Étude de législation comparée n° 284 - avril 2018

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- LÉGISLATION COMPARÉE -

Recueil des notes de synthèse

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DE JANVIER À MARS 2018

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AVERTISSEMENT

Ce document constitue un instrument de travail élaboré à la demande des sénateurs, à partir de documents en langue originale, par la division de la Législation comparée de la direction de l'Initiative parlementaire et des délégations. Il a un caractère informatif et ne contient aucune prise de position susceptible d'engager le Sénat.

AVANT-PROPOS

Au cours du premier trimestre 2018, la division de la Législation comparée a élaboré notamment des notes de synthèse en matière de droit public et de droit social.

À la demande de la Délégation aux Collectivités territoriales, elle a actualisé sa précédente étude datant de 2009 sur le statut financier de l'élu local et a produit une note complémentaire sur le cas de l'Italie qui n'avait pas été traité précédemment.

À la demande de la Commission des Lois, elle a travaillé sur :

- le vote électronique aux élections sur un large échantillon de douze pays européens, complété par le cas du Brésil ;

- le contrôle parlementaire des services de renseignement en Europe et aux États-Unis ;

- l'organisation de la justice du travail en Europe et au Mexique, cette étude faisant l'objet d'une demande conjointe de la Commission des Affaires sociales.

Enfin, à la demande de Mme Pascale Gruny, Sénateur de l'Aisne, elle a passé en revue les organismes et les dispositifs d'accompagnement et de placement des chômeurs.

LES ÉVOLUTIONS DU STATUT DE L'ÉLU LOCAL DEPUIS 2009
ACTUALISATION DE L'ÉTUDE DE LÉGISLATION COMPARÉE LC 194

La division de la Législation comparée a entrepris de mettre à jour son étude de février 2009 sur le statut de l'élu local en relevant les évolutions constatées dans six pays européens : l'Allemagne, le Danemark, l'Espagne, les Pays-Bas, le Portugal et le Royaume-Uni (Angleterre).

Dans certains pays, la recherche menée n'a pu mettre en évidence aucune modification significative du statut légal des élus locaux. C'est le cas au Portugal où les règles rassemblées dans la loi du 30 juin 1987 1 ( * ) ne paraissent pas avoir évolué depuis 2006. Dans ce cas, l'étude de février 2009 demeure valide, sous réserve d'une réévaluation mécanique des rémunérations par indexation. Il convient toutefois de relever que la loi n° 47/2010 du 7 septembre 2010 a imposé une réduction exceptionnelle de 5 % de la rémunération des titulaires de charges publiques, des ministres aux maires et échevins ( vereadores ). On notera également sur un plan plus général la réforme en 2013 de l'organisation territoriale visant à la réduction drastique du nombre des paroisses civiles ( freguesia ) de 4 259 à 3 091, dans le cadre du plan d'aide financière de l'Union européenne. 2 ( * )

En Angleterre , le texte en vigueur en matière d'indemnités des membres des conseils des collectivités territoriales est toujours le règlement n° 1021 du 7 avril 2003 3 ( * ) . Celui-ci dispose que chaque collectivité territoriale arrête le régime indemnitaire de ses membres, les chiffres étant revus annuellement sur proposition d'un panel indépendant. Les informations contenues dans la note LC 194 de février 2009 sur les différentes indemnités auxquelles peuvent prétendre les membres d'un conseil sont donc toujours valables.

À titre d'exemple, on peut indiquer que pour le comté de Kensington et Chelsea, les rémunérations annuelles votées pour la période courant du 1 er avril 2017 au 31 mars 2018 s'élèvent à 11 027 £ (12 610 €) pour l'allocation de base à laquelle sont éligibles tous les conseillers. 4 ( * ) Par ailleurs, des indemnités pour les personnes exerçant des responsabilités spécifiques sont prévues : ainsi, le président de l'exécutif (Leader) peut-il recevoir une indemnité annuelle de 56 429 £ (64 533 €) et le président du principal parti d'opposition 20 909 £ (23 912 €). Enfin, il existe une indemnité particulière de nature sociale, justifiée par le fait d'avoir un enfant de moins de 15 ans ou des personnes dépendantes à charge, d'un montant ne pouvant excéder 9,40 £ (10,75 €) par heure.

S'agissant de la retraite, si à compter du 1 er mai 2003 les élus pouvaient adhérer au fonds de pension du personnel des collectivités territoriales ( Local Government Pension Scheme - LGPS ), ce n'est plus le cas depuis le 1 er avril 2014. Les élus préalablement inscrits au fonds de pension continuent d'en bénéficier jusqu'au terme de leur mandat, mais les nouveaux élus ne peuvent pas le rejoindre. Le Gouvernement a expliqué cette décision par le fait qu'il est « fermement convaincu que les conseillers ne sont pas des politiciens à temps plein ou du personnel salarié de la mairie, et que maintenir cette appartenance au système de pension du personnel des collectivités territoriales ne servirait qu'à exacerber le flou entre les élus volontaires et les employés payés » 5 ( * ) .

Le Danemark n'a pas non plus modifié en profondeur son architecture locale depuis l'étude de 2009, cela ayant été fait en 2005 et en 2007. Depuis la publication de l'étude de 2009, les montants des indemnités perçues par les élus locaux ont cependant été actualisés par le pouvoir réglementaire.

De façon inhabituelle, une rémunération fixe est prévue pour les membres des conseils municipaux. Elle dépend du nombre d'habitants de la commune. 6 ( * )

Nombre d'habitants

Montant annuel de rémunération en couronnes danoises (DKK)

Équivalent en euros

Jusqu'à 80 000

89 314 couronnes

11 996 euros

Plus de 80 000

107 178 couronnes

14 395 euros

Commune de Copenhague

125 039 couronnes

16 794 euros

Ainsi que l'indiquait l'étude de 2009, les élus peuvent choisir de bénéficier d'une allocation pour perte de revenus démontrée. Dans ce cas, leur rémunération fixe annuelle est diminuée de 20 741 couronnes danoises (2 785 €).

Les membres des conseils municipaux ayant la charge d'un ou plusieurs enfants de moins de 10 ans touchent une rémunération complémentaire de 13 819 couronnes danoises (1 856 €) par an.

Le conseil municipal peut aussi décider d'octroyer des indemnités journalières pour les participations aux réunions, d'un montant de 420 couronnes danoises (56 €) par jour, doublé au-delà d'une durée de 4 heures. Cette indemnité est augmentée de 5 couronnes au 1 er janvier de chaque année.

D'autres compléments de rémunération peuvent intervenir en fonction de l'organisation du conseil municipal.

Ainsi, lorsque l'organisation du conseil municipal prévoit des commissions permanentes, les membres et les présidents de ces dernières peuvent toucher une rémunération supplémentaire, sur décision du conseil municipal. La somme de ces rémunérations supplémentaires annuelles pour l'ensemble des membres des commissions ne peut dépasser un certain multiple de la rémunération du président - entre 1,66 et 4,4 en fonction du nombre d'habitants.

En outre, les communes non dotées de commissions permanentes peuvent décider de porter la rémunération fixe des membres du conseil à :

- 107 178 DKK (14 395 €) si elles ont jusqu'à 12 500 habitants ;

- 121 467 DKK (16 316 €) si elles ont de 12 501 à 20 000 habitants ;

- 132 184 DKK (17 756 €) si elles ont de 20 001 à 30 000 habitants ;

- 146 474 DKK (19 675 €) si elles ont entre 30 001 et 60 000 habitants ;

- et 160 765 DKK (21 594 €) au-delà de 60 000 habitants.

Enfin, les communes organisées en gestion administrative partagée, soit les 5 communes autorisées à recourir à un conseil exécutif ( magistratsstyre) 7 ( * ) , peuvent également prévoir une rémunération pour les membres de commissions, les présidents et vice-présidents de commissions. Ces montants sont définis de telle manière que la somme de ces rémunérations annuelles ne peut dépasser un certain multiple de la rémunération du président, facteur qui varie avec la taille de la commune.

La rémunération des organes dirigeants (maires et, dans les villes disposant d'un tel dispositif, le conseil exécutif) est également précisée en annexe du règlement du 9 décembre 2016 précité.

Montant annuel de rémunération en couronnes danoises

Équivalent en euros

Rémunération des maires en fonction du nombre d'habitants

Jusqu'à 12 500

705 178 DKK

94 697 €

De 12 501 à 25 000

802 365 DKK

107 748 €

De 25 001 à 40 000

880 966 DKK

118 303 €

De 40 001 à 80 000

985 729 DKK

132 389 €

Plus de 80 000

1 103 327 DKK

148 184 €

Rémunération du président de la représentation civique de la commune de Copenhague 8 ( * )

1 236 489 DKK

166 068 €

Rémunération des membres du conseil exécutif

Commune de Frederiksberg

705 178 DKK

94 697 €

Commune d'Odense

802 365 DKK

107 748 €

Commune d'Aalborg

802 365 DKK

107 748 €

Commune d'Århus

880 966 DKK

118 303 €

Commune de Copenhague

985 729 DKK

132 389 €

Par ailleurs, la rémunération des élus régionaux est fixée à 107 534 couronnes danoises (14 442 €) par an aux termes du règlement sur la rémunération, les indemnités et la retraite pour l'exercice d'une fonction régionale du 9 décembre 2016 9 ( * ) . Un président de conseil régional gagne 1 103 327 couronnes par an (148 184 €). Des indemnités de fonction sont prévues pour le vice-président à hauteur de 10 % de la rémunération du président.

Le système indemnitaire des élus régionaux est calqué sur celui des élus municipaux. Ainsi, ceux qui optent pour l'allocation pour perte de revenus démontrée voient leur rémunération fixe annuelle minorée de 20 741 couronnes (2 785 €) et ceux ayant à charge un ou plusieurs enfants de moins de 10 ans bénéficient d'une rémunération annexe de 13 819 couronnes (1 856 €) par an. En outre, tout comme le conseil municipal, le conseil régional peut octroyer une indemnité journalière pour la participation aux réunions, du même montant et dans les mêmes conditions. De même, comme les élus municipaux, les conseillers régionaux peuvent toucher une rémunération supplémentaire du fait de leur appartenance à une commission permanente.

Enfin, les règles relatives aux indemnités de fin de mandat et aux pensions de retraite des maires, des présidents de commission et des présidents de conseils régionaux au Danemark n'ont pas changé depuis la publication de l'étude de 2009, qui reste donc pleinement valide sur ces questions.

Le cas de l' Espagne est légèrement différent. Le régime des élus locaux est resté globalement inchangé, tant dans son architecture globale que dans ses détails, notamment en matière de types de rémunérations (indemnités pour mandat à temps plein ou à temps partiel, jetons de présence), d'incompatibilités, de remboursement des frais, de déclarations d'intérêts et d'activités, de retour à la vie professionnelle et de pensions de retraite.

Toutefois, la crise financière a justifié des mesures de plafonnement des rémunérations. Plus précisément, elle a précipité l'adoption de mesures qui auraient dû être prises plus tôt. En effet, l'étude de février 2009 rappelait que conformément à l'article 75 de la loi espagnole 7/1985 du 2 avril 1985 10 ( * ) , les lois de finances auraient dû fixer les limites nationales des rémunérations des élus des provinces et des municipalités. Cela n'avait pas été fait, si bien que les assemblées délibérantes des collectivités établissaient les rémunérations de leurs élus de façon discrétionnaire.

Le plafonnement introduit à partir de 2014 est à double détente, ce qui reflète la superposition de deux mesures successives. Un nouvel article 75 bis a été introduit fin 2013 11 ( * ) dans la loi précitée à titre de mesure de rationalisation et de soutenabilité des dépenses des collectivités locales, puis complété par un décret-loi 12 ( * ) dès janvier 2014 13 ( * ) . Il en résulte deux séries de plafonds modulés en fonction de la population de la commune ou de la province.

La première série définit la limite maximale totale annuelle des rémunérations d'un élu (indemnités et jetons de présence) en fonction du traitement d'un secrétaire d'État ( Secretario de Estado ), qui est le titulaire de charges publiques le plus élevé d'un département ministériel, second seulement derrière le ministre. 14 ( * ) Par exception à cette règle, les présidents de provinces voient leur rémunération déterminée en référence à celle du maire de la commune la plus peuplée de la province.

Il est, en outre, expressément exclu que les élus des communes de moins de 1 000 habitants reçoivent une rémunération pour un mandat exercé à temps plein à l'exclusion de toute autre fonction ou emploi ( dedicación exclusiva ). Leur indemnité ne peut être versée que pour un mandat exercé à temps partiel, en fonction du temps consacré ( dedicación parcial ). Précisément, aucun mandat dans une commune de moins de 1 000 habitants ne peut être considéré comme exclusif, à temps plein. Par exception, les élus sont à temps partiel avec la rémunération correspondante. Sinon, ils ne bénéficient que de jetons de présence.

La deuxième série est de loin la plus importante car elle fixe les montants maximalement perçus par les élus locaux à titre de rémunération pour leur mandat 15 ( * ) . Le tableau suivant la reproduit. Il est exprimé en euros bruts pour un mandat exercé à titre exclusif, à temps plein, sans inclure les cotisations sociales, ni les indemnités de remboursement de frais de mandat.

Nombre d'habitants

Plafond annuel de rémunération

Plus de 500 000

100 000 €

De 300 001 à 500 000

90 000 €

De 150 001 à 300 000

80 000 €

De 75 001 à 150 000

75 000 €

De 50 001 à 75 000

65 000 €

De 20 001 à 50 000

55 000 €

De 10 001 à 20 000

50 000 €

De 5 001 à 10 000

45 000 €

De 1 000 à 5 000

40 000 €

En fonction de la durée consacrée par l'élu à son mandat dans une commune de moins de 1 000 habitants, les montants limites de rémunération s'établissent ainsi :

Exercice à temps partiel du mandat

Plafond annuel de rémunération

Jusqu'à 75 %

30 000 €

Jusqu'à 50 %

22 000 €

Jusqu'à 25 %

15 000 €

La deuxième modification apportée depuis 2009 au statut des élus locaux en Espagne vise également des économies budgétaires. La loi espagnole du 27 décembre 2013 de rationalisation et de soutenabilité des administrations locales n'a pas uniquement précisé les conditions de plafonnement, elle a également introduit dans la loi de 1985 portant régime des collectivités locales un nouvel article 75 ter destiné à limiter le nombre d'élus qui peuvent être considérés comme exerçant leur mandat à titre exclusif et à temps plein et qui peuvent donc recevoir la plénitude des indemnités de mandat. Par tranche de population, les municipalités peuvent accorder entre 45 mandats à temps plein pour Madrid jusqu'à un seul pour les communes comptant entre 1 001 et 2000 habitants, étant entendu que les communes de moins de 1 000 habitants ne connaissent que le mandat à temps partiel. Dans les provinces, le nombre maximal d'élus bénéficiant du régime de mandat à temps plein est le même que dans la commune la plus peuplée de la province.

L'exemple des rémunérations des élus de la commune de León

La commune de León dans la communauté autonome de Castilla y León compte environ 130 000 habitants. Conformément à la loi de 1985 modifiée par la loi du 27 décembre 2013 et le décret-loi du 24 janvier 2014, le montant maximal annuel des rémunérations est de 75 000 euros et le nombre maximal d'élus en régime de mandat à temps plein est égal à 18.

Par une délibération en date du 26 juin 2015, le conseil municipal a décidé que 8 membres bénéficieraient du régime de mandat à temps plein et que 5 autres bénéficieraient d'un régime de mandat à temps partiel à 50 %. Il a fixé ainsi les rémunérations des élus communaux :

- 4 453,55 € bruts en 14 mensualités pour le maire ;

- 3 143,14 € bruts en 14 mensualités pour les élus en mandat à temps plein et à titre exclusif et la moitié de cette somme pour les élus à temps partiel.

Par ailleurs, la valeur des jetons de présence est fixée à :

- 204,07 € pour chaque présence à une séance du conseil municipal, relevé à 339,14 € pour les présidents de groupes ( Portavoces de los Grupos Políticos ), dans la limite de 18 jetons annuels ;

- 169,57 € pour chaque présence à une séance de l'organe exécutif collégial, la Junta de Gobierno Local , présidée par le maire et 136,05 € pour chaque présence à une réunion de commission thématique, dans la limite de 48 jetons annuels ;

- 204,07 € pour chaque présence à une réunion de la conférence des présidents de groupes ( Junta de Portavoces ) chargée d'établir l'ordre du jour du conseil municipal, dans la limite de 26 jetons annuels.

Le montant des indemnités journalières pour couvrir des frais de déplacement des élus dans l'exercice de leur mandat est de 138 € sans nuitée en dehors de la ville et de 207 € en cas de nuitée hors de la ville.

Le statut des élus provinciaux et communaux aux Pays-Bas a davantage évolué depuis 2009 mais cela s'apparente à un processus continu et régulier d'ajustement sans bouleversement du régime.

Il convient de noter que la principale réforme, plusieurs fois évoquée et toujours repoussée, consisterait dans l'élection directe des commissaires du Roi ( Commissaris van de Koning ) dans les provinces et des maires ( burgemeester ) dans les communes. En effet, conformément à l'article 131 de la Constitution néerlandaise, les commissaires du Roi et les maires sont nommés par décret royal. Ces personnages essentiels ne sont donc pas élus même de façon indirecte, alors qu'ils président respectivement l'assemblée provinciale ( provinciale Staten ) et le conseil municipal ( gemeenteraad ) et qu'ils sont chargés de la direction et de la gestion courante des affaires de la collectivité ( het dagelijks bestuur ), en coordination avec un organe exécutif collégial, la délégation permanente dans les provinces ( gedeputeerde Staten ) et le collège du maire et des échevins ( het college van burgemeester en wethouders - B&W ) dans les communes 16 ( * ) .

La procédure de nomination ne laisse toutefois pas de côté les élus locaux : les assemblées provinciales et les conseils municipaux sont entendus par le ministre de l'intérieur pour définir un profil de poste, ils établissent une commission spéciale qui fait un rapport au ministre et peuvent recommander la nomination d'une personne. Le ministre ne peut s'écarter de cette recommandation que pour des motifs sérieux. On relève que techniquement rien n'empêche la nomination d'un même maire dans plusieurs communes. Le droit néerlandais prévoit expressément ce cas et les conséquences en termes de rémunérations et d'indemnités notamment 17 ( * ) .

En 1983 et 2005, des propositions de loi constitutionnelles tendant à l'élection directe des maires ont été bloquées par la chambre haute ( Eerste Kamer ) en deuxième lecture. Une nouvelle proposition touchant les commissaires du roi et les maires a été déposée en 2015. Elle a passé la première lecture, mais la deuxième lecture n'en est pas encore inscrite à l'ordre du jour du Parlement renouvelé au printemps 2017.

L'ensemble du régime financier (rémunérations, indemnités, pensions) demeure régi par une distinction de principe entre membres de l'organe exécutif collégial (maires, échevins, députés provinciaux, commissaires du Roi) et membres de l'assemblée délibérante (conseillers provinciaux, conseils municipaux). Les décrets statutaires ( rechtspositiebesluit ) du 22 mars 2004 qui définissent les différents régimes indemnitaires ont été revus depuis 2009.

Dans les communes, le principe d'une modulation de la rémunération ( bezoldiging ) des maires et des échevins en fonction de la population a été conservé (cf. tableau ci-dessous). Toutefois, le tableau des rémunérations par tranche de population a été simplifié en regroupant plusieurs classes de communes. Ainsi, il n'existe plus qu'une classe pour toutes les communes de moins de 8 000 habitants alors qu'en 2009, on en comptait trois (moins de 2 000, de 2 000 à 4 000, de 4 000 à 8 000 habitants). Cela est conforme à la volonté politique des gouvernements successifs dominés par le parti libéral du Premier ministre Mark Rutte de stimuler la fusion des communes 18 ( * ) .

La possibilité d'un exercice à temps partiel de la fonction d'échevin, sur autorisation du conseil municipal, est maintenue. La rémunération est calculée pro rata temporis . Mais depuis 2010, il n'est plus fixé par le pouvoir réglementaire de norme d'exercice à temps partiel de la fonction d'échevin en fonction de la taille de la commune. Jusqu'en 2010, comme le notait l'étude de législation comparée n° 194, dans les communes de moins de 2 000 habitants, la fonction était réputée représenter 45 % d'un temps plein, et dans celles dont la population était comprise entre 8 000 et 18 000, 75 % d'un temps plein, par exemple. Une augmentation jusqu'à un temps plein nécessitait une autorisation de la délégation permanente de la province sur proposition du conseil municipal. Le système a été simplifié : le conseil municipal fixe désormais la hauteur des temps partiels au cas par cas et le règlement se contente de déterminer les rémunérations mensuelles pour un temps plein.

Enfin, on rappelle que depuis 2009, les maires et les échevins reçoivent une allocation de vacances ( vakantieuitkering ) en mai égale à 8 % de leur rémunération, ainsi qu'une prime de fin d'année ( eindejaarsuitkering ) en novembre égale respectivement à 9,8 % et à 8,3 % de leur rémunération. Les maires reçoivent en outre une indemnité exceptionnelle de 450 € en novembre 19 ( * ) .

Les conseillers municipaux ( raadsleden ) ne perçoivent pas de rémunération mais une indemnité d'activité ( vergoeding voor werkzamheden ), car leur mandat est considéré comme une activité secondaire, exercée parallèlement à leur activité professionnelle. L'indemnité constitue donc une compensation pour un manque à gagner. Le pouvoir réglementaire en fixe les montants mensuels maximaux en fonction de la population de la commune.

La dernière réforme a permis de diminuer de moitié le nombre de classes de communes et de les aligner sur celles utilisées pour la rémunération des maires et des échevins, ce qui n'était pas le cas en 2009. Le conseil municipal a également perdu depuis 2014 la faculté de pouvoir diminuer de 20 % au plus le montant des indemnités d'activités, mais il garde la possibilité de conditionner le versement de 20 % de l'indemnité d'activité à la présence en réunion du conseil. On peut noter une très forte revalorisation de l'indemnité d'activité des conseillers municipaux, dont le montant a doublé dans les petites communes et triplé dans les grandes communes entre 2009 et 2017.

Rémunérations des maires et échevins et
indemnités d'activité des conseillers municipaux aux Pays-Bas 20 ( * )

(Montants au 1 er janvier 2017)

Population (habitants)

Rémunération mensuelle des maires

Rémunération mensuelle des échevins

Indemnité d'activité mensuelle maximale des conseillers municipaux

Jusqu'à 8 000

6 126,69 €

4 605,10 €

239,11 €

De 8 001 à 14 000

6 740,00 €

5 219,05 €

377,82 €

De 14 001 à 24 000

7 348,73 €

5 837,78 €

588,91 €

De 24 001 à 40 000

7 988,49 €

6 247,44 €

914,12 €

De 40 001 à 60 000

8 660,52 €

6 864,06 €

1 190,11 €

De 60 001 à 100 000

9 390,16 €

7 479,61 €

1 392,60 €

De 100 001 à 150 000

9 955,80 €

8 169,15 €

1 581,05 €

De 150 001 à 375 000

10 667,77 €

8 653,50 €

1 841,88 €

À partir de 375 001

11 427,98 €

9 818,34 €

2 242,41 €

Par ailleurs, les indemnités pour frais de mandat ( onkostenvergoeding ) des maires, des échevins et des conseillers municipaux ont été revues depuis 2009 pour supprimer la modulation en fonction de la population de la commune. Désormais, quelle que soit la commune, pour couvrir les dépenses liées à l'exercice de leur mandat, les maires reçoivent 386,74 € par mois, les échevins 355,80 € par mois et les conseillers municipaux 170,17 € par mois, montants réévalués de 1,5 % au 1 er janvier 2018 21 ( * ) .

