PROGRAMME 159
« EXPERTISE, INFORMATION GÉOGRAPHIQUE
ET MÉTÉOROLOGIE »

Le programme 159 « Expertise, information géographique et météorologie » regroupe depuis le projet de loi de finances pour 2017 les subventions pour charges de service public du Centre d'études et d'expertises pour les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (Céréma) , de l'Institut national de l'information géographique et forestière (IGN) et de Météo France 1 ( * ) .

De 2018 à 2020, les crédits dédiés au financement du soutien à l'économie sociale et solidaire (ESS) avaient également été placés dans ce programme, mais ils sont transférés à compter de 2021 vers le programme 305 « Stratégie économique et fiscale » de la mission « Économie » , dans la mesure où l'économie sociale et solidaire relève dorénavant du champ d'attribution du ministère de l'économie, des finances et de la relance.

I. EN DÉPIT DE LA CRISE SANITAIRE, MÉTÉO FRANCE INVESTIT ET CHERCHE À DÉVELOPPER SES RECETTES COMMERCIALES POUR CONFIRMER SA PLACE D'ACTEUR MÉTÉOROLOGIQUE DE RANG MONDIAL

Météo France, établissement public administratif de l'État, réalise des prévisions météorologiques et des travaux de recherche relatifs au changement climatique à destination des administrations publiques, des entreprises et du grand public.

Son rôle est particulièrement décisif en matière de sécurité météorologique des personnes et des biens , alors que les phénomènes météorologiques extrêmes (tempêtes, ouragans, cyclones, précipitations diluviennes, etc.) qui frappent le territoire français, en métropole comme en outre-mer, tendent à se multiplier , dans le contexte du réchauffement climatique.

1. Comme les années précédentes, la subvention pour charges de service public de Météo France diminuera en 2021, mais celle-ci comprendra bien une dotation dédiée au financement de son supercalculateur

La dotation de l'État versée à Météo France au titre du programme 159 , qui représente un peu moins de la moitié de ses recettes prévues en 2021, correspond à la compensation des missions de service public qui incombent à l'établissement :

- la fourniture d'informations permettant d'assurer la sécurité météorologique des personnes et des biens en avertissant les populations le plus en amont possible, dans un contexte où le territoire national est régulièrement frappé par des évènements climatiques extrêmes ;

- la conduite de travaux de recherches visant à améliorer les capacités de prévision et à mieux appréhender le changement climatique sur le long terme, afin de permettre à la société de mieux s'y adapter ;

- le soutien opérationnel aux forces armées et aux administrations de l'État en cas de crise.

Comme les années précédentes, la subvention pour charges de service public de Météo France diminuera significativement en 2021 de 4,7 millions d'euros à 185,1 millions d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement, contre 189,8 millions d'euros perçus en 2020.

Au sein de cette subvention, Météo France bénéficie d'une dotation dont le montant est fixé à 8,3 millions d'euros en 2021. Celle-ci est dédiée au financement des surcoûts liés à la mise en service d'un nouveau supercalculateur .

À noter que la subvention pour charges de service public de l'opérateur devrait de nouveau baisser en 2022, puisque le Gouvernement a prévu qu'elle devra avoir diminué au total de 20 millions d'euros en 2022 par rapport à 2017.

Selon le projet annuel de performances pour 2021, « 70 % du montant de la subvention de l'État est consacré aux dépenses de personnel et 30 % aux autres dépenses de fonctionnement et d'investissement ».

Le programme comprend deux sous-actions .

La première, « Observation et prévision météorologiques », regroupe 86,8 % des crédits de paiement de la subvention, soit 164,7 millions d'euros (AE=CP) , un montant inférieur de 4,2 millions d'euros aux 168,9 millions d'euros de 2020.

La seconde, « Recherche dans le domaine météorologique », rassemble 20,4 millions d'euros de crédits de paiement (AE=CP), soit 13,2 % des crédits, une somme inférieure de 500 000 euros à celle qui était prévue pour 2020.

En plus des dotations portées par le programme 159, Météo France bénéficiera également en 2021 de 3,9 millions d'euros versés par la direction générale de la prévention des risques à partir des crédits du programme 181 « Prévention des risques » pour participer à l'entretien du réseau d'observation hydro-météorologique (stations automatiques d'observation au sol, radars).

