II. LA PROGRESSION DE L'ENDETTEMENT BRUT EST PRINCIPALEMENT DUE AUX DÉFICITS PRIMAIRES STRUCTURELS SUCCESSIFS
La progression entre le 1er janvier 1980 et le 31 décembre 1997 du ratio d'endettement brut, soit 36,4 points de PIB, est principalement due aux déficits primaires structurels successifs, ces derniers atteignant en moyenne 1 point de PIB au cours de cette période. Les intérêts générés par la dette initiale (au 31 décembre 1979), les déficits conjoncturels et le financement des acquisitions de créances entre 1980 et 1997 net des revenus financiers perçus par les administrations publiques ont une part plus limitée dans la variation de l'endettement public (moins de 8 points de PIB).
A. L'ENDETTEMENT BRUT PEUT ÊTRE DÉCOMPOSÉ SUIVANT 4 DÉTERMINANTS
La
variation annuelle de la dette brute des administrations publiques peut
s'écrire comme la somme du déficit public de l'année et
des flux nets de créances
10(
*
)
:
Dette
t
- Dette
t-1
= Déficit public
t
+
Acquisitions nettes de créances
t
Entre 1980 et 1997, les déficits publics ont représenté en
moyenne 2,4 points de PIB et les acquisitions nettes de créances, 1
point de PIB
11(
*
)
. Cependant,
cette présentation ne permet pas de déterminer la contribution
des déficits successifs et de l'acquisition d'actifs financiers au
niveau de la dette actuelle. En effet, les séries de dettes,
créances et déficits interagissent : le service de la dette
accumulée en t-1 dégrade le déficit en t et ce dernier
bénéficie des revenus des actifs financiers
précédemment accumulés par les administrations publiques.
On met alors en évidence 4 déterminants de la progression de
l'encours de dette publique entre 1980 et 1997
12(
*
)
:
- la dette initiale au 31 décembre 1979 ;
- les déficits primaires structurels, le terme "primaire" signifiant
dans cette étude hors intérêts versés et revenus
d'actifs financiers reçus ;
- les déficits conjoncturels
13(
*
)
;
- le financement des flux nets de créances (i.e. acquisitions - ventes)
entre 1980 et 1997 net des revenus financiers procurés par l'ensemble
des actifs financiers (y compris les créances acquises avant 1980).
Ces 4 déterminants, en y ajoutant les intérêts qu'ils
génèrent "en cascade" - c'est-à-dire que les
intérêts versés doivent être financés par
emprunt, ce qui entraîne le paiement de nouveaux intérêts -
permettent de décomposer la progression de l'endettement
public
14(
*
)
.
B. LA PROGRESSION DU RATIO D'ENDETTEMENT BRUT EST PRINCIPALEMENT DUE AUX DÉFICITS PRIMAIRES STRUCTURELS SUCCESSIFS
La dette
initiale qui représentait 21,7 points de PIB au 31 décembre 1979
contribue à hauteur de 24,7 points de PIB au ratio d'endettement public
de 1997.
• Les déficits primaires structurels (avec une contribution de
29,3 points de PIB) sont en grande partie responsables de la variation du
ratio d'endettement entre 1980 et 1997 (+36,4 points).
• Les déficits conjoncturels - qui, lorsqu'ils se transforment en
excédents conjoncturels dans les phases hautes du cycle, permettent aux
administrations publiques de recevoir des intérêts - ne sont
responsables de la progression de l'endettement qu'à hauteur de 0,9
point entre 1980 et 1997.
• Par ailleurs, le coût net des acquisitions de créances
représente au sein du ratio d'endettement 3,4 points de PIB. Le
coût du financement des flux nets de créances entre 1980 et 1997
qui représente 34,6 points de PIB en 1997 est en grande partie
compensée par le gain des actifs financiers détenus, à
hauteur de 31,2 points de PIB en 1997.
Contributions à la progression du ratio d'endettement brut
(en points de PIB)
Calculs DP
C. LES DÉFICITS PRIMAIRES STRUCTURELS SUCCESSIFS ONT ATTEINT EN MOYENNE 1 POINT DE PIB ENTRE 1980 ET 1997
Avec une
contribution de 29,3 points de PIB, les déficits primaires structurels
sont en grande partie responsables de la variation du ratio d'endettement entre
1980 et 1997 (+36,4 points).
Les causes de cette évolution se situent tant au niveau des
dépenses que des recettes :
* la détérioration du solde primaire structurel est pour une
large part imputable à l'évolution des dépenses publiques ;
* la réduction du poids des impôts dans le PIB au début des
années 1990, due en particulier aux allégements fiscaux
consentis, a dégradé le solde structurel.
• la politique des pouvoirs publics a permis d'améliorer
récemment le solde primaire structurel. Ce dernier s'est établi
à 0,7 point de PIB en 1997, à 0,8 point en 1998 et devrait
s'améliorer encore de 0,1 point de PIB en 1999.
