CHAPITRE V
LES ÉQUIPEMENTS CLASSIQUES
La part des crédits consacrés aux équipements classiques (par opposition aux crédits consacrés au nucléaire, à l'espace et aux restructurations), s'établit à 9,5 milliards d'euros 30( * ) (62,7 milliards de francs), en nouvelle diminution de 2,3 %, après une légère reprise enregistrée en 2001.
I. L'ARMÉE DE TERRE
Les
crédits affectés à l'armée de Terre
s'élèvent à 2.843 milliards d'euros
(18,6 milliards de francs) en autorisations de programme et à
2.574 milliards d'euros (16,9 milliards de francs) en crédits de
paiement.
Ceci correspond à une nouvelle progression de 10,1 % des
autorisations de programme (après + 18,8 % en 2001), et
à une nouvelle baisse de 3,9 % pour les crédits de paiement
(après - 1,3 % en 2001).
A. PRINCIPALES ÉVOLUTIONS PRÉVUES POUR L'EXERCICE 2002
1. La capacité d'action blindée
La
« modernisation de la capacité d'action
blindée » s'est notamment traduite par une réduction
considérable du nombre de régiments de chars, passés de 17
en 1988 à 6 en 2001.
En 2002, 33
chars Leclerc
devraient être livrés. Fin 2002,
406
chars Leclerc
auront été commandés,
conformément à la cible fixée par la loi de programmation
révisée. Mais seulement 304 auront été
effectivement été livrés. Etant entendu que les 17
premiers chars livrés sont inaptes à une quelconque
activité militaire, le « trou » par rapport à
l'objectif s'établira à 113 chars. Pour compenser notamment le
manque de chars disponibles à l'entraînement,
22
simulateurs Leclerc
seront livrés en 2002.
Cette réduction sensible des cibles touche directement le producteur
final,
GIAT-Industries
dont, malgré l'ampleur financière
des mesures de redressement, la situation reste très difficile. Il n'est
pas assuré du reste que la fabrication des chars pour l'armée de
Terre dégage un résultat positif. Et les acquis de l'exportation
ont fait l'objet, d'une gestion désastreuse.
De fait, l'avenir de l'entreprise reste aujourd'hui largement dépendant
de la concrétisation des perspectives d'exportation du
char
Leclerc
.
Le coût total du
programme Leclerc
s'élève à
5,7 milliards d'euros (37,4 milliards de francs) dont
3,85 milliards d'euros déjà votés en crédits
de paiement. Les crédits de paiement prévus pour 2002
s'élèvent à 323 millions d'euros. Le coût
unitaire moyen est de 8 millions d'euros (52,5 millions de francs), en
dépassement de 20 % par rapport aux devis initiaux, en raison des
surcoûts du maître d'oeuvre industriel et de la réduction de
cible.
La Cour des comptes
31(
*
)
évalue au double le coût unitaire d'acquisition global d'un
char Leclerc
, soit 15,9 millions d'euros (104,4 millions de
francs), en tenant compte notamment des coûts de développement,
d'industrialisation, de pièces de rechange et de systèmes d'armes
annexes, de munitions spécifiques, d'infrastructures, d'instruction et
d'entraînement.
Le
véhicule blindé de combat d'infanterie
(VBCI) sera un
véhicule à roues destiné au transport de troupe qui
remplacera l'
AMX 10-P
équipé de chenilles. Il existera en
deux versions : une version poste de commandement (VPC) et une version
combat d'infanterie (VCI). Initialement mené en coopération avec
l'Allemagne et la Grande-Bretagne, ce projet a donné lieu à une
proposition du consortium ARTEC (Krauss-Maffei, Rheinmetal, Wegmann,
Alvis/GKN-D et GIAT-Industries). La France a estimé que la proposition
du consortium n'était pas satisfaisante pour la version transport de
troupe. Elle ne poursuit donc la coopération en cours que pour la
version poste de commandement. De fait, le calendrier initial a accumulé
les retards et devient maintenant critique.
Or l'arrivée dans les forces d'un nouveau véhicule pour le combat
d'infanterie est urgente, l'
AMX 10-P
n'étant plus en mesure
d'assurer une bonne protection à nos troupes.
Le coût total estimé du programme est désormais de
1,98 milliard d'euros (13 milliards de francs), le coût unitaire est
de 15 millions d'euros (10 millions de francs) pour la version VPC et
de 1,9 million d'euros (13,5 millions de francs) pour la version VCI.
En théorie, la livraison du premier véhicule ne devrait pas
intervenir avant mi-2005, ce qui là aussi, laisse présager un
« trou » compte tenu de l'état actuel des
AMX
10-P
. Des crédits sont donc prévus par le projet de budget
2002 pour des opérations de rénovation de l'
AMX 10
(commandes de 44 châssis).