C'est également par le budget de l'opérateur que transite la subvention accordée par le ministère de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation au titre du programme 193 « Recherche spatiale » et correspondant à la part principale de la contribution de la France à l'organisme européen EUMETSAT. Cette subvention augmentera significativement en 2021 conformément aux échéanciers prévus au niveau européen, puisqu'elle passera de 51,1 millions d'euros en 2020 à 69,0 millions d'euros l'an prochain.

2. Les efforts de Météo France pour redresser ses recettes commerciales se poursuivent en dépit des difficultés provoquées par la pandémie de Covid-19

Face à la diminution tendancielle de la dotation de l'État, Météo France doit consolider ses ressources propres , à savoir la redevance de prestataire de services à la navigation aérienne et, surtout, ses ressources commerciales, dont le niveau reste perfectible en dépit de nets progrès récents.

Dans le cadre du Ciel unique européen (CUE), Météo France est le prestataire exclusif de l'assistance météorologique pour la navigation dans l'espace aérien sous juridiction française 2 ( * ) . Les 85,5 millions d'euros versés chaque année par la DGAC à Météo France sont indispensables à son budget .

Il convient du reste de noter qu'en dépit de la crise sans précédent que traverse depuis mars 2020 le transport aérien en raison de la pandémie de Covid-19, les services de Météo-France en faveur de la navigation aérienne , qui ne sont pas directement corrélés à l'intensité du trafic, ne doivent pas être remis en question .

Si l'opérateur devrait pouvoir compter sur cette recette en 2021 et dans les années suivantes, celle-ci n'aura en revanche pas vocation à augmenter et il doit donc s'en procurer de nouvelles.

Recettes commerciales de Météo France
de 2015 à 2020

(en millions d'euros)

2015

2016

2017

2018

2019

2020

Recettes kiosque

6,1

5,4

4,1

3,4

2,3

1,7

Recettes publicitaires

4,7

4,6

4,9

7,0

7,3

8,0

Recettes professionnelles

19,1

19,1

20,7

21,3

22,0

23,0

Total chiffre d'affaires

29,9

29,2

29,7

31,8

31,6

29,5

Source : Météo France

Si le nombre d'utilisateurs des services téléphoniques (numéro 3250) va poursuivre son inexorable déclin dans les années à venir ( moins de 1,7 millions d'euros de recettes attendues en 2019 contre 13 millions d'euros en 2012, soit une baisse de - 86,9 % ), Météo France doit absolument relever deux grands défis .

Alors que ses recettes publicitaires avaient diminué jusqu'à représenter environ 4,5 millions d'euros par an entre 2013 et 2017, l'opérateur a mis en place une stratégie destinée à reconquérir des parts de marché dans le secteur des services au grand public en prenant pleinement en compte l'évolution des usages (sites internet mobile, applications mobiles, applications tablettes, objets connectés, etc.), dans un contexte de forte croissance du marché publicitaire sur les supports mobiles 3 ( * ) .

Des progrès ont été réalisés en matière de monétisation des supports digitaux et la régie publicitaire , qui n'était pas compétitive en interne, a été externalisée . Les résultats enregistrés en 2018 et en 2019 étaient très positifs, si bien que Météo France espérait réaliser 8 million d'euros de recettes publicitaires en 2020. Le coup d'arrêt provoqué par la crise sanitaire devrait entraîner une perte de 3 millions d'euros au minimum, avec une révision des objectifs 2020 à 5 millions d'euros désormais espérés .

Second axe de travail, accroître le volume des prestations météorologiques aux professionnels . Selon Météo France, 40 % des entreprises seraient en effet « météo-sensibles » (secteurs de l'agriculture, du BTP, de l'énergie, des transports ou bien encore du sport) et sont à la recherche d'informations météorologiques toujours plus précises et de services réactifs et innovants.

En dépit de la crise sanitaire, Météo France a poursuivi sa dynamique des années précédentes, puisque ses recettes professionnelles devraient représenter 23,0 millions d'euros en 2020, soit 1 million d'euros de plus qu'en 2019 , avec une part de marché estimée à 50 % sur le secteur des services météorologiques. L'établissement a notamment signé plusieurs contrats pluriannuels avec Orange, RTE, TF1 ou bien encore la direction générale de l'énergie et du climat (DGEC), ce dernier contrat devant rapporter quelque 8,6 millions d'euros à Météo France sur la période 2019-2022.