L'étude de législation comparée n° 194 de février 2009 indiquait qu'une réforme de la loi de 1969 sur les pensions des titulaires de charges politiques 22 ( * ) était en cours d'adoption. Elle visait notamment les conditions d'octroi aux anciens élus locaux de l'indemnité de transition ( wachtgeld ) à l'expiration du mandat pour la rapprocher des allocations chômage versées aux salariés. N'étaient concernés 23 ( * ) que les membres des exécutifs locaux (maires, échevins, commissaires du roi et députés provinciaux), présumés exercer leur mandat à titre exclusif, les conseillers municipaux et provinciaux ne recevant aucune indemnité de fin de mandat. La réforme a été adoptée, elle est entrée en vigueur mais elle a été prolongée par de nouvelles lois en 2012 et en 2015 24 ( * ) pour réduire la durée des versements et durcir le régime.

Le dispositif actuel 25 ( * ) prévoit que les élus visés, qui demeurent uniquement les titulaires de charges exécutives, ont droit dès le jour de leur sortie de fonction à une allocation ( uitkering ), dès lors qu'ils n'ont pas atteint l'âge légal de la retraite. Cela vaut aussi bien pour l'expiration normale du mandat que pour une démission volontaire en cours de mandat. En revanche, si la fin du mandat coïncide avec une condamnation à une mesure privative de liberté, ils n'y ont pas droit. Si un échevin quitte sa fonction exécutive pour devenir simple membre du conseil municipal, il a également droit à une allocation mais son indemnité d'activité en sera réduite d'autant. La reprise du même mandat entraîne à tout moment l'expiration de l'allocation.

L'allocation est versée pendant une durée égale à la durée passée en fonction, sans pouvoir être inférieure à deux ans, ni supérieure à trois ans et deux mois - contre quatre ans auparavant. Toutefois, s'il reste à l'élu au moment de sa sortie de mandat cinq ans ou moins avant d'atteindre l'âge légal de la retraite 26 ( * ) et si, cumulativement, il a siégé au moins 10 ans dans les douze dernières années, alors cette allocation lui est versée jusqu'à l'âge de la retraite. C'est une condition beaucoup plus dure qu'en 2009, car ce dispositif spécifique pour les longs mandats était alors ouvert dès 50 ans. À l'inverse, si l'élu a exercé sa fonction pendant moins de trois mois, la durée d'allocation est fixée à six mois.

Le montant de l'allocation est égal à 80 % du dernier traitement 27 ( * ) perçu par l'élu, la première année, et à 70 % pour le reste de la durée de versement 28 ( * ) . Si l'ayant-droit perçoit des revenus professionnels annexes, le montant est ajusté de telle sorte que ses revenus globaux ne dépassent pas la rémunération perçue à la fin de son mandat.

La durée de perception de l'allocation de reconversion est prise en compte pour le déclenchement du versement de la pension de retraite, dont le calcul est largement aligné sur le régime commun.

Sur le modèle des demandeurs d'emploi du secteur privé, l'élu ayant droit à l'allocation de transition a l'obligation de rechercher activement un emploi, d'accepter les offres d'emploi convenables et de participer à des activités propices à sa réinsertion dans l'emploi ( inschakeling in de arbeid ). Une indemnisation complémentaire égale au plus à 20 % du dernier traitement annuel peut être octroyée aux élus pour couvrir des frais éventuels d'orientation et d'accompagnement dans la recherche d'emploi.

Une des particularités du marché du travail néerlandais, qui demeure vivace, est l'importance du nombre de personnes déclarés partiellement inaptes à occuper un emploi ( gedeeltelijk arbeidsongeschikt ). Or, la possibilité d'être déclaré inapte est beaucoup plus largement utilisée qu'ailleurs, sans que l'état général de santé de la population soit plus mauvais. C'est un mécanisme qui tend à diminuer le nombre de demandeurs d'emploi, à alléger les obligations de recherche d'emploi et à diminuer la tension sur le marché du travail. On compte encore environ 800 000 personnes déclarées (partiellement) inaptes, soit près de 9 % de la population active des Pays-Bas.

C'est pourquoi il n'est pas étonnant de retrouver un dispositif très étoffé consacré au cas spécial de l'allocation de transition pour les élus partiellement « invalides », catégorie qui couvre l'invalidité ou l'affection de longue durée mais aussi des cas plus ambigus d'incapacité à retrouver un emploi. En particulier, cela couvre les cas des personnes qui totalement ou partiellement ne seraient pas en mesure avec leur travail de gagner ce que gagnerait une personne en pleine santé au même poste avec une formation et une expérience similaires 29 ( * ) . Même si la cause doit en être trouvée dans un fait médical objectif, la pratique pour les salariés est d'adopter une interprétation large et libérale, et il n'y a pas d'indice qu'elle soit plus restrictive pour les anciens élus locaux. Lorsqu'un ancien élu est reconnu comme partiellement inapte à plus de 25 % et qu'il a plus de 33 ans, le versement de l'allocation de reconversion peut être prolongé à sa demande de 6 mois à 6 ans selon son âge. Le montant de l'allocation versée pendant cette période de prolongation est dégressif en fonction du niveau d'inaptitude 30 ( * ) .

En Allemagne , la question de la rétribution des maires dépend de chaque Land . Un document de synthèse qui montre la disparité des situations selon les Länder a été rédigé par les services du Bundestag en 2011 31 ( * ) . Outre les disparités régionales concernant l'indemnisation des maires et des membres des conseils municipaux, la rémunération des maires varie également selon qu'ils exercent leur mandat à titre exclusif (hauptamtlicher Bürgermeister) ou à titre bénévole (ehrenamtlicher Bürgermeister) .

L'étude de février 2009 renvoyait à cette variation régionale sans préciser davantage d'éléments chiffrés et sans entrer dans la complexité des éléments de la rétribution des élus communaux. C'est pourquoi il a été jugé utile d'aller plus dans le détail à l'occasion de cette note d'actualisation en prenant quelques Länder comme exemples.

Le règlement sur les communes du Land de Bade-Wurtemberg, par exemple, considère que le maire d'une commune de moins de 2 000 habitants exerce à titre bénévole 32 ( * ) . Toutefois, au-delà de 500 habitants, la commune peut lors de la Hauptsatzung 33 ( * ) décider que le maire exerce à titre exclusif. Est également distingué le cas où le maire exerce son mandat à titre exclusif de celui où il l'exerce à titre bénévole 34 ( * ) .

On a choisi de détailler l'exemple du Land de Mecklembourg-Poméranie-Occidentale. Le traitement ( Besoldung ) d'un maire exerçant à titre exclusif est assimilé à celui d'un fonctionnaire aux termes de l'ordonnance régionale sur la rémunération et l'indemnité de représentation des fonctionnaires élus à titre exclusif 35 ( * ) , qui précise le groupe de rémunération de la fonction publique auquel est assimilé le maire en fonction du nombre d'habitants de la commune (§5). Au 1 er juin 2017, les rémunérations des maires exerçant à titre exclusif sont rassemblées dans le tableau suivant.

Rémunération des maires exerçant à titre exclusif
(Mecklembourg-Poméranie-Occidentale)
36 ( * )

Nombre d'habitants de la commune

Groupe de rémunération

Équivalent en euros

Jusqu'à 5 000

A 14

3 732,98 à 5 380,18 €

De 5 001 à 10 000

A 15

4 839,19 à 6 073,97 €

De 10 001 à 15 000

A 16

5 337,47 à 6 765,54 €

De 15 001 à 20 000

B 2

7 054,62 €

De 20 001 à 40 000

B 3

7469,77 €

De 40 001 à 70 000

B 5

8 403,45 €

De 70 001 à 150 000

B 6

8 874,55 €

Plus de 150 000

B 7

9 332,82 €

Outre son traitement, le maire peut prétendre à une indemnité de représentation pour les frais résultant de l'exercice de ses fonctions. Elle est également fonction du nombre d'habitants de la commune.

Indemnité de représentation des maires à titre exclusif
(Mecklembourg-Poméranie-Occidentale)

Nombre d'habitants de la commune

Montant de l'indemnité

Jusqu'à 5 000

90 €

De 5 001 à 10 000

120 €

De 10 001 à 20 000

150 €

De 20 001 à 30 000

190 €

De 30 001 à 80 000

230 €

De 80 001 à 150 000

280 €

Plus de 150 000

360 €

Plus généralement, selon la constitution communale du Land de Mecklembourg-Poméranie-Occidentale 37 ( * ) , les membres des conseils municipaux ont droit au remboursement de leurs frais, pouvant prendre la forme d'une indemnité forfaitaire, à l'indemnisation du manque à gagner des revenus du travail, au remboursement des cotisations patronales de sécurité sociale du manque à gagner des revenus du travail et à une indemnité de déplacement.

Dans les communes possédant une administration dont les mandats sont exercés à titre exclusif, le président du conseil municipal a droit à une indemnité maximale mensuelle de :

250 €

jusqu'à 5 000 habitants

300 €

jusqu'à 10 000 habitants

400 €

jusqu'à 20 000 habitants

500 €

jusqu'à 30 000 habitants

550 €

Au-dessus de 30 000 habitants

De plus, dans une ville-arrondissement (Kreisfreie Städte) ou une grande ville appartenant à une communauté (große kreisangehörige Städte) , cette compensation maximale mensuelle est portée à 38 ( * ) :

850 €

jusqu'à 70 000 habitants

900 €

jusqu'à 100 000 habitants

1 000 €

Au-delà de 100 000 habitants

L'ordonnance du Land de Mecklembourg-Poméranie-occidentale sur la compensation de ceux qui exercent des activités bénévoles dans les communes, les circonscriptions, les offices et les associations 39 ( * ) définit l'indemnité comme le dédommagement des frais ( Aufwandsentschädigung ), le dédommagement pour la perte des revenus de travail ( entgangener Arbeitsverdienstes ), le remboursement des frais de déplacement ( Reisekostenvergütung ) et les frais de garde ( Betreuungskosten ). Le dédommagement des frais est composé de la perte de gains ( Ersatz von Auslagen ), la perte d'exercice de travail et de temps ( Entschädigung für den Aufwand an Zeit und Arbeitsleistung ), ainsi que l'indemnisation pour la responsabilité endossée ( Haftungsrisiko ).

Dans les communes comportant une administration bénévole, les maires peuvent prétendre à une indemnité maximale mensuelle de :

420 €

jusqu'à 500 habitants

700 €

jusqu'à 1 000 habitants

850 €

jusqu'à 1 500 habitants

1 000 €

jusqu'à 2 000 habitants

1 250 €

jusqu'à 3 000 habitants

1 500 €

jusqu'à 4 000 habitants

1 750 €

Au-dessus de 4 000 habitants

Par ailleurs, les présidents de groupes politiques, dans les communes, peuvent obtenir une compensation mensuelle maximale de :

50 €

jusqu'à 1 000 habitants

80 €

jusqu'à 2 500 habitants

100 €

jusqu'à 5 000 habitants

160 €

jusqu'à 10 000 habitants

180 €

jusqu'à 20 000 habitants

210 €

jusqu'à 30 000 habitants

260 €

jusqu'à 70 000 habitants

420 €

jusqu'à 100 000 habitants

520 €

Au-delà de 100 000 habitants

S'agissant de la retraite, les conditions pour en bénéficier dépendent dans ce domaine aussi des Länder . La loi sur les pensions des fonctionnaires du Land de Rhénanie du Nord-Westphalie, par exemple, indique que les maires sont soumis aux règles générales applicables aux fonctionnaires ( Beamter ), si rien d'autre n'est prévu 40 ( * ) . Ils sont considérés comme des fonctionnaires élus dans une relation de fonctionnariat à titre temporaire. Ils ne sont pas obligés de se présenter à une réélection. La relation de fonctionnariat commence le jour de l'acceptation de l'élection et se termine à l'expiration du mandat.

Pour les maires, aucune limite d'âge n'est prévue. Les dispositions de droit commun pour l'entrée en retraite des fonctionnaires 41 ( * ) ne s'appliquent pas. Ils prennent leur retraite à l'expiration de leur mandat, s'ils atteignent :

- au total, au moins 8 ans de période de service ouvrant droit à pension et sont âgés de 45 ans révolus ;

- une période de service ouvrant droit à pension de 18 ans ;

- ou s'ils comptabilisent une période de 8 ans en tant que fonctionnaire temporaire.

Si les conditions ne sont pas remplies, le maire est considéré comme licencié par la loi ( Entlassung kraft Gesetz ) ; il a seulement droit à une indemnité.

Le montant perçu dépend de la durée du mandat et des éventuels autres services à prendre en compte, à l'instar du service militaire. Le taux des pensions peut être calculé de deux façons :

- selon la méthode de calcul de droit commun 42 ( * ) : pour chaque année de service ouvrant droit à pension, la personne reçoit 1,79375 % de sa rémunération dans la limite de 71,75 % (le minimum étant fixé à 35 %) ;

- pour les élus en fonction depuis plus de dix ans 43 ( * ) : la pension de retraite comprend une partie, calculée sur 8 ans, à 33,48345 % de la rémunération et la pension pour les autres années est calculée au taux de 1,91333 % par an, dans la limite de 71,75 % de la rémunération. Cette deuxième règle s'applique si elle est plus favorable que la première.

De plus, le maire a aussi droit à la pension légale ( gesetzliche Rente ). Celle-ci est cependant soumise à plusieurs limites. Le montant total des deux pensions ne peut dépasser un certain plafond, déterminé par la somme que le maire aurait perçu s'il avait été fonctionnaire toute sa vie. 44 ( * ) En outre, en cas de cumul de la retraite de maire et de la pension légale, le calcul de la retraite du maire est modifié. En effet, la pension allouée peut être inférieure au taux légal minimum de 35 %, sous réserve que le cumul des deux régimes ne soit pas inférieur à ce même taux.

Enfin, lorsque l'élu ne remplit pas les conditions nécessaires pour être éligible au régime des retraites des maires, il perçoit une indemnité de transition ( Übergangsgeld ). 45 ( * ) Elle a pour but de soutenir financièrement l'élu durant la recherche du nouvel emploi. Elle est distribuée de manière mensuelle, à la manière d'un salaire. Elle peut seulement être payée jusqu'à ce qu'il atteigne l'âge légal de la retraite.

L'indemnité de transition est calculée selon la durée de l'exercice de sa fonction. Le maire perçoit pour une année passée en fonction l'équivalent d'un mois de son salaire de maire. Pour chaque année d'exercice supplémentaire, il perçoit l'équivalent d'un demi-mois de salaire supplémentaire. Cette somme ne peut dépasser 6 fois le salaire perçu pour le dernier mois en fonction.

LE STATUT DE L'ÉLU LOCAL EN ITALIE

Le statut des élus locaux ( amministratori locali ) est régi en Italie par le décret législatif n° 267 du 18 août 2000 portant texte unique sur les collectivités territoriales ( Testo unico degli enti locali - TUEL ). Toutefois, le cadre juridique formé par ce texte et ses décrets d'applications a été très souvent modifié par des lois de finances, des collectifs budgétaires, des arrêtés des ministres de l'intérieur et des finances et la jurisprudence de la Cour constitutionnelle et de la Cour des comptes. Il en résulte une très grande complexité, sans que toutes les incertitudes dues à la superposition non coordonnée de toutes les mesures soient absolument levées, aux dires mêmes de l'Association nationale des communes italiennes ( ANCI ). L'idée de « texte unique » regroupant toutes les dispositions est donc trompeuse.

Par souci de simplicité et pour assurer la pertinence de la comparaison, la présente note se concentre sur l'échelon communal. En effet, le droit électoral et le droit des collectivités territoriales italiens sont très mouvants avec des successions de dispositions législatives, de sanctions par la Cour constitutionnelle, de référendums consultatifs locaux (en Vénétie et en Lombardie en octobre 2017) ou décisionnaires nationaux (échec de la réforme Renzi en décembre 2016). L'échelon communal propose encore l'armature la plus stable.

Il convient néanmoins de relever quelques traits importants des échelons supérieurs de l'organisation territoriale italienne :

- l'Italie est un État régional, dont les régions concourent à l'exercice du pouvoir législatif. L'autonomie et l'importance des lois régionales sont particulièrement marquées dans les 5 régions à statut spécial (Val d'Aoste, Trentin-Haut Adige, Frioul-Vénétie julienne, Sardaigne et Sicile) ;

- la loi 56/2014 du 7 avril 2014, dite loi Delrio, a évidé le niveau quasi-départemental des provinces, qui deviennent des unités territoriales de second niveau, non plus élues au suffrage direct, mais composées de l'assemblée des maires du ressort et d'un conseil provincial élu par les maires et les conseillers municipaux pour deux ans dans leurs propres rangs et dont le président est élu parmi les maires pour quatre ans. La fin ou la déchéance du mandat de maire ou de conseiller municipal entraîne l'éviction des instances provinciales. Les mandats provinciaux sont exercés à titre gratuit ;

- des métropoles ( città metropolitane ) ont remplacé 10 anciennes provinces dans certaines zones urbaines importantes en reprenant leurs compétences ; elles sont organisées selon ce schéma : assemblée des maires, conseil métropolitain élu au suffrage indirect, maire métropolitain qui est nécessairement le maire de la ville siège de la métropole. Les mandats métropolitains sont exercés à titre gratuit ;

- des règles particulières sont prévues pour Rome, Milan et Naples, ainsi que dans les régions à statut spécial dont les métropoles dépendent d'une loi régionale.

1. Organisation des organes communaux et définition des élus locaux

La commune est dirigée par un exécutif composé du maire ( sindaco ), élu pour 5 ans au suffrage universel, et de la junte ( giunta ) dont les membres assesseurs, y compris le premier adjoint ( vice-sindaco ), sont nommés par le maire. La junte est un organe collégial prenant ses décisions par délibération majoritaire. Dans les communes de plus de 15 000 habitants, les assesseurs de la junte sont nommés en-dehors des conseillers municipaux puisque les deux charges sont incompatibles ; la nomination d'assesseurs extérieurs est également possible dans les plus petites communes, si le règlement intérieur adopté par la commune ( statuto communale ) le prévoit. Un maire ne peut exercer plus de deux mandats consécutifs, sauf dans les communes de moins de 3 000 habitants dans lesquelles un troisième mandat consécutif est autorisé.

Il existe également au niveau communal un conseil municipal, assurant la représentation de la volonté populaire et le contrôle de l'exécutif communal. Ses membres sont élus pour 5 ans au suffrage direct au scrutin de liste. La liste du maire élu reçoit les deux tiers des sièges.

Il faut noter que sont considérés en droit italien comme des élus locaux ( amministratori locali , proprement administrateurs locaux) aussi bien le maire et les conseillers municipaux proprement élus, que les assesseurs de la junte même s'ils sont nommés en-dehors du conseil municipal. Élus ou nommés, ils jouissent du même statut. On peut relativiser ce point en remarquant que, dans la pratique, les assesseurs de la junte sont souvent élus sur la liste du maire puis démissionnent du conseil municipal une fois nommés assesseurs de la junte.

2. Droits et devoirs liés au mandat local

Le mandat qu'ils ont reçu donne aux élus locaux un droit d'accès à tous les actes de la commune et un droit d'information préalable sur toutes les initiatives et les projets soumis à leur délibération, soit comme assesseur de la junte, soit comme conseiller municipal.

Ils ont un devoir d'abstention en cas de conflit d'intérêts quand les décisions en cause les concernent directement ou leurs parents et associés étroits. Ce devoir leur impose de ne pas même participer aux délibérations précédant un vote. L'Autorité nationale anticorruption (ANAC) et les tribunaux ont rappelé plusieurs fois cette obligation stricte fixée par l'article 78 du TUEL et enracinée dans l'article 97 de la Constitution italienne exigeant de toute action administrative le respect des principes de légalité, d'impartialité et de transparence. La juridiction administrative est très stricte en la matière et prévoit l'invalidité des délibérations lorsque l'obligation d'abstention n'a pas été respectée. 46 ( * )

Il est également fait interdiction aux élus locaux d'acquérir des biens de la collectivité, même au cours d'enchères publiques. 47 ( * )

3. Conciliation avec la vie professionnelle : congés et absences

L'article 51 al. 3 de la Constitution italienne accorde à toute personne appelée à une fonction publique élective le droit de disposer du temps nécessaire pour la remplir et de conserver son poste de travail. Les « administrateurs locaux » ont en conséquence le droit de bénéficier d'absences de leur activité professionnelle pour exercer leurs charges dans le cadre fixé par la loi.

À leur demande, les élus locaux qui sont salariés ou fonctionnaires peuvent demander à leur employeur de bénéficier d'un régime de congé propre, non rétribué, l'aspettativa , pour tout ou partie de la durée de leur mandat (art. 81 TUEL). Le placement en aspettativa entraîne la cessation de la rémunération par l'employeur habituel mais la période est considérée comme un service effectivement réalisé.

En outre, est prévu un régime d'absences légitimes ( permessi ). Ces dispenses sont distinctes selon les strates de population des communes et selon les fonctions exercées localement. Le principe demeure le même : les salariés et fonctionnaires ( lavoratori dipendenti ), qu'ils soient membres du conseil municipal ou de l'exécutif communal, disposent du droit de s'absenter de leur travail pour la durée nécessaire aux réunions des organes communaux auxquels ils appartiennent (art. 79 TUEL). Cela comprend le temps de trajet. Si les réunions se tiennent le soir ou se prolongent la nuit, des récupérations sont prévues sur la journée suivante. Lorsque la commune compte plus de 15 000 habitants, l'exécutif communal et le président du conseil communal bénéficient d'un droit supplémentaire de s'absenter pendant 24 heures travaillées par mois, voire 48 heures pour le maire.

Ces absences légitimes sont rétribuées mais ne sont pas à la charge de l'employeur, si celui-ci est une personne privée ou une entreprise publique ou un EPIC ( enti pubblici economici ), mais à la charge de la commune. 48 ( * ) Concrètement, la collectivité rembourse l'employeur ; les calculs peuvent être complexes. Aucun remboursement n'est dû si l'employeur est une administration publique.

De surcroît, des absences supplémentaires sont autorisées pour tous les élus salariés ou fonctionnaires dans la limite de 24 heures travaillées mensuelles mais ces dernières ne sont pas rétribuées.

4. Statut financier : indemnités et jetons de présence

Le maire, les assesseurs de la junte et le président du conseil municipal ont droit à une indemnité mensuelle, mais pas les conseillers municipaux. Le montant de l'indemnité est calculé par la commune à partir des règles, très complexes et parfois confuses, fixées nationalement. Le cadre juridique est très instable : l'article 82 du TUEL, la base légale de l'indemnité, a été ainsi modifié par 9 lois successives entre 2006 et 2010. Les lois de finances et les collectifs budgétaires ont modifié le périmètre des destinataires, effectué des coupes dans les montants, supprimé les possibilités de cumul d'indemnités entre diverses charges publiques et suspendu pour trois ans entre 2008 et 2011 l'indexation sur l'indice du coût de la vie mesuré par l'institut statistique national. La jurisprudence de la Cour des comptes italienne est abondante sur un sujet qui n'a pas encore été parfaitement clarifié au-delà de toute contestation.

Le tableau suivant synthétise les calculs figurant dans les guides à destination des élus locaux italiens publiés régulièrement par les associations de collectivités territoriales, notamment l'association nationale des communes italiennes (ANCI).

L'indemnité est diminuée de moitié pour les salariés qui n'ont pas demandé à être placés en congé d' aspettativa auprès de leur employeur.

Au bénéfice des conseillers municipaux sont prévus des jetons de présence pour leurs participations effectives aux réunions du conseil municipal et des commissions. 49 ( * ) La valeur des jetons de présence va de 18,08 € par réunion pour les communes allant de 1 001 à 10 000 habitants jusqu'à 103,29 € par réunion pour les communes de plus de 500 000 habitants. Un plafond est fixé au quart de l'indemnité de fonction prévue pour le maire. Les élus qui bénéficient d'une indemnité de fonction ne peuvent recevoir de jetons de présence.

