ITALIE
En 1870,
l'occupation de Rome et la disparition des États pontificaux marquent
l'achèvement de l'unification italienne, en même temps qu'elles
ouvrent une longue période de crise entre le Saint-Siège et
l'État italien. Le pape se considère comme prisonnier dans son
palais du Vatican et refuse de reconnaître l'État italien.
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1) Les dispositions constitutionnelles relatives à la religion
a) L'interdiction de toute discrimination religieuse
Elle
constitue un droit fondamental, garanti par
l'article 3
de la
Constitution : «
Tous les citoyens ont la même
dignité sociale et sont égaux devant la loi, sans distinction de
sexe, de race, de langue, de religion, d'opinions politiques, de conditions
personnelles et sociales.
»
De plus,
l'article 20
précise : «
Le
caractère ecclésiastique et les fins religieuses ou cultuelles
d'une association ou d'une institution ne peuvent être la cause de
limitations législatives spéciales, ni de charges fiscales
particulières pour sa constitution, sa capacité juridique et
toutes ses formes d'activité.
»
Cette disposition, de portée très générale,
garantit non seulement les communautés religieuses constituées en
tant que telles, mais aussi toutes les organisations qui poursuivent des fins
religieuses, même s'il s'agit d'associations non reconnues.
b) La liberté religieuse
La
liberté de confession fait l'objet de
l'article 19
de la
Constitution : «
Chacun a le droit de professer librement sa
foi religieuse, sous n'importe quelle forme, individuelle ou collective, de
faire de la propagande pour sa foi et d'en exercer le culte en privé ou
en public, pourvu qu'il ne s'agisse pas de rites contraires aux bonnes
moeurs.
»
Par ailleurs, les alinéas 1 et 2 de
l'article 8
proclament la liberté du culte :
« Toutes les confessions religieuses sont également libres
devant la loi.
» Les confessions religieuses autres que la confession catholique ont
le droit de s'organiser selon leurs propres statuts, pourvu qu'ils ne soient
pas en contradiction avec l'ordre juridique italien. »
c) L'enseignement privé
L'article 33-3
affirme la liberté de
l'enseignement. Il énonce en effet à
l'alinéa 3 : «
Des collectivités et des
particuliers ont le droit de créer des écoles et des
établissements d'enseignement, sans qu'il en résulte de charges
pour l'État.
»
Comme le deuxième alinéa du même article
énonce : «
La République fixe les
règles générales relatives à l'instruction
(...) », il est prévu, au quatrième alinéa de
cet article, que la loi fixe les droits et obligations des écoles
privées qui demandent la parité.
d) L'instruction religieuse
La
Constitution ne comporte aucune disposition explicite relative à
l'instruction religieuse.
En revanche,
l'accord conclu entre la République italienne et le
Saint-Siège le 18 février 1984
et ratifié par la
loi n° 121 du 25 mars 1985 dispose à l'article 9
que : «
La République italienne (...) continuera
à assurer, dans le cadre des objectifs de l'école, l'enseignement
de la religion catholique dans les écoles publiques non universitaires
de tous ordres et de tous degrés.
»
Cependant, cet enseignement n'est pas obligatoire et les communautés
religieuses reconnues peuvent également organiser des cours
d'instruction religieuse dans les écoles publiques.
e) La reconnaissance des cultes
L'article 7
de la Constitution
régit
les
relations de l'État et de l'Église catholique
:
«
L'État et l'Église catholique sont, chacun dans
son ordre particulier, indépendants et souverains.
»
Leurs relations
sont réglées par les accords du
Latran. Les modifications de ces accords, acceptées par les deux
parties, n'exigent aucune procédure de révision
constitutionnelle.
»
S'agissant des
autres confessions
,
l'article 8-3
précise : «
Leurs relations avec l'État sont
réglées par la loi sur la base d'ententes avec les
représentants de chaque confession.
