2. L'hypothèque démographique constitue à moyen terme un enjeu pour l'avenir de la croissance économique
Il est désormais acquis que la Chine a quasiment achevé sa transition démographique, même si des disparités subsistent dans les fécondités observées dans les villes et celles des campagnes et a fortiori dans les provinces de l'Ouest. En moins de 25 ans, la Chine a rejoint les pays à faible mortalité et à faible accroissement naturel 19 ( * ) et cette transition rapide est en partie due à la politique de l'enfant unique mise en place dès le milieu des années 1970. Dans les villes, le nombre d'enfants par femme est de l'ordre de 1,3 voire inférieur à 1 dans des grandes agglomérations telles que Pékin et Shangaï. La plupart des projections s'appuient sur l'hypothèse d'un taux de fécondité proche de 1,8 en moyenne nationale jusqu'en 2025 et on estime que la population se stabilisera autour de 1,4 ou 1,6 milliard d'habitants.
Cette transition démographique va se traduire par un vieillissement rapide de la population : en 2040, la Chine comptera entre 225 et 260 millions de personnes âgées de plus de 60 ans, la plus forte proportion au monde et dès 2015, la croissance de la population de jeunes travailleurs serait égale à zéro. La population active devrait atteindre 1 milliard en 2015 pour commencer ensuite à régresser .
Population totale en millions
Source : Secrétariat des Nations-Unies (PNUD)
Le ralentissement accéléré de la croissance démographique aura, en Chine, un impact d'autant plus fort sur le développement économique que le décollage de l'économie depuis vingt-cinq ans a largement bénéficié de la forte progression de la population en âge de travailler, cette progression étant supérieure à celle de la population totale.
Par contraste, à moyen terme, les gains de productivité risquent de ralentir du fait du rapide déclin de la proportion de jeunes diplômés par rapport à la population active totale. Néanmoins, en valeur absolue, la Chine continuera de bénéficier d'une main d'oeuvre abondante. La principale incertitude concerne en réalité la répartition de la main-d'oeuvre qualifiée/non qualifiée, qui sera notamment fonction des efforts consentis dans l'éducation publique .
- De plus, le vieillissement accéléré de la population va modifier en profondeur sa structure socio-économique.
Le rapport des plus de 65 ans par rapport à la population active passerait ainsi de 10 % actuellement, à 20 % en 2025 et 37 % en 2050 selon le PNUD. Certains pays comme le Japon sont d'ores et déjà confrontés à ce problème, mais celui-ci dispose d'un niveau de richesses par habitant que la Chine sera loin d'avoir atteint à cette date.
La prise en charge des générations futures pèsera d'une manière ou d'une autre sur le budget de l'Etat, qui doit déjà abonder les déficits de caisses sociales expérimentées dans quelques régions sur la base de cotisations patronales et employés. Une grande partie des retraités n'aura en effet qu'un recours très limité à la traditionnelle solidarité inter-générationnelle.
Or, le système des retraites actuel est déjà en crise, notamment en raison du sous-financement des fonds de pension ainsi que des abus et des malversations commis par les gouvernements locaux. En septembre 2000, a été créé le Fonds national pour la sécurité sociale qui devait être alimenté en partie par la cession d'actions détenues par l'Etat dans les entreprises publiques. Mais l'Etat a dû renoncer à ce plan, en raison de la baisse des cours que cette mesure a provoqué en 2001.
Au total, le déficit implicite du système actuel de retraite est estimé par la plupart des analystes d'un montant compris entre 60 à 80 % du PIB. Bien que des marges de manoeuvre puissent être envisagées avec le développement des cotisations, l'élargissement des prélèvements fiscaux, le recours aux marchés financiers et la mise en vente d'actifs d'Etat, il s'agit là de montants considérables qui pèseront sur toute la politique budgétaire et sociale présente et à venir.
* 19 Le taux de natalité est de 13,4 % et le taux de mortalité de 6,4 % en moyenne.