La progression des recettes professionnelles en 2021, désormais attendues à 26,0 millions d'euros, devrait donc permettre à l'établissement de dépasser significativement l'objectif de hausse de 2 % par an qui lui est fixé par son contrat d'objectifs et de performance pour la période 2017-2021 .

3. Les dépenses de personnel de Météo France diminueront en 2020 de 4,0 millions d'euros grâce à des réductions d'effectifs de 95 ETPT

En 2020, les charges de personnel représentaient 246,2 millions d'euros . Pour 2021, la prévision s'établit à 240,2 millions d'euros , soit une baisse de 4,0 millions d'euros .

Évolution de la masse salariale de Météo France
de 2014 à 2021

(en milliers d'euros)

Source : réponses au questionnaire de votre rapporteur spécial

Entre 2014 et 2021, la masse salariale de l'établissement devrait avoir diminué de 23,8 millions d'euros, soit une baisse de - 9,0 % .

Cette baisse conséquente a été permise par la réduction continue des effectifs, qui conduit l'opérateur à ne remplacer que 20 % des départs à la retraite de ses collaborateurs.

En 2021, Météo France verra ses effectifs diminuer une nouvelle fois de 95 ETPT , soit un taux d'effort de - 3,2 % identique à celui de 2020 .

Ces dernières années, le plafond d'emplois de l'établissement public , qui a toujours fait l'objet d'une application stricte , a nettement diminué.

Plafond d'emploi de Météo France de 2014 à 2021

(en ETPT)

Source : réponses au questionnaire de votre rapporteur spécial

De 2013 à 2021, le plafond d'emplois de Météo France sera donc passé de 3 337 ETPT à 2 641 ETPT , soit une forte baisse de - 20,9 % correspondant à une perte de 696 ETPT .

À noter que l'établissement a obtenu pour 2021 le relèvement de ses emplois hors plafond (+15 ETPT, dont + 5 contrats d'apprentissage) pour les porter à 90 ETPT. Ce relèvement paraissait en effet nécessaire, sauf à mettre en péril la capacité de l'établissement à s'inscrire dans de grands projets de recherche, notamment européens, qui lui permettent de faire rayonner la recherche française dans les domaines des risques, du changement climatique et de l'environnement.

4. Un réseau territorial qui continue d'être recentré sur les missions justifiant une proximité géographique, de plus en plus de tâches pouvant être effectuées à distance

Le réseau territorial, qui avait connu une très forte réorganisation au cours de la période 2012-2016, avec la fermeture de 55 implantations , évolue de nouveau fortement dans le cadre d'Action Publique 2022.

Si la direction de l'établissement prévoit de conserver ses 7 centres interrégionaux , organisés autour des missions de sécurité, ainsi que ses centres spécialisés dans la marine et la nivologie , elle prévoit en revanche de réduire de 15 à 11 le nombre de ses centres aéronautiques et de 32 à 28 ses centres dédiés à la maintenance du réseau d'observation . À noter que 4 sites de montagne dont la fermeture avait été envisagée ont finalement été maintenus à l'issue de nombreuses consultations avec les acteurs des territoires alpins et pyrénéens.

Surtout, l'établissement projette de réduire de 40 % ses effectifs présents dans ce réseau territorial et de regrouper un maximum d'activités dans la Météopole de Toulouse .

Selon les dirigeants de Météo France, cette centralisation des activités de l'opérateur est rendue possible par les évolutions scientifiques et technologiques, qui permettent désormais de conduire un certain nombre de tâches météorologiques à distance .

Météo France bénéficie d'un soutien financier de 2,9 millions d'euros du Fonds de transformation de l'action publique (FTAP) pour accompagner ces mutations. Ces crédits servent à financer des reconversions d'agents, des requalifications de postes de techniciens en ingénieurs, des réformes du temps de travail, etc.

5. L'acquisition par Météo France d'un nouveau supercalculateur se poursuit

Conformément aux objectifs de son contrat d'objectifs et de performances 2017-2021, Météo France devrait avoir investi 22,1 millions d'euros en 2020, soit une somme en recul par rapport au niveau exceptionnel de 25,8 millions d'euros d'investissements en 2019.