Montants des indemnités de fonction
des exécutifs communaux italiens 50 ( * )

Nombre d'habitants

Indemnité de fonction du maire

(en euros)

Indemnité de fonction du
1 er adjoint (vice-maire)

(en % de l'indemnité
du maire)

Indemnité de fonction des assesseurs de la junte

(en % de l'indemnité
du maire)

Moins de 1 000

1 162,03

15 %

10 %

De 1 001 à 3 000

1 301,47

20 %

15 %

De 3 001 à 5 000

1 952,21

De 5 001 à 10 000

2 509,98

50 %

45 %

De 10 001 à 30 000

2 788,87

55 %

De 30 001 à 50 000

3 114,23

De 50 001 à 100 000 ou chefs de lieu de province jusqu'à 50 000

3 718,49

75 %

60 %

De 100 001 à 250 000 ou chefs de lieu de province jusqu'à 100 000

4 508,67

De 250 001 à 500 000 ou chefs de lieu de province jusqu'à 250 000

5 205,89

65 %

Au-dessus de 500 000 et chefs-lieux de régions

7 018,65

5. Protection sociale et assurantielle

Le régime de protection sociale des élus locaux est spécifique et différencié selon leur statut d'emploi (indépendants et professions libérales/salariés et fonctionnaires).

Le placement en congé non rémunéré d' aspettativa pendant la durée du mandat d'un élu fonctionnaire ou salarié suspend tout versement de charges sociales de la part de l'employeur privé ou public. Les charges sociales sont alors intégralement versées par la commune si l'élu local concerné est le maire, le président du conseil municipal ou un assesseur de la junte ; en revanche, elles sont intégralement à la charge propre des conseillers municipaux, aussi bien la part patronale que la part salariale. 51 ( * )

Lorsque l'élu local est travailleur indépendant ( lavoratori autonomi ), le droit à congé n'a pas de sens, mais l'élu doit nécessairement réduire son activité professionnelle pour assumer son mandat. Pour éviter que les charges sociales pèsent démesurément sur lui, il est prévu que la collectivité territoriale verse à l'Institut national de sécurité sociale ( INPS ) un montant forfaitaire déterminé sur la base d'un revenu de référence imposable fixé par la caisse dont l'élu dépend (artisans, commerçants, agriculteurs, pharmaciens, architectes, consultants, géomètres-experts, journalistes, infirmiers, notaires, etc.). L'élu demeure inscrit dans la caisse de sécurité sociale à laquelle il était affilié avant sa prise de fonction. L'assuré verse un complément au forfait pour ses revenus au-dessus du revenu de référence.

Par ailleurs, le maire a droit à une indemnité de fin de mandat. C'est un trait original qui doit être mise en perspective d'un dispositif ancien du droit du travail italien : le traitement de fin de relation de travail ( trattamento di fine rapporto - TFR ) perçu par le salarié lors de la cessation du lien de subordination avec son employeur, quelle qu'en soit la cause, retraite, démission ou licenciement. Le montant de l'indemnité de fin de mandat est égal à l'indemnité mensuelle multipliée par le nombre d'années de mandat. Le montant est ajusté pro rata temporis pour les années non complètes. Depuis le 1 er janvier 2007, sont exclus du bénéfice de l'indemnité de fin de mandat les maires qui ont été en poste moins de 30 mois. 52 ( * )

Enfin, les collectivités territoriales peuvent assurer les élus locaux contre les risques liés à l'accomplissement de leur mandat. 53 ( * ) Les frais de justice engagées par un élu peuvent lui être remboursés dans certaines limites par la collectivité territoriale lorsque l'action menée contre lui au titre de ses fonctions s'achève par un acquittement, un non-lieu ou un classement sans suite, en l'absence de conflits d'intérêts et dès lors qu'aucun dol ou faute grave ne peut être relevé (art. 86 al. 5 TUEL).

LE VOTE ÉLECTRONIQUE AUX ÉLECTIONS

La division de la Législation comparée a mis à jour son étude LC 176 de 2007 sur le vote électronique en reprenant comme base le même échantillon (Allemagne, Belgique, Espagne, Irlande, Italie, Pays-Bas, Portugal, Royaume-Uni, Suisse). Il a été toutefois jugé utile d'élargir le champ des recherches à l'Europe du Nord (Estonie, Finlande, Suède) et d'offrir en contrepoint une présentation de la situation au Brésil, qui utilise depuis longtemps le vote électronique à grande échelle et dont l'exemple n'est pas sans attraction dans le reste de l'Amérique latine.

I. UN NET REFLUX DU VOTE ÉLECTRONIQUE EN EUROPE POUR DES RAISONS DE COÛT ET DE SÉCURITÉ

Force est de constater que le vote électronique demeure l'exception en Europe. Depuis 2007, sa situation s'est même dégradée. Certains pays l'ont privé de base légale, comme les Pays-Bas. La décision de la Cour constitutionnelle allemande en 2009 condamnant les modalités de mise en oeuvre du vote électronique a également fait grand bruit. Plusieurs pays ont renoncé à l'employer après les premiers tests ou réflexions. Le plus souvent, l'attentisme prévaut donc aussi bien en Europe du Sud qu'en Scandinavie, au Royaume-Uni et en Irlande.

Il faut trouver l'origine de cette évolution dans la conjugaison de multiples facteurs : les contraintes financières, les craintes pour la sécurité des opérations et la sincérité du scrutin, l'obligation juridique d'assurer à la fois le secret du vote et la transparence du processus électoral. Les expérimentations menées dans la plupart des pays depuis les années 2000 ont été soit de trop petite ampleur pour être significatives, soit marquées par de nombreux dysfonctionnements.

Cela ne signifie pas que les débats soient définitivement clos. Des commissions sont régulièrement installées pour examiner à nouveau le sujet et émettre des prescriptions techniques satisfaisantes. Des propositions de loi sont déposées pour étendre le vote électronique et des expérimentations circonscrites à une zone donnée pour un scrutin déterminé continuent à se tenir. Les évolutions technologiques laissent entrevoir une possibilité de satisfaire aux différentes exigences constitutionnelles, dont le respect n'était pas suffisamment garanti par la première génération des dispositifs de vote électronique, qui ne prévoyait pas de possibilité de vérification et de contrôle du vote, ni d'émission d'une preuve papier, mais stockait toutes les données personnelles du vote.

Des revendications régionalistes (Catalogne, Lombardie) sont souvent associées aux demandes d'extension du vote électronique. Paradoxalement, selon les États, parmi les partis politiques qui y sont favorables, on trouve soit des formations libérales au nom de la modernité et de la révolution digitale, soit des mouvements populistes pour favoriser des formes de démocratie directe.

Il n'en demeure pas moins que la Belgique, hormis la Wallonie, certains cantons suisses et l'Estonie font désormais figure de postes avancés ou de camps retranchés des partisans du vote électronique, selon l'optique que l'on retiendra. C'est une différence marquante entre l'Europe et les espaces démocratiques extraeuropéens où de grands États, comme le Brésil, l'Inde ou les Philippines, sans évoquer les États-Unis, utilisent le vote électronique pour limiter la fraude électorale et les pressions dans les bureaux de vote et pour faciliter l'expression des suffrages de populations défavorisées, parfois illettrées.

Même dans les pays qui recourent largement au vote électronique, on constate une préoccupation croissante pour la sécurité et la sincérité du vote, qui conduit à modifier les types de machines et de procédures employées. La tendance est à l'utilisation de machines permettant un contrôle du vote par l'électeur et l'émission d'une trace sur papier, par exemple via l'impression des bulletins sous un format standard qui permet ensuite leur décompte automatisé.

L'Estonie et certains cantons suisses se distinguent en faisant le choix du vote par Internet, dont la sécurisation constitue un enjeu majeur.

II. UN ATTENTISME PERSISTANT ET DES EXPÉRIENCES NON CONCLUANTES EN EUROPE DU SUD, DANS LES ÎLES BRITANNIQUES ET EN SCANDINAVIE

Le Portugal n'a pas fait évoluer sa législation, ni ses pratiques depuis les expériences de vote électronique menées en 1997, 2001, 2004 et 2005, que décrivait l'étude de législation comparée LC 176 de septembre 2007. 54 ( * ) La dernière expérience lors des élections législatives de 2005 eut la particularité de prévoir un vote électronique en mode présentiel sur dans cinq paroisses ( freguesia ) et en mode non présentiel par Internet pour les Portugais résidents à l'étranger. L'attentisme prévaut depuis en raison des coûts et des difficultés logistiques, des incertitudes sur la sécurité et des exemples étrangers de pays qui ont renoncé au vote électronique.

De même, la situation n'a pas évolué en Espagne depuis l'étude de 2007. 55 ( * ) Le vote électronique n'est pas autorisé par la législation espagnole, bien que la Commission électorale ( Junta Electoral Central ) l'ait recommandé en 2010. Aucune mention n'en est faite dans la loi organique portant régime électoral, dont l'article 86 garantit le secret du vote et décrit la procédure de vote traditionnelle par bulletin placé dans l'urne physique du bureau de vote. 56 ( * ) En juin 2017, le gouvernement espagnol a réaffirmé qu'il n'envisageait pas d'introduire le vote électronique en raison de failles de sécurité qui le rendait vulnérable à la cybercriminalité aujourd'hui en pleine expansion.

Le Pays basque demeure la seule communauté autonome à recourir au vote électronique pour les élections de son parlement. 57 ( * ) Le système utilisé correspond à la première génération de machines à voter sans preuve papier, utilisée dans les années 1990-2000 en Belgique et aux Pays-Bas (cf. infra). Toutefois, une modification de la législation basque en 2015 habilite le Gouvernement basque à réaliser toutes les expérimentations pilotes qu'il estime nécessaire en employant des technologies nouvelles qui s'adaptent mieux au processus électoral aux fins d'évaluer leur possible mise en oeuvre. Les systèmes de vote qui peuvent être testés doivent, toutefois, garantir le secret du vote et la transparence du scrutin.

Malgré des tests conduits au moins en Andalousie (2004), en Catalogne (1995, 2003, 2010), dans la Communauté valencienne (1999) et en Galice (1997, 2005), le vote électronique n'y est pas devenu un mode de votation alternatif ni pour les élections régionales, ni pour les municipales. Un projet de loi déposé par le gouvernement indépendantiste catalan devait permettre aux catalans résidents à l'étranger de voter électroniquement au référendum convoqué le 1 er octobre 2017 et aux élections régionales, mais il n'a pu être adopté à la majorité qualifiée des 2/3 requise du parlement catalan.

Le cas de l' Italie offre de grandes similarités avec ceux de l'Espagne et du Portugal. Les tests effectués dans les années 2000 n'ont pas été prolongés après les graves dysfonctionnements constatés au moment du décompte des suffrages lors des élections législatives d'avril 2006. Le gouvernement italien a alors renoncé à la mise en oeuvre du vote électronique, comme le relevait l'étude de 2007. 58 ( * )

Toutefois, les mouvements régionalistes et populistes italiens continuent d'alimenter la demande de révision des modes de votation. C'est ainsi que la Lombardie a adopté une loi régionale spéciale 59 ( * ) pour prévoir le recours au vote sur machines électroniques pour son référendum consultatif sur l'élargissement de son autonomie du 22 octobre 2017. Cette consultation était le résultat de l'alliance entre la Ligue du Nord, qui dirige le gouvernement régional, et le Mouvement Cinq étoiles. Le dispositif technique retenu prévoyait que dans un certain nombre de bureaux de vote, représentant au moins 25 % des électeurs potentiels, les machines de voter permettraient l'impression sur papier du vote exprimé électroniquement à des fins de contrôle de régularité du processus.

Pour l'équipement de l'ensemble des bureaux de vote, 24 000 machines ont été achetées par la région à la société Smartmatic, également active en Flandre, pour une somme de 23 millions d'euros environ, comprenant également les logiciels, les systèmes de sécurité, l'assistance technique et la formation du personnel. 60 ( * ) De l'aveu général, la consultation s'est techniquement mal passée, le décompte des voix électroniques et la collation des résultats des différents bureaux ayant rencontré des problèmes. Il a fallu bloquer les assesseurs sur place et attendre le lendemain pour obtenir la participation et les résultats. Il convient de noter que la Vénétie qui organisait le même jour un semblable referendum n'avait pas ouvert la possibilité de voter électroniquement et les résultats définitifs ont été disponibles bien avant ceux de Lombardie, dans des délais normaux.

On ne peut cependant distinguer un particularisme de l'Europe du Sud, puisque l'attentisme prévaut aussi dans les systèmes politiques scandinaves et dans les pays de Common Law. Les coûts d'opportunité et les risques paraissent démesurés pour l'instant aussi bien en Irlande qu'en Suède.

L' Irlande a expérimenté le vote électronique en 2002 à l'occasion des élections législatives dans 3 circonscriptions sur 42 et du référendum sur le traité de Nice dans 7 circonscriptions. Pour autant, l'expérience a été suspendue, car la commission sur le vote électronique mise en place par l' Electoral (Amendment) Act de 2004 (dissoute depuis) avait conclu dans son rapport que, « compte tenu des problèmes de secret, d'exactitude et d'analyse [...], elle n'est pas en mesure de recommander l'utilisation du système proposé aux élections locales et européennes. La Commission insiste sur le fait que cette conclusion n'est pas fondée sur le constat que le système ne fonctionnera pas, mais sur le constat qu'il n'a pas été prouvé à l'heure actuelle de façon satisfaisante à la Commission qu'il fonctionnera » 61 ( * ) .

En 2009, l'idée du vote électronique a été complètement abandonnée. Les machines à voter commandées auprès d'une société néerlandaise et utilisées en 2002, puis remisées après l'abandon du projet par le gouvernement, à la suite des conclusions de la Commission, ont finalement été destinées au recyclage. Des enchères ont été ouvertes, lesquelles ont finalement conduit le gouvernement à les céder à l'entreprise même qui leur avait vendu les machines. Selon les journaux de l'époque, les machines auraient au total coûté plus de 55 millions d'euros à l'État irlandais (compte tenu de l'acquisition, de l'entretien, de l'entreposage ...) et elles auraient été revendues en 2009 pour 70 267 euros 62 ( * ) .

En Suède , une commission sur la loi électorale comprenant des représentants de tous les partis a proposé en 2015 de faire un essai de vote électronique via internet dans quelques communes lors des élections de 2018. Cette idée a été rejetée par le gouvernement, qui l'a jugée inopportune au regard du secret du vote et de la garantie que le vote ne soit pas influencé. Le ministre de la justice a également émis des réserves sur la mise en place du vote électronique comme alternative au système manuel, même dans un isoloir, estimant que cela engendrerait des coûts importants. L'intérêt d'une telle transformation serait minime, le système actuel fonctionnant plutôt bien. Il a aussi indiqué que si jamais le vote électronique finissait par être envisagé, alors ce serait selon la méthode présentielle dans un bureau de vote.

Malgré ces différents exemples, il faut noter que la réflexion se poursuit toujours, notamment au Royaume-Uni et en Finlande, malgré les positions fermement défavorables des différents gouvernements quelle que soit leur sensibilité. Les rapports se succèdent, des estimations des coûts et des évaluations des méthodes sont produites. La perspective du vote par internet est prise au sérieux notamment pour accroître la participation des jeunes aux scrutins.

En Royaume-Uni , le vote électronique ne fait pas partie des moyens à la disposition des citoyens pour exercer leur droit de vote. Ceux-ci peuvent voter en personne dans un bureau de vote, par voie postale ou par procuration. Pourtant, entre 2000 et 2007, le Gouvernement britannique a encouragé les autorités locales anglaises à entreprendre des projets pilotes électoraux pour tester de nouvelles méthodes de vote, incluant le vote électronique (e-voting) et le décompte électronique (e-counting) 63 ( * ) . Font partie des formes testées de vote électronique :

- le vote électronique à distance, utilisant internet, téléphones mobiles, messagerie texte ou télévision numérique, que ce soit le jour de l'élection ou par anticipation ;

- le vote en ligne dans des endroits supervisés, incluant l'utilisation de kiosques dans les bureaux de vote traditionnels ou dans d'autres endroits publics (bibliothèques, supermarchés, mairies), que ce soit le jour de l'élection ou par anticipation ;

- des bureaux de vote électroniques, permettant aux électeurs de voter dans n'importe quel bureau de vote dans la zone de l'autorité locale le jour du scrutin, grâce à des ordinateurs portables en réseau.

Tous les projets pilotes ont été évalués par la commission électorale depuis 2002. Elle a conclu que l' e-counting avait le potentiel d'améliorer à la fois l'efficacité et la précision du processus de décompte et que le vote électronique améliorait la commodité pour l'électeur. Toutefois, ces conclusions étaient assorties de recommandations :

- tout projet futur d' e-voting ou d' e-counting devra être basé sur des tests plus approfondis de sécurité, de fiabilité et de transparence des solutions proposées, soit par un processus d'accréditation et de certification, soit par un processus d'approvisionnement plus détaillé et approfondi ;

- un temps suffisant doit être alloué à la planification des projets d' e-voting et d' e-counting ;

- aucune nouveau projet pilote d' e-voting ou d' e-counting ne doit être entrepris tant que le Gouvernement n'a pas mis en place une stratégie globale de modernisation électorale précisant comment l'utilisation plus large de la technologie dans les élections garantira la transparence, la confiance du public et la rentabilité.

Dans les faits, aucun nouveau projet pilote n'a été entrepris depuis 2007. En mars 2010, des conclusions du Gouvernement sur l' e-voting ont reconnu que les citoyens étaient préoccupés par la sécurité, la transparence et la rentabilité du vote à distance.

En 2014, la commission sur la démocratie numérique de la Chambre des Communes 64 ( * ) a conduit une série d'auditions sur la démocratie numérique, incluant le vote électronique. Dans son rapport final, la commission estime que « le vote en ligne a le potentiel d'augmenter considérablement la commodité et l'accessibilité du vote (...). La commission est convaincue qu'il existe un intérêt considérable pour le vote en ligne au Royaume-Uni, en particulier parmi les jeunes. Il deviendra de plus en plus difficile de persuader les jeunes électeurs de voter selon les méthodes traditionnelles. Ce n'est qu'une question de temps avant que le vote en ligne ne devienne une réalité, mais il faut d'abord surmonter les problèmes de sécurité. Une fois cela atteint, il y aura un besoin urgent de fournir aux citoyens un accès au vote en ligne, et la Royaume-Uni doit s'y préparer. La commission électorale a appelé le Gouvernement à introduire une "stratégie globale de modernisation électorale [...] précisant comment l'utilisation plus large de la technologie dans les élections garantira la transparence, la confiance du public et la rentabilité". Le nouveau système d'enregistrement en ligne pourrait être la pierre angulaire d'un futur système de vote en ligne, bien que cela ne résolve pas le problème de la vérification de l'identité des personnes lorsqu'elles votent en ligne » .

La commission conclut en soutenant la proposition d'introduire le vote en ligne au Royaume-Uni à partir de 2020, tout en soulignant qu'il faudra au préalable répondre aux préoccupations concernant la fraude électorale et le secret du vote 65 ( * ) .

La Finlande a procédé, via la loi n°13.10.2006/880 66 ( * ) , à une expérimentation du vote électronique dans 3 communes (Grankulla, Högfors et Vichtis) lors des élections municipales de 2008. Cette loi, entrée en vigueur le 1 er janvier 2007 et applicable jusqu'au 31 décembre 2008, permettait aux électeurs des communes précitées de voter par voie électronique, soit en avance dans des lieux de vote préalables, soit le jour du scrutin dans des lieux de vote. Les électeurs pouvaient toutefois opter pour un vote « traditionnel » avec un bulletin de vote. La possibilité de vote par internet n'était pas ouverte par cette expérimentation. Le gouvernement a décidé le 13 janvier 2010 que le développement du vote électronique comme moyen de vote ne serait pas poursuivi pour le moment en Finlande, et que jusqu'à nouvel ordre, le système de vote actuel devait être appliqué 67 ( * ) .

Depuis, d'autres organes de réflexion créés par le ministère de la justice ont travaillé sur cette question, en se focalisant en particulier sur le vote sur internet.

En décembre 2017, un groupe de travail du ministère de la justice sur les conditions de mise en place du vote sur internet en Finlande a conclu qu'il y avait à l'heure actuelle plus de risques que d'avantages au vote sur internet 68 ( * ) . D'après le groupe de travail, s'il est du point de vue technique possible de construire un système pour le vote par internet, ces techniques ne sont cependant pas suffisamment avancées dans la mesure où il existe des défauts. Le groupe de travail a souligné les risques inhérents au vote sur internet. Pour le rendre viable, il faut pouvoir s'assurer que le vote arrive sur la plateforme de comptage des voix de façon non modifiée, préserver le secret du vote, éviter les pressions et la vente de voix qui pourraient être générés par l'émission d'un certificat de vote, éviter la manipulation des résultats et la perturbation du scrutin par une saturation volontaire du site de vote, éviter la perte de confiance dans le système qui peut être affaibli par des rumeurs ou des fausses informations. Enfin, le groupe de travail finlandais a souligné que le développement d'un vote sur internet n'aurait qu'un petit impact sur la participation au scrutin. Les estimations financières du groupe de travail pour la mise en place d'un système de vote sur internet s'élèvent à 32 millions d'euros s'il est utilisé 15 ans.

Le groupe de travail indique également que la dématérialisation peut être utilisée pour créer une nouvelle façon de participer. Le développement et la dématérialisation des systèmes de vote et des façons de participer comprennent également d'autres modes que le vote sur internet : l'implication du citoyen peut être renforcée par exemple par la création de nouveaux types d'outils numériques, qui pourraient rendre les processus de prise de décision plus transparents et offrir aux citoyens de nouvelles possibilités de participer au débat public.

III. DES COUPS D'ARRÊTS NETS ET DURABLES ENREGISTRÉS AUX PAYS-BAS ET EN ALLEMAGNE

Le coup d'arrêt porté au vote électronique aux Pays-Bas en 2008 est d'autant plus spectaculaire que le législateur autorisa dès 1965 le recours à d'autres modes d'expression du vote que le bulletin papier. Le premier test eu lieu lors des élections provinciales de 1966 sous l'autorité des communes. L'informatisation ayant ouvert des possibilités de développement nouvelles, la loi électorale ( Kieswet ) et le décret électoral ( Kiesbesluit ) furent modifiés en 1989 et un règlement pour l'agrément des machines à voter fut publié 69 ( * ) . À partir de là, le vote électronique sur machines ( stemcomputers ) se généralisa rapidement, au point de concerner 90 % des suffrages dans les années 1990 et au début des années 2000 tant dans les scrutins nationaux que locaux. D'après les statistiques du ministère de l'intérieur, 448 des 458 communes néerlandaises avaient alors installé des machines de vote dans leurs bureaux.

Les élections législatives de novembre 2006, suivies des élections provinciales de mars 2007 constituèrent un tournant majeur. Une enquête des services de renseignement néerlandais 70 ( * ) établit que les machines de la marque Sdu, représentant environ 9 % du stock et utilisées dans 35 communes dont Amsterdam, n'apportait pas de garanties de sécurité suffisantes. Le secret du vote, protégé par l'article 53 de la Constitution néerlandaise, ne pouvait en effet être assuré car elles émettaient un signal susceptible d'être capté jusqu'à 40 m de distance. Le ministre de l'intérieur leur retira l'agrément. Dans certaines communes, les machines de l'autre fournisseur, Nedap, purent être déployées mais dans 24 d'entre elles dont Amsterdam, il fut fait recours aux moyens traditionnels.

Un groupe d'activistes «Nous ne faisons pas confiance aux machines à voter» 71 ( * ) intensifia sa campagne contre le vote électronique tel qu'il était organisé. Les problèmes majeurs venaient de l'impossibilité, en l'absence de trace papier, pour l'électeur de vérifier que son vote avait été correctement pris en compte et pour les scrutateurs ou les observateurs de contrôler le décompte, entièrement automatisés et intégrés au logiciel. Les alternatives évoquées dès cette époque étaient l'impression soit d'un reçu valant preuve après l'enregistrement du vote dans l'ordinateur, soit du bulletin lui-même qui est ensuite déposé dans une urne et éventuellement scanné par un deuxième dispositif électronique pour le décompte. À défaut, il était impossible de procéder à un recompte manuel. Les observateurs électoraux de l'OSCE lors des élections législatives de 2006 parvenaient aux mêmes conclusions.