Par ailleurs, les déficits conjoncturels - qui, lorsqu'ils se
transforment ont en excédents conjoncturels dans les phases hautes du
cycle, permettent aux administrations publiques de recevoir des
intérêts - ne sont responsables de la progression de l'endettement
qu'à hauteur de 0,9 point entre 1980 et 1997. Le solde conjoncturel est
nul en moyenne sur la durée d'un cycle, les périodes
d'"excédent conjoncturel" étant compensées par celles de "
déficit conjoncturel ". Ainsi, les années 1993 à 1997 qui
présentent des déficits conjoncturels importants (de l'ordre de 1
point de PIB) succèdent à la période 1988-1991
15(
*
)
pendant laquelle les excédents
conjoncturels ont pu atteindre 1,6 point de PIB (1990). La contribution des
soldes conjoncturels à la variation d'endettement sur un cycle peut
alors être nulle, et dépend de l'évolution des taux
d'intérêt entre la période de basse conjoncture et celle de
conjoncture haute.
Solde
primaire structurel / solde conjoncturel
(en points de PIB)
Calculs DP
D. LE COÛT NET DES ACQUISITIONS DE CRÉANCES ENTRE 1980 ET 1997 REPRÉSENTE 3,3 POINTS DE PIB EN 1997
L'acquisition d'actifs financiers présente un
coût mais
permet aux administrations publiques de recevoir des revenus de ces actifs. On
définit alors le coût net des acquisitions de créances
entre 1980 et 1997 comme la différence entre le coût du
financement de ces acquisitions et le gain procuré par les revenus
financiers de l'ensemble des actifs financiers des administrations publiques (y
compris les actifs détenus avant 1980)
16(
*
)
.
Le coût du financement des flux nets de créances entre 1980 et
1997 représente 34,6 points de PIB en 1997
Entre 1980 et 1997, les acquisitions nettes de créances ont
représenté en moyenne 1 point de PIB et leur financement a
contribué à hauteur de 34,6 points de PIB à la progression
de la dette publique brute. Ces acquisitions ont concerné en moyenne
à parts relativement égales les quatre sous-secteurs des
administrations publiques :
Moyenne annuelle 1980-1997 des flux nets de créances
(en points de PIB, hors consolidations entre sous-secteurs)
Source : Comptes nationaux, « base 80 »
La contribution de l'Etat aux flux de créances a fortement fluctué au cours de cette période, en raison notamment des politiques de nationalisations et de privatisations. Ainsi, après les nationalisations du début des années 1980, les participations de l'Etat ont diminué au cours des vagues successives de privatisations (premières privatisations en 1986-1987, cessions minoritaires d'actifs de 1991 à 1993 puis nouvelles privatisations à partir de 1993). Par ailleurs, certaines opérations exceptionnelles comme la reprise par l'Etat de la dette de l'ACOSS en 1994 à hauteur de 110 MdsF ont entraîné de fortes variations du solde du Trésor à la Banque de France 17( * ) (gonflement en 1993, dégonflement en 1994).
Flux nets de créances de l'Etat
(en points de PIB)
Source : Comptes nationaux, « base 80 »
Pour les autres administrations (ODAC, APUL, ASSO), les flux nets de créances ont été plus réguliers depuis le début des années 1980, d'environ 0,4 point de PIB par an pour chaque sous-secteur. Leur composition est en outre très différente de celle des flux de créances de l'Etat. Pour ces sous-secteurs, la progression annuelle de l'actif financier s'explique en moyenne (1980-1997) pour prés de 70 % - contre moins de 20% pour l'Etat - par l'accroissement des crédits à court et à long terme 18( * ) . Le reste de la progression s'explique par un accroissement des liquidités détenues par les administrations et par des acquisitions de produits financiers (actions, OPCVM), notamment par les organismes de Sécurité sociale.
Décomposition des flux nets de créances des APU
hors Etat
(moyenne 1980-1997, hors consolidations entre sous-secteurs)
Source : Comptes nationaux, « base 80 »
Les
revenus issus des actifs financiers entre 1980 et 1997 représentent 31,2
points de PIB en 1997
Entre 1980 et 1997, les revenus des actifs financiers (actions, obligations,
titres du marché monétaire et crédits) ont
représenté en moyenne 1 point de PIB par an et ont permis de
réduire de 31,2 points de PIB la variation du ratio de dette brute entre
1980 et 1997. Une analyse plus complète des revenus des actifs
financiers est menée ci-après, au cours de la présentation
des comptes de patrimoine.
En définitive, on peut estimer que le coût net des
opérations sur actifs financiers sur cette période
s'élève à 3,3 points de PIB d'endettement brut
supplémentaire.