de la gendarmerie nationale, lors de son audition devant la commission, le 17 octobre dernier, le budget de la gendarmerie pour 2008 se caractérise par la recherche d'un équilibre entre deux priorités : maintenir l'effort entrepris pour améliorer la sécurité des Français, tout en participant de manière significative à la politique de maîtrise des dépenses budgétaires et à la réduction des déficits, a indiqué M. Jean Faure, rapporteur pour avis.
Le projet de budget de la gendarmerie pour 2008, qui figure dans le programme 152 de la mission interministérielle Sécurité, est marqué par une légère diminution des crédits.
Ses autorisations d'engagement pour 2008 sont de 7,7 milliards d'euros contre 7,9 milliards d'euros en 2007 (soit une baisse de 1,6 %) et ses crédits de paiement sont de 7,4 milliards d'euros, contre 7,5 en 2007.
Les dépenses de personnel s'élèvent à 6,1 milliards d'euros pour 2008, soit une légère augmentation par rapport à 2007. Elles représentent environ 80 % des crédits de la gendarmerie.
La loi d'orientation et de programmation pour la sécurité intérieure de 2002 avait fixé à 7 000 emplois les renforts nécessaires à la gendarmerie pour la période 2003-2007. A ce jour, la gendarmerie s'est vu doter de 6 050 emplois et il reste donc un déficit de 950 emplois.
Ce déficit ne sera toutefois pas résorbé en 2008, a indiqué M. Jean Faure, rapporteur pour avis. En effet, s'il est prévu de financer la création de 475 emplois, au titre de la LOPSI, cette mesure est contre-balancée par le non remplacement d'une partie des départs à la retraite, qui concerne 475 postes, a-t-il précisé.
En outre, il est prévu de supprimer 900 emplois équivalents temps plein, correspondant à des postes vacants, a-t-il ajouté.
Cette mesure ne se traduira donc par aucune suppression d'emploi, a souligné M. Jean Faure, rapporteur pour avis, car il s'agit d'ajustements techniques afin de tenir compte notamment des vacances d'emplois qui existent actuellement.
En définitive, les effectifs seront maintenus au niveau de 2007 alors qu'ils tendent à diminuer dans la plupart des corps de la fonction publique, a souligné M. Jean Faure. Au total, le plafond d'emploi s'élèvera à plus de 101 000 emplois dans la gendarmerie, contre 148 500 pour la police nationale et 320 000 pour les armées.
Le poste consacré aux rémunérations et aux charges sociales devrait augmenter de 24,1 millions d'euros, en raison notamment de la progression du point d'indice et de l'exécution de mesures catégorielles, a indiqué M. Jean Faure, rapporteur pour avis.
Parmi ces mesures, le PAGRE - plan d'adaptation des grades aux responsabilités exercées - mérite une attention particulière.
Ce plan, destiné à renforcer l'encadrement de la gendarmerie, dans le cadre notamment de la réforme du commandement territorial et de la mise en place des communautés de brigades, se traduit par la transformation d'emplois de sous-officiers en emplois d'officiers et d'emplois de gendarme en postes de sous-officiers.
Au terme de cet exercice pluriannuel, lancé en 2005, plus de 3 000 postes d'officiers auront été créés.
La poursuite de ce plan revêt une grande importance, a estimé M. Jean Faure.
La question des rémunérations constitue, en effet, un sujet sensible pour les gendarmes, qui constatent un décalage croissant avec les policiers, alors qu'on leur demande souvent de faire le même métier.
Or, l'évolution de la condition des militaires de la gendarmerie n'est pas seulement une affaire de grille indiciaire, a indiqué M. Jean Faure, rapporteur pour avis.
En effet, le re-pyramidage des corps et le rythme des carrières jouent également un rôle important.
M. Jean Faure a abordé ensuite les dépenses de fonctionnement, qui s'élèveront à 964 millions d'euros en 2008.
A périmètre constant, les moyens nouveaux accordés à la gendarmerie représentent 30 millions d'euros, soit une hausse de 3,4 %, a-t-il indiqué.