Saisie d'un recours, la chambre administrative du tribunal d'Amsterdam déclara illégaux et annula les arrêtés ministériels d'homologation des machines à voter Nedap utilisées lors des élections législatives de 2006 et provinciales de 2007. 72 ( * ) En particulier, l'homologation n'avait été décernée que sur la base de prototypes sans vérification que les machines installées dans les bureaux de vote correspondaient bien au prototype.

Tout en écartant la responsabilité personnelle du ministre de l'intérieur en poste dans les dysfonctionnements constatés, le rapport de la commission Hermans-van Twist concluait au printemps 2007 que le vote électronique, bien que devenu central dans la vie démocratique du pays, constituait un sujet laissé pour compte ( verweesd ). Il pointait l'inadéquation du cadre normatif qui ne prévoyait aucune prescription en matière de mise sous scellés, de stockage et de transport des machines à voter. Les trois textes -loi électorale, décret électoral et règlement d'agrément des machines - en restaient à un niveau d'abstraction inefficace. Il relevait que certains logiciels utilisés lors des élections n'avaient pas été soumis à des tests et à une homologation. Non seulement les codes sources des logiciels n'étaient pas publics, mais ils n'étaient pas non plus connus du ministère de l'intérieur, qui par ailleurs disposait de trop peu d'expérience et à peine des connaissances nécessaires pour juger de la pertinence des normes de contrôle et d'agrément des machines. Enfin, outre la refonte des textes normatifs, la commission demandait à son tour une évolution technologique pour assurer la possibilité de contrôler les opérations de vote, en permettant d'une part, de vérifier que le vote de l'électeur était bien enregistré, sauvegardé et compté correctement, d'autre part, de procéder à un recompte des voix. 73 ( * )

Une seconde commission, sous la direction de Korthals Altes, ancien ministre de la justice, fut mise sur pied dans la foulée, non plus pour juger les dysfonctionnements et l'adéquation des actions des différents responsables en charge lors des élections de 2006 et 2007, mais pour proposer des réformes susceptibles de restaurer la confiance des citoyens dans la sécurité, la sincérité et le secret du scrutin. Elle recommanda de ne plus recourir aux anciennes machines à voter et d'installer dans les bureaux de votes des imprimantes électroniques à bulletins ( stemprinter ) et des compteurs de bulletins ( stemmenteller ). 74 ( * ) Le gouvernement néerlandais accueillit favorablement cette proposition mais le groupe d'experts mis en place pour évaluer leur faisabilité pratique se montra sceptique.

Juridiquement, la situation ne pouvait rester en l'état, les recours menaçant de se multiplier. L'ensemble des dispositions autorisant et encadrant le vote par le moyen de machines électroniques au sein du décret électoral du 19 octobre 1989 ont été abrogées à compter du 6 février 2008. Lors des élections européennes de 2009, il n'a pu être voté que par le moyen de bulletins traditionnels. Par cohérence, dans l'incapacité à la fois de définir des normes adéquates et de trouver des solutions techniques praticables à grande échelle, toutes les dispositions introduites pour autoriser et encadrer le vote par des moyens autres que les bulletins au sein de la loi électorale du 28 septembre 1989 ont été abrogées à compter du 1 er janvier 2010. Le vote électronique est ainsi privé de toute base légale aux Pays-Bas. Sa réintroduction nécessitera donc l'adoption d'un projet ou d'une proposition de loi.

Le débat n'est toutefois pas définitivement clos. Une nouvelle commission Van Beek, chargée d'enquêter sur le vote électronique dans les bureaux de vote, a rendu un rapport en décembre 2013. Elle reprend et approfondit les travaux de la commission Korthals Altes. Sur la base d'une analyse de risques de différentes méthodes de votation, elle défend à nouveau l'installation d'imprimantes électroniques de bulletins, dotés chacun d'un code barre qui en permet le décompte électronique. Elle défend ce choix contre le bulletin traditionnel au nom de l'accessibilité du vote aux personnes présentant des limitations ( beperking ), de la capacité pour l'électeur de corriger son choix, de la fiabilité et de la rapidité du décompte électronique par rapport à la méthode manuelle. La commission insiste sur la nécessité de ne pas procéder à un stockage du vote sur la machine, mais uniquement à un enregistrement pour impression avant son effacement. Elle formule des prescriptions fonctionnelles, techniques et de sécurité pour la production des imprimantes et des compteurs électroniques en prenant en compte la problématique des émissions d'ondes et en pénalisant l'interception des signaux émis par les machines utilisées dans les opérations de vote. 75 ( * )

Devant l'attentisme des gouvernements de coalition qui se succèdent, des propositions de loi sont déposées pour réintroduire à titre expérimental le vote électronique en s'inspirant des rapports des commissions. Ce fut encore le cas en avril 2016 76 ( * ) . Elles ont été repoussées par la chambre basse. Bien qu'elles soient soutenues par le parti libéral VVD du Premier Ministre Rutte, le parti protestant ChristenUnie et les Verts, elles rencontrent la méfiance voire l'hostilité des sociaux-démocrates du PvdA, des chrétiens démocrates du CDA et des libéraux de gauche de D66.

Le débat se déplace progressivement des questions de principe aux questions de viabilité technique et de coût. En mai 2016, un groupe d'experts ( deskundigengroep ) a rendu au ministre de l'intérieur néerlandais un avis prudent sur la faisabilité de la réforme suggérée par la commission Van Beek en mettant en avant la complexité des opérations, les exigences de sécurité et le coût global. Il s'est prononcé en faveur de l'introduction de compteurs électroniques de bulletins mais était davantage réservé à l'égard des imprimantes électroniques de bulletins. 77 ( * )

Le ministère de l'intérieur a souhaité prolonger cette étude en s'adressant aux opérateurs de marché par l'intermédiaire de la société de conseil Atos afin de préciser si et comment les spécifications techniques proposées par le groupe d'experts étaient réalisables, à quel coût et dans quel délai. Les résultats en furent communiqués au Parlement fin août 2017. 78 ( * ) Il en ressort que la faisabilité technique en respectant toutes les normes de sécurité souhaitées demeurait incertaine. L'accès transparent à tous les codes sources pourtant indispensable ne paraissait pas garanti. Les coûts directs de production des machines (imprimantes et compteurs électroniques) par les fournisseurs seraient compris entre 260 et 365 millions d'euros sans compter les coûts annexes (appel d'offres, pilotage du marché, phase de tests, construction d'expertise interne, contrôles, évaluations, maintenance et développements ultérieurs). Enfin, Atos estimait sur la base des réponses des entreprises qu'il faudrait compter au moins deux ans pour le développement des nouvelles machines.

Au regard des incertitudes et des coûts, il est peu probable que les Pays-Bas retournent au vote électronique à court terme.

Le cas du droit électoral allemand fait souvent l'objet de mauvaises interprétations. Il est souvent indiqué que le vote électronique serait privé de base légale en Allemagne depuis 2009 du fait d'une décision de la Cour constitutionnelle. C'est une erreur, puisque les dispositions légales autorisant le vote électronique demeurent en vigueur. La Cour de Karlsruhe n'a pas prononcé l'inconstitutionnalité de principe du vote électronique, quelles qu'en soient les modalités. Sans invalider le résultat des élections législatives au cours desquels 25 % environ des votants s'étaient exprimés par la voie électronique, elle a dégagé un principe de transparence du vote directement lié à la confiance légitime et nécessaire que le citoyen devait avoir en la régularité du processus électoral par lequel s'exprime la souveraineté du peuple. La première génération des machines électroniques, utilisées en Allemagne à l'époque 79 ( * ) , quoique respectant les dispositions réglementaires et disposant d'un agrément, n'était pas conforme à ce principe.

La loi électorale fédérale du 23 juillet 1993 indique que pour faciliter la transmission et le comptage des voix, des machines à voter peuvent être utilisées à la place des bulletins de vote et des urnes. 80 ( * ) Les machines à voter doivent garantir le secret du vote. Leur conception doit officiellement être approuvée au Bundestag pour leur utilisation lors des élections uniques ou générales. Le ministère de l'intérieur fédéral décide de l'admission sur demande du fabricant de la machine à voter, et donne son approbation à l'utilisation d'une machine officiellement approuvée.

Le ministère de l'intérieur fédéral est autorisé à publier des dispositions plus détaillées par règlement (Bundeswahlgeräteverordnung) concernant notamment les conditions encadrant l'approbation officielle de la conception des machines à voter, le retrait et la révocation de la licence, la procédure d'approbation et d'essai d'une machine à voter.

Lorsqu'en 2009, la Cour constitutionnelle allemande s'est prononcée sur la licéité du vote électronique à l'occasion de deux recours portant sur le décompte des votes (Wahlprüfungsbeschwerde) des élections législatives de 2005, 81 ( * ) elle a estimé que si les dispositions de la loi fédérale sur les élections relatives au vote électronique étaient conformes à la Loi fondamentale, il n'en était pas de même du règlement fédéral sur les machines à voter.

En effet, il découle du principe de souveraineté populaire de l'article 20 §1 de la Loi fondamentale allemande et de la garantie d'un suffrage universel, direct, libre égal et secret offerte par l'article 38, un principe de transparence ( Öffentlichkeit ) du vote selon lequel toutes les étapes essentielles du vote doivent être publiquement vérifiables. Le contrôle des opérations électorales et l'agrégation des résultats font l'objet d'une attention particulière. La motivation est intéressante puisqu'elle ne s'appuie pas sur le secret du vote, qui était au centre des débats dans les autres pays, notamment aux Pays-Bas, mais bien au contraire sur la nécessaire publicité de la procédure électorale. 82 ( * ) Le fait que certaines machines à voter fonctionnent comme des boîtes noires sans possibilité de vérification individuelle et personnelle de chaque acte de vote pose problème.

Les machines à voter ne remplissent l'obligation de transparence posée par la Constitution allemande que si, et seulement si, elles permettent le contrôle des opérations électorales et l'agrégation des résultats de manière fiable et sans nécessiter de compétences techniques particulières. Le citoyen votant par voie électronique doit être en mesure de déterminer si son choix est, sans erreur ou modification, pris en compte dans le décompte des voix à l'instant où il vote ou sera pris en compte lors du décompte postérieur, et cela sans qu'il doive faire appel à des connaissances techniques particulières. La simple délivrance d'un reçu écrit ou d'un message électronique s'affichant sur l'écran pour attester qu'un vote a été pris en compte par la machine ne suffit pas à satisfaire cette condition.

La Cour estime que le règlement fédéral sur les machines à voter, en ce qu'il ne comporte pas de dispositions permettant au citoyen de vérifier facilement que le vote pris en compte est bien conforme à celui émis ou de contrôler a posteriori les résultats de façon fiable, méconnait le principe de transparence des opérations électorales. Ainsi, l'utilisation en l'espèce des machines à voter viole également ce même principe.

De façon instructive, la Cour considère comme secondaire la question mise en avant devant les tribunaux néerlandais des procédures d'agrément et du contrôle de la conformité au prototype des dispositifs de vote utilisés concrètement. La vérification par des autorités publiques des modèles agréés n'est pas suffisante pour satisfaire le principe de transparence du vote. La vérification par des autorités publiques des machines à voter effectivement utilisées lors de l'élection n'est pas non plus suffisante, pas plus que des mesures de sécurité organisationnelles ou techniques.

Ni les erreurs de décompte du vote manuel, ni une meilleure prise en compte des votes blancs, ni le principe du secret du vote, ni l'accélération du décompte et de la formation du Parlement ne justifient pour la Cour de faire une exception au principe de transparence au bénéfice des modalités de vote électronique en vigueur jusque-là. Il convient de noter que la Cor n'envisage pas comme justification d'intérêt général l'augmentation de la participation électorale, notamment auprès de certains publics (jeunes, handicapés, illettrés), qui est mise en avant par les avocats du vote électronique et qui n'était pas étrangère à la validation de la procédure du vote par correspondance par la même Cour constitutionnelle. 83 ( * ) Encore faudrait-il pouvoir disposer d'éléments quantitatifs pour apprécier la réalité de cet argument.

La jurisprudence de la Cour constitutionnelle dessine en creux, sans les spécifier, certains critères que devraient remplir de nouveaux matériels de vote électronique pour pouvoir être employés en Allemagne. La confusion dans l'esprit de certains commentateurs, passant trop vite sur les subtilités de la décision de 2009, vient de ce que, dans les faits, le gouvernement allemand n'a jamais souhaité élaborer un nouveau dispositif réglementaire et a abandonné concrètement le vote électronique. Il s'agit d'une décision politique qui n'enlève rien à la licéité de principe du vote électronique.

IV. LA TRANSITION VERS LA DEUXIÈME GÉNÉRATION DE MACHINES À VOTER AVEC IMPRESSION D'UNE PREUVE PAPIER EN BELGIQUE (FLANDRE) ET AU BRÉSIL.

La structure fédérale de la Belgique et les divergences politiques entre la Flandre et la Wallonie se reflètent dans l'organisation des opérations de vote. On distinguera les règles applicables aux élections européennes, législatives et des parlements de communauté et de région, fixées nationalement, et aux élections provinciales et communales, de la compétence des régions.

Lors des élections européennes, législatives et des parlements de communauté et de région, deux types de vote électronique peuvent être employés : le vote automatisé et le vote par impression des suffrages émis sur support papier.

Le vote automatisé a été introduit le premier par la loi fédérale du 11 avril 1994. Un système de vote automatisé comprend par bureau de vote une urne électronique et des « machines à voter équipées d'un écran de visualisation, d'un lecteur enregistreur de cartes magnétiques et d'un crayon optique » (art.2 §1 er ). Chaque bureau principal dispose d'un système électronique de totalisation des votes émis dans les bureaux de vote qui en dépendent. Les systèmes de vote et de décompte doivent être conformes aux conditions générales d'agrément déterminées par décret royal, qui garantissent la fiabilité et la sécurité des systèmes ainsi que la sécurité du vote. Le ministre de l'intérieur constate la conformité sur avis d'un organisme d'expertise agréé (art. 2 §2).

Ces systèmes électroniques sont la propriété des communes et si le matériel a été acquis par la commune, l'État assume 20 % des coûts d'investissement. Les frais d'entretien et de stockage sont à la charge de la commune, qui est tenu de faire réparer ou remplacer le matériel hors d'usage. Les logiciels électoraux, les codes de sécurité, les cartes magnétiques et les supports de mémoire sont fournis par l'État à chaque élection (art. 3).

Le jour du scrutin, dans le bureau de vote, chaque isoloir est doté d'une machine à voter. L'électeur reçoit du président du bureau une carte magnétique, qu'il introduit dans le lecteur de la machine pour exprimer son vote. L'écran de visualisation affiche alors toutes les listes et le crayon optique permet à l'électeur de choisir. Il peut également voter blanc. Il confirme ensuite son choix ou l'annule et fait un autre choix. Une fois le vote pour les candidats de son choix définitivement confirmé, l'électeur récupère sa carte magnétique. Il peut, s'il le souhaite, vérifier son vote en réintroduisant sa carte, sans pour autant pouvoir le modifier. Enfin, l'électeur reprend sa carte et l'introduit dans l'urne électronique sous la surveillance du président du bureau de vote. À l'issue du scrutin, le président rend l'urne inopérante et transmet au bureau principal les supports de mémoire (original et copie) sur lesquels sont enregistrés les votes afin de procéder au décompte des suffrages. 84 ( * ) Il convient de noter que la machine à voter ne stocke pas les votes émis.

Le vote électronique avec preuve sur papier a d'abord été expérimenté en 2003, après l'adoption de dispositions législatives spéciales uniquement pour les élections de cette année. Sa généralisation a été recommandée par un consortium d'experts des universités belges en 2007. Enfin, la loi fédérale du 7 février 2014 a autorisé et organisé le vote électronique avec preuve papier. Aux termes de son art. 4, « un système de vote électronique avec preuve papier comprend, par bureau de vote :

1° une urne électronique avec un scanner ;

2° plusieurs ordinateurs de vote équipés chacun d'un écran de visualisation tactile, d'une imprimante de bulletins de vote et d'un lecteur de cartes à puces ;

3° un ordinateur pour le président avec une unité pour initialiser les cartes à puces et une imprimante ;

4° un lecteur de code-barres pour la visualisation du contenu du code-barres par l'électeur ;

5° des cartes à puces. »

Les dispositions sur l'agrément des systèmes, sur les droits de propriété et les obligations de maintenance et de réparation des communes, ainsi que sur le soutien financier de l'État et la fourniture des logiciels et autres matériels par l'État sont identiques à celles qui régissent les anciens systèmes automatisés.

Les opérations de vote ressemblent à celles du vote automatisé. Le jour du scrutin, l'électeur reçoit du président du bureau de vote une carte à puce préalablement initialisée et permettant de voter une seule fois pour l'élection à laquelle l'électeur est convoqué. L'électeur introduit la carte à puce dans ordinateur de vote placé dans l'isoloir. L'écran de visualisation tactile affiche alors toutes les listes. L'électeur indique la liste de son choix par « effleurement tactile », puis choisit les candidats et exprime son vote de la même manière. Tant que le vote n'est pas confirmé, l'électeur peut recommencer l'opération de vote. La confirmation clôt le vote de l'électeur. Lorsque le vote est clos, un bulletin de vote est imprimé et mis à la disposition de celui-ci. Le bulletin de vote imprimé est divisé en deux parties : l'une présentant un code-barres, l'autre indiquant le vote sous forme dactylographiée à des fins de contrôle et d'audit. Le bulletin de vote doit ensuite être plié face imprimée à l'intérieur pour préserver le secret du vote. Si l'électeur déplie son bulletin au sortir de l'isoloir, son vote est annulé. L'électeur retire ensuite la carte à puce, sachant que ni l'ordinateur de vote, ni la carte ne sauvegardent la moindre donnée sur le vote émis. En scannant le code-barre dans l'isoloir, l'électeur peut visualiser son vote sans pouvoir le modifier. Ensuite, l'électeur remet sa carte à puce au président du bureau ou à l'assesseur, scanne le code-barre de son bulletin à l'aide du lecteur placé sur l'urne, puis insère sa preuve papier dans l'urne. À l'issue du scrutin, le bureau est clôturé par le président. L'urne est ouverte et les bulletins papiers placés dans une enveloppe scellée. Les supports de mémoire électroniques, ainsi que l'enveloppe scellée, sont transmis au bureau principal pour totalisation des suffrages. 85 ( * )

Le 25 mai 2014 se sont déroulées simultanément les élections européennes, législatives et des parlements de région et de communauté. Les deux systèmes de vote électronique ainsi que le vote papier traditionnel ont cohabité, mais la divergence entre les régions était très nette. En Flandre, 151 communes sur 308 étaient équipées de système électronique avec preuve papier, dont Anvers, Bruges, Courtrai, Ostende, Hasselt et Louvain. Les autres communes flamandes ont recouru aux bulletins et enveloppes traditionnels mais pas aux anciennes machines de vote automatisé. En Wallonie, 39 communes sur 262 étaient équipées de systèmes automatisés, dont Liège et Eupen. Les autres communes wallonnes ont recouru aux bulletins et enveloppes traditionnels mais pas aux nouveaux ordinateurs de vote avec impression d'une preuve papier. Dans la Région Bruxelles-Capitale, deux communes (Saint-Gilles et Woluwe-Saint-Pierre) ont essayé les nouveaux ordinateurs de vote, les autres sont restées aux anciens systèmes automatisés.

Les difficultés rencontrées lors des élections simultanées de 2014 ont mis en évidence les défauts du système de vote automatisé (modèle Jites/Digivote). Toutes les communes qui l'ont utilisé ont été affectées avec des lectures de carte très lente, des urnes électroniques illisibles, une validation en bloc sans possibilité de calculer pour chaque candidat le nombre de voix de préférence. 86 ( * ) À l'inverse, le nouveau système avec impression d'une preuve papier (modèle Smartmatic) s'est avéré robuste. Le collège des experts chargé du contrôle des opérations de vote électronique a recommandé l'abandon du système Jites, en raison de sa vétusté, tant au niveau du matériel que de la qualité du code source du logiciel, et son remplacement par un système uniforme pour toutes les élections en Belgique, quel que soit le pouvoir organisateur. 87 ( * )

La divergence entre les régions demeure cependant manifeste, notamment dans l'organisation des élections provinciales et communales, qui relèvent de leur compétence. La région flamande a abrogé en 2012 pour les élections locales les dispositions applicables de la loi du 11 avril 1994 organisant le vote automatisé. Le décret flamand du 25 mai 2012 ( Digitaal Kiesdecreet ) a imposé en cas de vote numérique le recours au système avec impression d'une preuve papier (art. 4 et 10). Les dispositions retenues pour sont identiques à celles de la loi fédérale de 2014, à ceci près que le gouvernement flamand se substitue au gouvernement fédéral belge. Un décret du gouvernement flamand du 30 juin 2017 a modifié à la marge le régime de 2012 pour prévoir la possibilité de recourir à des modules audio permettant à l'électeur d'écouter la présentation des listes dans l'isoloir (art. 74 et s.).

En Wallonie, le gouvernement a fait le choix radicalement inverse en revenant au scrutin traditionnel avec bulletins et enveloppes. L'article 45 du décret wallon du 9 mars 2017 a abrogé les articles du Code de la démocratie locale et de la décentralisation qui reprenaient les dispositions de la loi de 1994 et prévoyaient un système de vote automatisé pour les élections locales. Toutefois, la communauté germanophone a refusé cette évolution, si bien que le vote numérique avec système automatisé reste applicable pour les élections locales dans les cantons d'Eupen et Saint-Vith. De même, le vote électronique demeure en place dans la région Bruxelles-Capitale.

Le parti socialiste (PS), les chrétiens-démocrates (cdH) et les écologistes (Ecolo) réclamaient la suppression du vote électronique en raison de son coût estimé près de trois fois supérieur par électeur au vote papier (4,3 euros contre 1,5) et de difficultés pour respecter le secret du vote. Les libéraux du MR contestent ces arguments et regrettent que la Wallonie s'isole du reste du pays.

Alors que le vote électronique fait l'objet d'une méfiance grandissante en Europe, il s'agit d'une procédure désormais courante et d'un choix irréversible dans les grandes démocraties émergentes comme le Brésil, l'Inde ou les Philippines. À une toute autre échelle que la Belgique, le Brésil recourt au vote électronique depuis les élections municipales de 1996 où il fut expérimenté par 200 000 électeurs environ dans 57 villes du pays. Le vote électronique a été dans la foulée généralisé par la loi électorale de 1997 88 ( * ) pour être utilisé sur l'intégralité du territoire dès 2000.

Le premier modèle de collecteur de vote électronique ( coletor eletrônico de voto, urna eletrônica) utilisé au Brésil correspond aux machines à voter néerlandaises et aux systèmes de vote automatisé belge : il s'agit de dispositifs d'enregistrement électronique direct du vote ( Direct Recording Elecronic - DRE voting machine ) présentant les défauts déjà décrits. Sont utilisées aujourd'hui 600 000 de ces urnes électroniques pour un coût de 600 dollars pièce, d'après le Tribunal supérieur électoral.

Lors des prochaines élections générales de 2018 seront utilisées des machines de deuxième génération plus fiables et plus sûres avec impression de preuve papier ( Voter Verifiable Paper Audit Trail - VVPAT ). On constate donc au Brésil le même mouvement technologique qu'en Belgique et aux Pays-Bas, mais sans la tentation de revenir aux modes de vote traditionnels après le constat des lacunes des machines de première génération.

Toutefois, la modification de la législation nécessaire indispensable pour autoriser le nouveau dispositif technique a donné lieu à un conflit entre le Congrès brésilien et la présidente Rousseff en 2015. Le véto présidentiel initial, motivé par le coût et l'étroitesse des délais à tenir pour assurer le remplacement des systèmes de vote, a été finalement surmonté par le Congrès à la majorité qualifiée requise. 89 ( * ) La loi électorale de 1997 est ainsi dotée d'un nouvel article 90 ( * ) prévoyant qu'au cours du processus de vote électronique, soit imprimé un reçu ( registro ) de chaque vote qui sera déposé dans une urne physique préalablement scellée. Le vote ne sera pas achevé tant que l'électeur n'aura pu confirmer la correspondance entre la teneur de son vote et le reçu imprimé par la machine électronique.