Ce programme illustre à nouveau certaines des difficultés de la
coopération européenne. Les états-majors n'expriment pas
les mêmes besoins, ni sur la nature du matériel, ni sur les
calendriers de renouvellement. Les hésitations conduisent à des
retards. Les industriels du pays le plus éloigné du besoin
standard se retrouvent en porte-à-faux vis-à-vis de leurs
homologues européens. Ainsi nos partenaires allemand et britannique
continuent de privilégier la chenille, et sont surtout confrontés
à un besoin de renouvellement beaucoup plus reculé dans le temps
(au-delà de 2010).
2. La mobilité aéroportée
L'hélicoptère Tigre
(programme en
coopération
avec l'Allemagne intégré dans l'OCCAR)
est désormais parvenu au stade de l'industrialisation. L'accord
bilatéral sur la production a été conclu le 20 mai 1998.
Le contrat de série a été signé le 18 juin 1999. Il
porte, pour la France, sur 80 appareils (70 appareils appui protection HAP
et 10 appareils antichar HAC). Une commande globale de 12,7 milliards de
francs a été passée en 1999. Au total, les commandes
françaises porteront sur 115 hélicoptères en version
appui protection (HAP) et 100 en version antichars (HAC). Les premières
livraisons interviendront seulement en 2003 pour les appareils HAP et en 2011
pour les appareils HAC.
Le coût total du programme est estimé à 7,1 milliards
d'euros (46,6 milliards de francs). Le coût unitaire est de
20 millions d'euros (131 millions de francs) pour la version HAC et
de 17 millions d'euros (111 millions de francs) pour la version HAP.
L'hélicoptère de transport NH 90
doit équiper les
forces françaises, allemandes, italiennes et néerlandaises. Il
doit permettre soit le transport de 14 à 20 hommes ou d'un
véhicule de combat léger soit, à partir d'une
frégate, la lutte anti sous-marine ou anti-navires.
Le coût du développement du programme devrait s'élever pour
l'armée de Terre à 480 millions d'euros (3,13 milliards de
francs) et la part française de l'industrialisation à
1,5 milliard de francs. Le coût unitaire d'un appareil, en version
transport, devrait être de 20,1 millions d'euros (132 millions
de francs).
Les hélicoptères NH 90 version terre ne seront pas disponibles
avant 2011, ce qui pose à nouveau un réel problème compte
tenu du vieillissement accéléré des
Puma
, soumis
à une utilisation plus intense que prévu. De fait, il est
prévu un programme coûteux de remotorisation des
Puma
(137 millions d'euros, soit 900 millions de francs pour 100 appareils). La
première commande globale passée en juin 2000 ne concerne en
effet que les appareils version marine.
3. La trame anti-char
Dans ce
domaine, l'adaptation des armées au nouveau contexte
géostratégique a été particulièrement lente.
Démarré à la suite d'un protocole d'accord
intergouvernemental signé le 22 octobre 1976, entre la France, la
République fédérale d'Allemagne et le Royaume-Uni, pour
une «
menace identifiée
» correspondant au
Pacte de Varsovie, les deux programmes
AC3G-LP et AC3G-MP
(anti-char
3
ème
génération longue et moyenne
portée) ont été progressivement abandonnés par tous
les partenaires européens.
Pour sa part, la France a décidé en 2001 seulement de stopper
définitivement ces deux programmes, tout en maintenant le financement du
développement jusqu'à son terme.
Au total, le coût des deux programmes aura représenté
620 millions d'euros (près de 4 milliards de francs), sans que
la France, à terme, ne participe à la fabrication d'aucun des
deux.
Il semble que la trame anti-char puisse continuer de reposer sur les produits
existants et améliorés, à savoir l'enchaînement
Eryx-Milan-Hot
, étant entendu qu'il faudra, à l'horizon
2008-2010, remplacer le
système Milan
alors âgé de
quarante ans.
4. Munitions, transmissions, communications, renseignements
En 2002,
l'armée de Terre devrait bénéficier d'une livraison de
410
obus BONUS
, étant entendu qu'une nouvelle version plus
performante est actuellement en cours de développement, pour une
qualification prévue en 2002.
Le programme
radar de contre-batterie COBRA
, en coopération avec
l'Allemagne et le Royaume-Uni dans le cadre de l'OCCAR prévoit la
livraison de 3 radars de série en 2002.
Enfin,
1 200 postes de radio
4
ème
génération PR4G
seront
livrés en 2002.
B. BILAN DE RÉALISATION DE LA LOI DE PROGRAMMATION
S'agissant des livraisons effectuées fin 2002, aucun
objectif
n'est tenu. La plupart ne le sont pas du tout, certains, comme le
char
Leclerc
et le
système Roland
, partiellement seulement. Des
retards importants caractérisent même les commandes, non
passées en particulier pour le
NH 90
, et très
partiellement seulement pour le
VBCI
et les programmes de missiles.
Les dates prévues de livraisons s'échelonnent comme suit :
-
VBCI
: mi- 2005
- hélicoptère Tigre HAP : 2003
- hélicoptère Tigre HAC : 2011
- hélicoptère NH90 : 2011