Jeudi 19 octobre 2006
- Présidence de M. Nicolas About, président -Marchés publics - Etudes consacrées à la politique vaccinale de la France et aux accidents vasculaires cérébraux - Choix de prestataires
M. Nicolas About, sénateur, président, a indiqué que l'objet de la réunion est de choisir, parmi les organismes qui ont répondu aux appels d'offres lancés cet été, ceux auxquels l'Opeps souhaite confier la réalisation des études envisagées pour l'année 2007.
En préalable, M. Jean-Michel Dubernard, député, vice-président, a appelé l'attention de ses collègues sur la nécessité de maintenir l'activité de l'Opeps en dépit des interruptions dues aux échéances électorales de l'année prochaine. Dans cette perspective, il est indispensable que chacun, parlementaires et experts, fasse l'effort de participer aux réunions et que l'administration mette à la disposition de l'office les moyens de son fonctionnement.
M. Paul Blanc, sénateur, rapporteur pour la politique vaccinale, a signalé que le Sénat a pour habitude de poursuivre ses travaux durant les périodes de campagne électorale et lors des élections législatives qui mobilisent les députés, par exemple en menant des missions d'information. Ce fut le cas en 2002 sur le thème de la politique du handicap.
Il a ensuite rappelé que l'Opeps a retenu, lors de sa réunion du 30 mars 2006, le thème de la politique vaccinale de la France pour l'étude confiée au Sénat en 2007. L'objectif est de faire le point sur le résultat sanitaire des actions menées, d'apprécier l'efficacité de la politique vaccinale actuelle au regard des nouvelles pathologies et des risques sanitaires inédits, d'imaginer comment elle peut être conciliée avec le respect du principe de précaution et d'évaluer la capacité de la recherche et de l'industrie pharmaceutique françaises à trouver et à produire de nouveaux vaccins.
Ce choix a été confirmé par l'étude préalable présentée par Mme Claudine Blum-Boisgard, membre du comité d'experts de l'office et professeur de santé publique à la faculté de médecine de l'université Paris V-René Descartes, le 17 mai 2006, qui a conclu à la faisabilité et à l'opportunité d'une évaluation de la politique vaccinale menée par la France.
Pour respecter les règles relatives aux marchés publics, un appel d'offres a été lancé conformément au cahier des charges arrêté au cours de la réunion du 29 juin 2006. A la suite des opérations de publicité, neuf dossiers ont été retirés et quatre offres ont été effectivement déposées à la date limite du 15 septembre.
Ces candidatures, présentées par trois sociétés d'étude et de conseil - Parteurop, Stève Consultants et Alcimed - et par le Centre national de l'expertise hospitalière (CNEH), correspondent pour l'essentiel au cahier des charges fixé par l'office et ont, par conséquent, toutes été jugées recevables.
L'examen attentif de chacun des dossiers lui a permis de faire les observations suivantes :
- l'offre de Stève consultants, dont le tarif est de loin le plus compétitif, couvre effectivement l'ensemble des thèmes requis et propose une liste d'experts à auditionner très complète. Mais le niveau d'expertise interne de l'entreprise et celui des ressources humaines mises à la disposition de l'Opeps pour cette étude semblent trop faibles au regard des exigences de l'office ;
- le dossier déposé par Parteurop fait montre d'une bonne compréhension du sujet et d'un recours à une expertise externe et interne de haut niveau ; en outre, sa spécialisation en immuno-vaccinologie constitue un atout certain par rapport à ses trois concurrents. En revanche, on peut regretter que Parteurop, qui a jusqu'à présent travaillé quasi exclusivement pour le compte d'entreprises privées de biotechnologie et de biopharmacie dans le cadre d'études de marché préalables au développement d'un produit, dispose d'une expérience insuffisante dans le champ du conseil aux institutions publiques. En outre, le prix demandé pour la prestation est largement supérieur à celui de ses concurrents et aux moyens alloués par l'Opeps à ce type de travaux.