Cette augmentation s'explique principalement par la hausse des loyers, qui représentent, avec 434 millions d'euros (soit + 6,9 % par rapport à l'an dernier), une part non négligeable des dépenses de fonctionnement.
A ce montant s'ajoute un financement de 17 millions d'euros destiné à l'habillement des nouvelles recrues et des réservistes, M. Jean Faure, rapporteur pour avis, a précisé, à cet égard, que seule la première tenue est fournie gratuitement aux nouvelles recrues, les personnels devant ensuite financer eux-mêmes le renouvellement de leurs uniformes, grâce à une allocation annuelle.
On peut citer également une enveloppe de 10 millions d'euros destinée à la maintenance des aéronefs, qui devrait permettre de maintenir un taux de disponibilité des hélicoptères de la gendarmerie supérieur à 80 %.
Enfin, l'enveloppe budgétaire allouée à la gendarmerie au titre des investissements s'élève en 2008 à environ 612 millions d'euros en autorisations d'engagement, contre près de 885 millions d'euros en 2007, soit une diminution de 30 %, a indiqué M. Jean Faure.
Les financements disponibles seront consacrés au renouvellement d'une partie des matériels et au maintien opérationnel des programmes les plus sensibles, a-t-il précisé.
Ainsi, 750 véhicules de brigade, 420 motocyclettes, des équipements pour les gendarmes mobiles (2 600 casques de maintien de l'ordre) et pour la sécurité du personnel (7 670 gilets pare-balles à port discret) seront commandés en 2008.
Cela permettra également de financer le renouvellement d'une partie des ordinateurs (8 000 postes informatiques) et de poursuivre les programmes informatiques, comme le programme de gestion opérationnelle départementale Athéna.
Il est donc prévu, dans le projet de loi de finances pour 2008, que la gendarmerie contribue de manière significative à la politique de réduction des déficits, sans pour autant remettre en cause sa capacité opérationnelle.
Après cette présentation des grandes lignes du budget de la gendarmerie nationale pour 2008, M. Jean Faure, rapporteur pour avis, a souhaité procéder à l'examen de quelques aspects spécifiques.
Le rapporteur pour avis a tout d'abord évoqué le parc immobilier de la gendarmerie nationale. Celui-ci est composé de plus de 4 100 casernes et près de 80 000 logements, dont 18 000 hors caserne.
Plus de 70 % du parc domanial de la gendarmerie nationale a plus de vingt cinq ans en moyenne.
Dans certaines casernes, les conditions de logement sont telles (humidité, vétusté, insalubrité), qu'il est nécessaire de recourir chaque année à des locations hors caserne, pour un surcoût de 1 à 1,5 million d'euros, a indiqué M. Jean Faure, rapporteur pour avis.
Le renouvellement et l'amélioration du parc immobilier, domanial mais aussi locatif, de la gendarmerie, est donc une priorité, a-t-il estimé.
Le ministre de la défense souhaite accélérer de façon significative la remise à niveau du parc domanial en ayant recours à des procédures de partenariat public-privé avec autorisation d'occupation temporaire du domaine public (AOT).
Dans le cadre du projet de loi de finances pour 2008, il est prévu d'engager au total 292 millions d'euros d'opérations immobilières en 2008 au titre des autorisations d'occupation temporaire (AOT), dont 270 millions d'euros au titre d'opérations programmées initialement en 2007 et décalées en 2008.
Il s'agit notamment de :
- poursuivre les constructions de casernes domaniales lancées avant 2007 (construction de casernes à Châteauroux, Laval et Caen) et les opérations immobilières prévues en 2007 (transfert du siège de la direction générale de la gendarmerie nationale à Issy-les-Moulineaux, construction d'une caserne à Lyon-Sathonay) ;
- mettre en chantier de nouvelles opérations prioritaires (construction d'une caserne à Mulhouse et d'une autre à Montluçon) ;
Au total, 929 opérations domaniales (dont 555 d'AOT) devraient être lancées en 2008, contre 712 en 2007, et 287 devraient être livrées en 2008, contre 138 en 2007.