»
2) Les relations entre l'État et les communautés religieuses
Le système italien distingue trois catégories de confessions : l'Église catholique , qui jouit d'une position nettement privilégiée, les cultes qui ont signé un accord avec l'État et qui occupent une position intermédiaire, et les autres cultes .
a) L'Église catholique
Les
relations entre l'État et l'Église catholique sont
essentiellement régies par :
- l'accord du 18 février 1984 et son protocole additionnel, dits
accords de
Villa Madame
, qui modifient ceux du Latran ;
- l'accord du 15 novembre 1984, relatif aux communautés et aux
biens ecclésiastiques.
Ces accords, conclus entre l'État et le Saint-Siège, constituent
des traités internationaux. Ils ont été ratifiés
par le Parlement. Tout en affirmant la séparation des domaines religieux
et civil, ils continuent à accorder de nombreux privilèges,
notamment financiers, à l'Église catholique.
Pour régler certains points spécifiques (enseignement de la
religion catholique, reconnaissance civile de certaines fêtes
religieuses...), l'État a également conclu avec la
Conférence épiscopale des accords qui relèvent du droit
interne, à l'image de ceux qui peuvent être négociés
avec les autres communautés religieuses.
b) Les communautés religieuses signataires d'accords
Conformément à
l'article 8 de la
Constitution,
six communautés religieuses ont négocié avec
l'État
des accords qui ont ensuite été
ratifiés par le Parlement
. Ces accords relèvent du droit
interne.
Il s'agit de la Table vaudoise, qui rassemble des communautés vaudoises,
méthodistes et calvinistes des vallées piémontaises
(accord de 1984) ; de l'Église adventiste du
septième jour (accord de 1988) ; des Assemblées de
Dieu, d'inspiration pentecôtiste (accord de 1988) ; de l'Union des
communautés juives (accord de 1989) ; de l'Union chrétienne
évangélique baptiste (accord de 1995) et de l'Église
évangélique luthérienne (accord de 1995).
Ces accords reconnaissent notamment aux différentes communautés
concernées le droit d'entretenir des aumôneries, d'assurer
l'instruction religieuse des élèves dans les écoles
publiques et de célébrer des mariages civilement valables. Ils
leur permettent aussi de bénéficier des mêmes financements
publics que l'Église catholique.
Les témoins de Jéhovah et l'Union bouddhique ont signé en
mars 2000 des accords avec l'État, mais ces accords n'ont pas encore
été ratifiés par le Parlement. Par ailleurs, un accord est
en cours de négociation entre l'État et les communautés
islamiques. Pour l'heure, ces confessions continuent donc à appartenir
à la troisième catégorie.
c) Les autres communautés religieuses
Les
autres groupements religieux relèvent soit de
la loi du
24 juin 1929 relative aux cultes admis
soit du droit commun des
associations
.
La loi du 24 juin 1929 et le décret du 28 février 1930
pris pour son application permettent aux communautés religieuses non
catholiques d'être reconnues et de devenir des personnes morales
sui
generis
. Une seule condition est posée pour leur
reconnaissance : elles ne doivent pas professer des principes contraires
à l'ordre public et aux bonnes moeurs. La reconnaissance obtenue, elles
peuvent se prévaloir du statut fiscal avantageux des organismes de
bienfaisance et des établissements d'enseignement. Elles peuvent
également envoyer des aumôniers dans les prisons et les casernes
(mais pas dans les écoles publiques), et les mariages qu'elles
célèbrent ont des effets civils. Elles sont soumises à la
surveillance du ministère de l'Intérieur. En particulier, elles
ont besoin d'une autorisation pour effectuer des opérations
immobilières d'une certaine ampleur ou pour accepter des donations. Il
existe actuellement une trentaine de communautés religieuses qui
relèvent de ce régime.
La reconnaissance d'un culte en application de la loi de 1929 constitue en
général l'étape préalable à la signature
d'un accord avec l'État. Lorsqu'un tel accord est signé, il se
substitue, pour la communauté concernée, aux dispositions de la
loi 1929 et du décret de 1930.