Pour ces motifs, M. Paul Blanc, sénateur, rapporteur pour la politique vaccinale, a considéré que ces deux premières candidatures peuvent raisonnablement être écartées. En revanche, il est plus difficile de départager les deux autres concurrents, dont les dossiers respectifs sont de grande qualité et présentent des points forts et des insuffisances situés à des niveaux différents, d'autant que les tarifs respectivement demandés sont très proches et se situent dans des gammes de prix acceptables par l'Opeps.
Concernant l'offre d'Alcimed, il a rappelé que ce prestataire a déjà postulé l'an dernier au Sénat pour l'étude sur les infections nosocomiales et à l'Assemblée nationale sur le thème des psychotropes, sans être retenu. Cette proposition correspond parfaitement aux attentes de l'office et présente de multiples atouts : une méthodologie efficace, une expérience reconnue dans le domaine du conseil aux autorités publiques, une équipe opérationnelle de haut niveau et une bonne connaissance de l'industrie pharmaceutique. Paradoxalement, ce dernier point pourrait constituer un handicap : en effet, la société Alcimed ayant majoritairement orienté son activité vers la stratégie industrielle et le conseil aux entreprises, elle pourrait être tentée de concentrer ses travaux sur les aspects pharmaceutiques du sujet, au détriment des problématiques de santé publique.
Enfin, M. Paul Blanc, sénateur, rapporteur pour la politique vaccinale, a présenté la proposition du CNEH, organisme qui avait été retenu pour l'étude sur les infections nosocomiales en 2006. L'offre est nettement axée sur les aspects scientifiques et économiques du sujet, ce qui correspond exactement aux attentes et au rôle assigné à l'Opeps, et fait appel à un comité d'experts solide et compétent sur l'ensemble des thèmes de l'étude. La partie relative à la perception de la vaccination par la population française et le corps médical serait conduite par l'Ipsos, sous la forme d'une enquête. Toutefois, la connaissance et les contacts limités du CNEH avec l'industrie pharmaceutique pourraient se révéler gênants pour développer certains aspects du sujet.
A titre personnel, il a fait part de sa préférence pour la candidature d'Alcimed en raison de sa connaissance approfondie de l'industrie pharmaceutique et du fait que le CNEH a déjà été retenu pour une étude de l'Opeps.
M. Alain Vasselle, sénateur, a demandé en quoi la spécialisation d'Alcimed en stratégie industrielle pourrait constituer une faiblesse pour son dossier.
M. Nicolas About, sénateur, président, a fait valoir que l'étude de l'Opeps n'a pas pour objet d'offrir une tribune à l'industrie pharmaceutique mais qu'elle s'est fixée pour objectif de dégager les enjeux de la vaccination en termes de santé publique. Il semble donc normal d'évoquer cet aspect des choses sans pour autant en conclure qu'il est susceptible d'influer sur le travail que produirait Alcimed.
M. Alain Vasselle, sénateur, a demandé si, à l'occasion des travaux menés par Alcimed pour d'autres organismes publics, il a été fait état de dérives en ce sens.
M. Paul Blanc, sénateur, rapporteur pour la politique vaccinale, a indiqué que tel n'a pas été le cas.
M. Jean-Michel Dubernard, député, vice-président, est revenu sur le problème posé par le faible taux de présence des experts aux réunions de l'office. Il a estimé que ceux qui sont régulièrement absents doivent être remplacés, en privilégiant le recrutement de professionnels aux compétences transversales. En effet, l'avis du comité d'experts est précieux pour guider le choix des prestataires et garantir la bonne orientation de l'étude relative à la politique vaccinale, en l'espèce.
Après que Mme Claudine Blum-Boisgard, membre du comité d'experts, a souligné le haut niveau de compétences des experts proposés par Alcimed en matière d'épidémiologie, l'office a attribué l'étude à cet organisme.