A ce montant, s'ajoutent les financements accordés à la gendarmerie au titre de la loi de programmation militaire et consacrés à la construction de nouvelles casernes ou à l'entretien des casernes existantes, qui incombent aux services du ministère de la défense et qui représentent un total de 233 millions d'euros en autorisations d'engagement, a indiqué M. Jean Faure, rapporteur pour avis.
Malgré cet effort, l'état général du casernement demeure préoccupant, a-t-il estimé, l'immobilier ayant trop souvent servi de variable d'ajustement.
Cette question pèse lourdement sur les conditions de travail et la qualité de vie des militaires, ce qui n'est pas sans effet sur leur moral, a indiqué M. Jean Faure.
A cet égard, l'externalisation n'est pas la solution-miracle, a-t-il estimé.
Comme l'a indiqué le général Guy Parayre, lors de son audition devant la commission, l'externalisation de la gestion immobilière, lancée en 2003 sous la forme d'une expérimentation, n'a pas donné les résultats escomptés. Ainsi, dans ce domaine, les évaluations font état d'un surcoût de 60 millions d'euros pour l'externalisation par rapport au maintien de la gestion immobilière au sein de la gendarmerie.
M. Jean Faure a donc considéré qu'un important effort reste à accomplir dans les prochaines années dans ce domaine.
Le rapporteur pour avis, a ensuite évoqué la mutualisation des moyens entre la police et la gendarmerie.
Si la gendarmerie et la police nationales font l'objet d'une mission interministérielle unique, il subsiste des marges de manoeuvre pour renforcer les synergies entre les deux, a-t-il estimé.
A titre d'illustration, bien que la gendarmerie dispose d'un réseau de radiocommunication intitulé RUBIS, la police nationale a choisi de développer son propre réseau, dénommé ACROPOL.
Or, ces deux réseaux, dont la mise en place a eu un coût de l'ordre de 600 millions d'euros, ne sont pas directement interopérables, si bien qu'il a été nécessaire de créer des passerelles entre les deux réseaux nécessaires, notamment en cas d'opération commune.
Sur le plan opérationnel, la mise en place des groupes d'intervention régionaux (GIR), prévus par une circulaire de 2002, a permis de créer de nombreuses synergies entre les gendarmes et les policiers.
Selon M. Jean Faure, rapporteur pour avis, la cohérence de la mission interministérielle Sécurité pourrait encore être renforcée grâce à la passation de marchés publics communs aux deux forces (notamment pour les armes de poing et les véhicules), à la formation commune de certains personnels spécialisés (comme les maîtres chiens, les plongeurs ou les cavaliers) ou encore grâce au rapprochement des fichiers (le système commun, baptisé ARIANE, devrait être progressivement déployé en 2008).
Ce rapprochement ne signifie pas cependant qu'il faille aller jusqu'à fusionner les deux forces, a estimé M. Jean Faure, qui s'est déclaré très attaché à l'existence de deux forces de police, l'une à statut militaire, l'autre à statut civil, et à la spécificité de la gendarmerie, qui assure la sécurité de 50 % de la population résidente sur 95 % du territoire national. Un projet de loi devrait d'ailleurs être soumis au Parlement en 2008 qui consacrerait l'existence de la gendarmerie en tant que force de police à statut militaire, a-t-il indiqué.
Enfin, M. Jean Faure, rapporteur pour avis, a souligné l'action internationale et européenne de la gendarmerie.
Plus de 1000 gendarmes sont affectés ou détachés à l'étranger, notamment dans les ambassades, en tant qu'attachés de sécurité intérieure, a indiqué M. Jean Faure.
