Sommaire
Présidence de M. Gérard Larcher
Secrétaires :
MM. Philippe Nachbar, Jean-Paul Virapoullé.
2. Saisine du Conseil constitutionnel
3. Loi de finances pour 2010. – Suite de la discussion d’un projet de loi
Écologie, développement et aménagement durables
Budget annexe : Contrôle et exploitation aériens
Compte spécial : Contrôle et sanction automatisés des infractions au code de la route
Compte spécial : Avances au fonds d'aide à l'acquisition de véhicules propres
MM. Alain Lambert, rapporteur spécial de la commission des finances ; Yvon Collin, rapporteur spécial de la commission des finances ; Mme Fabienne Keller, rapporteur spécial de la commission des finances ; MM. Gérard Miquel, rapporteur spécial de la commission des finances ; Jean-Paul Emorine, président de la commission de l’économie, en remplacement de M. Jean Bizet, rapporteur pour avis ; Jean-François Le Grand, rapporteur pour avis de la commission de l’économie ; Francis Grignon, rapporteur pour avis de la commission de l’économie ; Roland Courteau, rapporteur pour avis de la commission de l’économie ; Ambroise Dupont, rapporteur pour avis de la commission de la culture.
Mme Évelyne Didier, MM. Roland Ries, François Fortassin.
PRÉSIDENCE DE M. Jean-Claude Gaudin
MM. Louis Nègre, Michel Teston, Mmes Anne-Marie Escoffier, Mireille Schurch, MM. Paul Raoult, Jean Desessard.
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État chargé des transports ; Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État chargée de l'écologie.
M. Daniel Soulage, Mme la secrétaire d'État.
M. Martial Bourquin, Mme la secrétaire d'État.
M. François Fortassin, Mme la secrétaire d'État.
M. Gérard Bailly, Mme la secrétaire d'État.
Mmes Évelyne Didier, la secrétaire d'État.
M. Marcel Deneux, Mme la secrétaire d'État.
M. Daniel Raoul, Mme la secrétaire d'État.
4. Hommage à une personnalité étrangère
5. Loi de finances pour 2010. – Suite de la discussion d'un projet de loi
Écologie, développement et aménagement durables
Budget annexe : Contrôle et exploitation aériens
Compte spécial : Contrôle et sanction automatisés des infractions au code de la route
Compte spécial : Avances au fonds d’aide à l’acquisition des véhicules propres
Questions-réponses-répliques (suite)
Mmes Anne-Marie Escoffier, Chantal Jouanno, secrétaire d'État chargée de l'écologie.
M. Michel Doublet, Mme la secrétaire d'État.
Mme Mireille Schurch, M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État chargé des transports.
MM. Michel Teston, le secrétaire d'État.
M. Dominique de Legge, Mme la secrétaire d'État.
Mme Odette Herviaux, M. le secrétaire d'État.
MM. Pierre Bernard-Reymond, le secrétaire d'État.
M. Paul Raoult, Mme la secrétaire d'État.
M. Alain Vasselle, Mme la secrétaire d'État.
Amendement no II-150 du Gouvernement. – Mmes la secrétaire d'État, Fabienne Keller, rapporteur spécial de la commission des finances ; Nicole Bricq, MM. Éric Doligé, Alain Vasselle, Mme Évelyne Didier. – Adoption.
Amendement no II-152 du Gouvernement. – Mmes la secrétaire d'État, Fabienne Keller, rapporteur spécial. – Adoption.
Amendement no II-149 du Gouvernement. – MM. le secrétaire d'État, Gérard Miquel, rapporteur spécial de la commission des finances. – Adoption.
Amendement no II-95 rectifié de M. Gérard Bailly. – M. Gérard Bailly, Mmes Fabienne Keller, rapporteur spécial ; la secrétaire d'État, M. Alain Vasselle. – Adoption.
PRÉSIDENCE DE Mme Monique Papon
Amendement no II-129 de M. Jean-Pierre Sueur. – M. Jean-Pierre Sueur, Mmes Fabienne Keller, rapporteur spécial ; la secrétaire d'État, M. Éric Doligé, Mme Nicole Bricq, M. Marc Daunis. – Rejet.
Amendement no II-128 de M. Jean-Pierre Sueur. – M. Jean-Pierre Sueur, Mmes Fabienne Keller, rapporteur spécial, la secrétaire d'État, Nicole Bricq, M. Éric Doligé. – Retrait.
Amendement no II-151 du Gouvernement. – MM. le secrétaire d'État, Gérard Miquel, rapporteur spécial ; Gérard Bailly. – Adoption.
Amendement no II-13 rectifié de la commission. – MM. Gérard Miquel, rapporteur spécial ; le secrétaire d'État. – Adoption.
Amendement no II-119 de M. Roland Courteau, rapporteur pour avis. – M. Roland Courteau, rapporteur pour avis de la commission de l’économie ; Mme la secrétaire d'État. – Retrait.
Adoption des crédits modifiés de la mission « Écologie, développement et aménagement durables ».
Adoption des crédits du budget annexe « Contrôle et exploitation aériens ».
Adoption des crédits du compte spécial « Contrôle et sanctions automatisés des infractions au code de la route ».
Adoption des crédits du compte spécial « Avances au fonds d’aide à l’acquisition des véhicules propres ».
Article additionnel après l'article 52 bis
Amendement no II-130 de M. Jean-Pierre Sueur. – M. Jean-Pierre Sueur, Mmes Fabienne Keller, rapporteur spécial ; la secrétaire d'État, Nicole Bricq. – Retrait.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances.
Suspension et reprise de la séance
MM. Gérard Longuet, rapporteur spécial de la commission des finances ; Thierry Foucaud, rapporteur spécial de la commission des finances ; Jean-Claude Carle, rapporteur pour avis de la commission de la culture ; Mmes Françoise Férat, rapporteur pour avis de la commission de la culture ; Brigitte Gonthier-Maurin, rapporteur pour avis de la commission de la culture.
M. René-Pierre Signé, Mme Françoise Laborde, M. Alain Vasselle, Mme Brigitte Gonthier-Maurin.
MM. Luc Chatel, ministre de l'éducation nationale, porte-parole du Gouvernement ; Bruno Le Maire, ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche.
MM. Jean Arthuis, président de la commission des finances ; Luc Chatel, ministre.
MM. Claude Domeizel, Luc Chatel, ministre.
Mme Anne-Marie Escoffier, M. Luc Chatel, ministre.
Mme Monique Papon, M. Luc Chatel, ministre.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin, M. Luc Chatel, ministre.
Mme Françoise Cartron, M. Luc Chatel, ministre.
MM. Yvon Collin, Luc Chatel, ministre.
Mme Colette Mélot, M. Luc Chatel, ministre.
MM. Ivan Renar, Luc Chatel, ministre.
Mme Claudine Lepage, M. Luc Chatel, ministre.
Mlle Sophie Joissains, M. Luc Chatel, ministre.
MM. Claude Bérit-Débat, Luc Chatel, ministre.
MM. Jackie Pierre, Luc Chatel, ministre.
MM. Jean-Luc Fichet, Luc Chatel, ministre.
Amendement no II-91 rectifié de M. Jean-Claude Carle. – MM. Jean-Claude Carle, Gérard Longuet, rapporteur spécial ; Luc Chatel, ministre ; Yannick Bodin, Mme Brigitte Gonthier-Maurin. – Rejet.
Amendement no II-126 de M. Gérard Longuet. – MM. Jacques Legendre, le président de la commission, Luc Chatel, ministre ; Yannick Bodin, Mme Brigitte Gonthier-Maurin. – Adoption.
Mme Françoise Férat.
Adoption des crédits modifiés.
Amendement no II-14 de la commission. – MM. Gérard Longuet, rapporteur spécial ; Luc Chatel, ministre ; Gérard Bailly. – Adoption.
Adoption de l'article modifié.
compte rendu intégral
Présidence de M. Gérard Larcher
Secrétaires :
M. Philippe Nachbar,
M. Jean-Paul Virapoullé.
1
Procès-verbal
M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
2
Saisine du Conseil constitutionnel
M. le président. J’ai été informé, par courrier en date du 30 novembre, par le président du Conseil constitutionnel que celui-ci a été saisi, le 27 novembre 2009, d’une demande d’examen de la conformité à la Constitution par plus de soixante députés de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2010.
Acte est donné de cette communication.
3
Loi de finances pour 2010
Suite de la discussion d’un projet de loi
M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2009, adopté par l’Assemblée nationale. (nos 100, 101).
Écologie, développement et aménagement durables
Budget annexe : Contrôle et exploitation aériens
Compte spécial : Contrôle et sanction automatisés des infractions au code de la route
Compte spécial : Avances au fonds d'aide à l'acquisition de véhicules propres
M. le président. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Écologie, développement et aménagement durables », ainsi que du budget annexe « Contrôle et exploitation aériens » et des comptes spéciaux « Contrôle et sanction automatisés des infractions au code de la route » et « Avances au fonds d’aide à l’acquisition de véhicules propres ».
La parole est à M. Alain Lambert, rapporteur spécial.
M. Alain Lambert, rapporteur spécial de la commission des finances. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État chargé des transports, mes chers collègues, conformément à l’esprit de la loi organique, je commencerai par faire une présentation succincte des crédits, avant de formuler quelques observations et interrogations, le tout dans les dix minutes qui me sont imparties ! (Sourires.)
Les crédits demandés en 2010 pour la mission « Écologie, développement et aménagement durables » s’élèvent à 10,29 milliards d’euros en autorisations d’engagement, les AE, et à 10,15 milliards d’euros en crédits de paiement, les CP, soit 0,7 % de plus qu’en 2009, évolution conforme à la loi de programmation que nous avons adoptée.
Le programme 203 – programme majeur au sein de la mission – couvre les infrastructures et les services de transports. En 2010, il mobilise 4,44 milliards d’euros d’AE et 4,35 milliards d’euros de CP. Dans le cadre de la révision générale des politiques publiques, la RGPP, les moyens en personnel seront réduits d’environ 300 emplois en 2010.
Nous déplorons toujours, monsieur le ministre, que cette politique soit majoritairement financée par des crédits extérieurs ou extrabudgétaires, notamment par des dépenses fiscales, à hauteur de 803 millions d’euros, et des fonds de concours provenant des collectivités territoriales et de l’AFITF, l’Agence de financement des infrastructures de transport de France.
Ce constat conduit la commission des finances à poser, pour la seconde fois – voire la troisième –, la question du rôle de l’AFITF, dont les circuits de financement demeurent complexes. Le rapport public annuel de la Cour des comptes, auquel vous ne pouvez pas être indifférent, monsieur le secrétaire d'État, souligne qu’elle est « une agence de financement aux ambitions limitées, privée de ses moyens, désormais inutile », qui « voit circuler des crédits qui partent du budget général avant d’y retourner ». Cette agence n’apporte pas de réelle valeur ajoutée puisqu’elle n’est pas devenue l’instance d’évaluation et de décision qui aurait conforté sa légitimité. Il nous sera très utile de savoir ce que vous en pensez, monsieur le secrétaire d'État.
Son budget devrait être consacré aux transports non routiers pour près de 62 %, conformément au redéploiement modal prévu par le Grenelle de l’environnement. La subvention de l’État diminue de 6,7 %, à périmètre constant, mais elle demeure importante. Elle s’élève à 980 millions d’euros. Je redoute, monsieur le ministre, que cette subvention, qualifiée de « provisoire », ne devienne durable. En effet, la taxe poids lourds sera sans doute reportée à 2012 et ne prendra que partiellement le relais.
J’évoquerai maintenant Réseau ferré de France, RFF. L’établissement public change de modèle économique avec l’entrée en vigueur de la réforme de la tarification. Les concours de l’État sont désormais affectés aux activités ferroviaires dont les péages ne couvrent pas le coût complet. Cette réforme permet de diminuer la subvention de 3,1 %, qui atteindra malgré tout 2,37 milliards d’euros.
Cette évolution vise à une relative amélioration de la situation financière de RFF, qui demeure fragile, sa dette ayant augmenté de 800 millions d’euros en 2008 pour atteindre 28,2 milliards d’euros. Il s’agit là d’un grave motif d’inquiétude, car la rénovation nécessaire du réseau va conduire à alourdir encore cette dette.
Le secteur ferroviaire connaît actuellement d’importants bouleversements. À cet égard, je souhaite vous poser trois questions, monsieur le secrétaire d'État.
Tout d’abord, est-on bien sûr que l’engagement national pour le fret ferroviaire ne sera pas un énième et désespérant plan de relance ? J’ai en effet déjà présenté à plusieurs reprises du haut de cette tribune l’« ultime » plan de relance du fret ferroviaire ! Les priorités paraissent multiples et les financements peu clairs... Je ne doute pas que vos explications seront limpides, monsieur le secrétaire d'État.
Ensuite, comment le Gouvernement accueille-t-il les propositions de la SNCF sur les trains d’aménagement du territoire, qui présentent un déficit d’exploitation récurrent et dont les voies sont menacées d’obsolescence ? Doit-on, comme le souhaite la SNCF, mettre en place une société distincte pour les matériels roulants dédiés à ces dessertes et prévoir une compensation financière dans le cadre d’un contrat de service public ? Si oui, selon quelles modalités ? C’est avec une grande attention que j’écouterai vos réponses, monsieur le secrétaire d'État.
Enfin, le dernier rapport de la Cour des comptes sur les TER, sévère, suggère dans certains cas le remplacement des dessertes par des autocars. Êtes-vous favorable à une telle solution, monsieur le secrétaire d'État ? Portez-vous la même appréciation que la SNCF sur ce sujet ?
Quant à Voies navigables de France, la rationalisation de son organisation se poursuit. Elle se traduit notamment par un recentrage sur le réseau magistral. La subvention de l’État s’élèvera à 58,9 millions d’euros. Elle inclura une dotation supplémentaire de 4 millions d’euros au titre du Grenelle de l’environnement. Au fond, la situation financière de VNF demeure assez confortable.
Pour terminer sur ce programme, je relève deux priorités et une lacune budgétaires. Le soutien au transport combiné devrait bénéficier d’une enveloppe supplémentaire de 8 millions d’euros au titre de l’engagement national pour le fret ferroviaire. Nous proposerons un amendement visant à augmenter ce montant de 1,5 million d’euros par transfert de crédits.
Les crédits d’entretien et d’exploitation des grands ports maritimes sont accrus de 5,85 millions d’euros.
Le taux de renouvellement des couches de surface du réseau routier devrait redescendre à 6 % en 2010, ce qui demeure insuffisant pour garantir une durée de vie optimale des chaussées. Ce n’est pas là un mince sujet ! La tendance générale à la dégradation du réseau routier national n’est donc pas encore enrayée, ce qui nous inquiète.
J’aborde à présent le programme 205, « Sécurité et affaires maritimes », que vous connaissez si bien, monsieur le secrétaire d'État. Il sera doté en 2010 de 133 millions d’euros en AE et de 135,5 millions d’euros en CP, soit une hausse de 0,7 % à périmètre constant. Cette dotation est plus que doublée par la masse salariale des 3 228 ETPT, équivalents temps plein travaillé. Les dépenses fiscales concourent également pour 244 millions d’euros. L’évaluation du système optionnel de taxe au tonnage reste approximative. Nous en surveillerons de très près l’évolution.
La principale réforme est la réorganisation des services déconcentrés des affaires maritimes. Elle vise à réaliser des économies de gestion et à rationaliser les implantations. Je regrette que le ministère n’ait pas fourni une évaluation des bénéfices escomptés de cette réforme. Pourriez-vous nous en dire davantage sur ce sujet, monsieur le secrétaire d'État ?
Les effectifs diminueront de 57 ETPT en 2010. Une réforme des écoles nationales de la marine marchande est en cours. Leur gestion sera confiée à un établissement public unique. Nous approuvons cette mesure de bonne gestion.
Trois priorités budgétaires sont mises en œuvre : la poursuite de la modernisation des centres régionaux opérationnels de surveillance et de sauvetage, les CROSS, et de leurs systèmes d’information ; la protection de l’emploi maritime, avec une augmentation des aides à la flotte de commerce sous pavillon français, qui comptait seulement 296 navires à la fin de 2008 ; un dispositif de contrôle et de surveillance des pêches enfin revalorisé.
Le programme 113, « Urbanisme, paysages, eau et biodiversité », mobilise d’importantes ressources humaines – 15 222 ETPT – et prend appui sur des opérateurs puissants, aux ressources extrabudgétaires considérables. Ainsi, les ressources fiscales et les ressources propres des agences de l’eau atteignent 2,3 milliards d’euros, comparées aux 350 millions d’euros du programme. Les écarts sont tout à fait considérables !
En 2010, ce programme se résume en deux mots : Grenelle et RGPP.
Il porte la marque du Grenelle de l’environnement : 61 millions d’euros – soit 24 millions d’euros de plus qu’en 2009 – sont consacrés à sa mise en œuvre dans les domaines de l’urbanisme, de l’eau et de la biodiversité.
Il est en outre porteur de plusieurs réformes issues de la RGPP. La principale d’entre elles est la cessation progressive des activités d’ingénierie publique concurrentielle exercées actuellement par les directions départementales de l’équipement, les DDE, et les directions départementales de l’équipement et de l’agriculture, les DDEA. Cette réforme se traduit par un plan de suppression d’environ 3 300 ETP entre 2009 et 2011. Il en résultera une économie dont le montant est estimé à 48 millions d’euros en 2010. La mutualisation des effectifs des polices de l’eau et de la nature se poursuit également.
Enfin, pour 4 millions d’euros en 2010, des actions de formation des agents sont engagées dans le cadre de la refonte de la fiscalité de l’urbanisme et du mode de traitement des actes d’urbanisme, domaines dans lesquels il y a beaucoup à faire. Cette refonte devrait permettre des gains de productivité équivalant à 1 000 ETPT en 2011 et, à terme, une économie budgétaire de l’ordre de 40 millions d’euros par an.
Monsieur le secrétaire d'État, j’écouterai avec beaucoup d’attention les réponses que vous apporterez aux questions que je viens de poser. Elles sont importantes pour la commission des finances. Vous rappeler les crédits dont vous avez demandé l’inscription ne vous apporterait rien ; en revanche, écouter les réponses à vos questions nous permettra quasiment d’atteindre le nirvana ! (Exclamations amusées sur l’ensemble des travées.)
M. Alain Lambert, rapporteur spécial de la commission des finances. Monsieur le président, l’avis de la commission des finances sur ces trois programmes sera donné dans un instant par Fabienne Keller, dernier rapporteur spécial à s’exprimer sur ce sujet.
Vous noterez, monsieur le président, que je n’ai utilisé que neuf minutes et quinze secondes de mon temps de parole ! (Applaudissements sur les travées de l’UMP et sur le banc des commissions.)
M. le président. La parole est à M. Yvon Collin, rapporteur spécial.
M. Yvon Collin, rapporteur spécial de la commission des finances. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, madame la secrétaire d’État chargée de l’écologie, mes chers collègues, il m’appartient de vous présenter successivement les crédits du programme 170, « Météorologie », du programme 159, « Information géographique et cartographique », et du budget annexe « Contrôle et exploitation aériens ».
Le programme « Météorologie » n’appelle pas de longs développements. Il est doté de 190 millions d’euros, qui constituent la subvention pour charges de service public de Météo France. Cet opérateur fait aujourd’hui face à une réduction de ses marges financières, qui résulte de la contrainte budgétaire imposée aux administrations et à leurs opérateurs, mais aussi des effets de la crise économique sur les recettes commerciales.
Selon la commission des finances, cette situation justifie d’autant plus les réformes de structure conduites par Météo France dans le prolongement de la RGPP. La principale de ces réformes est la réduction du nombre des implantations territoriales de l’opérateur. À la fin de l’année 2008, la mise en œuvre de cette réduction a suscité des tensions sociales qui semblent aujourd’hui apaisées. Selon les informations qui nous ont été transmises, les fermetures de sites s’échelonneront de 2012 à 2017. À l’horizon 2017, le réseau de Météo France devrait être constitué de cinquante-cinq implantations, soit un peu plus de la moitié des cent huit implantations actuelles.
vous puissiez, dans votre intervention, nous fournir un « état des lieux » de cette réforme.
Le programme 159, « Information géographique et cartographique » fait apparaître une subvention pour charges de service public de l’Institut géographique national, l’IGN d’un montant de 73 millions d’euros. Le budget de l’établissement pour 2009 s’exécute dans un contexte difficile, qui se traduit par une réduction importante de son chiffre d’affaires depuis l’automne 2008. Les mêmes tendances devraient d’ailleurs être observées en 2010.
La situation de l’IGN justifie d’autant plus notre vigilance que l’opérateur a fait l’objet d’observations particulièrement sévères de la part de la Cour des comptes en 2009 : stratégie de diversification « hasardeuse et mal maîtrisée », frontière mal définie entre les missions régaliennes et concurrentielles de l’IGN, gestion « dispendieuse »… autant de griefs sur lesquels nous aimerions recueillir votre point de vue, monsieur le secrétaire d’État.
Nous n’avons pas souhaité amender à la baisse les crédits de I’IGN, dans un contexte où l’établissement fait face à une réduction de sa subvention et à une érosion sensible de ses recettes commerciales. Nous souhaitons néanmoins connaître la teneur et le calendrier des mesures que vous comptez prendre pour remédier aux graves insuffisances relevées par la Cour des comptes.
Sans entrer dans les détails de chaque programme, je souhaite enfin vous exposer les difficultés d’équilibrage du budget annexe « Contrôle et exploitation aériens » et les nombreuses réformes en cours au sein de la direction générale de l’aviation civile, la DGAC.
Nous le savons, le secteur du transport aérien connaît actuellement d’importantes difficultés. L’International Air Transport Association, l’IATA, prévoit une baisse de 8 % du trafic aérien global et de 15 % du chiffre d’affaires cumulé sur l’année 2009. Sur le premier semestre de l’année 2009, le groupe Aéroports de Paris a connu une baisse de trafic de 6,4 % et le groupe Air France-KLM a enregistré une baisse de son chiffre d’affaires de 20,5 %.
Le budget annexe doit donc répondre à de multiples défis en 2010, et son équilibre repose sur des prévisions de diminution moyenne du trafic de 7 % en 2009, avec une légère remontée en 2010, à hauteur de 1,5 %. Cet équilibre doit cependant être susceptible de se maintenir sans reposer sur la hausse des redevances ou sur l’endettement.
Sur le plan structurel et organisationnel, la DGAC est engagée dans de nombreuses réformes. J’en relèverai quelques-unes en particulier.
La mutualisation et la modernisation des fonctions support devront se traduire dans le nouveau protocole pluriannuel négocié avec les organisations syndicales.
La télédéclaration des recettes et la mutualisation des achats publics par site sont mutualisés devraient normalement permettre au nouveau système d’information financière et de comptabilité analytique d’être opérationnel en 2011.
En matière de navigation aérienne – c’est le programme 612 –, le projet « Espace 2011 » permettra d’expérimenter des synergies entre les services d’approche d’Orly, Roissy et Athis-Mons, qui devraient être regroupés dans un nouveau centre modernisé à l’horizon 2015-2017, conformément au projet Organisme parisien d’en-route et d’approche, ou OPERA.
Le projet européen Single European Sky ATM Research, ou SESAR, est en voie d’avancement dans le cadre du renforcement de l’intégration de l’espace aérien européen, et le traité Functional Airspace Block Europe Central, ou FABEC, sera finalisé en 2010 avec cinq autres États européens.
Un nouveau système de régulation économique des services de navigation aérienne, fondé sur l’amélioration de la performance, sera mis en place, et le deuxième contrat de régulation économique pour 2011-2016 avec Aéroports de Paris est en préparation.
Concernant la formation aéronautique, un contrat d’objectifs, de moyens et de performances avec l’École nationale de l’aviation civile, l’ENAC, est en cours d’élaboration. Le Service d’exploitation de la formation aéronautique poursuivra son plan de modernisation et de réduction des coûts, l’objectif étant d’atteindre 350 ETPT, contre 420 actuellement. Les synergies entre formations théorique et pratique devraient conduire à la fusion de ces deux écoles en 2011, ce qui me semble être une bonne mesure.
Au-delà de ces réformes, une évolution statutaire de la DGAC est envisagée, avec une transformation en établissement public. Il serait souhaitable, monsieur le secrétaire d’État, que vous nous fassiez part de votre position sur ce sujet particulièrement sensible, notamment pour les personnels, d’autant que cette évolution intervient dans le contexte de mise en place du ciel unique européen.
Sur le plan financier, le budget annexe est dans une situation qu’on peut qualifier de « tendue ». Comme je l’ai indiqué, le projet de budget pour 2010 tient compte d’une baisse du trafic de 7 % en 2009.
L’autorisation d’emprunt a été relevée de 100 millions d’euros par la loi du 20 avril 2009 de finances rectificative pour 2009, et 65 millions d’euros supplémentaires devraient être ouverts par un prochain décret d’avance.
Cependant, la baisse des recettes de fonctionnement pourrait être de 10 % en 2009. Dès lors, les hypothèses d’élaboration du budget pour 2010 – l’équilibre prévisionnel s’établit à 1 937,5 millions d’euros – me paraissent d’ores et déjà dépassées.
Quoi qu’il en soit, l’équilibre prévisionnel du budget annexe en 2010 actionne trois leviers.
D’abord, les recettes de fonctionnement sont en augmentation. Le taux des redevances de navigation aérienne devrait être relevé de 4,9 %, tout comme les tarifs de la taxe de l’aviation civile, ainsi que le prévoit l’article 22 du projet de loi de finances. De même, l’extension du périmètre des redevances de surveillance et de certification se poursuivra, même si l’on peut regretter que le ministère ait renoncé à créer une redevance pour les manifestations aériennes. Nous espérons que l’instauration d’une redevance de route océanique permettra d’améliorer sensiblement le taux de couverture des coûts du contrôle aérien en outre-mer.
Ensuite, le recours à l’emprunt sera plus important. Ainsi, après une stabilisation entre 2006 et 2008, l’endettement net augmenterait de près d’un tiers par rapport à la fin de l’année 2008, pour atteindre 1 174 millions d’euros. Nous nous inquiétons d’ailleurs de cette évolution vers une dette moins soutenable.
Enfin, un plan d’économies de 40 millions d’euros sur les dépenses, déjà engagé en 2009, sera mis en œuvre. Il est en partie lié à l’application de la RGPP. Il se répartit de manière à peu près équivalente entre dépenses de fonctionnement et reports de projets d’investissement.
Le plafond d’emplois pour 2010 est également abaissé de 108 ETPT, ce qui correspond à la première tranche de mise en œuvre de la RGPP.
Cependant, il n’est pas évident que ce plan d’économies soit suffisant pour assurer l’équilibre du budget annexe. J’estime qu’il devra tenir compte des observations formulées par la Cour des comptes, dans deux récents référés, sur la négociation d’un protocole social et sur le SEFA, le service d'exploitation de la formation aéronautique. (Applaudissements sur les travées du RDSE et sur le banc des commissions. – M. Michel Guerry applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme Fabienne Keller, rapporteur spécial.
Mme Fabienne Keller, rapporteur spécial de la commission des finances. Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, je poursuis ce tour d’horizon avec la présentation des programmes « Prévention des risques », « Énergie et après-mines », et du compte de concours financiers « Avances au Fonds d’aide à l’acquisition de véhicules propres ».
Le programme 181, « Prévention des risques », connaît une incontestable montée en puissance puisque ses crédits augmentent de 30 %. Cette hausse intéresse tout particulièrement la prévention des risques technologiques et des pollutions, en particulier le financement des fameux plans de prévention des risques technologiques, les PPRT.
Par ailleurs, 60 millions d’euros supplémentaires sont consacrés à la mise en œuvre des mesures du Grenelle de l’environnement, ce dont nous nous réjouissons tous. À cet égard, le traitement des sites pollués, des déchets et la santé-environnement sont, bien entendu, des sujets centraux. Nous avons là un exemple typique des suites budgétaires tangibles du Grenelle, qui se traduisent également en termes d’emplois. Les crédits de personnel augmenteront de 11 % par rapport à 2009. Je pense notamment à la création de 144 postes fléchés « Grenelle » en régions.
Toujours sur les créations de postes, il nous est indiqué que les sous-effectifs de l’inspection des installations classées, dont nous parlons ici chaque année, seraient en voie de résorption. Madame la secrétaire d’État, la commission des finances aimerait vous entendre le confirmer et nous donner des perspectives. À quel moment aurons-nous enfin les effectifs pour assurer à la fois l’établissement des PPRT et une bonne surveillance des sites ? Il est évident que la catastrophe de l’usine AZF nous a rendus particulièrement sensibles sur de tels sujets.
Au-delà des crédits inscrits, ce programme mobilise des ressources extrabudgétaires. Il en va ainsi des concours de l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie, l’ADEME, à raison de 20 millions d’euros pour les sites pollués, de 30 millions d’euros pour la résorption des « points noirs bruit » et de 83 millions d’euros pour les déchets, et des interventions du Fonds de prévention des risques naturels majeurs, ou « Fonds Barnier », qui atteindront 153 millions d’euros en 2010.
Après deux années d’augmentation des ressources du fonds, grâce aux initiatives prises par la commission des finances comme par le Gouvernement et tendant à l’augmentation des taux, les réponses au questionnaire nous indiquent que ce fonds pourrait, de nouveau, être en déficit dès 2011, les dépenses étant supérieures aux recettes attendues. Madame la secrétaire d’État, pourriez-vous nous donner des indications sur la sécurisation de ce fonds ?
Je passe rapidement sur le programme 174 « Énergie et après-mines », qui, pour l’essentiel, garantit des droits aux mineurs et aux ayants droit des anciens mineurs.
Toutefois, je ne peux évoquer pas ce programme sans dire un mot de la dépense fiscale importante qui lui est rattachée, à savoir le crédit d’impôt « développement durable ». Son coût est estimé à 2,8 milliards d’euros pour 2009 et à une somme à peu près similaire pour 2010, même si ces montants pourraient être abaissés en raison de la crise. Le chiffrage du crédit d’impôt est assez erratique d’une année sur l’autre. Il est vrai qu’il soulève des difficultés techniques. Cela étant, pourriez-vous, madame la secrétaire d’État, nous donner la dernière estimation de ce dispositif important, qui exerce une incitation forte sur les ménages ? Comme il est tout à fait considérable, nous devons essayer de l’anticiper.
Je souhaite aborder le rôle de l’ADEME dans la mise en œuvre des objectifs du programme 174. Cet organisme est central. À la demande de la commission des finances, une enquête sera menée en 2010 par la Cour des comptes pour suivre l’emploi par l’ADEME des 500 millions d’euros de ressources de taxe générale sur les activités polluantes, ou TGAP, qui lui sont affectés. Il faut piloter avec soin les nouvelles missions de l’Agence, car il n’est pas si fréquent de disposer de telles marges de manœuvre en matière d’action publique environnementale.
Permettez-moi d’évoquer également le compte de concours financiers « Avances au Fonds d’aide à l’acquisition de véhicules propres ». Introduit en 2008, le dispositif du « bonus-malus » a rencontré un incontestable succès, à tel point qu’il se traduit par un déficit, le volume des bonus accordés ayant été nettement supérieur à celui des malus infligés. Il faut s’en réjouir : la baisse des émissions moyennes enregistrée en vingt mois équivaut en effet à dix années de la tendance antérieure au dispositif.
Il reste que le déficit de ce compte est important. Il était de 214 millions d’euros en 2008 et pourrait être bien plus élevé cette année et l’année prochaine. Pouvez-vous nous apporter quelques précisions sur ce point ?
Comme nous l’avons relevé, vous voulez anticiper d’un an les exigences en termes d’émissions de gaz carbonique pour tenir compte du rythme beaucoup plus rapide que prévu d’amélioration du parc automobile.
Je ne voudrais pas terminer cette présentation sans évoquer deux dossiers d’une grande actualité.
Le premier concerne la taxe carbone, que le Sénat a rebaptisée « contribution carbone ». Je forme le vœu que, à l’issue de la commission mixte paritaire, elle ne soit pas assortie de trop d’exonérations et qu’elle garde des assises solides. Nous comptons sur ce dispositif pour fonder un nouvel équilibre à la fois environnemental et fiscal. C’est donc un des éléments du débat financier qui sera tout à fait stratégique.
Le deuxième dossier, lui aussi d’actualité, concerne le sommet de Copenhague à venir. Madame la secrétaire d'État, monsieur le secrétaire d’État, vous avez tout notre soutien. Nous savons que, aux côtés de Jean-Louis Borloo, vous avez pris votre mission à bras-le-corps. D’ailleurs, le Sénat, sur l’initiative de sa commission de l’économie et de sa commission des affaires européennes, débattra demain de la question, pour vous donner un mandat clair en la matière.
Telles sont les observations que je souhaitais formuler sur les crédits que nous examinons cet après-midi. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et sur le banc des commissions.)
M. le président. La parole est à M. Gérard Miquel, rapporteur spécial.
M. Gérard Miquel, rapporteur spécial de la commission des finances. Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, la sécurité routière constitue un enjeu humain, social et économique important, que l’État a toute légitimité à assumer. Elle mobilisera près de 2,6 milliards d’euros en 2010, soit une progression des crédits de 3,4 % par rapport à 2009.
Nous le savons, la lutte contre l’insécurité routière a connu, ces dernières années, d’excellents résultats et a permis d’obtenir des changements majeurs de comportement des automobilistes. En 2008, 4 443 personnes sont décédées sur les routes. Les objectifs pour 2012 demeurent ambitieux : moins de 3 000 personnes tuées, et une division par deux des décès en deux-roues et de ceux qui sont dus à l’alcool.
L’année 2009 pourrait cependant être marquée par une inflexion, car les décès ont augmenté de 2 % sur les neuf premiers mois et de 17,7 % sur le seul mois de septembre, qui fut particulièrement meurtrier. Pourriez-vous faire le point sur les onze mois écoulés, monsieur le secrétaire d’État ? Quelles actions comptez-vous notamment mettre en œuvre pour limiter la mortalité des conducteurs de deux-roues ?
Dans cette intervention, j’aborderai successivement deux volets de la politique de sécurité routière : le programme 207 « Sécurité et circulation routières », qui a trait à la prévention, et le compte d’affectation spéciale « Contrôle et sanction automatisés des infractions au code de la route ». Je terminerai par le programme « soutien » de la mission.
Le programme 207 est modestement doté, avec 62 millions d’euros de crédits, même si ceux-ci augmentent de 2,3 % par rapport à 2009. Il bénéficie essentiellement à l’éducation routière et les personnels concourant à son exécution représentent 2 505 équivalents temps plein, soit 18 postes supplémentaires par rapport à 2009.
La portée de la justification au premier euro de ce programme est fortement limitée par l’ampleur des coûts analytiques. La ventilation des crédits de soutien et de polyvalence contribue, en effet, à quadrupler les crédits de paiement.
Sur un plan plus qualitatif, le programme est marqué par la mise en œuvre de la nécessaire réforme du permis de conduire, dont les orientations ont été fixées en janvier dernier : y figurent, notamment, la réduction des délais d’obtention, la simplification des démarches, la diminution du coût pour les candidats en difficulté et la rénovation des programmes de formation et d’examen.
Quant au dispositif du « permis à un euro par jour », il sera étendu afin de mieux cibler les familles modestes, l’État prenant ainsi directement en charge la caution de 20 000 prêts par an. Si cette décision est particulièrement opportune, l’estimation de son coût me paraît excessive. Les hypothèses d’octroi de prêts, notamment le taux de défaut des bénéficiaires du cautionnement, semblent en effet peu réalistes. Nous vous proposerons donc un amendement visant à réduire le coût du dispositif, mais toujours sur la base d’hypothèses relativement volontaristes.
J’en viens à présent au compte d’affectation spéciale relatif aux radars. Je le rappelle, les recettes des amendes forfaitaires sont affectées d’abord au compte, dans la limite de 212 millions d’euros, puis aux collectivités territoriales, dans la limite de 130 millions d’euros, et, enfin, à l’AFITF, qu’a évoquée notre collègue Alain Lambert.
Or, depuis deux ans, ces recettes sont inférieures aux prévisions, qui n’ont pris que partiellement en compte l’amélioration du comportement des usagers. Elles devraient s’élever à environ 500 millions d’euros en 2009.
Les contrôles radar sont aujourd’hui soumis à un double mouvement d’intensification et de diversification.
Le comité interministériel de la sécurité routière, qui s’est tenu le 13 février 2008, a ainsi annoncé le déploiement annuel de 500 nouveaux radars sur le territoire de 2008 à 2012, pour atteindre environ 4 500 dispositifs à cette échéance. Un tel objectif semble cependant difficile à atteindre, puisque 450 nouveaux radars devraient être installés en 2009. Des prévisions plus réalistes reposeraient plutôt sur 500 radars par an dans les trois prochaines années, ce qui porterait leur nombre à 4 250 à la fin de 2012, au lieu des 4 500 prévus.
Le comité interministériel a également confirmé la diversification des infractions relevées par les radars. Les dispositifs relatifs aux feux tricolores sont ainsi opérationnels depuis le 3 août dernier, tandis qu’une expérimentation a été lancée à la fin de ce même mois pour contrôler le respect des passages à niveaux. En outre, des marchés sont à l’étude pour sécuriser certains tunnels. Aucun nouveau radar mobile ne devrait être installé en 2010, l’effort portant essentiellement sur les radars fixes et les feux tricolores.
Sur le plan budgétaire, je relève que le coût de maintenance des radars sera stable en 2010 et que les dépenses liées au développement du Centre national de traitement automatisé des infractions routières poursuivront leur forte baisse, avec un fléchissement de plus de 57 %. Cela s’explique toutefois par les forts investissements réalisés en 2008 et 2009.
Par ailleurs, deux grandes tendances affectent le programme 752 « Fichier national du permis de conduire ».
En premier lieu, il devrait connaître une hausse de ses crédits de 55 % malgré d’importants reports, pour atteindre 16 millions d’euros en 2010. Cette augmentation s’explique notamment par la progression attendue du nombre de lettres envoyées aux contrevenants pour le retrait ou la restitution de points et pour les invalidations de permis.
En second lieu, il convient de rappeler le retard pris depuis trois ans par le projet FAETON, officiellement lancé en 2006 et qui vise à moderniser l’application informatique de gestion des permis de conduire. Un directeur de projet a cependant été nommé le 10 juin dernier. Monsieur le secrétaire d’État, ce projet pourra-t-il ou non être achevé dans les délais ?
J’achèverai mon propos par une brève présentation du programme 217 « Conduite et pilotage des politiques de l’écologie, de l’énergie, du développement durable et de la mer », qui regroupe la quasi-totalité des moyens en personnel de la mission, ainsi que l’ensemble des crédits dévolus aux fonctions support du ministère.
Nous avons déjà souligné le caractère peu satisfaisant, au regard de la LOLF, de ce type de programme « soutien ». Vos services, monsieur le secrétaire d'État, admettent le caractère imparfait d’une telle présentation, mais font valoir deux arguments : la centralisation des moyens humains et de soutien permet non seulement de gérer avec davantage de souplesse et d’efficacité le plafond d’emplois ministériels, mais favorise aussi la mutualisation des fonctions support encouragée par la RGPP. Nous vous donnons acte de ce choix et sommes impatients d’en constater les bénéfices.
En ce qui concerne les personnels, le plafond d’emplois du programme est en diminution de 879 équivalents temps plein en 2010, sous le triple effet de la décentralisation des personnels chargés de l’entretien et l’exploitation des infrastructures, de l’intégration, dans le périmètre du ministère, de l’essentiel des effectifs du programme 135 « Développement et amélioration de l’offre de logement » de la mission « Ville et logement », et des suppressions nettes d’emplois intervenues en 2009 ou qui interviendront en 2010. Je relève d’ailleurs que le ministère applique la règle du non-remplacement d’un départ à la retraite sur deux.
Hors dépenses de personnel, les évolutions marquantes sont liées à la hausse des dépenses immobilières due à l’élargissement du périmètre des loyers budgétaires et à la création du fonds « État exemplaire ». Si ce dernier n’est pour l’instant doté d’aucun crédit, il sera abondé en gestion par l’application d’un « sur-gel » au sein de chaque mission du budget de l’État.
Ce fonds, dont les crédits ainsi « sur-gelés » seront redistribués aux ministères en fonction de leurs performances environnementales, a attisé la curiosité de la commission des finances. Elle a jugé cette initiative propice à encourager les comportements écologiquement vertueux au sein des administrations d’État, mais est restée perplexe face à la complexité du dispositif.
Une pure et simple taxation interministérielle produirait probablement des effets similaires pour des coûts de gestion moindres. Il vous appartiendra, monsieur le secrétaire d'État, de nous convaincre du bien-fondé du mécanisme finalement retenu ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. le président de la commission de l'économie.
M. Jean-Paul Emorine, président de la commission de l'économie, du développement durable et de l'aménagement du territoire, en remplacement de M. Jean Bizet, rapporteur pour avis. Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, notre collègue Jean Bizet participant à une réunion de l’Organisation mondiale du commerce à Genève, il me revient de vous exposer le point de vue de la commission sur les crédits spécifiques de l’écologie au sein de la mission « Écologie, développement et aménagement durables ».
Nous nous félicitons de la hausse des crédits des deux programmes consacrés à l’écologie, qui atteint 30 % pour le programme 181 « Prévention des risques ». Elle reflète la mise en œuvre des priorités définies dans le cadre du Grenelle de l’environnement et validées par le législateur dans la dernière loi de programmation.
À cet égard, madame la secrétaire d'État, je souhaiterais vous interroger sur trois points.
Le premier concerne l’aide aux collectivités territoriales dans l’élaboration de leurs documents d’urbanisme. Notre commission avait déposé, l’an dernier, un amendement visant à rétablir un dispositif spécifique d’aide à l’élaboration des SCOT – schémas de cohérence territoriale –, à la suite de l’extinction, au 1er janvier 2008, du dispositif « un euro par habitant ». Nous avons obtenu en partie satisfaction en 2009, puisque 12 projets de SCOT innovants sur le plan environnemental ont été aidés. Toutefois, il n’existe pas de dispositif global de soutien aux autres projets, alors même que 230 secteurs ont manifesté, en 2009, l’intention de lancer un SCOT.
La commission estime d’autant plus nécessaire d’étendre ce système spécifique de soutien financier que le Sénat a adopté, dans le cadre du Grenelle II et sur mon initiative, un amendement visant à la généralisation des SCOT, témoignant ainsi de l’importance que nous accordons à cet outil de planification.
Par ailleurs, le budget prévoit une aide pour 20 plans locaux d’urbanisme intercommunaux. Or, l’an dernier, malgré une enveloppe de 1,5 million d’euros prévue pour 30 Plu de ce type, aucun n’a été financé, faute de demande, semble-t-il.
Dans ces conditions, madame la secrétaire d'État, ne faudrait-il pas envisager d’augmenter plus significativement le nombre de projets de SCOT aidés ?
Ma deuxième interrogation porte sur les subventions accordées par le ministère, qui ont connu, entre 2007 et 2008, des évolutions relativement importantes. Force est de constater, en effet, que les subventions en faveur des principales associations nationales de protection de l’environnement ont augmenté de plus de 30 %.
Cette hausse correspond à une inflexion volontaire de la part du ministère, qui souhaite une plus grande implication des associations dans les décisions, au niveau tant national que local. Nous prenons acte de cette réorientation des subventions, mais tenons à souligner que le corollaire de l’aide publique doit être la responsabilisation des associations. Or, nous constatons trop souvent qu’elles sont à l’origine, localement, de recours systématiques et parfois abusifs contre des projets de développement.
M. Jean-Louis Carrère. Absolument !
M. Jean-Paul Emorine, président de la commission de l'économie. Il est ainsi étonnant de constater qu’une de ces associations nationales affiche sur la page de son site internet consacrée à la présentation de ses objectifs le nombre de recours contentieux engagés en 2005, comme s’il s’agissait d’une fin en soi.
En conséquence, madame la secrétaire d'État, pourriez-vous nous indiquer, d’une part, la façon dont ont été utilisés les fonds publics supplémentaires alloués aux associations en 2008, et, d’autre part, les moyens que vous comptez mettre en œuvre pour limiter ces recours contentieux abusifs ?
Enfin, ma dernière question concerne les subventions accordées par l’ADEME. Nous observons aujourd’hui un rejet grandissant de nos concitoyens pour toute perspective d’implantation de nouvelles unités d’incinération au niveau local. Dans son rapport consacré aux déchets, l’ADEME s’est fait l’écho de telles oppositions, en pointant le risque de voir trente départements perdre leur autonomie à moyen terme pour le traitement de leurs déchets dans l’hypothèse où aucune nouvelle unité de ce type ne serait créée. Des aides financières pour ce type de projet, notamment pour l’aide à la concertation, sont-elles donc prévues ?
Madame la secrétaire d'État, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, sous réserve de ces observations et interrogations, la commission a émis un avis favorable à l’adoption des crédits des programmes consacrés à l’environnement pour 2010. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. Hubert Haenel. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Jean-François Le Grand, rapporteur pour avis.
M. Jean-François Le Grand, rapporteur pour avis de la commission de l’économie, du développement durable et de l'aménagement du territoire. Monsieur le secrétaire d'État, permettez-moi, tout d’abord, de faire une double observation.
Je tiens en effet à saluer l’initiative prise par le Gouvernement de remettre, conformément aux dispositions adoptées l’an dernier en loi de finances, un rapport d’activité au Parlement. Je ne reviens pas sur son contenu détaillé, tout le monde pourra s’y référer. Je salue par ailleurs l’orientation que vous proposez au sujet du statut de la Direction générale de l’aviation civile, la DGAC, en prônant un établissement public administratif au lieu d’une administration de l’État, ce qui favorisera les partenariats. J’avais suggéré d’autres solutions, mais il s’agit néanmoins d’une bonne évolution.
M. Jean-François Le Grand, rapporteur pour avis. En ce qui concerne le budget annexe « Contrôle et exploitation aériens », il retrace notamment les crédits affectés aux prestations de services de la DGAC pour un montant de 1,937 milliard d’euros. Mon collègue Yvon Collin, rapporteur spécial de la commission des finances, en a fait tout à l’heure une présentation parfaite. Je n’y reviendrai pas, si ce n’est pour rappeler que la forte chute du trafic aérien a fait exploser l’endettement de ce budget annexe, qui passera de 116 millions d’euros à quelque 250 millions d’euros, malgré une économie de 40 millions d’euros. Je salue cet effort, même si nous sommes encore loin du compte !
Madame la secrétaire d'État, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, j’insisterai sur trois points.
Premièrement, il faut prendre la mesure de la situation du secteur : en 2009, à l’échelle mondiale, on va enregistrer 180 millions de passagers en moins et une chute de 20 % du fret. Ce phénomène s’est d'ores et déjà traduit, en France, par une baisse de l’activité de 5 % au cours des huit premiers mois de l’année.
Toutes les entreprises du secteur font des efforts pour s’adapter, comme le montre la fusion récemment annoncée de nos concurrents – mais néanmoins amis ! – British Airways et Iberia. Pour autant, le compte n’y est pas, monsieur le secrétaire d’État, et je vous ferai dans un instant une suggestion.
Deuxièmement, quelle est la réponse du Gouvernement à cette crise ?
Sans entrer dans les détails, je me réjouis – encore un satisfecit, monsieur le secrétaire d'État ! – d’une excellente initiative. Chacun sait que les dessertes d’aménagement du territoire sont les plus fragiles. Par le biais du Fonds d’intervention pour les aéroports et le transport aérien, le FIATA, qui a succédé au Fonds de péréquation des transports aériens, le FPTA, vous proposez d’ouvrir la possibilité d’augmenter le nombre ces lignes pour les soutenir durant la crise.
Permettez-moi de vous faire une suggestion à propos de la taxe d’aviation civile, qui est en augmentation. Or ce sont les entreprises qui l’acquittent, et son produit revient à 20 % au budget général et à 80 % à l’aviation civile proprement dite.
Puisque les entreprises n’ont pas eu accès au plan de relance, je propose que la totalité de cette taxe soit affectée au transport aérien afin de soutenir ce secteur qui connaît des difficultés. J’espère être entendu, mais peut-être n’est-ce là qu’un vœu pieux.
Troisièmement, j’évoquerai le contrôle aérien.
Malgré la volonté affichée de créer le ciel unique européen, cela fait plusieurs années que nous soulignons les difficultés rencontrées à ce niveau : il y a en Europe autant de systèmes de contrôle que de pays membres.
Je veux donc saluer l’initiative prise par dix-sept syndicats de six pays – la France, la Suisse, l’Allemagne et le Benelux – qui proposent la mise en place d’un système de navigation aérienne optimisé et amélioré.
Je profite de votre présence, madame la secrétaire d’État, pour souligner qu’un tel système se traduirait, sur les routes aériennes, par une économie annuelle de 4,7 millions de tonnes d’émission de CO2. Sur le plan financier, cela représente 2,2 milliards d’euros, soit un gain largement supérieur au surcoût qu’entraînerait l’organisation du contrôle aérien de ces six pays. Tous ces avantages cumulés ne sont pas à négliger !
Je souhaite que nous puissions accompagner cette démarche afin de nous diriger le plus rapidement possible vers une meilleure organisation.
En tout état de cause, madame la secrétaire d'État, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, la commission de l’économie réserve un avis positif à la fois aux crédits du budget annexe « Contrôle et exploitation aériens » et à ceux de la mission « Écologie, développement et aménagement durables » relatifs au secteur aérien. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. le président. La parole est à M. Francis Grignon, rapporteur pour avis.
M. Francis Grignon, rapporteur pour avis de la commission de l’économie, du développement durable et de l’aménagement du territoire. Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, afin de ne pas alourdir le débat, je structurerai mon intervention autour de cinq points : l’avenir de l’Agence de financement des infrastructures de transport de France, l’AFITF, la stagnation du programme « Sécurité et affaires maritimes », le développement des radars, la soutenabilité du bonus-malus automobile et les mutations que connaît le transport routier de marchandises.
Premièrement, l’avenir de l’AFITF, le bras armé de l’État en matière d’investissements en infrastructures de transports, est assuré.
En effet, l’Agence recevra de l’État une nouvelle subvention d’équilibre d’environ 1,3 milliard d’euros si on cumule les crédits relevant du programme « Infrastructures et services de transports » et les crédits supplémentaires du plan de relance. Menacée l’an passé, elle a vu ses missions renforcées, dans la mesure où elle finance désormais cinquante projets de transports urbains durables, et pourrait même recevoir de nouvelles compétences au cas où les conclusions du rapport Gressier seraient mises en œuvre.
Toutefois, afin d’éviter que l’Agence ne soit pas un simple opérateur financier transparent, le circuit actuel de financement ne devrait pas perdurer au-delà de 2012, lorsque la taxe poids lourds sera opérationnelle.
Deuxièmement, l’impact du Grenelle de la mer sur les crédits du programme « Sécurité et affaires maritimes » ne s’est pas encore fait sentir.
La stagnation ainsi enregistrée est surprenante, tant les défis à relever seront nombreux : je pense, notamment, à la réforme de l’enseignement maritime secondaire et supérieur, mais également au renforcement des contrôles des navires de pêche pour enrayer la baisse sensible du nombre de contrôles depuis la fin de l’année 2008.
En outre, pour relayer une interrogation de notre collègue Odette Herviaux, il serait utile, l’an prochain, d’avoir une vision globale sur l’ensemble des ministères qui participent à la sécurité des marins, au travers – pourquoi pas ? – d’un « jaune budgétaire ». Nous pourrions même par la suite aller plus loin en demandant un document d’ensemble qui retrace l’effort de la nation en faveur de la mer.
Troisièmement, dans le cadre du développement du parc de radars, je me félicite de ce que 530 nouveaux radars soient prévus pour 2010, d’autant que certains appareils pourront contrôler, outre les règles de vitesse, le respect des feux rouges ou encore des passages à niveau. Je ne doute pas que ceux qui sont plus particulièrement destinés au contrôle de la vitesse n’auront pour seul objectif que la sécurité !
M. Jean-Louis Carrère. Ce serait bien !
M. Francis Grignon, rapporteur pour avis. Par ailleurs, les réparations pour vandalisme sur les radars fixes devraient coûter 14,7 millions d’euros l’an prochain : c’est lamentable !
En outre, je ne peux pas passer sous silence le ralentissement de la dynamique vertueuse en matière de mortalité sur les routes observé ces derniers mois. Le Gouvernement doit redoubler d’efforts, même si, nous le savons bien, plus on réduit les drames de la route et le nombre de victimes, plus il est difficile de les diminuer encore davantage.
Quatrièmement, j’ai également examiné le compte de concours financiers « Avances au fonds d’aide à l’acquisition de véhicules propres », qui retrace les crédits affectés au fameux bonus-malus automobile.
Ce dispositif est un remarquable outil écologique, car il a modifié en profondeur le comportement des Français qui achètent une voiture neuve. Mais, revers de la médaille, alors qu’il est censé être équilibré budgétairement, il pourrait coûter au contribuable la bagatelle d’un demi-milliard d’euros en 2009. Il conviendra donc, à terme, de réduire drastiquement ce déficit, tout en veillant – j’insiste sur ce point – à ne pas changer les règles du jeu d’une année sur l’autre si l’on ne veut pas porter préjudice aux constructeurs automobiles. Ces derniers ont en effet organisé leur production en fonction d’un calendrier connu longtemps à l’avance.
Enfin, cinquièmement, la commission de l’économie envisage de se pencher, au cours de l’année 2010, sur les profondes mutations que connaît le transport routier de marchandises : taxe poids lourds, contribution carbone, certificats d’énergie – certains évoquent une véritable « pandémie fiscale » – et, depuis le 1er mai dernier, ouverture du cabotage international. Il importe de réfléchir à toutes ces questions pour évaluer la compétitivité des transporteurs français face à la concurrence étrangère.
Force est de constater que le secteur des transports demeure une priorité du Gouvernement, au regard, surtout, des crédits supplémentaires affectés en sa faveur par le plan de relance.
S’il est vrai que le plan fret comme, d’ailleurs, le Grenelle de la mer n’ont pas encore reçu de traduction budgétaire, n’oublions pas qu’en ces matières il faut raisonner sur des périodes de cinq à dix ans, voire plus.
En tout état de cause, l’ambition du Gouvernement pour développer les transports en France demeure intacte, et je m’en réjouis.
Madame la secrétaire d'État, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, la commission de l’économie a émis un avis favorable sur les crédits de cette mission, sous réserve que les remarques qu’elle a formulées soient prises en compte. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. le président. La parole est à M. Roland Courteau, rapporteur pour avis.
M. Roland Courteau, rapporteur pour avis de la commission de l’économie, du développement durable et de l’aménagement du territoire. Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, il m’appartient de vous présenter l’avis de la commission de l’économie sur le programme 174 « Énergie et après-mines », qui s’élève à 815,7 millions d’euros en crédits de paiement pour 2010.
Ce programme apparaît très déséquilibré si l’on considère les seuls volumes des crédits, puisque l’action 4 « Gestion économique et sociale de l’après-mines » représente 92 % du total. Consacrée pour l’essentiel aux prestations sociales servies aux anciens mineurs et à leurs ayants droit, cette dernière n’appelle pas de commentaire particulier de ma part.
L’évolution démographique spontanée de la population concernée, qui ne se renouvelle plus, explique que les crédits correspondants soient en diminution de près de 5 % en 2010 par rapport à 2009. Cette baisse tendancielle permet de dégager une marge de manœuvre pour l’accroissement des autres actions du programme.
Je relève, ainsi, que des moyens nouveaux ont été dégagés pour la mise en œuvre du Grenelle de l’environnement. Au sein de l’action 1 « Politique de l’énergie », il s’agit, notamment, de la création du Fonds de soutien au développement de la chaleur renouvelable et du Fonds démonstrateur de recherche, respectivement dotés en crédits de paiement de 110 millions d’euros et de 41 millions d’euros. Le second vise à valider, en grandeur réelle, les technologies émergentes en amont de la phase de développement industriel et commercial.
De même, l’augmentation des crédits de l’action 5 « Lutte contre le changement climatique » s’explique principalement par l’accroissement des moyens consacrés à la lutte contre l’effet de serre, qui bondissent de moins de 900 000 euros en 2009 à plus de 4 millions d’euros en 2010.
Ces crédits financeront, notamment, les études nécessaires à la mise en place des schémas régionaux du climat, de l’air et de l’énergie.
Mes chers collègues, je vous proposerai tout à l’heure d’adopter un amendement visant à abonder de 600 000 euros le programme 181 « Prévention des risques », afin de financer pour 2010 les commissions locales d’information, les CLI, instituées à proximité des installations nucléaires de base. Il est en effet anormal que les dépenses de rémunération des CLI soient à la charge des seules collectivités territoriales.
Un tel abondement apparaît comme une solution transitoire pour 2010, dans l’attente de l’instauration, au profit des CLI, du prélèvement sur le produit de la taxe sur les installations nucléaires de base prévu par la loi du 13 juin 2006 relative à la transparence et à la sécurité en matière nucléaire.
Pour finir, j’évoquerai rapidement le développement des énergies renouvelables.
Comme chacun le sait, la France a pris l’engagement de porter à 23 % en 2020 la part des énergies renouvelables dans sa consommation énergétique totale, ce qui suppose d’augmenter de 20 millions de tonnes équivalent pétrole la production de ce type d’énergies par rapport à 2006.
Compte tenu du fait que le potentiel hydraulique est déjà pleinement exploité, sous réserve de l’optimisation des installations actuelles et du développement encore possible de la petite hydraulique, et que le photovoltaïque n’en est qu’à ses débuts, ce sont surtout la biomasse et l’éolien qui permettront d’atteindre cet objectif de 23 %.
La France est aujourd’hui le premier producteur européen de bois-énergie, qui représentait 5 % de la consommation finale énergétique en 2007. Mais le gisement de la biomasse est encore largement inexploité : il représente 52 millions de mètres cubes, quand l’accroissement annuel de la forêt atteint 125 millions de mètres cubes !
L’autre filière sur laquelle nous devrions fonder l’essentiel de nos espoirs est celle de l’énergie éolienne, dont la technologie est à la fois la plus mature et la moins chère.