Concernant l'appel d'offres lancé par l'Assemblée nationale pour l'étude des accidents vasculaires cérébraux (AVC), M. Jean-Michel Dubernard, député, vice-président, a indiqué que deux dossiers ont été retirés auprès de l'administration et qu'une seule candidature a finalement été déposée.
M. Jean Bardet, député, rapporteur pour les accidents vasculaires cérébraux, a fait valoir que l'urgence médicale que constituent les AVC est aujourd'hui avérée et tend à faire de la prise en charge précoce des victimes un enjeu majeur de santé publique. Les études conduites par les sociétés savantes neuro-vasculaires ont montré que l'efficacité des traitements administrés, que l'accident ait pour cause une thrombose, une embolie (80 % des cas) ou une hémorragie cérébrale, est conditionnée par leur prise en charge immédiate (inférieure à trois heures) dans des structures de soins spécialisées. Or, la réponse des autorités sanitaires à ce défi organisationnel reste encore insuffisante.
Dans ce contexte, l'étude confiée par l'Opeps à l'Assemblée nationale pour 2007 a pour objet de définir, à partir d'un bilan de la prise en charge actuelle des AVC, les conditions organisationnelles d'une couverture optimale des besoins sanitaires dans ce domaine et d'en estimer le coût.
A la suite de l'appel à candidature lancé par l'Assemblée nationale, une seule offre, présentée par la société REES-France, bureau d'étude spécialisé en économie de la santé, a été reçue. Cette proposition s'appuie, pour la partie médicale, sur une société savante, la société française neuro-vasculaire et sur la société française d'économie de la santé, pour le volet économique.
L'étude sera réalisée sous la responsabilité d'un économiste, co-auteur de plusieurs articles scientifiques sur les coûts de prise en charge des AVC et membre de deux groupes de travail sur ce thème mis en place en 2002 par l'agence nationale d'accréditation et d'évaluation en santé (Anaes). La direction scientifique du projet sera assurée par un comité comprenant quatre personnalités du monde médical ou scientifique, dont l'actuelle présidente de la société française neuro-vasculaire et le responsable du registre dijonnais des AVC, qui constitue la principale base de données de terrain constituée en France sur cette pathologie.
M. Jean Bardet, député, rapporteur pour les accidents vasculaires cérébraux, a précisé que la première partie de l'étude, qui portera sur l'évaluation des besoins sanitaires et leur répartition géographique, s'appuiera sur la construction d'un modèle épidémiologique fondé sur des données spécifiquement françaises grâce aux données collectées depuis 1985 par le registre dijonnais des AVC. L'analyse des schémas régionaux d'organisation sanitaire de troisième génération, qui viennent d'être rendus publics, permettra de tenir compte des disparités régionales.
Concernant les structures de prise en charge où coexistent des unités de soins neuro-vasculaires dédiées et une majorité d'unités de soins conventionnelles, il a précisé qu'elles feront l'objet d'une méta-analyse réalisée à partir des données de la littérature médicale et des réflexions des experts de la société française neuro-vasculaire et de la société française d'économie de la santé.
Rappelant que l'évaluation des coûts pour la collectivité d'une prise en charge précoce des victimes d'AVC se heurte à l'absence de données, il a indiqué qu'une enquête de terrain sera réalisée sur six cents patients, recrutés pour moitié dans une unité de soins neuro-vasculaire et dans une unité de soins conventionnelle, afin de comparer les coûts réels d'hospitalisation dans les deux types d'unités et d'établir un modèle de coût de prise en charge rénovée des AVC. Les résultats de cette enquête seront complétés par une synthèse des données existantes et s'appuieront sur les référentiels médicaux et les recommandations professionnelles en vigueur.