Par ailleurs, plus de 500 gendarmes participent actuellement à des opérations extérieures, notamment au Kosovo (200 gendarmes) et en Côte d'Ivoire (170 gendarmes), a-t-il rappelé.
A cet égard, il convient de relever que, dans le cadre de la budgétisation progressive des opérations extérieures, dont M. Jean Faure s'est félicité, la gendarmerie bénéficie d'une provision de 4 millions d'euros de fonctionnement et d'11 millions d'euros au titre de la masse salariale.
M. Jean Faure, rapporteur pour avis, a aussi rappelé qu'il s'était rendu, en mai dernier, avec le M. Serge Vinçon, président, à Vicence, en Italie, au quartier général de la Force de gendarmerie européenne. Cette force, créée en 2004 à l'initiative de la France et regroupant actuellement cinq pays (France, Espagne, Italie, Portugal, Pays-Bas), devrait être envoyée prochainement en Bosnie-Herzégovine dans le cadre de la mission de police de l'Union européenne et peut être aussi au Kosovo.
En conclusion, M. Jean Faure, rapporteur pour avis, a invité la commission à émettre un avis favorable à l'adoption des crédits du programme « Gendarmerie nationale ».
A la suite de l'exposé du rapporteur pour avis, M. André Rouvière s'est interrogé sur la prise en compte de la hausse du coût des carburants dans le projet de budget de la gendarmerie pour 2008. Il a rappelé qu'il avait à plusieurs reprises demandé aux autorités compétentes communication du rapport d'étape sur la mise en place des communautés de brigades, réalisé il y a près de deux ans. Il a constaté que malgré les assurances du ministre de la défense et du directeur général de la gendarmerie nationale, ce rapport n'avait toujours pas été transmis à la commission. Il a souhaité que cette demande soit renouvelée par la voix du président de la commission. Par ailleurs, il a souligné que les conditions d'un éventuel rapprochement entre la police et la gendarmerie suscitaient des interrogations et il s'est demandé si la commission ne pourrait pas en clarifier les enjeux, dans le cadre d'une mission d'information.
M. Jean Faure, rapporteur pour avis, a répondu que le projet de budget pour 2008 intégrait une augmentation des coûts des carburants, sur la base d'un cours du baril s'établissant en moyenne à 65 dollars, niveau certes inférieur à celui actuellement constaté. Par ailleurs, il a précisé qu'il avait réitéré auprès de la direction générale de la gendarmerie nationale le souhait de la commission de recevoir le rapport sur les communautés de brigades. Celle-ci aurait transmis le document au cabinet du ministre de la défense en vue de sa communication à la commission.
M. Charles Pasqua a souhaité que la commission exige de manière extrêmement ferme la transmission du rapport sur les communautés de brigades. Il a ensuite rappelé que le statut militaire de la gendarmerie impliquait certaines sujétions n'ayant pas d'équivalent dans la police, notamment en termes de disponibilité, et il a souligné la nécessité de les prendre pleinement en compte. Il a cité l'exemple du logement en casernement, qui constitue l'une des contreparties à ces sujétions, et il a déploré que trop de familles de gendarmes soient logées dans des conditions insatisfaisantes. Il a considéré que les conditions de vie des gendarmes et de leurs familles méritaient de bénéficier d'une priorité absolue. S'agissant des synergies entre la gendarmerie et la police, il a estimé qu'elles nécessitaient d'être développées, notamment pour l'achat d'équipements.
Mme Michelle Demessine s'est demandé si le niveau des dotations consacrées aux logements de la gendarmerie était en rapport avec l'état des besoins et le rythme souhaitable de réalisation des opérations de construction ou de rénovation. Elle a souhaité que la commission dispose d'une vue d'ensemble pluriannuelle des efforts budgétaires nécessaires.
M. Robert Bret a souligné que des interrogations demeuraient sur la nécessité et les conséquences d'un rapprochement entre la police et la gendarmerie. Il a fait état d'un malaise perceptible au sein de cette dernière et a souhaité que la commission évalue de manière approfondie les implications des évolutions en cours.