Vous savez comme moi que les éoliennes sont parfois contestées. La filière a, selon moi, souffert pendant trop longtemps d’un défaut d’encadrement par l’État, qui n’a pas vraiment cru à son potentiel de développement.
Il faut espérer que les choses rentreront progressivement dans l’ordre avec les schémas régionaux du climat, de l’air et de l’énergie prévus par le projet de loi portant engagement national pour l’environnement en cours de discussion.
Cela étant, nous pourrions, me semble-t-il, déroger à l’obligation de s’inscrire dans une zone de développement de l’éolien pour l’implantation des petites éoliennes d’une puissance inférieure à 36 kilowatts. J’avais fait adopter un amendement en ce sens lors de la première lecture du Grenelle I. Malheureusement, l’Assemblée nationale a écarté cette mesure, qui n’a pas été reprise en deuxième lecture par le Sénat.
Quant au passage des éoliennes sous le régime des installations classées pour la protection de l’environnement, voulu par le Gouvernement dans le cadre du Grenelle II, ce n’est pas selon moi une bonne idée.
Aussi, madame la secrétaire d'État, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, vous comprendrez qu’à titre personnel je ne sois pas favorable à l’adoption des crédits de la mission « Écologie, développement et aménagement durables ». (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. Jean-Louis Carrère. Pas trop d’éoliennes, tout de même !
M. le président. La parole est à M. Ambroise Dupont, rapporteur pour avis.
M. Ambroise Dupont, rapporteur pour avis de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication. Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, au-delà des observations relatives aux crédits prévus pour 2010, déjà très bien traités par mes éminents collègues rapporteurs, je souhaiterais, cette année, vous faire partager ma réflexion relative à la place du paysage et de l’architecture.
L’examen des crédits appelle trois observations de ma part.
Tout d’abord, la présentation du budget offre une réelle « traçabilité » des objectifs du Grenelle de l’environnement, plus précisément des dispositions de la loi de programmation du 3 août 2009 qui en a été la première traduction législative. Nous ne pouvons que nous féliciter de l’augmentation de près de 60 % des crédits alloués aux engagements pris en ce domaine, lesquels atteignent, au total, 61 millions d’euros.
Ensuite, dans le cadre de l’action 7 « Gestion des milieux et biodiversité », je tiens à souligner la poursuite des réformes engagées en faveur des espaces protégés, avec l’augmentation des moyens, tant budgétaires qu’humains, affectés aux parcs nationaux.
Enfin, j’ai pris connaissance avec beaucoup d’intérêt des dotations prévues pour l’action 1 « Urbanisme, aménagements et sites – planification », au sein de laquelle des crédits sont destinés à favoriser les démarches expérimentales d’élaboration de documents d’urbanisme exemplaires, ainsi que le financement de plans de formation des agents du ministère dont les compétences doivent être adaptées aux modifications institutionnelles et réglementaires intervenant en ce domaine.
J’observe d’ailleurs plusieurs améliorations, alors que bon nombre de projets de plan local d’urbanisme sont aujourd’hui en attente d’un financement de la dotation générale de décentralisation pour les documents d’urbanisme, ainsi que l’a évoqué le président de la commission de l’économie, Jean-Paul Emorine, au sujet des SCOT. J’aimerais voir dans ce budget pour 2010 l’amorce d’une dynamique qui s’amplifiera, je l’espère, dès l’année prochaine, en faveur d’une meilleure prise en compte du paysage et de l’architecture.
Ces deux dimensions ne paraissent en effet pas tenir la place qu’elles méritent. Aussi ai-je souhaité, en marge de cet avis budgétaire, mener une réflexion en auditionnant un certain nombre de professionnels des métiers du cadre de vie.
Le paysage, comme les paysagistes d’ailleurs, souffre d’une image réductrice puisqu’il est toujours associé à une organisation de la verdure qui viendrait en addition de toute une série de préoccupations, à l’image de la place qu’il tient au sein des longues énumérations d’objectifs que recèlent de nombreuses dispositions des lois Grenelle I et Grenelle II. Le même constat peut être dressé pour l’architecture : elle n’occupe pas la place centrale qui devrait lui revenir, comme le confirme la simple observation de nos entrées de ville, des zones commerciales et industrielles, des lotissements et de la périphérie des villes, ou encore du paysage rural.
Il m’a donc paru nécessaire de proposer des pistes de réflexion pour répondre aux nouveaux défis résultant, notamment, de l’adoption d’une logique de développement durable, poursuivant ainsi le travail réalisé par notre collègue Yves Dauge dans le rapport d’information publié en 2004 au nom de notre commission.
À mon sens, la clé du succès résidera dans notre capacité à associer, le plus amont possible de nos projets, paysagistes et architectes, en vue de définir des stratégies collectives, pluridisciplinaires et transversales de valorisation du paysage et de l’architecture.
Cet objectif passe par la revalorisation du métier des professionnels du paysage, ce qui suppose de réfléchir à la réglementation relative à l’utilisation du titre de paysagiste et à l’inscription des cursus dans le modèle européen « licence-master-doctorat », ou LMD.
Il convient aussi d’envisager l’association systématique de paysagistes et d’architectes, en amont des procédures d’élaboration des documents d’urbanisme. Il s’agit de définir ainsi les choix fondamentaux pour les territoires, en englobant, dès le départ, la vision transversale du paysage et de l’architecture, afin de donner tout son sens à ce que nous pouvons attendre d’une politique de développement durable. Cette question n’est évidemment pas anodine sur le plan financier, mais elle relève d’un véritable choix de société et je souhaite, à ce titre, que puissent être évalués, dans le cadre de la préparation du projet de loi de finances pour 2011, les besoins de crédits alloués à la rémunération et au recrutement des paysagistes-conseils et architectes-conseils de l’État, qui ne peuvent aujourd’hui intervenir que de façon « homéopathique ».
Enfin, la diffusion d’une culture du paysage et de l’architecture devient prioritaire. Une réflexion sur la formation continue des professionnels et sur celle des élus pourrait être menée, avec l’objectif d’y associer les écoles de paysagistes et d’architectes, ainsi que leurs ministères de tutelle, l’école de Chaillot, l’ordre des architectes et les conseils d’architecture, d’urbanisme et d’environnement, les CAUE.
Vous l’aurez compris, je ne souhaite pas proposer une nouvelle série de contraintes. Bien au contraire, il importe que nous nous donnions les moyens de définir de vrais projets collectifs rendant au paysage et à l’architecture la place qu’ils méritent, car il faut des règles vivantes pour définir le cadre de vie. À ce propos, je citerai Frank Lloyd Wright, célèbre architecte américain, qui s’exprimait ainsi : « Je déclare que l’heure est venue pour l’architecture de reconnaître sa propre nature, de comprendre qu’elle dérive de la vie. »
En conclusion, mes chers collègues, je vous indique que la commission de la culture a émis un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission « Écologie, développement et aménagement durables » pour 2010. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. le président. J’indique au Sénat que la conférence des présidents a décidé d’attribuer un temps de parole de vingt-cinq minutes aux groupes UMP et socialiste, de dix minutes aux groupes UC, CRC-SPG et RDSE et de cinq minutes à la réunion des sénateurs ne figurant sur la liste d’aucun groupe.
Le Gouvernement disposera de vingt minutes pour répondre aux commissions et aux orateurs.
Puis nous aurons une série de questions suivies de la réponse immédiate du Gouvernement. La durée de la discussion de chaque question est limitée à six minutes, réparties de la manière suivante : deux minutes trente pour la question, deux minutes trente pour la réponse et une minute pour la réplique éventuelle.
La conférence des présidents a décidé d’attribuer cinq questions aux groupes UMP et socialiste, deux questions aux groupes UC, CRC-SPG et RDSE et une question à la réunion des sénateurs ne figurant sur la liste d’aucun groupe.
Dans la suite du débat, la parole est à Mme Évelyne Didier.
Mme Évelyne Didier. Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, compte tenu du peu de temps qui m’est imparti, je n’évoquerai que quelques éléments concernant la mission « Écologie, développement et aménagement durables ».
Tout d’abord, je tiens à souligner l’augmentation importante des crédits affectés à la protection de la biodiversité, enjeu majeur et jusqu’ici négligé. Le territoire français bénéficie en effet d’une situation particulière parmi les pays industrialisés : la biodiversité y est très riche, en raison non seulement de la grande dispersion de ses territoires d’outre-mer autour du globe, mais aussi de l’extrême variété de son territoire métropolitain.
À l’heure où paraissent les premières études sur la valeur économique des systèmes écologiques, la prise de conscience de ce que cette richesse représente pour notre pays était évidemment nécessaire. La France figure en effet au quatrième rang mondial pour les espèces animales menacées et au neuvième rang pour les plantes, selon le « livre rouge » de l’Union internationale pour la conservation de la nature, l’UICN. Le défi à relever est considérable et les évolutions de ce budget seront suivies avec attention, avec l’espoir que l’effort sera continu, surtout en matière de recherche et de formation, l’expertise dans ce domaine étant loin d’avoir atteint le niveau requis.
En ce qui concerne le programme 174 « Énergie et après-mines », permettez-moi, en tant que sénatrice de Meurthe-et-Moselle, de déplorer la baisse tendancielle des dépenses de l’action 4 « Gestion économique et sociale de l’après-mines », dont les crédits diminuent de près de 5 % entre 2009 et 2010. La baisse du nombre d’ayants droit ne saurait justifier la diminution de l’offre, notamment dans le domaine de la santé !
Par ailleurs, ce programme prévoit des dépenses fiscales très importantes afin d’encourager les dépenses d’équipement de l’habitation en faveur des économies d’énergie et du développement durable. Je voudrais souligner que ces mesures profitent principalement à nos concitoyens les plus aisés, qui ont les moyens d’engager des travaux. Dans le contexte de l’introduction de la contribution carbone dans notre fiscalité, il serait bon d’engager une réflexion particulière sur une adaptation de ces mesures aux besoins des catégories sociales les plus modestes.
À ce sujet, je voudrais vous alerter sur la situation des locataires. Dans la mesure où ceux-ci n’ont aucune maîtrise de leur consommation d’énergie fossile pour chauffer un logement parfois extrêmement mal isolé – ce défaut n’ayant aucune incidence aux yeux du propriétaire –, ils n’auront pas d’autre choix que d’avoir froid s’ils ne veulent pas s’acquitter d’une contribution carbone démesurée eu égard à leurs revenus. Lorsque Martine Billard a posé cette question à l’Assemblée nationale à M. le ministre du budget, elle n’a reçu de sa part que cette réponse laconique : « Le dialogue entre le propriétaire et le locataire doit exister ». Une telle méconnaissance de la réalité des rapports de force entre locataires et propriétaires me stupéfie, mais elle est probablement symptomatique de la difficulté rencontrée par certains pour comprendre les réalités sociales !
Sur le financement des SCOT, comme vous le savez, la commission de l’économie a adopté, dans le cadre de la discussion du Grenelle II, un amendement de son président, Jean-Paul Emorine, visant à généraliser ces schémas, témoignant ainsi l’importance qu’elle accorde à cet outil de planification. En 2009, 12 projets de SCOT innovants sur le plan environnemental ont été financés, à raison de 100 000 euros chacun.
Toutefois, aucun dispositif global n’est prévu pour aider les autres projets, alors même que 230 secteurs ont manifesté, en 2009, l’intention de lancer un SCOT. Il faudrait sans doute mieux répartir les crédits disponibles et augmenter ces crédits au fur et à mesure de l’engagement des collectivités territoriales. Dans un contexte assez tendu et incertain pour leurs ressources, il nous paraît plus opportun que jamais que celles-ci reçoivent à cet effet une aide de l’État pour pouvoir produire des documents de qualité.
Concernant la politique de gestion des déchets, l’ADEME a fait le constat particulièrement préoccupant d’une perte d’autonomie départementale en matière de traitement des déchets, si de nouvelles unités de traitement ne sont pas créées.
La responsabilité de cette situation incombe d’abord aux industriels, dont les pratiques ont longtemps manqué de transparence. Aujourd’hui, il faut faire un effort dans l’autre sens, afin que tous les départements puissent disposer de centres de traitement. Ce changement d’orientation ne pourra intervenir sans l’accord de la population, dont on sait combien elle peut parfois être réticente. Mais chacun doit se préoccuper de ses propres déchets, et il n’est pas envisageable que certains départements accueillent des déchets venus de l’autre extrémité de la France !
Cette décentralisation est indispensable et relève du simple bon sens, tant le transport des déchets sur de longues distances est une aberration en matière d’émissions de CO2. Là encore, une intervention de l’État nous paraît indispensable.
Madame la secrétaire d'État, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, j’aurais aimé évoquer bien d’autres sujets, mais cela ne m’est pas possible, le chronomètre et le président étant absolument intraitables ! Ma collègue Mireille Schurch abordera donc la question des transports. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. Le président n’est pas intraitable, en revanche, le chronomètre l’est ! Je crois cependant que l’ensemble de notre débat gagnera à se dérouler dans les délais fixés.
La parole est à M. Roland Ries.
M. Roland Ries. Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, le volet « Transport urbain » du projet de loi de finances pour 2010 que nous examinons aujourd’hui s’inscrit dans un contexte relativement favorable pour le secteur de la mobilité, comme l’ont constaté les principaux acteurs à l’occasion des rencontres nationales du transport public, qui se sont tenues à Nice la semaine dernière.
Ce secteur résiste d’ailleurs mieux que d’autres à la crise économique que nous traversons. Les importants investissements réalisés par les collectivités territoriales sont un parfait exemple de cette « croissante verte » que nous appelons tous de nos vœux, car ils ont à la fois permis de remplir les carnets de commande des industriels, de favoriser la création d’emplois non délocalisables, d’accroître la qualité du service rendu aux usagers et, objectif central, d’encourager le report de l’usage privatif de l’automobile vers les transports collectifs.
Tout l’enjeu de ce budget consiste à vérifier s’il a été élaboré en vue d’accompagner les changements de comportements de nos concitoyens en matière de mobilité urbaine, lesquels ne pourront s’inscrire dans la continuité que si les autorités publiques – collectivités territoriales et État – poursuivent leurs politiques courageuses et volontaristes dans ce domaine.
Les autorités organisatrices de transport entendent être d’autant plus soutenues dans leurs efforts par le Gouvernement que les besoins de financement ont été chiffrés par le groupement des autorités responsables de transports, le GART, à plus de 43 milliards d’euros à l’horizon 2020 pour les seuls transports en commun en site propre, ou TCSP. Et je ne parle même pas des besoins en termes de régénération du réseau ferroviaire, de mise en accessibilité des véhicules et des infrastructures terrestres, et d’aménagement des gares !
De ce point de vue, le programme 203 « Infrastructures et services de transports » appelle deux remarques de ma part.
Monsieur le secrétaire d'État, dans un premier temps, je soulignerai la satisfaction que m’inspire votre annonce, le 26 novembre à Nice, du lancement au printemps prochain d’un nouvel appel à projets de TCSP, doté d’une enveloppe sensiblement identique au précédent, soit environ 800 millions d’euros. Cet enthousiasme doit être tempéré – mais peut-être nous rassurerez-vous –, car, s’il est exact que le financement des appels à projets lancés dans le cadre du Grenelle de l’environnement pour les projets de transport en commun en site propre des grandes agglomérations figure au nombre des missions de l’AFITF, le « bleu budgétaire » ne fait pas mention d’un tel montant. Je m’étonne donc du chiffre que vous avez avancé.
En outre, on peut se demander, à y regarder de plus près, comment l’Agence de financement des infrastructures de transport de France va pouvoir remplir les missions qui lui ont été confiées avec des ressources moindres cette année, la totalité de la somme en provenance de la vente des sociétés d’autoroutes ayant été consommée. Doit-on considérer, dès lors, que la subvention d’équilibre de 980 millions d’euros accordée par l’État servira à couvrir l’ensemble de ses missions pour l’année 2010 ? En clair, monsieur le secrétaire d’État, avez-vous vraiment prévu un financement budgétaire en 2010 de l’appel à projets que vous allez lancer ?
Je souhaiterais, dans un second temps, attirer votre attention sur la question du financement du matériel roulant.
Après une vingtaine d’années de développement des TCSP, nombre de réseaux arrivent aujourd’hui à saturation. Vous savez que l’augmentation de l’offre passe par celle des fréquences, ce qui suppose du matériel supplémentaire. Or, à ce jour, l’État concentre son aide sur les seules infrastructures et s’est toujours refusé à envisager son extension à l’acquisition de matériels roulants.
À mon sens, le Gouvernement gagnerait pourtant à revenir sur cette position, ne serait-ce que pour témoigner, de façon plus substantielle encore, sa volonté d’encourager la politique de report modal promue par le Grenelle de l’environnement et mise en œuvre par les collectivités territoriales.
Du reste, cette question devrait aussi intéresser votre collègue ministre de l’industrie, M. Christian Estrosi, qui, en sa qualité de maire de Nice, nous a accueillis pour ces rencontres nationales du transport public. En effet, il y va du soutien à l’ensemble des acteurs d’une filière fortement créatrice d’emplois.
Mais je voudrais aller plus loin, car il y a plus à exprimer que de simples regrets quant à cette relative stagnation budgétaire ou cette insuffisance des crédits.
Chacun le sait, la part relative aux transports représente actuellement un quart, parfois davantage, du budget principal de la plupart des agglomérations et des intercommunalités. Cette contribution ne peut augmenter indéfiniment sans compromettre les autres actions des collectivités, dont les recettes fiscales ont en outre subi une forte réduction due aux effets mécaniques de la crise économique. À cet égard, la baisse du produit global du versement transport, induite par l’augmentation du chômage, suscite de lourdes inquiétudes chez les autorités organisatrices de transports.
En ces temps de fortes incertitudes budgétaires, la suppression de la taxe professionnelle, principale ressource des intercommunalités, vient accroître l’inquiétude des décideurs locaux.
Avec cette réforme, aucune autorité organisatrice de transports ni aucune intercommunalité ne dispose aujourd’hui de la visibilité budgétaire à moyen et long termes qui lui permettrait d’engager, en toute connaissance de cause, de lourds investissements. Comment, dans ces conditions, établir une programmation pluriannuelle des investissements ?
Une telle réforme pèsera inévitablement sur les choix à venir et indirectement sur l’activité économique de notre pays. En effet, nous le savons tous, les collectivités territoriales réalisent l’essentiel des investissements publics et, de ce fait, constituent le principal soutien à l’économie de notre pays.
En conclusion, monsieur le secrétaire d’État, je crains que le budget que vous nous soumettez, avec les incertitudes qu’il comporte quant aux ressources pérennes des autorités organisatrices de transports, n’entrave les politiques volontaristes menées par les collectivités, depuis plusieurs années maintenant, en faveur de la mobilité durable. Je doute que les garanties apportées par M. le Premier ministre à l’occasion du congrès des maires de France, lesquelles portent essentiellement sur le court terme, soient de nature à rassurer les responsables locaux des autorités organisatrices de transports. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. François Fortassin. (Applaudissements sur certaines travées du RDSE.)
M. François Fortassin. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, l’examen des crédits alloués à la mission « Écologie, développement et aménagement durables » revêt cette année une dimension toute particulière.
Deux mois après l’examen du Grenelle II, à quelques jours du sommet de Copenhague et alors que nous avons évoqué la contribution carbone en première partie du projet de loi de finances, il est temps aujourd’hui de savoir si les moyens accordés par le Gouvernement sont véritablement à la hauteur des enjeux.
Depuis deux ans, en effet, l’environnement s’est imposé dans les médias, les débats politiques, les campagnes électorales, les stratégies d’entreprise, les universités, et même dans certaines discussions en famille ou entre amis. Il y a là un élan qu’il serait évidemment dangereux de briser.
Nous attendions donc un budget de rupture, mais nous ne le trouvons pas ! Il nous est simplement proposé une confirmation de la politique d'ores et déjà menée dans ce domaine.
Mieux qu’un processus, le Grenelle de l’environnement est d’abord un phénomène de société et, à ce titre, nous avons un devoir d’enthousiasme à l’égard de cette démarche. Sans naïveté, j’affirme que nous devons poursuivre, encore et encore, cet effort en faveur d’une écologie humaniste.
Madame la secrétaire d’État, je vous sais gré d’avoir donné à l’écologie cette tonalité humaniste de bon aloi, sans laquelle il n’est pas de véritable écologie. Vous avez contribué à faire en sortir l’écologie de sa gangue de tristesse, à déchirer les vieux oripeaux du sectarisme pour la revêtir des habits neufs de l’espérance et de la joie de vivre ! (Exclamations admiratives sur plusieurs travées.)
M. Daniel Raoul. C’est notre poète des Pyrénées ! (Sourires.)
M. Jean Desessard. La couleur de l’espérance, c’est le vert !
M. François Fortassin. Nous n’avons pas toujours le même « vert », cher ami !
M. François Fortassin. Dans le domaine des transports, l’enjeu est de favoriser les transports alternatifs à la route. Si l’on ne peut que se féliciter du montant des crédits prévus, comment occulter le fait que, en réalité, seule l’augmentation des tarifs de péage nous permettra de faire face à un certain nombre de dépenses absolument indispensables ?
Peut-être faut-il se tourner vers le grand emprunt.
M. Jean Desessard. Ah !
M. François Fortassin. La commission mise en place à cet effet préconise d’allouer 2 milliards d’euros en faveur de l’accélération du développement des sciences du vivant. Tout le problème est de savoir si cela sera suffisant.
Au-delà des chiffres, je souhaiterais que ce débat nous offre aussi l’occasion de restaurer le bon sens et l’intelligence du cœur, tout en introduisant la rupture nécessaire. Je prendrai trois exemples pour illustrer mon propos.
Tout d’abord, un billet d’avion entre Aurillac et Paris coûte aux alentours de 500 euros (Exclamations sur plusieurs travées), alors que, dans le même temps, on peut aller à Londres pour moins de 60 euros et aux États-Unis pour 400 euros !
MM. Yvon Collin et Jacques Mézard. Très bien !
M. Pierre Bernard-Reymond. Absolument !
M. François Fortassin. Pourquoi, dans le cadre de l’aménagement du territoire, indispensable à une écologie en quelque sorte bien réfléchie, ne déciderait-on pas de taxer les compagnies low cost au titre de la réduction des gaz à effet de serre ? Cela déplairait peut-être à quelques touristes en mal d’Asie du Sud-Est, mais je crois que notre pays y gagnerait beaucoup !
Par ailleurs, comment penser que nous progressons quand on sait que, pour relier Aurillac à Paris, il fallait cinq heures et demie de train dans les années soixante, contre six aujourd'hui ?
M. Jacques Mézard. Il est formidable !
Mme Évelyne Didier. Bonne question !
M. Yvon Collin. Absolument !
M. François Fortassin. Ce sont des interrogations qui méritent tout de même d’être posées.
M. le président. Veuillez conclure, monsieur Fortassin, sinon notre avion va avoir du retard ! (Rires.)
M. François Fortassin. De plus, n’existe-t-il pas des solutions plus intelligentes que celle qui consiste à transporter des salades cultivées en Roussillon jusqu’au marché de Rungis pour que, le lendemain, elles soient vendues à Béziers, Montpellier et Perpignan ?
M. Yvon Collin. Eh oui !
M. Jean Desessard. La faute à qui ?
M. François Fortassin. Des solutions alternatives ne coûteraient certainement pas très cher. À l’évidence, cela mérite réflexion.
Madame la secrétaire d'État, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, la France veut apparaître, au sommet de Copenhague, comme le bon élève de l’Europe. Pour ma part, je me demande si cet élève n’a pas fait beaucoup trop d’impasses pour pouvoir se présenter, avec quelques chances de succès, à l’examen ! (Applaudissements sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur les travées du groupe socialiste.)
M. Yvon Collin. Très bien !
(M. Jean-Claude Gaudin remplace M. Gérard Larcher au fauteuil de la présidence.)
PRÉSIDENCE DE M. Jean-Claude Gaudin
vice-président
M. le président. La parole est à M. Louis Nègre.
M. Louis Nègre. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, dans le cadre de mon intervention sur la mission « Écologie, développement et aménagement durables », je tiens d’emblée à féliciter le Gouvernement,…
M. Raymond Vall. Ah !
M. Louis Nègre. …qui, par l’intermédiaire du Grenelle de l’environnement, a su mobiliser, dès 2007, la nation et les forces vives de la France en faveur du développement durable.
Cette politique de fond, marquée par une vision à long terme du devenir de notre pays et de la planète, a placé la France au niveau des nations les plus dynamiques dans le domaine du développement durable et en a fait une référence incontestable en la matière.
Qu’on en juge : 268 engagements ont été pris, 800 actions ont été définies et, d’ores et déjà, une centaine d’entre elles sont achevées ! Il faut y ajouter 44 dispositions fiscales issues de la loi de finances rectificative pour 2008 et de la loi de finances pour 2009, sans compter les nouvelles dispositions prévues pour 2010.
La loi Grenelle I a été votée à l’unanimité. Le Grenelle II, approuvé par le Sénat, viendra en discussion à l’Assemblée nationale. Les dispositions qu’il prévoit, notamment au titre II, relatif aux transports, que j’ai eu l’honneur de rapporter au nom de la commission de l’économie, vont d’ailleurs permettre de faire de grandes avancées dans le domaine de l’environnement : elles tendent à mettre en place un nouveau cadre financier ambitieux, incluant la taxation des plus-values immobilières ou encore, monsieur le secrétaire d’État, l’expérimentation des péages urbains, ces deux mesures étant propres à aider substantiellement au développement des transports collectifs urbains et périurbains.
Dans le secteur de la biodiversité, élément essentiel du développement durable, je constate également, madame la secrétaire d’État, qu’un effort financier considérable a été réalisé. Ainsi, année après année, l’augmentation des crédits est importante et pérenne : 25 % en 2007, 30 % en 2008, 10 % en 2009 et 10 % en 2010.
Ces orientations politiques fortes sont accompagnées de prolongements hautement stratégiques, comme la contribution carbone, le programme en faveur des véhicules décarbonés ou l’engagement national pour le fret ferroviaire.
Grâce à ces moyens budgétaires importants, le Gouvernement donne à la France, là encore, une position exceptionnelle pour fêter dignement l’année internationale de la biodiversité en 2010.
À ce sujet, je n’oublierai pas, madame la secrétaire d’État, votre volonté de proposer la création d’un réseau international d’aires marines protégées et votre ambition particulièrement louable d’instaurer de nouveaux parcs marins d’ici à 2011. J’ai d’ailleurs, avec l’aide du président du conseil général des Alpes-Maritimes, Éric Ciotti, contribué modestement à cette action en créant très récemment, au droit de ma commune, Cagnes-sur-Mer, une réserve sous-marine de neuf hectares.
Enfin, je terminerai ce survol général en soulignant le lancement récent par le ministre de l’écologie, Jean-Louis Borloo, et le ministre chargé de l’industrie, Christian Estrosi, du plan national pour le développement des véhicules électriques et hybrides rechargeables, doté de 100 millions d’euros dans le projet de loi de finances pour 2010.
De plus, l’État participera, au travers du Fonds stratégique d’investissement, à la création d’une filière française de batteries lithium-ion, en débloquant 125 millions d’euros sur les 625 millions d’euros prévus au total. En ce qui concerne le déploiement des bornes de recharge pour les infrastructures publiques, qui nous avait fait cruellement défaut par le passé, l’État prévoit désormais un financement à hauteur de 900 millions d’euros par l’intermédiaire du grand emprunt.
Le maintien du super-bonus de 5 000 euros pour tout achat de véhicule décarboné est un signal fort qu’il faudra maintenir dans le temps, vraisemblablement après 2012. Cette filière est hautement stratégique pour la France et doit continuer à bénéficier dans les années à venir d’un soutien total du Gouvernement, au regard de la compétition féroce qui s’organise au niveau mondial.
Toutes ces orientations politiques s’inscrivent plus que jamais dans une perspective de développement durable. Elles contribuent à répondre aux enjeux majeurs auxquels notre pays doit faire face, avec l’impérieuse nécessité, d’une part, de préserver son environnement, et, d’autre part, d’obtenir une compétitivité renforcée de son économie à l’international.
Au-delà de cette vision globale, très favorable à la protection de l’environnement, je voudrais m’attacher davantage, dans le cadre de la mission précitée, au programme concernant les infrastructures et services de transport.
Le secteur des transports représente aujourd’hui 26,5 % des émissions nationales de gaz à effet de serre dont l’essentiel provient du mode routier.
Le transfert modal ou l’utilisation des véhicules moins polluants est donc un enjeu de première importance.
La stratégie du Gouvernement repose sur plusieurs orientations. J’en distinguerai tout particulièrement trois.
Premièrement, il est nécessaire de développer une offre multimodale fondée sur la complémentarité des modes de la chaîne de transports à travers un important programme de réalisation des infrastructures de transports.
Deuxièmement, il faut utiliser de manière optimale les infrastructures existantes.
Troisièmement, il convient de donner la priorité aux modes de transports alternatifs à la route, à travers une action volontariste en faveur du ferroviaire, du fluvial et du portuaire, ainsi qu’aux transports collectifs de personnes.
Cette orientation, vertueuse, ne peut que recueillir notre assentiment et notre soutien et confirme que le discours politique se traduit par des actes concrets et des moyens budgétaires significatifs ; la France pourra aller au sommet de Copenhague la tête haute !
Je me félicite qu’en 2010 le Gouvernement confirme l’effort qu’il a accompli en 2009 et qui était déjà hors norme, car, je le rappelle, dans le projet de loi de finances de l’an dernier, les crédits avaient augmenté de 33,4 % en autorisations d’engagement et de 30,2 % en crédits de paiement. Ainsi, 10,29 milliards d’euros en autorisations d’engagement et 10,15 milliards d’euros en crédits de paiement sont prévus en 2010 au titre de la mission « Écologie, développement et aménagement durables ». Rapportés aux crédits demandés pour 2009, ces montants affichent la stabilité de la dotation de la mission avec un léger plus, puisqu’ils sont en augmentation de 0,7 % en crédits de paiement.
Le programme 203, qui regroupe l’ensemble des moyens dévolus aux infrastructures et services de transport, est doté, hors fonds de concours, de 4,4 milliards d’euros en autorisations d’engagement et de 4,35 milliards d’euros en crédits de paiement.
L’essentiel des crédits de paiement, soit 83,6 %, est imputé à l’action 10 « Infrastructures de transports collectifs et ferroviaires ».
Par ailleurs, les fonds de concours d’un montant de 1 854,8 millions d’euros en autorisations d’engagement et 1 903,8 millions d’euros en crédits de paiement complètent les crédits budgétaires. Ils proviennent en grande partie, à hauteur de 1 476,3 millions d’euros en crédits de paiement, de l’Agence de financement des infrastructures de transport de France, l’AFITF.
Ces crédits permettront notamment de conforter le discours du Gouvernement et, surtout, de donner une traduction concrète à l’article 13 de la loi Grenelle I, qui dispose que, en dehors de l’Île-de-France, il est prévu de développer les transports collectifs en site propre, afin de les porter en quinze ans de 329 kilomètres à 1 800 kilomètres.
Grâce aux 800 millions d’euros portés par l’AFITF, le premier appel à projet pour les transports collectifs qui a été bouclé en 2009 entraînera l’engagement de près de 6 milliards d’euros de travaux pour la réalisation de 365 kilomètres de nouvelles lignes de transport en commun en site propre, TCSP.
L’accélération extraordinaire de ces crédits permettra de réaliser en trois ans – je dis bien : en trois ans – l’équivalent de ce qui, auparavant, nécessitait près d’une génération pour être réalisé.
Les moyens dégagés permettront également d’accélérer la rénovation du réseau ferroviaire en faisant bénéficier RFF des crédits nécessaires au renouvellement de 900 kilomètres de voies.
Je constate qu’à la suite de l’audit réalisé par l’école polytechnique de Lausanne sur l’état du réseau ferré national le Gouvernement a, là encore, accru considérablement ses efforts financiers, passant de 900 millions d'euros en 2005 à près de 1,7 milliard d'euros en 2010.
Ce renouvellement sera orienté en priorité sur le réseau principal, qui accueille 90 % des circulations.
Ce programme assurera également la poursuite de la mise en œuvre de la réforme des grands ports maritimes. En effet, l’action 11 « Infrastructures fluviales, portuaires et aéroportuaires » bénéficie d’une augmentation de plus de 50 % de ses moyens par rapport à 2009 !
Ce soutien financier accompagnera le développement de la compétitivité de nos ports qui ont représenté, en 2006, 38,5 % en tonnage de l’acheminement de notre commerce extérieur.
De même, le soutien au transport fluvial dont le bilan énergétique est particulièrement favorable est le bienvenu. En effet, même si la part modale est encore faible, on constate – excellente nouvelle ! – que le trafic de marchandises conteneurisé a doublé en cinq ans.
J’ajouterai, dans ce domaine, que le calendrier du projet de canal à grand gabarit Seine-Nord Europe a prévu un début des travaux dès 2011 et une mise en service en 2015.
Tout serait donc pour le mieux dans le meilleur des mondes, madame la secrétaire d’État, monsieur le secrétaire d'État, s’il n’y avait de ma part trois interrogations et une observation.
M. Daniel Raoul. Ah, quand même !
M. Louis Nègre. Ma première interrogation concerne l’avenir de l’AFITF, qui non seulement a subi des critiques de la Cour des comptes mais risque de souffrir d’un effet de ciseaux entre le besoin de financement et les recettes effectives, notamment au vu de l’écotaxe appliquée aux poids lourds qui n’entrera en vigueur au mieux qu’en 2012 et de l’absence d’augmentation de la redevance domaniale sur les autoroutes.
À la lecture du rapport Gressier, et en fonction des ressources très importantes affectées à l’AFITF, je pense qu’une réforme de la mission de l’Agence s’impose.
Ma deuxième interrogation a trait au schéma national des infrastructures de transports, qui n’a pas encore été publié et que nous attendons tous avec beaucoup d’impatience.
Ma troisième interrogation porte sur le deuxième appel à projet – vous avez fait une intervention lors des 22e rencontres nationales des transports publics à Nice – : j’aimerais avoir l’assurance qu’il sera bien lancé en 2010 avec un montant de crédits au moins équivalent au premier appel à projet, c'est-à-dire 800 millions d'euros au minimum.
Enfin, je ferai une observation : il me semble qu’il ne faut pas redouter la concurrence dans le domaine ferroviaire, car elle est à la base d’une diminution des coûts, donc d’une moindre dépense des deniers publics et, surtout, d’un meilleur service rendu à l’usager.
En conséquence, et malgré ces interrogations légitimes, je souhaite que le budget qui nous est présenté, conforme aux orientations qui seront préconisées à Copenhague, soit approuvé et, bien entendu, je le voterai. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. le président. La parole est à M. Michel Teston. (Mme Patricia Schillinger applaudit.)
M. Daniel Raoul. Le ton va changer !
M. Michel Teston. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, mon intervention porte sur le programme 203 « Infrastructures et services de transport » et, plus précisément, sur l’action 10 relative aux infrastructures de transports collectifs et ferroviaires.
Au cours des cinq dernières années et tout particulièrement depuis quelques mois, tout ce qui concerne les investissements visant à développer le transport ferroviaire a fait l’objet d’un grand battage médiatique.
Il en est ainsi du plan de renouvellement et de régénération des voies sur la période 2006-2010 mis en place après l’audit de l’école polytechnique de Lausanne, ou encore du contrat de performance, signé par l’État et RFF, d’un montant de 13 milliards d’euros pour cinq ans. L’accent a également été mis très fortement par le Gouvernement sur le développement du transport ferroviaire dans la loi dite « Grenelle I », ou encore sur la place consacrée au mode ferroviaire dans le plan de relance.
Comment ne pas citer encore l’engagement national pour le fret ferroviaire annoncé par le Gouvernement en septembre 2009 ainsi que le plan d’actions et d’investissements de 7 milliards d’euros qui a été présenté ?
Au-delà de toutes ces annonces, qu’en est-il réellement de l’engagement en faveur du ferroviaire,…
M. Jean Desessard. Exactement !
M. Michel Teston. … en particulier dans ce projet de loi de finances initial ?
D’abord, quel est l’effort en matière de régénération du réseau ?
Des enveloppes financières supplémentaires ont été votées lors des précédentes lois de finances, sans toutefois respecter totalement les objectifs du plan, qui se situaient déjà en deçà du scénario optimal préconisé par le rapport Rivier.
Si les crédits correspondants ont ainsi progressé pour atteindre 1,064 milliard d’euros en 2008, il est très difficile, depuis 2009, de les chiffrer avec précision en raison de la réforme de la tarification de l’usage des infrastructures.
En effet, les concours de l’État à RFF ne sont plus désormais attachés à l’utilisation – régénération, entretien, désendettement – qu’en fait ce dernier. Ils dépendent de l’équilibre économique résultant, pour le gestionnaire d’infrastructures, de l’utilisation du réseau par les différents types de services ferroviaires, tels que les transports express régionaux, TER, les trains à grande vitesse, TGV, les trains Corail, le fret. On peut seulement constater que les concours totaux de l’État à RFF s’élèvent à 2,653 milliards d’euros, compte tenu de la compensation de 264,4 millions d’euros pour des réductions de péages consenties aux opérateurs de fret.
Si les concours pour les TER progressent, en revanche, ceux qui sont alloués aux trains classiques nationaux, les trains Corail, diminuent de 76,5 millions d’euros par rapport à 2009, ce qui est en totale contradiction avec les orientations du Grenelle de l’environnement qui prévoyaient un système de péréquation pour ce type de trains. Le même constat peut être fait pour l’activité fret où les concours passent de 863 millions d’euros en 2009 à 826,6 millions d'euros en 2010.
En réalité, si le nombre de kilomètres de voies renouvelées a sensiblement augmenté, cela est dû certes à un effort plus important de l’État, mais aussi – ne l’oublions pas – à un effort sans précédent des régions…
Mme Odette Herviaux. Tout à fait !
M. Michel Teston. … qui, loin de se contenter de financer intégralement le renouvellement et la modernisation des matériels TER, ont été souvent contraintes, pour des raisons de sécurité, de s’engager dans le financement de la régénération des lignes utilisées par leur matériel roulant. (Mme Odette Herviaux opine.) Elles l’ont fait dans le cadre des contrats de projet État-région mais aussi parfois de plans rail spécifiques, afin d’accélérer la rénovation de petites lignes parcourues à près de 80 % par les TER.
S’agissant du fret, outre le fait que les concours de l’État à RFF sont en baisse pour cette activité, il semble bien que le soutien au transport combiné se situe à un niveau assez faible. Il serait de 35,6 millions d’euros, soit 6 millions de plus par rapport à 2009, mais très en dessous du niveau budgétaire atteint durant la période 1999-2002, où le concours de l’État s’élevait à 90 millions d’euros par an. Pourtant, le transport combiné n’est-il pas présenté comme une priorité dans l’engagement national pour le fret ferroviaire ?
Les autres grands chapitres du plan d’actions et d’investissements qu’il est prévu de mettre en œuvre pour concrétiser l’engagement national pour le fret ferroviaire ne semblent guère mieux traités que le transport combiné. Pour l’instant, à ma connaissance, la seule véritable concrétisation de cet engagement en faveur du fret émane non pas de l’État mais du principal opérateur, la SNCF, qui a décidé de répartir sur cinq ans un milliard d’euros pour développer son activité de fret.
J’en viens au plan de relance. S’il a permis l’accélération de quelques projets ferroviaires engagés, il ne s’est nullement traduit par une réelle augmentation du volume des investissements ferroviaires. Ce constat est confirmé par le fait que la subvention d’équilibre de l’État à l’AFITF est ramenée de 1,2 milliard d’euros en 2009 à 980 millions d’euros en 2010. L’État déduit ainsi de sa subvention les avances consenties en 2009 au titre du plan de relance mais aussi la partie des dépenses de régénération de voies prises en charge par les régions dans le cadre des contrats de projet et des plans rail spécifiques.
Je terminerai ce commentaire sur le projet de budget pour 2010 en rappelant que les concours de l’État n’étant plus attachés à l’utilisation qu’en fait RFF, il est très difficile de déterminer le montant des crédits d’État consacrés à la réduction de la dette du gestionnaire d’infrastructures. Cela me conduit à vous poser la question suivante, monsieur le secrétaire d'État : où en est la rédaction du rapport présentant les solutions proposées pour le remboursement de la dette de RFF ?
M. Roland Courteau. Bonne question !
M. Michel Teston. En effet, l’article 3 A du projet de loi relatif aux transports ferroviaires adopté, à la majorité, il y a quelques semaines prévoit le dépôt de ce document avant la fin de l’année 2009.
En conclusion, comment ne pas constater et regretter le décalage entre les annonces du Gouvernement et le manque d’ambition de ce programme budgétaire, qui n’est pas à la hauteur des enjeux liés au Grenelle de l’environnement, au plan de régénération du réseau, ou encore à l’engagement national pour le fret ferroviaire ?
Le groupe socialiste votera contre les crédits de ce programme. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. le président. La parole est à Mme Anne-Marie Escoffier.
Mme Anne-Marie Escoffier. Monsieur le président, madame le secrétaire d’État, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, le projet de budget dont nous discutons aujourd’hui occupe une place particulière non pas tant parce que l’évolution des choses, au fil des années, a fait que l’écologie est désormais présente dans l’esprit de tous les élus de la nation, mais parce que la loi de finances intervient dans une période de grande mutation pour tout ce qui concerne le développement durable. Je veux naturellement parler des lois adoptées dans le cadre du Grenelle de l’environnement et de leurs conséquences sur la vie de nos compatriotes, de nos entreprises et de nos territoires, dont la France attend beaucoup, de même que du prochain sommet de Copenhague.
Du reste, qui, dans cet hémicycle, ne saurait être concerné par une cause aussi fondamentale, déclinée en termes budgétaires dans les neuf programmes composant les crédits de la mission « Écologie, développement et aménagement durables » ? Malgré la volonté de traçabilité affichée par le Gouvernement, certains secteurs restent extrêmement complexes, notamment celui qui concerne les circuits de financement de la politique des transports. Si je ne peux que me féliciter de l’intention du Gouvernement d’œuvrer à la sauvegarde de notre planète, je suis infiniment plus sceptique lorsqu’il affirme que les objectifs du Grenelle de l’environnement seront atteints en 2011, et ce en raison même du budget qui nous est présenté.
Car je mesure, une fois de plus, qu’il y a souvent loin des intentions aux faits. N’est-il pas légitime, en effet, de se demander si les 10,5 milliards d’euros prévus en crédits de paiement pour 2010 permettront, malgré leur importance, de satisfaire les objectifs prévus, si vastes et si variés ? Cela nous conduit, une fois encore, à formuler l’idée qu’il est préférable, avant de les faire voter, d’évaluer avec exactitude les mesures que l’on entend mettre en œuvre, sans quoi on risque de limiter son action à des effets d’annonce. Les rapporteurs spéciaux du Sénat – Alain Lambert, Gérard Miquel, Yvon Collin et Fabienne Keller, à la pertinence desquels je tiens à rendre hommage – ont émis des réserves sur un certain nombre de points, notamment l’insuffisance de la qualité du service ferroviaire ou le taux de contrôle du transport routier des matières dangereuses. Cela laisse planer un grand doute quant à l’incertaine soutenabilité budgétaire de cette mission, pour reprendre l’expression judicieuse de l’un de nos collègues, et explique aussi les modifications apportées par la commission des finances.
Certes, les crédits mobilisés pour la mise en œuvre du Grenelle en matière de préservation et de restauration de la biodiversité augmentent de 60 % et offrent l’aspect le plus novateur de ce budget, avec sa volonté d’aménagement équilibré des territoires, sa gestion intégrée de la ressource en eau et sa préservation du littoral.
Je ne conteste, d’ailleurs, nullement ce choix, que j’approuve même, mais j’observe que d’autres secteurs ne sont pas aussi bien aidés. Sur un budget aussi considérable, les crédits liés à la mise en œuvre du Grenelle ne passent que de 30 millions à 60 millions d’euros, ce qui est, somme toute, modeste, même en considérant les efforts d’économies recherchés dans le cadre de la révision générale des politiques publiques, en particulier dans le domaine ferroviaire.
Mais, plus inquiétant encore, ce projet de budget est sinon illisible du moins obscur et peu fléché : on s’y perd et, de ce fait, sa logique nous échappe. Que veut-on exactement ? Où va-t-on ? Et pour quoi faire ? Est-ce parce que le nombre de missions est trop élevé ? Ou parce qu’on les cerne mal ? Est-ce parce qu’il est difficile de trancher entre ce qui appartient à l’aménagement du territoire et ce qui relève de l’écologie ? Je ne sais pas. Toujours est-il que, si RFF semble s’améliorer et VNF, Voies navigables de France, offrir une situation satisfaisante, la tendance à la dégradation générale du réseau routier n’est pas enrayée ; il en est de même de la gestion des affaires maritimes, de Météo-France, de l’Institut géographique national ou du contrôle aérien, qui nécessite des efforts plus poussés.
Une bonne politique écologique, comme du reste toute bonne politique budgétaire, ne consiste pas à déshabiller Pierre pour habiller Paul. Ainsi, certains objectifs semblent d’ores et déjà impossibles à atteindre, comme ceux qui sont relatifs au contrôle et à la sanction automatisés des infractions au code de la route ou l’autofinancement budgétaire pour l’acquisition des véhicules propres, malgré les effets positifs du système du bonus-malus automobile.
Tout cela manque un peu de cohérence et je le regrette, puisque, si nous sommes tous ici attachés à la mise en œuvre d’une véritable politique écologique, nous sommes aussi nombreux à être soucieux d’une bonne politique d’aménagement du territoire, conforme à la tradition républicaine, même si, aujourd’hui, l’État et les collectivités territoriales en partagent la responsabilité. Nous devons arriver à un équilibre entre la vie économique et l’écologie, même si ce n’est pas facile. Cet équilibre, je ne l’ai pas trouvé dans ce budget, pas plus que le souffle, l’audace et l’ambition des lois Grenelle I et Grenelle II, que nous avons passé tant d’heures à étudier ici.
M. Jean Desessard. Bravo !
Mme Anne-Marie Escoffier. Madame le secrétaire d’État, monsieur le secrétaire d’État, le groupe RDSE et moi-même aurions voulu soutenir ce budget comme nous avions donné notre plein accord au Grenelle I. Mais, vous l’aurez compris, nos réticences nous amèneront à nous abstenir. (Applaudissements sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à Mme Mireille Schurch.
Mme Mireille Schurch. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, à la suite des engagements pris lors du Grenelle de l’environnement et des annonces, dans les médias, des milliards d’euros octroyés tant au plan de régénération du réseau ferroviaire qu’au plan de relance et au plan fret d’avenir, nous nous attendions, concernant le volet « transport » au sein de la mission « Écologie, développement et aménagement durables » pour 2010, à examiner des crédits renforcés, à la hauteur des enjeux de la révolution verte.
Pourtant, à la lecture de ce projet de budget, quelle déception ! Les crédits du volet « transport » sont en baisse de 3 %, soit 137,7 millions d’euros, alors même que l’on recourt plus fortement aux ressources extrabudgétaires telles que les taxes, les redevances et les péages.
Ainsi, la subvention budgétaire à l’AFITF est en baisse de 220 millions d’euros par rapport à 2009. Cela s’explique pour partie par les dépenses transférées aux collectivités locales, par les avances de 2009 faites dans le cadre du plan de relance et par les fameux engagements pour le fret ferroviaire.
Cependant, au-delà de cette diminution, les membres du groupe CRC-SPG restent particulièrement inquiets, comme certains orateurs précédents, sur la pérennité des financements de cette agence.
Dans ce cadre, monsieur le secrétaire d’État, nous continuons de déplorer le choix fait par votre majorité de céder aux investisseurs privés les très rentables concessions d’autoroutes, dont les recettes devaient initialement financer l’Agence et, donc, la régénération du réseau.
Par ailleurs, la taxe poids lourd, qui n’entrera en vigueur qu’en 2012, mais qui est présentée comme la solution miracle pour le financement de l’AFITF, ne nous semble pas de nature à garantir un niveau suffisant de recettes.
Nous déplorons également votre volonté inébranlable d’affaiblir les opérateurs publics, qu’il s’agisse de la SNCF ou de RFF.
Ainsi, cette année encore, la subvention à RFF est en baisse de 75 millions d’euros, et ce alors même que l’audit de l’École de Lausanne préconisait un engagement de la puissance publique sans précédent. À défaut d’un tel engagement, plus de la moitié de notre réseau sera obsolète d’ici peu.
Vous continuez de contraindre RFF à augmenter les péages ferroviaires, ainsi que le niveau de la convention de gestion qui le lie à la SNCF. Par là même, vous contraignez la SNCF à reporter sur les usagers ces hausses de tarifs. Ce sont donc bien toujours les mêmes qui payent les conséquences du désengagement de l’État. RFF est également censé se financer grâce à la cession de son patrimoine, lui permettant par ailleurs de rembourser la dette qui l’écrase. Une nouvelle fois, il s’agit donc de céder le patrimoine public, alors même que celui-ci constitue une richesse inestimable.
À ce titre, l’article 7 de la loi relative à l’organisation et à la régulation des transports ferroviaires prévoyait la remise, à la fin de l’année 2009, d’un rapport sur les perspectives de désendettement de RFF. Comme vous le savez, mes chers collègues, la dette de RFF a encore augmenté cette année et s’élève à 28,2 milliards d’euros. À l’instar de mon collègue Teston, je lirai ce rapport avec une grande attention.
En toute logique, vous affaiblissez les opérateurs publics afin de faire de la place pour les nouveaux entrants sur les tronçons rentables, abandonnant toute ambition en termes d’aménagement du territoire. Ainsi, force est de constater que les conséquences du plan fret sont désastreuses pour les territoires les plus fragiles.
Dans ce cadre, la faiblesse de votre engagement pour le fret est éclairante. Je souhaite ici rappeler que, à la suite d’un long déclin, la part modale du transport ferroviaire atteint péniblement 10,7 % en 2009. L’objectif qui consiste à atteindre 10,9 % nous paraît bien peu ambitieux : à ce rythme de 0,2 % par an, nous atteindrons les objectifs fixés par le Grenelle de l’environnement dans soixante-dix ans !
Il est également troublant de voir, dans ce projet de budget, combien le secteur routier est une nouvelle fois privilégié, notamment grâce aux exonérations fiscales qui atteignent cette année 330 millions d’euros.
D’un côté, 330 millions d’euros d’exonérations, de l’autre, un peu plus de 30 millions d’euros pour le transport combiné : cela illustre l’engagement bien timide de votre Gouvernement pour le rééquilibrage modal.
Telles sont les raisons pour lesquelles les sénateurs du groupe CRC-SPG ne voteront pas ces crédits, qui s’inscrivent dans la continuité de la logique de la droite au pouvoir depuis 2002 : privatiser les profits et socialiser les pertes. Les enjeux du développement durable ne peuvent souffrir d’une telle vision, qui fait de la rentabilité économique le seul critère d’intervention et de la mise en concurrence le seul mode d’organisation possible des services publics.
Au contraire, il faut renforcer la maîtrise publique dans le secteur des transports par une action déterminée et des investissements massifs pour le rail, levier d’action stratégique pour le respect des engagements en faveur de l’environnement. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Paul Raoult.
M. Paul Raoult. Madame la secrétaire d’État, monsieur le secrétaire d’État, le budget de l’écologie est fortement marqué par votre volonté de soutenir les efforts prévus par les lois Grenelle I et Grenelle II dans le domaine de la biodiversité.
Dans un contexte économique et financier difficile, nous sommes sensibles à ce soutien qui doit permettre de « casser » le processus engagé depuis plusieurs décennies, lequel met en péril notre planète et la survie même de l’espèce humaine.
À titre personnel, j’apprécie les efforts déployés pour l’accroissement des parcs nationaux et régionaux, ainsi que pour les réseaux et aires des espèces protégées. Les dispositions financières devraient permettre d’engager de manière solide la mise en place de la trame bleue et de la trame verte, même si des efforts beaucoup plus importants devront être réalisés dans les années à venir pour ces deux trames empreignent notre environnement.
Mes inquiétudes portent d’abord sur l’insuffisance de moyens humains, au regard des défis qui s’annoncent. L’étape préalable des inventaires scientifiques nécessitera un énorme travail des scientifiques et des experts, parce qu’il y a un grand retard à rattraper et que la qualité environnementale des PLU et des SCOT dépend largement de cette mise à jour de nos connaissances scientifiques.
Assurer les continuités écologiques, en partenariat avec les collectivités territoriales, est un objectif à prendre en compte. Pour ce faire, l’État doit être au rendez-vous.
En effet, on le voit bien, la mise en place des bandes enherbées le long des rivières, par exemple, n’est pas simple. Celles-ci progressent peu. Quelles sont les plantes autorisées ? Quelles compensations accordera-t-on aux agriculteurs lorsqu’il n’y a pas de DPU ? Autant de questions qui restent sans réponse, madame la secrétaire d’État.
De même, quels moyens financiers dégagera-t-on pour l’effacement des 40 000 petits barrages de moins de cinq mètres ? Nous n’avons pas non plus de réponse pour la mise en œuvre de cet objectif extrêmement important.
Mettre en place des logiques transversales entre les ministères et des politiques de coordination entre les différents services du ministère de l’écologie est indispensable.
La trame verte et la trame bleue ne sont pas juxtaposées, mais indissociables, ce qui suppose que les directions régionales de l’environnement, de l’aménagement et du logement et les Agences de l’eau coopèrent davantage et ne restent pas chacune dans leur pré carré. Un dialogue permanent doit donc s’engager avec les régions, les départements et les intercommunalités. Toutefois, j’ai bien conscience qu’une véritable révolution culturelle doit s’opérer pour obtenir des résultats positifs dans ce domaine.
Mon autre inquiétude est liée aux problèmes de gestion de l’eau dans notre pays.
L’assiette des nouvelles redevances acquittées par les usagers domestiques est liée dorénavant à la consommation. Celle-ci diminuant chaque année de 1 % à 1,5 %, les recettes des agences, mais aussi celles des distributeurs, baissent. Les agences sont donc conduites à augmenter les redevances afin de compenser les pertes. Ce système un peu pervers a ses limites. N’oublions pas que des investissements très importants restent à réaliser en matière d’eau potable et de traitement des eaux usées.
Par ailleurs, la presse nationale s’est fait l’écho des problèmes de fuites dans les réseaux d’eau potable. Certes, la situation est sérieuse, mais on a un peu mélangé les problèmes et donné des chiffres caricaturaux. On a ainsi comptabilisé comme des fuites l’eau utilisée par les sapeurs-pompiers pour lutter contre les incendies, sous prétexte que cette eau est gratuite.
Reste que des efforts d’investissement très lourds doivent être poursuivis pour renouveler nos réseaux et pour créer ou rénover des stations d’épuration. Il y a une urgence écologique forte pour arrêter, par exemple, l’eutrophisation de nombreux plans d’eau et de rivières.
Il est également urgent de mettre en place une protection efficace des fameux 500 captages les plus menacés avec une délimitation précise des zones de protection de l’aire d’alimentation, des études et diagnostics territoriaux des pressions agricoles, la définition et la mise en œuvre des programmes d’action – je pense aux MAET ou à l’agriculture biologique. Dans ce domaine aussi des efforts très importants restent à faire.
Par ailleurs, la lutte contre les pollutions diffuses d’origine agricole est en panne. Le programme de développement rural hexagonal et le plan végétal pour l’environnement sont en effet difficiles à mettre en œuvre. Je souhaiterais que le ministère de l’écologie en ait conscience afin que les MAET, par exemple, dont le nombre est jusqu’à présent très limité, puissent être engagées de manière nettement plus positive qu’aujourd’hui.
Je vous sais très attachée, madame la secrétaire d’État, à la protection des zones humides – à leur acquisition, leur restauration, à leur entretien –, mais l’action est longue et difficile. Les résistances sont rudes. Pourtant, il nous faut impérativement défendre ces zones, qui conditionnent le ravitaillement en eau potable de nombreuses régions dans notre pays.
Beaucoup d’élus souhaiteraient que l’on aille plus vite en matière d’assainissement non collectif. En tout cas, félicitons-nous de la publication d’un certain nombre de décrets en septembre 2009 : c’est un enjeu majeur, en particulier dans les zones d’habitat dispersé.
L’enjeu écologique est devenu primordial pour notre économie et notre société. Des avancées législatives, réglementaires et financières sont en cours, mais pour porter une économie réellement soutenable, il faut aussi une société plus juste, plus égalitaire afin d’obtenir le consensus nécessaire et de faire changer les comportements individuels. J’ai quand même la conviction que les mesures fiscales qui ont été prises depuis deux ans ne vont pas dans ce sens.
Il nous faut faire accepter à nos concitoyens une gestion plus économe de nos ressources. Pour cela, il faut avoir le courage politique de bousculer des situations acquises.
Nous avons encore beaucoup à faire pour définir les mécanismes de contrôle et de sanction, sinon nous risquons d’être dans le domaine de l’incantation. Au-delà des objectifs de diminution des émissions de gaz à effet de serre, que tout le monde souhaite, c’est bien une question majeure qui se posera au sommet de Copenhague.
En conclusion, madame la secrétaire d’État, il subsiste beaucoup d’interrogations par rapport à ce projet de budget. Si notre regard est positif, il est également critique tant les incertitudes sur les résultats de la nouvelle politique environnementale sont grandes. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. Didier Guillaume. Discours très concret !
M. le président. La parole est à M. Jean Desessard.
M. Jean Desessard. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, mon intervention portera spécifiquement sur le volet « transport ferroviaire », car la situation est grave.
Pourtant, depuis plusieurs semaines, nous assistons à un grand plan de communication de la direction de la SNCF sur le thème « Et si les marchandises prenaient le train ? ».
Pourtant, M. Borloo a présenté il y a quelques semaines le plan Fret d’avenir, qui nous promet une nouvelle politique des transports : le rail serait développé pour réduire le transport routier.
M. Louis Nègre. C’est bien !
M. Jean Desessard. Pourtant, la mission dont nous débattons aujourd’hui prévoit une augmentation de 25 % de la part modale du fret non routier d’ici à 2012.