M. Jean Bardet, député, rapporteur pour les accidents vasculaires cérébraux, a regretté de ne pouvoir effectuer de réel choix en l'absence d'autre concurrent. Il a fait part de ses craintes que les travaux déjà réalisés par le candidat, bien qu'ils témoignent d'une compétence certaine sur ce sujet, ne puissent conduire à préjuger, s'agissant de l'analyse des coûts, des résultats de l'étude à mener. Il s'est également interrogé sur la partie de l'étude relative à la comparaison coût-efficacité des traitements, estimant qu'il est délicat de fixer un prix pour une vie humaine. Il s'est enfin étonné de ce que le candidat envisage déjà des recommandations pour la prise en charge des patients.
Par conséquent, il s'est interrogé sur la procédure par laquelle il serait possible d'obtenir une étude plus conforme aux orientations retenues par l'Opeps.
M. Jean-Michel Dubernard, député, vice-président, après avoir fait part de ses doutes sur la possibilité d'attirer de nouveaux candidats, a estimé qu'il serait plus judicieux d'obtenir du prestataire le recadrage du dossier présenté.
Mme Claudine Blum-Boisgard, membre du comité d'experts, a considéré que la proposition pourrait, en effet, être davantage orientée vers l'évaluation des structures de prise en charge précoce et le développement de leurs capacités.
M. Nicolas About, sénateur, président, a constaté que le projet prévoit d'ores et déjà une analyse du registre dijonnais des AVC et des schémas régionaux d'organisation sanitaire (Sros).
M. Jean-Michel Dubernard, député, vice-président, a proposé que l'Opeps précise au prestataire qu'il souhaite une évaluation approfondie de la situation existante en vue d'apporter des améliorations aux politiques de santé.
M. Paul Blanc, sénateur, rapporteur pour la politique vaccinale, a rappelé que, dans le cadre d'une procédure de marché public, si une proposition unique ne répond pas aux exigences fixées, il convient de la négocier avant de déclarer l'appel d'offres infructueux.
M. Guy Fischer, sénateur, s'est déclaré favorable à une négociation avec le prestataire pour éviter de perdre trop de temps avant le lancement de l'étude, alors que le thème de la prise en charge des AVC est actuellement au coeur de l'actualité médicale, sans que les moyens humains et matériels soient à la hauteur.
M. Jean-Michel Dubernard, député, vice-président, a ajouté que la question de la prise en charge des victimes d'AVC est également liée à celle de la durée d'attente dans les services d'urgence.
M. Nicolas About, sénateur, président, s'est interrogé à cet égard sur la possibilité, pour le système de soins, de prendre en charge ces personnes dans un délai inférieur à trois heures.
Revenant sur la question du rapport coût-efficacité en matière de soins aux victimes d'AVC, M. Jean-Michel Dubernard, député, vice-président, a rappelé qu'en France la prise en charge des patients est réalisée sur la base d'une évaluation coûts/bénéfices pour le patient d'ordre médical et non économique, mais que la dimension économique reste présente au travers des inégalités d'accès aux techniques coûteuses, telles que celles mises en oeuvre pour la prise en charge précoce des AVC.
Revenant sur la question de la présence des experts aux réunions de l'office, M. Nicolas About, sénateur, président, s'est interrogé sur la possibilité de leur accorder des jetons de présence ou, à tout le moins, de les rémunérer lorsqu'ils établissent des études de faisabilité. Il est à son sens légitime de les dédommager pour le travail fourni et le temps passé.
M. Jean-Michel Dubernard, député, vice-président, n'a pas souhaité que l'Opeps s'engage dans ce sens.
A l'issue de ce débat, l'Opeps s'est prononcé en faveur de la candidature d'Alcimed pour l'étude confiée au Sénat relative à la politique vaccinale de la France. Pour l'étude concernant les AVC, l'office a demandé au rapporteur de rencontrer le candidat afin de lui indiquer les réaménagements souhaités par l'Opeps, conformément aux dispositions prévues par le règlement de consultation du marché. Sous cette réserve, l'office a accepté l'offre présentée par la société REES-France.