M. Jean Faure, rapporteur pour avis, a précisé que plus de 70 % des logements du parc domanial de la gendarmerie étaient constitués de logements datant de plus de 25 ans, 25 % des logements datant de plus de 50 ans. Il a ajouté que les besoins en matière de logement étaient donc considérables et qu'en dépit de l'importance de l'effort réalisé ces dernières années, la mise à niveau du parc immobilier de la gendarmerie constituait une oeuvre de longue haleine.
M. Charles Pasqua a estimé que l'on pouvait s'interroger sur l'intérêt de conserver la notion de casernement pour les gendarmes. Il s'agissait, selon lui, d'une des questions que pourrait examiner une mission d'information de la commission.
M. Jacques Blanc a évoqué les diverses modalités d'externalisation possibles en matière de logement pour la gendarmerie. Il a souligné que dans les zones rurales, l'implication des communes et des conseils généraux avait donné des résultats satisfaisants.
Un échange de vues a alors eu lieu entre MM. André Rouvière, Josselin de Rohan, Charles Pasqua, Jean Faure et Jacques Blanc et la commission a décidé à l'unanimité la création par la commission d'une mission d'information concernant les problématiques actuelles de la gendarmerie.
Puis la commission a émis un avis favorable à l'adoption des crédits du programme « Gendarmerie nationale» dans la mission interministérielle « Sécurité », le groupe Communiste Républicain et Citoyen s'abstenant.
Application des lois - Bilan au 30 septembre 2007 - Communication
Puis la commission a entendu une communication de M. Jacques Blanc, président, sur le contrôle de l'application des lois pour la session 2006-2007.
M. Jacques Blanc, président, a rappelé que l'essentiel du travail de la commission consistait en l'examen de projets de loi autorisant la ratification ou l'approbation d'accords internationaux. Ainsi, au cours de l'année parlementaire écoulée, le Sénat a adopté en séance publique 51 accords internationaux relevant de la compétence de la commission.
De plus, au cours de l'année parlementaire écoulée, deux projets de loi ont été examinés par la commission, ayant abouti à la loi n° 2007-288 du 5 mars 2007 modifiant les articles 414-8 et 414-9 du code pénal, et la loi n° 2007-289 du 5 mars 2007 portant modifications du code de justice militaire et du code de la défense. Ces deux lois sont des lois d'application directe, donc aucune mesure d'application n'est attendue.
En conclusion, M. Jacques Blanc, président, a regretté que deux lois adoptées lors des sessions précédentes soient toujours dans l'attente de plusieurs mesures d'application pour pouvoir être totalement applicables, et notamment la loi n° 2005-270 du 24 mars 2005 portant statut général des militaires.
Jeudi 8 novembre 2007
- Présidence de Mme Monique Cerisier-ben Guiga, vice-présidente -PJLF pour 2008 - Mission « Défense » - Audition de M. Michel Miraillet, directeur chargé des affaires stratégiques au ministère de la défense
La commission a procédé à l'audition de M. Michel Miraillet, directeur chargé des affaires stratégiques au ministère de la défense, sur le projet de loi de finances pour 2008 (mission défense), accompagné du vice-amiral Anne-François de Saint Salvy, directeur-adjoint.
M. Michel Miraillet a tout d'abord indiqué que la gestion du programme « environnement et prospective de la politique de défense », au cours de l'exercice 2007, devrait se solder par un excédent d'environ 20 millions d'euros au titre 2, ce montant correspondant essentiellement à des emplois que la Direction générale de la sécurité extérieure (DGSE) n'est pas parvenue à pourvoir. Il a évoqué, à ce sujet, les difficultés de recrutement que rencontre ce service pour certaines spécialités, notamment les langues rares.
M. Michel Miraillet a ensuite présenté les principales caractéristiques des crédits prévus pour le programme par le projet de loi de finances pour 2008.