D'après les estimations du Tribunal supérieur électoral du Brésil, le déploiement du nouveau système de vote électronique coûtera 1,8 milliards de réaux, soit environ 450 millions d'euros, de coûts directs de fourniture des machines. Pour les élections d'octobre 2018, seulement 30 000 nouveaux systèmes avec impression de preuve papier seront disponibles. Il faudra encore quelques années pour remplacer le stock des 600 000 machines anciennes.

Des tests de sécurité furent réalisés sur les nouveaux dispositifs de vote électronique en novembre 2017 sous l'égide du Tribunal supérieur électoral. Trois failles furent détectées par le groupe de hackers mobilisé qui disposait du code source du logiciel. Aucune de ces failles ne représente un danger en termes d'altération des résultats du vote d'après le président du Tribunal. 91 ( * )

V. L'ESSOR DU VOTE EN LIGNE DANS LES CANTONS SUISSES ET EN ESTONIE

Comme l'indiquaient les derniers rapports officiels anglais et finlandais sur le vote électronique, les enjeux ne portent déjà plus tant sur le perfectionnement de nouvelles machines de vote que sur le recours sécurisé au vote par internet. Si des solutions techniques fiables étaient trouvées, le recours au vote en ligne permettrait de lever l'obstacle dirimant du coût des équipements tout en favorisant la participation de couches de la population moins enclines à voter, en particulier les jeunes. C'est pourquoi les expériences pionnières de certains cantons suisses et de l'Estonie méritent d'être observées de près.

L' Estonie se veut en pointe du vote électronique en faisant le choix du vote en ligne à l'exclusion du recours à toute machine à voter ou ordinateur de vote installé physiquement dans les bureaux de vote. C'est un choix politique fort conformément au souhait du pays de se présenter comme un pôle d'excellence en hautes technologies et une démocratie moderne. Les bulletins et enveloppes en papier traditionnels peuvent encore être utilisés et forment la seule alternative demeurant au citoyen estonien qui refuserait le vote par Internet. Grâce à une application spéciale, le vote par téléphone mobile constitue une variante possible du vote en ligne.

Le vote par internet est autorisé et encadré par la loi estonienne depuis 2005. Les dispositions applicables aux élections législatives 92 ( * ) et aux élections locales 93 ( * ) sont symétriques. Le vote électronique a sur cette base été utilisé dans quatre élections municipales, (2005, 2009, 2013 et 2017), trois élections législatives (2007, 2011 et 2015) et deux élections européennes (2009 et 2014). Les statistiques publiées font état d'une croissance nette de la part des votes par Internet parmi les suffrages exprimés. 94 ( * ) Pour les élections locales, ils représentaient 31,7 % des votants en 2017 contre 21,2 % en 2013, 15,8 % en 2009 et 1,9 % en 2005. Pour les élections législatives, ils représentaient 30,5 % des votants en 2015 contre 24,3 % en 2011 et 5,5 % en 2007. 95 ( * ) Parmi les votants par internet, on peut noter également une multiplication de ceux qui utilisent l'application de téléphone mobile : ils approchent désormais le quart des votants électroniques, ce qui toutefois étant donné la taille du pays ne représente qu'environ 45 000 votants.

La procédure retenue pour le vote par internet est très particulière. Il est possible de voter pendant 7 jours en anticipation de la date fixée pour le scrutin, entre le 10 ème et le 4 ème jour précédant le scrutin précisément. Pendant cette période, l'électeur peut toujours modifier son vote électronique. Il peut également se déplacer dans un bureau de vote ouvert dans cette phase de scrutin anticipé ( advanced polls ) et déposer un bulletin physique dans l'urne électorale. Dans ce cas, seul le suffrage exprimé par papier est compté et les éventuels votes électroniques précédents sont annulés. Le jour du scrutin lui-même, il n'est plus possible de modifier le vote électronique exprimé au cours de la phase anticipée.

Techniquement, l'application de vote par Internet utilisée par l'électeur lui permet d'exprimer son suffrage et de le crypter. Après avoir fait son choix, l'électeur le confirme et le scelle électroniquement à l'aide d'une signature numérique qui lui est propre. Cette signature digitale peut être donnée soit avec la carte d'identité qui peut être lue par un lecteur numérique et un logiciel téléchargeable auprès des sites officiels estoniens, soit avec un certificat d'identité numérique ( Digi-ID ), délivré par les autorités, utilisable uniquement sur Internet et permettant à une personne de s'identifier dans un environnement électronique et de donner une signature numérique. Le troisième mode de signature numérique pour confirmer et sceller le vote requiert uniquement l'utilisation d'un smartphone ( Mobile-ID ) d'un PIN-code spécifique et de codes de sécurité envoyés par SMS. La Mobile-ID doit toutefois avoir été préalablement activée avec la carte d'identité qui contient les données personnelles numérisées. 96 ( * )

Enfin, depuis 2015, dans le souci d'améliorer la sécurité et la transparence du vote, tout en détectant en amont d'éventuelles failles, une application de vérification permet à l'électeur de vérifier après coup que son suffrage a bien été pris en compte et que l'intégrité de la procédure n'a pas été compromise par un virus ou un bug. Pour cela, il utilise un autre appareil (smartphone ou tablette) différente de l'ordinateur sur lequel il a voté. Seulement 4 % des votes sont vérifiés par les électeurs.

La Suisse s'est engagée, suivant les recommandations d'un rapport du Conseil fédéral de 2002 sur la faisabilité, les chances et les risques du vote électronique, dans un projet de vote électronique, dans un premier temps à l'échelle de 3 cantons (Zürich, Neuchâtel et Genève). Aux termes de l'article 8a 97 ( * ) de la loi fédérale sur les droits politiques du 17 décembre 1976 modifiée le 21 juin 2002, « 1 le Conseil fédéral peut, en accord avec les cantons et les communes intéressés, autoriser l'expérimentation du vote électronique en la limitant à une partie du territoire, à certaines dates et à certains objets. 2 Le contrôle de la qualité d'électeur, le secret du vote et le dépouillement de la totalité des suffrages doivent être garantis. Tout risque d'abus doit être écarté (...) » .

Dans un deuxième rapport de 2006, les essais pilotes menés en 2004 et 2005 ont été jugés positivement. Le Conseil fédéral et le Parlement ont souhaité étendre progressivement et de façon contrôlée le canal du vote électronique.

D'après le site de la Chancellerie fédérale, « en 2013, le Conseil fédéral a formulé dans son troisième rapport relatif au vote électronique la stratégie pour son extension et a défini de nouvelles exigences de sécurité. L'ordonnance sur les droits politiques a été révisée, en même temps, l'ordonnance de la Chancellerie fédérale du 13 décembre 2013 sur le vote électronique (OVotE) adoptée. Les principales exigences concernent la mise en oeuvre de la vérifiabilité et la certification des systèmes. Avec l'introduction de la vérifiabilité individuelle en 2014, une étape intermédiaire vers la vérifiabilité complète a pu être atteinte. Cependant, la mise en oeuvre de la vérifiabilité complète ainsi que la certification des systèmes restent à régler. Les fournisseurs de systèmes prévoient de réaliser ces objectifs d'ici à 2018 » 98 ( * ) .

Deux systèmes sont actuellement en place dans les huit cantons disposant d'une autorisation générale du Conseil fédéral pour mener des essais de vote électronique lors de votations fédérales :

- celui du canton de Genève, utilisé à Berne, Lucerne, Bâle-Ville (jusqu'en 2017), Argovie, Saint-Gall et Genève ;

- et celui de la Poste suisse utilisé à Fribourg et Neuchâtel, ainsi que dans le canton de Bâle-Ville au terme d'un appel d'offres public début 2017. Le canton de Thurgovie reprendra ses essais de vote électronique en 2018 en utilisant le système de la Poste.

Le site internet de la chancellerie fédérale présente le procédé du vote électronique ainsi que les deux systèmes en vigueur en Suisse : « pour voter ou élire par voie électronique, il faut disposer de plusieurs codes, comme il est d'usage pour de nombreuses prestations proposées sur Internet. Les codes figurent sur la carte de légitimation que vous recevez si vous avez le droit de voter ou d'élire par voie électronique. Le premier code permet de se connecter au système d'élection ou de vote à partir d`Internet. Vous pouvez alors voter » . Le bulletin peut être contrôlé après avoir voté et plusieurs codes permettent à l'électeur de vérifier que son vote a été correctement transmis au système.

S'agissant du système dit du canton de Genève, toute personne souhaitant voter par voie électronique doit se munir de sa carte de vote (avec indication vote électronique, possédant un numéro de carte de vote), de sa date de naissance et d'un équipement disposant d'un accès internet stable. La personne se rend sur le site du vote ( https://www.evote-ch.ch/ge ) et insère son numéro de carte de vote dans le champ à cet effet de la page d'accueil. Une nouvelle page demandera à l'électeur de confirmer qu'il a pris connaissance des sanctions pénales pour fraude.

L'électeur peut ensuite faire son choix de vote en cochant les cases correspondant à ses souhaits pour chaque question posée. Il vérifie que son bulletin est conforme à ses choix puis indique sa date de naissance.

Le contrôle se fait à l'étape suivante : l'électeur compare les codes de vérification fournis par le système à ceux reçus avec sa carte de vote, ils doivent correspondre. Lorsque c'est bien le cas, le votant introduit son code de confirmation, qui donne l'ordre au système d'introduire le vote dans l'urne électronique. Le système envoie alors un code de finalisation qui doit lui aussi correspondre à celui indiqué sur la carte de vote et qui finalise le processus de vote.

S'agissant du système dit de la Poste, on retiendra ici l'exemple du canton de Neuchâtel. Pour pouvoir participer en ligne aux scrutins, il convient d'abord de signer un contrat d'utilisation. Les électeurs conservent la possibilité de voter par les moyens traditionnels que sont le vote par correspondance ou au bureau électoral.

Le Service informatique de l'Entité neuchâteloise (SIEN) et la chancellerie d'État collaborent avec la société SCYTL, partenaire de La Poste, pour introduire le principe de la vérifiabilité individuelle lors d'une votation fédérale tenue le 8 mars 2015. Ce système est en cours d'évolution vers un autre plus performant première qui devrait intégrer, en plus de la vérifiabilité individuelle, la vérifiabilité universelle et des certifications de haut niveau.

Toutefois, « si l'introduction de la vérifiabilité individuelle améliore sensiblement la sécurité du vote électronique, cette évolution ne permet pas pour l'instant d'augmenter au-delà de 30% la limite des électrices et électeurs pouvant participer au vote électronique » .

Du point de vue de la procédure, elle reste similaire à celle de la méthode dite du canton de Genève, le votant doit se munir de sa carte de vote et se rendre sur la page du scrutin, accepter les conditions d'utilisation et choisir le scrutin auquel il souhaite participer. Il peut ensuite voter par oui ou non, sans réponse son vote est considéré comme non, vérifier son vote, puis le valider en saisissant le code de validation présent sur sa carte. Il n'est plus possible de revenir son vote une fois qu'il est validé, mais les votes ne sont pour autant pas encore « déposés » dans l'urne. Pour cela, il faut au préalable comparer les codes de vérification figurant sur la carte de vote à ceux inscrits sur la page du scrutin. S'ils correspondent, l'électeur entre son code de confirmation et reçoit ensuite son code de finalisation, lequel doit également correspondre à celui inscrit sur sa carte de vote 99 ( * ) .

Ainsi, le principe de vérifiabilité individuelle, corollaire soit de la transparence de la procédure électorale mise en avant par la Cour constitutionnelle allemande, soit de la sécurité et de la fiabilité du scrutin dans les rapports officiels belges et néerlandais a également trouvé son chemin dans les doctrines suisse et estonienne sur le vote en ligne.

LES ORGANES PARLEMENTAIRES DE CONTRÔLE
DES SERVICES DE RENSEIGNEMENT

La division de la Législation comparée a mené une recherche sur le contrôle parlementaire des services de renseignement dans cinq pays, l'Allemagne, les États-Unis, l'Italie, les Pays-Bas et le Royaume-Uni.

Les Pays-Bas connaissent depuis très longtemps un contrôle parlementaire des services de renseignement. Dès 1952, une commission pour les services de renseignement et de sécurité (CIVD) fut constituée au sein de la chambre basse ( Tweede Kamer ). 100 ( * )

L'article 22 du Règlement de la chambre qui en constitue la base juridique est très laconique : il ne lui assigne pas de mission et se contente d'en établir la composition. La commission elle-même précise qu'elle est « chargée du contrôle parlementaire des aspects secrets des politiques publiques entourant les services de renseignement et de sécurité civils et militaires » 101 ( * ) .

Jusqu'à la présente législature, les présidents de tous les groupes politiques en étaient membres. Il a été décidé de restreindre le nombre des membres à la suite d'un scandale de fuites de documents confidentiels de la part de membres de la commission à un journaliste du NRC Handelsblad en 2014-2015. Après l'adoption en décembre 2016 d'un amendement au Règlement présenté par le président du groupe VVD, le plus important de la chambre auquel appartient le Premier ministre Rutte, la composition de la commission est limitée à 5 membres de droit, les présidents des 5 groupes politiques les plus importants. La Chambre peut toutefois décider sur proposition de la commission d'autoriser la participation à une réunion déterminée d'au plus deux autres présidents de groupe. La coutume est de laisser présider le président du groupe politique le plus important. La participation aux réunions n'est pas obligatoire.

En s'appuyant sur l'article 68 de la Constitution néerlandaise, qui oblige le Gouvernement à informer le Parlement dès lors que la communication des documents et des informations demandées ne peut être jugée contraire à l'intérêt national, et sur les deux lois sur les services de renseignement et de sécurité de 2002 et de 2017 102 ( * ) , la commission obtient la transmission confidentielle de documents classés secret d'État.

Elle se réunit en moyenne au moins une fois par mois lorsque le Parlement siège. Sont conviés fréquemment les ministres de l'Intérieur, de la Défense ou de la Justice, accompagnés des secrétaires généraux, les directeurs des deux services de renseignements généraux et militaires, accompagnés au plus d'un collaborateur, et le Coordinateur national à la lutte contre le terrorisme et à la sécurité. Un compte rendu de chaque réunion est réalisé puis classé secret d'État. Chaque année, la commission prépare un très bref rapport public résumant l'objet de chaque réunion.

Il existe un autre organe extraparlementaire de surveillance des services de renseignement et de sécurité, la Commissie van Toezicht op de Inlichtingen- en Veiligheidsdiensten (CTIVD) , créée par la loi en 2002 et renforcée en 2017 pour lui donner la responsabilité de l'examen des plaintes contre les services. Le Parlement néerlandais est associé à la nomination des quatre membres de la CTIVD en proposant des candidatures parmi lesquels le ministre de l'intérieur choisit (art. 99 de la loi sur le renseignement de 2017). Les chambres peuvent demander des enquêtes à la CTIVD et la commission au renseignement de la chambre basse est destinataire des annexes confidentielles classées secret d'État du rapport annuel de la CTIVD (art. 112 & 113).

En Allemagne , existe au sein du Bundestag un comité de contrôle parlementaire des services de renseignement, le PKGr 103 ( * ) . Préfiguré par une autre instance plus restreinte dès 1956, puis institué par la loi en 1978, le PKGr s'est vu élevé à la dignité constitutionnelle en 2009. L'article 45d de la Loi fondamentale garantit désormais le contrôle par le Bundestag, à travers un comité dédié, des activités des services de renseignement fédéraux. Il renvoie les mesures d'application à une loi fédérale, qui a été adoptée dans la foulée de la révision constitutionnelle. 104 ( * ) Les révélations en 2012 des activités du groupe terroriste d'extrême droite « Parti nazi sous-terrain » ( Nationalsozialistischer Untergrund - NSU ) ont révélé des défaillances des services allemands. En conséquence, a été exigée une complète réorganisation et un contrôle parlementaire accru sur les trois services fédéraux civils et militaires de renseignement. 105 ( * ) Les travaux ont débouché dans une loi du 5 janvier 2017 dont l'article 13 modifie la loi de 2009.

Il revient au Bundestag de décider souverainement du nombre des membres du PKGr, de sa composition et de ses méthodes de travail (§2 de la loi de 2009 modifiée). Au début de chaque législature, le Bundestag élit en son sens les membres du Comité, mais tant que l'élection des nouveaux membres n'a pas eu lieu 106 ( * ) , le Comité poursuit ses activités dans son ancienne composition. Dans la précédente législature, le PKGr comptait 9 membres répartis à la proportionnelle des groupes politiques. Il n'existe aucune disposition exigeant la représentation de tous les groupes politiques. Le président du Comité est élu par ses membres (§3).

Tous ses membres et toutes les personnes assistant ou préparant les réunions sont tenus au secret, y compris après l'expiration de leur mandat. Les délibérations du Comité sont secrètes. Toutefois, à la majorité des deux tiers, le Comité peut décider de rendre public leur appréciation sur des événements déterminés. Les opinions dissidentes individuelles sont autorisées (§10). En outre, une fois par an doit être conduite par le PKGr une audition publique des chefs des services de renseignement fédéraux.

Pour permettre au PkGr de remplir sa mission constitutionnelle, la loi oblige le Gouvernement fédéral à le tenir informé de l'activité générale des services de renseignement, ainsi que des affaires revêtant une importance particulière, notamment les changements essentiels dans la situation de sécurité intérieure et extérieure, les procédures internes aux services ayant un impact significatif sur l'accomplissement de leur mission et des faits individuels qui sont l'objet de débats politiques ou de rapports publics (§ 4 (1)). Sur requête du PKGr, le gouvernement fédéral le tient informé de toute autre affaire.

Le Comité peut exiger du gouvernement fédéral et des services de renseignement la transmission d'actes et de données. Il peut aussi obtenir le droit d'entrer dans certains locaux. Il peut demander à auditionner des membres ou employés du gouvernement fédéral, ainsi que des agents des services de renseignement. Le gouvernement fédéral doit satisfaire sans attendre les demandes de la délégation. Les tribunaux et les administrations sont tenus d'apporter leur concours au PKGr, notamment pour la mise à disposition d'actes et de documents. Les données personnelles contenues dans ces actes et documents ne peuvent être utilisées à d'autres fins que celles que la loi fixe au Comité (§ 5).

En cas de conflit entre le Comité parlementaire et le Gouvernement fédéral, il revient à la Cour constitutionnelle de trancher sur saisine soit du Gouvernement, soit de deux tiers des membres du Comité (§ 14).

Dans le cadre de ses activités de contrôle, le PKGr peut également décider à la majorité des deux tiers de charger des experts indépendants d'une enquête sur un fait individuel à la suite d'une audition du Gouvernement fédéral (§ 7). Plus généralement, la loi prévoit la nomination pour cinq ans par le Président du Bundestag sur proposition du Comité d'un mandataire permanent ( ständiger Bevollmächtiger ) chargé d'apporter son soutien technique et juridique au Comité. Le mandataire a également pour tâche de préparer les réunions du Comité ainsi que les rapports du Comité au Bundestag (§ 5a & 5b).

Le Comité de contrôle parlementaire doit remettre au Bundestag un rapport d'activités au moins deux fois au cours de la législature, au milieu et en fin de période. Il prend position à cette occasion sur la façon dont le Gouvernement fédéral remplit ses obligations d'information et de transparence (§ 13). 107 ( * )

L' Italie a procédé en 2007 à une réforme de ses services de renseignements, qui a également refondu les modalités du contrôle parlementaire par un organe bicaméral commun à la Chambre des députés et au Sénat italiens, installé dès 1977. Est institué par la loi sur le Système de renseignement pour la sécurité de la République et portant nouvelle régulation du secret 108 ( * ) , un Comité parlementaire pour la sécurité de la République (COPASIR) qui a pour mission de vérifier, de façon systématique et continue, que l'activité du Système de renseignement est conforme à la Constitution et aux lois et n'a pas d'autre but que les intérêts et la défense de la République italienne (art  30). Font partie du Système de renseignement après la réforme de 2007 les deux agences de renseignement extérieur (militaire) et intérieur (civil), ainsi que le département du Bureau du Président du Conseil chargé de la tutelle et de la coordination des agences.

Le comité est composé de cinq députés et cinq sénateurs nommés dans les vingt jours suivant le début de chaque législature par le Président de leur assemblée respective en assurant une représentation proportionnelle des groupes politiques. Le président du comité est élu par ses membres à bulletins secrets mais la loi impose qu'il soit inscrit dans un groupe d'opposition. Tous les membres du Comité, ainsi que le personnel qui lui est affecté, sont soumis à une obligation de secret sur toutes les informations dont ils ont eu connaissance (art. 36). L'obligation de secret demeure après la cessation des fonctions.

Pour l'exercice de ses fonctions de contrôle, le COPASIR dispose d'amples pouvoirs (art. 31). Il procède à des auditions régulières du Président du Conseil, des ministres compétents, des directeurs des agences de renseignement. Il peut procéder à l'audition de toute personne hors des services de renseignement en mesure de fournir des informations ou des évaluations pertinentes pour l'exercice de sa mission. Il peut, par délibération motivée et transmise au Président du Conseil, décider l'audition de tout agent des services de renseignement, seul le Président du Conseil pouvant s'opposer à la tenue de cette audition. Les personnes auditionnées sont tenues légalement de transmettre avec loyauté et en détail toutes les informations en leur possession.

En outre, le Comité peut obtenir tout document en rapport avec son objet conservé, produit ou obtenu par tout moyen par les services de renseignement et en général les administrations publiques. Il peut également obtenir, par dérogation au code de procédure pénale, copie des actes et documents relatifs à des procédures et des enquêtes judiciaires en cours. Il ne peut être opposé au Comité ni secret des affaires, ni secret bancaire, ni secret professionnel à l'exception du secret entre un avocat et son client.

Lorsque la communication d'une information ou la transmission d'un document peuvent porter préjudice à la sûreté de l'État, aux rapports avec les États étrangers, au déroulement d'opérations en cours ou à la sécurité d'une source ou d'un collaborateur des services de renseignement, le destinataire de la requête peut opposer le devoir de réserve au COPASIR. Si le Comité maintient sa demande, il revient au Président du Conseil de trancher dans les 30 jours. Deux bémols sont prévus pour restreindre l'opposition du devoir de réserve : il ne peut être opposé aux demandes qui ne portent pas sur un document ou une information classée secret d'État ; il ne peut être opposé lorsque le Comité a ordonné à la majorité des deux tiers 109 ( * ) une enquête sur la conformité des actions d'un agent aux dispositions légales et constitutionnelles.

Le Comité dispose également d'un pouvoir d'enquête sur place dans les locaux des services de renseignement, dès lors qu'il en a prévenu le Président du Conseil.

Lorsque le Comité estime sur la base des informations recueillies que des comportements irréguliers sont imputables aux agents ou aux ex-agents des services de renseignement, il peut délibérer pour demander au Président du Conseil de diligenter une enquête interne, dont les conclusions lui seront intégralement remises (art. 34).

Le pouvoir exécutif est soumis à des obligations d'information du Comité sans attendre ses requêtes (art. 33). Ainsi le Président du Conseil transmet-il tous les semestres un rapport sur l'activité des services de renseignement comprenant une analyse de la situation et des dangers, ainsi que sur les recrutements effectués. Tous les décrets et arrêtés ministériels pertinents sont transmis au Comité. Le Président du Conseil informe également le Comité parlementaire des opérations secrètes dans lesquelles seront mises en oeuvre certaines actions qualifiables comme délits mais autorisées spécialement conformément à la loi.

Outre sa fonction de contrôle, le Comité parlementaire pour la sécurité de la République est consulté sur les projets d'actes réglementaires concernant l'organisation et le statut du personnel des services de renseignement (art. 32).