M. Louis Nègre. À qui la faute ?
M. Jean Desessard. Qu’en est-il réellement ?
Dépassons ces déclarations d’intention et regardons la politique de SNCF-fret ou Geodis-fret. C’est aujourd’hui la politique des autoroutes ferroviaires, dont je doute de la faisabilité, et celle de l’abandon du wagon isolé. La SNCF veut des trains complets du départ à l’arrivée.
M. Louis Nègre. Bravo !
M. Jean Desessard. Mais non !
M. Louis Nègre. Mais si !
M. Jean Desessard. Elle ne veut plus aller chercher deux, trois, quatre ou cinq wagons dans une zone industrielle, les assembler pour former un convoi entier, acheminer celui-ci à destination, puis distribuer les containeurs. Cette réalité contredit les chiffres optimistes d’une progression de 25 % de la part modale.
Cette politique d’abandon du wagon isolé se traduira dès demain par une réduction du fret ferroviaire, c’est-à-dire le report sur la route de 1 à 2 millions de poids lourds par an. Si le train ne va plus chercher les wagons isolés, c’est donc le camion qui transportera les containeurs, et ce par la route.
Cette politique d’abandon se traduira également par la suppression de 5 000 emplois de cheminots et la détérioration des conditions de travail et des risques accrus pour la sécurité ferroviaire. C’est donc cela le fret d’avenir ?
Abandonner le wagon isolé, c’est aussi aboutir à la perte d’un outil industriel, sans la possibilité de revenir en arrière. (M. Louis Nègre s’exclame.) Car cela aura pour conséquence la fermeture des gares de triage, l’abandon de lignes secondaires ! Mes chers collègues, cela ne vous fait-il pas mal au cœur en allant à la campagne de voir toutes ces lignes de chemin de fer et toutes ces gares que l’on utilisait il y a encore trente ou quarante ans…
M. Nicolas About. Nostalgie !
M. Jean Desessard. … être maintenant sous-utilisées ?
M. Nicolas About. Moi, c’est de voir des relais Poste qui me donne le blues !
M. Jean Desessard. Ce processus va encore être accentué.
M. Nicolas About. Oui !
M. Jean Desessard. Cela aura également pour conséquence l’abandon des compétences des cheminots. On n’insiste pas suffisamment sur ce point, les cheminots sont de moins en moins polyvalents.
Auparavant, les conducteurs de train pouvaient être affectés au transport de voyageurs ou de marchandises. Aujourd’hui, pour favoriser l’entrée de la concurrence dans le secteur ferroviaire, on a privilégié la sectorisation des métiers, c’est-à-dire que l’on impose à un conducteur de ne travailler que sur le fret, les TER ou les grandes lignes. Cela détruit peu à peu leur savoir-faire et leur polyvalence. On a même remarqué que des lignes de fret ont été supprimées faute de personnel, alors que certains conducteurs de TER étaient dans le même temps sous-employés.
L’abandon du wagon isolé, c’est à terme condamner de façon irréversible le fret ferroviaire et le maillage du territoire.
M. Louis Nègre. 600 millions !
M. Jean Desessard. Quand les gares de triage auront fermé et que les lignes secondaires ne seront plus utilisées, que fera Réseau ferré de France ? Il trouvera probablement plus rentable de vendre le foncier de ces lignes et gares qui ne servent plus à rien.
M. Nicolas About. Bien sûr !
M. Jean Desessard. Dans quinze ou vingt ans,…
Mme Évelyne Didier. Il n’y aura plus rien à vendre !
M. Jean Desessard. … quand le carburant routier sera devenu trop rare et hors de prix, comment desservirons-nous nos territoires ? Le tout-routier a ses limites, alors soyons prévoyants – gouverner, c’est prévoir, dit-on ! (Mme Évelyne Didier opine) – et faisons en sorte de ne pas programmer aujourd’hui la désertification des territoires jugés peu rentables.
Mme Évelyne Didier. Gardons les lignes !
M. Jean Desessard. Aussi, les Verts proposent aujourd’hui d’abaisser les tarifs des péages ferroviaires pour le fret afin que le fret ferroviaire gagne en compétitivité par rapport à la route. C’est ce qu’on appelle la prise en compte du coût écologique.
Pour compenser les pertes de revenus liées à cette baisse des péages et ainsi maintenir l’activité de wagon isolé, l’État devrait abonder RFF à hauteur de 150 millions d’euros par an. J’aurais souhaité que cela apparaisse dans le projet de budget.
À quelques jours du sommet de Copenhague, on ne peut pas laisser de côté le rail alors que la planète entière parle de réduire ses émissions de gaz à effet de serre.
C’est l’intérêt général des populations et les considérations environnementales qui doivent dicter ces lignes budgétaires.
Le transport ferroviaire est un bien public indispensable à une politique des transports sobre en carbone. Une politique véritablement écologiste, cher collègue Fortassin, et non pas simplement des intentions, favoriserait le fret ferroviaire, qui aurait bien mérité un petit coup de pouce de 150 millions d’euros. C’est pourquoi les Verts ne voteront pas les crédits de cette mission. (Applaudissements sur plusieurs travées du groupe socialiste. – Mme Évelyne Didier applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État chargé des transports. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je veux avant tout remercier les rapporteurs de leur excellent travail.
Avant que Chantal Jouanno réponde aux intervenants, je voudrais rapidement rappeler que le projet de budget pour 2010 est marqué par une accélération sans précédent de nos investissements. Jamais, en France, on n’aura construit autant de grandes infrastructures alternatives à la route.
L’année 2009 a déjà été une année importante pour plusieurs grands projets.
Nous avons signé, avec Jean-Louis Borloo, le protocole d’intentions pour le canal Seine-Nord Europe. Nous avons lancé la deuxième phase de la LGV Est ; à cet égard, je remercie les collectivités qui ont signé avec nous la convention de financement. Nous avons engagé le dernier tour de l’appel d'offres pour les lignes à grande vitesse Bretagne-Pays de la Loire – Le Mans-Rennes et une petite antenne vers Angers –, Tours-Bordeaux – le plus grand chantier d’Europe, soit près de 7,5 milliards d’euros de travaux et 40 000 emplois –, et CDG Express à la fin du mois de juillet.
MM. Roland Ries et Louis Nègre, qui étaient présents à Nice, la semaine dernière, avec Christian Estrosi, ont évoqué les transports en commun en site propre. Dans ce domaine, 365 kilomètres sont prévus au terme du premier appel à projet lancé en 2009, soit en trois ans plus que ce qui avait été réalisé par les collectivités en trente ans ! Nous lancerons, dès 2010, un deuxième appel à projet.
L’année 2010 sera celle du démarrage des grands travaux. Les premiers coups de pioche, si j’ose dire, seront donnés pour la deuxième phase de la LGV Est et des travaux préparatoires seront conduits pour les autres grands projets, qui débuteront en 2011. J’aurais également pu citer le TGV Rhin-Rhône, dont la construction se poursuit entre Mulhouse et Besançon.
MM. Francis Grignon, Alain Lambert, Roland Ries et Louis Nègre ont évoqué le budget de l’Agence de financement des infrastructures de transport de France, l’AFITF, qui portera la part de l’État dans ces investissements. Celui-ci s’établira à 2 673 milliards d’euros en 2010, dont 331 millions d’euros au titre du plan de relance ; il nous donne les moyens de notre politique. À la suite du rapport Gressier, nous allons en effet renforcer les moyens de l’AFITF, qui sera dotée de moyens complémentaires en attendant que la redevance poids lourds – que vous avez votée – et les autres recettes complémentaires prennent le relais.
Par ailleurs, nous faisons également un effort important pour réorienter le fret vers d’autres modes de transport que nous jugeons durables. Ainsi, la réforme portuaire se met en place ; 34 millions d’euros d’investissements nouveaux sont portés par l’AFITF en 2010 et, conformément au texte que vous avez voté, les crédits d’entretien et de dragage sont en augmentation.
MM. Alain Lambert et Jean Desessard ont évoqué l’engagement national pour le fret ferroviaire.
Il est prévu une montée en puissance du transport combiné, à laquelle nous consacrons 8 millions d’euros supplémentaires dès 2010, l’augmentation des cadences des autoroutes ferroviaires – déjà effective sur la ligne Perpignan-Bettembourg, elle le sera bientôt sur la ligne transalpine –, ou encore la création d’opérateurs de proximité. Je signerai vendredi à La Rochelle et dans les jours suivants au Havre la mise en œuvre des premiers opérateurs de proximité.
Nous allons également supprimer les goulets d’étranglement de notre réseau de fret ; je pense au contournement des agglomérations de Nîmes et Montpellier, ainsi qu’au contournement ferroviaire de l’agglomération lyonnaise, le CFAL.
L’ensemble de ces projets aura un impact majeur. J’aurai auprès de moi un comité de suivi qui tiendra à jour un tableau de bord trimestriel pour voir comment les choses se déroulent, car nous voulons justement éviter, cher Alain Lambert, qu’il ne s’agisse d’une énième réforme du fret.
Nous consacrerons un total de 7 milliards d’euros à l’engagement national pour le fret, non seulement pour les infrastructures mais aussi pour le transport combiné ou les autoroutes ferroviaires.
L’équilibre financier des lignes d’aménagement du territoire a également été évoqué. Les liaisons Corail classiques connaissent en effet des difficultés et il convient de trouver une compensation spécifique ; nous y travaillons.
Chacun a entendu parler du rapport de la Cour des comptes sur les TER : il est sévère, mais pas forcément injuste. M. Francis Grignon, après avoir été rapporteur d’un texte important dans ce domaine, a accepté d’animer une « commission des parties prenantes » qui rendra ses conclusions au printemps sur les conditions dans lesquelles les régions pourraient, après appel d'offres, confier les TER à d’autres opérateurs que la SNCF.
Comme je le dis souvent aux présidents de région, quelle que soit leur sensibilité politique, même déjà aujourd’hui, il vaut mieux à certaines heures un autocar plein qu’un TER aux trois quarts vide, qui occupe de surcroît des sillons qu’on ne peut utiliser pour le fret ferroviaire.
M. Jean-Paul Emorine. Tout à fait !
M. Jean Desessard. Ce n’est pas sûr !
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. En ce qui concerne le transport routier de marchandises, il est vrai que la fiscalité augmente. Mais c’est la traduction de notre politique de report modal…
M. Jean-Paul Emorine. Très bien !
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. … et, par ailleurs, nous avons pris des engagements d’allégement de cette fiscalité. Un abattement de 36 % de la taxe carbone en 2010 et un allégement des charges de personnel dans le cadre de l’harmonisation européenne des conditions de travail sont prévus. La baisse de la taxe professionnelle profitera en outre à ce secteur.
Depuis la tribune de la Haute Assemblée, j’en profite pour lancer un appel au dialogue entre les syndicats de salariés du transport routier et les organisations professionnelles. Je veillerai personnellement à ce que ces rencontres aient lieu, afin d’éviter qu’une grève, en pleine période de fêtes, n’affecte gravement notre économie et le bien-être de nos concitoyens.
Dans le domaine de la sécurité, nous poursuivons nos efforts pour la sécurité en mer avec l’augmentation du programme « Sécurité et affaires maritimes », pour la sécurité aérienne avec l’accroissement des moyens de la formation et de la navigation aérienne, pour la sécurité ferroviaire avec la réduction du nombre de passages à niveau pouvant poser problème, et pour la sécurité routière avec 530 nouveaux radars dont les implantations seront diversifiées, avec une attention particulière portée aux feux rouges et aux passages à niveau.
MM. Gérard Miquel et Francis Grignon ont évoqué la baisse exceptionnelle de la mortalité routière dans notre pays pendant la période 2002-2008, due à l’action conjointe des acteurs de sécurité et de chaque automobiliste. Malheureusement, si la tendance actuelle se confirme, le bilan pour l’année 2009 devrait être en augmentation par rapport à l’année précédente. La vitesse et l’alcool ainsi que la sur-accidentalité des deux-roues motorisés restent les problèmes dominants.
Dans ces conditions, j’ai proposé à M. le Premier ministre de réunir rapidement le Comité interministériel de la sécurité routière pour proposer de nouvelles sanctions destinées aux grands délinquants et pour rendre plus effective et mieux comprise la politique de limitation de vitesse. Concernant les deux-roues, nous avons entamé une concertation depuis plusieurs mois. Nous allons proposer des mesures très importantes pour l’amélioration de leur sécurité, en particulier pour les deux-roues motorisés.
Monsieur Gérard Miquel, s’agissant du projet FAETON, la mise en place s’effectuera selon un calendrier conforme à celui qui est prévu par la directive européenne.
Je voudrais préciser à Mme Mireille Schurch que, malgré des investissements très importants, le budget des transports est maîtrisé puisque la dotation du programme « Infrastructures et services de transport », même si elle est en baisse, est compensée par l’augmentation des recettes de RFF et de l’AFITF, ce qui permet de réduire les subventions à ces deux organismes sans réduire notre marge de manœuvre.
S’agissant du budget annexe de l’aviation civile, la baisse des trafics, liée à la crise économique, a eu, hélas ! des conséquences sensibles sur les recettes. Un plan d’économies a été engagé et il sera poursuivi l’an prochain. Je tiens à ce que les tarifs des taxes et redevances soient augmentés de manière raisonnable, pour conjuguer l’équilibre budgétaire et le soutien à un secteur qui connaît des difficultés.
M. Jean-François Le Grand a eu raison de le souligner, le secteur aérien n’a pas bénéficié du plan de relance, mais il a profité d’autres mesures exceptionnelles, telles que des avances au budget annexe afin de poursuivre les investissements stratégiques sans conduire à une hausse excessive des taxes et redevances.
En ce qui concerne la quote-part de la taxe d’aviation civile au budget annexe, les conditions d’équilibre du budget général ne nous permettront pas de la faire évoluer, mais cela reste un sujet de réflexion pour les années futures.
Nous travaillons à la création d’une entité unique de contrôleurs aériens européens. La France n’est pas opposée, dans le cadre du ciel unique européen, à la formation d’alliances poussées avec ses partenaires européens, pouvant aller jusqu’à l’intégration de certains services et la création d’entités internationales. Pour ce faire, nous devons négocier à la fois avec nos partenaires étrangers et, en interne, avec nos personnels qui, cela se comprend, ont exprimé certaines craintes.
Monsieur Yvon Collin, nous venons de remettre au Parlement un rapport sur les évolutions stratégiques de la direction générale de l’aviation civile, la DGAC, qui se place dans le cadre du ciel unique européen et notamment des projets FABEC et SESAR. La piste d’un établissement public administratif fait l’objet de discussions avec les personnels.
S’agissant des lignes aériennes d’aménagement du territoire, monsieur Fortassin, la taxation du transport aérien n’est pas le meilleur moyen d’en faire baisser le coût. Comme vous le savez, nous finançons à plus de 50 % des lignes d’aménagement du territoire dans des zones mal desservies en termes routier et ferroviaire.
S’agissant de l’IGN, nous préparons un nouveau contrat d’objectifs.
Enfin, le régulateur du secteur ferroviaire dont vous avez voté la création sera financé par le secteur via un droit spécifique.
Bref, nous poursuivons nos investissements ; nous maîtrisons les dépenses courantes et les effectifs de notre ministère et nous redéployons les agents vers des missions liées à la mise en œuvre du Grenelle.
Notre budget traduit les ambitions élevées que le Gouvernement s’est fixées en matière de développement des infrastructures de transport. Quatre grands projets de LGV sont menés de front en 2010 : c’est un moment unique dans notre histoire des transports, qui symbolise bien les orientations du Grenelle en faveur du développement durable. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
Mme Fabienne Keller, rapporteur spécial. Très bien !
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État chargée de l'écologie. Monsieur le président, madame, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, nous sommes tous comptables des engagements du Grenelle de l’environnement que nous avons pris dans le cadre de la loi dite Grenelle I, concrétisés par la loi dite Grenelle II. Nous nous sommes notamment engagés à créer les conditions d’une future croissance verte.
L’année 2009 a été l’année du lancement de différents programmes, avec la mise en place d’outils comme l’éco-prêt à taux zéro. Nous avons déjà financé plus de 50 000 chantiers de rénovation grâce à ce prêt, alors que nous n’en comptons habituellement qu’à peine 40 000 par an.
Le fonds de soutien au développement de la production et de la distribution de chaleur d’origine renouvelable mis en place l’année dernière a été doté de près de 1 milliard d’euros sur trois ans. Lors du premier appel d’offres, nous avons dépassé nos objectifs de plus de 50 %.
Il convient également de souligner que, dans le domaine de l’énergie solaire, nous avons plus que doublé le nombre d’installations en à peine six mois.
M. Roland Courteau a eu raison de nous alerter sur les éventuelles difficultés liées au troisième régime ICPE, mais les recours sont actuellement la principale source de ralentissement du déploiement des projets de parcs éoliens. Nous devons trouver le moyen de créer un régime juridique sécurisé, notamment pour l’éolien.
Nous avons également mis en place un plan pour la rénovation des friches industrielles, qui est probablement l’un des plus rentables, au niveau tant écologique qu’économique.
Mme Fabienne Keller m’a interrogée sur le fonds Barnier. Ses moyens ont augmenté en 2009 et sont désormais suffisants pour répondre à la demande. À l’avenir, la programmation du fonds s’adaptera aux besoins.
L’année 2010 sera celle de l’accélération de notre action. Le Grenelle entre vraiment dans le vif du sujet. Nous assistons à une accélération de la mutation – bien évidemment humaniste, monsieur Fortassin – de notre société.
Le rapport Stiglitz, qui a été remis le 14 septembre dernier, démontre notamment que nous devons compléter notre indicateur, le PIB, afin de prendre en considération l’état de notre patrimoine à la fois naturel et humain. Le Président de la République a chargé M. Cotis, de l’INSEE, de nous proposer un tel indicateur.
Bien plus, 2010 sera l’année de la modification des comportements.
Comme Mme Fabienne Keller l’a souligné, le bonus-malus automobile a très largement dépassé nos espoirs et le rythme de baisse des émissions des véhicules neufs vendus est très supérieur à ce que nous escomptions. C’est la raison pour laquelle, monsieur Francis Grignon, nous confirmons la diminution de cinq grammes pour 2010 et nous anticipons la future réduction de cinq grammes qui était initialement prévue pour 2012, laquelle sera appliquée dès 2011.
L’année 2010 sera aussi l’année de la mise en application, et ce dès le 1er janvier, de la contribution carbone, que vous avez adoptée. Ce sera une véritable révolution et, comme l’a signalé Mme Fabienne Keller, il convient d’éviter les exonérations.
Vous avez évoqué, madame Évelyne Didier, la délicate question des plus défavorisés. S’agissant de la contribution carbone, selon les calculs de l’ADEME, le mécanisme de redistribution permet de garantir au premier décile de la population jusqu’aux déciles cinq à sept une redistribution supérieure au coût de la contribution carbone.
Le Président de la République souhaite également mettre en place une avance sur le crédit d’impôt pour les ménages les plus défavorisés. Par ailleurs, M. Jean-Louis Borloo a demandé à Mme Valérie Létard de prévoir un plan contre la précarité énergétique destiné à répondre aux préoccupations que vous avez exprimées.
Enfin, 2010 sera l’année du verdissement de notre fiscalité, notamment dans le domaine de la construction dont vous allez bientôt débattre.
Notre deuxième chantier, outre la mutation de la société, c’est l’accélération de la mise en œuvre des différents plans. Le fonds « chaleur » verra sa contribution multipliée par deux l’an prochain.
Nous avons pris l’engagement de sélectionner une centrale solaire au sol par région, en étant extrêmement prudents dans l’affectation des terres agricoles, ce qui nous permettra de multiplier par trois notre production d’énergie solaire.
Je le répète, nous avons déjà accordé 50 000 éco-prêts à taux zéro. Notre objectif est d’en offrir 200 000 l’année prochaine et de parvenir à un rythme de croisière annuel de 400 000 éco-prêts.
Madame Fabienne Keller, vous m’avez interrogée en particulier sur l’article 200 quater du code général des impôts, qui est relatif au crédit d’impôt « développement durable ». En 2009, cet outil représentait entre 2,7 et 2,8 milliards d’euros, compte tenu des mesures que vous avez votées l’an dernier, mesdames, messieurs les sénateurs, notamment la baisse des taux pour certains dispositifs qui sont désormais sur le marché. Selon mes estimations, ce crédit d’impôt devrait coûter 2 milliards d’euros l’année prochaine. Enfin, monsieur Miquel, je vous confirme que, l’an prochain, le bonus-malus sur les administrations exemplaires produira tous ses effets financiers.
Notre troisième grand chantier, c’est l’accélération des efforts de prévention.
Vous avez tous souligné, mesdames, messieurs les sénateurs, que les crédits alloués à la prévention des risques progresseraient de 35 % l’année prochaine. Notre objectif est clairement d’accélérer la prescription et la mise en œuvre des PPRT, les plans de prévention des risques technologiques, dont seulement la moitié sont aujourd'hui prescrits. Nous voulons, l’an prochain, que 95 % des PPRT soient prescrits et que 40 % d’entre eux soient approuvés, ce qui explique la forte hausse de cette enveloppe.
Par ailleurs, comme vous l’avez également relevé, les fonds gérés par l’ADEME voient leurs crédits s’accroître : de 20 % pour le fonds « Sites et sols pollués » et de 28 % pour le fonds « Points noirs du bruit ». Quant au plan « Déchets », monsieur Jean-Paul Emorine, nous aurons l’occasion d’en débattre tout à l'heure, dans le cadre des questions-réponses-répliques, quand nous aborderons la question de la TGAP.
Madame Fabienne Keller, vous m’avez interrogée sur les effectifs des inspecteurs des installations classées. Nous allons renforcer ce dispositif grâce à 300 nouveaux inspecteurs au cours de la période 2008-2012. Quelques difficultés de recrutement se sont produites cette année, mais elles sont en train de se résorber. Par ailleurs, dans le cadre de la table ronde dite « Risques industriels », nous avons confirmé notre engagement de doubler le nombre des inspecteurs, qui devraient être 1 700 en 2015.
Notre quatrième chantier, c’est l’accélération des efforts menés pour préserver les milieux naturels. À cet égard, en ce qui concerne la biodiversité, « l’écologie pure », l’enveloppe des crédits augmentera de 12 %, après avoir progressé de 10 % en 2009 et de 30 % en 2008.
M. Louis Nègre l’a rappelé, et je tiens à y insister, 2010 sera l’année de la biodiversité ! Nous comptons sur vous, mesdames, messieurs les sénateurs, pour mener des opérations sur ce thème, partout sur le territoire français.
Tous les programmes du Grenelle doivent donc être poursuivis et amplifiés, à commencer par les trames verte et bleue, si chères à M. Paul Raoult. En ce qui concerne les effectifs et la coordination des personnels nécessaires à leur mise en œuvre, nous n’avons pas abandonné l’idée de créer une agence, et nous lançons une mission sur ce thème. De même, nous favorisons le développement des aires protégées, notamment en créant trois parcs, dont un en zone humide, ainsi que la contractualisation Natura 2000.
Monsieur Jean-Paul Emorine, vous m’avez interrogée sur les SCOT, les schémas de cohérence territoriale. L’enveloppe consacrée aujourd'hui à leur élaboration est d’environ un million d’euros ; elle a permis d’aider à la création d’une quinzaine de ces schémas, mais, en réalité, les demandes qui nous ont été adressées n’ont pas été très nombreuses. Nous sommes tout à fait prêts à doubler cette enveloppe, s’il le faut, notamment pour aider les territoires ruraux à élaborer leurs SCOT.
Je poursuis sur la question de la préservation des milieux naturels. Vous aurez tous noté, mesdames, messieurs les sénateurs, que le Gouvernement partageait avec M. Ambroise Dupont une véritable communauté de vues, ce qui a permis, d’ailleurs, d’adopter à travers le projet de loi Grenelle II des dispositions sur la publicité aux entrées des villes qui modifieront profondément, du moins je l’espère, notre paysage.
Tout comme vous, j’estime qu’il serait positif de revaloriser les métiers du paysage et de parvenir enfin à définir ce dernier. Un important travail doit être mené sur ce sujet.
L’année prochaine sera aussi celle du Grenelle de la mer, comme M. Louis Nègre l’a souligné, et nous tiendrons nos engagements. Je suis tout à fait prête d’ailleurs à aller visiter le parc marin que vous avez créé, monsieur le sénateur.
Enfin, nous devons accélérer l’innovation. Le fonds démonstrateur de l’ADEME a été mis en place, et il a déjà permis de sélectionner seize projets en 2009. Son enveloppe augmentera de 52 % en 2010, ce qui représentera environ 226 millions d’euros supplémentaires pour des projets liés à la recherche et à l’innovation, notamment dans les domaines des véhicules électriques, des énergies marines, des bâtiments décarbonés, du solaire thermodynamique ou photovoltaïque, enfin de la mobilité urbaine.
Telles sont, mesdames, messieurs les sénateurs, les quelques éléments que je souhaitais formuler en réponse à vos questions. Je vous remercie de nouveau de votre engagement et de la solidarité de la Haute Assemblée sur la question du Grenelle de l’environnement. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
questions-réponses-répliques
M. le président. Mes chers collègues, nous allons maintenant procéder aux questions-réponses-répliques.
Je rappelle que l’auteur de la question dispose de deux minutes trente. Pour lui répondre, Mme la secrétaire d’État ou M. le secrétaire d'État dispose également de deux minutes trente. L’auteur de la question dispose, enfin, s’il le souhaite, d’une minute pour la réplique.
La parole est à M. Daniel Soulage.
M. Daniel Soulage. Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, le Sénat a autorisé, à la demande du groupe de l’Union centriste, la création d’une mission commune d’information sur le traitement des déchets, dont M. Dominique Braye est le président et moi-même le rapporteur.
Cette mission aura, notamment, à examiner l’efficacité des différents modes de traitement des déchets et la pertinence des aides que l’ADEME attribuera dans le cadre de son plan « Déchets ».
Madame la secrétaire d'État, je souhaiterais, dans cette perspective, vous interroger sur deux points.
Premièrement, j’évoquerai les recettes affectées au plan « Déchets » de l’ADEME, qui sont constituées des nouvelles TGAP votées l’année dernière à la suite du Grenelle de l’environnement.
À cet égard, le Gouvernement devait rendre avant le 10 octobre 2009 un rapport au Parlement sur la possibilité d’alléger la TGAP pesant sur les collectivités qui éliminent leurs déchets, notamment dans des installations de stockage, et qui, en particulier, construisent des équipements permettant de récupérer du biogaz.
Je crois que ce rapport est finalisé. Or il n’a toujours pas été transmis au Parlement. Madame la secrétaire d'État, pouvez-vous nous en livrer les principales conclusions ? En effet, ce document devrait utilement éclairer la mission, qui aura à examiner, en fonction de ses constatations, la pertinence d’éventuelles modifications du régime des nouvelles TGAP.
Deuxièmement, j’aborderai la question des subventions accordées par l’ADEME. Madame la secrétaire d'État, pouvez-vous nous indiquer précisément les modes de traitement que cette agence compte subventionner et les critères sur lesquels elle se fondera pour aider une méthode plutôt qu’une autre ?
L’attribution d’une éventuelle subvention ne doit-elle pas être l’occasion d’attirer l’attention des porteurs de projets sur les conditions de mise en œuvre de telle ou telle méthode, afin d’éviter d’importants problèmes, voire des catastrophes financières qui coûteraient très cher au contribuable ?
Par ailleurs, le choix définitif n’est-il pas parfois conditionné à la nature du milieu concerné, une méthode bonne à la campagne ne valant pas forcément, selon moi, en ville ?
Madame la secrétaire d'État, je vous remercie de vos réponses, mais aussi du concours que vous voudrez bien nous apporter sur cette mission.
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État. Monsieur le sénateur, nous avons tous pris ici l’engagement de rendre plus chers l’incinération et le stockage, afin de favoriser la prévention et le recyclage.
Le rapport que vous évoquez a bien été finalisé. Il est en cours de validation interministérielle, ce qui explique que nous ne vous l’ayons pas encore remis. Toutefois, dès qu’il sera prêt, nous vous le transmettrons le plus rapidement possible, je m’y engage.
Vous m’avez interrogée sur l’évaluation du produit de la TGAP sur le stockage. Celui-ci représentera, grosso modo, entre 40 et 45 millions d'euros. Je ne puis être plus précise, car nous ne disposerons des tonnages exacts, qui sont nécessaires pour estimer le montant de l’augmentation de la TGAP, qu’en avril 2010.
Cette nouvelle TGAP « Incinération et stockage » doit abonder le fonds de l’ADEME. Son montant pour les trois années à venir est estimé à 570 millions d'euros. En outre, nous avons pris l’engagement que l’augmentation de la TGAP serait bien redistribuée aux collectivités territoriales, via le fonds de l’ADEME « Déchets », sans qu’aucun euro ne soit perdu en chemin…
Sans dévoiler entièrement le contenu de ce rapport, je soulignerai que, pour ses auteurs, le mécanisme de modulation actuel de la TGAP, lorsque le centre valorise le biogaz, joue pleinement son rôle d’incitation. Ces conclusions nous engagent plutôt à maintenir le dispositif tel que vous l’avez voté, mesdames, messieurs les sénateurs, car, en liant réduction de la TGAP et valorisation du biogaz, celui-ci semble tout à fait satisfaisant.
M. le président. La parole est à M. Daniel Soulage, pour la réplique.
M. Daniel Soulage. Madame la secrétaire d'État, je vous remercie de votre réponse. Toutefois, je souhaiterais disposer d’informations complémentaires sur le second point que j’ai évoqué.
M. le président. La parole est à M. Martial Bourquin.
M. Martial Bourquin. Je saisis l’occasion qui nous est offerte d’examiner le compte spécial relatif aux véhicules propres pour engager un débat sur ce thème.
En effet, près de 10 % de la population active, de nombreuses petites et moyennes entreprises et des bassins de production et d’emploi tout entiers vivent de l’industrie automobile. Ils sont directement concernés par la mutation environnementale annoncée, qui est d'ailleurs indispensable.
En octobre dernier, M. le ministre de l’écologie a présenté un plan en faveur des voitures propres en quatorze points.
Le Gouvernement a fait le pari de permettre la production, mais aussi l’achat par nos concitoyens, de près de 2 millions de voitures électriques ou hybrides rechargeables d’ici à 2012, ce qui représenterait environ 6 % des voitures en circulation sur notre territoire. Des systèmes de prime à la casse et de bonus-malus sont prévus pour faire évoluer les habitudes de consommation.
Or, vous le savez, madame la secrétaire d'État, ces habitudes ne se décrètent pas. Je crains qu’il n’existe un décalage certain entre vos intentions et la réalité de notre pays.
Tout d'abord, vous ignorez la réalité sociale. Nombre de nos concitoyens devront garder leur voiture même si elle est polluante, que l’on instaure ou non des super-bonus, faute du pouvoir d’achat nécessaire ou d’une possibilité de crédit !
Ensuite, vous oubliez la réalité du marché. Les super-bonus et les primes à la casse seront valables jusqu’en 2012. Or, comme vous le reconnaissez vous-même, le lancement des premières voitures électriques de masse se fera à la fin de 2010 et celui des véhicules hybrides rechargeables en 2012. Il y a donc quelque inadéquation dans les aides proposées.
Enfin, à bien des égards, vous méconnaissez la réalité économique. Le secteur de la construction mais aussi les communes seront sollicités pour permettre l’installation des prises de recharge.
Cet effort, conjugué avec celui qui sera nécessaire pour adopter les nouvelles normes relatives au handicap, entraînera des dépenses importantes pour les municipalités, les organismes d’HLM et le secteur de la construction.
M. le ministre de l’écologie a souligné qu’une concertation avec les communes était prévue d’ici à la fin de l’année. Madame la secrétaire d'État, pouvez-vous nous indiquer où en sont ces discussions ?
Par ailleurs, la standardisation des prises a été évoquée. Comme vous le savez, celle des téléphones portables constitue un véritable casse-tête. Une harmonisation des recharges est-elle prévue dès la conception de ces dernières ?
Enfin, l’aide à la filière automobile constitue une question essentielle.
La mutation environnementale des entreprises du secteur est difficile. Certes, nos deux grands constructeurs, qui sont dynamiques, parviendront à s’adapter, mais de nombreuses TPE et PME connaissent de graves difficultés. Il est absolument nécessaire d’accompagner ces entreprises et de les aider à se trouver au rendez-vous de l’innovation.
Les dispositifs envisagés aujourd'hui sont totalement insuffisants. Madame la secrétaire d'État, qu’avez-vous prévu pour aider la filière automobile à réussir cette mutation indispensable mais nécessaire ? Car si ces TPE et PME ne recevaient pas les aides dont elles ont besoin, nous risquerions d’assister à des drames sociaux et économiques importants. Madame la secrétaire d'État, qu’envisagez-vous de faire pour que nous soyons au rendez-vous de l’innovation et pour que la voiture décarbonée devienne une manifestation de l’excellence française et européenne ?
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État. Monsieur le sénateur, le plan que vous avez évoqué vise à produire deux millions de véhicules électriques en 2020 ; après cette date, la montée en puissance du dispositif sera plus rapide et nous comptons sur quatre millions de voitures propres en 2025.
Dans cette perspective, nous agissons sur tous les éléments de la chaîne de production.
Premièrement, en matière de recherche, nous avons mis en place le fonds démonstrateur de l’ADEME. L’année dernière, nous avons consacré presque 57 millions d'euros au véhicule du futur. L’an prochain, un nouvel appel à projets sera lancé sur ce thème.
Deuxièmement, s'agissant de la filière industrielle que vous évoquiez à l’instant, monsieur Bourquin, nous avons mobilisé le fonds stratégique d’investissement, le FSI, grâce auquel, en particulier, quelque 350 000 batteries pourraient être fabriquées sur le site de Flins.
Troisièmement, nous nous efforçons de stimuler la demande, par le biais du bonus et du super-bonus de 5 000 euros qui sera versé pour l’achat des premiers cent mille véhicules électriques.
Il faut le savoir, nous avons mobilisé les grands opérateurs, qui se sont regroupés pour acheter 50 000 véhicules électriques et faire ainsi baisser les prix du marché. Toutefois, nous ne pouvons nous engager au-delà de 2012, car notre programme budgétaire est triennal et nous ne pouvons nous prononcer pour nos successeurs.
J’en viens aux infrastructures de recharge. C’est probablement ce qui avait manqué lors de l’élaboration du plan véhicule électrique dans les années quatre-vingt. Nous avons passé un accord avec les Allemands sur la standardisation des prises. Nous pourrons maintenant, à deux pays, œuvrer pour une standardisation européenne.
Nous avons aussi prévu certaines dispositions législatives pour imposer l’obligation d’installer systématiquement des prises dans les immeubles neufs et les locaux neufs d’entreprises, afin que les personnes puissent effectuer des rechargements. Ensuite, des prises seront installées au fur et à mesure sur la voie publique, l’essentiel étant cependant de permettre de recharger le véhicule à son domicile ou sur son lieu de travail.
S’agissant des communes, les premières mesures d’accompagnement seront exposées dès 2010 et des assises nationales seront effectivement organisées à la mi-2010.
Nous avons demandé à Électricité Réseau Distribution France, ERDF, de constituer une filiale dédiée précisément à ces questions d’infrastructures de recharge.
J’ajoute, enfin, que les dispositions que je viens d’évoquer ne prennent pas en considération d’éventuels arbitrages dans le cadre du grand emprunt.
M. le président. La parole est à M. Martial Bourquin, pour la réplique.
M. Martial Bourquin. Madame la secrétaire d'État, tout d’abord, il faut veiller à ne pas passer du tout-pétrole au tout-électrique et à faire en sorte que le spectre des possibilités pour arriver au véhicule décarboné soit préservé. C’est là un point très important, car un lobby électrique très fort est déjà en action aujourd'hui.
Ensuite, la filière automobile vit les mutations de façon inégale. Vous avez parlé du FSI et des aides en faveur des équipementiers. Pour l’instant, nous assistons à une dualité au sein de la filière.
Les grands constructeurs sont en train de répondre au défi de l’innovation, et il faut encore les y encourager.
En revanche, les petites et moyennes entreprises de la filière, les PME artisanales, familiales, ont beaucoup de mal à y répondre et à être présentes dans le grand rendez-vous de la voiture décarbonée. En effet, elles connaissent aujourd'hui de graves difficultés : elles ont perdu environ 30 % de leurs emplois et ont été confrontées à la baisse des commandes. C’est la raison pour laquelle le Gouvernement doit leur apporter une attention beaucoup plus grande.
Je plaide fortement pour que la filière soit préservée. C’est notre gage d’avenir, pour que l’excellence de l’industrie automobile française soit encore au rendez-vous dans les années à venir.
M. le président. La parole est à M. François Fortassin.
M. François Fortassin. Madame la secrétaire d'État, ma question porte sur les pompes à chaleur de nouvelle génération.
Ayant généralement un bon fonctionnement et dotées d’un rendement énergétique extrêmement intéressant, puisqu’elles produisent 4 kilowattheures pour une consommation de 1 kilowattheure, elles offrent une attractivité très grande pour nos concitoyens, qui les installent facilement, d’autant plus qu’elles ne sont soumises à aucune déclaration ni autorisation.
Toutefois, un problème délicat se pose : leur mise en route provoque un pic d’intensité, qui ne dure parfois que quinze à vingt secondes, à l’occasion duquel l’appel de puissance énergétique est quinze à vingt fois supérieur à la normale, en rythme de croisière. Aussi, des quartiers entiers sont plongés dans l’obscurité et privés de chauffage.
Il en résulte une incompréhension de la part de la population, à laquelle les responsables ne vont généralement pas expliquer que l’incident est lié à la mise en route de leur pompe à chaleur. Les maires se trouvent alors en première ligne, de même que les présidents des syndicats départementaux d’électricité.
Madame la secrétaire d'État, que comptez-vous faire non pas pour remédier à l’installation de ces pompes à chaleur, mais pour régler ce problème ?
Par ailleurs, madame la secrétaire d'État, permettez-moi d’exprimer un souhait, sur lequel je vous demande de méditer. Les bâtiments agricoles, notamment ceux qui sont destinés à l’élevage, étant généralement très vastes et dépourvus de caractère architectural particulier, ne serait-il pas judicieux de les équiper, chaque fois que cela est possible, de panneaux photovoltaïques ?
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État. Monsieur le sénateur, l’un des objectifs du Grenelle est d’équiper deux millions de foyers de pompes à chaleur de nouvelle génération à l’horizon 2020.
Nous avons saisi ERDF au sujet du pic de consommation occasionné lors de leur mise en route. À ce stade, il est difficile de savoir si l’on pourra traiter ce problème au moyen de boîtiers intelligents.
En tout état de cause, ces pompes à chaleur sont amenées à connaître un fort développement, puisqu’elles constituent l’un des dispositifs les plus adaptés aux logements construits selon les nouvelles normes « basse consommation ».
Quant au souhait que vous avez émis, je vous indique que le plan de performance énergétique des exploitations agricoles du ministère de l’agriculture et de la pêche prévoit l’utilisation des surfaces des toits des bâtiments agricoles pour développer l’énergie.
M. le président. La parole est à M. François Fortassin, pour la réplique.
M. François Fortassin. Les réponses de Mme la secrétaire d’État me satisfont.
Je ferai néanmoins une dernière remarque concernant le pic d’intensité. Le risque d’être plongé dans le noir est très grand lorsque nos concitoyens mettent en route leur pompe à chaleur entre dix-neuf heures et vingt heures. (Mme Odette Herviaux et M. Martial Bourquin acquiescent.) En revanche, quand ils le font vers quinze heures, tout se passe bien, parce que la consommation d’énergie n’est pas considérable. Cela ajoute à l’incompréhension de la population.
M. le président. La parole est à M. Gérard Bailly.
M. Gérard Bailly. Madame la secrétaire d'État, les débats au Sénat ont montré l’importance de la croissance verte. Mais elle n’est pas sans causer, vous le savez, quelques soucis à certains, même s’il convient de saluer la prise en compte de ces enjeux environnementaux, désormais reconnus comme impératifs.
Je souhaite attirer votre attention sur deux points.
Tout d’abord, la volonté de réduction des émissions de gaz à effet de serre a conduit à l’instauration de la taxe carbone mise en œuvre dans ce projet de loi de finances pour 2010, ainsi qu’à l’étiquetage obligatoire du « coût carbone » des produits et de leur emballage à partir du 1er janvier 2011.
Si l’affichage de la classe énergétique des produits est de nature à modifier positivement le choix des consommateurs, du moins nous l’espérons tous, j’ai tout de même quelques interrogations sur sa mise en œuvre, notamment dans les petites entreprises et chez les artisans.
Les PME auront-elles les moyens humains et financiers pour appliquer le mécanisme de l’indice de carbone de leur production ? N’y a-t-il pas un risque que cela se traduise par une augmentation des coûts pour les consommateurs ou alors, comme on le voit souvent, par une diminution de la marge chez le producteur ?
Un petit producteur de fromage ou de fruits pourra-t-il faire face, sans coût supplémentaire, à ces contraintes ?
N’y a-t-il pas non plus un risque de compétition économique faussée ? Une fois de plus, nous avons en France des exigences très fortes pour nos produits, exigences qui n’existent pas partout, loin s’en faut. Qu’en est-il de nos produits alimentaires face à ceux venant d’autres pays d’Europe ou de pays tiers ? Je pense, par exemple, aux fruits et légumes de l’Ardèche par rapport à ceux de l’Espagne, aux gigots d’agneaux de nos massifs par rapport à ceux de Nouvelle-Zélande.
Les produits alimentaires provenant de ces pays subiront-ils les mêmes contraintes lorsqu’ils parviendront sur nos étals à partir du 1er janvier 2011 ? Quel régime se verront-ils appliquer ?
Ensuite, ma seconde question porte sur la TGAP. Alors que certaines collectivités accomplissent depuis des années des efforts importants en matière de tri, c’est le cas par exemple dans le Jura depuis plus de deux décennies, cette taxe décourage nos concitoyens qui voient augmenter sans cesse le prix de leurs poubelles, alors qu’ils trient de plus en plus.
Je crains que l’ensemble du dispositif qui a été mis en place ne vienne réduire à néant tous les efforts qui sont faits.
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État. S’agissant de l’étiquetage carbone, je vous rappelle, monsieur le sénateur, que le Sénat a adopté un amendement à l’article 85 de la loi Grenelle II, visant à tenir compte de la spécificité des très petites entreprises et de leur difficulté à remplir cet objectif.
Dans le cadre d’une plate-forme commune de l’Association française de normalisation, dite ADEME/AFNOR, nous travaillons à la mise en place d’outils « clés en mains », notamment d’une base de données carbone accessible à tous, permettant d’éviter que l’établissement des prix carbone ne constitue un véritable casse-tête. L’expérimentation faite auprès de différents distributeurs ou grandes marques est a priori concluante.
Les produits d’importation subiront, à l’évidence, les mêmes exigences d’étiquetage carbone. Nous ne sommes pas seuls à nous lancer dans cette opération du prix écologique. C’est le cas, notamment, du Royaume-Uni qui l’applique depuis quelques années, de l’Allemagne et de la Hongrie. Nous travaillons à l’échelon européen pour définir une forme de normalisation du prix écologique. Ce sera une véritable bataille de la normalisation dans ce domaine !
En ce qui concerne la TGAP, le dispositif que nous avons mis en place vise précisément à permettre aux collectivités locales qui se sont fixé volontairement des objectifs efficaces de valorisation de leurs déchets, donc de réduction des flux taxés, de payer moins. La redistribution du fonds ADEME en leur faveur sera fonction du niveau de réduction des déchets et de recyclage fixé dans chaque plan.
M. le président. La parole est à M. Gérard Bailly, pour la réplique.
M. Gérard Bailly. Mme la secrétaire d'État a répondu favorablement à ma première question sur l’étiquetage des produits. Je reste tout de même très interrogatif : je me demande si les produits venant de Chine, ou d’ailleurs, auront bien tous leur bilan carbone au 1er janvier 2011. N’allons pas fâcher davantage encore les producteurs français, qui sont quelque peu déprimés à l’heure actuelle.
La réponse à ma deuxième question n’est que partielle. Je crains que nos concitoyens, qui ont investi lourdement et constatent néanmoins l’augmentation du prix de leurs poubelles, ne se découragent.
M. le président. La parole est à Mme Évelyne Didier.
Mme Évelyne Didier. Ma question s’adresse à Mme la secrétaire d'État et porte sur la politique de gestion des déchets qui aujourd’hui, de mon point de vue, ne s’attache pas assez à réduire le problème à la source par l’écoconception.
On a pu voir ces dernières semaines une campagne de communication de l’ADEME à destination du consommateur, fort bien faite, ma foi, en ces termes : « Réduisons vite nos déchets, ça déborde ! ».
Cette campagne préconise notamment de réduire les emballages en préférant les produits grand format aux portions individualisées.
Or, si vous faites l’expérience – peut-être sommes-nous plusieurs à nous rendre dans les supermarchés ? –, vous noterez que l’offre en matière de produits grand format est aujourd’hui extrêmement limitée, pour ne pas dire inexistante pour la plupart des produits. Bien au contraire, les portions individualisées et entourées de multiples couches d’emballage foisonnent dans les gondoles.
Il est vrai qu’elles permettent une marge plus substantielle, puisque c’est en grande partie du carton et du plastique que l’on vend – le poids intervient dans le prix –, et que les suremballages sont souvent là pour inciter le client à acheter davantage, par exemple trois tablettes de chocolat plutôt qu’une.
Ce que je veux expliquer, c’est qu’il n’est pas possible de se limiter à des injonctions envers le consommateur, visant parfois à le culpabiliser, alors même qu’aucune alternative sérieuse ne lui est proposée et que, au contraire, tout est fait pour lui compliquer la tâche, puisque la réduction des emballages va à l’encontre des intérêts de la grande distribution.
Dans ces conditions, madame la secrétaire d'État, pouvez-vous nous indiquer les mesures fiscales ou autres qui sont envisagées pour développer l’écoconception dans les processus industriels et pour limiter les emballages utilisés par les distributeurs ?
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État. Tout d’abord, le prix carbone des produits, ou prix écologique, est fonction de l’emballage, extrêmement discriminant – les formats individuels ont un prix plus élevé –, et il favorise plutôt les produits français.
Ensuite, nous sommes en train de revoir la convention, signée voilà un peu plus d’un an, avec la Fédération du commerce et de la distribution, pour inciter au développement des emballages familiaux. Cet organisme avait conclu des enquêtes qu’il avait effectuées que les consommateurs n’étaient pas nécessairement attirés par les produits moins suremballés. Il faut donc un accord entre l’ensemble des producteurs pour que cela fonctionne. La nouvelle convention devrait sans doute être signée au mois de janvier prochain.
Par ailleurs, la réflexion sur les dispositifs comme le bonus-malus est en cours. Ce n’est pas simple : le bonus-malus ne doit pas se traduire par un bonus pour un public aisé et un malus pour un public plus défavorisé. Ce problème ralentit beaucoup notre réflexion.
M. le président. La parole est à Mme Évelyne Didier, pour la réplique.
Mme Évelyne Didier. Ces explications sont très intéressantes. Sur l’emballage, vous avez été très claire, madame la secrétaire d’État. Toutefois, le prix carbone sera-t-il suffisamment incitatif pour que l’on travaille davantage sur la conception et sur la fin du produit au moment de sa conception ? C’est tout l’enjeu du travail qu’il nous reste encore à faire.
M. le président. La parole est à M. Marcel Deneux.
M. Marcel Deneux. Madame la secrétaire d’État, dans le cadre du Grenelle de l’environnement et des engagements de la France en termes de réduction de gaz à effet de serre, le secteur du transport automobile constitue un point de vigilance particulier, car il concerne directement la plupart de nos concitoyens dans leur vie de tous les jours.
Les fluctuations des cours du pétrole ont amené des constructeurs automobiles – surtout étrangers, dans le passé – à développer des modèles hybrides. Il y a plusieurs années déjà, des mesures financières destinées à soutenir l’innovation ont permis à des constructeurs automobiles français de réaliser des investissements importants pour développer des véhicules propres.
On le sait, les constructeurs automobiles français ont la capacité de construire aujourd’hui des véhicules électriques. Ils l’ont déjà démontré, je pense notamment à la flotte de 500 véhicules électriques utilisés par La Poste depuis plusieurs années.
Mais leur commercialisation au grand public n’a jamais fait l’objet d’une attention particulière de la part de l’État. Il s’agissait là sans doute d’un choix politique mal affirmé.
On semble découvrir seulement aujourd’hui que ce type de modèle commercialisé au grand public permettrait de répondre aux exigences environnementales que la France s’est fixées, en vue de préparer l’après-pétrole. Vous venez de le rappeler, madame la secrétaire d’État, on estime aujourd’hui, au mieux, à 5 %, voire à 10 % dans le haut de la fourchette, la part des voitures électriques qui rouleront en France en 2020.
Le président de La Poste, M. Jean-Paul Bailly, a par ailleurs reçu une lettre de mission pour faciliter l’achat par les administrations et les services publics de 50 000 véhicules électriques. Un appel d’offre sera très probablement lancé au début de l’année prochaine. Cela peut s’avérer déterminant.
Aujourd’hui, tous les grands constructeurs présents sur le territoire français, seuls ou en association avec d’autres, commencent à développer des prototypes de voitures électriques.
Tout le monde est heureux, c’est très bien : il faut le faire. Toutefois, depuis bientôt deux ans, une politique active de bonus-malus et de subventions bien relayée par les constructeurs a montré que l’on peut faire baisser le niveau moyen de CO2 des véhicules vendus en France. C’est très bien, il faut continuer.
Mais tout cela ne sera pas suffisant. Malgré nos efforts, la très grande majorité du parc automobile français continuera à fonctionner aux énergies fossiles pendant longtemps encore. On ne le dit pas assez.
Pour gagner la bataille des véhicules propres, il est nécessaire de s’occuper de l’ensemble du parc automobile et pas seulement des véhicules qui sont à la pointe de l’innovation.
Madame la secrétaire d’État, pour que nos engagements environnementaux soient tenus et pour anticiper la raréfaction du pétrole, comment le Gouvernement entend-il favoriser le développement, dans les années à venir, des véhicules propres pour tous et de davantage de véhicules hybrides ?
Comment les objectifs d’incorporation en matière de biocarburants seront-ils atteints pour parvenir, comme nous nous y sommes engagés, aux 95 grammes de CO2 au kilomètre ?
Nous avons pris des engagements, il faudrait essayer de les tenir.
Enfin, comment faire en sorte que les mesures préconisées permettent de lutter réellement contre l’ensemble des gaz à effet de serre, et pas seulement contre le CO2 ?
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État. Vous avez raison, monsieur le sénateur, dans les programmes actuels, on ne cherche plus à développer spécifiquement une filière, comme cela a été fait dans toutes nos politiques précédentes, on vise un objectif en termes d’émissions de gaz à effet de serre.
Pour atteindre cet objectif, plusieurs moyens sont à notre disposition.
D’abord, il faut améliorer les moteurs thermiques existants, avec des moteurs à un litre, qui arriveront très prochainement sur le marché, des moteurs hybrides et des moteurs électriques. Il existe tout un éventail de possibilités. C’est la raison pour laquelle notre politique se fonde sur la recherche dans le cadre du fonds démonstrateur, qui vise tous types de véhicules, pas seulement les véhicules électriques.
Ensuite, il convient de mettre en place un bonus-malus établi en fonction du nombre de grammes de CO2, et non d’une technologie. Ce type de dispositif va être maintenu, quitte à le durcir.
En outre, il faut renouveler le parc automobile existant, puisque ce sont les vieux véhicules qui polluent le plus – c’était le principe de la prime à la casse liée au bonus-malus.
Enfin, il faut appliquer les normes européennes, l’Europe ayant fixé un niveau maximal d’émissions de gaz à effet de serre à respecter.
Notre politique vise maintenant non pas une technologie quelle qu’elle soit, mais un niveau d’émissions de gaz à effet de serre et un niveau de pollution.
M. le président. La parole est à M. Marcel Deneux, pour la réplique.
M. Marcel Deneux. Je remercie Mme la secrétaire d’État de ses propos. Je souhaitais mettre en valeur devant la Haute Assemblée ces efforts dont j’avais un peu connaissance. (M. Daniel Raoul sourit.)
M. le président. La parole est à M. Daniel Raoul.
M. Daniel Raoul. On parlait depuis plus d’un an de la fusion de l’AFSSA, l’Agence française de la sécurité sanitaire des aliments, et de l’AFSSET, l’Agence française de la sécurité sanitaire de l’environnement et du travail. C’est dans le cadre de la loi « Hôpital, patients, santé, et territoires » que la décision a été prise officiellement.
Madame la secrétaire d’État, pouvez-vous nous donner plus de détails sur cette grande réorganisation interne qui, vous n’êtes pas sans le savoir, provoque de grandes inquiétudes ?
Cette nouvelle agence, qui serait dénommée A2S, agence de sécurité sanitaire des aliments, de l’environnement et du travail, verrait le jour le 1er juillet 2010.
Les inquiétudes que je voudrais soulever ici sont de deux natures. Il s’agit, d’une part, d’inquiétudes internes, ce qui est tout à fait classique à l’occasion de toute réorganisation et tout à fait légitime dans le cadre de la RGPP, la révision générale des politiques publiques, laquelle aura, on l’imagine, quelques conséquences sur le plan des moyens humains. Il s’agit, d’autre part, d’inquiétudes relevant du domaine socio-économique et des partenaires sociaux, comme les syndicats et les associations environnementales, notamment l’association France nature environnement et les associations de victimes de l’amiante ou d’accidentés du travail.
Ces associations s’interrogent sur l’indépendance de la nouvelle agence, qui pourrait s’avérer très faible. Avec cinq ministères de tutelle, vous imaginez le nombre de représentants de l’État au conseil d’administration !
On s’interroge également sur les moyens budgétaires affectés à cette nouvelle agence. S’agira-t-il simplement de la somme des deux budgets de l’AFSSA et de l’AFSSET ?
L’AFSSET, qui vous est sans doute chère, madame la secrétaire d’État, constitue un apport très important dans l’expertise des champs électromagnétiques.
Comment sera-t-elle confortée dans ses missions, qui sont de plus en plus vastes et concernent en particulier les problèmes de sécurité au travail ?
Madame la secrétaire d’État, pouvez-vous nous rassurer sur ces deux sujets d’inquiétudes internes et externes ?
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État. Ce projet a été discuté à de multiples reprises. M. Marc Mortureux, le directeur général de l’AFSSA, l’a d’ailleurs préfiguré.
Le principe est simple. Il ne s’agit absolument pas de fusionner les missions : chaque agence conservera ses propres missions. Nous tenons à une totale visibilité du pôle et de la mission « environnement », qui est une mission très spécifique avec des modalités d’expertise contradictoires.
Concernant la gouvernance, les deux conseils d’administration seront agrégés afin de conserver également la représentativité de chaque agence.
Quant à l’indépendance de la nouvelle agence, nous avons demandé à M. Thierry Thuot, conseiller d’État, de préparer le projet d’ordonnance pour cette fusion entre les deux agences et de veiller à la totale visibilité des moyens, des missions et, donc, du fonctionnement et de l’indépendance, qui est extrêmement importante, de cette agence.
En effet, les agences et les autorités sanitaires fondent leur indépendance sur leur organisation et sur leur expertise pluraliste et contradictoire.
J’espère que ces précisions vous rassurent, monsieur Raoul.
M. le président. La parole est à M. Daniel Raoul, pour la réplique.
M. Daniel Raoul. J’ai bien entendu les engagements de Mme la secrétaire d’État : conserver les spécificités des missions. J’attends de voir ce qu’il en sera sur le terrain, puisque, vous le savez, je prête beaucoup d’intérêt à l’AFSSET.
Reste néanmoins le problème de l’indépendance de ces agences et des autorités que nous créons quasiment à l’occasion de l’examen de chaque texte. Quelle est leur réelle indépendance ?
L’AFSSET a une expertise que je voudrais voir élargir aux aspects socio-économiques, madame la secrétaire d’État. Ce qu’on appelle le « Grenelle des ondes » ne posait pas uniquement le problème scientifique et technique, il abordait également le problème science et société d’une façon plus large, c’est-à-dire les aspects socio-économiques que j’aimerais voir confortés dans l’ex-AFSSET, puisque vous maintenez les deux missions.
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Hommage à une personnalité étrangère
M. le président. Mes chers collègues, notre éminent collègue M. Michel Bécot reçoit en ce moment, en notre nom, M. l’ambassadeur du Pakistan, qui se trouve dans la tribune officielle.
Nous saluons M. l’ambassadeur avec beaucoup de considération. (Mme et M. les secrétaires d’État ainsi que Mmes et MM. les sénateurs se lèvent et applaudissent.)
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Loi de finances pour 2010
Suite de la discussion d'un projet de loi
M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi de finances pour 2010, adopté par l’Assemblée nationale.
Écologie, développement et aménagement durables
Budget annexe : Contrôle et exploitation aériens
Compte spécial : Contrôle et sanction automatisés des infractions au code de la route
Compte spécial : Avances au fonds d’aide à l’acquisition des véhicules propres
(suite)
questions-réponses-répliques (suite)
M. le président. Nous poursuivons les questions-réponses-répliques.
La parole est à Mme Anne-Marie Escoffier.
Mme Anne-Marie Escoffier. Madame la secrétaire d’État, ma question porte sur les antennes relais.
L’État, après les nombreuses mises en garde des spécialistes sur l’absence de précaution contre les rayonnements, les ondes électromagnétiques, magnétiques et, plus généralement, contre les champs magnétiques auxquels nous sommes exposés, s’est engagé, dans la loi portant engagement national pour l’environnement, à mettre en place un dispositif de surveillance et de mesure des ondes électromagnétiques menées par des organismes indépendants.
Financés par un fonds indépendant alimenté par la contribution des opérateurs, il incombera alors à l’Agence française de sécurité sanitaire de l’environnement et du travail, l’AFSSET, et à l’Agence nationale des fréquences, l’ANFR, de publier les résultats des mesures.
Au-delà, une synthèse des études scientifiques relative aux effets des champs électromagnétiques devrait être présentée par le Gouvernement au Parlement avant la fin de l’année 2009, c’est-à-dire dans quelques semaines.