Ces crédits seront en légère diminution, de l'ordre de 0,7 % pour les autorisations d'engagement et de 0,6 % pour les crédits de paiement.
Les dotations du titre 2 seront en baisse de 7,3 % du fait du recalage, désormais achevé, des crédits de rémunération sur la réalité des effectifs et d'un transfert au titre 3 de la charge salariale des personnels mis à la disposition des écoles de la Direction générale de l'armement (DGA). Le plafond d'emplois du programme s'établira à 8 800 emplois équivalent temps plein en 2008, soit 316 emplois de moins qu'en 2007. Il résulte d'un alignement sur les effectifs moyens 2007, estimés à la date du 30 juin, de l'extension en année pleine des créations de postes décidées en 2007 et d'une réduction de 34 postes au titre du non-remplacement d'un départ à la retraite sur deux. De ce fait, le programme ne connaîtra pas en 2008 de progression de ses effectifs, mais une capacité de recrutement de 16 emplois équivalent temps plein sera maintenue au profit de la DGSE.
Hors titre 2, les crédits du programme augmenteront de 2,3 % en autorisations d'engagement et de 2,6 % en crédits de paiement.
M. Michel Miraillet a ensuite présenté les principales évolutions concernant les différentes actions du programme.
Les autorisations d'engagement consacrées à l'analyse stratégique augmenteront de 1,3 million d'euros (31 %), du fait du lancement de plusieurs marchés d'études triennaux destinés à offrir une plus grande visibilité aux centres de recherche. Au total, une centaine d'études nouvelles seront engagées en 2008 sur la base des priorités définies par le comité de coordination des études prospectives associant les représentants des forces armées et des autres services du ministère.
Les autorisations d'engagement destinées à la prospective des systèmes de force progresseront de 4 millions d'euros au profit des études opérationnelles et technico-opérationnelles.
L'action relative à la recherche et à l'exploitation du renseignement de sécurité bénéficiera d'une progression de 5,6 % des autorisations d'engagement et de 3,7 % des crédits de paiement. Elle concernera presque exclusivement la DGSE, dont les besoins en consommation électrique augmenteront sensiblement avec l'entrée en service d'un nouveau centre de calcul. Le budget de la direction de la protection et de la sécurité de la défense (DPSD) restera en revanche inchangé. Les crédits de masse salariale seront pratiquement stables pour les deux services de renseignement, ce qui permettra de maintenir la capacité opérationnelle.
L'action « maintien des capacités technologiques et industrielles » représente à elle seule 80 % du programme, hors titre 2. Les autorisations d'engagement (967 millions d'euros) progresseront de près de 1 % et les crédits de paiement de 2 %.
Cette augmentation résulte, en premier lieu, du lancement d'études amont importantes dans le domaine nucléaire, alors que les crédits d'études amont dans les domaine spatial et conventionnel diminuent. Le montant global des crédits alloués aux études amont (689 millions d'euros en autorisations d'engagement et 644 millions d'euros en crédits de paiement) est stable et permettra de respecter l'objectif d'engagement de 700 millions d'euros assigné par le ministre. Il inclut notamment 15 millions d'euros destinés aux pôles de compétitivité, transférés vers le programme « recherche duale ».
La progression des dotations de cette action est également liée au transfert des crédits de rémunérations destinés aux écoles de la DGA et à l'Office national d'études et recherches aérospatiales (ONERA). Le montant des subventions est un peu inférieur aux besoins stricts des contrats d'objectifs et de moyens passés avec ces établissements. Ces écarts feront l'objet soit de mesures en gestion, par exemple l'octroi d'études amont supplémentaires pour l'ONERA, soit d'une renégociation de certains contrats pour les écoles, compte tenu de leurs situations respectives.