Un rapport annuel public est préparé par le Comité pour présenter ses activités (art. 36). Il est nettement plus développé que le rapport néerlandais par exemple mais ne présente pas véritablement une analyse géopolitique et des menaces pour la sécurité comme les rapports anglais ou américains. 110 ( * )

Au Royaume-Uni , le contrôle parlementaire des services de renseignement est assuré depuis 1994 111 ( * ) par la Commission du renseignement et de la sécurité du Parlement, l'ISC. 112 ( * ) Son champ de compétence a été élargi et ses pouvoirs renforcés en 2013 par la loi pour la Justice et la Sécurité. 113 ( * )

La Commission du renseignement et de la sécurité constitue un organe bicaméral dont les neuf membres sont sélectionnés par le Premier ministre au sein de la Chambre des Communes et de la Chambre des Lords, après consultation du chef de l'opposition (§1 de la loi de 2013). Le président est élu par les membres de la Commission. Tous les membres et le personnel qui les assistent sont soumis au secret et ne peuvent divulguer aucune information ou document confidentiel dont ils ont eu connaissance dans l'exercice de leur fonction. Ils sont soumis aux mêmes dispositions de la loi sur le secret de 1989 114 ( * ) que les agents des services de renseignement eux-mêmes.

La loi assigne pour fonction à l'ISC d'examiner et de contrôler les dépenses, la gestion, la politique et les opérations de la communauté du renseignement britannique (§ 2). Cela couvre à la fois les services de la sécurité intérieure ( Security Service - MI5 ), les services de renseignement extérieur ( Secret Intelligence Service - MI6 ) et l'organe gouvernemental chargé de la surveillance des communications et du renseignement électronique ( Government Communications Headquarters - GCHQ ). La Commission supervise également les actions des organes de coordination et de pilotage du renseignement, placés auprès du Premier ministre. En outre, son action s'étend depuis 2013 aux services de renseignement militaire sous l'autorité du ministre de la Défense aux services chargés du contreterrorisme sous la tutelle du ministre de l'Intérieur.

Avant 2013, l'ISC ne pouvait pas assurer le contrôle les opérations des services de renseignement, qui restait une prérogative de l'exécutif. Le nouveau régime légal lui permet de le faire dans un cadre fixé en commun avec le Premier ministre. Pour que la Commission puisse se pencher sur des questions opérationnelles spécifiques, il faut que :

- le Premier ministre lui en ait fait la demande ;

- ou que cela n'interfère pas avec une opération de renseignement ou de sécurité en cours ;

- ou que l'examen de la question par l'ISC soit limité à l'examen des seuls documents qui lui sont transmis par les services ou par un département ministériel.

Il appartient à la Commission de définir son programme de travail. Elle auditionne les membres du Gouvernement, des directeurs des services de renseignement et des agents de la communauté du renseignement, ou tout autre témoin.

Pour obtenir quitus de ses fonctions, l'ISC prépare annuellement un rapport au Parlement sur ses activités, l'état des menaces, l'adéquation des services de renseignement à leurs missions, les relations avec les partenaires. 115 ( * ) Il peut également produire des rapports spécifiques sur un sujet donné. Avant publication, tous les rapports sont envoyés au Premier ministre soumis pour relecture aux différentes agences de renseignement et de sécurité qui peuvent demander de masquer ( redact ) certaines informations qui pourraient nuire à leur travail ou à leurs agents en révélant trop de détails sur leurs cibles, leurs méthodes ou leurs capacités opérationnelles (§ 4). Les rapports qui lui sont commandés par le Premier ministre ont vocation à demeurer strictement confidentiels.

Aux États-Unis , la légitimité du contrôle du Congrès sur les services de renseignement s'appuie sur une interprétation extensive de l'article I, section 8 de la Constitution qui donne pouvoir au Congrès pour prendre toute loi qui serait considérée comme nécessaire et appropriée pour mettre en oeuvre les autres pouvoirs confiés au Congrès ou au Gouvernement. La jurisprudence déduit de la Necessary and Proper Clause la possibilité de contrôler et d'interroger l'exécutif sur toute matière susceptible de donner lieu à une législation fédérale. C'est toutefois le scandale du Watergate qui conduisit le Congrès à constituer dans chaque chambre un organe propre dédié à la supervision des services de renseignement. Les résolutions 400 de 1976 du Sénat et 658 de 1977 de la Chambre des Représentants ont instauré respectivement la Commission restreinte pour le renseignement du Sénat ( Senate Select Committee on Intelligence - SSCI ) et la Commission retreinte permanente pour le renseignement de la Chambre ( House Permanent Select Committee on Intelligence - HPSCI ). On se concentrera sur l'organe sénatorial.

Dans la version en vigueur de la résolution -dernièrement amendée par la résolution 470 de 2014, la Commission restreinte a la charge de contrôler et de mener une étude continue des activités et des programmes de renseignement du Gouvernement des États-Unis. Elle informe le Sénat par des rapports et lui soumet toute proposition de législation pertinente. Elle veille à ce que les agences et départements compétents procure le renseignement adéquat à temps pour que les pouvoirs exécutif et législatif prennent les bonnes décisions pour préserver la sécurité et les intérêts vitaux de la Nation. Elle s'assure que les activités de renseignement sont conformes à la Constitution et aux lois américaines.

Son champ de compétences s'étend à l'organisation, au financement et aux activités de toutes les agences et services de renseignement qu'ils dépendent des ministères de la Défense, des Affaires étrangères, de la Justice ou des Finances ( Central Intelligence Agency, Defense Intelligence Agency, National Security Agency, Federal Bureau of Investigation notamment).

La Commission restreinte du Sénat ne peut comprendre plus de 15 membres. Huit membres sont nommés par binôme majorité-opposition parmi les membres de certaines commissions permanentes : deux membres de la Commission des « crédits et dépenses » ( Committee on Appropriations ) 116 ( * ) , deux membres de la Commission des forces armées, deux membres de la Commission des Affaires étrangères et deux membres de la Commission de la Justice. Au plus 7 autres membres peuvent être nommés parmi les sénateurs. Il est prescrit que la majorité sénatoriale dispose d'une majorité d'une voix au sein de la commission restreinte.

Les Chefs de la majorité et de l'opposition désignent les membres qui reviennent à leur groupe. Ils nomment respectivement le président et le vice-président de la commission restreinte. Ils sont membres de droit mais ne peuvent prendre part aux votes.

Pour mener à bien sa mission, la Commission restreinte dispose d'un droit à l'information très étendu qui la rend destinataire de tout projet d'acte ou de décision en rapport avec le renseignement, en particulier la législation, le financement, l'organisation et certaines nominations. Les directeurs de chacune de ces agences transmettent un rapport annuel sur leurs activités et sur les activités des services étrangers dirigés vers les États-Unis et leurs intérêts. Le Gouvernement doit la maintenir régulièrement et complètement informée. Réciproquement, la Commission restreinte informe le Sénat au moins chaque trimestre de la nature et de l'étendue des activités des services de renseignement.

Le Sénat accorde de larges pouvoirs d'investigation à la Commission restreinte qui peut mener des enquêtes sur tout sujet relevant de sa compétence, convoquer ( subpeona ) des témoins et exiger la production de documents et de correspondance, prendre des dépositions et enregistrer des témoignages sous serment. Dans cette procédure quasijuridictionnelle qui s'apparente à une commission d'enquête permanente les témoins peuvent être assistés d'un conseil selon le règlement intérieur de la Commission restreinte. Le conseil peut élever des objections aux questions, le président tranche alors comme un juge. Un témoin réfractaire peut être poursuivi pour offence au Parlement ( contempt of Congress ).

Ses pouvoirs en matière d'autorisation budgétaire rendent la Commission restreinte particulièrement influente. Il lui revient en effet d'élaborer chaque année le texte de la loi ouvrant en allouant les crédits aux agences de renseignement ( Intelligence Appropriations Bill ).

En outre, la Commission restreinte peut disposer d'un budget propre, employer du personnel et faire appel à des consultants et experts. Elle peut, avec l'accord de l'agence concernée et à ses frais, bénéficier du concours de personnels des agences de renseignement.

Un ensemble complexe de règles procédurales encadre la possibilité pour la Commission restreinte de rendre public ou divulguer une information entrée en sa possession dès lors qu'elle considère que cela sert l'intérêt général ( public interest, national interest ). Après une prédécision interne, un dialogue s'instaure entre le Président des États-Unis, et les Chefs de la majorité et de l'opposition. En cas de véto présidentiel à la publication d'informations classées, l'affaire est portée devant le Sénat qui se prononce selon une procédure spéciale. Le règlement intérieur de la Commission restreinte détaille les procédures de sécurité pour la gestion, l'utilisation et la conservation de documents te matériels sensibles.

Conformément au règlement intérieur, la Commission restreinte se réunit ordinairement chaque jeudi tant que le Sénat siège. Le principe est l'ouverture au public, sauf si à la majorité des voix il est décidé de tenir une réunion à huis clos pour préserver la confidentialité des échanges. C'est la pratique usuelle comme on pouvait s'y attendre. Les réunions ouvertes au public concernent des auditions annuelles pour faire le point sur les menaces contre la sécurité nationale et les auditions des candidats du Président des États-Unis à certains postes de direction demandant la confirmation du Sénat.

L'ORGANISATION DE LA JUSTICE DU TRAVAIL

La division de la Législation comparée a mené une recherche sur l'organisation de la justice du travail dans neuf pays de l'Union européenne (9) et au Mexique.

Elle s'est attachée :

- à la place de la justice du travail dans l'organisation globale de la justice ;

- à la délimitation de la compétence du juge du travail ;

- à la composition des tribunaux du travail ;

- et, plus succinctement, aux voies de recours et à la procédure.

I. L'ÉCHEVINAGE, UN PRINCIPE RÉPANDU QUI DISTINGUE LA JUSTICE DU TRAVAIL DES JURIDICTIONS ORDINAIRES

1. Le modèle allemand : un ordre juridictionnel autonome pratiquant systématiquement l'échevinage

L'organisation de la justice du travail en Allemagne 117 ( * ) est atypique. Il y existe en effet un ordre juridictionnel propre et autonome pour le contentieux du travail, qui se déploie sur trois degrés jusqu'à un tribunal fédéral autonome, parallèlement aux ordres ordinaire, administratif, financier et social. Cette division en ordres autonomes est garantie par l'article 95 de la Loi fondamentale. Une loi spécifique est dédiée à l'organisation, aux compétences et à la procédure propres aux tribunaux du travail. 118 ( * ) Le modèle allemand s'inspire historiquement des cours des corporations marchandes et de l'expérience des conseils de prud'hommes installés par Napoléon Bonaparte en Allemagne à partir de 1806.

Le législateur allemand qualifie les affaires du travail de « contentieux civil » ( bürgerliche Rechtsstreitigkeiten ), bien qu'elles soient traitées hors des juridictions ordinaires. La compétence du juge du travail porte aussi bien sur les conflits individuels que collectifs du travail, qui sont de son ressort exclusif et sont entendus de la façon la plus large. Les cas de doute, en particulier sur la compétence concurrente du juge civil, viennent parfois de difficultés à établir soit le statut de « preneur de travail » ( Arbeitnehmer - salarié) d'une des parties, soit l'existence d'un contrat de travail, qui est en droit allemand une sous-catégorie du contrat de prestation de service ( Dienstvertrag ) régi par le droit civil. Les litiges concernant les personnels de droit privé des administrations publiques sont traités par le tribunal du travail, seul le contentieux de la fonction publique au sens strict est du ressort du tribunal administratif.

Deux procédures peuvent être suivies selon le domaine de compétence. Pour simplifier, on distingue :

- la procédure de jugement ( Urteilsverfahren ) dans les cas de litiges entre partenaires sociaux parties à une convention collective ou entre salariés et employeurs 119 ( * ) ;

- la procédure de décision ( Beschlussverfahren ) lorsque sont concernés les organes et les procédures de cogestion et de codétermination dans l'entreprise 120 ( * ) .

L'ordre juridictionnel du travail comprend trois degrés. L'échevinage est pratiqué à tous les degrés, mais selon des clefs de répartition différentes entre les juges professionnels et les juges bénévoles. Les juges non professionnels qui disposent pleinement d'une voix délibérante et des mêmes compétences que les magistrats de métier au cours du procès, sont majoritaires en première instance et en appel, mais minoritaires en dernière instance.

En première instance sont compétents les tribunaux du travail ( Arbeitsgerichte ) 121 ( * ) . Les jugements et décisions sont rendus par un collège de trois juges : un juge professionnel qui en occupe la présidence et deux juges bénévoles, l'un employeur, l'autre salarié. Les tribunaux du travail peuvent tenir des audiences foraines ( Gerichtstage ). Le ministère d'avocat n'est facultatif qu'en première instance.

En deuxième instance, au niveau des Länder, l'appel et les recours contre les jugements et décisions de première instance sont entendus par le Tribunal du travail régional ( Landesarbeitsgerichte ) 122 ( * ) . On y retrouve la même clef de composition de la formation de jugement qu'en première instance.

Enfin, le Tribunal fédéral du travail ( Bundesarbeitsgericht ) 123 ( * ) , installé à Erfurt, est placé au troisième et dernier degré de l'ordre juridictionnel du travail. La formation de jugement ( Senat ) comprend cinq juges, trois magistrats professionnels dont le président et deux bénévoles, l'un employeur, l'autre salarié. Le Tribunal fédéral est lié par la qualification matérielle des faits retenus par les juridictions inférieures, dont les décisions sont attaquées. Il tranche, en troisième instance, les demandes de révision des jugements d'appel et les plaintes pour violation du droit ( Rechtsbeschwerde ) contre les décisions d'appel des tribunaux régionaux. Il accueille également, en seconde et dernière instance, les pourvois directs ( Sprungrevision ) contre les décisions des tribunaux du travail du premier degré. Ces pourvois directs qui court-circuitent l'appel ne sont possibles qu'avec l'accord des deux parties et uniquement pour les litiges entre partenaires sociaux à propos d'une convention collective, sur l'interprétation d'une convention collective applicable dans plusieurs Länder, sur des atteintes au droit de grève et à la liberté d'association. 124 ( * ) La révision, la plainte pour violation de droit et le pourvoi direct doivent être avoir été préalablement autorisés par la juridiction inférieure. 125 ( * )

Les juges bénévoles sont issus pour moitié du cercle des employeurs et de celui des salariés. Ils doivent avoir au moins 25 ans en première instance, 30 ans dans les tribunaux régionaux et 35 ans au tribunal fédéral. Ils sont nommés pour cinq ans soit par le ministre fédéral du travail et des affaires sociales dans le cas du tribunal fédéral, soit par l'administration compétente dans les Länder. Les candidats à la nomination sont inscrits sur des listes présentées par les syndicats et les associations patronales. Dans le cas du tribunal fédéral, les organisations proposant des candidats doivent disposer d'une influence significative au niveau national.

2. L'Autriche et la Belgique : échevinage généralisé et contentieux unifié des affaires sociales

L' Autriche présente la particularité de pratiquer l'échevinage à tous les échelons comme l'Allemagne sans pour autant reconnaître d'ordre juridictionnel propre et sans même constituer des tribunaux du travail indépendants. Une autre caractéristique, partagée avec la Belgique, la sépare du modèle allemand : la réunion du contentieux du travail et de la protection sociale des salariés.

Les tribunaux ordinaires autrichiens (ordentlichen Gerichte) sont compétents pour connaître des affaires liées au droit du travail et des prestations sociales, sauf à Vienne où il existe un tribunal de première instance spécifique ( Arbeits- und Sozialgericht Wien ) 126 ( * ) .

Sont notamment considérés par le législateur autrichien comme des contentieux du travail, les litiges de droit civil :

- entre salariés et employeurs, en lien avec le contrat de travail ou en amont de la conclusion du contrat de travail ;

- entre un salarié ou un employeur et un membre d'une instance représentative ou le conseil d'entreprise ;

- entre salariés, dans le cadre du travail ;

- concernant la codétermination et la cogestion ( Betriebsverfassungsrecht) ;

- pour la reconnaissance d'un droit du salarié ( Feststellungklage ). 127 ( * )

Les chambres ( Senate ) sont échevinées. 128 ( * ) Le nombre de juges professionnels et assesseurs représentant à parité les employeurs et les salariés diffère selon le degré de juridiction. Ainsi, siègent en première instance au niveau régional ( Landesgericht ), deux assesseurs et un magistrat professionnel qui préside. Les recours devant le tribunal régional supérieur ( Oberlandesgericht ) sont tranchés par deux assesseurs et trois juges professionnels. On constate donc une inversion de majorité au profit des magistrats de carrière plus tôt qu'en Allemagne, dès l'appel.

En formation simple, la Cour suprême ( Obersten Gerichtshof ) rend ses décisions par deux assesseurs et trois juges professionnels. La formation tripartite ( Dreiersenat ) est composée de trois juges professionnels. La formation plénière pour les cas les plus complexes est composée de 4 assesseurs et de 7 juges professionnels.

Les assesseurs représentant employeurs et salariés exercent bénévolement. 129 ( * ) Leur mandat est de 5 ans renouvelables. 130 ( * ) Ils sont élus à la représentation proportionnelle sur proposition des représentations professionnelles légalement instituées pour les employeurs et pour les salariés. Les corps électoraux ( Wahlkörper ) à l'échelon fédéral et fédéré sont définis pour chacun des neuf groupes de métiers. 131 ( * )

Pour pouvoir voter et être élu à ces élections, il faut :

- être âgé de plus de 24 ans et de moins de 65 ans ;

- être prêt à accepter la fonction ;

- appartenir au groupe professionnel soumis au vote ou en être retraité ;

- et posséder les conditions requises pour être électeur au niveau national.

L'existence de tribunaux spécifiques du travail et l'échevinage se retrouvent également en Belgique . La loi belge du 10 novembre 1967 portant code judiciaire a supprimé les conseils de prudhommes au profit de tribunaux et de cours du travail échevinés. Cela peut être interprété comme un glissement hors du régime français vers le modèle allemand. L'existence de juridictions distinctes du travail est garantie par l'article 157 al. 3 de la Constitution belge. Ces juridictions spécialisées font partie de l'ordre civil dont la cohérence est assurée par la jurisprudence de la Cour de Cassation belge 132 ( * ) . Le Conseil d'État 133 ( * ) est compétent pour régler les litiges portant sur le statut des fonctionnaires, les contractuels étant en revanche assimilés à des salariés privés, selon une solution que l'on rencontre systématiquement dans les pays qui connaissent à la fois une fonction publique statutaire et un ordre juridictionnel administratif distinct de l'ordre civil.

La compétence du juge du travail est très soigneusement détaillée par législateur. 134 ( * ) Pour simplifier, on retient qu'elle couvre les litiges portant sur le contrat de travail, l'apprentissage, la formation professionnelle, les discriminations et le harcèlement au travail, les accidents du travail et les maladies professionnelles, et les élections des représentants du personnel. Elle s'étend également à tout le champ de la sécurité sociale (assurance-chômage, vieillesse, allocations familiales, prestations de solidarité, soutien aux handicapés). Enfin, le tribunal du travail est aussi compétent en matière de règlement collectif de dettes, seul cas où un juge professionnel décide seul, sans échevinage. Comme en Autriche, en Espagne ou en Italie, le juge du travail belge est un juge aux affaires sociales à large spectre d'intervention.

Chaque tribunal du travail en formation de jugement se compose d'un président, juge professionnel, et de deux assesseurs qui ne sont pas des magistrats de carrière et qui sont dénommés juges sociaux. 135 ( * ) Les chambres sont formées en fonction des matières traitées. Pour prendre un exemple topique, en cas de litige individuel entre un employeur et un salarié, un des juges sociaux doit avoir été nommé au titre d'employeur, l'autre au titre d'ouvrier ou au titre d'employé, selon la qualité du travailleur en cause. 136 ( * ) Les juges sociaux, qui doivent avoir 25 ans accomplis, sont nommés par le Roi pour cinq ans renouvelables sur proposition du ministre du Travail. 137 ( * ) Les candidatures sont présentées au ministre par les organisations représentatives d'employeurs, de travailleurs ouvriers, de travailleurs employés et de travailleurs indépendants. 138 ( * )

Il faut relever qu'auprès de chaque tribunal du travail, sont installés des auditeurs du travail qui exercent les fonctions du ministère public sous l'autorité du procureur général. 139 ( * ) L'auditorat du travail donne des avis sur les litiges, notamment en matière de discrimination, de harcèlement ou de protection sociale. En cas d'infraction pénale dans le domaine social, il poursuit le contrevenant devant le tribunal correctionnel. 140 ( * )

Les cours du travail connaissent de l'appel des décisions rendues en premier ressort par les tribunaux du travail. 141 ( * ) Elles ont le même ressort que les cours d'appel civiles ordinaires. Elles sont organisées selon le même principe : un magistrat professionnel, deux conseillers sociaux nommés selon les mêmes modalités que les juges sociaux, si ce n'est qu'ils doivent être âgés de plus de 30 ans. 142 ( * ) Un auditorat du travail est aussi installé près les cours du travail avec les mêmes compétences.

3. Le Royaume-Uni : une large autonomie du contentieux du travail, des assesseurs professionnels payés sur honoraires et recrutés sur appel à candidatures

Le tribunal du travail (employment tribunal) en Angleterre et au Pays de Galles constitue une juridiction spécifique, distincte du circuit des cours de justice ( Courts ) et compétente pour décider des plaintes des personnes considérant avoir été traitées de façon illégale (unlawfully) par un employeur ou un employeur potentiel. Sont inclus notamment les licenciements injustes, les discriminations ou encore les retenues injustifiées sur le salaire.

Les parties en litige sont invitées à recourir dans la mesure du possible à une voie non juridictionnelle pour la résolution de leur conflit, comme une médiation par l'ACAS (Advisory, Conciliation and Arbitration service) , judiciaire ou autre, ou à tout autre moyen de résoudre le conflit par un accord 143 ( * ) .

À moins que la plainte ne soit rejetée ab initio , le tribunal en fait parvenir une copie aux défendeurs, accompagnée d'un formulaire de réponse (prescribed response form) . Le défendeur doit répondre dans les délais indiqués, soit 28 jours à compter de l'envoi de la copie de la plainte par le tribunal.

Aux termes de l' Employment Tribunals Act de 1996, les affaires portées devant un tribunal du travail sont entendues par une formation échevinée comportant un président, qui est aussi un juge professionnel et deux assesseurs ( panel members ) représentant l'un les employés et l'autre les employeurs. 144 ( * ) Tous les membres du tribunal disposent d'une voix délibérative. Les assesseurs prennent conseil auprès du juge professionnel sur les points de droit et de procédure soulevés.

Les juges sont sélectionnés par la Commission des nominations judiciaires ( Judicial Appointments Commission - JAC) qui publie une offre lors de vacances de poste . Ils peuvent être salariés (salaried employment judge) ou payés aux honoraires (fee-paid employment judge), en s'engageant dans ce cas à participer à 30 jours de session au moins par an. Ce sont souvent d'anciens avocats plaideurs ( barrister ).

Les candidats aux postes de panel member n'ont pas besoin d'avoir reçu une formation juridique car ils ne sont pas nommés à un poste de juge (non-legal appointment) . Les candidats répondent à une offre publiée par les tribunaux en fonction des besoins de leur recrutement prévisibles. L'offre précise les critères de sélection et les qualifications requises, les candidats devant faire la preuve au tribunal qu'ils disposent de l'expérience professionnelle adéquate. Les assesseurs sont recrutés au sein d'un tribunal du travail pour cinq ans renouvelables. Ils sont quasi-exclusivement rémunérés en honoraires en fonction du nombre de sessions auxquelles ils participent.

Un recours est possible devant un tribunal du travail supérieur, l' Employment Appeal Tribunal, si celui-ci l'autorise, dans le cas où le tribunal de première instance a commis une erreur de droit ou de procédure, en incluant les cas où la décision était injustement biaisée 145 ( * ) . Il s'agit encore d'un tribunal écheviné. Un appel de la décision de second niveau est encore possible sur des points de droit devant la division civile de la Court of Appeal , sortant ainsi du régime des tribunaux spécialisés pour revenir dans le circuit des cours de justice ordinaire. À cet échelon, les décisions ne sont plus rendues que par des magistrats professionnels et selon les procédures ordinaires.