Ces investissements concernent principalement la modernisation des réseaux d'observation (radars, réseaux au sol, radiosondage) et des moyens de calcul intensif (renouvellement des équipements de stockage des données).

Dans une moindre mesure, ils concernent également la rénovation du patrimoine immobilier de l'opérateur , en particulier la réhabilitation du site de Toulouse.

Mais ces dépenses classiques ne sauraient suffire pour relever les défis météorologiques de la période actuelle : l'activité de prévision devient de plus en plus intensive en capital et repose sur des technologies de calcul de plus en plus puissantes .

Lors des discussions qui ont conduit à la conclusion du contrat d'objectifs et de performances (COP) 2017-2021 de l'établissement, il a été acté que pour remplir les objectifs qui lui sont assignés par l'État, Météo France devrait multiplier sa puissance de calcul par cinq , grâce à l'acquisition d'un nouveau supercalculateur , dont les bénéfices socio-économiques sont très élevés 4 ( * ) .

Le marché relatif à la fourniture de moyens de calculs intensifs pour Météo-France sur la période 2020-205 a été notifié à la société Atos le 24 juillet 2019. L'installation du premier des deux calculateurs composant ce nouveau système a démarré mi-novembre 2019 et la phase de vérification d'aptitude finalisée le 28 mai 2020, avec un léger retard dû à la période de confinement. La nouvelle configuration sera ainsi 5,45 fois plus puissante que la précédente, alors que l'objectif du COP était de 5 (voir supra ).

Ce nouveau matériel, indispensable pour permettre à Météo France de maintenir son rang, nécessite un investissement total de 144 millions d'euros sur la période 2019-2025 dans le cadre du projet « Calcul 2020 ». Sur cette somme, 65,9 millions d'euros seront consacrés à la fourniture de capacités de calcul supplémentaire .

Après les 5 millions d'euros de 2019 et les 7,7 millions d'euros de 2020 perçus à ce titre en 2019, le contrat pluriannuel signé par Météo France avec la direction du budget prévoit que l'établissement bénéficiera de financements supplémentaires à hauteur de 8,3 millions d'euros en 2021 (voir supra ) et de 6,1 millions d'euros en 2022.

Les besoins supplémentaires à couvrir seront donc de 18,8 millions d'euros en 2023 et de 9,7 millions d'euros en 2024.

Si ces sommes sont conséquentes, elles ne seront pas suffisantes , notamment pour financer la mise à niveau des locaux qui accueilleront les équipements techniques du nouveau supercalculateur 5 ( * ) .

Cette situation conduira Météo France à devoir présenter des budgets déficitaires et à puiser dans son fonds de roulement , qui devrait passer de 33 millions d'euros en 2018 à 12 millions d'euros en 2022. Il faudra ainsi veiller à ce que cet opérateur essentiel ne soit pas fragilisé .


* 1 En conséquence, le programme 170 « Météorologie » avait été supprimé et le Céréma ne figure plus dans le programme 217 « Conduite et pilotage des politiques de l'écologie, du développement et de la mobilité durable ».

* 2 Les règlements communautaires du CUE, qui s'imposent directement aux États membres de l'Union européenne et aux prestataires de services de navigation aérienne autorisés à opérer dans l'espace aérien de l'Union, laissent la liberté aux États de désigner un prestataire exclusif dans leur espace aérien. Pour la France, ce prestataire est Météo France.

* 3 Le profond renouvellement du site internet en 2013 et de l'application mobile à l'été 2015 ont permis de développer l'offre commerciale en ligne, qui bénéficie d'environ un million et demi de visites quotidiennes.

* 4 La contre-expertise réalisée par le Commissariat général à l'investissement (CGI) a montré que le rapport entre l'investissement réalisé et les bénéfices socio-économiques pour la société (sécurité des personnes et des biens, adaptation au changement climatique, défense, énergie, etc.) serait de 1 à 12 au minimum.

* 5 La notification du marché d'assistance à maîtrise d'oeuvre pour les travaux à réaliser au Centre national de calcul a été réalisée le 13 août 2018. Une démarche de même nature est en préparation pour l'Espace Clément Ader.

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