Cet engagement du Gouvernement à apprécier les effets et les conséquences éventuelles de la prolifération des antennes relais sur la santé des Français s’inscrit en outre dans l’objectif du deuxième plan national santé-environnement portant sur la connaissance, l’anticipation, la prévention et la réduction des risques sanitaires liés à l’environnement, qui devrait être élaboré de manière concertée au plus tard à la fin de cette année.
Pourtant, madame la secrétaire d’État, il apparaît dans le budget présenté aujourd’hui que la part de financement et les modalités de recouvrement des montants nécessaires à mettre en œuvre ce plan national et le dispositif de surveillance sont modiques.
Est-ce à croire qu’il nous faut relativiser les effets des technologies nouvelles ?
L’engagement et la détermination du Gouvernement à faire adopter rapidement la loi Grenelle valaient, à mon sens, engagement à pourvoir en moyens financiers, matériels, humains et techniques l’ensemble des partenaires pour la mise en œuvre d’une véritable politique de santé-environnement.
C’est pourquoi, madame la secrétaire d’État, je souhaite que vous précisiez, si ce n’est le montant chiffré du financement, tout du moins la part de budget que vous consacrerez au plan national santé-environnement, les modalités de recouvrement des fonds nécessaires à la création et au fonctionnement du dispositif d’évaluation et de surveillance des effets des ondes électromagnétiques.
Subsidiairement, dans quelle mesure le Gouvernement pense-t-il pouvoir respecter le terme de l’année 2009 pour présenter la synthèse et engager le plan national santé-environnement ? (Applaudissements sur certaines travées du RDSE ainsi que sur plusieurs travées du groupe socialiste.)
M. Yvon Collin. Très bien !
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État chargée de l'écologie. Vous posez deux questions, madame Escoffier : la question des antennes relais et celle du deuxième plan national santé-environnement, le PNSE 2.
S’agissant des antennes relais, nous avons présenté les conclusions de l’étude de l’AFSSET, qui montrent grosso modo l’absence de problème sanitaire identifié. En revanche des doutes importants persistent puisque 11 % des études pour la question du téléphone montrent l’existence d’un impact, notamment pour les enfants, d’où l’application du principe de précaution.
Concernant cette question antenne-ondes, nous tiendrons les objectifs qui sont fixés d’ici à la fin de l’année, soit décembre.
À l’issue de la table ronde sur les antennes et les ondes, nous avons pris l’engagement d’expérimenter la réduction des ondes dans certaines villes – sur les 280 villes postulantes, nous allons en choisir au plus une trentaine. Nous avons également pris l’engagement d’expérimenter de nouvelles modalités de concertation. Notre ministère y consacrera une enveloppe de 1 million d’euros. Je le précise, nous ne sommes pas les principaux financeurs de ce type de dispositif auquel participent également le ministère de la santé et le secrétariat à l’État à l’économie numérique.
Le plan national santé-environnement 2 représente environ 480 millions d’euros, dont 110 millions d’euros sont consacrés au volet « recherche » et une toute petite partie aux sujets que vous avez évoqués.
M. le président. La parole est à Mme Anne-Marie Escoffier, pour la réplique.
Mme Anne-Marie Escoffier. Je vous remercie, madame la secrétaire d’État, de ces indications, qui répondent à mon questionnement.
M. le président. La parole est à M. Michel Doublet.
M. Michel Doublet. Monsieur le président, madame le secrétaire d’État, mes chers collègues, ma question portera sur les crédits des agences de l’eau à destination des collectivités rurales.
En effet, les schémas directeurs d’aménagement et de gestion des eaux, ou SDAGE, qui définissent les orientations des politiques des agences sur la période 2010-2015, mettent l’accent sur l’objectif qui consiste à atteindre le bon état écologique des masses d’eau à l’horizon 2015 afin de respecter les objectifs de la directive-cadre sur l’eau.
La révision des neuvièmes programmes à mi-parcours permet d’infléchir les politiques antérieures et de dégager de nouvelles ressources financières par des hausses de redevance ou des réductions de primes : c’est le cas, notamment, dans les bassins Adour-Garonne et Loire-Bretagne.
La lecture des projets de SDAGE sur ces deux bassins a mis en évidence une mobilisation très substantielle des crédits vers la reconquête des cours d’eau, la protection des habitats et la lutte contre les pollutions diffuses d’origine agricole.
Force est de constater que, passé le cap du respect de la directive eaux résiduaires urbaines, ERU, la dépollution domestique devient secondaire - 7 % de l’enveloppe du bassin versant de la Charente – aussi bien pour les opérations d’assainissement collectif que pour les opérations d’assainissement non collectif.
Nonobstant, la quasi-intégralité des communes de Charente-Maritime a réalisé des études de zonage qui permettent, parallèlement à l’élaboration ou à la révision des plans locaux d’urbanisme, PLU, de délimiter les secteurs relevant soit de l’assainissement collectif, soit de l’assainissement individuel.
Même s’il convient évidemment de privilégier l’assainissement individuel dans les zones rurales, de nombreux villages où l’habitat est relativement dense ne peuvent relever que de l’assainissement collectif.
La concrétisation de ces zonages par la réalisation des équipements adéquats – réseaux de collecte et stations d’épuration – se heurte depuis deux ans à l’insuffisance des crédits disponibles, notamment au titre du programme de solidarité urbain rural, PSUR.
Aujourd’hui, le syndicat des eaux de Charente-Maritime, que je préside et qui regroupe 415 communes pour la compétence « assainissement », a plus de 120 millions d’euros de travaux d’assainissement collectif en attente, sans compter les investissements autofinancés liés à la gestion patrimoniale du parc existant.
Parallèlement, nous estimons que les contrôles en cours des 80 000 dispositifs d’assainissement autonome existants généreront des besoins de réhabilitation par leurs propriétaires pour une somme de l’ordre de 200 à 300 millions d’euros d’ici à 2017.
Les enveloppes du PSUR sont donc très loin de répondre à ses besoins. Les collectivités locales et les conseils généraux, qui les soutiennent dans un contexte budgétaire délicat, ne pourront assumer seuls la charge de ces investissements. Les conséquences économiques sont très lourdes pour ces collectivités, mais aussi pour l’ensemble des entreprises de travaux publics spécialisées dans la pose de canalisations. Depuis le début de l’année 2008, beaucoup d’emplois intérimaires n’ont pas été renouvelés et des plans de licenciement sont en cours.
M. le ministre chargé de la mise en œuvre du plan de relance avait fait état, dans un courrier adressé en février 2009, d’un prêt bonifié de 1,5 milliard d’euros pour les agences de l’eau sur la période 2009-2012. On peut s’interroger sur la capacité réelle des agences à mobiliser ces fonds, qu’il faudra, de toute façon, rembourser par des hausses de redevance.
Même si on peut facilement comprendre les contraintes imposées par la directive-cadre sur l’eau, on peut être circonspect quant à la brutalité du changement de politique des agences envers le soutien aux équipements des territoires ruraux.
Il serait utile de dégager des capacités de financement qui permettraient de répondre aux exigences de la directive.
En conséquence, madame la secrétaire d’État, quelles mesures comptez-vous mettre en œuvre pour répondre à ces exigences ?
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État. Monsieur le sénateur, après cinq années de discussions, les SDAGE sont quasiment tous bouclés. En tout cas, ils sont tous signés en métropole. Deux attendent une signature en outre-mer. Ces nouveaux SDAGE traduisent les engagements de la directive-cadre sur l’eau d’atteindre aux deux tiers le bon état écologique des eaux en 2015.
L’évaluation des besoins de financement pour la mise en œuvre des SDAGE est d’environ 26 milliards d’euros sur la période 2010-2015. Vous évoquez la problématique spécifique des petites communes rurales et de l’application de la loi sur l’eau et les milieux aquatiques, la LEMA, qui prévoyait, en effet, la mise en place d’un dispositif de solidarité urbain-rural.
Ce dispositif a été inscrit comme l’une des priorités des neuvièmes programmes d’intervention des agences de l’eau. Il permet aux communes rurales de bénéficier – il faut vérifier que cela soit bien appliqué –, au titre de cette solidarité, d’aides spécifiques qui viennent en sus des programmes d’intervention classiques des agences de l’eau. L’enveloppe réservée dans ce cadre est de 1 milliard d’euros.
J’espère avoir répondu à vos interrogations.
M. le président. La parole est à M. Michel Doublet, pour la réplique.
M. Michel Doublet. Je vous ai bien écoutée, madame le secrétaire d’État. Néanmoins, dans notre région, les agences de l’eau n’aident plus les communes de moins de 2 000 habitants en assainissement.
M. Gérard César. Exact !
M. Joël Billard. C’est vrai !
M. Michel Doublet. Il est évident que l’aide se limite, par exemple, aux stations d’épuration qui ne sont pas aux normes. Et les bons élèves de la classe – comme la Charente-Maritime ! – passent à côté des financements.
Actuellement, le blocage est complet. On ne fait plus d’assainissement collectif dans les communes de moins de 2 000 habitants. C’est très inquiétant car ces communes sont souvent dans des zones fragiles, à proximité de zones humides. Faute de financement, les eaux usées sont directement rejetées dans le milieu, ce qui n’est pas une bonne solution écologique.
M. le président. La parole est à Mme Mireille Schurch.
Mme Mireille Schurch. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, je souhaiterais reparler ici de l’avenir du fret ferroviaire.
Alors que la révolution verte est engagée à grands coups d’annonces dans les médias, que ce soit au travers du plan de relance ou encore dans le cadre du plan « fret d’avenir », nous ne sommes pas encore convaincus, monsieur le secrétaire d'État, en ce qui concerne le devenir de cette activité d’intérêt général.
En effet, alors que la loi Grenelle I, qui définit des objectifs ambitieux en termes de rééquilibrage modal, aurait dû être l’occasion de déclarer, comme nous l’avions proposé, l’activité de wagon isolé d’intérêt général, le Gouvernement l’a refusé.
Dans la continuité, cette loi de finances confirme malheureusement la faiblesse des crédits octroyés au soutien du transport combiné.
Nous restons très loin des 90 millions d’euros consacrés entre 1999 et 2002 aux transports combinés. Alors que, nous le savons, le secteur des transports routiers est l’un des plus émissifs en termes de gaz à effet de serre, le compte n’y est pas pour rééquilibrer le rail par rapport à la route.
Lors du sommet de Copenhague, vous allez appeler de vos vœux, monsieur le secrétaire d'État, une réduction des émissions polluantes mais, parallèlement, nous attendons des politiques volontaristes et courageuses, à l’échelon national comme européen, pour en finir avec l’avantage concurrentiel de la route sur le rail.
À ce titre, il est stupéfiant de voir que l’instauration de la contribution carbone va, une nouvelle fois, aboutir à renforcer cet avantage concurrentiel, puisque le secteur routier va se voir rembourser en majeure partie cette taxe par une augmentation du remboursement sur la TIPP.
Dans le même temps, le nouveau plan « fret d’avenir », va aboutir, de fait, à jeter un à deux millions de camions supplémentaires sur les routes en justifiant une rétraction du réseau jugé non rentable et l’abandon de l’activité de wagon isolé. Pourtant, force est de constater que cette activité, le wagon isolé, représente actuellement 42 % du volume du fret ferroviaire et recèle un important potentiel de développement.
Aussi, nous demandons très solennellement un moratoire sur l’abandon par la SNCF des trafics diffus.
Concernant ce débat, ma question sera simple, mais d’actualité : comment comptez-vous prendre réellement en compte l’impératif écologique et économique lié au rééquilibrage modal et qui passe par le soutien au wagon isolé ? Il y va – vous le comprenez, monsieur le secrétaire d’État – de l’avenir et du développement économique des territoires les plus fragiles et les plus éloignés.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État chargé des transports. Madame le sénateur, l’une des particularités du ferroviaire est d’être extrêmement rentable et efficace sur un plan écologique quand il s’agit de transports de masse. Il n’en va pas véritablement de même pour les transports dont vous parlez.
C’est la raison pour laquelle le plan que nous prévoyons est fondé sur le développement du transport de masse, à l’instar de tous les grands pays européens qui ont redonné au fret ferroviaire une pertinence et lui ont permis de progresser sur le marché.
Ainsi, la construction de quatre lignes nouvelles de TGV va débloquer, sur les lignes classiques, des sillons qui se prêteront à un développement intelligent des TER et du transport de fret.
Quand nous concevons le contournement ferroviaire de l’agglomération lyonnaise ou celui de Nîmes et Montpellier, nous pensons avant tout au fret.
Après avoir renforcé considérablement l’autoroute ferroviaire entre la région lyonnaise et l’Italie, nous allons créer, dès l’année prochaine, une autoroute ferroviaire entre le nord de la France et l’Espagne.
Les opérateurs ferroviaires de proximité sont précisément une réponse aux besoins de trafics diffus, auxquels les opérateurs historiques ne peuvent plus faire face, et qu’ils dirigent vers les grands opérateurs comme la SNCF ou ses concurrents.
Je vais mettre en place un opérateur de fret cette semaine à La Rochelle puis dans quelques jours au Havre. D’autres se créent à travers la France, notamment en Auvergne et dans la région Centre.
Nous faisons donc le pari du transport de fret ferroviaire, un transport de fret ferroviaire non pas « à l’ancienne », mais adapté au continent européen, puisque l’Europe avec un espace de vingt-sept pays redonne une pertinence au transport ferroviaire.
Lors de mon déplacement à Moscou à l’occasion du 200e anniversaire du ministère des transports russe, une semaine avant la catastrophe de dimanche dernier, j’ai travaillé sur un projet de transport de fret entre l’Europe et l’Asie. Par rapport au trafic maritime, il ferait gagner quinze jours pour certaines marchandises qui en valent la peine.
C’est dire que nous sommes mobilisés pour le transport de fret ferroviaire ! Nous le faisons évoluer pour l’adapter aux nouvelles dimensions de l’Union, comme aux besoins économiques et industriels de notre pays.
M. le président. La parole est à Mme Mireille Schurch, pour la réplique
Mme Mireille Schurch. Monsieur le secrétaire d’État, je crois savoir que vous allez bientôt venir dans l’Allier. Vous devrez d’abord prendre un train Corail, puis un TER. Ce dernier ne circulant pas à plus de 100 kilomètres par heure, vous aurez le loisir d’observer l’itinéraire tortueux emprunté sur les routes de petite montagne par les camions transportant les billes de bois produites dans la Creuse. Si on mettait le paquet sur le wagon isolé, on pourrait les reporter vers le rail ! Mais la ligne Montluçon-Ussel est malheureusement suspendue. Je soutiens le conseil général du Limousin dans ses efforts pour obtenir la réouverture de cette ligne, mais je crains qu’ils ne soient vains ! Vous constaterez également que la laine de roche a cessé d’être transportée par rail au départ de Saint-Éloy-les-Mines pour être acheminée dans toute la France.
J’ai du mal à vous comprendre. Des autoroutes ferroviaires, certes, mais comment les territoires vont-ils être irrigués autrement que par les camions si nous ne mettons pas l’accent sur le transport ferroviaire ? L’enjeu est important sur le plan de l’écologie puisque cela permettrait d’éviter la circulation de 1 à 2 millions de camions.
M. le président. La parole est à M. Michel Teston.
M. Michel Teston. Le Gouvernement a pris, le 16 septembre 2009, un engagement national pour le fret ferroviaire et présenté un plan d’actions et d’investissements de 7 milliards d’euros.
Ce plan est articulé autour de huit priorités : premièrement, créer un véritable réseau d’autoroutes ferroviaires cadencées ; deuxièmement, doubler le transport combiné de marchandises ; troisièmement, créer des opérateurs ferroviaires de proximité ; quatrièmement, développer le fret à grande vitesse entre les aéroports ; cinquièmement, créer un réseau orienté fret ; sixièmement, supprimer les goulets d’étranglement ; septièmement, favoriser la desserte ferroviaire des ports ; huitièmement, améliorer le service offert aux transporteurs.
Or la ventilation des crédits annoncés n’intègre pas la sécurisation des lignes classiques retenues pour compléter le réseau orienté fret.
Rien n’est prévu non plus pour la protection phonique des habitations en bordure de ces lignes, et tel est notamment le cas de la ligne de la rive droite du Rhône.
Monsieur le secrétaire d'État, n’ayant pas reçu à ce jour de réponses claires à plusieurs questions que je vous ai posées à ce sujet, je vous demande de recevoir une délégation du collectif qui s’est constitué le 23 novembre dernier et qui regroupe tous les élus concernés par la ligne de la rive droite du Rhône.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. Monsieur Teston, naturellement, je recevrai ce collectif puisque vous me demandez de le faire et que Michel Mercier, président du conseil général du département voisin, m’en a également fait la demande.
Il est vrai que nous allons devoir relever le défi du bruit des trains de fret – problème qui se pose d’ailleurs déjà en Allemagne, sur la rive droite du Rhin, du fait du trop grand trafic ferroviaire de fret au milieu des populations – sur les nouvelles lignes de contournement comme sur les autoroutes ferroviaires qui utiliseront des lignes classiques passant au cœur des villes.
À cette fin, nous disposons de deux moyens.
Premièrement, comme je l’ai annoncé lorsque nous avons choisi le tracé du contournement ferroviaire de l’agglomération lyonnaise, il faut en effet prendre des mesures environnementales.
Deuxièmement, et c’est ce qui est fait dans le cadre du PREDIT, le programme de recherche et d’innovation dans les transports terrestres, que préside votre collègue député Jean-Louis Léonard, nous devons étudier les nouvelles technologies de nature à limiter le bruit causé, par exemple, par le freinage des wagons ou par l’entrechoquement des attelages.
En effet, autant les matériels ferroviaires de type TGV ou TER ont connu des progrès considérables depuis trente ans, autant, en matière de fret ferroviaire – et cela dans tous les pays du monde, d’ailleurs –, le matériel a été peu modernisé, en tout cas sur le plan du bruit. Un important effort doit donc être accompli à cet égard.
Dorénavant, les commandes de wagons que feront les opérateurs ferroviaires devront porter sur du matériel adapté. Sinon, nous aurons le même problème avec les trains de fret qu’avec les camions : celui du bruit et donc du rejet par les populations de ce mode de transport, ce qui serait contraire aux objectifs du Grenelle de l’environnement.
C’est donc naturellement, monsieur Teston, que je recevrai en votre compagnie les personnes que vous souhaitez me faire rencontrer.
M. le président. La parole est à M. Michel Teston, pour la réplique.
M. Michel Teston. Je remercie M. le secrétaire d'État d’avoir accepté de recevoir une délégation du collectif regroupant tous les élus concernés par la ligne de la rive droite du Rhône ; en tant que coordinateur de ce collectif, je ne manquerai pas de prendre contact avec son cabinet pour arrêter la date du rendez-vous. (Sourires.)
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. Vous pouvez le faire dès aujourd'hui ! (Nouveaux sourires.)
M. le président. La parole est à M. Dominique de Legge.
M. Dominique de Legge. Madame la secrétaire d’État, monsieur le secrétaire d'État, je souhaite attirer votre attention sur le problème particulier de l’approvisionnement d’énergie, qui se pose toujours dans certaines régions comme la Bretagne.
Ainsi, le 6 janvier 2009, entre dix-sept et vingt heures, la Bretagne a bien failli être plongée dans le noir, situation qui, malheureusement, n’a rien d’exceptionnel puisque nous y avions déjà été confrontés en 2007.
Si nous avons miraculeusement réussi à passer le cap, ce fameux 6 janvier, c’est grâce au dispositif d’alerte Ouest ÉcoWatt, qui permet à des abonnés de réduire instantanément leur consommation électrique. Vous conviendrez avec moi qu’il n’est pas envisageable que ce dispositif, au demeurant tout à fait remarquable en termes de responsabilisation des citoyens et conforme à notre souci partagé d’une prise de conscience collective initiée par le Grenelle de l’environnement, puisse à lui seul tenir lieu de solution pérenne pour la Bretagne et, a fortiori, pour la France, qui ne semble plus en mesure de faire face, à l’échelle nationale, à sa demande d’électricité.
La situation bretonne se résume ainsi : notre région produit moins de 5 % de ses besoins, alors que sa démographie est en pleine croissance ; la part de l’électricité dans sa consommation énergétique est de 23 %, contre 20 % en moyenne sur le plan national ; l’habitat breton, composé de nombreuses maisons individuelles, consomme 36 % de l’énergie utilisée, dont un tiers d’électricité.
Ces chiffres sont éloquents et c’est pourquoi le projet de création d’une centrale thermique avait été lancé à Ploufragan. Avancé puis repoussé, il n’a toujours pas vu le jour, alors qu’aucune solution alternative raisonnable et crédible n’existe.
Je n’ignore pas les oppositions locales suscitées par ce projet. Celles-ci sont fondées sur des arguments plus ou moins sérieux que l’on doit sans doute examiner, mais il y a un moment où l’intérêt général doit primer sur les intérêts particuliers. J’avoue avoir du mal à comprendre la position de certains qui déplorent la situation actuelle, mais refusent tout à la fois la construction d’une unité de production et celle de lignes d’approvisionnement.
Certes, les collectivités bretonnes investissent beaucoup pour développer les énergies renouvelables, mais le parc éolien actuel s’avère incapable de faire face aux périodes de pointe et de répondre à l’ensemble des besoins.
Pour faire face à cette situation, une réunion s’est tenue au cabinet du ministre d’État au printemps dernier. Des arbitrages devaient être rendus en juin. Aussi, je souhaiterais connaître la position du Gouvernement, tout en sachant que si les travaux opérationnels débutaient demain, dans le meilleur des cas, l’unité de production ne pourrait entrer en service qu’en 2012.
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État. Monsieur le sénateur, c’est à juste raison que vous donnez l’alerte sur la situation spécifique de la Bretagne, qui ne produit que 7 % de l’énergie qu’elle consomme et qui de plus a un réseau de transport d’électricité dit « en antennes », donc plus fragile.
Cette question avait déjà été traitée par RTE, le gestionnaire du réseau de transport d’électricité, qui avait lancé un appel d’offres en 2006 pour demander la disponibilité dès 2010 d’une centrale de production d’électricité pour assurer l’équilibre offre-demande.
L’appel d’offres a été remporté ; le projet a pris du retard, mais l’engagement a été clairement pris de réussir à mettre en marche cette centrale en 2012. Il est en effet certain, monsieur le sénateur, que nous n’y parviendrons pas avant.
J’ajoute que, dans le cadre des discussions sur la programmation pluriannuelle des investissements, ou PPI, un atelier spécifique à la Bretagne avait été constitué et le rapport sur la PPI remis en 2009 a bien souligné le caractère assez alarmant de la situation en Bretagne.
Vous pouvez donc compter, monsieur le sénateur, sur l’engagement total du Gouvernement, d’une part, de pérenniser le parc existant, d’autre part, de mettre en service un moyen de production dans le Nord-Bretagne. C’est en effet la seule solution qui permettra de faire face au problème dans les délais impartis. En attendant, nous devons tous agir sur la maîtrise de la demande d’électricité, car c’est pour l’heure notre seul levier d’action.
M. le président. La parole est à M. Dominique de Legge, pour la réplique.
M. Dominique de Legge. Madame la secrétaire d'État, je vous remercie de votre réponse ; je prends acte avec satisfaction du fait que le dossier est en de bonnes mains au ministère et je compte sur le rendez-vous de 2012.
M. le président. La parole est à Mme Odette Herviaux.
Mme Odette Herviaux. Depuis celle du Prestige en 2002 et celle de L’Erika en 1999, nous n’avons fort heureusement pas connu de grandes catastrophes maritimes, mais les épisodes de pollution des eaux et des plages sont récurrents. Nous venons encore d’en avoir un exemple puisque, depuis vendredi dernier, se sont déversées sur les plages de Vendée et de Loire-Atlantique une grande quantité de galettes de fioul dont l’origine est encore mystérieuse.
Notre pays possède l’un des plus grands domaines maritimes du monde ; ces espaces particulièrement fragiles appellent des engagements forts de la part de l’État en matière de protection, de prévention, de contrôle et de sanction.
C’est dans un cadre régulé que les collectivités territoriales ont voulu, notamment avec le procès Erika, faire progresser la sécurité du transport maritime, en amont d’un cadre juridique clair et stabilisé pour la reconnaissance du préjudice écologique consécutif à une pollution maritime, mais aussi pour les pollutions par substances dangereuses et nocives, pour les problèmes des indemnisations et de la réparation des dommages et, surtout, pour l’implication des professionnels dans la lutte.
Madame la secrétaire d’État, monsieur le secrétaire d'État, souligner l’importance de la sécurité maritime, ce n’est pas se résoudre à des réductions d’effectif, notamment dans les CROSS, les centres régionaux opérationnels de surveillance et de sauvetage. Pourtant, certains indicateurs laissent présager des difficultés à venir dans ce secteur.
Ainsi, les autorisations d’engagement comme les crédits de paiement de l’action 01 « Sécurité et sûreté maritime » du programme 205 « Sécurité et affaires maritimes » subissent une diminution de plus de 9 % par rapport à 2009.
Par ailleurs, même si l’importance accordée dans le budget à « la rénovation des outils radar des CROSS et à la modernisation de leurs systèmes d’information » s’inscrit en conformité avec l’engagement du Grenelle de la mer, qui vise à « accélérer le déploiement des systèmes de surveillance dans les CROSS en poursuivant leur plan de modernisation », nous n’avons que très peu de précision, voire aucune, s’agissant des personnels.
Dans le même temps, la dotation pour les centres de sécurité des navires reste stable, alors qu’il est clairement indiqué que « des missions nouvelles de sûreté maritime leur ont été confiées ». Cela nous fait craindre une simple rationalisation comptable de la gestion des ressources humaines.
On sait à quel point la sécurité en général, et sur la mer en particulier, dépend de l’attention, de la compétence et de disponibilité des hommes. Sacrifier l’intelligence humaine sur l’autel du seul contrôle technologique constituerait une faute majeure.
L’actualité exige donc encore une fois de l’État des mesures fortes et efficaces pour empêcher que notre littoral ne soit sans cesse victime des comportements irresponsables de quelques-uns.
Or, madame le secrétaire d’État, monsieur le secrétaire d'État, comme le reconnaissait lui-même un député de votre majorité dans son rapport, « l’ambition maritime de la France n’a pas de traduction financière sur la période 2009-2011 ».
L’objectif de tolérance zéro rappelé par le Grenelle de la mer exige de déployer le plus rapidement possible des moyens matériels, technologiques et humains.
Quelles sont donc vos intentions précises sur ce sujet primordial de la sécurité en mer ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. Madame le sénateur, vous avez tout à fait raison. On s’interroge sur les boulettes ramassées sur notre littoral cette semaine, mais c’est certainement le résultat d’un dégazage sauvage quelque part dans l’Atlantique ; je puis vous assurer que, dans ce domaine, nous ne désarmons pas.
D’abord, nous nous sommes battus pendant la présidence française de l’Union européenne, avec le concours de parlementaires français – et, à cette occasion, je veux rendre un hommage tout particulier à Gilles Savary, qui ne siège plus comme député européen, mais qui a été très actif dans ce combat –, pour faire adopter le paquet Erika III, et cela malgré de nombreuses oppositions, ce dont notre pays s’enorgueillit.
Ensuite, avec Jean-Louis Borloo et Chantal Jouanno, nous avons engagé la mise en œuvre du Grenelle de la mer, effort considérable qui vise à essayer de rationnaliser également notre politique de la mer, laquelle dépend de multiples acteurs : le secrétariat général de la mer pour tout ce qui est régalien ; les préfets maritimes pour la coordination ; le ministre de l’alimentation, de l’agriculture et de pêche, pour la politique de la pêche, de l’ostréiculture et de la mytiliculture ; le ministère de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat, pour tout ce qui concerne l’environnement et les affaires maritimes.
Une telle politique implique une importante coordination, y compris s’agissant de l’action de l’État en mer, notamment dans les ports. Se mêlent ainsi sur l’ensemble du littoral, sans réelle coordination, vedettes des affaires maritimes, de la gendarmerie maritime, des douanes, moyens de la SNSM, moyens de la police nationale, moyens des SDIS…
Il importe donc que les moyens ne soient pas diminués. C'est la raison pour laquelle nous modernisons les CROSS, dont chacun connaît l’importance.
Nous améliorons notre dispositif de surveillance en mer, en liaison avec la réorganisation de nos forces armées et de leurs moyens.
Je puis donc vous assurer, madame le sénateur, qu’il n’est absolument pas question pour nous de baisser pavillon.
À propos de pavillon, nous accomplissons également un gros effort en ce qui concerne l’OMI, l’organisation maritime internationale ; la France y a nommé un ambassadeur de premier plan pour porter ses projets, liés, naturellement, à la démarche de Copenhague.
Nous nous donnons donc les moyens, avec le concours des collectivités locales, puisque cette politique est également menée dans le cadre des contrats de projet État-région, de nos ambitions dans ce domaine, dans lequel je puis dire, mesdames, messieurs les sénateurs, que la France est plutôt à l’avant-garde de ce qui se passe en Europe, où la plus belle démonstration de notre volonté commune serait la création d’un corps de garde-côtes européens.
Un tel corps permettrait en effet aux États membres de rassembler tous leurs moyens et de mener une politique mieux coordonnée, comme nous l’avons déjà fait en Méditerranée en mettant en œuvre des moyens de dépollution avec le concours de l’Union européenne, ce qui était d’autant plus nécessaire que c’est en Méditerranée que les risques sont les plus importants du fait de la configuration de cette mer par rapport aux pays qui l’entourent.
M. Roland Courteau. Tout à fait !
M. le président. La parole est à Mme Odette Herviaux, pour la réplique.
Mme Odette Herviaux. À la suite de la réponse de M. le secrétaire d'État, je réitère ma demande d’avoir une vision consolidée, en quelque sorte, de l’ensemble des intervenants, sujet évoqué par M. Grignon, rapporteur pour avis.
Je tiens aussi à rappeler l’engagement 88.b. du Grenelle de la mer, qui vise à « engager une expertise sans préalable, impliquant les salariés des services maritimes, afin d’évaluer l’organisation des services maritimes et leurs capacités en effectifs et moyens matériels pour garantir la mise en œuvre des prérogatives, orientations et missions découlant du Grenelle de la mer ».
Il me semble que cela n’a été fait en ce qui concerne ni la réorganisation des directions des affaires maritimes, ce qui complexifie la chaîne de commandement, ni la réorganisation des CROSS, ni même parfois les moyens à accorder aux missions dévolues, par exemple, à l’Agence des aires marines protégées.
Il me semble que c’est en contradiction avec l’engagement pris par le Président de la République dans son discours du Havre. Tous ceux qui, comme les élus des régions côtières, ont encore à l’esprit les images de l’Amoco Cadiz, du Torrey Canyon, de l’Erika et du Prestige, entre autres, ne peuvent que le regretter.
M. le président. La parole est à M. Pierre Bernard-Reymond.
M. Pierre Bernard-Reymond. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, si les informations dont je dispose sont exactes, le Gouvernement a l’intention de réaliser, dans quelques semaines ou quelques mois, l’inventaire d’une soixantaine des plus grands projets routiers ou autoroutiers prévus en France depuis plusieurs années, de les confronter à une grille multicritères et, à partir de cette analyse, de statuer sur leur sort après consultation des assemblées parlementaires.
Pouvez-vous, madame la secrétaire d’État, monsieur le secrétaire d’État, me confirmer ces intentions du Gouvernement, m’indiquer si la liste de cette soixantaine de projets est aujourd’hui arrêtée, me faire savoir si la grille multicritères a été élaborée et si l’on peut en connaître le contenu, et me dire si les porteurs de projets pourront s’exprimer devant le groupe de travail du secrétariat d’État chargé des transports avant que celui-ci ne vous propose une décision ?
Pouvez-vous, enfin, me préciser la nature de la consultation que vous envisagez avec les deux assemblées sur cette question ? Le dossier sera-t-il présenté devant une commission ? Sera-t-il évoqué en séance publique ? Sera-t-il sanctionné par un vote ? Si oui, s’agira-t-il d’un vote groupé ou d’un vote sur chaque projet ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Dominique Bussereau, secrétaire d’État. Vous avez raison, monsieur le sénateur, de poser cette question de méthode. Qu’en est-il ?
Nous avons mis en place, dans le Grenelle I, un schéma national des infrastructures de transport, qui a été validé par le Parlement, et prévu diverses échéances, antérieures et postérieures à 2020. Sont intervenus ensuite le Grenelle II, qui concerne plus spécifiquement les transports, puis des décisions gouvernementales, comme l’annonce par le Président de la République, lors de son discours du Havre du 16 juillet dernier, de la mise en place d’un nouveau TGV en direction de la Normandie, avec une branche basse-normande et une branche haute-normande, qui permettra de desservir en particulier le port du Havre, jusqu’alors exclu du schéma prévu dans le Grenelle de l’environnement.
Il fallait inscrire tout cela noir sur blanc, d’où l’initiative que nous avons prise, avec Jean-Louis Borloo, d’élaborer ce schéma national des infrastructures de transport, qui sera joint, en annexe, aux textes que vous avez votés.
Quelle est la méthode adoptée ? Nous examinons actuellement chaque projet routier ou autoroutier – je pense notamment à celui de l’A 51, que vous défendez depuis de nombreuses années, cher Pierre Bernard-Reymond, avec courage et détermination – et nous les passons au gril des critères du Grenelle de l’environnement. Nous vous ferons ensuite des propositions, que Chantal Jouanno, Jean-Louis Borloo et moi-même nous vous présenterons de façon globale au Parlement, à l’occasion d’un débat sans vote qui permettra de passer en revue ces projets, comme nous l’avions fait avec Gilles de Robien en 2003.
Je me souviens encore de la détermination dont le Sénat avait fait preuve à l’occasion de ce débat : la séance, qui s’était ouverte à vingt et une heures trente s’était terminée à six heures le lendemain matin. Si les sénateurs sortaient de l’hémicycle par intermittence pour se reposer, Gilles de Robien et moi-même sommes restés au banc du Gouvernement et nous avons pu mesurer la force du Sénat lorsqu’il s’agit de faire des choix structurants d’infrastructures et d’influer sur le débat national. (Sourires.)
M. le président. La parole est à M. Pierre Bernard-Reymond, pour la réplique.
M. Pierre Bernard-Reymond. Je vous remercie, monsieur le secrétaire d’État, des informations que vous venez de me donner. Je regrette un peu qu’aucun vote ne vienne sanctionner le débat que vous annoncez. Je vous rappelle néanmoins que le Sénat a déjà voté, dans le cadre du Grenelle II, un amendement que j’ai eu l’honneur de présenter, et qui a été entériné par l’Assemblée nationale.
Je suis heureux de cette perspective de nous revoir, et je ne doute pas qu’il y aura du « Pastis 51 » à l’apéritif ! (Sourires.)
M. le président. La parole est à M. Paul Raoult.
M. Paul Raoult. Je voudrais vous interroger, madame la secrétaire d’État, sur les conditions de mise en œuvre du traitement des eaux usées dans notre pays.
On nous a annoncé, voilà quelques jours, que Bruxelles assignait la France en justice pour son retard dans l’application de la directive eaux résiduaires urbaines, dite ERU, qui aurait dû être mise en place avant le 31 décembre 2000. Pouvez-vous nous indiquer où nous en sommes sur ce dossier, car il me semble important que la mise en œuvre de ce plan soit effective dans les cent soixante villes concernées ? Cette situation doit être normalisée, car un tel retard fait un peu désordre alors même que l’on parle sans cesse des objectifs du Grenelle I et II.
De la même façon, on constate que l’assainissement non collectif, qui concerne tout de même plus de 5 millions d’installations et plus de 11 millions de Français, accuse également un retard, et que le réseau SPANC, ou service public d’assainissement non collectif, est encore insuffisant. Il faut former des agents, des élus, fournir un agrément du matériel, organiser une filière d’élimination des matières de vidange. N’oublions pas que certaines zones de captage sont en habitat dispersé, où l’assainissement non collectif est indispensable. C’est donc, là aussi, une urgence écologique à laquelle il faut répondre.
Je souhaite, madame la secrétaire d’État, que vous nous rassuriez sur l’ensemble de ces objectifs, qu’il s’agisse de l’assainissement collectif ou non collectif.
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Chantal Jouanno, secrétaire d’État. Nous avons hérité, en 2007, d’une situation dans laquelle cent quarante-six stations d’épuration dédiées aux communes de plus de 20 000 habitants n’étaient pas aux normes ; les travaux de mise aux normes n’étaient pas engagés.
Jean-Louis Borloo a mobilisé des moyens, notamment des crédits en provenance de la Caisse des dépôts et consignations, pour un montant de 1,5 milliard d’euros. Aujourd’hui, seules onze stations n’ont pas encore commencé ces travaux ; elles ne devraient plus être que trois à la fin de l’année. Nous sommes donc sur la bonne voie. La Commission s’est fondée sur la situation antérieure.
L’assainissement non collectif est un sujet dont nous avons déjà eu l’occasion de débattre longuement dans le cadre de la loi Grenelle II ; ce texte devrait permettre de résoudre les problèmes que vous avez soulevés.
M. le président. La parole est à M. Alain Vasselle.
M. Alain Vasselle. Je voudrais vous sensibiliser, madame la secrétaire d’État, aux difficultés de certaines intercommunalités qui ont la compétence de la collecte et du traitement des déchets ménagers, et qui doivent faire face à des avis d’opportunité exprimés par certains conseils généraux chargés d’élaborer les plans départementaux. Des plans avaient ainsi été élaborés par les préfets, en leur temps, et certains conseils généraux ont tardé à les réviser. Je suis moi-même confronté à ce problème dans le département de l’Oise, où les appréciations sur les modes de traitement divergent.
Je trouve regrettable ce partage de compétences entre les communes, les intercommunalités et les conseils généraux. Je partage l’objectif de cohérence du plan départemental, mais j’ai plus de mal à admettre les jugements d’opportunité sur les modes de traitement.
Nous savons que les collectivités ont le choix entre plusieurs modes de traitement. Or certains conseils généraux considèrent qu’il y a lieu de privilégier la méthanisation plutôt que la valorisation énergique.
J’avais déposé, à l’occasion du Grenelle II, un amendement visant à prendre en compte les choix opérés par les intercommunalités. Pouvez-vous me confirmer, madame la secrétaire d’État, que la parfaite entente qui doit exister entre les collectivités permettra d’éviter une sorte de tutelle de l’une sur l’autre dès lors qu’une collectivité respecterait les grandes lignes politiques et les choix législatifs et réglementaires arrêtés dans le Grenelle II ?
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Chantal Jouanno, secrétaire d’État. L’article 78 de la loi Grenelle II permet de répondre à votre préoccupation, monsieur le sénateur, puisqu’il dispose que les plans départementaux d’élimination des déchets doivent recenser les délibérations des personnes morales de droit public détenant cette compétence. Ces délibérations font automatiquement partie intégrante des plans départementaux, dés lors qu’elles sont compatibles avec les objectifs du Grenelle I, ce qui est le cas pour la délibération que vous avez évoquée.
Du fait de cette disposition, la concordance de vues doit donc être totale entre les différentes collectivités, qui ne peuvent se livrer à une « guerre » politique à cet égard.
M. le président. La parole est à M. Alain Vasselle, pour la réplique.
M. Alain Vasselle. Je vous remercie de votre réponse, madame la secrétaire d’État. Je souhaite simplement que le Gouvernement obtienne des députés, lors de l’examen du Grenelle II, qu’ils votent conforme cet article 78, afin qu’aucun problème ne se pose. Je vous sais gré par avance d’y veiller. Je fais confiance au Gouvernement pour convaincre l’Assemblée nationale que la bonne voie est celle qu’a choisie le Sénat.
M. le président. Mes chers collègues, nous avons achevé les questions-réponses-répliques.
Écologie, développement et aménagement durables
M. le président. Nous allons procéder à l’examen des crédits de la mission « Écologie, développement et aménagement durable », figurant à l’état B.
État B
(En euros) |
||
Mission |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
Écologie, développement et aménagement durables |
10 241 373 005 |
10 114 364 826 |
Infrastructures et services de transports |
4 402 821 728 |
4 319 115 772 |
Sécurité et circulation routières |
61 452 480 |
62 047 048 |
Sécurité et affaires maritimes |
132 090 446 |
134 785 575 |
Météorologie |
189 300 000 |
189 300 000 |
Urbanisme, paysages, eau et biodiversité |
353 133 230 |
346 832 095 |
Information géographique et cartographique |
73 650 000 |
73 650 000 |
Prévention des risques |
346 497 807 |
306 714 049 |
Dont titre 2 |
39 063 219 |
39 063 219 |
Énergie et après-mines |
812 380 911 |
815 706 856 |
Conduite et pilotage des politiques de l’écologie, de l’énergie, du développement durable et de la mer |
3 870 046 403 |
3 866 213 431 |
Dont titre 2 |
3 276 721 812 |
3 276 721 812 |
M. le président. L’amendement n° II-150, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Modifier comme suit les crédits des programmes :
(En euros) |
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Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
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+ |
- |
+ |
- |
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Infrastructures et services de transports |
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Sécurité et circulation routières |
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Sécurité et affaires maritimes |
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Météorologie |
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Urbanisme, paysages, eau et biodiversité |
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Information géographique et cartographique |
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Prévention des risques Dont Titre 2 |
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Énergie et après-mines |
70 000 000 |
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20 000 000 |
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Conduite et pilotage des politiques de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer Dont Titre 2 |
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TOTAL |
70 000 000 |
20 000 000 |
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SOLDE |
+ 70 000 000 |
+ 20 000 000 |
La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Chantal Jouanno, secrétaire d’État. Dans le cadre de la discussion du projet de loi de finances, vous avez créé et rebaptisé la contribution carbone, et regretté que ne soit pas prévu de mécanisme de compensation pour les collectivités territoriales, comme il en existe pour les particuliers et les entreprises.
Le Premier ministre a ainsi annoncé, lors du Congrès de l’Association des maires de France, la mise en place d’un fonds, géré par l’ADEME, destiné à financer les investissements des collectivités territoriales en matière d’économie d’énergie et d’énergies renouvelables.
Ce fonds sera doté d’un montant correspondant au produit de la contribution carbone acquittée par les collectivités territoriales. Les emplois du fonds seront définis après avis d’une commission dans laquelle siègeront des représentants des collectivités territoriales.
Le coût de la contribution carbone à la charge des collectivités locales est estimé à 70 millions d’euros, en tenant compte de l’exonération dont elles bénéficient sur les transports en commun.
Le présent amendement vise à ouvrir, en conséquence, les crédits nécessaires à la mise en place du fonds en 2010, soit 70 millions d’euros en autorisations d’engagement et, pour tenir compte d’un moindre besoin de décaissement pour cette première année de démarrage, 20 millions d’euros en crédits de paiement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Fabienne Keller, rapporteur spécial de la commission des finances. Ce dispositif correspond à l’engagement pris par le Premier ministre devant les maires de confier à une commission la charge de gérer le volume de la contribution carbone prélevée auprès des collectivités territoriales.
C’est donc un retour aux fondamentaux de la contribution carbone, puisqu’il s’agit de fiscaliser la consommation d’énergie productrice de CO2 et de donner la ressource ainsi collectée à ceux qui investissent dans des processus industriels ou des modes de chauffage et de transport moins carbonés. Le Gouvernement nous propose de faire entrer les collectivités territoriales dans ce cercle vertueux, en « recyclant » cette fiscalité dans le même domaine et en créant ainsi une dynamique d’économie carbone.
La commission est tout à fait favorable à cet amendement, tout en s’étonnant du faible montant des crédits accordés à ce fonds. Mais il est vrai que, sur les sommes payées par les collectivités, nous sommes encore dans le flou ; il faudra vraisemblablement ajuster ces montants, qui seront reconductibles chaque année. Il s’agit bien d’un retour aux fondamentaux de l’éco-fiscalité.
M. le président. La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote.
Mme Nicole Bricq. Je souhaite rappeler que les collectivités territoriales étaient les seules à ne pas bénéficier de compensation pour leur contribution carbone.
Le groupe socialiste était défavorable au mode de compensation retenu pour les ménages, qui ne tient pas compte de leurs revenus. Il existait également une compensation pour les entreprises, mais pas pour les collectivités territoriales. Le Premier ministre a donc annoncé cette mesure, que la commission des finances avait estimée à 140 millions d’euros. La moitié de cette somme a disparu !
M. Paul Raoult. Et oui !
Mme Nicole Bricq. Nous sommes sceptiques quant au montant du produit attendu et au contrôle des fonds, qui pourraient être réaffectés au soutien de projets de nature écologique dans le domaine des transports ou dans celui des bâtiments.
Voilà plusieurs années, le groupe socialiste avait imaginé une sorte de taxe carbone qui aurait été réaffectée à un fonds à destination des collectivités locales. Mais le Gouvernement, que ce soit le précédent ou l’actuel, s’y est toujours opposé. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. Éric Doligé, pour explication de vote.
M. Éric Doligé. Cet amendement me met très mal à l’aise.
Si je comprends bien le fond du dossier, il est normal que les collectivités territoriales, qui vont acquitter la contribution carbone, aient un retour.
J’avais déposé des amendements, qui n’ont pas été adoptés, relatifs notamment au service départemental d’incendie et de secours, le SDIS. En la matière, les obligations des collectivités les conduisent à payer une taxe importante. Dans mon département, la taxe globale permettant de financer le SDIS est de l’ordre de 1 million d’euros ; la somme augmente très vite dans une collectivité qui compte 1 000 véhicules et 400 bâtiments.
J’en reviens à notre sujet. Ce qui m’inquiète, c’est que l’on va prélever la contribution carbone sur les collectivités territoriales, contribution qui sera placée dans un fonds géré par l’ADEME. Une commission sera créée ; je vous rappelle que les élus siègent déjà dans de nombreuses commissions. Et cette commission va redistribuer le fonds aux mêmes collectivités ou à d’autres. Si ce n’est une usine à gaz, c’est une usine à carbone. (Sourires.)
Mme Nicole Bricq. Un piège à carbonne !
M. Éric Doligé. Ce dispositif me paraît d’une très grande complexité. Bien sûr, on ne peut pas s’y opposer, car aucune autre solution n’existe actuellement. Mais n’est-il pas possible de trouver un montage plus simple ?
M. le président. La parole est à M. Alain Vasselle, pour explication de vote.
M. Alain Vasselle. Cet amendement est intéressant, car il correspond à l’engagement pris par le Premier ministre au congrès de l’Association des maires de France. Cependant, nous sommes en droit de nous interroger sur les modalités d’application du dispositif. Comment ce fonds sera-t-il redistribué aux collectivités ? Notre collègue Éric Doligé a raison de se poser la question de la pertinence de la création d’une commission pour assurer cette redistribution.
Madame la secrétaire d’État, je souhaite vous faire une suggestion à laquelle j’aimerais que le Gouvernement réfléchisse. Dans chaque département, une commission départementale est chargée de définir les domaines d’intervention et le taux des subventions allouées au titre de la dotation globale d’équipement, la DGE. Pourquoi créer une commission et un fonds spécial ? On pourrait très bien imaginer que la commission départementale puisse se prononcer également sur les sujets relatifs au développement durable et aux investissements des collectivités locales.
Sont prévus 70 millions d’euros. Selon Mme Bricq, les besoins s’élèveraient à 140 millions d’euros.
Mme Nicole Bricq. C’est ce qui nous avait été dit !
M. Alain Vasselle. Je ne me suis pas livré à une expertise sur le sujet ; la commission des finances a dû s’en charger.
Madame la secrétaire d’État, il faudrait veiller à ce que les crédits soient partagés entre les communes rurales et les villes les plus importantes, dont les besoins seront beaucoup plus élevés. Les plus gros consommateurs seront les villes ou les intercommunalités disposant de flottes ou de bâtiments importants. Autrement dit, les communes rurales vont payer sans avoir l’assurance d’un retour.
Une autre difficulté s’ajoute à cela. Les communes rurales n’investiront que si elles peuvent compter sur leur partenaire habituel financier, c’est-à-dire le conseil général ou le conseil régional. On entre dans un système relativement complexe de financements croisés qui restent indispensables pour les petites communes, sauf si ce fonds est suffisamment doté pour se passer du concours du conseil général et du conseil régional.
Il serait intéressant que nous connaissions les modalités d’application du dispositif avant de donner notre bénédiction définitive au projet qui nous est proposé. Je n’ai aucun a priori, mais je me pose un certain nombre de questions.
M. le président. La parole est à Mme Évelyne Didier, pour explication de vote.
Mme Évelyne Didier. Nous avons bien compris que cet amendement était un pare-feu : il fallait bien que le Premier ministre fasse une annonce au Congrès de l’Association des maires de France, sauf à courir à la catastrophe.
Qui peut s’opposer à un amendement tendant à redistribuer de l’argent aux collectivités ? Bien entendu personne ! Mais comment éviter le clientélisme quand il n’y aura pas assez d’argent ? Comment trouver les bons critères ? Comment ne pas penser que certains seront les premiers servis au détriment des autres ?
M. Paul Raoult. Eh oui !
Mme Évelyne Didier. M. Vasselle vient d’évoquer le milieu rural. Des collectivités disposeront de l’ingénierie nécessaire pour boucler les dossiers, d’autres non. Cette difficulté est liée aux financements croisés.
Le dispositif soulève donc énormément de questions. En réalité, il s’agit de calmer la grogne des collectivités face à la réforme de la taxe professionnelle. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État. Pour ce qui concerne le montant du fonds, seule une estimation est possible. Voici le principe qui a été appliqué : les dépenses d’énergie des communes représentant à peu près trois quarts des dépenses d’énergie de l’ensemble des collectivités, on a appliqué une règle de trois.
Une « commission verte » a été mise en place pour suivre la contribution carbone. Elle pourra se saisir de la question spécifique de l’évaluation du montant payé par les collectivités au titre de la contribution carbone.
Pour ce qui est de la commission qui devra être créée, on peut s’inspirer du modèle proposé par M. Vasselle. Le Gouvernement souhaite que les collectivités soient parties prenantes de la décision, comme pour les agences de bassin, ce qui évitera tout problème de clientélisme. Pour ma part, j’ai une entière confiance en l’ADEME, établissement public indépendant, pour gérer ce dossier de manière totalement transparente. Les systèmes d’aides sont validés par le conseil d’administration de l’Agence. Le dispositif sera donc très encadré.
M. le président. L'amendement n° II-152, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Modifier comme suit les crédits des programmes :
(En euros) |
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Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
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+ |
- |
+ |
- |
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Infrastructures et services de transports |
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Sécurité et circulation routières |
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Sécurité et affaires maritimes |
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Météorologie |
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Urbanisme, paysages, eau et biodiversité |
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Information géographique et cartographique |
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Prévention des risques Dont Titre 2 |
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Énergie et après-mines |
10 000 000 |
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10 000 000 |
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Conduite et pilotage des politiques de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer Dont Titre 2 |
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TOTAL |
10 000 000 |
10 000 000 |
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SOLDE |
+ 10 000 000 |
+ 10 000 000 |
La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État. Cet amendement traduit l’une des initiatives de M. Marini, rapporteur général. Il souhaitait que le fonds démonstrateur géré par l’ADEME soit financé par des ressources budgétaires plutôt que par des recettes affectées, notamment celle du réseau des technologies pétrolières et gazières, le RTPG.
Dans la mesure où ce type de disposition dérogeait au principe de l’universalité budgétaire, il jugeait plus opportun que le fonds soit abondé directement par le Gouvernement. Cet amendement tire les conséquences de cette volonté en ouvrant au profit du programme « Énergie et après-mines » 10 millions d’euros de crédits en autorisations d’engagement et en crédits de paiement, qui vont financer le fonds démonstrateur de l’ADEME, en remplacement de la recette affectée.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Fabienne Keller, rapporteur spécial. Il s’agit d’un amendement de coordination très technique. La commission des finances ne peut qu’y être favorable.
M. le président. L'amendement n° II-149, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Modifier comme suit les crédits des programmes :
(En euros) |
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Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
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+ |
- |
+ |
- |
|
Infrastructures et services de transports |
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Sécurité et circulation routières |
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Sécurité et affaires maritimes |
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|
Météorologie |
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|
Urbanisme, paysages, eau et biodiversité |
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|
Information géographique et cartographique |
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Prévention des risques Dont Titre 2 |
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|
Énergie et après-mines |
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Conduite et pilotage des politiques de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer Dont Titre 2 |
|
512 789 436 337 |
|
512 789 436 337 |
TOTAL |
512 789 |
512 789 |
||
SOLDE |
- 512 789 |
- 512 789 |
La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. Cet amendement, purement technique, vise à tirer les conséquences sur les crédits de la mission « Écologie, développement et aménagement durables » de l’ajustement des compensations dues aux collectivités territoriales au titre de certains transferts de crédits.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Gérard Miquel, rapporteur spécial de la commission des finances. La diminution de 512 789 euros de crédits du programme support est accompagnée d’une majoration à due concurrence des crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales ». Elle résulte de deux transferts de compétences : premièrement, le transfert de l’État au STIF des services qui participent à l’exercice des compétences transférées en matière de plan de déplacements urbains, d’organisation et de fonctionnement des transports scolaires, ainsi que de remboursement des frais de déplacement des élèves ; deuxièmement, le transfert au maire de Paris de la faculté de délivrer les autorisations préalables de changement d’usage des locaux destinés à l’habitation.
La commission des finances émet un avis favorable.
M. le président. L'amendement n° II-95 rectifié, présenté par MM. Bailly, César, Bécot, J. Blanc, Revet, Huré et Pointereau, est ainsi libellé :
Modifier comme suit les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
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+ |
- |
+ |
- |
|
Infrastructures et services de transports |
|
|
|
|
Sécurité et circulation routières |
|
|
|
|
Sécurité et affaires maritimes |
|
|
|
|
Météorologie |
|
|
|
|
Urbanisme, paysages, eau et biodiversité |
|
500 000 |
|
500 000 |
Information géographique et cartographique |
|
|
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|
Prévention des risques Dont Titre 2 |
|
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|
Énergie et après-mines |
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|
Conduite et pilotage des politiques de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer Dont Titre 2 |
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TOTAL |
500 000 |
500 000 |
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SOLDE |
- 500 000 |
- 500 000 |
La parole est à M. Gérard Bailly.
M. Gérard Bailly. En tant que président du groupe d’étude de l’élevage, j’ai été conduit à présenter cet amendement avec quelques collègues.
La réintroduction des grands prédateurs, en particulier des loups, des ours, des lynx, entraîne des dégâts croissants au sein des troupeaux d'ovins. Les éleveurs présents dans nos massifs subissent de ce fait des préjudices très importants, qui découragent un certain nombre d'entre eux.
Pour seule réponse, les pouvoirs publics inscrivent des crédits d'indemnisation, au sein du budget de l’agriculture, ou de prévention, mais la prévention demande un travail considérable aux bergers.
Par ailleurs, au moment où l'Europe sensibilise les éleveurs au bien-être animal, est-il normal de laisser déchiqueter, égorger des ovins, qui agonisent pendant des heures, des nuits ? Cela, les bergers ne le comprennent pas, alors qu’il leur est demandé de porter de l’attention à leurs animaux, au titre de ce que l’on appelle le bien-être animal.
Tous les éleveurs ont reçu la plaquette que je tiens entre les mains en provenance de l’Union européenne et intitulée Le bien-être des animaux est une priorité de l’UE. Je vais vous donner lecture de certains passages de ce document.
« Le bien-être des animaux est une préoccupation majeure des citoyens de l’Union européenne. Il s’agit de leur assurer un traitement humain et respectueux.
« Les préoccupations des citoyens européens pour le bien-être des animaux d’élevage ont permis à l’UE de renforcer la législation et les politiques au fil du temps afin de protéger les animaux des mauvais traitements et des souffrances inutiles.
« De nombreuses lois européennes en matière de bien-être des animaux d’élevage sont déjà en vigueur. L’objectif général est de garantir que les animaux ne subissent pas de douleurs ou de souffrances inutiles, en commençant par reconnaître que les animaux sont des êtres sensibles. »
Ces animaux doivent « être à l’abri de la faim et la soif ; ne pas souffrir de contrainte physique ; ne pas être sujets à la douleur, aux blessures ou aux maladies ; avoir la liberté d’exprimer des comportements normaux ; être à l’abri de la peur et de l’angoisse ».
Tel est le document qu’ont reçu les éleveurs, afin d’agir au mieux dans leurs exploitations, mais doit également être pris en compte ce qui se passe dans les montagnes.
Le présent amendement a pour objet de réduire de 500 000 euros les crédits destinés au soutien des actions en faveur de la préservation des espèces de grands prédateurs et permettant notamment de financer des associations de défense des prédateurs. Bien entendu, il ne s’agit pas de diminuer les crédits affectés à l’indemnisation ou à la prévention.
Cette action s'inscrit dans un vaste projet de réduire de moitié en trois ans les crédits en ce domaine. Ma proposition correspond à une diminution des crédits, que je n’ai pas voulue drastique, comprise entre 10 % et 15 %. Mon objectif est de diminuer le nombre de prédateurs – près de 200 loups sont présents dans les Alpes –, alors que les prélèvements sont très faibles.
Je rappelle tout de même que plus d’un millier d’animaux – on ne sait jamais exactement combien d’animaux sont concernés ; le nombre de trois mille a même été avancé – sont égorgés chaque année. Je me place aussi, bien entendu, en tant que défenseur de ces animaux.
La réduction des crédits que je propose serait une bonne chose en termes budgétaires. En outre, elle répondrait aux attentes des éleveurs et permettrait d’éviter le sacrifice de nombreux animaux.
J’espère, mes chers collègues, que vous ne serez pas insensibles à cette question et que vous voterez avec moi cet amendement. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Fabienne Keller, rapporteur spécial. Il s’agit là d’un sujet difficile, que nous évoquons chaque année, à savoir la mise en œuvre d’une directive européenne visant à protéger des animaux.
Pour tenter de vous faire sourire sur ce sujet extrêmement délicat, permettez-moi de vous rapporter les propos de Gérard Miquel, mon collègue de la commission des finances, qui me disait à l’instant qu’il préférait voir des brebis dans la montagne plutôt que des loups. Nous savons bien que les loups s’attaquent aux troupeaux et que, même si les bergers sont indemnisés, cela ne compense pas le préjudice qu’ils subissent. Leur métier est d’élever ces animaux ; nous en sommes bien conscients.