Compte tenu de l'ancienneté de cette loi et du fait qu'elle comporte
certaines dispositions en contradiction avec celles de la Constitution, sa
révision est envisagée depuis quelques années. Un projet
de loi comportant des dispositions relatives à la liberté
religieuse et abrogeant la législation sur les cultes admis a donc
été déposé à la Chambre des
députés le 3 juillet 1997. Son examen en commission n'est
pas achevé. Ce projet ne modifie pas la répartition des
communautés religieuses italiennes en trois groupes, mais il remplace la
notion de « culte admis » par celle de
« confession reconnue ». En outre, il tend à
concrétiser l'affirmation constitutionnelle de liberté des
confessions religieuses.
Les communautés religieuses qui n'ont pas opté pour la
reconnaissance par le biais de la législation de 1929 sont
généralement constituées en associations.
3) Le financement des dépenses des communautés religieuses
La
loi n° 222 du 20 mai 1985 relative aux communautés
ecclésiastiques et aux biens religieux
, adoptée notamment
pour permettre l'application du protocole conclu entre le Saint-Siège et
l'État italien, a complètement modifié les
mécanismes de financement de l'Église catholique.
Elle a en particulier supprimé le système des
bénéfices ecclésiastiques et transféré les
propriétés foncières associées aux charges
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à des organes
créés spécifiquement, les instituts diocésains pour
la subsistance du clergé, qui sont chargés de la
rémunération des ministres du culte. Une
péréquation des ressources est ensuite réalisée
grâce à l'Institut central pour la subsistance du clergé.
En remplacement de l'ancien système, la loi a introduit un dispositif de
financement public dont bénéficient non seulement l'Église
catholique, mais également les communautés religieuses qui ont
conclu des accords avec l'État.
a) Les communautés religieuses reconnues
L'Église catholique, ainsi que les six communautés religieuses qui ont conclu des accords avec l'État, bénéficient de financements publics. Elles peuvent en particulier recevoir une fraction de l'impôt sur le revenu, et les dons qui leur sont faits sont fiscalement déductibles. Elles bénéficient également d'un régime fiscal assez avantageux.
- • L'affectation d'une partie du produit de l'impôt sur le revenu
- l'État , pour lui permettre de financer ses dépenses d'entretien du patrimoine historique, d'aide aux réfugiés, d'assistance aux victimes de catastrophes naturelles... ;
- l'Église catholique pour son action pastorale, la rémunération de ses prêtres ou des mesures sociales ;
- l'une des communautés religieuses qui a signé un accord avec l'État .
Si le contribuable n'exprime aucun souhait, la fraction de 0,8 % est affectée aux différents bénéficiaires potentiels en proportion des choix faits par les autres contribuables.
L'Union des communautés juives et l'Union chrétienne évangélique baptiste ont décidé de ne pas participer à ce système, qui contredit le principe d'autonomie, auquel elles sont très attachées. La Table vaudoise, l'Église adventiste du septième jour et l'Église pentecôtiste ont décidé d'affecter les revenus provenant de cette source de financement à leurs activités sociales et humanitaires.
- • La déductibilité des dons
L'Union des communautés juives, qui a refusé de recevoir une partie de l'impôt sur le revenu, a obtenu que le plafond des dons déductibles, pour ce qui la concerne, soit porté à 7,5 millions de lires (c'est-à-dire 25 000 FRF).
- • Le régime fiscal avantageux
- réduction de 50 % du montant de l'impôt sur les sociétés, payé pour les activités de nature commerciale ;
- exemption de l'impôt sur les successions ;
- exonération de la TVA.
- • Les subventions indirectes
Les aumôniers catholiques de l'armée, des prisons et des hôpitaux sont rémunérés sur des fonds publics. En revanche, les aumôniers des autres communautés sont à la charge de ces dernières.
L'État assume le coût de l'instruction religieuse catholique dans les établissements publics d'enseignement primaire et secondaire : deux heures hebdomadaires dans les premiers, une heure dans les seconds.
b) Les autres communautés religieuses
Elles ne bénéficient d'aucun financement, direct ou indirect, de l'État. Cependant, elles profitent du même régime fiscal que les communautés religieuses reconnues.