4. La Suède : une compétence de première instance partagée avec la juridiction ordinaire, des décisions définitives sans possibilité d'appel

La Suède connaît également des tribunaux spéciaux (specialdomstol) échevinés chargés d'examiner les conflits du travail. La caractéristique la plus saillante est que leur décision est insusceptible d'appel.

Aux termes de la loi de 1974 sur la procédure dans les conflits de travail 146 ( * ) , le tribunal du travail peut statuer, lorsque l'affaire concerne :

- un litige sur la convention collective ou tout autre conflit du travail visé dans la loi de 1976 sur la participation des salariés aux décisions de la vie professionnelle (cogestion) ;

- un autre litige de travail à condition que la convention collective s'applique entre les parties ou qu'un employé particulier concerné par le litige occupe un travail visé par la convention collective à laquelle l'employeur est lié.

Dans les autres types de conflit du travail qui pourraient survenir, le droit suédois prévoit que les procédures soient portées devant une juridiction de première instance  ordinaire (vanlig tingsrätt). 147 ( * )

En outre, les matières pouvant faire l'objet d'une action directement devant le tribunal du travail peuvent aussi être portées devant la juridiction civile ordinaire.

Lorsque les conflits de travail sont portés directement devant le tribunal du travail, celui-ci juge en première et dernière instance. Lorsque l'affaire est portée en première instance devant une juridiction ordinaire, un appel est possible mais uniquement devant le tribunal du travail qui statue à nouveau en dernier ressort.

Le tribunal comprend 7 membres :

- 3 juges titulaires sont réputés ne représenter les intérêts de personne : ce sont le président et le vice-président, magistrats de carrière, ainsi qu'un troisième magistrat ayant une expérience spécifique du marché du travail ou ayant exercé une fonction importante dans une administration ;

- 2 membres sont nommés par le gouvernement sur proposition des employeurs privés ou publics pour trois ans ;

- 2 membres sont nommés par le gouvernement sur proposition des principaux syndicats d'employés (LO, TCO et SACO) pour trois ans.

Dans les affaires les plus simples, la formation de jugement se limite à 3 membres, qui sont dans ce cas le président du tribunal et deux membres représentants les employeurs et les employés.

En outre le président peut agir seul, notamment pour décider des mesures préparatoires, classer le dossier ou rejeter la plainte quand elle est manifestement irrecevable.

II. LE REFUS DE L'ÉCHEVINAGE AU PROFIT DE MAGISTRATS PROFESSIONNELS

Dans un tiers de notre échantillon, on ne retrouve ni juridiction paritaire à la française, ni échevinage. Toutes les affaires sont traitées par des juges professionnels. La spécificité du contentieux du travail, en première instance à tout le moins, n'est pas reflétée partout ni au même degré, ni selon des modalités analogues. L'échantillon examiné offre une palette de solutions : juridiction généraliste (Pays-Bas) ou spécialiste (Espagne) distincte des tribunaux ordinaires, formation spécialisée des juridictions civiles ordinaires (Italie), unification de la matière sociale en agrégeant la protection sociale (Espagne et Italie).

1. Une incontestable originalité néerlandaise : le juge cantonal

Aux Pays-Bas , la justice du travail est confiée à des juges professionnels, sans échevinage. Il n'existe ni ordre juridictionnel propre, ni juridiction spécialisée uniquement dans le droit du travail ou les affaires sociales. La répartition des affaires au sein des tribunaux ordinaires ( rechtbank ) distingue les domaines ( rechtsgebied ) civil, administratif et pénal. S'ajoute à ces trois domaines, un secteur ( sector ) particulier, celui des affaires cantonales ( kantonzaken ) décidées par le juge cantonal. Cette appellation est trompeuse et renvoie à l'organisation ancienne de la justice néerlandaise, lorsqu'existait encore un échelon inférieur de juridiction au niveau du canton distinct des tribunaux ordinaires. La rationalisation de la carte judiciaire a conduit à l'intégration des juges cantonaux ( kantonrechter ) au sein des tribunaux ordinaires, tout en conservant leur champ propre de compétences, dont fait partie le contentieux du travail.

Le code de procédure civile néerlandais attribue au juge cantonal des compétences très diversifiées, mais qui ont en commun de couvrir un contentieux considéré comme relativement moins important et de proximité. Font partie du secteur cantonal les affaires civiles jusqu'à 25 000 euros, le droit de la consommation et du crédit à la consommation jusqu'à 40 000 euros, les contrats d'agence et de location sans limite de montant, les litiges individuels et collectifs du travail. 148 ( * ) En outre, le juge cantonal est compétent en matière pénale pour statuer sur les contraventions ( overtredingen ). Le gros de son activité dans ce domaine est lié à la police de la circulation.

Le ministère d'avocat n'est pas obligatoire devant le juge cantonal, ce qui le distingue de toutes les autres juridictions ordinaires. 149 ( * ) Les décisions dans les affaires cantonales sont prises, sauf exceptions, par un juge unique ( enkelvoudige kamer ) d'après la loi sur l'organisation de la justice. 150 ( * )

Le juge cantonal a un rôle particulier en matière de droit du licenciement. Un employeur peut soit engager la résiliation ( opzegging ), soit la dissolution ( ontbinding ) du contrat de travail. La résiliation nécessite l'obtention préalable d'une autorisation de licenciement ( ontslagvergunning ) auprès d'UWV 151 ( * ) , l'organe administratif autonome, sous la tutelle du ministre des affaires sociales et du travail, qui est notamment chargé de l'assurance-chômage. C'est la procédure en cas de licenciement économique ou en cas de congé maladie du salarié supérieur à deux ans.

Toutefois, lorsque l'employeur dispose d'autres motifs sérieux pour licencier un salarié ou lorsqu'il s'est vu refuser l'autorisation de licencier, il peut déposer une requête auprès du juge cantonal pour demander la dissolution du contrat de travail, conformément au code civil néerlandais. 152 ( * ) Le juge cantonal décide si le contrat est dissous, à quelle date et en ouvrant droit à quelles indemnités ( vergoeding ) pour le salarié. Il est rare dans la pratique que le juge cantonal refuse la dissolution.

Jusqu'au 1 er juillet 2015, en outre, le code civil fermait toute voie de recours, en appel ( hoger beroep ) et en cassation contre une décision de dissolution du contrat de travail prononcé par le juge cantonal. Les décisions en matière de licenciement du juge cantonal ne sont désormais plus définitives et peuvent donner lieu, comme ses autres décisions, à des appels devant les Cours de justice ( gerechtshoven ) et à un pourvoi en cassation devant le Haut Conseil ( Hoge Raad ). 153 ( * )

2. Une certaine parenté entre l'Espagne et l'Italie malgré des procédures divergentes

En Espagne , la loi organique 6/1985 du 1 er juillet 1985 sur le pouvoir judiciaire (LOPJ) distingue les ordres juridictionnels civil, pénal, administratif ( contencioso-administrativo ) et social. Le cadre demeure toutefois moniste puisque le Tribunal suprême ( Tribunal Supremo ) examine en dernière instance, selon les modalités prévues par la loi, les décisions des tribunaux inférieurs, quel que soit leur ordre. La Quatrième chambre du Tribunal suprême est ainsi chargé de statuer en cassation sur la matière sociale. Une formation du Tribunal suprême joue le rôle d'un tribunal des conflits pour résoudre les conflits positifs et négatifs de juridiction.

Les juridictions sociales espagnoles traitent les requêtes relevant de « la branche sociale du droit, tant en matière de contentieux individuels que collectifs, de même que les recours en matière de sécurité sociale ou dirigés contre l'État quand la législation du travail lui attribue la responsabilité » (art. 9.5 LOPJ). Les contentieux de la relation de travail, de l'activité syndicale et de la protection sociale sont donc décidés par le même juge.

Cette clause générale a été explicitée de façon très détaillée dans un effort de systématisation de la jurisprudence du Tribunal suprême. 154 ( * ) Pour se limiter au droit du travail en excluant la protection sociale, entrent notamment dans son domaine :

- en matière individuelle, les litiges entre salariés et employeurs liés à la conclusion, l'exécution et l'extinction du contrat de travail, ainsi que les engagements précontractuels ou postérieurs comme l'indemnisation ou les clauses de non-concurrence. Sont inclus tous les litiges connexes (usage de l'automobile, conclusion d'assurances) ayant un effet sur l'accomplissement des obligations professionnelles 155 ( * ) . Les litiges relatifs à une mise à disposition, à des dommages subis dans le cadre de la prestation de service, à des accidents du travail ou des maladies professionnelles, à la prévention des risques professionnels et à la protection des droits fondamentaux du travailleur sont également mentionnés dans la loi de 2011 ;

- en matière collective, les litiges concernant la représentation des travailleurs et des employeurs, la protection de la liberté syndicale et du droit de grève, la constitution, la reconnaissance de la personnalité juridique et la contestation des statuts des syndicats et des associations d'employeurs, le régime juridique des syndicats et la contestation d'accords collectifs ;

- l'action des administrations publiques en matière de travail et d'emploi : contestation de décisions des autorités en charge de la politique du travail, notamment en matière d'autorisations et de sanctions, sous réserve d'une compétence explicitement confiée au juge administratif ; responsabilité des administrations publiques déduites de leurs obligations aux termes de la législation du travail, en particulier les obligations du Fonds de garantie salariale, qui verse les indemnisations pour licenciement économique ou en cas de faillite de l'employeur ; litiges entre un particulier et les services publics de l'emploi ou les agences de placement autorisés.

Le législateur espagnol a pris soin de tracer la frontière de compétence entre l'ordre social et l'ordre administratif en excluant de la compétence du juge social toutes les questions liées à la fonction publique, y compris la protection de la liberté syndicale et du droit de grève des fonctionnaires et du personnel statutaire des services de santé. 156 ( * ) Les litiges concernant le personnel employé par une administration publique sous contrat de travail dépendent du juge social.

À tous les échelons, les affaires sont traitées et décidées par des juges professionnels, sans échevinage. En principe, la procédure propre aux litiges du travail répond au principe de l'instance unique et du double degré, ce qui signifie que l'évaluation des preuves matérielles ne dépend pleinement que du premier juge saisi, que l'appel ordinaire est impossible mais que des recours extraordinaires, dont la cassation, sont ouverts. 157 ( * ) En particulier, il est interdit de réitérer à un deuxième niveau juridictionnel les mêmes demandes ( pretensiones ) que celles qui ont été initialement formulées devant le premier juge agissant comme instance unique.

Le premier échelon de l'ordre social est constitué par le Tribunal des affaires sociales ( Juzgados de lo Social ) implanté généralement dans la capitale de la province et dans quelques autres villes de la Communauté autonome susceptibles d'accueillir un nombre importants de litiges. Pour simplifier, il s'agit de l'instance unique en matière de conflits individuels du travail ou lorsque sont contestés des actes d'une administration publique de niveau provincial ou inférieur.

Le deuxième échelon est occupé par les chambres sociales des Tribunaux supérieurs de justice ( Tribunales Superiores de Justicia ), juridiction ordinaire de recours et d'appel pour tous les ordres juridictionnels, installée dans chaque Communauté Autonome. Les chambres sociales des TSJ servent d'instance unique de jugement en matière de conflits collectifs (licenciements collectifs, contestation d'accords collectifs, contentieux syndical, protection de la liberté syndicale) et pour la contestation d'actes émanant d'administrations de niveau régional. En outre, comme juge de second degré, elles reçoivent et décident des recours formés contre les décisions des tribunaux des affaires sociales installés dans leur ressort.

À ce même échelon, en parallèle, il faut situer la chambre sociale de la Cour nationale ( Audiencia Nacional ) installée à Madrid. Elle n'intervient qu'en tant qu'instance unique dans le même champ matériel de compétences que les Tribunaux supérieurs de justice mais sa compétence territoriale est distincte. Elle traite les affaires qui débordent des confins d'une communauté autonome et qui ont des répercussions nationales. Elle juge également les requêtes dirigées contre les actes de l'administration d'État pris par un organe de niveau ministériel en matière de droit du travail ou de droit syndical.

Enfin, comme on l'a indiqué, le Tribunal Suprême examine les pourvois éventuels en cassation contre les décisions des juridictions inférieurs. Il peut également connaître comme instance unique des recours contre les actes du Conseil des ministres en matière de droit du travail ou de droit syndical.

En Italie , le contentieux de la relation de travail est régi par la loi 533/1973 du 11 août 1973. Celle-ci modifie le code de procédure civile pour définir une procédure propre qui se distingue notamment de la procédure civile ordinaire par l'oralité, seuls les actes introduisant le recours devant être rédigés, par des obligations spécifiques de célérité et par des pouvoirs d'instruction étendus pour le juge du travail 158 ( * ) .

Sont concernés par la procédure propre à la relation de travail ( rito del lavoro ) les litiges touchant :

- le travail subordonné privé, qu'il se déroule ou non au sein d'une entreprise, l'emploi à domicile ( lavoro domestico ) étant donc concerné ;

- le travail agricole, y compris les rapports de métayage, de fermage et tirés d'autres contrats agraires ;

- les rapports d'agence, de représentation commerciale et en général de parasubordination, c'est-à-dire les collaborations qui se caractérisent par une prestation continuée et coordonnée, à caractère essentiellement personnel, même si un lien de subordination n'est pas strictement constitué. Le travail sur contrat de mission en fait partie ;

- les agents des entreprises publiques et des EPIC ( enti pubblici economici ) ;

- et les agents publics dont la relation de travail ne serait pas confiée par la loi au juge administratif (clause balai). 159 ( * )

Les litiges individuels du travail sont décidés en première instance par la juridiction civile ordinaire du ressort faisant office de juge du travail ( giudice del lavoro ). 160 ( * ) La décision est rendue par un juge professionnel unique, sans échevinage. Les juges appelés à se prononcer en matière de contentieux du travail appartiennent à une section spécifique du tribunal civil ordinaire. 161 ( * ) L'appel du jugement est formé devant la Cour d'appel du ressort, qui se prononce en formation collégiale. 162 ( * ) Un ultime recours devant la Cour de cassation est enfin possible.

Les parties peuvent recourir, préalablement à l'action judiciaire, à la conciliation. Il ne s'agit que d'une simple faculté qui ne constitue plus depuis 2011 163 ( * ) une condition de recevabilité du recours devant le juge du travail.

Jusqu'à la réforme du marché du travail en 2015, une procédure propre était prévue pour le contentieux du licenciement ; elle demeure en vigueur pour les salariés dont le contrat de travail dépend du régime antérieur au Jobs Act . Toutefois, l'organe juridictionnel compétent était et demeure le même, que le litige porte sur le licenciement ou sur un autre point de la relation de travail. De même, bien qu'il existe une procédure spécifique pour la répression des agissements antisyndicaux ( condotta antisindacale ) de l'employeur 164 ( * ) , le juge du travail est compétent en la matière.

Les litiges de la protection sociale répondent à la même procédure devant la même juridiction que le contentieux individuel du travail. 165 ( * )

3. Une réforme en cours au Mexique : vers la pleine professionnalisation de la justice du travail

Jusqu'en 2017, l'organisation de la justice du travail au Mexique, prévue en détail par l'article 123 de la Constitution mexicaine, reposait sur une juridiction spécifique échevinée mais située en dehors du pouvoir judiciaire.

Les conflits individuels et collectifs du travail étaient traités par des conseils de conciliation et d'arbitrage ( Junta de Conciliación y Arbitraje ), soit au niveau régional, soit au niveau fédéral lorsque le litige a des répercussions sur au moins deux États fédérés. Après une phase obligatoire de conciliation entre les deux parties dans les 15 jours suivant la saisine du Conseil, si aucun accord n'était conclu, le Conseil rendait une sentence arbitrale ( laudo ). Cet arbitrage n'était pas susceptible de recours, à l'exception de la seule procédure d' amparo , plus connue dans le cas du contentieux constitutionnel espagnol, qui vise la protection des droits fondamentaux. 166 ( * )

La formation de jugement était échevinée avec un nombre égal de représentants des travailleurs et des employeurs, élus pour six ans lors de conventions,  et un représentant du Gouvernement. 167 ( * ) Les conseils n'étaient donc pas indépendants de l'exécutif et ne faisaient pas partie du pouvoir judiciaire. En réalité, ces conseils qui se réunissaient en plénière ou en formation spécialisée, une par branche d'activités étaient à mi-chemin entre des organes de dialogue social collectif et des juridictions du travail.

Conformément à l'article 135 de la Constitution mexicaine, le Congrès par une majorité des deux tiers et une majorité des États fédérés ont modifié l'article 123 de ladite constitution pour réformer profondément la justice du travail après une ample consultation sur la justice du quotidien menée en 2016. 168 ( * )

Le point fondamental réside dans la suppression des conseils de conciliation et d'arbitrage qui sont remplacés par des tribunaux du travail de la Fédération et des États fédérés, tribunaux qui font expressément partie désormais du pouvoir judiciaire et dont les membres sont nommés selon les mêmes règles que les magistrats des juridictions ordinaires. La phase de conciliation sera renforcée avec des centres et des organes décentralisés dédiés. La réforme n'étant pas rétroactive, les conseils de conciliation et d'arbitrage disparaîtront au fur et à mesure de l'épuisement du contentieux initié avant l'entrée en vigueur de la réforme. Le Mexique ne prévoit pas de réunir le contentieux du travail et celui de la protection sociale sur le modèle espagnol ou italien.

La réforme mexicaine met aussi l'accent sur le renforcement de la conciliation en amont de la phase juridictionnelle. On pourrait parler d'une décantation de l'ancien système accompagne d'une séparation et d'une professionnalisation de rôles de médiation, de négociations et de jugement, auparavant amalgamés dans un même organe.

III. LA PERSISTANCE DU MODÈLE DES PRUD'HOMMES EN SUISSE (CANTON DE GENÈVE)

La gestion des conflits individuels relève en Suisse des tribunaux cantonaux. En première instance, il s'agit en général des tribunaux des prud'hommes.

À titre d'exemple, nous retiendrons le tribunal des prud'hommes du canton de Genève , régi par la loi du 11 février 2010 sur le tribunal des Prud'hommes. Son article premier précise que le tribunal est compétent en particulier pour les litiges :

- découlant d'un contrat de travail ;

- portant sur la constatation de l'existence ou de l'inexistence d'un rapport de droit en une matière pour laquelle le tribunal est compétent ;

- relatifs à l'interprétation ou à l'application d'une convention collective de travail, à la demande d'une partie contractante ;

- entre les parties à une convention collective de travail et un employeur ou un travailleur ;

- concernant les relations de travail, qui lui sont soumis par une organisation professionnelle, lorsque celle-ci a la qualité pour agir selon le droit fédéral ;

- et des litiges qu'une autre loi lui attribue.

Ordinairement, la procédure devant le tribunal des prud'hommes est précédée d'une requête de conciliation 169 ( * ) . Si cette dernière aboutit, alors son procès-verbal a les mêmes effets qu'une décision exécutoire. Si elle n'aboutit pas, la partie demanderesse se voit attribuer une autorisation de procéder, lui permettant dans un délai de 3 mois de déposer sa demande devant le tribunal.

Les juges prud'hommes sont sans exception des magistrats non professionnels. Le tribunal des prud'hommes en formation de jugement est composé d'un président, d'un juge prud'homme employeur et d'un juge prud'homme salarié. Il ne peut donc y avoir égalité de voix et il n'est pas besoin de départage. Dans la mesure du possible, les causes sont attribuées alternativement à un tribunal présidé par un employeur et à un tribunal présidé par un salarié. 170 ( * )

Les présidents de tribunal sont des juges prud'hommes titulaires du brevet d'avocat ou du brevet de président de la juridiction des prud'hommes. Ce dernier diplôme est obtenu à l'issue d'une formation organisée conjointement par l'autorité judiciaire cantonale et l'Université de Genève.

L'article 123 de la Constitution de la République et canton de Genève, lequel dispose que « les juges prud'hommes sont élus par le Grand Conseil 171 ( * ) . L'élection est paritaire et par groupes professionnels » . Le mandat des juges prud'hommes est de 6 ans. Sont éligibles en tant que juges prud'hommes, les employeurs et salariés, désignés comme tels par les organisations professionnelles, de nationalité suisse, âgés de 18 ans révolus, exerçant depuis un an au moins leur activité professionnelle dans le canton. Sont aussi éligibles les étrangers ayant exercé pendant 8 ans au moins leur activité professionnelle en Suisse, dont la dernière année au moins dans le canton 172 ( * ) . Les 5 groupes professionnels 173 ( * ) sont composés chacun de 15 à 45 juges prud'hommes employeurs et d'un nombre égal de juges prud'hommes salariés. C'est la commission de gestion du pouvoir judiciaire qui fixe le nombre de juges à élire pour chaque groupe après consultation des partenaires sociaux, 9 mois avant l'élection. 174 ( * )

Les recours contre les décisions du tribunal des prud'hommes sont portés devant la Chambre des prud'hommes au sein de la cour civile de la Cour de Justice. Cet équivalent d'une chambre de cour d'appel n'est pas composé uniquement de magistrats professionnels. Elle siège en formation échevinée de trois juges, dont un juge professionnel qui préside, un juge prud'homme employeur et un juge prud'homme salarié. Pour être éligibles, les candidats aux postes de juge prud'homme de la Chambre doivent au préalable avoir exercé au moins trois ans au tribunal des prud'hommes en première instance. En dernier ressort est compétent le Tribunal fédéral suisse.

Organes de conciliation et d'arbitrage
pour les conflits collectifs du travail en Suisse

Au niveau fédéral, la loi fédérale du 12 février 1949 prévoit la possibilité de constituer un Office fédéral de conciliation en matière de conflits collectifs de travail pour connaître des conflits du travail surgis entre employeurs et travailleurs et débordant les limites d'un canton . L'article premier de la loi précise que «  l'office de conciliation sera seulement institué à la requête d'intéressés, si les tentatives de concilier les parties par des pourparlers directs ont échoué, et seulement s'il n'existe pas d'office contractuel paritaire de conciliation ou d'arbitrage » . Il ne s'agit donc pas d'un organe permanent.

Au niveau cantonal, et par exemple dans le canton de Genève, la Chambre des relations collectives de travail remplit la fonction d'office de conciliation. Elle est compétente, en vertu de la loi cantonale du 29 avril 1999 concernant la Chambre des relations collectives de travail, en matière de prévention et de conciliation des différends d'ordre collectif concernant les conditions de travail ou encore pour trancher les différends collectifs en tant que Tribunal arbitral public. Elle est composée :

- d'un président et de son suppléant, possédant des compétences en droit, élus par le Grand Conseil après consultation des partenaires sociaux ;

- de 4 assesseurs (2 employeurs et 2 salariés) et de leurs suppléants (8 employeurs et 8 salariés), nommés par les juges prud'hommes.

IV. SYNTHÈSE

1. Bien que la matière du droit du travail soit très généralement considérée comme relevant du droit civil, et plus spécifiquement du droit des obligations dans la doctrine germanique, la très grande majorité des États maintient séparés les contentieux civils et du travail, en prévoyant des juridictions propres , des formations de jugement à composition atypique, des règles de procédures ou des voies de recours singulières.

Une juridiction spécifique propre au seul contentieux du travail et uniquement à celui-ci est présente en Allemagne, au Mexique, au Royaume-Uni, en Suède et en Suisse.

L'Autriche, la Belgique, l'Espagne et l'Italie ont fait le choix commun d' unifier le contentieux du travail et de la protection sociale sous la compétence d'un même juge, mais diffèrent dans la l'organisation du tribunal. La Belgique et l'Espagne ont constitué des juridictions spécifiques, tandis que l'Autriche et l'Italie ont confié la tâche à des formations spéciales de la juridiction civile ordinaire et respectant une procédure distincte des règles ordinaires.