S'agissant des indicateurs de performance associés au projet de loi de finances, il a précisé que certains d'entre eux avaient été améliorés pour renforcer leur pertinence. Il a cité la mesure du taux de coopération européenne en matière de prospective des systèmes de forces ainsi que celle du coût de la direction du développement international de la DGA dans les contrats de vente à l'exportation.
M. Michel Miraillet a ensuite effectué plusieurs observations sur le fonctionnement du programme « environnement et prospective de la politique de défense », deux années après l'entrée en vigueur de la LOLF. Il a rappelé le caractère quelque peu atypique de ce programme, dans la mesure où, à l'exception de la délégation aux affaires stratégiques (DAS), les entités qui concourent au programme ne relèvent pas de l'autorité organique du responsable de programme. Il a néanmoins estimé qu'en dépit des moyens humains et techniques limités dont dispose ce dernier, l'expérience démontre qu'une véritable gouvernance de ce programme est possible. Il a notamment évoqué la stratégie d'ensemble énoncée cette année dans le projet annuel de performance, l'association désormais officielle du responsable de programme à l'élaboration et à la présentation au ministre des documents d'orientation et de programmation des études amont, ou encore l'action menée en vue de mieux coordonner les études de prospective.
M. Michel Miraillet a estimé qu'au-delà de ces progrès, plusieurs difficultés restaient à résoudre. Il a notamment considéré que les arbitrages auxquels sont associés les responsables de programme ne devraient pas se limiter aux seuls sujets financiers. Il a également mentionné la lourdeur des procédures, qui amplifie au-delà du raisonnable le poids des tâches de gestion financière au détriment du pilotage par la performance, la DAS ne disposant en outre que de quatre personnes pour assurer sa responsabilité de gestion financière du programme. Il a précisé que le comité de pilotage et d'orientation politique du programme allait réfléchir sur les moyens d'axer davantage l'exercice de la responsabilité du programme sur le contenu et la cohérence entre les missions, au delà du seul plan budgétaire.
M. Michel Miraillet a conclu en soulignant le rôle de la DAS dans la mise en cohérence des analyses prospectives des différents services du ministère de la défense. Citant le plan prospectif à 30 ans, le rapport établi conjointement par la DAS et l'état-major des armées sur les engagements futurs et les réflexions de prospective stratégique à l'échéance de 2030 conduites par la DAS avec les différents services, il a souligné que ces différents documents étaient aujourd'hui à la base des travaux de réflexion engagés pour la préparation du futur Livre blanc. Il a indiqué que cette démarche se développait dans plusieurs directions : concertation au sein du comité de cohérence de la prospective présidé par le DAS, création d'un référentiel ministériel des activités et des outils de prospective, extension du réseau d'expertise interne et externe.
A la suite de cet exposé, M. Didier Boulaud, rapporteur pour avis de la mission « Environnement et soutien de la politique de défense », s'est déclaré sensible aux observations du directeur chargé des affaires stratégiques concernant la complexité des procédures budgétaires mises en place à la suite de la LOLF. Concernant la DGSE, il a estimé que les difficultés de recrutement pour certaines spécialités n'étaient pas nouvelles et ajouté qu'une partie de la marge disponible sur les crédits de masse salariale avait été utilisée pour offrir de meilleures rémunérations, sans lesquelles le service n'aurait pu pourvoir certains postes. Il a considéré que, globalement, les effectifs de la DGSE restaient très en deçà des besoins reconnus, et inférieurs de moitié à ceux de son homologue britannique. Il s'est par ailleurs étonné de la légère diminution des crédits de fonctionnement de la DGSE alors que l'entrée en service du nouveau centre de calcul va générer des dépenses supplémentaires d'énergie électrique de l'ordre de 3 millions d'euros en 2008. Enfin, il s'est interrogé sur les réflexions en cours en vue d'améliorer la cohérence de l'effort de renseignement, suite aux orientations données en ce sens par le Président de la République lors de la mise en place de la commission sur le Livre blanc.