Néanmoins, la préservation à très long terme de la biodiversité impose de protéger certaines espèces, des plus grandes aux plus petites. Je vous prie donc, mon cher collègue, de bien vouloir retirer votre amendement. S’il était adopté, nous serions en infraction avec des textes européens visant à préserver les espèces menacées et leur habitat.
M. le président. Monsieur Bailly, l'amendement n° II-95 rectifié est-il maintenu ?
M. Gérard Bailly. Oui, monsieur le président, je le maintiens, car le cheptel ovin a diminué de 3 millions de têtes dans notre pays : il est passé de 11 millions à 8 millions ; François Fortassin et moi-même avons réalisé une étude sur ce sujet.
Il ne faudra pas se plaindre lorsque les friches brûleront dans le Midi ou lorsqu’il y aura des avalanches dans les Alpes, parce qu’il n’y aura plus d’ovins, et accuser le Parlement de ne pas avoir pris de décision ! Nous devons assumer nos responsabilités, monsieur le président, et dire aux pouvoirs publics que, oui, il faut des loups, oui, il faut des ours, mais pas trop afin qu’ils ne détruisent pas nos troupeaux de moutons. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État. Tout d’abord, comme l’a rappelé Mme Fabienne Keller, nous sommes tenus par deux conventions : la convention de Berne, d’une part, et la directive européenne « Habitats », d’autre part.
Ensuite, s’il était adopté, l’amendement reviendrait à supprimer une grande partie des crédits alloués à l’indemnisation et à l’accompagnement des éleveurs, les crédits affectés directement à des missions de suivi ou de valorisation de la biodiversité ne représentant que 14 % de l’ensemble.
Enfin, le loup pose une difficulté toute particulière. Le « plan loup », qui prévoit des tirs de prélèvement en cas de difficulté, était si contraignant qu’il était totalement inapplicable. Afin de faciliter la prise de décision, l’arrêté pris en mai à la suite des difficultés rencontrées cet hiver prévoit que la décision de procéder à un tir de prélèvement sera déconcentrée au niveau du préfet. En outre, selon cet arrêté, l’utilisation de chiens patous est un moyen d’effarouchement, ce qui rend plus facile le passage à l’étape du tir de prélèvement. Enfin, cet arrêté autorise les tirs de prélèvements en dehors des saisons de pâturage.
J’ajoute que le pastoralisme, sujet sur lequel Bruno Le Maire et moi-même travaillons, rencontre de nombreuses difficultés, qui ne sont pas toutes dues aux loups. En effet, si on regarde les prélèvements, on se rend compte que ces difficultés sont beaucoup plus lourdes et plus graves, entre autres à cause des chiens errants – mais pas seulement –, qui posent des problèmes non négligeables.
Ce n’est donc pas en supprimant des crédits que l’on parviendra à résoudre ces difficultés. Une telle suppression serait même contraire aux intérêts des éleveurs. Prenons le temps de voir si l’arrêté ministériel pris au mois de mai facilite ou non la mise en œuvre du « plan loup ».
Telles sont les raisons pour lesquelles je vous prie, monsieur le sénateur, de bien vouloir retirer votre amendement. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.
M. le président. La parole est à M. Alain Vasselle, pour explication de vote.
M. Alain Vasselle. Je prie mon collègue Gérard Bailly, dont je comprends la démarche, de bien vouloir m’en excuser, mais je pense que Mme la secrétaire d’État a en partie raison de demander le retrait de son amendement. Cet amendement est en fait un appel au secours,…
Mme Fabienne Keller, rapporteur spécial. Bien sûr !
M. Alain Vasselle. …car les éleveurs voient leurs troupeaux décimés.
Madame la secrétaire d’État, vous avez raison de dire que les loups ne sont pas les seuls à poser problème. C’est aussi le cas des chiens errants, notamment dans mon département, où, fort heureusement, il n’y a pas de loups. Des chiens abandonnés viennent égorger des moutons, même si ce n’est pas en nombre aussi important que dans le département de notre collègue Gérard Bailly.
Le risque, sauf si nous trouvons une autre solution, est que les éleveurs ne puissent plus bénéficier d’indemnisations. Les tirs de prélèvement évoqués par Mme la secrétaire d’État, c'est-à-dire la régulation de cette espèce, sont un premier élément de réponse. Encore faudra-t-il que des instructions précises soient données aux préfets et aux agents chargés de procéder à la régulation afin que celle-ci soit effective. Nous ne saurions nous contenter de déclarations pour calmer l’ire des parlementaires et des éleveurs !
En outre, il faudra étendre la régulation à d’autres prédateurs, madame la secrétaire d’État. En effet, d’autres espèces sont aujourd'hui menacées, à tel point qu’il n’est pas impossible que l’Europe – ou vous-même, madame la secrétaire d’État, dans le cadre du Grenelle de l’environnement – décide d’inscrire dans la liste des animaux protégés la perdrix grise ou d’autres espèces de petit gibier, qui connaissent une décroissance particulièrement préoccupante en raison du développement de prédateurs ailés et de prédateurs à quatre pattes, comme le renard.
Je souhaite donc, madame la secrétaire d’État, que soient renforcées les dispositions permettant aux acteurs sur le terrain d’assurer une véritable régulation de ces prédateurs, car ils menacent certaines espèces, ainsi qu’une partie de l’économie agricole et de l’élevage.
L’appel de notre collègue est donc tout à fait légitime. Encore faudrait-il que nous obtenions des réponses à la hauteur de sa demande.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-95 rectifié.
(L'amendement est adopté. – Bravo ! et applaudissements sur les travées de l’UMP.)
(Mme Monique Papon remplace M. Jean-Claude Gaudin au fauteuil de la présidence.)
PRÉSIDENCE DE Mme Monique Papon
vice-présidente
Mme la présidente. L'amendement n° II-129, présenté par M. Sueur, Mme Bricq et M. Frécon, est ainsi libellé :
Modifier comme suit les crédits des programmes :
(En euros) |
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Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
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+ |
- |
+ |
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Infrastructures et services de transports |
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Sécurité et circulation routières |
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Sécurité et affaires maritimes |
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Météorologie |
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Urbanisme, paysages, eau et biodiversité |
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Information géographique et cartographique |
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Prévention des risques Dont Titre 2 |
180 000 000 |
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180 000 000 |
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Énergie et après-mines |
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Conduite et pilotage des politiques de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer Dont Titre 2 |
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180 000 000 |
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180 000 000 |
TOTAL |
180 000 000 |
180 000 000 |
180 000 000 |
180 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.
M. Jean-Pierre Sueur. Chaque année, à l’occasion de l’examen du projet de loi de finances, nous évoquons les sinistrés de la sécheresse de 2003. Vous le savez, mes chers collègues, nombre de nos compatriotes ont subi très durement les conséquences de cette sécheresse, à la suite de laquelle de nombreux bâtiments ont été très gravement endommagés.
Une procédure de catastrophe naturelle a été engagée, mais elle a donné lieu à d’importantes injustices, inégalités ou différences de traitement, appelez-les comme vous le voulez. En effet, dans certains départements, pratiquement toutes les communes ont été reconnues en état de catastrophe naturelle, alors que, dans d’autres, seules quelques communes l’ont été, sans qu’il soit possible de bien distinguer les critères météorologiques ou géologiques justifiant cette différence de traitement entre communes voisines.
Nous avons obtenu en 2006 le vote d’une dotation exceptionnelle tant le problème était crucial, mais, dans beaucoup de départements, les associations ont fait valoir que celle-ci était insuffisante. Nous connaissons nombre de personnes qui éprouvent toujours de graves difficultés et qui ne parviennent absolument pas à faire face aux conséquences de cette catastrophe.
Nous étions déjà intervenus sur cette question l’année dernière. Le Sénat avait alors décidé, sur l’initiative de la commission des finances, de constituer un groupe de travail sur ce sujet. Ce groupe, dont le président était Eric Doligé et les rapporteurs Fabienne Keller et Jean-Claude Frécon, a fort bien travaillé pendant plusieurs mois et a rédigé un excellent rapport sur le problème.
Mes collègues Nicole Bricq, Jean-Claude Frécon et moi-moi même vous proposons une série de trois amendements visant à reprendre plusieurs des conclusions de ce rapport, qui a été adopté dans d’excellentes conditions par la commission des finances.
L’amendement n° II-129 tend à appliquer la proposition n° 10 du rapport : « Le groupe de travail demande au Gouvernement de mettre en œuvre une vague complémentaire d’indemnisations. » Ce qui a été fait en 2006 était positif, mais largement insuffisant. C’est pourquoi, après avoir procédé à de nombreuses auditions, le groupe de travail mis en place par la commission des finances du Sénat a constaté qu’une dotation complémentaire était absolument nécessaire.
Le présent amendement a donc pour objet de modifier les crédits, afin de prévoir une dotation complémentaire de 180 millions d’euros. J’espère, madame la secrétaire d’État, monsieur le secrétaire d’État, que votre réponse sera différente de celle qui nous a été faite l’année dernière : il nous avait alors été dit qu’il s’agissait là d’un véritable problème, mais qu’une étude approfondie était nécessaire. Cette étude ayant été réalisée, et dans de bonnes conditions, j’espère vivement qu’une réponse favorable sera apportée à notre demande.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Fabienne Keller, rapporteur spécial. Comme l’a parfaitement rappelé notre collègue Jean-Pierre Sueur, la sécheresse de 2003 est un sujet sérieux. Elle a entraîné un gonflement des argiles, suivi d’un dégonflement qui a conduit à l’effondrement d’un certain nombre de murs porteurs d’immeubles et de maisons. Les conséquences de cette sécheresse, qui a touché de très nombreuses familles, ont été très difficiles à évaluer, et les vagues successives d’indemnisation n’ont pas complètement correspondu aux sinistres subis par les habitants.
Comme vous l’avez rappelé, cher collègue, un groupe de travail actif a été constitué. Il a réuni, autour de son président Eric Doligé et de son rapporteur Jean-Claude Frécon, nos collègues Nicole Bricq, Adrien Gouteyron, Jean-Jacques Jégou, Aymeri de Montesquiou et Bernard Vera. Ce groupe de travail a formulé dans son rapport un ensemble d’observations et de recommandations.
À mon sens, nous pouvons interpréter l’interpellation de notre collègue Jean-Pierre Sueur comme un appel à réponse, sur la base du rapport que nous avons déposé. Nous nous sommes efforcés d’analyser le problème sur le terrain, même si nous ne sommes pas parvenus à en déterminer l’ampleur financière exacte. Un travail d’expertise complémentaire est donc nécessaire.
Par conséquent, nous souhaitons connaître la position du Gouvernement sur le sujet.
Mme la présidente. Quel est donc l’avis du Gouvernement ?
Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État. Le programme « Prévention des risques » a pour objet de mettre en œuvre des actions visant à limiter l’exposition des populations à de tels risques. Mais il ne fixe pas les crédits d’indemnisation des victimes.
Un débat avait effectivement eu lieu sur le sujet l’année dernière et Mme Keller a rappelé qu’un rapport très complet avait été établi à cette occasion.
En fait, une telle question relève de la compétence du ministère de l'intérieur, qui avait d’ailleurs agi en 2003, en permettant la reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle pour 4 300 communes. Si l’on avait appliqué les critères classiques, seulement 200 communes auraient pu faire l’objet d’une telle reconnaissance.
Dans ces conditions, si vous estimez que de nouvelles indemnisations s’imposent, il faut en saisir le ministère de l'intérieur. Les crédits que vous évoquez ne relèvent pas du programme « Prévention des risques ».
Mme la présidente. La parole est à M. Éric Doligé, pour explication de vote.
M. Éric Doligé. Il est toujours désagréable, lorsqu’on dépose un rapport que l’on estime de qualité et qui a été approuvé sur toutes les travées de la Haute Assemblée, de constater les difficultés de mise en application des dispositions proposées. Nous soulevons de véritables problèmes, et celui dont nous débattons actuellement en est un.
Des mesures doivent être prises pour répondre aux injustices ou anomalies que nombre de nos concitoyens peuvent rencontrer en pratique. Et ce n’est pas fini… C’est pourquoi beaucoup de recommandations du groupe de travail ont pour objet d’éviter que de tels problèmes ne se reposent dans les mêmes proportions à l’avenir.
Je souhaite vous faire part de quelques réflexions sur l’amendement qui vient d’être présenté par M. Sueur.
Pour ma part, j’ignore si la somme proposée par les auteurs de cet amendement, c'est-à-dire 180 millions d’euros, est pertinente. Peut-être aurions-nous besoin d’approfondir la réflexion sur le sujet pour parvenir à une juste estimation. Mais admettons que cette somme soit justifiée…
Comment les auteurs de l’amendement proposent-ils de dégager 180 millions d’euros ? En réduisant de moitié les crédits de fonctionnement du ministère ! Si nous retenions une telle suggestion, vos services éprouveraient sans doute quelques difficultés pour fonctionner, madame la secrétaire d’État. Peut-être cela permettrait-il de réduire vos émissions de CO2 (Sourires), mais convenons que cela poserait tout de même un certain nombre de problèmes. Nous avons besoin que le ministère fonctionne correctement, surtout en ce moment. Nous ne pouvons donc pas toucher à cette ligne budgétaire.
Par ailleurs, comme vous l’avez souligné à juste titre, madame la secrétaire d’État, la question dont nous débattons relève de la compétence du ministère de l'intérieur. Je suis donc un peu gêné, puisque je dois moi-même intervenir dans le débat sur les missions relevant de ce ministère. Cela m’ennuierait donc de redéposer ces trois amendements et de mettre M. le ministre de l’intérieur en difficulté.
Aussi, pour sortir de ce problème, je suggère que la présidence du Sénat s’engage à organiser un débat d’initiative sénatoriale sur le sujet dès le début de l’année 2010, si toutefois nous parvenons à trouver un créneau, car l’ordre du jour s’annonce chargé… Il me semble indispensable de pouvoir en débattre à partir du rapport du groupe de travail. Comme la question intéresse les ministères chargés de l’intérieur, de l’environnement et du budget, il faudrait que les trois ministres concernés soient présents. C’est la proposition que je vous soumets.
Madame la secrétaire d’État, j’ai bien compris que nous ne pouvions pas prélever 180 millions d’euros sur votre ligne budgétaire.
M. Jean-Pierre Sueur. Si c’est moins, nous prendrons quand même ! (Sourires.)
M. Éric Doligé. Certes, mon cher collègue ! Nous pourrions par exemple y consacrer l’euro symbolique pour prouver notre volonté d’avancer sur le dossier. (Nouveaux sourires.)
Quoi qu’il en soit, il serait tout de même souhaitable que le Gouvernement émette un avis favorable sur l’un des deux amendements suivants, car ils me paraissent relativement logiques.
Mme la présidente. La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote.
Mme Nicole Bricq. Les seules batailles perdues sont celles que l’on ne mène pas. Vous me permettrez donc de poursuivre la bataille que nous menons ici-même depuis 2004.
Le rapport du groupe de travail qui s’est réuni sous la haute autorité de notre collègue Éric Doligé a un titre particulièrement pertinent : Sécheresse de 2003 : un passé qui ne passe pas. C’est exactement de cela qu’il s’agit !
Madame la secrétaire d’État, vous avez avancé un argument technique. Mais la LOLF étant ce qu’elle est, nous agissons comme nous pouvons dans ce cadre.
Peut-être nos trois amendements portent-ils sur des sujets qui ne relèvent pas de la compétence du ministère de l'écologie. Mais nous savons bien que l’acteur-clé en la matière est le ministère du budget. Il faudrait donc un accord entre les trois membres compétents du Gouvernement, c'est-à-dire le ministre de l’écologie, car l’aléa argileux constitue un risque bien identifié, le ministre de l’intérieur, qui dispose des crédits et les transfère aux préfets, et, évidemment, le ministre du budget.
Sur l’ensemble de ces travées, nous avons tous le même objectif : trouver à un moment donné une solution pour solder, même imparfaitement, ce passé, qui est un passif !
Pourquoi avons-nous retenu la somme de 180 millions d’euros ? Je rappelle que l’aide avait été fixée au départ à 180 millions d’euros ; elle a été portée à 218 millions d’euros au cours de la navette parlementaire. Nous avons donc opté pour ce chiffre, de manière, j’en conviens, un peu conventionnelle.
Nous devrons bien résoudre le problème à un moment ou à un autre. Vous avez mentionné certains critères, madame la secrétaire d’État. Or tous les interlocuteurs, notamment les associations, que nous avons rencontrés lors de nos visites sur le terrain – je pense en particulier au département de l’Essonne – ont insisté sur l’opacité de ces critères, ainsi que sur leur variabilité selon les départements ; c’est insupportable pour les victimes de la sécheresse ! (M. Jean-Pierre Sueur applaudit.)
Mme la présidente. La parole est à M. Marc Daunis, pour explication de vote.
M. Marc Daunis. Dans la droite ligne de ce qui vient d’être indiqué par notre collègue Nicole Bricq, c'est-à-dire « un passé qui ne passe pas » et des critères opaques, permettez-moi de mentionner un exemple très concret qui concerne mon territoire, les Alpes-Maritimes.
L’ouest du département est rattaché à une station météo située dans le département voisin du Var. Alors que les communes se trouvant à l’est ont été indemnisées, deux communes limitrophes rattachées à la station météo varoise et placées sur la même langue d’argile que les autres – des bureaux de contrôle l’ont démontré – ne l’ont pas été ! Comment voulez-vous expliquer cela à des familles qui ont dû quitter leur maison parce que l’apparition de failles la mettait en péril ?
Madame la secrétaire d’État, il faut entendre non seulement ce qui a été souligné par les auteurs du rapport, mais également la souffrance de certains de nos concitoyens, ainsi que leur incompréhension. Il est grand temps de solder ce passé qui ne passe décidément pas ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
Mme la présidente. L'amendement n° II-128, présenté par M. Sueur, Mme Bricq et M. Frécon, est ainsi libellé :
Modifier comme suit les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
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+ |
- |
+ |
- |
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Infrastructures et services de transports |
|
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Sécurité et circulation routières |
|
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Sécurité et affaires maritimes |
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Météorologie |
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Urbanisme, paysages, eau et biodiversité |
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Information géographique et cartographique |
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Prévention des risques Dont Titre 2 |
10 000 000 |
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10 000 000 |
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Énergie et après-mines |
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Conduite et pilotage des politiques de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer Dont Titre 2 |
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10 000 000 |
|
10 000 000 |
TOTAL |
10 000 000 |
10 000 000 |
10 000 000 |
10 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.
M. Jean-Pierre Sueur. Je souhaite tout d’abord revenir sur les propositions qui viennent d’être formulées.
Notre collègue Éric Doligé suggère qu’un débat soit organisé au début de l’année 2010. Nous sommes évidemment d'accord sur le principe ; nous sommes toujours preneurs de débats. D’ailleurs, je rappelle que la proposition de loi déposée en 2004 par Nicole Bricq sur le sujet avait donné lieu à une discussion. Il y a eu, ensuite, le débat sur l’aide exceptionnelle en 2006. Enfin, la question est évoquée lors de l’examen de chaque projet de loi de finances.
Toutefois, de notre point de vue, il n’est pas possible de continuer à débattre et à poser le problème sans prendre de décision concrète. Certes, ce serait très bien si une décision était prise au mois de janvier. Mais nous sommes actuellement en train d’examiner le projet de loi de finances. Monsieur le président de la commission des finances, ne vous paraîtrait-il pas juste que nous tentions de trouver une solution avant la fin de ce débat budgétaire ?
Madame la secrétaire d’État, vous avez indiqué qu’une telle question relevait de la compétence du ministère de l'intérieur. Mais convenez que le ministère chargé de l’environnement est aussi un peu concerné… Et, de toute manière, comme l’a très justement rappelé Nicole Bricq, cela dépend également du ministère du budget.
Vous comprenez bien que nous ne pouvons pas déposer d’amendements sur les crédits affectés aux missions relevant de la compétence du ministre de l’intérieur : d’abord, il me semble que le délai limite est expiré ; ensuite, et surtout, je crains que M. le ministre ne nous apporte une réponse du même ordre.
En revanche, si le Gouvernement en a la volonté politique, il a la possibilité de formuler des propositions d’ici à la fin de l’examen du présent projet de loi de finances. Et je vous demande vraiment de le faire. Le rapport du groupe de travail a été approuvé par des sénateurs de tous les groupes. Il s’agit d’une question qui concerne tout le monde. Nous avons des compatriotes sinistrés et en grande difficulté dans différents départements ; il est nécessaire d’agir.
Le coût du dispositif que nous proposons à l’amendement n° II-128 est beaucoup moins élevé, madame la secrétaire d’État. Il s’agit simplement de reprendre l’excellente recommandation n° 13 du rapport d’information rédigé par Mme Fabienne Keller et M. Jean-Claude Frécon, sous la présidence de M. Éric Doligé : nous suggérons de mettre en œuvre une procédure d’alerte spécifique des maires des communes situées en zone d’aléa argileux avant la fin de l’année 2010. C’est donc une mesure de prévention.
Mais si nous voulons que cette procédure d’alerte soit effective et n’en reste au stade de pure clause verbale, il faut mobiliser quelques crédits. Selon nous, cette idée est tout à fait opportune si nous souhaitons pouvoir prévenir des sinistres comme celui auquel nous avons été confrontés en 2003, qui s’est reproduit depuis, même si c’était avec une moindre ampleur, et qui peut se reproduire demain.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Fabienne Keller, rapporteur spécial. La commission a constaté que les leçons de 2003 n’avaient effectivement pas été tirées : les constructions et les plans d’occupation des sols sont toujours marqués par une absence de mesures de prévention. Pourtant, dans la mémoire collective, il y a désormais une bonne connaissance des problèmes liés aux sous-sols argileux et des risques d’effondrement. C’est, je crois, ce qui motive les auteurs de cet amendement. Mais, là encore, nous ne percevons pas très bien la justification de la somme proposée.
En revanche, sur le fond, nous nous sommes aperçus que les dispositifs destinés à prévenir les communes ne fonctionnaient pas. Il s’agit pourtant d’un risque dont l’ampleur est désormais avérée.
Dans ces conditions, madame la secrétaire d’État, quelles démarches comptez-vous engager et, le cas échéant, quels crédits souhaitez-vous mobiliser pour que l’on cesse d’accorder des autorisations de construire sur des sols dont l’instabilité est non seulement connue, mais en plus amenée à s’aggraver du fait du réchauffement climatique ?
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État. La recommandation n° 13 du groupe de travail visant à mettre en œuvre une procédure d’alerte assortie de recommandations pour les maires de communes situées en zone d’aléa argileux est excellente.
Nous avons d’ores et déjà commencé à travailler sur le sujet et élaboré un guide et soixante-cinq cartes d’aléas, qui sont désormais disponibles sur internet. Mais il faut aller plus loin sur la question du dispositif d’alerte. Nous œuvrons actuellement avec Météo France à la diffusion d’un système d’information ; nous vous aviserons de l’évolution des travaux.
Toutefois, a priori, la mobilisation de crédits spécifiques pour la mise en place de ce dispositif ne semble pas nécessaire, car cela peut être réalisé avec les crédits existants. Pour une fois, nous ne réclamons pas de crédits supplémentaires !
Mme la présidente. La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote.
Mme Nicole Bricq. Madame la secrétaire d’État, là, vous êtes directement concernée et vous répondez favorablement à notre demande. Néanmoins, un calendrier serait appréciable dans la mesure où la mise en place de la procédure d’alerte à l’intention des maires ne progresse pas très vite. Il faudrait donc que vous vous engagiez sur un calendrier.
Mme la présidente. La parole est à M. Éric Doligé, pour explication de vote.
M. Éric Doligé. Je partage les arguments présentés par Mme Bricq. Je souhaite néanmoins revenir sur les propos de M. Sueur relatifs à l’amendement précédent. Il a été fait allusion aux difficultés à trouver les crédits nécessaires et je me suis abstenu lors du vote.
Toutefois, si un tel amendement venait à être représenté dans les trois prochains mois et que le Gouvernement ne dispose toujours pas d’un chiffrage précis, je voterai cet amendement. Nous ne pouvons pas continuer à ne pas suivre les recommandations qui figurent dans nos rapports, à nous parjurer de la sorte ! Nous sommes conscients de la réalité, mais nous n’en connaissons pas le montant exact. (Très bien ! sur les travées du groupe socialiste.)
Je souhaite que, d’ici à la fin du premier trimestre 2010, un chiffrage soit réalisé et que l’on essaye de procéder à un début d’affectation de crédits, afin de pouvoir répondre aux drames sur le terrain.
Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État. Nous réalisons vingt cartes d’aléas par an. Je vous propose, madame Nicole Bricq, de vous faire, dans trois mois, un rapport complet, accompagné d’un calendrier sur la mise en place du dispositif d’alerte élaboré avec Météo France.
Il est vrai que, souvent, l’État ne suit pas les suggestions des rapports.
Mme la présidente. La parole est à M. Éric Doligé.
M. Éric Doligé. Je me permets de revenir sur les 180 millions d’euros. Je le répète, si un amendement de même nature est présenté à nouveau par mes collègues sur un texte quelconque pour essayer de faire face à cette situation, et si nous n’avons pas, dans trois mois, une réponse précise – pas nécessairement 180 millions d’euros ! –, je le voterai. Je rappelle que l’on a su dégager quelque 200 millions d’euros il y a un an ou deux.
Mme la présidente. La parole est à Mme Nicole Bricq.
Mme Nicole Bricq. Dans la mesure où Mme la secrétaire d’État s’engage de façon ferme à produire un état des lieux dans trois mois, nous retirons notre amendement.
Mme la présidente. L’amendement n °II–128 est retiré.
L'amendement n° II-151, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Modifier comme suit les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
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+ |
- |
+ |
- |
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Infrastructures et services de transports |
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7 172 821 |
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7 172 821 |
Sécurité et circulation routières |
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Sécurité et affaires maritimes |
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Météorologie |
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Urbanisme, paysages, eau et biodiversité |
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Information géographique et cartographique |
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Prévention des risques Dont Titre 2 |
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Énergie et après-mines |
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Conduite et pilotage des politiques de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer Dont Titre 2 |
7 172 821 7 172 821 |
|
7 172 821 7 172 821 |
|
TOTAL |
7 172 821 |
7 172 821 |
7 172 821 |
7 172 821 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Dominique Bussereau, secrétaire d’État. Cet amendement vise à tirer les conséquences de la loi sur le transfert des parcs de l’équipement aux départements, qui a été longuement discutée au sein de la Haute Assemblée.
La plupart des collectivités territoriales, notamment la mienne, vont réaliser des transferts complets avant le 15 décembre ; la date a d’ailleurs été un peu retardée. Mais, au jour d’aujourd’hui, nous estimons que 170 ouvriers des parcs ne seront pas transférés au 1er janvier 2010, pour diverses raisons. Afin qu’ils continuent d’être rémunérés, nous sollicitons le transfert de crédits. Tel est l’objet du présent amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Gérard Miquel, rapporteur spécial. Ce transfert de crédits correspond à la masse salariale des personnels des parcs de l’équipement non transférés aux départements, soit 170 ouvriers, qui seront affectés dans d’autres services du ministère pour assurer des missions d’entretien, d’exploitation des routes et de maintenance.
La commission a émis un avis favorable.
Mme la présidente. La parole est à M. Gérard Bailly, pour explication de vote.
M. Gérard Bailly. Je profite de cet amendement pour attirer l’attention de M. le secrétaire d’État sur ce transfert. Hier, M. Bussereau était dans le Jura ; nous avons évoqué bien des sujets, mais pas celui-ci.
Aujourd’hui, il est tout à fait envisageable que les parcs de l’équipement soient transférés aux départements. Mais lorsqu’on demande à la DRIRE, service de l’Etat, s’il est prévu de faire appel aux moyens humains et matériels du parc pour les routes encore à la charge par l’Etat, on nous répond que l’État peut s’engager pour 2010, mais pas au-delà. Comment un département pourrait-il s’engager au-delà de 2010 à reprendre la totalité des hommes et du matériel du parc s’il n’existe pas de garanties de l’État en ce qui concerne les routes nationales non transférées ?
Monsieur le secrétaire d’État, comptez-vous donner des consignes aux différentes DRIRE pour clarifier la situation ? Nous attendons votre réponse avant de décider de l’importance du transfert.
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. L’exemple du Jura est intéressant : il est révélateur des problèmes qu’engendre l’articulation entre l’ancien réseau routier d’État et le réseau départemental.
Naturellement, les directions interdépartementales des routes utiliseront, quand ce sera nécessaire, des personnels des parcs de l’équipement. Les besoins sont très importants dans les départements.
On peut aussi s’interroger sur le transfert aux SDIS de personnels d’un certain nombre de départements ; je pense notamment aux mécaniciens, qui pourraient faire une deuxième carrière au service du département dans le cadre de missions différentes.
Je souhaite enfin évoquer un sujet porté ici par M. Sueur et par M. Derosier à l’Assemblée nationale. Nous sommes en train d’achever le décret d’homologie pour que ces ouvriers de l’équipement, qui ont un statut très particulier, puissent se voir appliquer le statut de la fonction publique territoriale.
Nous règlerons les difficultés au coup par coup, quand elles surviendront, mais je vous remercie d’avoir souligné ce problème devant la Haute Assemblée.
Mme la présidente. L'amendement n° II-13, présenté par MM. Lambert, Miquel et Collin et Mme Keller, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Modifier comme suit les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Infrastructures et services de transports |
1.562.100 |
|
1.562.100 |
|
Sécurité et circulation routières |
|
1.562.100 |
|
1.562.100 |
Sécurité et affaires maritimes
|
|
|
|
|
Météorologie
|
|
|
|
|
Urbanisme, paysages, eau et biodiversité
|
|
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|
Information géographique et cartographique
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Prévention des risques Dont titre 2 |
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Energie et après-mines |
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Conduite et pilotage des politiques de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer Dont titre 2 |
|
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TOTAL |
1.562.100 |
1.562.100 |
1.562.100 |
1.562.100 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Gérard Miquel, rapporteur spécial. Cet amendement a pour objet de ramener le coût du dispositif du « permis à un euro par jour » à un montant plus réaliste et d’affecter la somme correspondante au renforcement du soutien au transport combiné.
Ledit dispositif sera opportunément renforcé en 2010 par la prise en charge directe par l’Etat du cautionnement de 20 000 nouveaux prêts, afin de mieux cibler les familles défavorisées. Les hypothèses utilisées pour estimer le coût total à 10,05 millions d’euros sont toutefois optimistes ou trop souples. D’une part, elles reposent sur l’octroi de 92 000 prêts non cautionnés par l’État, alors que les projections pour 2009 sont au mieux de 75 000 prêts. D’autre part, le taux prévisionnel d’appel de la caution de l’État correspond au taux de défaut des prêts de 12,5 %.
Or le dispositif analogue du prêt étudiant garanti par l’État mis en place fin 2008 par le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche repose sur un taux de défaut de 5 %, soit le taux constaté pour le prêt à la consommation, alors que son plafond est sensiblement supérieur – 15 000 euros – au montant moyen des prêts pour le permis de conduire : 1124 euros.
Il est donc proposé de retenir les hypothèses suivantes, qui demeurent volontaristes : 85 000 prêts non cautionnés, soit un coût de 6 689 500 euros ; un taux de provision de cautionnement de 8 %, soit un coût de 1 798 400 euros. Au total, le coût du dispositif serait de 8 487 900 euros, soit 1 562 100 euros de moins que dans la prévision inscrite dans le projet de budget. Il est proposé d’affecter cette somme au soutien au transport combiné de marchandises, financé sur l’action 13 du programme 203 et qui bénéficie en 2010 d’une enveloppe supplémentaire de 8 millions d’euros dans le cadre de l’engagement national pour le fret ferroviaire.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. Le permis à un euro, très bonne mesure adoptée par le Gouvernement précédent pour permettre aux jeunes qui n’ont pas les moyens de passer le permis de conduire, comportait une difficulté : il reposait sur un système de cautionnement, alors que ce sont précisément les familles les plus modestes qui n’ont pas accès au cautionnement. C’était absurde et le système ne fonctionnait pas de façon satisfaisante.
Nous avons donc mis au point, avec la Caisse des dépôts et consignations, un système de cautionnement qui permettra à tous les jeunes, même ceux dont la famille ne peut se porter caution, d’avoir accès au permis à un euro par jour, ce qui est un facteur de démocratisation.
Le fait de ne pas avoir de permis de conduire constitue souvent pour les jeunes un frein à la vie active et au premier emploi, ce qui les place dans une situation extrêmement difficile. Des crédits sont donc nécessaires !
La commission des finances a réalisé un travail tout à fait intéressant à ce sujet. Nous avions évalué le coût du dispositif à 10,05 millions d’euros, en anticipant 92 000 prêts à cautionner. Mais le taux de provisionnement de 8 % proposé apparaît suffisant. Je propose donc à la commission des finances de rectifier son amendement pour prévoir un coût de 1 011 600 euros. Cela permettrait aux jeunes de passer le permis et répondrait en même temps à la demande de la commission des finances.
Mme la présidente. Monsieur le rapporteur spécial, acceptez-vous de rectifier l’amendement dans le sens proposé par M. le secrétaire d’État ?
M. Gérard Miquel, rapporteur spécial. Oui, madame la présidente, mais il y a une petite erreur de calcul : c’est 1 011 200 euros !
Mme la présidente. Vous êtes d’accord avec ce chiffre, monsieur le secrétaire d’État ?
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. Je fais toujours confiance à la commission des finances du Sénat !
Mme la présidente. Je suis donc saisie de l'amendement n° II-13 rectifié, présenté par MM. Lambert, Miquel et Collin et Mme Keller, au nom de la commission des finances, qui est ainsi libellé :
Modifier comme suit les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Infrastructures et services de transports |
1.011.200 |
|
1.011.200 |
|
Sécurité et circulation routières |
|
1.011.200 |
|
1.011.200 |
Sécurité et affaires maritimes
|
|
|
|
|
Météorologie
|
|
|
|
|
Urbanisme, paysages, eau et biodiversité
|
|
|
|
|
Information géographique et cartographique
|
|
|
|
|
Prévention des risques Dont titre 2 |
|
|
|
|
Energie et après-mines |
|
|
|
|
Conduite et pilotage des politiques de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer Dont titre 2 |
|
|
|
|
TOTAL |
1.011.200 |
1.011.200 |
1.011.200 |
1.011.200 |
SOLDE |
0 |
0 |
Je le mets aux voix.
(L'amendement est adopté.)
Mme la présidente. L'amendement n° II-119, présenté par M. Courteau, au nom de la commission de l'économie, est ainsi libellé :
Modifier comme suit les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
+ |
- |
+ |
- |
|
Infrastructures et services de transports |
||||
Sécurité et circulation routières |
||||
Sécurité et affaires maritimes |
||||
Météorologie |
||||
Urbanisme, paysages, eau et biodiversité |
||||
Information géographique et cartographique |
||||
Prévention des risques Dont Titre 2 |
600 000 |
600 000 |
||
Énergie et après-mines |
600 000 |
600 000 |
||
Conduite et pilotage des politiques de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer Dont Titre 2 |
||||
TOTAL |
600 000 |
600 000 |
600 000 |
600 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à M. Roland Courteau, rapporteur pour avis.
M. Roland Courteau, rapporteur pour avis de la commission de l’économie. Cet amendement a pour objet d'abonder de 600 000 euros les crédits du programme 181 « Prévention des risques » de l’action 09 « Contrôle de la sûreté nucléaire et de la radioprotection ».
Cet abondement de crédits est destiné à contribuer au financement des dépenses de rémunération du personnel des commissions locales d'information, ou CLI, instituées auprès des sites accueillant des installations nucléaires de base qui sont constituées sous la forme d'associations.
En effet, l'article 22 de la loi du 13 juin 2006 relative à la transparence et à la sécurité en matière nucléaire prévoit que les CLI dotées de la personnalité juridique peuvent recevoir une partie du produit de la taxe sur les installations nucléaires de base.
Dans l'attente de l'instauration de cette affectation de recettes par une loi de finances, il est proposé d'apporter pour l'exercice 2010 une subvention budgétaire à hauteur des besoins de la douzaine de CLI aujourd'hui dotées de la personnalité juridique.
Cet abondement de 600 000 euros est gagé par une réduction à due concurrence des crédits du programme 174 « Énergie et après-mines », répartie entre les actions du programme au prorata de leur poids budgétaire respectif, à l'exclusion de l'action 04 « Gestion économique et sociale de l'après-mines ».
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Fabienne Keller, rapporteur spécial. M. le rapporteur pour avis de la commission de l’économie propose d’abonder le financement des commissions locales d’information. Ces dernières connaissent, il est vrai, un développement de leur activité, ce dont nous nous réjouissons. Elles sont néanmoins déjà financées par l’intermédiaire de l’Autorité de sûreté nucléaire.
La commission des finances aimerait connaître l’avis du Gouvernement et obtenir des précisions sur ces différents financements.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État. Je partage l’ambition d’assurer un financement à la hauteur et pérenne des commissions locales d’information.
Nous ne rencontrerons pas de difficulté l’année prochaine pour financer les CLI puisque l’Autorité de sûreté nucléaire dispose des ressources nécessaires. Pour autant, vous pouvez compter sur moi pour porter ce débat lors des prochaines négociations budgétaires qui fixeront le plan de financement triennal pour les années 2011, 2012 et 2013.
J’ajoute que cet amendement nous pose des difficultés, puisque le gage proposé sur le programme 174 touche des actions qui concernent la lutte contre les changements climatiques menées par l’ADEME et l’ANDRA. Nous avons dû faire face à quelques dépenses imprévues pour ce programme ; je pense, notamment, à la fermeture de la cokerie de Carling.
Je demande donc le retrait de cet amendement. À défaut, je me verrais contrainte d’émettre un avis défavorable.
Mme la présidente. Monsieur le rapporteur pour avis, l'amendement n° II-119 est-il maintenu ?
M. Roland Courteau., rapporteur pour avis. Je ne peux pas consulter la commission de l’économie, mais je prends la responsabilité de retirer cet amendement.
Mme la présidente. L'amendement n° II-119 est retiré.
Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Écologie, développement et aménagement durables » figurant à l’état B.
Je n’ai été saisie d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.
Je mets aux voix ces crédits, modifiés.
(Ces crédits sont adoptés.)
contrôle et exploitation aériens
Mme la présidente. Nous allons procéder au vote des crédits du budget annexe « Contrôle et exploitation aériens » figurant à l’état C.
État c
(En euros) |
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Mission |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
Contrôle et exploitation aériens |
1 952 328 588 |
1 937 460 588 |
Soutien aux prestations de l’aviation civile |
1 304 728 588 |
1 302 108 588 |
Dont charges de personnel |
1 100 475 588 |
1 100 475 588 |
Navigation aérienne |
513 799 000 |
492 929 000 |
Transports aériens, surveillance et certification |
56 619 000 |
61 876 000 |
Formation aéronautique |
77 182 000 |
80 547 000 |
Mme la présidente. Je n’ai été saisie d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.
Je mets aux voix les crédits de la mission « Contrôle et exploitation aériens ».
(Ces crédits sont adoptés.)
Compte spécial : contrôle et sanction automatisés des infractions au code de la route
Mme la présidente. Nous allons procéder au vote des crédits du compte spécial « Contrôle et sanction automatisés des infractions au code de la route », figurant à l’état D.
État D
(en euros) |
||
Mission |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
Contrôle et sanction automatisés des infractions au code de la route |
212 050 000 |
212 050 000 |
Radars |
196 000 000 |
196 000 000 |
Fichier national du permis de conduire |
16 050 000 |
16 050 000 |
Mme la présidente. Je n’ai été saisie d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.
Je mets aux voix les crédits de ce compte spécial « Contrôle et sanction automatisés des infractions au code de la route ».
(Ces crédits sont adoptés.)
Compte spécial : avances au fonds d’aide à l’acquisition de véhicules propres
Mme la présidente. Nous allons procéder au vote des crédits du compte spécial « Avances au fonds d’aide à l’acquisition de véhicules propres », figurant à l’état D.
État D
(en euros) |
||
Mission |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
Avances au fonds d’aide à l’acquisition de véhicules propres |
339 600 000 |
339 600 000 |
Avances au titre du paiement de l’aide à l’acquisition de véhicules propres |
339 600 000 |
339 600 000 |
Avances au titre du paiement de la majoration de l’aide à l’acquisition de véhicules propres en cas de destruction simultanée d’un véhicule de plus de quinze ans |
0 |
0 |
Mme la présidente. Je n’ai été saisie d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.
Je mets aux voix les crédits du compte spécial « Avances au fonds d’aide à l’acquisition de véhicules propres ».
(Ces crédits sont adoptés.)
Mme la présidente. J’appelle en discussion l’amendement tendant à insérer un article additionnel après l’article 52 bis qui est rattaché pour son examen aux crédits de la mission « Écologie, développement et aménagement durables ».
Article additionnel après l'article 52 bis
Mme la présidente. L'amendement n° II-130, présenté par M. Sueur, Mme Bricq et M. Frécon, est ainsi libellé :
I. - Après l'article 52 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le reliquat des crédits votés dans le cadre de la loi n° 2005-1719 du 30 décembre 2005 de finances pour 2006 afin de créer une dotation exceptionnelle supplémentaire pour indemniser les victimes de la sécheresse de 2003 sera exclusivement consacré à apporter des aides à ces victimes.
II. - En conséquence, faire précéder cet article de l'intitulé :
« Mission écologie, développement et aménagement durables »
La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.
M. Jean-Pierre Sueur. Cette fois-ci, il s’agit de crédits très limités par rapport à la somme nécessaire pour indemniser les personnes qui se trouvent encore dans une situation de très grande difficulté à la suite de la sécheresse de 2003.
Il existe un reliquat de crédits, lequel s’élève, d’après le rapport d’information fait au nom de la commission des finances du Sénat, à 1,833 million d’euros.
Il s’agit, madame la secrétaire d'État, de fonds qui existent. Vous ne pouvez donc pas nous objecter que la mesure a un coût et que vous ne disposez pas de crédits disponibles.
Dans l’excellent rapport de Mme Fabienne Keller et de M. Jean-Claude Frécon, fait au nom de la commission présidée par M. Doligé, la recommandation n° 9 est « que la totalité du reliquat de fonds constaté au titre de la procédure exceptionnelle d’indemnisation soit exclusivement consacré au versement des aides aux victimes de la sécheresse ».
Cet amendement vise à reprendre cette très bonne idée, qui apparaît logique puisque des crédits exceptionnels ont été dégagés pour ces sinistrés de la sécheresse et que la mesure n’aura aucun coût pour le budget de l’État car les fonds sont disponibles.
J’espère, madame la secrétaire d'État, que cet amendement recueillera votre accord.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Fabienne Keller, rapporteur spécial. Effectivement, ce point a été traité dans le cadre du groupe de travail. Le reliquat évoqué est d’ailleurs clairement inscrit sur la ligne prévue pour l’indemnisation des victimes. Il n’est donc pas nécessaire, techniquement, de voter un tel amendement pour que la somme soit affectée à cet objet.
Madame la secrétaire d'État, pourriez-vous néanmoins rassurer M. Sueur et confirmer que ce reliquat de 1,833 million d’euros sera bien exclusivement consacré à l’indemnisation des victimes de la sécheresse ?
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État. Cette disposition ne relève pas du domaine législatif, mais je m’engage très clairement à ce que le reliquat soit affecté à l’indemnisation des victimes. Cela ne pose aucune difficulté.
Mme la présidente. L'amendement n° II-130 est-il maintenu ?
Mme Nicole Bricq. Ce que nous souhaitons, c’est que ce reliquat modeste soit affecté aux victimes de la sécheresse, d’après des critères que nous contestons, d’ailleurs, mais il n’y en a pas d’autres !
Nous avons constaté qu’il existait une inégalité de traitement selon les préfets. Il faut que ces sommes, qui ont été votées, soient effectivement attribuées aux victimes.
Madame la secrétaire d'État, nous vous faisons confiance, mais il faut maintenant passer aux actes.
Cela étant, nous retirons l’amendement.
Mme la présidente. L'amendement n° II-130 est retiré.
Mes chers collègues, nous avons achevé l’examen des crédits de la mission « Écologie, développement et aménagement durables », du budget annexe « Contrôle et exploitation aériens », du compte spécial « Contrôle et sanction automatisés des infractions au code de la route », ainsi que du compte spécial « Avances au fonds d’aide à l’acquisition des véhicules propres ».
La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Monsieur le secrétaire d’État, ce matin, la commission des finances a examiné un projet de décret d’avance pour le budget annexe « Contrôle et exploitation aériens ». Ce décret prévoit une autorisation pour un emprunt de 65 millions d’euros sur huit ans alors que, semble-t-il, nous n’avons besoin de trésorerie que pendant une huitaine de jours.
La commission des finances a donc émis un avis défavorable sur ce projet pour exprimer le souhait que vous trouviez à l’avenir d’autres modes de financement que le recours à l’emprunt lorsqu’il s’agit d’une trésorerie de quelques jours.
La lourdeur administrative ne doit pas conduire à souscrire de nouveaux emprunts à moyen terme, alors que le besoin de trésorerie se fait sentir à très court terme. De grâce, faites en sorte de trouver des moyens plus appropriés pour assurer les fins de mois !
Mme la présidente. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures quarante.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-neuf heures quarante, est reprise à vingt et une heures quarante, sous la présidence de M. Guy Fischer.)
PRÉSIDENCE DE M. Guy Fischer
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
Nous poursuivons la discussion du projet de loi de finances pour 2010, adopté par l’Assemblée nationale.
Enseignement scolaire
M. le président. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Enseignement scolaire », et article 54 ter.
La parole est à M. Gérard Longuet, rapporteur spécial.
M. Gérard Longuet, rapporteur spécial de la commission des finances. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, je me réjouis tout d’abord de la présence au banc du Gouvernement des deux ministres en charge de cette mission « Enseignement scolaire », qui concerne, pour l’essentiel, la rue de Grenelle, mais aussi la rue de Varenne, pour rester dans le VIIe arrondissement de Paris.
Mon intervention au nom de la commission des finances sera sobre et s’articulera autour de trois points.
Tout d’abord, cher Luc Chatel, vous avez poursuivi la mise en œuvre d’une politique d’enseignement personnalisée, s’efforçant de mobiliser les moyens de l’éducation nationale vers la réussite individuelle des élèves, dans la ligne du projet de loi que François Fillon avait fait voter en 2005, lorsqu’il était ministre de l’éducation nationale. J’évoque ces orientations parce qu’elles témoignent de la volonté de votre ministère et des enseignants français de s’intéresser avant tout à ceux dont ils ont la charge.
Ces orientations se sont traduites par la mise en place des programmes personnalisés de réussite éducative, qui couvrent désormais l’enseignement primaire et les collèges. Vous avez conduit cette réforme à moyens constants, ce qui n’est pas une mince performance !
Vous avez mis en place des aides personnalisées en CM1 et en CM2, grâce au redéploiement des heures dégagées par la suppression des classes du samedi matin : ces aides permettent aux élèves en difficulté de surmonter les obstacles qui peuvent freiner durablement leur acquisition du socle de connaissances.
Vous avez également mis en place un accompagnement éducatif pour les élèves de l’éducation prioritaire, dans l’enseignement primaire et au collège. Vous avez réussi cet effort en mobilisant des moyens importants : en 2010, une dotation de près de 280 millions d’euros est prévue au titre de l’accompagnement éducatif, dont 100 millions d’euros pour les heures supplémentaires.
Je voudrais évoquer une quatrième mesure, dont la presse s’est fait largement l’écho, et tant mieux : il s’agit de la réussite des stages de remise à niveau pour les élèves de CM1 et de CM2, financés eux aussi à partir d’heures supplémentaires.
Ces deux dernières mesures reposent sur le volontariat, ce qui représente sinon une limite, du moins un élément qui doit nourrir notre réflexion : comment faire en sorte que ce volontariat puisse être étendu et généralisé, du côté tant des élèves que des enseignants ? Je serais heureux de connaître votre position sur cette orientation, monsieur le ministre.
J’ajoute enfin deux observations importantes.
Tout d’abord, la prise en charge continue des élèves handicapés pèse sur votre budget, monsieur le ministre, à hauteur de 300 millions d’euros. La commission des finances s’interroge chaque année sur la légitimité de cette imputation : cette politique relève-t-elle de la mission « Enseignement scolaire » ou devrait-elle être rattachée, pour partie, à une mission regroupant les crédits liés à la solidarité à l’égard de nos compatriotes handicapés.
Ensuite, vous avez-vous-même annoncé, monsieur le ministre, l’introduction de l’aide personnalisée au lycée, dans le cadre de la réforme générale du lycée. Il s’agit de faire des lycées des établissements vivants, disposant de plus d’autonomie et de responsabilités et, par conséquent, de plus de moyens pour accompagner la réussite des projets pédagogiques développés en leur sein.
Cette personnalisation de l’enseignement se double d’une politique beaucoup plus difficile, qui pèse lourdement, en apparence, sur votre ministère et que vous avez su jusqu’à présent traiter sans compromettre la présence effective des enseignants et des adultes devant les élèves ; je veux parler de la réduction des effectifs selon le principe général du non-remplacement d’un départ en retraite sur deux, auquel votre ministère est astreint comme tous les autres, mais dont l’application est beaucoup plus délicate dans le cas de l’éducation nationale.
Les chiffres parlent d’eux-mêmes : ils sont spectaculaires. À la rentrée de 2007, 8 512 postes ont été supprimés. La réforme des décharges envisagée par Gilles de Robien a été abandonnée ; vous vous êtes donc intéressé essentiellement à la réduction du nombre d’enseignants surnuméraires et vous avez tiré parti de la baisse démographique des effectifs du deuxième degré.
En 2008, 11 200 postes ont été supprimés. Votre prédécesseur, M. Xavier Darcos, a utilisé le recours plus large aux heures supplémentaires et, là encore, poursuivi la réduction du contingent des enseignants surnuméraires, c’est-à-dire des enseignants qui, hélas ! n’ont pas d’élèves en face d’eux dans leur discipline. Dès lors, il semble naturel de souhaiter en diminuer le nombre.
Par ailleurs, les années 2007 et 2008 ont été marquées par une politique drastique de reprise de détachements ou de mises à disposition.
Monsieur le ministre, votre administration s’est attaquée, en 2008, au problème extraordinairement difficile de la réorganisation du remplacement. Alors que 13 000 emplois ont été supprimés à la rentrée de 2009, cette réorganisation s’est poursuivie en 2009 par l’optimisation des remplacements et une meilleure mobilisation nationale des capacités de remplacement, sans aller jusqu’à la mise en place de l’agence nationale qui avait été évoquée. Mais je suis persuadé que vous aurez à cœur, dans votre réponse, de nous préciser les raisons de cette décision.
En revanche, nous constatons, en 2009, une diminution des effectifs affectés aux réseaux d’aides spécialisées aux élèves en difficulté, ou RASED, c’est-à-dire à ce soutien nomade apporté à certains élèves. Vous avez, en cours d’année, décidé d’en limiter l’impact, sans doute à raison, car les RASED accompagnent, d’une certaine façon, la politique d’enseignement personnalisé que j’évoquais tout à l’heure et qui constitue assurément une orientation positive.
En 2010, 16 000 suppressions d’emploi sont annoncées. En réalité, la quasi-totalité d’entre elles sont liées à la réforme du recrutement des enseignants. Je ne parlerai pas d’une sorte de jeu comptable… Néanmoins, ce sont les conséquences administratives d’une modification de statut qui vous permettent de réduire les effectifs, sans pour autant diminuer le nombre d’adultes présents face aux élèves.
Comment avez-vous justement réussi – vous-même, monsieur le ministre, et vos prédécesseurs – à poursuivre une politique de réduction des effectifs sans restreindre cette présence des enseignants ? Par le recours aux heures supplémentaires et par la diminution du nombre des enseignants surnuméraires, dont il faut d’ailleurs cesser de faire un mythe ! C’est une réalité, une friction inévitable sur un effectif de plus de 900 000 enseignants. On ne peut que vous savoir gré de cette réduction d’année en année.
En revanche, vous avez développé des formes de présence qui n’apparaissent pas dans les effectifs budgétaires de votre administration. Les personnels d’assistance éducative sont rémunérés sur des crédits de fonctionnement et, heureusement, la diminution du plafond des effectifs de votre administration ne se répercute pas sur ces personnels. Nous comptabilisons ainsi 53 000 assistants d’éducation, 43 500 agents en contrats aidés, plus de 2 100 auxiliaires de vie scolaire qui n’apparaissent pas dans les effectifs ; il faut simplement savoir qu’ils existent !
Le sentiment de la commission des finances – ce sera le troisième point de mon intervention – est que nous arrivons au bout d’un exercice qui a permis au Gouvernement de faire face aux obligations qu’il s’était assignées, avec le soutien du Parlement, en matière d’effectifs de la fonction publique. Toutefois, pour les années 2011 et 2012, il devra vraisemblablement s’attaquer à la réorganisation de l’offre éducative.
Nous connaissons les chiffres des pays de l’Organisation de coopération et de développement économiques, l’OCDE, et nous savons qu’en matière d’enseignement secondaire la France se caractérise par l’année la plus longue en heures de cours et la plus courte en journées de cours. C’est la meilleure façon de mal utiliser les effectifs : ceux-ci sont trop importants pour des années trop lourdes !
Plus de 30 000 départs à la retraite sont annoncés en 2011 et un peu moins de 30 000 en 2012, puisque la pyramide des âges se modifie légèrement. Compte tenu de l’importance de ces chiffres, il est évident, monsieur le ministre, que vous ne pourrez faire face à cette obligation que dans le cadre d’une réflexion sur l’offre éducative et d’une réorganisation de cette offre.
La commission des finances vous propose quelques pistes de réflexion.
Elle vous suggère, par exemple, d’utiliser le Centre national d’enseignement à distance pour répondre à des besoins d’enseignement diversifiés dont les effectifs sont trop dispersés sur le territoire national et, ainsi, d’optimiser les moyens humains dont vous disposez.
Nous pourrions également imaginer des regroupements de filières, en particulier dans les disciplines technologiques et professionnelles, en acceptant le recours à l’internat qui est, en soi, une bonne solution pour toute une série de jeunes s’orientant vers des formations professionnelles extrêmement spécialisées.
Enfin, il serait souhaitable de relancer la bivalence des enseignants pour mieux optimiser, notamment en matière de remplacement, les moyens disponibles.
En conclusion, ayant la responsabilité de ce rapport, au nom de la commission des finances, depuis maintenant quatre ans, je me permets de relancer trois sujets récurrents qui, d’année en année, progressent peu.
Le premier concerne la mise en place des établissements publics d’enseignement primaire, dont le principe avait été retenu dans le cadre de la décentralisation et, précisément, de la loi de 2004 Or nous sommes en 2009 !
Le deuxième sujet est le principe de l’expérimentation en matière d’organisation et de direction des lycées, qui avait également été acté en 2004 et qui n’est toujours pas appliqué.
S’agissant enfin du troisième sujet, la présence des deux ministres – M. Luc Chatel et M. Bruno Le Maire – me réjouit et me rassure. Il s’agit d’assurer une bonne coopération en matière de soutien à l’enseignement technique agricole, pour lequel un certain nombre de promesses ont été tenues lentement, tardivement et incomplètement. Sur ce sujet, messieurs les ministres, j’aurai l’occasion de présenter des amendements ayant pour objet de vous réconcilier, ce qui est naturellement le souhait de votre majorité. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et sur le banc des commissions.)
M. le président. La parole est à M. Thierry Foucaud, rapporteur spécial.
M. Thierry Foucaud, rapporteur spécial de la commission des finances. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, cette intervention ne participera évidemment pas d’un exercice d’autosatisfaction.
C’est peu de dire que la mission « Enseignement scolaire » constitue un élément fondamental de mesure des choix politiques d’un gouvernement : l’école, c’est tout simplement le vécu quotidien de douze millions de jeunes de notre pays et c’est bien à l’aune de la qualité d’un système éducatif que l’on mesure la réalité du progrès social.
Si l’on sait agir pour la santé, pour l’école, pour le logement et pour répondre aux besoins des plus vulnérables, alors on mène une politique de progrès social.
Rapporteur spécial de la commission des finances, qui a adopté le rapport présenté par notre collègue Gérard Longuet, je ne peux partager la logique comptable qui préside, et ce de plus en plus, à la définition de la politique éducative de notre pays.
Nous trouvons, dans ce projet de budget pour 2010, la traduction brutale de cette logique comptable : suppression de 16 000 emplois ; précarisation renforcée des conditions de formation initiale des enseignants ; recherche permanente d’économies diverses tendant à comprimer autant que possible la dépense d’éducation – le débat sur le baccalauréat professionnel en trois ans en est une illustration.
En étant limité à un niveau inférieur à 60 milliards d’euros, le budget de l’enseignement scolaire n’échappe pas à la règle imposée : dans la logique gouvernementale, l’école, et singulièrement l’école publique, doit payer sa part dans l’effort de réduction des déficits, et tant pis pour nos jeunes !
Je le regrette, parce qu’on ne peut réduire la demande sociale d’apprentissage, d’enseignement, d’éducation à de quelconques moyennes, statistiques ou données chiffrées.
Vingt-cinq élèves dans une école du sixième arrondissement de Paris, même si celle-ci n’est pas forcément exempte de subir le processus de suppression de postes observé un peu partout, ce n’est pas pareil que vingt-cinq élèves dans une école du Val-Fourré, ou même vingt élèves dans une classe accueillant les enfants de différentes communes d’un même canton, dans le cadre d’une école de campagne fonctionnant en regroupement pédagogique intercommunal.
De mon point de vue, il faut à chaque fois partir du terrain et ne pas se contenter de la « règle à calcul », si facilement maniée par ceux qui décident des fermetures et ouvertures de classes.
Ce qui est vrai dans ce domaine, c’est que les quelques secteurs où l’on va constater une augmentation des effectifs des équipes éducatives, notamment lorsque le développement démographique l’exige, n’auront pas le nécessaire pour la mise à niveau de leurs moyens, tandis que les secteurs victimes des ajustements à la baisse se retrouveront dangereusement dépourvus. Par exemple, pour les postes qu’il faut créer dans les académies d’outre-mer ou dans celle de Montpellier, on est loin du compte !
Là où l’on ferme des écoles, où l’on réduit l’offre éducative dans les collèges et les lycées, les dégâts risquent fort de s’annoncer irréversibles, notamment dans les zones urbaines sensibles où jouent à plein les effets d’éviction découlant des politiques menées depuis plusieurs années.
Je souhaiterais faire état, ici, de notre légitime inquiétude devant la suppression progressive de la carte scolaire et les aménagements des rythmes scolaires, avec, entre autres, la suppression de l’école le samedi.
Comme on pouvait s’y attendre, la suppression progressive de la carte scolaire a favorisé les effets d’éviction, dont on pouvait craindre qu’ils ne se produisent dès l’annonce de l’expérimentation.
D’ores et déjà, des rapports mettent en évidence que, comme on pouvait le penser, les établissements présumés les plus « difficiles » ont perdu leurs élèves les plus brillants ou les mieux intégrés, phénomène qui permet à quelques établissements plus réputés de se donner bonne conscience tout en ghettoïsant un peu plus encore les établissements d’origine de ces élèves. Même la Cour des comptes le souligne !
En vérité, la mobilité des élèves, que la suppression de la carte scolaire est censée encourager, joue toujours dans le même sens et s’avère susceptible de justifier, demain – et même dès aujourd’hui, dans bien des cas –, la suppression de moyens humains et matériels dans les établissements délaissés. Il s’agit d’une sorte de mobilité asymétrique, que l’on peut rapprocher de la fongibilité asymétrique des crédits de personnel théorisée par la LOLF…
Ce que le Gouvernement attend d’ailleurs des parents d’élèves, c’est qu’ils contribuent « à l’insu de leur plein gré », par les choix et les options qu’ils auront finalement arrêtés eux-mêmes, à la maîtrise de la dépense publique pour l’éducation, dont d’aucuns se félicitent aujourd’hui.
La fermeture de l’école le samedi, alors même que les rythmes scolaires en France ne sont pas aussi insupportables que certains l’affirment et que le nombre de jours de classe y est souvent moins élevé qu’ailleurs – 140 jours de classe par an contre 185 en moyenne dans les pays de l’OCDE –, participe de la même logique.
Outre qu’elle ne change pas grand-chose à la vie des familles, cette fermeture de l’école le samedi permet quelques menues économies – en termes de décharges d’enseignement, par exemple – qui, mises bout à bout, finissent par constituer une source de réduction des dépenses budgétaires.
Je ne suis aucunement convaincu que ces choix politiques, qui trouvent leur traduction budgétaire dans le projet de loi de finances pour 2010, soient les plus propres à nous permettre d’atteindre les objectifs ambitieux de la loi Fillon pour l’avenir de l’école, singulièrement pour ce qui concerne le niveau de formation initiale des élèves. En tant que co-rapporteur spécial des crédits de l’enseignement scolaire, je pense même que c’est tout le contraire qui risque de se produire.
J’aurais pu également évoquer les réseaux d’aides spécialisées aux élèves en difficulté, les RASED, dont l’efficacité, en termes de progression dans les acquisitions scolaires et d’amélioration des compétences cognitives, a été objectivement prouvée. Or vous décidez de ne pas pérenniser le dispositif et continuez de « bricoler » avec les accompagnants scolaires.
Tels sont les commentaires que je souhaitais faire à propos des crédits de la mission « Enseignement scolaire ». On l’aura compris, je n’invite pas le Sénat à aller dans le sens de la commission.
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Carle, rapporteur pour avis.
M. Jean-Claude Carle, rapporteur pour avis de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, je vais essayer, en quelque cinq minutes, de présenter l’avis de notre commission sur les 60 milliards d'euros du projet de budget de l’enseignement scolaire. Je n’aurai pas l’orgueil de dire que chaque minute de mon intervention vaut 12 milliards d’euros ! (Sourires.)
Le projet de budget de l’enseignement scolaire pour 2010 témoigne du maintien de l’effort du Gouvernement en faveur de l’éducation, dans un contexte économique et budgétaire pourtant difficile. Je me félicite de ce que l’objectif de maîtrise des dépenses publiques n’ait pas conduit à l’abandon des réformes ambitieuses dont a besoin le système scolaire et qui visent à donner sa chance à chaque élève.
Les crédits de personnel représentent 93 % du budget de l’enseignement scolaire, et il faudrait y ajouter les rémunérations inscrites sur les crédits d’intervention de la mission.
Autant dire que beaucoup repose sur la politique de ressources humaines, quelle que soit l’importance des réformes pédagogiques, que je ne conteste pas, bien au contraire. Je suis convaincu que la rénovation pédagogique ne verra pas le jour sans une rénovation des ressources humaines. Notre société, où la valeur caractéristique de l’espace-temps semble passée, en quelques décennies, de la journée à la nanoseconde, exige, tant du secteur public que du secteur privé, une réactivité optimale, appuyée sur une connaissance profonde des réalités socioéconomiques.
La modernisation de la gestion des recrutements, des carrières et des compétences des enseignants et des autres personnels doit habiter toutes vos démarches, monsieur le ministre de l’éducation nationale.
Le schéma d’emplois de la mission est très largement issu de la réforme de la « mastérisation ». Je soutiens sans réserve la réforme du recrutement des enseignants. Toutefois, la plus grande attention doit être portée à la définition des maquettes des nouveaux masters, ainsi qu’à l’organisation des stages d’observation et en responsabilité dans les classes, afin que l’élévation du niveau de connaissances s’accompagne vraiment d’un développement parallèle des qualités pédagogiques.
Il me paraît indispensable que tous les nouveaux masters permettent aux étudiants d’acquérir une certaine connaissance de l’organisation du système éducatif et du fonctionnement du marché du travail. Ainsi, les futurs enseignants pourront aider leurs élèves à élaborer un projet professionnel et à choisir l’orientation qui leur convient.
Sous l’impulsion de vos prédécesseurs, monsieur le ministre, notamment de Xavier Darcos, la gestion des ressources humaines de l’éducation nationale s’est améliorée, particulièrement en matière de surnombres disciplinaires. Mais les efforts doivent se poursuivre, surtout en vue d’améliorer les remplacements d’enseignants, tant de courte durée que de plus de quinze jours, dont aujourd’hui personne n’est satisfait.
En outre, il devient urgent de répondre au déficit de médecins et d’infirmiers scolaires. L’exercice libéral ou en hôpital est en effet plus attirant qu’une carrière au sein de l’éducation nationale. Ces difficultés de recrutement sont accrues dans les zones rurales ou les zones urbaines sensibles. Devant cette carence, il me semble souhaitable de contractualiser avec la médecine libérale.
Je salue l’ampleur de la rénovation engagée depuis un an dans l’enseignement primaire. Reste un point qui n’est pas abordé de front par la réforme, mais que je considère pourtant comme capital : le pilotage local de la politique éducative.
La rénovation du statut des directeurs d’école devrait être très rapidement entreprise. Je propose que leur soit attribué un plein statut de chef d’établissement, en adéquation avec les nouvelles responsabilités qui leur sont confiées. Cette transformation irait de pair avec la création des établissements publics d’enseignement primaire, les EPEP.
La loi du 13 août 2004 prévoyait une expérimentation de ce dispositif. Celle-ci était cependant soumise à la publication d’un décret en Conseil d’État, qui n’a toujours pas eu lieu. Je le déplore vivement, monsieur le ministre.
L’ampleur de la réforme entreprise dans le primaire appelle une redéfinition parallèle de la gouvernance. J’ai confiance dans votre volonté, monsieur le ministre, d’agir sur ce terrain.
Vous aurez compris, mes chers collègues, que nous considérons avec beaucoup de bienveillance le projet de budget de l’éducation nationale. Cependant, inquiète du mauvais sort réservé à l’enseignement agricole,…
Mme Nathalie Goulet. Ah !
M. Jean-Claude Carle, rapporteur pour avis de la commission de la culture. … la commission de la culture a émis un avis de sagesse sur les crédits de la mission « Enseignement scolaire ».
Le Gouvernement a entendu nos inquiétudes, comme nous le dira dans quelques instants notre collègue Françoise Férat. Je tiens d'ailleurs à saluer la présence, au banc du Gouvernement, du ministre de l’agriculture, car cela est suffisamment rare pour être noté. (M. le président de la commission de la culture applaudit.)
C’est pourquoi je suis désormais très favorable à l’adoption de ce projet de budget, sous réserve de celle de l'amendement présenté par MM. Longuet et Legendre et de l’engagement du Gouvernement de remédier à la situation inacceptable de l’enseignement agricole. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
M. le président. La parole est à Mme Françoise Férat, rapporteur pour avis.
Mme Françoise Férat, rapporteur pour avis de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, tout au long des neuf années pendant lesquelles j’ai officié en qualité de rapporteur pour avis des crédits de l’enseignement scolaire, je n’ai pu que constater une lente détérioration de la situation de l’enseignement agricole.
L’abondement de 38 millions d’euros des crédits du programme 143 voté par notre assemblée l’an passé m’avait fait espérer en l’avènement d’une ère plus favorable pour l’enseignement agricole. J’ai accueilli avec une certaine déception le projet de loi de finances pour 2010.
Certes, les 38 millions d’euros en question, après un gel de six mois, ont été débloqués et utilisés. Ils ont notamment permis de revaloriser la subvention aux organismes de formation des établissements privés et de réduire le report de charges du temps plein et du rythme approprié. Ces reports avaient atteint un niveau insupportable et minaient la crédibilité des engagements futurs de l’État. Je ne puis que me réjouir de cet apurement, qui avait largement motivé l’amendement que j’avais déposé l’an passé.
Malheureusement, le projet de loi de finances pour 2010 n’a repris qu’une faible partie des 38 millions d’euros octroyés grâce à l’intervention du Sénat. Les crédits du programme 143 enregistrent donc une baisse de 15,6 millions d’euros à périmètre courant.
La situation des établissements du rythme approprié est particulièrement difficile : persiste en effet à leur détriment un report de charges de 8,5 millions d’euros, et la dotation pour 2010 ne prévoit pas la poursuite du rattrapage. Or la subvention versée au rythme approprié comprend la rémunération des enseignants. C’est donc l’offre de formation et la capacité d’accueil des établissements qui sont directement touchées.
De plus, les suppressions de postes d’enseignant sont extrêmement préoccupantes. Ainsi, ce sont 201 emplois d’enseignant qui seraient supprimés, pour 306 départs à la retraite. Deux départs à la retraite d’enseignant sur trois ne seraient donc pas compensés, ce qui est nettement plus sévère que la règle du « un sur deux », vous en conviendrez.
Cette rigueur particulière s’agissant des personnels enseignants ne peut que conduire, inexorablement, à la réduction des effectifs scolarisés.
Entre les rentrées 2005 et 2008, l’enseignement agricole a perdu 5 500 élèves sur un effectif de 170 000 environ. Cette diminution ne peut s’expliquer que par le verrouillage de l’offre, puisque je constate, sur le terrain, combien la demande des familles est forte. Malheureusement, les fermetures de classes s’accélèrent : soixante-cinq sont prévues l’année prochaine, après les vingt-cinq fermetures intervenues cette année.
Ce mouvement de resserrement de l’offre de formation, particulièrement préjudiciable dans les zones rurales, remet en cause la mission d’aménagement du territoire que l’enseignement agricole doit aussi assurer.
Je ne peux m’expliquer cette limitation du volume de l’enseignement agricole, d’autant que ses performances en matière d’insertion professionnelle et de poursuite d’études dans le supérieur sont tout à fait remarquables et reconnues par tous.
Ces succès témoignent de la capacité de l’enseignement agricole à rester à l’écoute des territoires et des mutations du monde économique. Contrairement à l’image trop facilement véhiculée, peu de ses diplômés s’installent comme agriculteurs. Ils poursuivent une grande variété de carrières, y compris dans les services et les métiers du développement durable, qui ne manqueront pas de connaître un essor rapide dans les années à venir.
Sans doute serait-il opportun de trouver pour l’enseignement agricole une nouvelle dénomination qui mettrait en avant son ancrage territorial. Peut-être pourrait-il s’appeler « enseignement technique rural » ou « enseignement de l’environnement et de la ruralité » ? Bref, vous l’avez compris, le concours de la meilleure dénomination est ouvert !
Pour assurer la pérennité de l’enseignement agricole, j’estime nécessaire qu’un vrai régime de coresponsabilité entre les deux ministères de l’agriculture et de l’éducation nationale soit mis en place. C’est là l’esprit même de la LOLF, tant vantée, qui devait permettre d’abattre les cloisonnements administratifs mais qui est, vous en conviendrez, largement battue en brèche dans la pratique.
Une coopération plus étroite avec l’éducation nationale aurait tout son sens. Elle permettrait d’accélérer la diffusion de bonnes pratiques pédagogiques et administratives tout en procurant des économies grâce à la mutualisation des moyens.
J’ai l’espoir qu’en empruntant cette voie il sera possible de regagner des marges de manœuvre budgétaires pour l’enseignement agricole, avant que ne soit menacée sa capacité d’innovation. L’apprentissage des langues, l’information et l’orientation des élèves constituent des domaines dans lesquels des actions concrètes pourraient être rapidement menées. Il pourrait également être envisagé de progresser encore dans l’organisation des concours de recrutement et des épreuves d’examens nationaux.
Cependant, j’en suis particulièrement convaincue, il faut éviter toute absorption au sein de l’éducation nationale : cette solution de facilité n’est souhaitée ni par les enseignants et les formateurs, ni par les familles.
La mutualisation des moyens devra donc impérativement respecter la singularité et la culture propre de chacun de ces deux systèmes d’enseignement.
Déçue du sort réservé, malgré son excellence, à l’enseignement agricole, la commission de la culture avait émis un avis de sagesse sur l’adoption des crédits de la mission « Enseignement scolaire ». Tenant compte de nos critiques, le Gouvernement nous a assuré qu’un amendement serait déposé sur le projet de loi de finances rectificatives pour solder les reports de charges et qu’il soutiendrait celui de nos collègues Gérard Longuet et Jacques Legendre, visant à réduire les suppressions de postes d’enseignant. Au bénéfice de l’adoption de ces deux initiatives, que j’approuve sans réserve, j’émets, à titre personnel, un avis favorable sur l’adoption des crédits de l’enseignement scolaire. (Applaudissements sur les travées de l’Union centriste et de l’UMP.)
M. le président. La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin, rapporteur pour avis.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin, rapporteur pour avis de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, permettez-moi, à titre liminaire, de regretter les conditions difficiles de préparation de mon avis sur le projet de budget de l’enseignement professionnel. Les documents budgétaires demeurent en effet déficients. Certains indicateurs de performance ne sont même pas renseignés. De plus, le ministère n’a pas été en mesure de me fournir en temps utile des données précises sur la rentrée de 2009.
Je me suis attachée, pour ce projet de budget, à faire notamment le point sur la mise en place du baccalauréat professionnel en trois ans. Je souhaite rappeler que je n’étais pas hostile, par principe, à la possibilité de conduire certains élèves en trois ans jusqu’au baccalauréat professionnel, mais que je m’étais inquiétée du sort des élèves les plus fragiles.
Je suis aujourd’hui convaincue que l’enseignement professionnel est profondément déstabilisé par l’onde de choc de la réforme. La précipitation avec laquelle elle a été menée et l’absence de doctrine pédagogique claire sont responsables des dysfonctionnements constatés dans les lycées.
C’est très net, par exemple, pour la mise en œuvre de l’accompagnement personnalisé. Laissés à eux-mêmes, les enseignants et les chefs d’établissement rencontrent de sérieuses difficultés d’organisation et de construction pédagogique.
Plus généralement, il faudra éviter deux écueils liés à l’extension de l’autonomie des établissements : d’abord, un risque majeur de rupture d’égalité entre les territoires et entre les élèves, que seul un cadre national fort permettra d’écarter ; ensuite, le danger d’une multiplication des marchandages entre les enseignants et les chefs d’établissement, qui ne peuvent que diviser les équipes éducatives et favoriser une concurrence stérile entre les projets.
La carte des formations est un enjeu crucial de la réforme. L’offre de CAP a été en effet accrue, afin d’absorber les flux dirigés jusqu’à présent vers le BEP. Mais cette stratégie ne doit pas conduire à une orientation excessive vers le CAP à l’issue de la troisième. Il serait particulièrement préjudiciable de restreindre d’emblée l’accès au baccalauréat, en le réservant à une minorité : cela risquerait de consolider les inégalités sociales dans l’accès à l’éducation et de freiner l’élévation du niveau général de qualification, à l’encontre des objectifs affichés par le Gouvernement.
De plus, il faudra porter une attention particulière aux élèves de troisième en difficulté, issus notamment de sections d’enseignement général et professionnel adapté – les SEGPA – ou de classes d’insertion : aucun d’entre eux ne doit être laissé de côté.
Enfin, la cohérence des formations doit être assurée : sur un même territoire, devraient coexister une offre de CAP et une offre de bacs professionnels dans des spécialités proches. L’efficacité des passerelles en dépend aussi étroitement : à défaut, les élèves ne se verraient pas offrir un véritable choix et opteraient pour le diplôme pouvant être préparé près de chez eux.
Le statut de la certification intermédiaire est le dernier point qui méritera une évaluation attentive. Le BEP est aujourd’hui un diplôme reconnu par les branches professionnelles et bien identifié par les entreprises, mais sa version rénovée et rebaptisée « certification intermédiaire » laisse planer beaucoup d’incertitudes, sans que l’on puisse prévoir la réaction des employeurs. L’articulation de la certification intermédiaire et des programmes scolaires menant au baccalauréat mérite d’être clarifiée. Le choix du contrôle en cours de formation peut remettre en cause l’égalité entre élèves et la valeur du diplôme.
J’évoquerai enfin la « mastérisation » de la formation des professeurs de lycée professionnel.
Le concours externe de recrutement ne sera plus ouvert, dans les spécialités professionnelles, aux candidats justifiant de huit ans de pratique professionnelle et d’un diplôme de niveau V. Cette fermeture du concours à des personnes peu qualifiées, mais bénéficiant d’une solide expérience, est injustifiée. Je demande donc le rétablissement de cette possibilité de présentation du concours de professeur de lycée professionnel supprimée par le décret du 28 juillet 2009.
Parallèlement à mon enquête sur la mise en œuvre du bac professionnel en trois ans, j’ai poursuivi l’évaluation des dispositifs de préparation à l’orientation mis en place au collège.
Les conditions d’une authentique éducation à l’orientation ne me semblent pas réunies. L’idée d’un parcours progressif tout au long du collège et du lycée n’est pas sans valeur, mais il faut admettre que les différentes séquences organisées actuellement de la cinquième à la troisième manquent de cohérence et présentent un intérêt limité. C’est pourquoi je reste convaincue qu’il faut prévoir un accompagnement dans la durée par un adulte référent, spécialement formé pour cela.
La mise en place d’adultes référents ne doit pas cependant se faire au détriment des conseillers d’orientation-psychologues, les COP, dont le statut et les missions doivent être confortés. L’action des COP est particulièrement précieuse, notamment auprès des élèves les plus fragiles. Je ne peux que m’inquiéter de l’extinction du recrutement des COP, alors même que leur effectif actuel est déjà trop bas. Je souhaite que cette tendance puisse s’inverser.
Devant la déstabilisation très réelle de la voie professionnelle et la déficience des dispositifs d’orientation, gouvernés par une logique utilitariste, je ne peux qu’émettre, à titre personnel, un avis défavorable à l’adoption des crédits de la mission « Enseignement scolaire ». (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. J’indique au Sénat que la conférence des présidents a décidé d’attribuer un temps de parole de dix minutes aux porte-parole de chaque groupe politique et de cinq minutes à la réunion des sénateurs ne figurant sur la liste d’aucun groupe.
Le Gouvernement répondra aux commissions et aux orateurs pour quinze minutes.
Puis nous aurons une série de questions avec réponse immédiate du Gouvernement. La durée de la discussion de chaque question est limitée à six minutes réparties de la manière suivante : deux minutes trente pour la question, deux minutes trente pour la réponse et une minute pour une réplique éventuelle.
La conférence des présidents a décidé d’attribuer cinq questions aux groupes UMP et socialiste, deux questions aux groupes de l’Union centriste, CRC-SPG et RDSE, et une question à la réunion des sénateurs ne figurant sur la liste d’aucun groupe.
Dans la suite du débat, la parole est à M. René-Pierre Signé.
M. René-Pierre Signé. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, notre école ne va pas bien. Elle ne répond pas à nombre d’attentes, comme le prouvent la réalité de l’échec scolaire, trop lourd dans tous les cycles, et la multiplication des réformes auxquelles elle est soumise depuis quelques années, la dernière faisant toujours apparaître que la précédente n’avait pas atteint l’excellence…
L’enseignement scolaire, qui est au cœur de notre socle républicain, doit être une priorité nationale, et non pâtir d’arbitrages budgétaires. Si le budget de la mission « Enseignement scolaire » demeure le premier de l’État, il témoigne, comme les années précédentes, de peu d’ambition. Certes, il s’élèvera à 60,84 milliards d’euros en crédits de paiement, contre 59,9 milliards d’euros en 2009 et 59,1 milliards d’euros en 2008, soit une hausse de 1,5 %, mais ces crédits sont largement inférieurs à ceux qui étaient prévus au titre de la programmation pluriannuelle pour 2009-2011, soit quelque 63 milliards d’euros.
Ce projet de budget pour 2010 reste marqué par le non-remplacement d’un fonctionnaire partant à la retraite sur deux : 16 000 suppressions d’emploi viendront s’ajouter aux 13 500 de 2009 et aux 11 200 de 2008. Depuis 2003, près de 45 000 postes ont été supprimés dans les collèges et les lycées, ce qui va à l’inverse de la poussée démographique qui se poursuit à l’école.
Les conséquences de cette situation sont lourdes pour le personnel, pour les élèves, ainsi que pour les conditions de travail, d’étude et d’enseignement, qui ne s’améliorent pas. Suppression des options, surcharge de classes, alourdissement de la charge de travail, baisse de l’offre éducative, remplacements non assurés, multiplication des heures supplémentaires et des compléments de service, non-scolarisation des enfants de deux ans, réduction des possibilités de formation professionnelle pour les enseignants : excusez cette litanie ! Un regard sur l’enseignement privé permet de constater que le principe de parité n’est pas respecté, puisqu’on supprime inégalement les postes dans le privé, que la loi Carle conforte encore en instaurant une relation marchande entre usager et commune, avec ou sans accord du maire.
Les mesures prises par M. Darcos dans le cadre de la réforme de l’enseignement primaire – semaine de quatre jours, évaluations, nouveaux programmes, stages de remise à niveau, accompagnement éducatif – suscitent bien des critiques. L’inspection générale a récemment pointé les perturbations de rythme, l’alourdissement des conditions de travail, la désorganisation des écoles par la multiplication des dispositifs hors et pendant le temps scolaire et les interrogations portant sur l’efficacité même du dispositif de l’aide personnalisée, quand les écoles qui rencontrent les plus grandes difficultés ne disposent d’aucun moyen supplémentaire.
Le démantèlement des RASED, dont l’efficacité a pourtant été prouvée, ou les incertitudes concernant les emplois vie scolaire ou les auxiliaires de vie scolaire, personnels indispensables à la scolarisation des enfants handicapés, ajoutent encore une note négative. L’absence de statut de ces intervenants, depuis longtemps dénoncée, les empêche d’être reconnus dans le monde de l’éducation, où ils atténuent pourtant les discriminations.
Les nouvelles évaluations nationales sont également sur la sellette : confusion sur la finalité des évaluations, calendrier inadapté, manque de concertation avec les enseignants, absence d’accompagnement des équipes. Ces constats sont partagés par les enseignants, les parents d’élèves et nombre d’autres acteurs de l’école.
Force est de constater, une fois de plus, que tout dispositif imposé dans la précipitation soulève de nombreuses difficultés.
Quant aux lycées, dont la réforme a déjà fait l’objet de débats, les persistantes mobilisations ont poussé le Gouvernement à répondre à des demandes fortes, s’agissant par exemple de la reconnaissance de la voie technologique – la technologie étant plus proche de la société que la science –, de la prise en compte de la diversité des publics scolarisés et du rééquilibrage des séries générales, avec une rénovation de la série L.
Quelques mesures nouvelles doivent être signalées.
En seconde, sont introduits deux enseignements d’exploration d’une durée hebdomadaire d’une heure et trente minutes chacun, dont au moins un enseignement d’économie, le second devant être choisi parmi diverses matières : sciences médicosociales, biotechnologies, littérature et monde contemporain, arts, etc. La nouvelle seconde a pour objectif de devenir une véritable classe de détermination.
La classe de première bénéficiera d’un ensemble d’enseignements communs – français, langues vivantes, histoire-géographie – représentant 60 % de l’emploi du temps et de stages « passerelle », censés permettre les corrections de trajectoire. Les lycéens auront désormais un droit à l’erreur et la possibilité de changer de série en cours de première. À cette fin, un tronc commun à toutes les filières est donc créé.
La classe de terminale offrira un choix élargi d’enseignements spécialisés pour projeter l’élève vers l’enseignement supérieur.
Tous les élèves pourront bénéficier d’un tutorat, et des groupes de compétences seront constitués au profit des élèves, qui bénéficieront de deux heures d’accompagnement individualisé par semaine, en seconde et en première. C’est peut-être la meilleure mesure, si les moyens affectés sont à la hauteur. Mais les modalités restent floues, et il reviendra aux établissements eux-mêmes de les définir. Toute tentative de confier aux établissements la gestion d’une partie de la dotation horaire, qui serait globalisée, ne fera que renforcer autonomie et mise en concurrence.
En outre, il reste des zones d’ombre, s’agissant en particulier de la formation des enseignants et de la prise en compte égalitaire bien affirmée des quatre voies du lycée : générale, professionnelle, technologique et agricole. L’un de mes collègues évoquera tout à l’heure l’enseignement agricole, dont le projet de budget fera l’objet d’un amendement. Les crédits destinés à financer les actions pédagogiques complémentaires à l’enseignement des langues vivantes et des technologies de l’information et de la communication à l’école ont baissé de moitié en une année, de même qu’ont été réduits les partenariats dans les domaines artistique, littéraire, culturel et scientifique.
Malgré quelques mesures intéressantes, cette réforme ne paraît guidée que par la volonté d’économiser des moyens. Ainsi s’accentue le caractère sélectif du lycée et se ferment les portes de l’enseignement supérieur aux lycéens qui ont le plus de difficultés.
L’aide aux élèves ne doit pas être renvoyée et résumée à un accompagnement personnalisé, assuré hors temps scolaire et financé par une réduction des horaires d’enseignement.
Le lycée professionnel est vraiment peu promu dans cette réforme. Le Président de la République a affirmé qu’il n’y aurait pas de nivellement par le bas, pas d’abaissement du niveau d’exigence. On en prend note ! Il n’est pas inutile qu’une exigence de qualité soit affirmée si elle s’accompagne de moyens supplémentaires, ce qui signifie pas de suppressions de postes, des pratiques pédagogiques plus étudiées en matière d’orientation et de parcours de formation, ainsi que l’élargissement de filières aujourd’hui insuffisamment ouvertes, au point que des élèves n’ont pu y trouver de place.
Quant à l’assouplissement de la carte scolaire, il a accentué les phénomènes de ghettoïsation et d’évitement de certains établissements. La réforme de la sectorisation a entraîné une perte d’effectifs – jusqu’à 10 % – et une concentration des élèves en difficulté dans nombre d’établissements, notamment ceux qui relèvent de l’éducation prioritaire.
Pis encore, au mépris des constats sur les effets positifs d’une scolarisation précoce, le désengagement de l’État à l’égard des plus petits se traduit par la création des jardins d’éveil, nouvelles structures d’accueil des enfants de deux à trois ans. Celles-ci ne sauraient remplacer l’école. Le jardin d’éveil, forme de halte-garderie sans grande ambition éducative, va soustraire les enfants les plus fragiles à un premier lieu de socialisation et d’éducation.
Avec la disparition programmée des instituts universitaires de formation des maîtres, les IUFM, et la « mastérisation », on peut légitimement s’interroger sur les moyens qui seront consacrés à la formation des enseignants. Le principe de base est de relever le niveau de recrutement de bac+3 à bac+5. Mais le Gouvernement veut surtout, on le dit moins, revenir à une formation disciplinaire et à la certitude que ce métier s’apprend. Les enseignants se formeront sur le terrain. Cependant, rien, dans le détail, n’est bien établi, en particulier la définition des masters qui seront préparés par ces étudiants. Les jeunes professeurs risquent d’arriver fort démunis devant leurs élèves.
L’école subit une crise qui suit l’évolution des connaissances nécessaires à l’entrée dans la vie. Dans cette perspective, il faut lui donner les moyens de réhabiliter l’ascenseur social, grippé par des inégalités criantes, par des disparités qui sautent aux yeux dès le départ, mais qui sont tolérées d’abord, et aggravées ensuite ; il faut aussi reconsidérer les savoirs professionnels, qui méritent mieux que l’intérêt qu’on leur porte actuellement.
L’école publique doit être considérée non pas comme une charge, mais comme un investissement pour l’avenir. La politique de restriction budgétaire menée selon une logique purement comptable, alors qu’il s’agit d’un pilier essentiel de notre République et d’un instrument majeur de l’égalité des chances – toujours réaffirmée, mais toujours plus lointaine –, affiche sans complexe votre volonté de faire de l’école une machine à sélectionner, avec une stratégie éducative de tri social : réussite pour les uns, avenir incertain, réduit au minimum, pour les autres.
L’État doit développer une offre de qualité, diversifiée et répartie sur l’ensemble du territoire. Oubliant cette obligation essentielle, le système éducatif peine à réduire les inégalités sociales.
Au moment où l’on parle d’identité nationale, l’école doit donner une densité nationale à tous ses élèves, surtout là où la nationalité est découplée ; elle doit marquer la volonté du « vivre ensemble », que Renan appelait fort justement et joliment le « plébiscite permanent ». On peut craindre, au contraire, que votre école ne porte en elle les prémices d’une école à deux vitesses, ce qui va à l’encontre des objectifs de l’école républicaine.
Tout cela nous conduira à ne pas voter les crédits de la mission « Enseignement scolaire ». (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à Mme Françoise Laborde.
Mme Françoise Laborde. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, avec 292 millions d’euros, l’enseignement scolaire est le premier budget de l’État. Ces crédits permettent à celui-ci d’assurer l’une de ses principales missions régaliennes. À ce titre, ils ne doivent pas s’inscrire dans une logique purement financière de court terme, mais, au contraire, correspondre à des objectifs à long terme et de contenus.
Les sommes consacrées à cette mission doivent permettre de garantir l’égal accès de tous à un socle commun de connaissances et à un enseignement de qualité, quelle que soit la filière choisie, quel que soit le territoire.
En y regardant de plus près, ligne par ligne, programme par programme, ces chiffres ne sont malheureusement pas à la hauteur du défi à relever. Comment l’enseignement scolaire et l’éducation nationale peuvent-ils trouver un nouveau souffle pour conduire leur nécessaire modernisation avec un budget en hausse de seulement 1,6 % ? Rapportée au taux d’inflation de 1,2 % attendu pour cette année, la hausse nette est plus que modeste.
Je partage les inquiétudes du monde enseignant et des familles, car, à ce rythme, la qualité de l’enseignement dispensé aux générations futures pourrait être sérieusement hypothéquée. La question est donc bien celle des contenus. Avec des crédits pédagogiques pour le premier degré de l’enseignement public qui connaissent une baisse sans précédent, passant de 12,3 millions d’euros à 5,9 millions d’euros, quel type de citoyen l’État espère-t-il pouvoir former ?
M. Daniel Raoul. On se le demande !
Mme Françoise Laborde. Lors de votre audition par la commission, monsieur le ministre, vous avez même reconnu l’existence de certains dysfonctionnements, mais vous n’en avez pas tiré les conséquences dans l’élaboration de votre projet de budget.
Vous avez aussi rendu hommage « à la politique de gestion des ressources humaines de l’éducation nationale, qui participe à l’effort de redressement des finances publiques de l’État ». Malheureusement, nos conceptions de l’effort à réaliser en matière de gestion du personnel divergent considérablement.
Vous vous placez dans la logique de la RGPP. Pour ma part, je la déplore, même si une rationalisation de la gestion des ressources humaines est un principe comptable à respecter –encore faut-il savoir au service de quels objectifs.
J’estime que l’effort budgétaire devrait justement porter sur le personnel, avec une ouverture du robinet des recrutements, de la formation et de la titularisation des contractuels. Il devrait aussi permettre de tourner davantage l’école, le collège et le lycée vers des activités complémentaires : partenariats culturels, scientifiques, artistiques ou éducation à la santé et à l’environnement.
Il est vrai que l’on ne peut pas reprocher son immobilisme au gouvernement auquel vous appartenez. L’examen du projet de loi de finances intervient en effet dans un contexte de réformes tous azimuts. Conduites dans la précipitation, en particulier depuis un an, celles-ci ne vont pas sans provoquer oppositions et incompréhensions, dans le monde enseignant comme dans les familles.
Vous avez lancé conjointement, au cours de l’année qui vient de s’écouler, plusieurs réformes de taille : à l’école primaire, le service minimum d’accueil, les nouveaux programmes, la semaine des quatre jours et un dispositif d’accompagnement scolaire personnalisé des élèves parallèlement à la suppression, dite « sédentarisation », des postes affectés aux RASED ; au collège, l’aide au devoir ; au lycée, la réforme des programmes avec pour objectif de conduire 50 % d’une classe d’âge à un diplôme de l’enseignement supérieur, la rénovation de la voie professionnelle, le bac professionnel en trois ans, ainsi que l’amélioration des passerelles entre les différentes voies de l’enseignement secondaire, sans oublier la réforme des IUFM et celle des enseignements artistiques.
Ces réformes semblent plutôt creuser les inégalités. Sans pour autant dresser un catalogue à la Prévert des points noirs de votre budget, je voudrais évoquer plus longuement ceux qui me préoccupent. Mes collègues du groupe du RDSE compléteront ces interrogations par deux questions complémentaires, relatives au manque criant de remplaçants et à la carte scolaire.
Permettez-moi de commencer ma démonstration avec les emplois vie scolaire et les auxiliaires de vie scolaire. Le sort qui leur est réservé est symptomatique des effets d’annonce du Gouvernement.
Le nombre d’enfants handicapés accueillis en école banalisée n’a cessé d’augmenter, atteignant 185 000 élèves en 2009. Cependant, vos orientations budgétaires sont insuffisantes pour rendre possible cet accueil dans des conditions décentes.
Environ 1 300 accompagnants ont été licenciés en août dernier, à la fin de leur contrat. Vous nous avez affirmé avoir pérennisé les 17 000 contrats existants, mais il ne s’agira pas des mêmes personnes physiques. Je regrette que les compétences acquises se soient ainsi perdues dans la nature.
Se pose aussi la question des moyens qui pourraient être consacrés à la formation professionnelle. En effet, on n’intègre pas des enfants en difficulté avec du personnel qui n’est pas formé. Il est devenu urgent de mettre en place un véritable statut professionnel. Lui seul permettra de garantir un service d’accompagnement compétent et de qualité pour les enfants concernés.
J’en viens maintenant à la question des réseaux d’aide aux enfants en difficulté. Ils sont, eux aussi, traités selon la logique de la RGPP.
Comme je l’avais déjà exposé lors de l’examen des crédits de la mission pour 2009, le soutien scolaire ne peut pas remplacer le travail spécifique effectué par ces personnels spécialisés. Une équipe de chercheurs de l’université Paris-Descartes a d’ailleurs présenté les résultats d’une analyse comparative portant sur l’efficacité des aides personnalisées et des aides spécialisées du type de celle qui est apportée par les RASED.
Les aides personnalisées correspondent à deux heures hebdomadaires de soutien scolaire et permettent la révision de notions non acquises. Cette étude conclut que 20 % des élèves font effectivement des progrès grâce à cette méthode.
Les aides dispensées par les enseignants spécialisés des RASED sont beaucoup plus diversifiées et complexes. Parmi les élèves ayant bénéficié de cette forme d’aide, 70 % font des progrès, non seulement en matière d’acquisitions scolaires, mais également dans le domaine des compétences cognitives, sociales et relationnelles.
Les chercheurs concluent que « la nature de la réponse institutionnelle apportée à la difficulté scolaire a des conséquences directes sur la nature et les finalités de l’école. L’école doit-elle permettre aux élèves d’utiliser des notions de base telles que la lecture, l’écriture et le calcul ou doit-elle également former des citoyens capables de vivre dans une société, d’y apporter une contribution personnelle, de développer leurs compétences et leurs talents ? » Je crois que tout est dit !
Permettez-moi d’évoquer la question des autres personnels spécialisés, dont le recrutement est insuffisant : je veux parler des infirmiers, des médecins ou encore des psychologues scolaires. Comment comptez-vous améliorer la prévention en matière de santé, ainsi que l’écoute des enfants et des adolescents, en dehors du cadre strict de la classe, sans y consacrer plus de moyens humains, et donc financiers ? La question reste en suspens…
L’adéquation des compétences du personnel se pose également en ce qui concerne les enseignements artistiques. Avec le recul, il s’avère que confier ces enseignements aux professeurs d’histoire-géographie est inapproprié, le programme de ces disciplines étant déjà très chargé. Il faut franchir une étape supplémentaire, en mettant en place un programme à part entière et en recrutant des enseignants spécialisés. Garantir l’égalité d’accès à la culture pour tous par le biais de l’école est à ce prix. Comme je l’ai d’ailleurs déjà indiqué vendredi au ministre de la culture, il ne suffit pas de prendre des engagements, les moyens doivent suivre.
Comme l’affirme l’académicien Pierre Rosenberg, « l’histoire de l’art est peut-être l’une des meilleures idées de ces dernières années, encore faudrait-il que le ministère se donne les moyens de dispenser un enseignement de qualité plutôt qu’une culture du saupoudrage. C’est une discipline à part entière, l’enseigner est un métier qu’on apprend, on ne s’improvise pas professeur d’histoire de l’art. »
Venons-en à la réforme des IUFM et à la « mastérisation » de la formation des enseignants, qui sera effective en 2011. Mes chers collègues, je vous prie d’excuser le côté répétitif de mes interventions, mais Mme Pécresse ne m’a pas répondu sur ce point hier.
Rapatrier les IUFM au sein des facultés et créer des masters pour revaloriser le diplôme, soit ! Cependant, le contenu est inadapté à la réalité de ce métier, qui nécessite, d’une part, la maîtrise de connaissances polyvalentes, et, d’autre part, une formation à la dimension didactique et pédagogique de la profession, permettant la prise en charge d’une classe.
Par ailleurs, je m’oppose farouchement à la suppression de l’année de stage rémunérée, tout comme au fait que les enseignements soient essentiellement théoriques.
La formation professionnelle des enseignants devrait désormais être placée sous la responsabilité de l’université. Or, selon l’université et le parcours choisis, elle ne sera pas organisée dans les mêmes conditions, ce qui engendrera une véritable fracture territoriale. Se pose aussi le problème des IUFM installés dans des villes moyennes où n’existe pas d’université. Que deviendront ces établissements ?
La rupture d’égalité, je la constate aussi au vu de la différence de traitement entre l’enseignement privé et l’enseignement public. Ainsi, les suppressions de postes au titre du projet de budget pour 2010 interviendront lorsque la diminution d’effectifs sera de soixante-seize élèves dans l’enseignement privé, contre seulement trente-six élèves dans l’enseignement public. Cela se passe de commentaires…
Concernant l’accueil de la petite enfance, point dont nous avons déjà eu à débattre grâce à une question orale posée par notre collègue Françoise Cartron en octobre dernier, la réponse apportée n’est pas satisfaisante. Je regrette vivement que davantage de moyens ne soient pas mobilisés pour financer un service public d’accueil gratuit, notamment par la scolarisation en maternelle à partir de deux ans.
Pour terminer sur une touche positive, j’évoquerai rapidement l’initiative heureuse lancée en faveur de l’école numérique rurale en 2009. Cette opération est destinée à attribuer aux communes de moins de 2 000 habitants un crédit de 10 000 euros en vue d’acquérir du matériel informatique pour équiper leurs écoles. Cette opération, limitée à un quota de 5 000 dossiers, a connu un très vif succès, avec plus de 8 000 candidatures déclarées. Monsieur le ministre, comptez-vous pérenniser cette opération ? Si oui, de quelle façon ?
En conclusion, les membres du groupe du RDSE déplorent la précipitation dans laquelle sont conduites toutes ces reformes et vous demandent de prendre désormais du temps pour l’évaluation, afin de permettre les ajustements nécessaires en concertation avec les personnes concernées.
Par ailleurs, nous serons particulièrement attentifs aux questions relatives à la laïcité dans l’enseignement scolaire et l’enseignement supérieur.
Eu égard aux insuffisances relevées, nous ne voterons pas les crédits de la mission « Enseignement scolaire ». (Applaudissements sur les travées du RDSE, du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. le président. La parole est à M. Alain Vasselle. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. Alain Vasselle. Sans négliger l’enseignement agricole, mon propos portera essentiellement sur les domaines qui ressortissent à la compétence directe de M. Chatel : je suis chargé de vous dire, monsieur le ministre, tout le bien que le groupe UMP pense de l’action que vous menez. (Exclamations ironiques sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. Ivan Renar. Auto-félicitations !
M. René-Pierre Signé. Quelle pommade !
M. Alain Vasselle. Mme Férat et MM. Longuet et Carle ayant déjà présenté dans le détail les crédits de la mission, avec plus de talent que je ne saurais en montrer, je me bornerai à solliciter de votre part quelque éclairage complémentaire sur trois points.
S’agissant en premier lieu de la réforme du lycée, nul ne contestera le fait, je pense, que chaque année 50 000 élèves quittent le lycée sans avoir obtenu le baccalauréat et qu’un étudiant sur deux échoue à l’issue de la première année d’université, parce qu’il a été mal orienté.
Ce constat étant posé, quels sont les éléments de la réforme du lycée qui permettront de modifier la situation ?
M. Yannick Bodin. Cela fait sept ans que vous répétez la même chose ! Qu’avez-vous fait ?
M. Alain Vasselle. Ne critiquez pas trop l’action du Gouvernement : la situation ne s’est pas améliorée lorsque vous étiez aux affaires ! (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. René-Pierre Signé. Elle était meilleure !
M. Alain Vasselle. Monsieur le ministre, je tiens à saluer la méthode employée, qui est importante dans un ministère ô combien sensible.
M. René-Pierre Signé. La forme, à défaut du fond !
M. Alain Vasselle. Vous avez écouté attentivement l’ensemble des acteurs, engagé le dialogue avec les professionnels, les représentants des parents d’élèves et ceux des enseignants. C’était un préalable absolument indispensable, conforme d’ailleurs à la méthode que le Gouvernement a suivie dans le traitement de tous les dossiers dont il a la charge. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. Daniel Raoul. Avec quel succès !
M. Alain Vasselle. Monsieur le ministre, quels changements les lycéens vont-ils connaître ? Surtout, quelles sont les grandes innovations pour les classes de seconde, de première et de terminale ? Comment allez-vous favoriser une orientation plus progressive, plus ouverte et plus juste ? Renforcerez-vous l’apprentissage des langues étrangères,…
Mme Nathalie Goulet. Ah !
M. Alain Vasselle. … l’accès à la culture et la connaissance de l’économie ?
En ce qui concerne la connaissance de l’économie, j’ai reçu de nombreux courriers d’enseignants qui s’inquiètent du contenu de la réforme et de la teneur de l’enseignement dispensé.
Nous pourrions aussi évoquer le nécessaire rééquilibrage entre la voie générale et la voie technologique,…
M. Bernard Frimat. Par exemple !
M. Alain Vasselle. … mais c’est incontestablement l’accompagnement personnalisé qui constitue la mesure phare de votre projet de budget. Le lycée va-t-il davantage soutenir l’élève en vue de la réussite de sa scolarité ? Comment les lycéens seront-ils mieux responsabilisés ? Je sais, monsieur le ministre, que vous êtes déterminé à faire en sorte que cette réforme soit une réussite et réponde aux attentes de notre jeunesse et à celles du pays.
En deuxième lieu, j’évoquerai brièvement l’enseignement primaire et la réforme de l’école élémentaire. Les enseignants et les parents se sont approprié les actions menées dans ce domaine, et les choses se passent assez bien. Cependant, il me semble que nous n’avons pas encore réussi à assurer dans des conditions satisfaisantes un enseignement précoce des langues étrangères, dès la maternelle. (Mme Nathalie Goulet applaudit.) J’ai déjà eu l’occasion de m’en entretenir à plusieurs reprises avec le président Legendre, qui est particulièrement sensible à cette problématique.
À cet égard, des expériences tout à fait concluantes sont menées dans certaines régions frontalières,…
M. Gérard Longuet, rapporteur spécial. C’est exact !
M. René-Pierre Signé. Il faut commencer très tôt, dès deux ans !
M. Alain Vasselle. … notamment en Alsace-Lorraine ou dans le Nord-Pas-de-Calais, mais souvent elles s’essoufflent et ne sont pas poussées jusqu’à leur terme. J’ai moi-même lancé, dans mon département de l’Oise, une expérimentation d’enseignement précoce des langues, dès la moyenne section de maternelle, permettant aux enfants de bénéficier de six heures hebdomadaires d’enseignement d’une langue étrangère, alors que, à l’heure actuelle, trois quarts d’heure de cours de langue étrangère sont dispensés dans l’enseignement primaire.
Je vous adresse d’ailleurs mes remerciements, monsieur le ministre, car cette action volontariste a pu être menée grâce à un partenariat entre le conseil général, les collectivités territoriales et l’éducation nationale. Nous prenons en charge la moitié du coût de cet enseignement : cela pèse sur les budgets des collectivités, mais les résultats tout à fait intéressants que nous obtenons aujourd’hui, évalués par le rectorat et l’inspection académique, démontrent que l’expérience est positive et mériterait d’être étendue. Les enfants qui ont suivi un tel enseignement de l’allemand ou de l’anglais, selon les cas, arriveront en sixième avec un acquis.
Il me semblerait souhaitable d’encourager, de conforter et d’évaluer ces expériences, monsieur le ministre, pour en tirer les enseignements avant de les généraliser sur l’ensemble du territoire. Quelle action le Gouvernement entend-il mener pour aller au-delà des trois quarts d’heure hebdomadaires de cours actuellement dispensés à l’école élémentaire, qui sont largement insuffisants ?
En troisième lieu, je voudrais revenir, à la suite de Mme Laborde, sur l’école numérique rurale, qui a remporté un tel succès que le ministère a été quelque peu débordé et n’a pu satisfaire qu’une partie des demandes. Entendez-vous prolonger l’opération ?
Je relève quelques difficultés pratiques dans sa mise en œuvre à l’échelon des communes. Actuellement, dans mon département, sur 160 candidatures, 120 ont été retenues. Pour une douzaine de communes, nous ne savons pas si le financement pourra être assuré. Une difficulté tient à la communication des procès-verbaux de recettes par les communes pour encaisser la subvention de 20 % permettant de boucler le financement. Cette subvention pourra-t-elle être débloquée avant la fin de l’année ? Cela dépend de la fourniture des équipements par les entreprises. L’inspecteur d’académie a pris quelques mesures d’assouplissement concernant les justificatifs à fournir, mais nombre de communes continuent d’interpeller régulièrement l’Union des maires de l’Oise, que je préside, pour savoir si votre ministère pourrait accorder des facilités supplémentaires.
En conclusion, monsieur le ministre, je vous confirme que vous pouvez compter sur le soutien du groupe UMP, qui votera ce projet de budget. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. Gérard Longuet, rapporteur spécial. Très bien !
M. le président. La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, je déplore que l’examen des crédits de la mission « Enseignement scolaire », fondamentale pour notre pays et pour l’avenir de notre jeunesse, premier budget de l’État, intervienne à une heure aussi tardive. Cette situation est d’autant plus regrettable que ce projet de budget marque une nouvelle étape décisive dans la déconstruction du service public de l’éducation que le Gouvernement a engagée depuis plusieurs années.
Vous vous êtes fixé pour objectif de réduire la dépense et les emplois publics. Ainsi, budget après budget, s’égrènent les suppressions d’emplois : 16 000 sont annoncées pour 2010, s’ajoutant aux 13 500 de 2009 et aux 11 200 de 2008. Je dis « annoncées », car l’exécution budgétaire de 2008 a montré que plus de 13 000 postes avaient finalement été supprimés cette année-là, notamment au détriment du premier degré, pour lequel le plafond d’emplois a donc été sous-utilisé, à concurrence de 1 232 postes.
Malgré l’augmentation des effectifs d’élèves en 2008, les créations de postes affichées et votées par le Parlement n’ont pas eu lieu. Ainsi, pour les enseignants du premier degré, alors que le plafond d’emplois de chaque projet de loi de finances était annoncé à la hausse depuis 2006, l’exécution de 2008 s’avère en fait inférieure, à hauteur de plus de 1 000 emplois, au plafond de 2006. Voilà pour les promesses non tenues ! C’est là toute la perversité de la notion de plafond d’emplois, qui recouvre finalement une réduction d’effectifs.
Au lieu de créer des postes, vous généralisez et institutionnalisez les heures supplémentaires, au point d’en faire un mode de gestion qui, en définitive, favorise le développement de la précarité. Cela apparaît de façon tout à fait criante dans le second degré, où le nombre de contractuels s’est accru de 21 % en deux ans, et au collège, qui a perdu 8 000 postes parallèlement à une augmentation de 18 % des effectifs de contractuels.
Cette situation gagne aussi le premier degré. Ainsi, le nombre de postes de professeur des écoles mis au concours est en baisse depuis 2008, et le recours aux listes complémentaires a considérablement diminué, quand il n’a pas disparu.
Or, dans le même temps, les effectifs d’élèves croissent. La hausse est confirmée pour 2010, aux niveaux tant élémentaire que préélémentaire, et la tendance ne va pas s’inverser, si l’on se réfère aux chiffres de l’INSEE sur l’augmentation des naissances. Je m’interroge d’ailleurs, monsieur le ministre, sur la manière dont vos services intègrent ces données dans les statistiques.
Cette évolution démographique se conjuguera aux départs massifs à la retraite d’enseignants « baby-boomers ». Comment ferez-vous alors pour pallier les vacances de postes et garantir le « face-à-face pédagogique » ?
Certains recteurs ont d’ores et déjà trouvé la solution et se tournent maintenant vers des vacataires. En effet, à la différence des candidats inscrits sur les listes complémentaires – qui deviendront des enseignants stagiaires, avant d’être titularisés –, le vacataire présente l’avantage, si j’ose dire, de permettre la réalisation d’économies tant sur la formation que sur la rémunération.
Cette question se posera avec plus d’acuité encore à la rentrée de 2010. En effet, dans le présent projet de budget, vous prévoyez la suppression de 9 182 postes d’enseignant stagiaire dans le premier degré. Employés à quart de temps, ils représentent tout de même 2 296 emplois. Or vous affichez la création de 2 182 postes seulement : le solde est, là encore, négatif, alors même que vous prévoyez d’accueillir 5 300 élèves supplémentaires.
Dans les écoles, ces suppressions de postes auront des conséquences très concrètes, au premier chef sur le taux d’encadrement des élèves.
Permettez-moi, à ce sujet, de formuler une remarque sur les conditions d’accueil à la maternelle. Les effectifs du préélémentaire sont revus à la hausse pour 2010. Or le Gouvernement s’est clairement déclaré hostile à la scolarisation des enfants âgés de deux à trois ans. Ce projet de budget ravive donc nos inquiétudes quant à la fin programmée de la scolarisation des tout-petits, qui est en chute libre du fait de la pression démographique et faute de postes et de classes en nombre suffisant. Le problème touche aussi les enfants atteignant l’âge de trois ans en fin d’année.
L’État, volontairement, ne se dote plus des moyens de remplir les obligations imposées par le code de l’éducation. Le développement des jardins d’éveil n’est pas une réponse adaptée – j’ai déjà eu l’occasion d’expliquer les raisons de mon opposition à ce projet.
Ce qu’il faut, au contraire, c’est offrir « plus » et « mieux » d’école maternelle, en ouvrant la possibilité d’accueillir les enfants de deux ans quand les parents le souhaitent. Investir dans l’école maternelle, c’est investir pour l’avenir de chaque élève.
Par ailleurs, ces suppressions de postes auront des conséquences sur la formation même des enseignants. Vous affirmez que celle-ci sera « revalorisée » par votre réforme, mais cette analyse est largement contestée par la communauté éducative, qui redoute au contraire une détérioration de la formation initiale et des conditions d’entrée dans le métier, ainsi qu’un risque accru de précarisation pour ceux qui resteront « sur le carreau » à l’issue de leur master. Nous sommes loin de la revalorisation promise !
À l’inverse, ce que nous constatons avec certitude, à la lecture de ce projet de budget, c’est que cette réforme sera source d’économies. Ce sera même un véritable jackpot : plus de 173 millions d’euros d’économies dans le premier degré, et 252 millions d'euros dans le second !
Ce budget est donc aussi celui de l’instrumentalisation de la réforme de la formation. Sous le vernis de la « revalorisation », l’objectif reste le même : supprimer des emplois. Pour y parvenir, vous exploitez cette année la source des enseignants stagiaires, mais celle-ci n’en est pas moins tarissable… Que ferez-vous l’année prochaine ? Et comment, après avoir supprimé en trois ans plus de 40 000 postes, qui s’ajoutent aux 35 000 détruits depuis 2003, pouvez-vous continuer à affirmer aux familles que l’offre éducative n’est pas dégradée ?
Les familles et les personnels constatent d'ailleurs déjà les dégâts : classes surchargées, enseignants non remplacés, options supprimées ou non assurées…
Nous ne sommes plus dans l’anecdote, le cas isolé, dissimulable derrière des moyennes ! La vérité est tout autre, et elle vient d’être confirmée par M. Longuet. « Si l’on veut par la suite continuer à diminuer les emplois, dans une optique de réduction de la dépense publique à long terme, il faudra alors modifier en profondeur le système éducatif et les méthodes d’enseignement », souligne d'ailleurs Yves Censi, député UMP et rapporteur spécial pour le budget de l’enseignement scolaire à l’Assemblée nationale.
Réforme des programmes du primaire, fin des cours le samedi, suppression de postes en RASED, préparation du baccalauréat professionnel en trois ans, réforme du lycée demain, avec une diminution des heures d’enseignement, réforme de la formation des professeurs, avec la « casse » de leur statut : en échange de ces pilules amères, vous généralisez l’aide individualisée, présentée comme une solution miracle !
En effet, cette mesure devrait, à elle seule, résoudre les difficultés de tous les élèves et améliorer l’orientation – élément pourtant décisif, qui mérite et réclame un véritable engagement.
Ces « nouveaux services », comme vous les appelez, ont surtout l’avantage de correspondre au mode de gestion que vous avez institutionnalisé en généralisant les heures supplémentaires et de ne s’inscrire dans aucun cadrage national. Il revient aux enseignants et aux établissements de se débrouiller, comme on a pu le voir avec la mise en place catastrophique de l’aide individualisée dans les lycées professionnels, et cela en faisant fi de l’égalité de traitement entre les élèves.
C’est à tel point vrai que, depuis trois ans, et en toute logique, tous les postes et les crédits qui participent de ces missions fondent dans le budget comme neige au soleil : les RASED, les conseillers d’orientation-psychologues et les conseillers principaux d’éducation sont supprimés, tandis que les crédits pédagogiques sont divisés par trois dans le primaire alors qu’ils financent des activités complémentaires dans les domaines artistique, littéraire, culturel, scientifique, dans l’enseignement des langues vivantes, le développement des nouvelles technologies, l’éducation à la santé, à la sécurité et à la connaissance du patrimoine… En outre, les subventions aux établissements publics locaux d’enseignement baissent de 14 %. Partout, la dotation par élève diminue. Le collège est particulièrement touché, avec une diminution de ses crédits de 12 %, alors que le nombre d’élèves augmente depuis 2007.
Pour les établissements, vous revendiquez toujours plus d’autonomie. C’est déjà le cas pour les lycées, qui seront mis en concurrence, et ce le sera bientôt pour les écoles, si le projet des EPEP venait à se réaliser.
Budget après budget, vous orchestrez un projet de société qui remet en cause les fondements de notre système éducatif, celui d’un service public de l’éducation gratuit et laïc, dont l’ambition est d’assurer l’égalité d’accès pour tous, sur l’ensemble du territoire, à un haut niveau de culture générale, et d’aider chacun à relever le défi de l’émancipation.
En réalité, votre projet promeut une visée utilitariste d’employabilité immédiate pour l’économie, qui est source d’inégalités et qui est portée, faut-il le rappeler, par la stratégie dite de Lisbonne, à laquelle vous vous référez.
Ce projet est déjà particulièrement avancé, aujourd'hui même, dans un enseignement qui constitue pourtant une voie de réussite incontestée et un levier indispensable pour le développement de nos territoires : l’enseignement agricole. À force d’arbitrages et de restrictions budgétaires, cette filière, notamment sa composante publique, est en état de choc.
Mes chers collègues, c’est donc aujourd’hui l’épreuve de vérité : apporter son soutien au projet de budget pour 2010, c’est prendre la responsabilité de voir se généraliser ce que tout le monde aujourd’hui semble prêt à dénoncer pour l’enseignement agricole. C’est pourquoi mon groupe votera contre ce projet de budget. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG, ainsi que sur certaines travées du groupe socialiste et du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Luc Chatel, ministre.
M. Luc Chatel, ministre de l'éducation nationale, porte-parole du Gouvernement. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, la crise que nous traversons aujourd’hui fait indiscutablement apparaître que nous avons besoin de davantage d’éducation. Celle-ci n’a sans doute jamais été aussi nécessaire dans le monde.
En effet, le diplôme est certainement la meilleure arme contre la crise. Il est probablement le remède face aux situations difficiles que nous rencontrons de nos jours. Je le rappelle, un jeune de moins de vingt-cinq ans a cinq fois plus de chances de trouver un emploi s’il est diplômé que s’il ne l’est pas.