M. Michel Miraillet a indiqué qu'il n'était pas en mesure de commenter les orientations qui pourraient être définies par le chef de l'Etat en matière de coordination du renseignement, mais il a constaté que le dispositif actuel, incarné par le comité interministériel du renseignement, était généralement considéré comme insuffisant. S'agissant de l'évolution des effectifs, il a estimé qu'elle devrait être envisagée en tenant compte des moyens dévolus à l'ensemble des services de renseignement du ministère de la défense.
Le vice-amiral Anne-François de Saint Salvy, directeur-adjoint, a précisé que l'ajustement sur le niveau réel des effectifs entraînait une diminution du plafond d'emplois de la DGSE sans incidence sur les moyens en personnels, qui pourront éventuellement être légèrement renforcés en cours de gestion grâce à la capacité de recrutement de 16 postes équivalent temps plein qui restent disponibles. La question d'une augmentation à moyen terme des effectifs de services de renseignement sera traitée dans le cadre des nouvelles orientations de notre politique de défense qui seront définies à l'issue des travaux du Livre blanc. S'agissant des dépenses supplémentaires entraînées par la mise en service du nouveau centre de calcul de la DGSE, il appartient à cette dernière d'examiner dans quelle mesure elle peut les financer par des économies réalisées sur d'autres postes. L'éventualité d'un redéploiement de crédits au sein du programme ne sera envisagée qu'après examen des résultats de cette démarche. En tout état de cause, le fonctionnement de cette capacité essentielle ne sera pas remise en cause.
M. André Rouvière a demandé des précisions sur l'organisation de la protection des systèmes et des données informatiques au sein du ministère de la défense, ainsi que sur la coordination interministérielle et la coopération internationale dans ce domaine. Il a également souhaité connaître les orientations retenues pour l'évolution du dispositif de représentation du ministère de la défense à l'étranger.
M. Michel Miraillet a répondu que les attaques opérées contre les systèmes informatiques du gouvernement estonien, il y a quelques mois, avaient souligné l'actualité de la cyberdéfense. Il a précisé que le ministère de la défense, comme tous les ministères, assurait la protection de son réseau informatique, la coordination interministérielle étant du ressort de la Direction centrale de la sécurité des systèmes d'information (DCSSI) placée auprès du Secrétariat général de la défense nationale (SGDN). Il a cité quelques exemples du rôle de veille et de protection assuré par ce service. Il a ajouté que des coopérations étroites étaient nouées avec des pays européens comme avec des pays extra-européens tels que Singapour, ainsi qu'avec le centre de cyberdéfense de l'OTAN.
En ce qui concerne le réseau du ministère de la défense à l'étranger, M. Michel Miraillet a indiqué qu'il n'enregistrerait pas d'évolution sensible en 2008. Il a toutefois précisé qu'une réflexion était en cours sur la rationalisation de ce réseau composé des attachés de défense, relevant de l'Etat-major des armées, et des attachés d'armement, relevant de la DGA. Il a estimé qu'au cours de ces dernières années, des efforts importants avaient été réalisés pour en renforcer l'efficacité, notamment en redéfinissant les profils de postes. Il a cependant considéré qu'un réexamen des besoins, prenant en compte de manière globale les effectifs des missions militaires et des services d'armement, était justifié.
Le vice-amiral Anne-François de Saint Salvy a ajouté qu'au sein du ministère de la défense, le comité directeur des postes à l'étranger avait pour tâche d'évaluer la pertinence de l'affectation des moyens dévolus à ce réseau. Il a souligné la réflexion en cours sur la répartition de ces postes entre les ambassades pour les relations bilatérales et les organisations internationales.
Mme Monique Cerisier-ben Guiga, présidente, a demandé si la commission pourrait être destinataire des études commandées par la DAS, au-delà de celles mises en ligne sur le site du ministère de la défense.
M. Michel Miraillet a proposé de transmettre à la commission la liste des études réalisées pour la DAS afin qu'elle indique celles dont elle souhaite communication.