L’école est bien le lieu où se prépare la France de demain, qui misera encore davantage sur l’intelligence que celle d’aujourd’hui pour relever les défis qui se présenteront à elle et affronter la concurrence internationale.
Mesdames, messieurs les sénateurs, le projet de budget que nous vous présentons doit permettre à l’école de remplir pleinement les missions que la nation lui a confiées : instruire, éduquer, insérer professionnellement nos jeunes, transmettre à tous les savoirs qui forment la culture commune nécessaire tout au long de la vie, aider chaque élève à affermir ses goûts, à exercer son esprit critique, à forger un projet d’avenir ; tout cela pour l’accompagner vers les responsabilités de l’âge adulte. Y a-t-il plus beau projet ? Je ne le crois pas. Les moyens que je vous propose d’y consacrer doivent, c’est ma conviction, permettre de le réaliser.
Les crédits des cinq programmes de la mission « Enseignement scolaire » relevant de ma compétence représentent quelque 59,6 milliards d’euros, soit, à périmètre constant, une progression de 1,6 % par rapport à la loi de finances initiale de 2009, alors que le budget de l’État augmente dans son ensemble de 1,2 %. L’éducation nationale reste donc une priorité, et demeure le premier poste budgétaire de l’État.
Ce projet de budget doit nous permettre de mettre en œuvre les engagements qui ont été pris devant les Français par le Président de la République. Il s’agit d’adapter l’éducation nationale à de nouveaux défis, de favoriser l’égalité des chances entre les élèves, enfin de participer à l’effort de redressement des finances publiques tout en permettant une politique de gestion des ressources humaines ambitieuse pour les personnels de l’éducation nationale.
La nécessité d’adapter l’éducation nationale à de nouveaux défis tient au fait que le monde a changé, que nos jeunes ont changé. Notre système éducatif doit donc être capable de s’adapter à la diversité des élèves et des établissements scolaires. On ne peut pas travailler dans les classes de la même manière que par le passé, quand 20 % d’une classe d’âge fréquentait le lycée ; aujourd'hui, cette proportion s’élève à 66 %. Les élèves sont différents, les classes sont hétérogènes, et notre système éducatif doit pouvoir prendre en compte cette diversité.
Un certain nombre de réformes substantielles ont déjà été engagées par mon prédécesseur. Je les poursuivrai, en m’engageant dans plusieurs directions.
À l’école primaire et au collège, tout d'abord, notre objectif est de conduire tous les élèves à la maîtrise du socle commun de connaissances et de compétences.
Dans cette perspective, de nouveaux programmes, davantage axés sur les enseignements fondamentaux et sur des évaluations nationales, ont été mis en œuvre. En outre, l’accompagnement des élèves a été renforcé, grâce à une nouvelle organisation de la semaine scolaire. En primaire, comme M. Longuet l’a rappelé, la libération du samedi a permis…
M. Yannick Bodin. D’aller chez Carrefour ! (Sourires sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. Luc Chatel, ministre. … de proposer à tous les élèves qui rencontrent des difficultés deux heures d’aide personnalisée.
Par ailleurs, l’apprentissage des langues étrangères constituait, monsieur Vasselle, l’une des priorités de la loi du 23 avril 2005 d’orientation et de programme pour l’avenir de l’école. Dans les classes du cycle III, c'est-à-dire le CE2, le CM1 et le CM2, tous les élèves bénéficient aujourd’hui d’un enseignement de langue vivante d’une heure trente par semaine, soit 54 heures par an.
M. René-Pierre Signé. Ils ne vont pas être épuisés !
M. Luc Chatel, ministre. De plus, 31,4 % des élèves de CP et 72,4 % de ceux de CE1 bénéficient également d’un enseignement de langue vivante.
Parmi les nouveaux défis auxquels nous sommes confrontés figure aussi la rénovation de la voie professionnelle : nous devons faire en sorte que cette dernière soit véritablement une formation qualifiante, qui permette l’insertion professionnelle.
C’est tout l’enjeu de la réforme qui a été mise en œuvre en septembre 2009, non pas pour faire des économies, monsieur Foucaud, mais pour élever le niveau de qualification des élèves, limiter le nombre de ceux qui sortent du système éducatif sans qualification, donner à tous les jeunes la possibilité d’obtenir un diplôme de niveau V et, au total, tenir compte des perspectives d’insertion dans la vie professionnelle.
S’adapter à de nouveaux défis, c’est enfin mettre en place des dispositifs liés à l’orientation des élèves et améliorer les processus en la matière. Nous avons mis en œuvre progressivement, depuis la rentrée de cette année, le parcours de découverte des métiers et des formations. En 2010, nous développerons les plates-formes d’information multimédias de l’ONISEP, l’Office national d’information sur les enseignements et les professions, qui ont fait l’objet d’une expérimentation dans l’académie d’Amiens.
Toutefois, l’enjeu essentiel en matière d’orientation, c’est indiscutablement la réforme du lycée : nous voulons passer d’un système d’orientation subi, dans lequel il faudrait, à quinze ans et pour la vie, choisir son avenir professionnel, à un dispositif beaucoup plus progressif, réversible, qui autorise les corrections de trajectoire et reconnaisse le droit à l’erreur.
Madame Gonthier-Maurin, vous avez souhaité qu’un adulte référent puisse accompagner les élèves dans ce parcours, qui est souvent vécu comme une épreuve par les familles et par les jeunes eux-mêmes. Or, madame la sénatrice, dans la réforme du lycée, nous proposons que ce soient les enseignants qui assurent ce tutorat des élèves, pour accompagner ceux qui n’ont pas la possibilité d’être bien informés, étant entendu que cette mission est complémentaire de celle des conseillers d’orientation, dont le rôle est irremplaçable.
S’adapter aux nouveaux défis, c’est donc moderniser notre lycée. Comme MM. Gérard Longuet, Jean-Claude Carle et Alain Vasselle l’ont rappelé, il s'agit d’un objectif essentiel du Gouvernement pour les prochains mois.
Monsieur Vasselle, nous sommes effectivement partis d’une large phase de concertation menée au printemps dernier par M. Richard Descoings. Elle a permis de dégager certains consensus, et c’est sur cette base que j’ai proposé des orientations que le Président de la République a présentées le 13 octobre dernier et que j’ai déclinées devant les organisations syndicales à partir du 19 novembre.
L’objectif est que cette réforme soit mise en place à partir de la rentrée de 2010 en classe de seconde. En découlera une modification de l’organisation des études au sein du lycée, la seconde devenant une classe générale de détermination, avec deux authentiques enseignements d’exploration d’une heure trente par semaine, dont un nécessairement en économie. L’idée est d’ouvrir le champ des possibles pour les élèves, de leur faire découvrir de nouvelles disciplines, afin qu’ils puissent améliorer leur parcours d’orientation et se déterminer en vue de l’année de première.
Je tiens à ce que l’ensemble des élèves puissent découvrir l’économie, au moins une fois dans leur vie. L’économie pour tous, c’est à mon sens une avancée importante de cette réforme du lycée.
Nous entendons également améliorer l’apprentissage des langues, au travers d’un plan d’une ampleur sans précédent, avec la mise en place de groupes de compétences, le recours aux moyens multimédias, le renforcement des échanges entre établissements scolaires. Nous voulons multiplier les moyens, pour permettre à nos élèves de quitter le lycée en maîtrisant parfaitement leur première langue vivante.
Il nous faut aussi ouvrir le lycée sur le monde, en faire un lieu davantage tourné vers la culture, améliorer la vie lycéenne, confier davantage de responsabilités à nos lycéens ; c’est dans cette direction que nous nous sommes orientés.
M. Longuet a évoqué le coût de cette réforme. Le Président de la République l’a rappelé le 13 octobre dernier, elle se fera à moyens constants. Les horaires des élèves ne seront pas augmentés, les deux heures par semaine d’accompagnement personnalisé pour tous se substituant à des enseignements traditionnels et relevant donc des obligations réglementaires de service des professeurs. L’accompagnement personnalisé des élèves ne représentera pas de coût supplémentaire.
Instaurer une plus grande égalité des chances entre les élèves constitue un autre défi que nous avons à relever : l’idée est de rendre l’école plus juste, ce qui signifie qu’il faut faire davantage pour aider les élèves qui en ont le plus besoin.
Au travers du renforcement du dispositif de l’accompagnement éducatif en collège, nous apportons une vraie réponse. En 2008-2009, 870 000 collégiens en ont bénéficié, soit environ 30 % des effectifs, proportion qui est montée jusqu’à 40 % dans certains départements ruraux. Le projet de loi de finances initiale pour 2010 prévoit d’y consacrer 278 millions d’euros.
Rendre l’école plus juste, c’est aussi accorder des moyens supplémentaires à l’éducation prioritaire. Ainsi, 1,2 milliard d’euros sont prévus pour 2010 au titre du plan de relance de l’éducation prioritaire, au travers des réseaux « ambition réussite », qui concernent 400 000 élèves, et des réseaux de réussite scolaire, touchant plus de 1 100 000 élèves.
M. Foucaud a évoqué la carte scolaire. À l’occasion de mon audition par la commission des finances du Sénat sur ce sujet, à la suite de la publication du rapport de la Cour des comptes, j’avais indiqué d’emblée que les effets de l’assouplissement de la carte scolaire n’étaient pas univoques : en effet, 20 % des établissements concernés ont vu leurs effectifs augmenter. Nous avons maintenant besoin d’une évaluation en profondeur de ces deux années d’assouplissement, avant d’aller plus loin dans ce sens. J’ai demandé à mes services de procéder à une telle évaluation.
À cet égard, j’ai évoqué plusieurs pistes devant la commission des finances du Sénat. Par exemple, j’ai émis l’idée que les élèves issus des écoles relevant des réseaux « ambition réussite » soient prioritaires pour le choix de leur collège. J’ai également parlé de la nécessité de stabiliser les équipes éducatives des collèges de ces réseaux, en affectant dans ces établissements des personnels bien formés et préparés à ce type de défi. C’est un enjeu en matière de ressources humaines. Nous pourrions nous inspirer de l’exemple des internats d’excellence, qui ont fait l’objet de recrutements spécifiques.
Une école plus juste, c’est aussi une école qui accueille toujours davantage d’enfants handicapés. Cette année scolaire, nous accueillons 185 000 élèves handicapés, soit 10 000 de plus que l’année dernière, 40 % de plus qu’en 2005, année du vote de la loi sur le handicap. En 2010, de nouvelles unités pédagogiques d’intégration seront créées. Au total, 292 millions d’euros de crédits sont prévus à cette fin.
J’indique à M. Signé qu’il n’y a plus d’incertitudes sur l’avenir des auxiliaires de vie scolaire individuels. Outre que le Gouvernement a décidé de prolonger les 17 000 contrats qui arrivaient à échéance, le Premier ministre a accepté la création de 5 000 postes supplémentaires : c’est un effort sans précédent ! De plus, j’ai décidé de signer des conventions avec quatre associations – la quatrième signature, avec l’association Autisme France, est intervenue cet après-midi – afin qu’elles puissent reprendre des contrats d’auxiliaire de vie scolaire parvenus à échéance mais ne pouvant être renouvelés, avec un financement de l’État. Ce règlement de cas difficiles a été rendu possible par l’adoption d’un amendement important par le Parlement.
Une école plus juste, monsieur Vasselle, c’est enfin une école capable de lutter contre la fracture numérique des territoires. C’est un sujet qui vous tient à cœur, je le sais. Dans votre département de l’Oise, 111 projets d’école numérique rurale sur 123 seront financés. Le plan de relance allouait 50 millions d’euros au financement de 5 000 écoles numériques rurales, situées dans des communes de moins de 2 000 habitants. Devant le succès de ce dispositif, le Premier ministre a décidé de redéployer des crédits. J’ai annoncé hier, avec Patrick Devedjian, que 17 millions d’euros supplémentaires seraient mobilisés afin de répondre à des demandes qui avaient été instruites mais auxquelles nous ne pouvions jusqu’alors donner une suite favorable. Cette somme nous permettra de traiter de 7 500 à 8 000 dossiers.
Quant aux formalités administratives que vous avez évoquées, monsieur Vasselle, j’en saisirai mes services, afin que les communes ayant procédé à des investissements puissent recevoir les subventions attendues dans les délais.
Au travers de ce projet de budget pour 2010, nous proposons de mettre en place une politique de gestion des ressources humaines de nos personnels d’éducation plus ambitieuse, tout en étant compatible avec la participation de l’éducation nationale à l’effort de redressement des finances publiques.
Le Président de la République l’a encore rappelé aujourd’hui, il n’est pas question de revenir sur le principe de la non-compensation d’un départ à la retraite sur deux dans la fonction publique. Au sein de l’éducation nationale, le schéma d’emplois pour 2010 se traduira par la suppression de 16 000 postes, chiffre qui correspond à la disparition de 18 202 emplois de stagiaire, liée à la « mastérisation » et conjuguée à la création d’emplois d’enseignant, dont 2 182 dans le premier degré, 144 dans le second degré pour des zones particulièrement défavorisées, ainsi que 476 dans l’enseignement privé. Je souligne, monsieur Signé, que nous respectons scrupuleusement, pour l’enseignement privé, la proportion de 20 % des suppressions ou des créations de postes.
M. René-Pierre Signé. Ce n’est pas sûr !
M. Luc Chatel, ministre. Mesdames, messieurs les sénateurs, les chiffres que je vous indique témoignent de la capacité de notre système éducatif de s’adapter à la réalité locale : certes, 16 000 postes seront supprimés en 2010, mais des créations d’emplois interviendront là où se manifestent des besoins, de manière que le taux d’encadrement puisse être maintenu. La qualité de l’enseignement ne souffrira donc pas de l’application du principe de la non-compensation d’un départ à la retraite sur deux.
La contrepartie de ces mesures, le Président de la République l’a toujours dit, c’est une revalorisation du traitement de nos enseignants. Une enveloppe de 196 millions d’euros est prévue à cette fin dans ce projet de budget. Les négociations ont démarré et devraient se poursuivre jusqu’à la fin du mois de janvier. La revalorisation sera importante, puisqu’elle représentera environ un mois de salaire supplémentaire en début de carrière.
Vous avez évoqué, mesdames, messieurs les sénateurs, la réforme de la formation des maîtres, avec la « mastérisation ». Allonger d’une année la formation de nos futurs enseignants est effectivement une mesure importante. Il s’agit bien, madame Laborde, de respecter un équilibre entre l’enseignement disciplinaire et la formation didactique.
Après la réforme, les étudiants en licence pourront bénéficier de stages d’observation. Ceux de master 1 suivront 108 heures de stage d’observation, une même durée de stage en responsabilité étant prévue en master 2, année au cours de laquelle aura lieu le concours, dont les lauréats seront nommés professeurs stagiaires. Rémunérés, ils bénéficieront d’une formation en alternance : deux tiers du temps en classe, un tiers en formation complémentaire.
Quant aux IUFM, le transfert de leurs compétences aux universités remonte à la loi Fillon de 2005. Les universités prépareront désormais les étudiants au master et aux concours de recrutement. L’éducation nationale, elle, a la responsabilité de l’organisation de ces concours, ainsi que de l’accueil des étudiants, puis des professeurs stagiaires, dans les classes. Les bâtiments et les équipements des IUFM, en particulier les antennes départementales, continueront à être affectés, notamment, à des formations universitaires, en concertation avec leur propriétaire, c'est-à-dire, le plus souvent, le conseil général.
Mesdames, messieurs les sénateurs, j’ai la conviction que ce budget nous permettra de poursuivre l’effort de réforme, de moderniser nos enseignements, d’adapter en profondeur notre système éducatif à la situation actuelle : assurer la réussite de chaque élève, tel est bien l’objectif prioritaire que s’est assigné le Gouvernement. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. Bruno Le Maire, ministre.
M. Bruno Le Maire, ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je voudrais tout d’abord exprimer mon attachement personnel, et celui du Gouvernement, à l’enseignement agricole public, qui est un enseignement de qualité, concernant plus de 300 000 élèves et présentant des taux de réussite aux examens de plus de 80 %. Surtout, le taux d’insertion professionnelle des élèves de cette filière est supérieur à 85 % : cela en fait, à mon sens, un véritable modèle en matière d’enseignement.
M. Ivan Renar. C’est pour cela qu’on l’étrangle !
M. Bruno Le Maire, ministre. Ayant constaté, à mon arrivée au ministère, un sentiment de désarroi au sein de l’enseignement agricole public, j’ai pris immédiatement un certain nombre de décisions qui étaient attendues depuis de longues années.
La première a été d’organiser des assises de l’enseignement agricole public. (Exclamations ironiques sur les travées du groupe socialiste.) Elles se sont ouvertes le 10 septembre dernier et seront clôturées le 10 décembre prochain. Elles permettront de fixer une nouvelle orientation et de nouvelles missions à l’enseignement agricole public, comme me l’ont demandé tous les responsables syndicaux.
J’ai décidé d’un moratoire sur toutes les fermetures et fusions d’établissements durant les travaux de ces assises.
M. Jacques Legendre, président de la commission de la culture. Très bien !
M. Bruno Le Maire, ministre. Par ailleurs, le Premier ministre a décidé de rétablir, à la rentrée de 2009, 60 équivalents temps plein afin d’accueillir 400 élèves supplémentaires et de résorber les listes d’attente. Grâce à l’adoption d’un amendement utile et constructif de Mme Férat, nous avons pu débloquer 38 millions d’euros en 2009. Nous solderons le report de charges de 8,2 millions d’euros qui était dû à l’enseignement agricole privé par un amendement gouvernemental au projet de loi de finances rectificative pour 2009.
Toutes ces décisions ont permis de rassurer l’enseignement agricole public quant à ses missions et à l’engagement du Gouvernement en sa faveur.
Dans cette perspective, le budget que nous avons construit doit permettre à l’enseignement agricole public de remplir ses missions dans le courant de l’année 2010. Comme tout budget, il est perfectible. J’ai donc écouté avec attention les remarques des rapporteurs, en particulier celles de M. Longuet et de Mme Férat, qui entendent améliorer encore le budget pour 2010 afin de donner à l’enseignement agricole public davantage de moyens pour assurer ses missions l’année prochaine. Je ne puis qu’accueillir très favorablement leurs propositions.
M. Pierre Hérisson. Très bien !
M. Bruno Le Maire, ministre. Luc Chatel et moi-même en avons parfaitement conscience, il est temps, dans l’intérêt général et dans celui de l’enseignement agricole, de renforcer les liens entre le ministère de l’éducation nationale et celui de l’alimentation, de l’agriculture et de la pêche. Cela permettra de résoudre les difficultés, récurrentes depuis plusieurs années, que nous rencontrons en ce qui concerne la gestion des emplois et des activités.
Nous ouvrirons ainsi la voie à la coopération que Mme Férat appelle de ses vœux, en engageant formellement un travail en ce sens entre nos deux ministères, qui portera par exemple sur l’organisation de concours ou sur les relations entre établissements géographiquement proches. Il y va de l’intérêt de l’enseignement agricole et de celui des élèves, que nous entendons tous défendre ici. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. Jacques Legendre, président de la commission de la culture. Très bien !
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Je voudrais interroger M. le ministre de l’éducation nationale.
Il est clair que la richesse de l’éducation, ce sont les enseignants. Les salaires et les charges sociales constituent d’ailleurs l’essentiel de votre budget, monsieur le ministre.
S’agissant des effectifs, la mission « Enseignement scolaire » va rémunérer 979 000 emplois en 2010, soit près de la moitié du plafond d’emplois de l’État autorisé.
Cela étant, nous éprouvons quelques difficultés à appréhender la réalité des effectifs. En effet, s’ils sont en partie placés sous le contrôle de l’État-employeur, des établissements tels que les collèges et les lycées, qui sont dotés d’une personnalité morale ainsi que d’un budget, et qui reçoivent des dotations de l’État, peuvent rémunérer directement un certain nombre de collaborateurs – on en dénombre environ 97 600, à raison de 53 000 assistants d’éducation, de 42 500 contrats aidés et d’un peu plus de 2 000 auxiliaires de vie scolaire.
M. Yannick Bodin. C’est une bonne chose ! Heureusement qu’ils sont là !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Ces établissements ne sont pas considérés comme des opérateurs de l’État, contrairement aux universités. Dans ces conditions, il n’y a pas d’encadrement, visible du moins, de l’évolution des effectifs en leur sein.
Par conséquent, peut-être faudrait-il envisager de modifier le statut de ces établissements, pour en faire des opérateurs de l’État. La question pourra d’ailleurs se poser aussi un jour pour les écoles : à cet égard, un décret se fait attendre depuis 2004.
Si l’on devait procéder à une telle modification du statut des collèges et des lycées, il serait bon alors de fixer des règles claires en matière d’encadrement des effectifs. L’effectivité du contrôle du Parlement passe sans doute par le renforcement des procédures.
Sur ce point, je souhaiterais, monsieur le ministre, que vous nous fassiez connaître vos intentions.
M. le président. La parole est à M. Luc Chatel, ministre.
M. Luc Chatel, ministre. Nous avons célébré, il y a quelques semaines, les vingt-cinq ans du statut des EPLE, les établissements publics locaux d’enseignement.
Ce sont ces établissements qui recrutent directement des personnels pour des emplois aidés ou des assistants d’éducation, soit pour leur propre compte, dans le cadre de l’action quotidienne de l’éducation nationale, soit pour le compte d’écoles, puisque celles-ci n’ont pas de statut particulier.
Ces contrats apparaissent non pas dans les effectifs du projet de budget que vous examinez, mais dans le budget de fonctionnement, où l’on trouve une rubrique concernant les assistants d’éducation, les auxiliaires de vie scolaire et les emplois aidés. Au total, plus de 1,5 milliard d’euros sont inscrits à ce titre, pour rémunérer un nombre de collaborateurs supérieur à ce que vous avez annoncé, puisqu’il faut aussi prendre en compte 6 000 personnes employées au titre de l’accompagnement éducatif.
Faut-il, au nom d’un souci fort légitime de transparence budgétaire, faire apparaître ces contrats comme des emplois et, en conséquence, revoir le statut de ces établissements ?
Cette question n’a pas été abordée au cours du colloque que nous avons organisé voilà deux mois à l’occasion du vingt-cinquième anniversaire du statut des EPLE, mais je ne suis pas opposé à ce que l’on engage cette réflexion tout à fait intéressante sur une éventuelle amélioration du dispositif dans le sens que vous souhaitez, même si je mesure mal la portée juridique d’une telle évolution statutaire.
questions-réponses-répliques
M. le président. Mes chers collègues, nous allons maintenant procéder à un échange de questions, de réponses et de répliques.
Je rappelle que l’auteur de la question dispose d’un temps de parole de deux minutes trente, de même que le ministre pour sa réponse. L’auteur de la question peut ensuite, s’il le souhaite, reprendre la parole pour une durée n’excédant pas une minute.
La parole est à M. Claude Domeizel.
M. Claude Domeizel. Ma question porte sur l’aide personnalisée.
Pour la deuxième année, les écoles élémentaires expérimentent ce dispositif mis en place de façon concomitante avec la suppression des cours le samedi matin. Après un démarrage difficile de ce service imposé et non concerté, il paraît utile d’observer ce qu’il en est aujourd’hui.
La mise en œuvre de l’aide personnalisée a mis à contribution les directeurs d’école, qui ont dû adapter les différents temps scolaires et périscolaires se superposant dans la journée.
Selon les écoles et les circonscriptions, l’aide personnalisée, plus ou moins intégrée dans les projets d’école, est dispensée soit le matin avant la classe, soit entre midi et deux heures, soit le soir après la classe. Dans tous les cas, ce fut, reconnaissons-le, un vrai casse-tête pour tous les intervenants – personnel enseignant, personnel communal, animateurs périscolaires –, mais aussi pour les familles dont les enfants sortent de l’école à des heures différentes.
Pour les enfants, les journées doivent paraître très longues, puisqu’elles peuvent atteindre dix heures s’ils vont à la garderie le matin et fréquentent la cantine le midi, puis la garderie ou l’étude le soir.
Certes, ces heures d’aide personnalisée peuvent être profitables lorsque les difficultés rencontrées par les élèves sont légères ou passagères, mais ce soutien est-il efficace pour les enfants connaissant des difficultés plus lourdes et plus marquées, d’ordre scolaire, psychologique ou social ? J’en doute profondément.
Il est en outre regrettable de constater que, désormais, règne une certaine confusion entre aide personnalisée et intervention des RASED. Il ne faut pas s’étonner si les nouvelles dispositions d’aide personnalisée ont finalement et paradoxalement mis en lumière le caractère indispensable du travail des RASED, dont le maintien est vivement souhaité par les enseignants.
À l’issue de ces deux années d’expérience, il nous paraît indispensable de faire un bilan en consultant les personnes concernées – enseignants, enfants et parents –, mais aussi les communes.
Monsieur le ministre, comptez-vous expertiser ce nouveau service d’aide personnalisée, de manière à mesurer son efficacité concrète, ainsi que les problèmes rencontrés avec les divers intervenants, tout en le comparant au service rendu par les réseaux d’aides spécialisées aux élèves en difficulté ?
M. le président. La parole est à M. Luc Chatel, ministre.
M. Luc Chatel, ministre. Le dispositif d’aide personnalisée mis en place dans le primaire a déjà été évalué par l’Inspection générale de l’éducation nationale, qui a remis en juillet 2009 un rapport intitulé Troisième note de synthèse sur la mise en œuvre de la réforme de l’enseignement primaire.
L’Inspection générale de l’éducation nationale conclut à un bilan largement positif de la mise en œuvre de cette aide personnalisée. Ainsi, le rapport indique que les parents et les élèves ont plébiscité le dispositif : « L’aide personnalisée est vue comme un privilège que les élèves demandent pour eux-mêmes. »
Ce dispositif est une avancée et constitue même, à mon sens, la bonne réponse au problème, évoqué tout à l’heure par M. Longuet, de la prise en compte de la diversité des élèves, qui représente une grande richesse de notre système éducatif.
Au-delà des programmes et des enseignements nationaux, dont je suis, en tant que ministre de l’éducation nationale, le garant, le système doit être capable de s’adapter aux spécificités de chaque élève. C’est l’objet de ces deux heures d’aide personnalisée, surtout en primaire, au moment de l’apprentissage des fondamentaux, quand les difficultés de lecture peuvent commencer à être perçues, avant l’entrée en sixième.
Nous avons souhaité laisser les établissements libres de s’organiser : c’est le directeur d’école qui décide, après avis du conseil d’école, et cela me semble une bonne chose. Dans ma ville de Chaumont, par exemple, plusieurs écoles ont fait des choix différents, en fonction des besoins des élèves et de l’avis des parents. Il faut laisser aux acteurs de terrain et à la communauté éducative la liberté de décider de cette organisation.
S’agissant de la prise en charge des enfants qui ont davantage de difficultés que d’autres, il ne faut pas mélanger les deux dispositifs : l’aide personnalisée est potentiellement destinée à tous les élèves, tandis que les RASED s’occupent de ceux qui rencontrent de grandes difficultés. La sédentarisation de 1 500 personnels a permis de rapprocher ces derniers de la réalité du terrain.
M. le président. La parole est à M. Claude Domeizel, pour la réplique.
M. Claude Domeizel. Monsieur le ministre, vous évoquez un rapport de l’Inspection générale de l’éducation nationale, dont j’ignorais l’existence. Je souhaiterais pouvoir en prendre connaissance, et savoir s’il compare le service rendu par l’aide personnalisée à l’action des RASED. Pourrions-nous, monsieur le ministre, avoir plus de précisions sur ce rapport ?
M. le président. La parole est à Mme Anne-Marie Escoffier.
Mme Anne-Marie Escoffier. Ma question porte sur la carte scolaire.
La réforme de la carte scolaire a été engagée en juin 2007 et entrera dans sa phase finale en 2010. Elle a pour objet d’assouplir les règles d’affectation des élèves dans les collèges ou les lycées.
Conforté, monsieur le ministre, par la progression du nombre des demandes de dérogation, vous souhaitez poursuivre et renforcer les mesures d’assouplissement, sur le fondement d’une rénovation profonde du système scolaire qui conduira à terme à placer les établissements d’enseignement et leur projet éducatif au cœur du système scolaire, ainsi qu’à apprécier et à évaluer les projets et les équipes pédagogiques.
Si l’objectif est louable, le résultat me paraît incertain. Tous les acteurs socioéconomiques, la Cour des comptes, les commissions des assemblées parlementaires, les étudiants eux-mêmes et l’Inspection générale de l’éducation nationale relèvent les nombreux effets secondaires, indirects et néfastes de cette réforme au regard du principe de l’égalité des chances et de l’équité pour l’accès à un établissement de qualité.
Ainsi, les services d’inspection notent que cette réforme concerne surtout les villes présentant une forte densité d’établissements et particulièrement bien desservies par les transports urbains.
Ils concluent, en revanche, à la difficulté, voire à l’impossibilité « technique », en milieu rural, de disposer de ce même droit à choisir effectivement et librement son établissement.
Pis encore, chacun constate que cette suppression de la carte scolaire conduit finalement, en réalité, à organiser un palmarès implicite des établissements scolaires et des équipes enseignantes. En outre, inéluctablement, les chances d’instaurer une mixité scolaire et sociale se réduisent alors comme peau de chagrin, ce qui entraîne un réel danger de ghettoïsation.
C’est pourquoi je souhaiterais, monsieur le ministre, connaître les premiers résultats de l’évaluation du dispositif d’assouplissement de la carte scolaire que vous vous êtes engagé à conduire.
J’aimerais également savoir quelles mesures vous permettront, comme vous vous y êtes aussi engagé, d’assurer aux établissements dont l’effectif se réduira la conservation de leurs moyens et la mobilisation de l’équipe enseignante pour améliorer la réussite des élèves.
Enfin, je voudrais que vous nous disiez, monsieur le ministre, si cette réforme est véritablement adaptée aux territoires ruraux, difficiles d’accès et où l’on est moins prompt à opérer des choix. Ne serait-il pas plus raisonnable de suivre le conseil de la commission de la culture et de réfléchir de manière plus approfondie sur les équilibres plus précaires du milieu rural, afin de pallier la disparition programmée des collèges et lycées « de campagne », qui se traduirait in fine par une amplification du phénomène de désertion de nos territoires ruraux ?
M. le président. La parole est à M. Luc Chatel, ministre.
M. Luc Chatel, ministre. La carte scolaire a été créée en 1963. Cette mesure se justifiait pleinement à une époque où l’on construisait à la fois, sur une grande échelle, de nouveaux quartiers de banlieue et des établissements scolaires. L’objectif était alors d’assurer une bonne mixité sociale.
Plus de quarante ans après, force est de constater qu’un effet pervers est apparu. L’application de la carte scolaire a abouti, de l’avis unanime, à des inégalités, avec le contournement du système par ceux qui le connaissent et envoient leurs enfants dans un établissement autre que celui qui leur est désigné par la carte scolaire. J’ai coutume de dire qu’il s’agit là d’un délit d’initiés, et la ghettoïsation dont vous avez parlé, madame le sénateur, résulte précisément du fonctionnement du dispositif de la carte scolaire !
Le Gouvernement a donc décidé, en 2007, d’aller vers la suppression de la carte scolaire en procédant de manière progressive, par un assouplissement. Nous avons ainsi mis en place de nouveaux critères de dérogation, en donnant la priorité aux enfants boursiers et aux enfants handicapés.
Deux ans après, nous constatons que le nombre de dérogations a augmenté de plus de 11 %. Cette progression sensible est due à la prise en compte des demandes exprimées pour les élèves boursiers et handicapés, qui ont été satisfaites dans deux cas sur trois.
M. Claude Domeizel. Et les autres ?
M. Luc Chatel, ministre. Comme je l’ai indiqué voilà quelques jours devant la commission de la culture, j’ai demandé à mes services de procéder à une évaluation plus approfondie de ces deux premières années d’assouplissement de la carte scolaire. Dès que j’en aurai les résultats, je les communiquerai à votre assemblée.
Il nous faut aller plus loin, et j’ai évoqué tout à l’heure un certain nombre de pistes.
D’abord, les élèves issus des écoles des réseaux « ambition réussite », les anciennes zones d’éducation prioritaire, doivent pouvoir choisir plus facilement leur collège, en vue d’une plus grande mixité sociale.
Il nous faut ensuite travailler sur les projets de ces établissements. Je le disais tout à l’heure, 20 % des 250 collèges des réseaux « ambition réussite » ont vu leurs effectifs augmenter : la raison en est que ces établissements ont construit un projet, auquel adhèrent les équipes pédagogiques ; ils ont bâti une identité forte et mis en place des partenariats. Il faut donc utiliser ces expériences et les diffuser dans d’autres établissements.
J’ai pris la décision qu’aucun collège ne serait fermé du seul fait des conséquences de l’assouplissement de la carte scolaire : les moyens affectés à un collège en difficulté doivent pouvoir servir à reconstruire un projet pédagogique. J’approuve l’idée qu’un collège puisse recruter sur profil des enseignants bien préparés et bien adaptés à sa situation.
Je reviendrai dans quelques semaines vous présenter le bilan que j’ai évoqué et vous soumettre des pistes de réflexion. Un certain nombre de syndicats m’ont proposé de travailler avec eux sur le sujet de la carte scolaire. Encore une fois, il nous faut aller plus loin et dépasser la situation actuelle : c’est bien le fonctionnement perverti du dispositif de la carte scolaire qui aboutissait à la ghettoïsation.
M. le président. La parole est à Mme Anne-Marie Escoffier, pour la réplique.
Mme Anne-Marie Escoffier. Monsieur le ministre, les délits d’initiés que vous évoquez, nous les connaissions, certes, et depuis bien longtemps. Je pense néanmoins qu’ils posaient moins de problèmes que le système actuel.
Les inspecteurs d’académie que nous rencontrons soulignent combien l’assouplissement de la carte scolaire, dont je persiste à penser qu’il n’a probablement pas été assez préparé, suscite de véritables difficultés au regard de la répartition des horaires, des transports scolaires, de l’accompagnement scolaire : autant d’aspects qui n’ont pas été anticipés.
Cela étant, je me réjouis qu’une véritable étude soit en cours de réalisation, qui nous permettra de voir si cet assouplissement répond vraiment aux besoins de nos élèves.
M. le président. La parole est à Mme Monique Papon.
Mme Monique Papon. Le Gouvernement a mis en œuvre, dès la rentrée de 2009, une réforme du lycée professionnel. L’objectif de cette réforme, que nous soutenons, est d’amener davantage de jeunes jusqu’au baccalauréat professionnel. Je tiens d’ailleurs à souligner que les principales orientations de cette réforme ont été approuvées par le rapport annuel du Haut Conseil de l’éducation, remis au Président de la République le 17 novembre dernier.
L’objet de cette réforme est non seulement d’augmenter le nombre de bacheliers professionnels et de favoriser leur accès à l’enseignement supérieur, mais aussi d’améliorer la lisibilité des diplômes pour les élèves et pour les chefs d’entreprise qui les recrutent. Il s’agit, surtout, de réduire significativement le nombre de jeunes quittant le système scolaire sans qualification.
Cette réforme a été fondée sur le constat suivant : un élève sur deux ayant choisi la voie professionnelle n’allait pas plus loin que le BEP. En effet, les élèves faisaient face à plusieurs types de difficultés.
Tout d’abord, le choix d’une spécialisation ou d’une filière se posait en des termes particulièrement contraignants pour l’élève. En ce sens, nous saluons la simplification et la souplesse de l’organisation de l’enseignement rendues possibles par la mise en place de passerelles entre les spécialisations et entre les filières.
Ensuite, la préparation d’un baccalauréat en quatre ans, contre trois ans pour les autres filières, apparaissait pénalisant pour les élèves. Je me félicite donc de ce que l’accès au baccalauréat professionnel soit désormais facilité, grâce à la création d’un parcours en trois ans, au lieu de quatre.
Cependant, je m’interroge sur les conséquences de l’accélération des apprentissages. En effet, pour de nombreux jeunes, la première année de BEP constituait une année de remise en confiance après une scolarité difficile. Pouvez-vous nous préciser, monsieur le ministre, quel est l’avenir des CAP et des BEP ? (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. le président. La parole est à M. Luc Chatel, ministre.
M. Luc Chatel, ministre. Madame le sénateur, vous avez rappelé l’importance et l’enjeu de la réforme de la voie professionnelle. Ma conviction profonde est qu’il n’y a pas une filière unique d’excellence dans notre pays.
M. Jean-Claude Carle, rapporteur pour avis de la commission de la culture. Très bien !
M. Luc Chatel, ministre. Par le passé, nous avons trop souvent eu le sentiment que la voie générale, et particulièrement la série S, constituait, en quelque sorte, la voie royale, en dehors de laquelle il n’y avait point de salut !
Il convient donc de diversifier les voies et les filières d’accès à l’excellence. C’est précisément l’enjeu de cette réforme du bac professionnel : le passage à trois ans vise à le revaloriser, pour le mettre sur un pied d’égalité avec le bac général et le bac technologique.
Nous avons la volonté de créer des passerelles qui permettent une orientation progressive des élèves. Dans cette perspective, ceux-ci recevront des formations correspondant à plusieurs spécialités du baccalauréat professionnel.
Nous avons également travaillé sur l’insertion de ces jeunes, afin de limiter le nombre d’élèves qui quittent le système sans diplôme ni qualification, dont on sait qu’une grande partie vient de la filière professionnelle.
Que deviennent, dans ces conditions, le CAP et le BEP ? Le passage à trois ans du parcours conduisant au baccalauréat professionnel modifie le niveau V, en faisant du CAP le diplôme d’insertion à ce niveau et du BEP une simple étape. Jusqu’à présent, un jeune sur deux arrêtait ses études après le BEP. L’objectif étant d’améliorer le niveau de qualification et d’amener le maximum de nos jeunes jusqu’au baccalauréat professionnel, le BEP va devenir une étape du cursus vers le baccalauréat professionnel.
M. le président. La parole est à Mme Monique Papon, pour la réplique.
Mme Monique Papon. Monsieur le ministre, je vous remercie de ces précisions : nul doute qu’elles vont rassurer les nombreux jeunes qui fondent de grands espoirs sur votre réforme du baccalauréat professionnel.
M. le président. La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Monsieur le ministre, je voudrais revenir sur la question des RASED. L’opacité du projet de loi de finances pour 2010 quant à l’avenir de ces réseaux m’amène à tirer de nouveau la sonnette d’alarme et à exercer une sorte de droit de suite.
Alors que le projet de loi de finances pour 2009 prévoyait la sédentarisation ou, pour mieux dire, la suppression de 3 000 postes en RASED, soit 1 000 équivalents temps plein travaillé, pour la rentrée, M. Darcos avait dû reculer devant la mobilisation. Il avait alors pris l’engagement de ne supprimer que 1 500 postes, soit 500 équivalents temps plein travaillé, ou ETPT. La suppression de ces 3 000 postes en RASED devait, en fait, permettre de combler le vide laissé par 3 000 départs à la retraite
Le projet de loi de finances pour 2009 prévoyait un plafond d’emplois de 318 912 ETPT pour le premier degré. Si l’engagement de ne supprimer que 1 500 postes en RASED avait été tenu, le plafond aurait dû logiquement être relevé de 500 ETPT. Or, à la page 50 du « bleu » budgétaire de cette année, que lit-on pour le plafond d’emplois au titre de 2009 ? La même chose que l’an dernier, soit 318 912 ETPT !
Les engagements ne sont donc pas tenus, sauf à penser qu’ils l’ont été au détriment d’autres postes. Monsieur le ministre, sans doute allez-vous pouvoir m’éclairer sur ce sujet.
De plus, je regrette, comme mon collègue Domeizel, que nous ne disposions pas d’une évaluation du dispositif de l’aide personnalisée. Vous parlez d’un bilan positif, mais il se fonde surtout, me semble-t-il, sur des données quantitatives. Que sait-on réellement de ce qui est fait pendant ces deux heures hebdomadaires ? Quels sont les élèves concernés ? Quel type d’activité est pratiqué ? Et avec quelle efficacité ?
J’ai entre les mains une étude que vous devez connaître. Publiée en septembre 2009 par la Fédération nationale des associations de rééducateurs de l’éducation nationale, la FNAREN, et l’université Paris-Descartes, elle porte sur les différences de traitement des difficultés scolaires entre l’aide personnalisée et l’aide spécialisée des RASED.
L’efficacité de l’aide personnalisée est confirmée pour les seuls élèves dont le niveau, même bas, est homogène. En revanche, pour ceux dont les difficultés relèvent d’une multiplicité de facteurs, l’aide rééducative des RASED permet des progrès dans le domaine des acquis scolaires, mais aussi dans celui des compétences cognitives, sociales et relationnelles.
Le fait que les difficultés de beaucoup d’élèves soient d’origine multifactorielle implique qu’il est nécessaire d’apporter des réponses adaptées et diversifiées. Ma question sera donc simple : allez-vous poursuivre la mise en œuvre de cette logique budgétaire de réduction de postes au détriment des enfants, ou bien allez-vous enfin entendre les arguments des professionnels qui militent pour une école ambitieuse, de la réussite pour tous, où les RASED doivent avoir toute leur place et être reconnus pour leur efficacité sur le terrain ?
M. le président. La parole est à M. Luc Chatel, ministre.
M. Luc Chatel, ministre. J’ai rappelé tout à l’heure que, dans le premier degré, le traitement des difficultés scolaires et la lutte contre l’échec scolaire constituaient pour le Gouvernement un objectif prioritaire.
Nous avons donc mis en place un dispositif complet permettant la prise en charge de tous les types de difficultés rencontrées par les élèves.
Deux heures d’aide individualisée sont dispensées chaque semaine par les enseignants, cette aide étant potentiellement accessible à tous les élèves, par exemple à ceux qui rencontrent des difficultés de lecture.
Des stages de remise à niveau, naturellement gratuits, sont mis en place pendant les vacances scolaires pour les élèves de CM1 et de CM2 rencontrant des difficultés en français et en mathématiques.
Les enseignants ont donc la possibilité de traiter eux-mêmes les difficultés liées à l’apprentissage, dans le prolongement de leurs classes.
Dans ce contexte, la contribution des enseignants spécialisés des RASED a évolué : ils interviennent désormais en cas de très grandes difficultés. À la rentrée de 2009, les maîtres spécialisés des RASED, dont l’action est donc tournée vers les situations que les professeurs des écoles ne peuvent pas gérer, étaient 8 000, nombre auquel il convient d’ajouter les 1 500 maîtres spécialisés itinérants, affectés à titre de surnuméraires dans une ou deux écoles.
Ce dispositif a été reconduit dans ces termes dans le projet de budget pour 2010.
M. le président. La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin, pour la réplique.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. J’observe que je n’ai pas reçu de réponse à la première partie de ma question !
Il me semble qu’une véritable confusion est entretenue entre les deux types d’aides.
M. Darcos m’avait indiqué, l’année dernière, que l’échec scolaire devait être résolu par les enseignants dans les classes. Or, l’aide spécialisée n’est pas dispensée en classe, mais vient s’ajouter aux horaires de cours.
Cela nous a d’abord amenés à nous inquiéter des effets du rallongement de la journée scolaire, l’aide personnalisée intervenant souvent à l’heure du déjeuner ou le soir.
En outre, quid des « bons » élèves, qui perdent ainsi pas moins de 540 heures d’enseignement du CP au CM2 ?
Quant aux enseignants, ils doivent devenir des « super-formateurs » polyvalents : enseignement, orientation à la place des conseillers d’orientation-psychologues, bivalence pour assurer plus de remplacements, aide aux élèves à la place des RASED.
Dans le même temps, les crédits de la formation continue sont réduits. Par exemple, les enseignants du premier degré perdront à la rentrée prochaine l’équivalent de 165 900 jours de formation continue : c’est une preuve supplémentaire que ce budget s’inscrit toujours dans une logique comptable.
M. le président. La parole est à Mme Françoise Cartron.
Mme Françoise Cartron. Monsieur le ministre, vous avez commencé votre intervention, tout à l’heure, en disant que le monde avait besoin de davantage d’éducation ; je suis tout à fait d’accord avec vous sur ce point, mais permettez-moi d’ajouter que l’éducation a besoin de moyens.
Or, au travers de ce projet de budget, vous poursuivez l’œuvre de réduction massive des moyens humains entreprise depuis 2002.
En 2010, 16 000 postes seront supprimés, tandis que 13 500 l’avaient déjà été en 2009. Au total, près de 45 000 postes ont disparu depuis 2003, alors que, dans le même temps, les effectifs du premier degré ont progressé de plus de 15 000 élèves.
Dans la logique de la fameuse RGPP, le Gouvernement avait annoncé que, en ce qui concernait l’enseignement scolaire, deux départs à la retraite sur trois devaient être compensés. Or, aujourd'hui, la réalité nous apparaît : le taux de remplacement ne sera que de un sur deux.
Les effets de cette politique se font déjà sentir, hélas ! et, dans certaines académies, on doit désormais recourir à des contractuels ou à des retraités pour assurer les remplacements… quand les remplacements sont assurés. Dans certains établissements, les horaires normaux d’éducation physique et sportive ne peuvent être dispensés, faute d’enseignants.
Dans ce domaine comme dans d’autres, l’obsession comptable et la politique du chiffre ne peuvent mener qu’à la dégradation du service public.
L’année dernière, toujours au nom de la rationalisation, le Gouvernement avait décidé de supprimer un grand nombre de postes en RASED. Les heures d’intervention des RASED ont été remplacées par des heures de soutien assurées par les enseignants : or, quand elles ont effectivement été mises en place, ces heures de soutien ont été le plus souvent dispensées au moment de la pause du déjeuner, ce qui est en totale contradiction avec les recommandations issues des études portant sur les rythmes scolaires. De plus, aucun contenu sérieux n’a été défini pour cette aide.
En réalité, on a sacrifié les RASED, qui accomplissaient un travail remarquable auprès des enfants en difficulté scolaire, pour leur substituer une solution inadaptée, qui peut apparaître comme un contresens pédagogique.
Quels critères avez-vous retenus, monsieur le ministre, pour l’évaluation du dispositif d’aide ? Au travers de vos propos, j’avais perçu qu’il s’agissait plutôt d’un indice de satisfaction que d’un critère relatif à la réussite de l’enfant.
Par ailleurs, jusqu’à quand allez-vous persister à ne compenser qu’un départ à la retraite sur deux, en privant ainsi notre enseignement public des moyens dont il a besoin ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. Luc Chatel, ministre.
M. Luc Chatel, ministre. Madame le sénateur, j’ai rappelé tout à l’heure les propos tenus par le Président de la République cet après-midi ; ils apportent, me semble-t-il, des éléments de réponse à votre seconde question.
Nous pouvons nous retrouver sur un point au moins : l’éducation a besoin de moyens. Or justement, le projet de budget que je vous présente ce soir, avec 59,6 milliards d'euros, est le plus gros budget que vous ayez jamais eu à voter, mesdames, messieurs les sénateurs, pour l’éducation nationale.
M. Jean-Claude Carle, rapporteur pour avis de la commission de la culture. Absolument !
M. Luc Chatel, ministre. J’ai également rappelé que, dans l’environnement budgétaire contraint que la commission des finances du Sénat connaît bien, marqué par une augmentation de 1,2 % des dépenses de l’État l’année prochaine, l’éducation nationale voit, quant à elle, son budget progresser de 1,6 %, ce qui signifie bien que nous nous situons au-delà de la simple contrainte budgétaire.
M. René-Pierre Signé. C’est l’inflation !
M. Luc Chatel, ministre. Je rappellerai enfin, madame le sénateur, que, depuis 1975, la France n’a cessé d’augmenter son budget pour l’éducation nationale et qu’elle consacre 16 % de plus à ses élèves du secondaire que la moyenne des pays de l’OCDE.
M. Jacques Legendre, président de la commission de la culture. Eh oui !
M. Luc Chatel, ministre. En conséquence, s’il suffisait de multiplier les moyens pour obtenir des résultats, 150 000 jeunes ne quitteraient sans doute pas chaque année notre système éducatif sans diplôme, comme c’est le cas aujourd’hui.
Nous n’avons pas fait le choix de tailler dans les effectifs de manière systématique : nous adaptons aux priorités et aux évolutions démographiques les moyens de l’éducation nationale, par exemple en créant cette année plus de 2 000 postes dans le primaire et dans les zones urbaines sensibles.
S’agissant de l’évaluation de l’aide individualisée, j’ai fait référence tout à l’heure à un rapport de l’Inspection générale de l’éducation nationale. Un autre outil nous sera fourni par l’évaluation des élèves décidée dans le cadre de la réforme : l’aide individualisée est maintenant en place depuis une année pleine, et nous allons donc pouvoir mesurer, auprès des élèves, les effets qu’elle peut avoir. Les résultats de ces évaluations étant publics, ils seront naturellement largement diffusés.
M. le président. La parole est à Mme Françoise Cartron, pour la réplique.
Mme Françoise Cartron. Monsieur le ministre, vous avez dit, à juste titre, que le monde avait changé et nos élèves aussi ; dès lors, il est sans doute normal que les moyens aient augmenté sur les vingt dernières années.
Par ailleurs, si vous voulez comparer ces moyens à ceux qu’allouent les autres pays de l’OCDE à leur système éducatif, il faut entrer dans le détail et examiner quel usage en est fait et à quelles priorités ils sont affectés.
Pour ma part, je constate avec inquiétude qu’il y a une diminution des moyens consacrés à l’accompagnement des élèves en difficulté. Or, c’est sur ces élèves-là que nous devons faire porter notre effort si nous voulons réduire le nombre des élèves qui sortent sans qualification de notre système éducatif.
M. le président. La parole est à M. Yvon Collin.
M. Yvon Collin. Sur un budget de presque 60 milliards d’euros devant être consacrés à la mission « Enseignement scolaire » en 2010, le système du remplacement mobilisera 2,7 milliards d’euros.
Depuis quelques années, les parents se plaignent de l’inefficacité des remplacements, et les enseignants eux-mêmes les jugent inadaptés aux besoins des écoles, mais aussi et surtout des élèves.
Nous sommes dans une situation telle qu’il s’agit avant tout d’organiser la pénurie. À chaque rentrée, du fait des suppressions de postes, les conditions d’enseignement se dégradent et la gestion quotidienne des remplacements se trouve compliquée.
Dans mon département, le Tarn-et-Garonne, la situation à cet égard est devenue très alarmante dans les écoles primaires.
Alors que la population scolaire du premier degré s’est accrue de 1 140 élèves entre 2006 et 2008, les créations de postes n’ont pas suivi. Le Tarn-et-Garonne a ainsi la particularité d’avoir un des taux de remplacement les plus bas, soit 6,95 %, alors que la moyenne de l’académie de Toulouse est de 8,5 %, et la moyenne nationale de 8,4 %. En 2007, le département se classait, sur ce plan, à l’avant-dernier rang national, devant le Morbihan.
Comment faire accepter aux parents cette situation de sous-dotation chronique ? Cette année, l’affectation de deux remplaçants supplémentaires, pour un total de quatre-vingt-deux, ne suffira pas à rattraper le retard accumulé, d’autant que, sur ces deux postes, un demi-poste a été créé pour compenser la fermeture d’une classe à Montaigu-de-Quercy.
Les difficultés sont telles que sept enseignants du Lot voisin ont été intégrés, mais nous sommes encore loin des moyennes académiques. En outre, monsieur le ministre, que deviendront ces postes l’an prochain ?
À la rentrée de 2010, 777 élèves supplémentaires seront attendus dans les écoles primaires du Tarn-et-Garonne, ce qui devrait avoir pour conséquence l’allocation d’une dotation exceptionnelle au titre de l’évolution démographique, correspondant à une vingtaine de postes. Par ailleurs, si des créations de postes de remplaçant sont envisagées pour la rentrée de 2010, se feront-elles au détriment des nécessaires ouvertures de classes ?
Monsieur le ministre, la question des remplacements recouvre deux enjeux majeurs : d’une part, la continuité de la scolarité des enfants ; d’autre part, la formation continue des professeurs. Quelles garanties pouvez-vous donc nous apporter pour rassurer des parents et des enseignants très inquiets ?
M. le président. La parole est à M. Luc Chatel, ministre.
M. Luc Chatel, ministre. Avant d’évoquer le cas de votre département, je présenterai la situation générale au regard des remplacements.
Il est exact que le système des remplacements doit être amélioré dans notre pays. Il est aujourd'hui beaucoup trop rigide, et nous avons décidé d’y remédier.
Pour lui donner davantage de souplesse, mon prédécesseur avait envisagé la création d’une agence du remplacement, évoquée tout à l’heure par M. Longuet. Je ne suis pas sûr que le terme « agence » soit forcément approprié, mais le principe d’une amélioration du système des remplacements doit demeurer. J’ai donc confié une mission sur ce thème à M. Michel Dellacasagrande, ancien directeur des affaires financières de l’éducation nationale, qui doit me rendre dans les prochains jours les conclusions de ses travaux. J’annoncerai des mesures d’amélioration de notre système du remplacement au début de l’année prochaine.
Aujourd'hui, 91 % des absences sont compensées dans le premier degré, mais le taux de mobilisation des titulaires remplaçants est de 80 % seulement. Il nous faut donc aller plus loin.
Dans le second degré, le remplacement est assuré à 96,5 %, mais le taux de mobilisation des TZR, les titulaires en zone de remplacement, est de 85 %.
Par ailleurs, on constate de fortes disparités entre académies : dans l’une, il y aura des enseignants disponibles dans certaines disciplines, mais pas de besoins ; dans une académie voisine, il y aura des besoins dans ces mêmes disciplines, mais pas d’enseignants disponibles…
Telle est la situation, et je reviendrai donc vous présenter en début d’année prochaine, mesdames, messieurs les sénateurs, des propositions tendant à l’améliorer.
Quant à la situation particulière du Tarn-et-Garonne, monsieur Collin, les chiffres qui m’ont été transmis montrent que votre département a reçu des dotations en postes significatives pour faire face à la pression démographique. Il a en effet bénéficié de seize des quarante-quatre emplois créés dans l’ensemble de l’académie à la rentrée de 2007, et de vingt-cinq des quarante postes créés, toujours dans l’ensemble de l’académie, à la rentrée de 2009. Le Tarn-et-Garonne s’est donc vu octroyer 62,5 % des emplois créés à la rentrée de 2009 alors qu’il compte moins de 10 % des effectifs du premier degré de l’ensemble de l’académie. Par conséquent, je n’ai pas le sentiment que votre département ait été mal traité par le rectorat !
M. le président. La parole est à M. Yvon Collin, pour la réplique.
M. Yvon Collin. J’ai bien noté, monsieur le ministre, que le fonctionnement des remplacements ne vous paraît pas idéal et que vous envisagez de l’améliorer dès la rentrée prochaine.
Les chiffres que j’ai cités pour le département du Tarn-et-Garonne sont parfaitement exacts. Si vous le souhaitez, je suis tout à fait disposé à poursuivre cette discussion.
M. le président. La parole est à Mme Colette Mélot.
Mme Colette Mélot. Monsieur le ministre, la loi du 11 février 2005 a renforcé les actions en faveur de la scolarisation des enfants handicapés. Elle affirme le droit, pour chacun, à une scolarisation en milieu ordinaire, au plus près de son domicile, à un parcours scolaire continu et adapté. Elle permet en outre aux parents d’être plus étroitement associés à la décision d’orientation de leur enfant et à la définition de son projet personnalisé de scolarisation.
Comme l’a rappelé le Président de la République lors de la première Conférence nationale du handicap du 10 juin 2008, la scolarisation des enfants handicapés reste un objectif prioritaire.
Dans cette perspective, une solution concrète en faveur des enfants handicapés scolarisés a été adoptée lors de l’élaboration, en juillet dernier, de la loi relative à la mobilité et aux parcours professionnels dans la fonction publique.
Cette mesure prévoit que l’aide individuelle de l’État en faveur des enfants présentant un handicap particulier pourra être assurée par une association ayant fait l’objet d’un agrément et conclu une convention avec le ministère de l’éducation nationale, et ce après la signature d’un accord entre l’inspecteur d’académie et la famille de l’enfant. Cette solution innovante permet de garantir la continuité de l’aide scolaire entre l’école et le milieu familial, dans l’intérêt supérieur de l’enfant.
Pouvez-vous nous rassurer, monsieur le ministre, sur la mise en œuvre de cette mesure ?
Par ailleurs, en ce qui concerne les auxiliaires de vie scolaire, force est de constater les progrès qu’ils font accomplir à l’élève dont ils ont la charge, grâce à la relation de confiance qu’ils instaurent avec lui. Dans ces conditions, la fin de leur contrat de travail est souvent déstabilisante pour l’enfant handicapé, comme pour sa famille. Quelles mesures pourraient être prises pour éviter ces difficultés, monsieur le ministre ?
Enfin, pouvez-vous nous préciser le nombre d’unités pédagogiques et de postes d’auxiliaire de vie prévus dans le projet de budget ? (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. le président. La parole est à M. Luc Chatel, ministre.
M. Luc Chatel, ministre. Madame le sénateur, j’ai rappelé tout à l’heure la forte volonté du Gouvernement d’intégrer les élèves handicapés à l’école et les progrès qui ont été réalisés depuis quatre ans : 185 000 enfants handicapés sont aujourd’hui scolarisés au sein des établissements.
Nous avons ouvert, lors de la dernière rentrée, 200 nouvelles unités pédagogiques d’intégration. Elles sont désormais au nombre de 1 800 dans notre pays, l’objectif étant de passer le cap des 2 000 UPI à la rentrée de 2010.
Par ailleurs, nous ouvrons chaque année, dans le premier degré, une centaine de classes pour l’inclusion scolaire, les CLIS. Aujourd’hui, plus de 4 000 CLIS accueillent environ 41 000 élèves.
S’agissant des auxiliaires de vie scolaire, j’ai déjà dit que nous avions fait le choix de reconduire les 17 000 contrats existants. Nous avons en outre créé 5 000 postes supplémentaires, ce qui signifie qu’aujourd’hui 22 000 postes d’auxiliaire de vie scolaire individuel sont inscrits dans le projet de budget.
Nous avons conscience des difficultés rencontrées par certaines familles en termes de continuité dans l’accompagnement de leur enfant lorsque le contrat d’un auxiliaire de vie scolaire arrive à échéance et ne peut être renouvelé, bien que le poste continue d’exister. Le Gouvernement a donc présenté un amendement, que le Sénat a adopté au mois de juillet, visant à permettre la prise en charge de ces personnels par les associations, qui prennent ainsi le relais.
J’ai signé une convention en ce sens, avant la rentrée scolaire, avec l’Union nationale des associations de parents et amis de personnes handicapées mentales, l’UNAPEI, la Fédération générale des pupilles de l’enseignement public et la Fédération nationale des associations au service des élèves présentant une situation de handicap, la FNASEPH, puis, cet après-midi même, avec l’association Autisme France. Ce dispositif, qui prévoit le versement d’une aide de l’État, doit permettre d’assurer un portage et la continuité de la présence des mêmes auxiliaires de vie scolaire auprès des enfants handicapés scolarisés.
Pour l’avenir, il serait bon, comme vous l’avez souligné, madame le sénateur, de pérenniser ces emplois de façon durable. Ma collègue Nadine Morano et moi-même réfléchissons à la constitution d’une véritable filière professionnelle, comme il en existe dans le secteur médico-social, car il s’agit là d’un vrai métier, appelé à se développer dans les années à venir. Des auxiliaires de vie ont été formés et ont acquis de vraies compétences ; il ne faut pas les laisser perdre.
M. le président. La parole est à Mme Colette Mélot, pour la réplique.
Mme Colette Mélot. Je vous remercie de vos réponses, monsieur le ministre, qui sont de nature à rassurer les familles des enfants handicapés. Il nous faut toujours avoir à l’esprit les difficultés qu’elles rencontrent pour trouver un établissement qui convienne au type de handicap de leur enfant. C’est toujours un véritable parcours du combattant, car chaque cas est unique.
La situation s’améliore, mais il faut encore trouver des solutions au cas par cas, dans l’intérêt de l’enfant.
M. le président. La parole est à M. Ivan Renar.
M. Ivan Renar. En 2009, un projet de création d’une agence nationale du remplacement était censé justifier la suppression de 3 000 postes d’enseignant. Aujourd’hui, ce projet semble abandonné, mais les 3 000 postes ont bel et bien été supprimés. Dans les documents budgétaires, on parle désormais en équivalents temps plein, officiellement pour décompter de façon plus exacte les temps partiels, mais, en réalité, pour que l’on ne puisse plus distinguer les emplois précaires des emplois statutaires.
Sous couvert d’une amélioration de la gestion des remplacements, vous procédez littéralement à une précarisation à marche forcée des enseignants affectés à une mission de remplacement dans le second degré. En effet, la proportion de non-titulaires ne cesse d’augmenter, particulièrement dans le cadre du service du remplacement.
Alors que le budget affecté au remplacement est en baisse, on ne peut que s’interroger sur la volonté du ministère : souhaitez-vous avoir de plus en plus recours à une main-d’œuvre bon marché, malléable car désemparée, ou à une cohorte de précaires embauchés selon les besoins et payés à la vacation ?
La réforme de la formation des maîtres est d’ailleurs une aubaine au regard de cette politique, qui transforme les jeunes diplômés en génération « kleenex » : combien d’étudiants se retrouveront sans poste, à l’issue de leur master d’enseignement, faute d’un recrutement suffisant de titulaires ? Ce seront autant de jeunes diplômés disponibles pour assurer suppléances et vacations à bas coût, sans aucune perspective !
Avec l’autonomisation des établissements qui, faute d’enseignants disponibles, affectent à l’année des titulaires sur zone de remplacement, les TZR, on assiste à une baisse du potentiel de remplacement, d’où l’augmentation du recours à des précaires. C’est d’autant plus pratique que ces précaires sont rémunérés sur les budgets d’heures supplémentaires effectives et qu’ils ne sont donc pas comptabilisés au titre du plafond d’emplois : encore une économie facile réalisée par le ministère, au détriment de l’offre éducative !
Cet ensemble de mesures d’économie déstabilise le dispositif de remplacement, ce qui conduit à une augmentation du nombre d’enseignants non remplacés. On se rappellera la création par la Fédération des conseils de parents d’élèves des écoles publiques, la FCPE, en septembre 2009, d’un site de recensement des enseignants non remplacés, témoignage du désarroi des parents face à la dégradation bien réelle de l’offre éducative.
On peut aussi s’interroger sur la pertinence de l’indice de performance, qui ne comptabilise, pour calculer le taux de remplacements, que ceux de longue durée, excluant ceux de moins de quinze jours, qui posent justement le plus de problèmes.
Étant donné les répercussions réelles, sur le terrain, de la diminution du nombre de postes, après la suppression de 3 000 postes de remplaçant, les TZR étant en outre moins nombreux et souvent affectés à l’année, eu égard à cette importante baisse du potentiel de remplacement, par quels moyens envisagez-vous de remplacer les enseignants absents cette année ? Va-t-on continuer à précariser toute une génération de jeunes diplômés ?
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Luc Chatel, ministre. Monsieur le sénateur, ce projet de budget prévoit, pour le premier degré, 27 000 postes de titulaire remplaçant, soit 8,5 % du nombre total d’enseignants du premier degré, et 21 000 enseignants remplaçants pour le second degré, dont 75 % de titulaires, soit 15 700 TZR, et 25 % de contractuels, soit 5 300 vacataires, souvent faute de titulaires disponibles dans la discipline concernée.
Je précise que ces vacataires sont souvent des étudiants ayant échoué au concours de recrutement et qui vont le représenter l’année suivante. Ils bénéficient ainsi d’une formation permanente complémentaire, en attendant le prochain concours.
J’ai déjà rappelé que la situation globale du remplacement ne me satisfaisait pas. C’est la raison pour laquelle j’ai confié une mission sur ce sujet à M. Dellacasagrande, qui me rendra ses conclusions dans les jours prochains. Ma conviction est que nous devons nous orienter vers un système beaucoup plus souple et plus efficace, permettant aux académies d’interagir et d’affecter les moyens là où sont les besoins.
M. le président. La parole est à M. Ivan Renar, pour la réplique.
M. Ivan Renar. Vous avez omis d’évoquer, monsieur le ministre, la désormais célèbre circulaire de M. le recteur de l’académie de Créteil relative à l’ « amélioration des pratiques liées au remplacement ».
Au travers de ce document, dont la presse s’est largement fait l’écho et qui fera date, les chefs d’établissement sont invités à remédier aux problèmes de remplacement des professeurs absents, le rectorat n’étant plus, de son propre aveu, en capacité de le faire, car il ne dispose pas du corpus d’enseignants suffisant. Aussi les responsables d’établissement sont-ils appelés à trouver et à recruter « des étudiants ou des personnes titulaires au minimum d’une licence ou ayant des compétences avérées » à qui, en « cas d’urgence », on pourrait confier immédiatement des élèves.
Cette situation est difficilement acceptable, d’autant que ce sont souvent les établissements des quartiers les plus défavorisés qui connaissent les plus grands besoins en matière de remplacements. Il est indispensable, tout particulièrement dans ces établissements, que les remplacements soient assurés par des enseignants formés et expérimentés, et non par des jeunes livrés à eux-mêmes face à des élèves qui feront, eux, les frais de l’inexpérience de leurs professeurs.
Comme j’ai pu le dire hier matin à Mme Pécresse lors du débat sur le projet de budget de la recherche et de l’enseignement supérieur, la précarité est en passe de devenir une véritable plaie pour l’ensemble de notre système d’enseignement et de recherche. Prenez-y garde, monsieur le ministre !
M. le président. La parole est à Mme Claudine Lepage.
Mme Claudine Lepage. « Un plan d’urgence pour les langues » : c’est ainsi que le Président de la République a qualifié, le 13 octobre dernier, la nouvelle politique qu’il entend promouvoir en matière d’enseignement des langues étrangères, en affichant l’ambition de former des bacheliers bilingues, voire trilingues.
Bilinguisme, trilinguisme : ce sont bien les termes employés par M. Sarkozy. Cette ambition est remarquable !
Sénatrice des Français de l’étranger et observatrice particulièrement attentive de l’incroyable enrichissement que représentent non seulement la maîtrise d’une autre langue, mais aussi la connaissance inhérente d’une autre culture, d’un autre mode de pensée, je souscris totalement à cet ambitieux projet ; j’attendais donc des idées neuves de la réforme du lycée.
Mais dans les faits, monsieur le ministre, à quoi correspond ce « plan d’urgence » ?
Est annoncée, d’abord, la répartition des élèves par groupes de compétence. Mais les groupes de niveau ne sont-ils pas déjà prévus par les textes ? Leur mise en place effective n’est empêchée, bien souvent, que par le manque de moyens…
Est prévu, ensuite, le recours à des locuteurs natifs. Mais que sont les assistants, présents dans nombre d’établissements, sinon des locuteurs natifs ? Et ce n’est pas une nouveauté, puisqu’ils existaient déjà à l’époque lointaine où je fréquentais le lycée !
Est proposé, enfin, l’enseignement de matières non linguistiques en langues étrangères. C’est un excellent moyen, en effet, de témoigner que la langue étrangère, plus qu’une simple discipline, est avant tout un outil de communication permettant, en l’occurrence, d’acquérir des connaissances.
N’est-ce pas le rôle des sections européennes, telles que nous les connaissons depuis bientôt vingt ans ?
Monsieur le ministre, le bilinguisme que vous appelez de vos vœux, c’est bien autre chose, et cela nécessite bien d’autres moyens. Cet objectif peut être approché grâce, d’abord, à l’enseignement précoce, c’est-à-dire dès la maternelle, les professeurs des écoles ne devant cependant pas se limiter à l’apprentissage de comptines, et grâce, ensuite, à la généralisation de l’enseignement de disciplines fondamentales non linguistiques par des locuteurs natifs.
Mais l’éducation nationale dispose-t-elle des ressources humaines adéquates ? J’en doute. Pour parvenir à cette fin, une vision au minimum européenne est nécessaire, accompagnée d’échanges d’enseignants. Dans ce cadre, le récent programme Jules Verne, sorte de programme Erasmus des professeurs, est prometteur, c’est vrai, mais à la condition qu’il soit davantage développé.
Bien entendu, il n’est pas question de mettre en concurrence les professeurs de l’éducation nationale et les enseignants locuteurs natifs. L’expérience des écoles françaises à l’étranger – je les connais bien – témoigne de la parfaite complémentarité de leur travail pour le bienfait de tous. Qui mieux qu’un natif peut enseigner non seulement la langue, mais aussi les codes interculturels et la communication non verbale ?
Je vous poserai une seule question, monsieur le ministre : au-delà des mots, l’éducation nationale se donnera-t-elle les réels moyens de faire en sorte que chaque lycéen approche au moins le bilinguisme à sa sortie du lycée ?
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Luc Chatel, ministre. Madame le sénateur, nous partageons le même objectif : nous ne nous résignons pas à ce que notre pays demeure dans les profondeurs des classements internationaux : il occupe la soixante-quatrième sur cent neuf du classement TOEFL. Nous avons décidé de prendre le taureau par les cornes, si vous me permettez cette expression, et de multiplier les initiatives dans le domaine de l’apprentissage des langues.
Les décisions que nous avons prises font suite à des expérimentations qui ont été menées avec succès dans de nombreux lycées. Les groupes de compétences, consistant à regrouper les élèves par niveau homogène et à dispenser un enseignement en petits groupes aux élèves connaissant davantage de difficultés, existent dans un certain nombre d’établissements. Ils ont montré leur efficacité.
Par ailleurs, certaines disciplines seront enseignées en langue étrangère. Dans la filière littéraire, qui doit devenir une filière linguistique d’excellence, deux heures et une heure trente de littéraire étrangère seront dispensées respectivement en première et en terminale. Il s’agira d’enseignements supplémentaires. Cette solution est l’une des bonnes réponses au problème de l’apprentissage des langues.
La généralisation du recours aux multimédias pour l’apprentissage de la langue anglaise, notamment, permettra de réaliser des progrès très significatifs, comme ce fut partout le cas où nous l’avons expérimenté.
Enfin, chaque lycéen devra avoir effectué au moins une fois un échange avec un établissement dans un pays dont la langue officielle est sa première langue vivante, ce qui contribuera également à un bon apprentissage des langues.
C’est non pas une seule mesure mais l’addition de plusieurs initiatives, pour la plupart expérimentées avec succès, qui permettra de régler le problème. Nous voulons généraliser ces dispositions à tous les lycées.
M. le président. La parole est à Mme Claudine Lepage, pour la réplique.
Mme Claudine Lepage. Monsieur le ministre, je vous remercie de ces précisions.
Vous avez évoqué l’enseignement en langue étrangère de la littérature. On pourrait imaginer qu’il en soit de même pour l’histoire, par exemple. J’insiste sur le fait que cet enseignement pourrait être dispensé par des locuteurs natifs.
Je veux vous donner l’exemple du lycée français de Munich, que je connais très bien, où la littérature allemande et l’histoire sont enseignées par un enseignant ou une enseignante allemande. Un tel enseignement concourt non seulement à améliorer l’accent des élèves – point important –, mais aussi à diffuser une autre vision.
M. le président. La parole est à Mlle Sophie Joissains. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
Mlle Sophie Joissains. Mon intervention porte sur la formation des enseignants, volet fondamental pour mener à bien la réforme globale de l’éducation nationale dans laquelle vous vous êtes engagé, monsieur le ministre.
Au mois de juillet dernier, lors de votre audition par la commission de la culture, de l’éducation et de la communication, vous avez présenté les grands axes de votre projet. J’aimerais obtenir des précisions sur certains points.
Ma première question concerne l’objectif d’élévation du niveau de qualification des enseignants, désormais recrutés au niveau du master. Nous savons tous que le contenu des formations, de même que le fonctionnement des concours, ne permet plus de répondre aux besoins et aux attentes, sur le plan tant intellectuel que disciplinaire, du système éducatif. Comment la « mastérisation » pourra-t-elle répondre à ce double défi, et surtout, quelles mesures, à l’image du compagnonnage, l’accompagneront ?
Ma deuxième question vise la répartition des compétences entre l’État et les universités dans la mise en œuvre de la réforme de l’éducation nationale. En effet, leur complémentarité est seule garante d’une amélioration notoire de la qualité de l’éducation.
Je pense à la préparation aux concours, à l’adaptation des contenus, et, évidemment, à l’avenir des IUFM, qui ont vocation à s’intégrer pleinement dans la réforme et sont des éléments importants de l’attractivité de nos territoires. Pouvez-vous m’éclairer sur ce point ?
Monsieur le ministre, je n’oublie pas la célèbre formule de Victor Hugo : une école qui ouvre, c’est une prison qui ferme. Pouvez-vous donc nous éclairer encore sur la mise en œuvre de cette réforme essentielle pour les futurs enseignants et pour l’éducation des citoyens de demain, en précisant les moyens budgétaires qui lui seront alloués ?
M. Jean-Claude Carle, rapporteur pour avis de la commission de la culture. Très bonnes questions !
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Luc Chatel, ministre. J’ai eu l’occasion de revenir tout à l’heure sur les grands enjeux de la réforme de la formation des enseignants. Ces derniers doivent atteindre le haut niveau de compétences nécessaire à l’exercice de leur métier, ce qui sera possible grâce à l’allongement d’une année de la formation des maîtres. La revalorisation des carrières est par conséquent indispensable.
Les futurs enseignants, à l’issue de l’obtention d’une licence, suivront un master disciplinaire. En master 1, ils effectueront des stages dits d’« observation ». Ils passeront le concours au début du master 2 et suivront des stages de mise en situation au cours desquels ils seront confrontés à la réalité.
Les épreuves d’admissibilité des concours doivent avoir vocation à sélectionner les étudiants ayant le meilleur niveau scientifique, les meilleurs « disciplinaires », si je puis dire. Ensuite, lors de la phase d’admission, leur réelle aptitude à enseigner et, pour les CPE, à exercer des missions éducatives, sera vérifiée.
En réalité, il s’agit d’une part, de s’assurer de l’acquisition par les enseignants de bases scientifiques solides – l’allongement d’un an de leur formation répond à cet objectif –et, d’autre part, de vérifier leurs aptitudes pédagogiques. Ce sera l’objet des épreuves d’admission.
Comme je l’indiquais tout à l’heure, la « mastérisation » se traduit par la revalorisation financière en début de carrière. J’ai rappelé le montant dédié dans le présent projet de budget à ce poste. Les enseignants mieux formés pendant une année supplémentaire doivent être mieux rémunérés en début de carrière. Je souhaite que, d’ici à la fin du mois de janvier, la négociation engagée avec les organisations syndicales ait pu être bouclée.
M. le président. La parole est à Mlle Sophie Joissains, pour la réplique.
Mlle Sophie Joissains. Monsieur le ministre, me voila rassurée et surtout pleine d’espoir : le talent pédagogique des futurs professeurs rejoindra leurs capacités scientifiques. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. le président. La parole est à M. Claude Bérit-Débat.
M. Claude Bérit-Débat. Monsieur le ministre, comme l’ont fait observer de nombreux collègues de gauche, ce budget comporte de nombreuses insuffisances mais aussi, malheureusement, beaucoup d’incohérences.
J’en veux pour preuve les crédits alloués à l’accompagnement des élèves handicapés.
Aujourd’hui, près de 160 000 d’entre eux sont scolarisés et, comme vous l’avez vous-même précisé, ils seront plus de 185 000 à la rentrée prochaine. On ne peut, bien sûr, que se féliciter d’une telle intégration.
Force est de constater cependant que les ressources mobilisées pour permettre cette intégration manquent cruellement : actuellement, à peine plus d’un quart de ces élèves sont accompagnés par un auxiliaire de vie scolaire individuel.
Ce taux d’encadrement est très faible ; il est d’autant plus anormal que, en 2003, un plan d’adaptation et d’intégration scolaire des élèves handicapés prévoyait la création de 6 000 postes d’auxiliaires de vie scolaire, ou AVS. Or, à ce jour, seulement 2 000 postes d’AVS collectifs, ou AVS-co, ont été créés. Ce manque est d’autant plus considérable qu’il n’est pas compensé par les AVS individuels, ou AVS-i.
Cette situation ne devrait pas s’améliorer, puisque le « bleu » pour 2010 ne précise pas le nombre de postes d’AVS collectifs qui seront créés. De plus, aucun chiffrage fiable relatif aux postes d’AVS individuels déjà créés ou devant être créés en 2010 n’est disponible.
C’est pourquoi le budget que vous nous proposez, monsieur le ministre, est incohérent : vous ne pouvez pas, d’un côté, prôner l’accueil d’un plus grand nombre d’enfants handicapés et, de l’autre, ne pas débloquer les crédits nécessaires au recrutement d’AVS en nombre suffisant.
Cette situation rend difficile, voire impossible l’intégration par un enseignant d’un élève handicapé dans sa classe parallèlement à une bonne gestion de ses autres élèves, faute de l’aide nécessaire.
De la même manière, il n’est pas acceptable que les AVS ou les emplois de vie scolaire, qui, eux aussi, participent à ces missions d’accompagnement, ne bénéficient pas d’un réel statut et de la reconnaissance sociale qui l’accompagne. Cette précarité les pénalise d’ailleurs doublement, puisqu’ils ne bénéficient pas du dispositif de validation des acquis.
Ce manque de personnel pénalise aussi et surtout les élèves handicapés et remet en cause leur intégration scolaire.
Dans ce domaine, l’État doit se donner les moyens de ses ambitions et débloquer les crédits correspondants aux engagements pris. Tel n’est manifestement pas le cas dans le budget qui nous est proposé aujourd'hui.
Les membres du groupe socialiste souhaitent donc connaître les mesures que vous comptez prendre pour respecter vos engagements, monsieur le ministre. Dans la réponse que vous venez d’apporter à Mme Mélot, les chiffres que vous avez cités ne sont pas les mêmes que ceux qui sont en ma possession. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Luc Chatel, ministre. Monsieur le sénateur, je vous le répète, 185 000 élèves handicapés sont bien scolarisés cette année, et non 160 000. Cette évolution est significative : leur nombre est deux fois plus important qu’il y a dix ans et enregistre une hausse de 40 % par rapport à 2005, au moment du vote de la loi pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées.
Monsieur Bérit-Débat, vous considérez que les ressources manquent. J’ai eu l’occasion de rappeler les moyens supplémentaires déployés par le Gouvernement, ainsi que la création d’unités pédagogiques d’intégration supplémentaires. À la rentrée 2009, 200 unités pédagogiques d’intégration ont été ouvertes et le Gouvernement espère disposer au total de 2 000 de ces unités à la rentrée 2010, soit la création de 200 unités supplémentaires.
Je rappelle, comme je l’ai indiqué à Mme Mélot, qu’une centaine de CLIS ont été créées dans le premier degré à la rentrée.
Non seulement nous avons voulu pérenniser les 17 000 postes d’AVS-i dont certains arrivaient à renouvellement, mais encore nous avons décidé, dans le cadre des mesures d’accompagnement du plan de relance, de créer 5 000 postes supplémentaires, ce qui porte le nombre de ces personnels à 22 000.
De tels moyens n’ont jamais été déployés jusqu’à présent dans le domaine de l’accompagnement du handicap !
Enfin, pour assurer la continuité de l’accompagnement des enfants handicapés par leur auxiliaire de vie scolaire, nous avons rendu possible leur portage en recourant à des associations d’enfants handicapés, avec un financement de l’État. Ce fut l’objet de l’amendement que vous avez adopté cet été, mesdames, messieurs les sénateurs, et des conventions que j’ai signées avec quatre associations.
M. le président. La parole est à M. Claude Bérit-Débat, pour la réplique.
M. Claude Bérit-Débat. Monsieur le ministre, les moyens d’accompagnement des élèves handicapés ont connu une baisse, significative, de 3 % en 2007 et de 14 % en 2008
Les chiffres que vous venez d’annoncer – j’en prends note –permettent, certes, de rattraper le retard accumulé au cours de ces années, mais partiellement seulement. Je veillerai à ce que ces chiffres se traduisent dans la réalité, ne serait-ce que dans les écoles de mon département et de ma ville.
M. le président. La parole est à M. Jackie Pierre.
M. Jackie Pierre. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, ma question porte sur l’enseignement agricole.
Lors de l’examen des crédits de la mission « Enseignement scolaire », les sénateurs de la commission des finances et de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication se sont montrés critiques vis-à-vis du traitement réservé à l’enseignement technique agricole. Le Gouvernement doit y entendre un signal fort de l’attachement des sénateurs à cette filière d’excellence, excellence dont témoignent ces quelques chiffres : près de 338 000 élèves, étudiants, apprentis et stagiaires, répartis dans 1 385 établissements dans toute la France ; un taux d’insertion dans la vie professionnelle supérieur à 85 %.
Monsieur le ministre, je ne méconnais pas l’engagement du ministre de l’agriculture en faveur de la valorisation de la filière de l’enseignement agricole. Il s’est en effet exprimé sur ce sujet dès sa prise de fonction et à plusieurs reprises depuis. Il a fait de l’enseignement agricole son cheval de bataille, notamment en lançant, dès septembre dernier, les Assises nationales de l’enseignement agricole public.
Ces assises ont pour objet de réaffirmer les principes fondamentaux qui ont fait et qui font la force de l’enseignement agricole, d’élaborer dans la concertation une stratégie pour l’enseignement agricole public et de mieux faire connaître et reconnaître l’enseignement agricole.
Malgré cela, il est certain que ce projet de budget suscite de fortes craintes parmi les personnels de l’enseignement agricole.
Nous avons bien conscience des difficultés que rencontre le ministère de l’agriculture. Alors que le ministère de l’éducation nationale supporte l’ensemble des suppressions d’emplois dues à la mise en place de la mastérisation, l’enseignement agricole, quant à lui, ne peut supporter que 30 suppressions d’emplois sur les 224 suppressions de postes prévues dans le projet de loi de finances pour 2010.
Que comptez-vous faire, monsieur le ministre, pour que cette filière ne devienne pas le parent pauvre de l’enseignement et qu’elle reste avant tout une filière d’excellence ? (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Luc Chatel, ministre. Monsieur le sénateur, le budget de l’enseignement agricole représente 2,1 % de la mission « Enseignement scolaire ». En tant qu’élu d’un département rural, je connais, comme vous tous, la tradition de l’enseignement agricole ; je connais, comme vous tous, la spécificité de cet enseignement, qui constitue une offre de formation complémentaire à destination des populations rurales.
Nous sommes, Bruno Le Maire et moi-même, en quelque sorte les héritiers d’un système qui est loin d’avoir fait ses preuves, Mme Férat en a témoigné tout à l’heure.
M. Longuet défendra dans quelques instants un amendement résultant des discussions qui ont eu lieu entre nos deux ministères ces dernières semaines et qui vise à répondre aux inquiétudes et aux interrogations que suscite chez certains d’entre vous ce projet de budget.
Par ailleurs, monsieur le sénateur, mon devoir est de vous indiquer que cette situation ne pourra pas perdurer et qu’il nous faudra bien trouver une solution. Pour simplifier à l’extrême, il me semble assez logique, pour un bon contrôle de l’engagement des fonds publics et de la répartition des moyens, que, à un moment, le décideur, le gestionnaire et le payeur soient la même entité. Cela serait une sage décision.
Plusieurs réunions interministérielles ont été organisées sur le sujet. Bruno Le Maire et moi-même sommes très désireux de trouver, dans le cadre de la préparation du projet de loi de finances pour 2011, une solution qui nous permette d’éviter les gesticulations auxquelles nous avons dû procéder cette année, notamment dans le cadre de l’arbitrage que nous évoquerons tout à l’heure avec l’amendement de M. Longuet. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. le président. La parole est à M. Jackie Pierre, pour la réplique.
M. Jackie Pierre. Je vous remercie, monsieur le ministre. J’espère que ces filières trouveront leur compte dans vos propos. Il s’agit là d’un sujet important, qui pose de nombreux problèmes, particulièrement dans les départements comme le vôtre et le mien. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Fichet.
M. Jean-Luc Fichet. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous sommes tous d’accord sur les travées de cet hémicycle sur le fait que l’enseignement agricole est aujourd’hui dans une situation d’une extrême gravité. Les acteurs sont très inquiets. Le programme « Enseignement technique agricole » est, on peut le dire, le parent pauvre de l’enseignement scolaire, et ce de façon récurrente depuis cinq ans. Et la donne ne change pas cette année !
La réduction drastique de l’emploi public va à l’encontre d’une réflexion sereine sur le rôle et la place de l’enseignement agricole dans le système éducatif français.
Ces crédits font une nouvelle fois l’objet d’une partie de ping-pong entre le ministère de l’éducation nationale et le ministère de l’agriculture, tant et si bien que personne n’en est responsable !
Avec l’organisation des Assises nationales de l’enseignement agricole public, on pouvait espérer que la situation allait évoluer de manière positive. Mais non ! Le budget de l’enseignement agricole est toujours en baisse et le lot de suppressions d’emplois prévu augure mal du « nouvel élan » que ces assises étaient censées donner. Quelle déception pour la commission, qui a unanimement demandé, lors de votre audition, monsieur le ministre, de véritables moyens en faveur de cet enseignement, dont l’excellence est reconnue.
L’enseignement agricole apporte aux futurs acteurs du monde rural un savoir-faire à la fois technique et humain, nécessaire à l’insertion professionnelle des jeunes. Plus que tout autre, il intègre les notions de changement climatique, de perte de la biodiversité et de dégradation des ressources. Il prend également en compte les problèmes liés au déséquilibre Nord-Sud.
Cet enseignement, c’est le choix d’une école pour la réussite de tous, ouverte, pratiquant la mixité sociale, plaçant l’élève et ses apprentissages au cœur de ses missions et de son organisation.
L’enseignement agricole, M. le ministre de l’agriculture le rappelait, c’est un taux d’insertion professionnelle exceptionnel.
Dans le discours qu’il a tenu à Poligny, le Président de la République a vanté les mérites de l’agriculture. Il nous a alors expliqué qu’il fallait plus de formation, plus d’apprentissage en considération du développement durable, que c’était l’avenir. Il vantait une formation d’excellence pour une vraie réconciliation du monde agricole avec la société, sur fond d’agenda 21 et de Grenelle de l’environnement. Tout le monde est d’accord et, pourtant, le budget diminue. Des postes sont une nouvelle fois supprimés.
Jugez plutôt : 244 emplois ont été supprimés en 2009, 106 en 2008, 210 en 2006, 94 en 2005 et 126 en 2004. En outre, 200 classes ont été fermées, alors que les effectifs sont en progression constante. Les établissements techniques agricoles, qui scolarisent cette année plus de 170 000 élèves dans 820 établissements, ont dû refuser des inscriptions.
Les effectifs doivent s’adapter aux petits moyens que vous affectez à ces établissements.
Monsieur le ministre, après les Assises nationales de l’enseignement agricole public, après le Grenelle de l’environnement, après les beaux discours du Président de la République sur la valorisation de l’agriculture et à l’heure des Assises des territoires ruraux, nous attendions pour le moins une stabilité des effectifs d’enseignement et d’encadrement. Or, avec votre logique de démolition de l’enseignement public, nous n’avons droit, pour toute réponse, qu’à des coupes budgétaires et à des suppressions de postes.
N’est-il pas encore temps, monsieur le ministre, de vous ressaisir et de décider immédiatement d’un moratoire sur les suppressions de postes afin de mettre vos actes en cohérence avec vos paroles ?
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Luc Chatel, ministre. Monsieur le sénateur, j’ai rappelé à l’instant à M. Pierre les enjeux du maintien de l’enseignement agricole en milieu rural, ainsi que la complémentarité de ce type d’enseignement avec l’enseignement général, technologique ou professionnel.
Ce rappel étant fait, je ne me laisserai pas entraîner sur votre terrain. Vous avez parlé de moratoire. Or l’enseignement agricole ne peut s’exonérer des contraintes existantes, notamment en matière budgétaire. Les règles sont claires : les efforts doivent être partagés entre les différentes fonctions publiques et, au sein de l’enseignement, entre les différentes formes d’enseignement.
Vous avez évoqué la partie de ping-pong qui se joue entre le ministère de l’éducation nationale et le ministère de l’agriculture. Il y sera mis un terme cette année grâce à un accord qui sera matérialisé par l’amendement que Gérard Longuet présentera dans un instant. Cet accord ne sera que provisoire, notre souhait, à Bruno Le Maire et moi – le Premier ministre en est d’accord – étant de vous présenter l’année prochaine un projet de loi de finances réglant définitivement la situation de l’enseignement agricole, car ce types d’échanges entre nos deux ministères ne peut perdurer d’année en année.
M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Fichet, pour la réplique.
M. Jean-Luc Fichet. On nous a tenu quasiment les mêmes propos l’année dernière. Seuls les ministres – il s’agissait alors de M. Xavier Darcos et de M. Michel Barnier – étaient différents ! Dès qu’il s’agit d’enseignement agricole, on parle certes de filière d’excellence, mais force est de constater que rien n’est fait pour en assurer l’avenir.
Les moyens continuent d’être réduits, des postes sont supprimés. Il arrivera un moment où il ne sera plus possible de tenir. Croyez-moi, je me fais ici le porte-parole des nombreux enseignants et de directeurs d’établissements que j’ai rencontrés aux cours de ces derniers mois et qui sont véritablement en souffrance. Les familles sont également en attente.
La seule chose que nous voyons, c’est la dégradation de l’enseignement agricole aujourd'hui. Les acteurs de cet enseignement attendent très rapidement des signes concrets leur permettant d’espérer un meilleur avenir.
M. le président. Nous en avons terminé avec les questions-réponses-répliques.
Nous allons maintenant procéder à l’examen des crédits de la mission « Enseignement scolaire », figurant à l’état B.
État B
(En euros) |
||
Mission |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
Enseignement scolaire |
60 875 726 724 |
60 828 376 636 |
Enseignement scolaire public du premier degré |
17 610 276 262 |
17 610 358 962 |
Dont titre 2 |
17 557 933 756 |
17 557 933 756 |
Enseignement scolaire public du second degré |
29 043 581 480 |
29 043 827 647 |
Dont titre 2 |
28 888 162 571 |
28 888 162 571 |
Vie de l'élève |
3 753 614 012 |
3 756 853 233 |
Dont titre 2 |
1 709 608 984 |
1 709 608 984 |
Enseignement privé du premier et du second degrés |
7 040 570 863 |
7 041 764 532 |
Dont titre 2 |
6 286 946 362 |
6 286 946 362 |
Soutien de la politique de l'éducation nationale |
2 143 768 143 |
2 106 156 298 |
Dont titre 2 |
1 327 214 814 |
1 327 214 814 |
Enseignement technique agricole |
1 283 915 964 |
1 269 415 964 |
Dont titre 2 |
812 851 905 |
812 851 905 |
M. le président. L'amendement n° II-91 rectifié, présenté par MM. Carle, Humbert et Beaumont, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
+ |
- |
+ |
- |
|
Enseignement scolaire public du premier degré Dont titre 2 |
||||
Enseignement scolaire public du second degré Dont titre 2 |
||||
Vie de l'élève Dont titre 2 |
5 500 000 |
5 200 000 |
||
Enseignement privé du premier et du second degrés Dont titre 2 |
2 400 000 |
2 000 000 |
||
Soutien de la politique de l'éducation nationale Dont titre 2 |
7 900 000 |
7 200 000 |
||
Enseignement technique agricole Dont titre 2 |
||||
TOTAL |
7 900 000 |
7 900 000 |
7 200 000 |
7 200 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à M. Jean-Claude Carle.
M. Jean-Claude Carle. Je ferai trois observations, mes chers collègues, sur l’amendement que je vous propose.
Premièrement, cet amendement ne modifie en rien l’équilibre du budget de la mission « Enseignement scolaire », car il n’ajoute ni ne supprime aucun crédit.
Deuxièmement, cet amendement ne remet pas en cause le souhait du Gouvernement de financer le plan de soutien à l’agriculture en faisant appel à la solidarité de toutes les lignes du budget de la nation. Je partage cette volonté et je la soutiens. À cet égard, je salue l’action du ministre de l’agriculture dans ce domaine.
Troisièmement, comme vous le savez, M. Éric Woerth, ministre du budget, a prélevé 21,5 millions d’euros sur la mission « Enseignement scolaire », dont 11,5 millions sur le programme « Vie de l’élève ». Or les crédits de ce programme servent à financer des actions destinées aux élèves handicapés, des mesures d’accompagnement éducatif, la santé scolaire ou des actions sociales, en particulier les bourses.
Tous ces domaines, mes chers collègues, me semblent importants et prioritaires. En outre, ils concernent tant l’enseignement public que l’enseignement privé.
À mon sens, la réduction de ces crédits risque de fragiliser, voire de remettre en cause ces actions prioritaires, ce qui n’est pas souhaitable en cette période de crise économique. En outre, monsieur le ministre, réduire ces crédits, c’est adresser un message négatif à la communauté éducative.
Je vous propose donc, mes chers collègues, non pas, je l’ai dit, de remettre en cause la décision du Gouvernement de faire appel à la solidarité de toutes les lignes du budget de la nation à l’égard du monde agricole, mais de le faire sur une autre ligne de la mission, à savoir le programme « Soutien de la politique de l’éducation nationale ». Ce programme est doté de 2 milliards d’euros, dont une partie est destinée à l’administration centrale.
Cette modification permettrait à ce grand corps qu’est l’administration centrale d’adresser un signe de solidarité à un secteur de notre économie qui est parmi les plus méritants et les plus exposés.
Tel est l’objet de mon amendement, monsieur le président.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Gérard Longuet, rapporteur spécial. La commission des finances n’a pas à proprement parler examiné cet amendement. Je m’exprimerai donc non pas en son nom.
L’amendement de M. Carle pose problème, même si on en comprend bien la motivation, qui est tout à fait légitime. S’il était adopté, cet amendement ferait en effet peser l’effort voulu par M. Woerth d’une façon différente de celle qu’il a envisagée lorsque cette disposition a été adoptée à l’Assemblée nationale. M. Woerth souhaite en effet répartir les efforts suivant une clé de répartition traditionnelle entre l’enseignement public, à hauteur de 80 %, et l’enseignement privé, à hauteur de 20 %.
Si nous suivions M. Carle, certes, nous augmenterions la contribution du programme « Soutien de la politique de l’éducation nationale », donc de l’administration centrale, mais nous augmenterions d’une façon significative la contribution de l’enseignement public au programme « Vie de l’élève », alors que nous diminuerions d’une façon non moins significative la contribution de l’enseignement privé. Cela serait contraire au statu quo, principe que notre commission a systématiquement défendu jusqu’à présent pour éviter de rouvrir le lancinant débat sur la répartition des efforts.
Par conséquent, mon cher collègue, même si je comprends votre préoccupation, je pense ne pas trahir la jurisprudence constante de la commission des finances, qui est de faire contribuer l’enseignement privé et l’enseignement public à un même effort financier, en vous demandant de bien vouloir retirer cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Luc Chatel, ministre. Je ne puis qu’être sensible à la volonté du sénateur Jean-Claude Carle de renforcer les crédits du programme 230 « Vie de l’élève ».
Toutefois, je voudrais indiquer à la Haute Assemblée que le programme 214 « Soutien de la politique de l’éducation nationale » est sous une forte contrainte depuis plusieurs années. À périmètre constant, les crédits hors titre 2 ont diminué de 14 % de 2007 à 2009, soit 100 millions d’euros, auxquels s’ajoutent 8,6 millions d’euros d’économies dans le projet de loi de finances pour 2010.
Les établissements publics nationaux, comme le Centre national d'enseignement à distance, le CNED, cher à M. Gérard Longuet, sont particulièrement affectés par une telle situation. En deux ans, leurs crédits ont diminué de 17 %.
Malgré les efforts de rationalisation et de redéploiement interne qui ont été engagés, la gestion de ce programme demeure particulièrement tendue, car celui-ci supporte un certain nombre de dépenses très contraintes.
Je pourrais ainsi évoquer les investissements immobiliers en outre-mer – nous avons encore la responsabilité de l’investissement, notamment dans le cadre du Grenelle de l’environnement – ou encore la montée en charge du système de gestion des ressources humaines, en lien avec le futur opérateur national de paye du ministère, qui rend impérative l’inscription de crédits informatiques à un niveau suffisant.
Dans ce contexte, le programme doit faire face à des dépenses nouvelles ; il ne me paraît donc pas pertinent d’accroître encore les contraintes qui pèsent sur lui.
C'est la raison pour laquelle je sollicite le retrait de cet amendement. À défaut, l’avis du Gouvernement serait défavorable.
M. le président. Monsieur Carle, l’amendement est-il maintenu ?
M. Jean-Claude Carle. J’ai bien entendu les explications qui viennent d’être apportées tant par M. le rapporteur spécial que par M. le ministre.
Pour autant, mon amendement respecte bien la règle dite du « 80-20 ». Il y a trois lignes budgétaires pour l’enseignement public, en l’occurrence une pour l’enseignement scolaire du premier degré, une pour celui du second degré et une pour la vie de l’élève, contre une seule pour l’enseignement privé. La règle est donc globalement respectée.
De mon point de vue, le retrait de cet amendement serait un signal négatif adressé à la communauté éducative sur des sujets aussi prioritaires que l’accueil des élèves handicapés ou le soutien scolaire.
Comme je l’ai déjà indiqué, l’adoption de mon amendement ne pénaliserait pas l’administration centrale, dont la ligne budgétaire est dotée de 2 milliards d’euros.
J’ai la conviction que les partisans du statu quo se trompent. Et, quand j’ai une conviction, je la défends jusqu’au bout.
C'est la raison pour laquelle je maintiens mon amendement, monsieur le président.
Mme Nathalie Goulet. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Yannick Bodin, pour explication de vote.
M. Yannick Bodin. Cet amendement présente un certain intérêt et la proposition de M. Carle nous satisfait globalement, puisqu’elle vise à garantir les crédits du programme « Vie de l’élève ».
Cela étant, nous ne pouvons pas accepter la totalité du dispositif proposé. En effet, mon cher collègue, en présentant votre amendement, vous avez déclaré vouloir préserver l’offre éducative dans l’enseignement privé.
Pour ma part, et sans verser dans l’idéologie, j’estime que le rôle de l’État est plutôt de renforcer l’offre éducative dans l’enseignement public.
D’ailleurs, monsieur Longuet, l’enseignement privé n’est tout de même pas trop maltraité. Comme vous avez pu le constater, on supprime un poste d’enseignant pour trente-six élèves dans l’enseignement public, contre un poste pour soixante-seize élèves dans l’enseignement privé !
Par conséquent, nous ne nous opposerons pas à l’amendement de M. Carle ; nous serions même prêts à aller dans le sens que notre collègue propose. Mais, en raison de la réserve que nous émettons sur l’enseignement privé, nous serons dans l’obligation de nous abstenir.
M. le président. La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin, pour explication de vote.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Nous voyons bien dans quelles affres nous plonge le dogme de la réduction des dépenses publiques. La démonstration est claire : même les plus fervents défenseurs de cette politique en voient les limites et les risques, d’où l’amendement qui nous est soumis.
Les contraintes budgétaires de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances, la LOLF, ont conduit M. Carle à proposer un remède qui est, pour nous, inacceptable. À cet égard, je souscris à ce qui vient d’être souligné par M. Bodin : l’aide de l’État doit aller en priorité à l’offre éducative publique.
Ce qui nous pose tout de même problème, c’est que, si j’ai bien compris, l’auteur de cet amendement propose de réduire les crédits dédiés à l’innovation pédagogique, dans le programme « Soutien de la politique de l’éducation nationale ». Or ces crédits ne sont pas négligeables. Ils concernent tout de même les subventions accordées à des associations, comme la Ligue de l’enseignement, d’ailleurs soutenue par le ministère, ou à des agents en détachement, par exemple au sein d’associations ou au Centre national de documentation pédagogique, le CNDP.
Nous le voyons bien, le « tricotage » qui nous est proposé vise en réalité à surmonter le fameux dogme de la baisse des dépenses publiques, qui crée tant de soucis…
C’est pourquoi nous voterons contre cet amendement.
M. le président. L'amendement n° II-126, présenté par MM. Longuet et Legendre, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
+ |
- |
+ |
- |
|
Enseignement scolaire public du premier degré Dont titre 2 |
1 809 185 1 809 185 |
1 809 185 1 809 185 |
||
Enseignement scolaire public du second degré Dont titre 2 |
||||
Vie de l'élève Dont titre 2 |
||||
Enseignement privé du premier et du second degrés Dont titre 2 |
||||
Soutien de la politique de l'éducation nationale Dont titre 2 |
||||
Enseignement technique agricole Dont titre 2 |
1 809 15 1 809 185 |
1 809 185 1 809 185 |
||
TOTAL |
1 809 185 |
1 809 185 |
1 809 185 |
1 809 185 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à M. Jacques Legendre.
M. Jacques Legendre. Nous aurons beaucoup évoqué l’enseignement agricole aujourd'hui.
Cet amendement vise à apporter certains éléments de réponse aux problèmes qui ont été soulevés dans ce cadre. Nous voulons également tenir compte des propos tenus lors de l’ouverture des Assises nationales de l’enseignement agricole public. Trois mesures avaient alors été annoncées : le rétablissement de 60 postes, le gel des décisions de fermeture de classes et d’établissements, la révision du plafond d’emplois pour le programme.
Il nous a donc semblé important, à M. Gérard Longuet et à moi-même, d’abonder les crédits du programme « Enseignement technique agricole » dès le projet de loi de finances pour 2010.
À ce titre, nous proposons de minorer le plafond des autorisations d’emplois du ministère de l’éducation nationale de 50 équivalents temps plein travaillés et de majorer à due concurrence celui des autorisations d’emplois du ministère de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche.
Une telle évolution avait notamment été souhaitée par Mme Françoise Férat, rapporteur pour avis de la commission de la culture, et, plus généralement, par l’ensemble des membres de notre commission.
Tel est l’objet de cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la commission des finances ne peut que remercier MM. Longuet et Legendre d’avoir déposé cet amendement.
En effet, lorsque le rapporteur spécial Gérard Longuet avait analysé, en compagnie de M. Thierry Foucaud, devant la commission des finances les crédits de la mission « Enseignement scolaire », il avait laissé entendre qu’il y aurait sans doute une initiative à prendre en la matière.
En l’occurrence, son initiative est judicieuse. Elle permettra à M. le ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche de mettre en œuvre les dispositions qu’il a annoncées en ouvrant les Assises nationales de l’enseignement agricole public. Je pense notamment au rétablissement de 60 postes, au gel des fermetures de classes et à la révision du plafond d’emplois, engagements qui n’étaient inscrits ni dans les crédits de la mission ni dans les plafonds d’emplois.
Par conséquent, cet amendement vient judicieusement combler une telle lacune.
La commission des finances, qui ne s’est pas réunie, mais qui avait vivement encouragé Gérard Longuet à proposer un tel dispositif, aurait certainement émis un avis favorable si elle avait dû se prononcer sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Luc Chatel, ministre. J’ai eu l’occasion d’indiquer tout à l’heure la position du Gouvernement sur la question de l’enseignement agricole.
J’ai rappelé qu’il y avait eu de nombreux échanges entre la commission, M. Legendre, M. Longuet, Mme Férat et l’ensemble des sénateurs concernés.
Nous avons décidé de soutenir cet amendement, qui nous permettra d’apporter une réponse ponctuelle dans le projet de loi de finances pour 2010.
Encore une fois, nous devrons travailler pour vous présenter une structure budgétaire différente l’année prochaine, afin qu’une telle situation ne se reproduise pas.
M. Jacques Legendre. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Yannick Bodin, pour explication de vote.
M. Yannick Bodin. Les années se suivent et, malheureusement, se ressemblent. Les ministres se succèdent et, malheureusement, disent la même chose.
Nous serions prêts à croire sur parole l’engagement qui vient d’être pris ce soir et que différents intervenants ont salué.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Comment y croire ?
M. Yannick Bodin. Malheureusement, nous avons constaté, les années précédentes, que les engagements n’étaient jamais concrétisés.
On nous tient chaque année le même discours, en promettant de régler le problème. Il est vrai qu’un tout petit effort est fait cette année : M. le ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche s’est déplacé pour être aux côtés de M. le ministre de l'éducation nationale…
Autant nous constatons l’insuffisance des crédits affectés à l’enseignement agricole et nous estimerions juste de les renforcer, autant nous refusons que cela s’effectue au détriment de l’enseignement scolaire ! En particulier, il ne saurait être question de retirer des crédits du programme « Enseignement scolaire public du premier degré », dont les dépenses de fonctionnement et d’intervention baissent déjà respectivement de 13,1 % et de 7,6 %. Une telle option n’est absolument pas acceptable.
Les années précédentes, nous attendions des modifications et nous espérions que chacun, au premier chef le ministère de l’agriculture puis le ministère de l’éducation nationale, prendrait ses responsabilités. C’est pourquoi nous nous sommes souvent abstenus lors de l’examen de telles dispositions.
Mais, aujourd'hui, vous vous êtes solennellement engagé à faire en sorte que ce soit la dernière fois. Pour notre part, nous vous prenons tout aussi solennellement au mot : cette année, nous voterons contre !
M. Jacques Legendre. Il faudra qu’on m’explique le raisonnement…
M. le président. La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin, pour explication de vote.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, j’aimerais vous faire part de ma consternation, de ma colère et de mon désarroi, aussi.
Demain, je dois rencontrer l’intersyndicale. Je devrai alors expliquer à mes interlocuteurs ce qui se sera passé dans cet hémicycle.
Chacun a rappelé ici que l’enseignement agricole était une voie d’excellence, une voie d’insertion professionnelle, une voie de « remédiation », une voie importante pour le défi du développement durable que nous devons tous relever ensemble.
Chers collègues, si c’est une voie d’excellence, elle a besoin de moyens pérennes. Il faudra bien, inévitablement, que nous nous posions la question du plafond d’emplois qui est accordé à cette voie d’excellence.
On nous propose une nouvelle ponction du budget consacré à l’enseignement scolaire. M. le ministre a parlé de « gesticulations ». J’aurais, pour ma part, eu un mot plus violent : celui de « bricolage » me venait à l’esprit ! (Exclamations sur les travées de l’UMP.)
On nous propose de ponctionner le programme de l’enseignement scolaire public du premier degré, qui plus est sans aucun fléchage quant à la répartition ultérieure au sein de l’enseignement technique agricole ! Ces fonds iront-ils à l’enseignement agricole public ou à l’enseignement agricole privé ?
Pour toutes ces raisons, nous nous prononcerons contre cet amendement.
M. le président. Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Enseignement scolaire », figurant à l’état B.
J’ai été saisi d’une demande d’explication de vote dans le délai limite.
La parole est à Françoise Férat, pour explication de vote.
Mme Françoise Férat. Je tiens avant tout à saluer l’action de mes collègues Jacques Legendre et Gérard Longuet lors de l’étude de la mission « Enseignement scolaire ». Je suis fort satisfaite de l’excellent travail qu’ils ont accompli à cette occasion.
Le vote de l’amendement tendant à restituer 50 postes nous permet d’adresser un signal fort à tous nos partenaires de la grande famille de l’enseignement agricole et de leur redonner un peu de souffle.
Vous vous rappellerez certainement ma détermination en faveur de l’enseignement agricole lors de l’examen du précédent projet de loi de finances, puisque nous avions transféré 38 millions d’euros de crédits afin de soutenir l’enseignement dans cette filière.
Cette année, n’en doutez pas, mon engagement à l’égard de l’enseignement agricole n’a pas faibli. C’est pourquoi je ne peux pas, nous ne pouvons pas nous satisfaire d’un budget en baisse.
L’enseignement agricole est en effet à la croisée des chemins et, pour franchir l’étape de sa renaissance, il a besoin de nous, et de notre reconnaissance. Reconnaissance tout à la fois de sa spécificité, puisque c’est un enseignement professionnalisant, de son identité, fortement ancrée dans la ruralité, de son potentiel, au service de l’économie « verte », de sa capacité à relever les défis de demain.
Or on observe que, au-delà de ses bons résultats en termes de réussite et d’intégration professionnelle, des leitmotive de l’engagement gouvernemental, l’enseignement agricole n’a toujours pas la reconnaissance qu’il mérite.
C’est chaque année un vrai parcours du combattant ! La situation, comme vous le disiez, monsieur le ministre, ne peut plus durer.
Messieurs les ministres, l’enseignement agricole a besoin de vous, et de vous deux, pour porter ensemble l’éducation de tous nos jeunes, qu’ils se destinent à l’un ou l’autre de ces systèmes d’enseignement. Je sais que le ministre de l’agriculture en a pris l’engagement, et je vous ai également entendu monsieur Chatel.
Des mesures peu coûteuses peuvent être mises en place à cet effet, notamment en mutualisant les moyens entre vos ministères – les possibilités sont fort nombreuses – pour valoriser, avec détermination, cet enseignement d’excellence.
Il vous faut porter ensemble tous ces jeunes qui entrent dans le parcours éducatif. Alors que la réforme du lycée à venir fait la part belle à l’orientation des élèves, il ne serait pas cohérent de laisser au bord du chemin, pour une simple question de moyens, ceux qui ont fait le choix d’une orientation vers l’enseignement agricole.
Or le présent projet de loi restreint les moyens consacrés à l’enseignement agricole, alors même que c’est lui qui forme les agriculteurs mais aussi les acteurs de la croissance « verte » de demain et couvre donc une grande variété de carrières dans l’industrie, les services et l’agronomie, pour ne citer que ces secteurs d’activité.
J’apprécie en revanche le signe que vous envoyez en donnant un avis favorable à l’amendement de mes collègues permettant de « sauver » 50 emplois d’enseignant agricole.
De même, je prends note de l’amendement gouvernemental de 8,5 millions d’euros déposé à l’occasion de la discussion du projet de loi finances rectificative à l’Assemblée nationale.
C’est parce que je ne doute pas de votre engagement pour l’avenir que notre groupe votera les crédits relatifs à la mission « Enseignement scolaire ».
M. le président. Je mets aux voix, modifiés, les crédits de la mission « Enseignement scolaire ».
(Ces crédits sont adoptés.)
M. le président. J’appelle en discussion l’article 54 ter, rattaché pour son examen aux crédits de la mission « Enseignement scolaire ».
Enseignement scolaire
Article 54 ter (nouveau)
Au plus tard le 30 juin 2010, le Gouvernement transmet au Parlement un rapport sur les moyens financiers et en personnels consacrés à la scolarisation en milieu ordinaire des élèves handicapés.
M. le président. L'amendement n° II-14, présenté par M. Longuet, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
Ce rapport précise également l'impact sur les charges des collectivités territoriales, notamment les coûts spécifiques de transport scolaire et d'aménagement des établissements publics locaux d'enseignement.
La parole est à M. Gérard Longuet, rapporteur spécial.
M. Gérard Longuet, rapporteur spécial. Il s’agit de compléter le rapport que le Gouvernement doit adresser au Parlement sur les coûts humains et financiers de l’accueil des élèves handicapés en milieu scolaire ouvert, par une évaluation des dépenses de transport qui sont à la charge des collectivités locales et qui constituent, nous le savons, une lourde responsabilité tant technique que financière.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Gérard Bailly, pour explication de vote.
M. Gérard Bailly. Demander à ce que ce rapport fasse le point sur les transports scolaires et principalement sur celui des handicapés est une idée judicieuse.
Vous savez tous combien les conseils généraux sont impliqués dans ces transports scolaires et principalement celui des enfants handicapés. C’est une tâche très importante qui leur incombe et qu’ils assument.
Mais je m’interroge sur cet amendement. En effet, les conseils généraux, du moins est-ce vrai dans mon département, affrètent chaque matin entre 350 et 400 bus, qui devront être équipés pour accueillir des handicapés, et, dans le même temps, disposent d’un parc de 150 à 200 voitures pour transporter les enfants jusqu’à leurs écoles.
Nous ne pouvons pas supprimer le transport des élèves handicapés par voiture, et ce pour plusieurs raisons. D’une part, les voitures permettent la prise en charge des enfants handicapés à la porte du domicile, ce que ne permet pas le bus, l’arrêt pouvant être à deux cents mètres, au mieux. Et il arrive parfois que le chauffeur aille lui-même chercher l’enfant handicapé à son domicile quand ses parents sont déjà partis au travail !
De la même façon, au moment de l’arrivée à l’école, la solution de la voiture permet de déposer l’enfant à proximité de la classe, tandis que le bus laisse souvent l’enfant à l’entrée de l’établissement, voire dans la cour, ce qui rend nécessaire une autre intervention humaine. Enfin, l’enfant handicapé peut avoir besoin d’un accompagnateur à côté de lui.
Je ne conçois pas, au moment où il est nécessaire de réaliser des économies, que l’on exige de tous nos bus qu’ils soient équipés pour le transport des personnes handicapées, alors que, dans le même temps, les conseils généraux continueront comme il se doit à financer d’autres modes de transport, même si ces dépenses sont importantes.
Je crois que l’on risque d’avoir demain deux postes de dépenses : d’une part, l’adaptation des véhicules collectifs, d’autre part, le transport en voiture quand le bus ne constitue pas un moyen adéquat.
J’aimerais que ce rapport puisse tenir compte de l’ensemble de ces considérations. Est-ce une bonne formule d’équiper l’ensemble des bus ou le système actuel est-il plus satisfaisant ? Je demande à ce qu’une vraie réflexion soit menée sur ce sujet avant que les conseils généraux et les transporteurs n’en supportent le coût.
M. le président. Monsieur Longuet, voulez-vous bien rassurer M. Bailly ?
M. Gérard Longuet, rapporteur spécial. C’est exactement l’objet de ce rapport que de permettre une évaluation de l’ensemble des efforts consentis par les uns et par les autres et de comparer l’opportunité et la pertinence des différentes solutions.
M. le président. Nous avons achevé l’examen des crédits de la mission « Enseignement scolaire ».
6
Ordre du jour
M. le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd’hui, mercredi 2 décembre 2009, à dix heures trente, à quatorze heures trente et le soir :
- Suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2010, adopté par l’Assemblée nationale (n° 100, 2009-2010).
Examen des missions :
Politique des territoires
M. François Marc, rapporteur spécial (rapport n° 101, annexe n° 20) ;
M. Rémy Pointereau, rapporteur pour avis de la commission de l’économie, du développement durable et de l’aménagement du territoire (avis n° 105, tome VI).
Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation (+ article 51)
M. Jean-Marc Todeschini, rapporteur spécial (rapport n° 101, annexe n° 5) ;
Mme Janine Rozier, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales (avis n° 103, tome I).
Gestion des finances publiques et des ressources humaines
Compte spécial : prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés
Compte spécial : avances à divers services de l’État ou organismes gérant des services publics
Compte spécial : gestion du patrimoine immobilier de l’État
M. Bernard Angels et Mme Nicole Bricq, rapporteurs spéciaux (rapport n° 101, annexe n° 14) ;
Mme Jacqueline Gourault, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d’administration générale (Fonction publique – avis n° 106, tome II) ;
Mme Éliane Assassi, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d’administration générale (Modernisation de l’État – avis n° 106, tome VI).
Régimes sociaux et de retraite
Compte spécial : pensions
M. Bertrand Auban, rapporteur spécial (rapport n° 101, annexe n° 24) ;
M. Dominique Leclerc, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales (avis n° 103, tome III).
Remboursements et dégrèvements
Mme Marie-France Beaufils, rapporteur spécial (rapport n° 101, annexe n° 26) ;
Santé (+ articles 59, 59 bis et 59 ter)
M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur spécial (rapport n° 101, annexe n° 27) ;
M. Alain Milon, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales (avis n° 103, tome IV).
Travail et emploi (+ articles 61, 62 et 63)
M. Serge Dassault, rapporteur spécial (rapport n° 101, annexe n° 32) ;
M. Alain Gournac, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales (avis n° 103, tome VII).
Plan de relance de l’économie
M. Jean Arthuis, rapporteur spécial (rapport n° 101, annexe n° 19) ;
M. Charles Revet, rapporteur pour avis de la commission de l’économie, du développement durable et de l’aménagement du territoire (avis n° 105, tome V).
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
(La séance est levée le mercredi 2 décembre 2009, à une heure vingt-cinq.)
La Directrice
du service du compte rendu intégral,
MONIQUE MUYARD