Les Pays-Bas se distinguent radicalement. Il n'y existe pas de tribunal du travail ou des affaires sociales. Le domaine de responsabilité du juge cantonal, compétent pour les conflits individuels de travail, est extrêmement étendue et hétérogène, sans se confondre avec la compétence de la juridiction civile ordinaire.

2. Quel que soit le pays, la séparation du contentieux du travail -éventuellement des affaires sociales- confié à un tribunal distinct de la juridiction ordinaire ne s'étend pas nécessairement au-delà de la première instance ou du premier degré. Lorsqu'un recours est possible contre la décision, ce qui n'est pas toujours prévu et souvent soumis à de strictes conditions, il est fréquemment porté devant les juridictions civiles ordinaires supérieures. En général, une chambre sociale dans l'équivalent des cours d'appel ou de la cour de cassation est compétente.

La Suède ne prévoit aucun recours contre les décisions du juge du travail. C'était aussi le cas en matière de licenciement aux Pays-Bas jusqu'en 2015. L'Espagne restreint fortement les possibilités de recours en écartant expressément l'appel et le réexamen au fond de l'affaire.

La Belgique et le Royaume-Uni prévoient que le recours contre la première instance soit reçu par un tribunal du travail de second degré. L'Autriche conserve une chambre spécifique échevinée pour le contentieux social au sein des tribunaux supérieurs d'appel. L'Allemagne se singularise nettement en prévoyant un ordre juridictionnel complet et entièrement autonome pour le contentieux du travail, avec première instance au niveau local, appel au niveau régional et cassation au niveau fédéral. La Cour constitutionnelle allemande est la seule autorité supérieure au tribunal fédéral dans l'interprétation du droit du travail.

3. En matière de composition du tribunal , le clivage est net entre les pays qui ne recourent qu'à des magistrats professionnels et ceux qui pratiquent l'échevinage, en joignant des magistrats non-professionnels représentants salariés et employeurs à la formation de jugement.

L' échevinage , au moins en première instance, est majoritaire dans notre échantillon et concerne notamment les pays de tradition néocorporatiste où le système économique et les entreprises sont copilotés par les employeurs et les syndicats (sphère germanique, Scandinavie). Le cas du Royaume-Uni peut s'interpréter comme un héritage de l'époque où les syndicats britanniques exerçaient une grande influence.

Les Pays-Bas, l'Espagne et l'Italie, ainsi que le Mexique, si la réforme engagée en 2017 aboutit, n'y ont pas recours. Dans les pays de tradition latine, marqués par de violents conflits syndicaux et un faible degré de coopération, le recours au seul juge professionnel est perçu comme nécessaire pour garantir la sérénité et l'indépendance du jugement. Ce n'est pas le cas des Pays-Bas, à la fois beaucoup plus marqués par l'esprit de consensus et par le libéralisme économique. La solution néerlandaise est plutôt liée à un souci affiché d'efficacité et de sécurité juridique, qui se manifeste en particulier par un droit du licenciement original qui permet à l'employeur de demander directement la dissolution du contrat de travail au juge, qui doit alors être hors des deux parties.

4. Les solutions concrètes retenues dans chaque pays présentent une diversité certaine, dont le véritable point commun est peut-être de s'éloigner des prud'hommes à la française , qui a pourtant été une référence historique dans de nombreux pays.

L'exemple du canton de Genève en Suisse est le seul dans la recherche menée par la division qui s'apparente au modèle des prud'hommes sans présence de magistrat professionnel en première instance. Le nombre de juges étant impair, il n'est cependant pas besoin de départage.

L'ACCOMPAGNEMENT ET LE PLACEMENT DES CHÔMEURS

À la demande de Mme Pascale Gruny, sénateur de l'Aisne, la division de la Législation comparée a mené une recherche sur les organismes chargés de l'accompagnement et du placement des chômeurs dans sept pays européens, l'Allemagne, la Belgique, le Danemark, l'Espagne, l'Italie, les Pays-Bas et le Royaume-Uni (Angleterre et Pays de Galles).

L'indemnisation du chômage, notamment les règles d'éligibilité, les modes de calcul, les conditions de versement, les contreparties et les modalités de contrôle sortent du champ de cette étude et ne seront évoquées qu'incidemment, ces sujets ayant été abondamment traités en 2016 et en 2017 dans les documents publiés par la DARES, l'UNEDIC et la DG Trésor.

I. UNE GRANDE CONVERGENCE DES POLITIQUES

Il ressort de la recherche conduite une grande convergence dans les politiques d'accompagnement et de placement des chômeurs menées dans les différents États européens examinés. À partir des années 2000 et plus encore avec la crise économique amorcée en 2008, l'accent a été placé partout sur les politiques actives de l'emploi, qui misent sur l'augmentation de l'employabilité des chômeurs, la personnalisation de l'accompagnement, l'attention aux besoins des entreprises et l'incitation à la sortie par tout moyen du chômage y compris en renforçant les contraintes sur des demandeurs d'emploi et en développant le travail à temps partiel ou à durée déterminée. Les politiques passives de substitution temporaire des revenus du travail par des allocations chômage demeurent mais ne constituent plus la priorité. Elles sont clairement considérées comme insuffisantes et systématiquement durcies.

Malgré les différences d'organisation sociale, politique et administrative et malgré l'écart de santé économique entre les pays, on peut constater une convergence sur les stratégies et sur les instruments déployés pour accompagner et placer les chômeurs. L'essor de la dématérialisation et les efforts de rationalisation budgétaire se constatent partout avec des intensités et des effets variables. De même, est prévue partout sous une modalité ou une autre, l'évaluation du potentiel d'insertion ou de la difficulté probable de retrouver un emploi, ainsi que la conclusion d'un plan personnalisé de retour à l'emploi, souvent présenté comme un engagement contractuel entre le chômeur et le service de placement.

La libéralisation sous l'effet du droit européen de l'activité de placement et d'intermédiation a conduit la plupart des pays à tester une délégation de l'accompagnement de certains publics à des bureaux privés, notamment des agences d'intérim, soit par une collaboration organisée avec le service public, soit en incitant financièrement les demandeurs à s'adresser à eux. En général, la coordination des différents dispositifs et aides proposés par les acteurs compétents (État, agissant potentiellement par plusieurs canaux, régions autonomes, communes, agences privées de placement) constitue régulièrement un enjeu majeur.

II. DEUX MODÈLES DE POLITIQUE ACTIVE DE L'EMPLOI : LE RENOUVELLEMENT DES INTERVENTIONS DES AGENCES PUBLIQUES EN ALLEMAGNE ET AU DANEMARK

Les réformes Hartz menées entre 2003 et 2005 sous le gouvernement Schröder ont profondément remanié l'encadrement du marché du travail, la politique de l'emploi et le régime de protection sociale en Allemagne . Malgré les critiques qu'elles ont pu susciter et le débat politique qui se poursuit dans le pays, elles ont été largement maintenues au cours des évolutions législatives suivantes 175 ( * ) et sont devenues un modèle pour la plupart des réformes menées dans les pays européens Elles ont été abondamment commentées, si bien que la présente note se concentrera sur les éléments directement liés à l'accompagnement et au placement des chômeurs.

Créé en 1952, l'Office fédéral du travail ( Bundesanstalt für Arbeit ) était un établissement de droit public placé sous l'autorité du ministre du travail et des affaires sociales, dès l'origine responsable simultanément de l'indemnisation des chômeurs et de leur placement. Avec l'entrée en vigueur le 1 er janvier 2004 de la Loi Hartz III, l'Office fédéral du travail devient l'Agence fédérale pour l'emploi ( Bundesagentur für Arbeit). L'Agence fédérale est un établissement de droit public indépendant disposant de l'autonomie de gestion ( Körperschaft des öffentlichen Rechts mit Selbstverwaltung ) et placée sous la tutelle du ministre fédéral du travail et des affaires sociales 176 ( * ) , ce qui est un modèle courant en Europe pour les instances nationales de coordination du service public de l'emploi tant sur le volet d'indemnisation que pour le placement.

Le ministère fédéral du travail et des affaires sociales, avec l'approbation du ministère fédéral des finances, a conclu à plusieurs reprises des contrats d'objectifs ( Zielvereinbarungen ) avec l'Agence fédérale pour le travail 177 ( * ) . Le dernier a été conclu en mars 2017. Il rappelle et développe les buts principaux fixés par la loi 178 ( * ) à l'ensemble des institutions oeuvrant pour les demandeurs d'emploi : la diminution de la dépendance du chômeur à l'aide publique et son autonomisation; l'amélioration de l'insertion sur le marché du travail soit dans une activité salariée, soit dans une formation professionnelles pleinement qualifiante, soit encore par le passage à l'auto-entreprenariat. 179 ( * ) Cinq axes prioritaires opérationnels ont également été fixés à l'Agence fédérale : accroître l'effort en direction des chômeurs de longue durée par des prestations individualisées et la mobilisation de tous ses partenaires locaux ; accompagner intensivement les demandeurs d'emploi de moins de 25 ans à la fin de leur scolarité et lors de la transition entre les études et l'activité professionnelle ; contribuer à l'égalité des femmes et des hommes sur le marché du travail, en accordant une attention particulière aux mères seules ; agir en direction des personnes malades ou handicapées ; favoriser l'intégration par le travail des migrants. 180 ( * )

En instaurant le principe de collégialité à la tête des organes gestionnaires de l'Agence fédérale pour l'emploi, la loi Hartz III a visé une plus grande transparence, autant qu'un contrôle renforcé de l'action de l'organe fédéral. Ainsi l'Agence fédérale est-elle désormais pilotée par un conseil d'administration ( Verwaltungsrat ) tripartite rassemblant les parties prenantes. Il est composé de 21 membres nommés par le ministre du travail et des affaires sociales et représentant de manière égale les salariés, les employeurs et les administrations publiques. 181 ( * ) Il détermine les orientations stratégiques et les politiques de l'Agence. Il adopte ses statuts et son budget. Il contrôle et conseille le comité de direction ( Vorstand ), qui exerce les responsabilités de gestion opérationnelle et se compose de trois membres : un président directeur général et deux autres membres. 182 ( * ) Il appartient au conseil d'administration de soumettre les candidatures au comité de direction au gouvernement fédéral, qui les proposera au Président de la République fédérale en vue de leur nomination finale.

L'Agence fédérale, dont le siège est installé à Nuremberg, se divise en une centrale nationale responsable de la coordination et de la fixation des objectifs, dix directions régionales, qui sont chargées du succès de la politique régionale de l'emploi et collaborent avec les gouvernements des Länder pour assurer la convergence des efforts, et 156 agences pour l`emploi ( Agenturen für Arbeit ). Celles-ci sont déployées localement pour assurer les prestations offertes aux demandeurs d'emploi dans environ 600 succursales et 300 Jobcenters créés conjointement avec les villes-arrondissements ( Kreisfreie Städte ), catégorie qui rassemble les communes les plus peuplées. 183 ( * )

Les modalités de coopération entre l'État fédéral et les collectivités territoriales en matière de politique de l'emploi, comme souvent dans les politiques publiques allemandes, constituent un enjeu majeur. Entrée en vigueur le 1 er janvier 2005, la loi Hartz IV prévoyait la création de communautés de travail ( Arbeitsgemeinschaften - ARGEn ) chargées de la coordination administrative entre les services déconcentrés des agences pour l'emploi et les services municipaux chargés de l'aide sociale. Arguant d'une violation du principe constitutionnel d'autonomie communale ( kommunale Selbstverwaltung ) 184 ( * ) , des communes allemandes déposèrent des recours devant la Cour constitutionnelle 185 ( * ) fédérale, qui trancha le 20 décembre 2007 en faveur des communes. Par cette même décision, la Cour constitutionnelle fédérale invita le législateur allemand à adopter un nouveau cadre légal avant le 31 décembre 2010. Après des tensions entre le groupe CDU/CSU du Bundestag et le ministère fédéral du travail et des affaires sociales, un compromis fut finalement trouvé à l'été 2010, pour procéder à une modification de la constitution allemande.

La loi modificatrice 186 ( * ) a introduit une exception à l'interdiction d'immixtion de l'État fédéral dans les affaires relevant de l'autonomie locale pour l'exécution des lois fédérales ayant pour objet de garantir une protection de base aux demandeurs d'emploi. Dans cette matière, la règle est que l'État et les Länder ou les communes compétentes collaborent dans des institutions communes 187 ( * ) . Puis, dans la foulée, une loi pour le développement de la protection de base des demandeurs d'emploi 188 ( * ) du 3 août 2010 a acté le remplacement des communautés de travail par les Jobcenters, des structures communes aux agences déconcentrées pour l'emploi et aux communes qui le souhaitaient . 189 ( * )

Parmi les services et prestations d'accompagnement et d'intermédiation légalement dues au demandeur d'emploi régulièrement inscrit, il faut relever qu'il doit être procédé à une évaluation de ses qualifications, de son expérience, de ses aptitudes professionnelles et personnelles dès son inscription. Cette étape est qualifiée d'« analyse de potentiel » ( Potenzialanalyse ) et vise à évaluer le degré de difficulté pour la réinsertion professionnelle et à identifier les éventuels facteurs de complication. 190 ( * ) Ce profilage permet ensuite la conclusion d'un contrat d'intégration ( Eingliederungsvereinbarung ) 191 ( * ) qui fixe pour une durée déterminée l'objectif de réinsertion, les efforts de placement prévus par l'agence pour l'emploi, la fréquence à laquelle le demandeur d'emploi doit faire la preuve de ses propres efforts personnels en vue d'une réinsertion professionnelle et la forme que prendront ces preuves, les prestations d'activation (formation, requalification) pour augmenter le potentiel d'employabilité. Ces engagements doivent être révisés dans un délai maximum de 6 mois, raccourci à 3 mois pour les demandeurs d'emploi âgés de moins de 25 ans 192 ( * ) .

Le développement de la participation des opérateurs privés ( private Arbeitsvermittlungen ) au placement des chômeurs est un axe déjà ancien de la politique allemande et qui se renforce tendanciellement. L'Office fédéral du travail avait perdu le monopole du placement des chômeurs en 1994, avec l'entrée en vigueur de la loi sur la promotion de l`emploi, 193 ( * ) mais l'impulsion décisive date de 2002. 194 ( * ) Depuis cette date, des « chèques recherche d'emploi » ( Vermittlungsgutschein ) 195 ( * ) peuvent être émis par l'agence pour l'emploi pour permettre aux demandeurs d'emploi de s'adresser à un organisme privé de placement de leur choix. Les demandeurs d'emploi bénéficiant d'une allocation et qui n'ont toujours pas été placé après au moins six semaines de chômage au cours des trois derniers mois ont droit au bénéfice du dispositif. 196 ( * )

L'intermédiaire privé doit proposer des mesures appropriées pour réduire la distance au marché du travail, pour déterminer, réduire ou écarter les obstacles au placement, pour placer en emploi salarié, pour familiariser l'exercice d'une profession indépendante ou pour stabiliser une insertion en emploi. La validité du chèque peut être limitée dans le temps ; son utilisation peut être restreinte à un périmètre régional.

La rémunération à laquelle peuvent prétendre les agences privées de placement via le chèque recherche d'emploi peut être forfaitisée. Elle tend à être conditionnée aux résultats obtenus. Elle ne peut généralement excéder 2 000 euros 197 ( * ) , montant maximal correspondant au cas où l'intermédiation est un succès, le demandeur d'emploi ayant retrouvé un emploi stable pour une durée de six mois au moins. Le paiement se fait en deux fois : 1 000 euros au bout de six semaines dans l'emploi, le restant au bout de six mois. 198 ( * )

À l'instar de l'Allemagne, le Danemark est souvent cité comme modèle d'organisation pertinente du marché du travail pour assurer le plein-emploi. Le concept de flexisécurité s'est désormais répandu mais l'organisation de l'accompagnement et du placement des chômeurs est moins connue. Le système danois se caractérise par sa décentralisation poussée et le souci du dialogue avec les partenaires sociaux.

Entre 2007 et 2009, la répartition des compétences entre l'État et les communes en matière de service public de l'emploi a été profondément revue, si bien que depuis le 1 er août 2009, les communes assument seules la gestion et administration des 94 agences locales pour l'emploi. Ces jobcenters ne sont plus des structures partagées avec les services déconcentrés du ministère du travail mais uniquement des organes dédiés de l'administration communales. Le législateur a confirmé en 2014 que les communes avaient la responsabilité des interventions publiques pour l'insertion dans l'emploi ( beskæftigelsesindsatsen ). 199 ( * ) La réforme de 2014 visait à personnaliser davantage les prestations d'insertion dans l'emploi, notamment des chômeurs de longue durée et des jeunes. C'est pourquoi il est apparu pertinent au Danemark d'accorder plus de responsabilités et de liberté aux communes dans l'élaboration des programmes d'accompagnement, tout en responsabilisant davantage les individus dans leur recherche et en durcissant les conditions d'indemnisation.

En revanche, les communes ne sont pas responsables de l'indemnisation du chômage. L'ouverture des droits, le calcul et le versement des allocations sont de la compétence des 25 caisses d'assurance-chômage professionnelles ( arbejdløshedskasse - a-kasse) . On retrouve cette disjonction entre l'indemnisation et le placement en Belgique et en Italie.

En outre, les jobcenters offrent leurs services aux entreprises pour les aider à recruter des personnes sans emploi, à former et à élever le niveau de qualification des nouveaux embauchés, ainsi qu'à maintenir employables leurs employés en congé maladie. 200 ( * )

Le ministère de l'emploi conserve un rôle d'impulsion et de pilotage stratégique, en rendant notamment public annuellement les objectifs de la politique nationale de l'emploi. Ainsi, il apporte son soutien à la mise en oeuvre des réformes par les communes et au développement d'interventions intercommunales. Il supervise et analyse les développements du marché du travail et les effets des actions menées dans les jobcenters. Il agit comme guichet unique et point de contact pour les grandes entreprises dont l`activité couvre tout le pays, ainsi que pour les entreprises qui présentent de forts besoins de recrutement. 201 ( * ) Le ministère de l'emploi intervient depuis 1989 par l'intermédiaire d'une agence gouvernementale qu'il maîtrise et qui a été rénovée pour devenir l'Agence pour le marché du travail et le recrutement ( Styrelsen for Arbejdsmarked og Rekruttering - STAR ) depuis le 1 er janvier 2014.

Dans l'organisation administrative danoise, il est fréquent de diviser l'action de l'État entre les départements du ministère qui définissent la politique à mener sous l'autorité du ministre (préparation des lois et règlements, coordination et planification) et une agence gouvernementale d'exécution agissant par délégation du ministre. La politique nationale de l'emploi illustre cette structure classique. L'agence STAR est elle-même divisée entre une direction centrale et trois directions régionales pour assurer au plus près des communes sa mission de de mise en réseau des jobcenters communaux et de soutien à leur personnel.

Au niveau organisationnel, un système d'information commun 202 ( * ) au ministère de l'emploi, à l'agence STAR et ses directions, aux municipalités et leurs jobcenters et aux caisses d'assurance-chômage permet d'échanger entre les parties prenantes toutes les informations nécessaires et de disposer d'une base de données partagée. Elle est utilisée à la fois comme instrument de coordination des instances et de statistiques et comme outil de contrôle et de suivi du parcours du demandeur d'emploi (inscriptions et désinscriptions dans un jobcenter , appartenance à une caisse d'assurance-chômage, paiement des allocations, entretiens, mesures personnalisées de formation et d'activation, et en général toutes les informations contenues dans l'espace personnel numérique). Les droits d'accès aux données personnelles des demandeurs d'emploi chargées dans le système d'information varient en fonction de l'institution concernée.

La structure de décision et d'exécution articulant État, caisses et communes est doublée aux niveaux national et régional d'organes de concertation rassemblant toutes les parties prenantes.

Au niveau national, le Conseil de l'Emploi ( Beskæftigelsesrådet - BER ), un organe consultatif auprès du ministre qui se réunit au moins six fois par an pour rendre des avis sur les propositions de modifications de la législation, sur les expérimentations et sur les objectifs annuels de la politique de l'emploi. Il comprend un président et 26 membres représentant les syndicats de salariés et des associations d'employeurs, les collectivités territoriales et les organisations de personnes handicapées. Le secrétariat en est assuré par l'agence STAR. 203 ( * )

En outre, les huit Conseils régionaux du marché du travail ( Regionale Arbejdsmarkedråd - RAR ) 204 ( * ) comprenant 21 membres représentant les syndicats de salariés et des associations d'employeurs, les collectivités territoriales et les organisations de personnes handicapées, ainsi que les établissements d'enseignement et de formation professionnelle et les forums locaux pour la croissance 205 ( * ) . L'objectif est d'accroître la coordination des actions de tous ces acteurs, sans enfreindre la compétence des communes. L'accent est mis sur la formation professionnelle et le maintien ou l'élévation du niveau de qualification des demandeurs d'emploi. Depuis 2015, les RAR décident du type de programmes de qualification professionnelle de courte durée, mis en place par les job centers , qui peuvent être subventionnés au titre d'un fonds spécial de 100 millions de couronnes danoises (environ 13,5 millions d'euros). Ils veillent à ce que les programmes de qualification soient adaptés aux besoins des entreprises locales.

En matière de prestations concrètes d'accompagnement et de placement, la réforme de 2014 a voulu intensifier l'aide à la recherche d'emploi dans les premiers mois d'inactivité en imposant le suivi strict d'un parcours de retour sur le marché du travail. Dans les six premiers mois de chômage, le demandeur d'emploi doit assister à six entretiens individuels au jobcenter concentrés sur l'aide à la recherche d'emploi Trois autres rendez-vous sont prévus auprès de sa caisse d'assurance-chômage locale. La coopération entre les jobcenters communaux et les a-kasse chargées du versement des allocations est perçue comme un instrument essentiel pour connecter les politiques passives et actives de l'emploi et en tirer le meilleur parti.

Depuis le 1 er juillet 2015, au plus tard deux mois après son enregistrement pour bénéficier d'une allocation-chômage, le demandeur d'emploi est convoqué par l' a-kasse dont il dépend. L'entretien initial porte sur son parcours, son expérience et son CV. Puis, est organisé un premier entretien personnalisé au jobcenter au plus tard 6 semaines après l'enregistrement. La caisse d'assurance-chômage peut participer à cet entretien, sauf objection du demandeur d'emploi. Ensuite, s'ouvre une période de 5 entretiens mensuels au jobcenter . La caisse peut participer aux deux derniers sauf objection du demandeur d'emploi. Au-delà des six rendez-vous du parcours obligatoire de six mois, les rendez-vous se font trimestriels. Au plus tard 16 mois après l'enregistrement initial, le chômeur se voit offert un programme intensifié (formations professionnalisantes, recours au coaching, entretiens plus fréquents,...).

Le jobcenter est libre à tout moment de mettre sur pied les programmes qu'il estime pertinents et le demandeur d'emploi a le devoir de les accepter. Toutefois, l'idée initiale demeure celle de contractualisation avec la conclusion d'un accord (« Min Plan » 206 ( * ) ) fixant les objectifs d'emploi et de carrière et les étapes à réaliser pour les atteindre. Le respect des engagements conclus dans ce plan de retour à l'emploi conditionne le maintien du bénéfice de l'allocation-chômage.

Une politique forte de dématérialisation a été menée au Danemark pour faciliter la recherche d'emplois. Le principe en est inscrit dans la loi : le ministre de l'emploi doit établir et gérer un site internet pour servir de point d'entrée commun pour les citoyens et les entreprises à tous les jobcenters et caisses d'assurance chômage. 207 ( * ) Le portail www.jobnet.dk accessible à tous les demandeurs d'emploi et les employeurs au Danemark offre non seulement l'accès à une large base de données d'offres de postes vacants et de CV avec des possibilités de candidature directe. Il est obligatoire de déposer un CV récapitulant les études suivies et l'expérience professionnelle sur la base de données pour bénéficier de l'assurance chômage. 208 ( * )

Le portail donne aussi accès à des outils numériques permettant d'accroître l'autonomie du demandeur d'emploi dans sa recherche. Il convient de citer notamment :

- des outils de profilage ( profilafklaringsværktøjet ) dont les données servent individuellement pour définir une stratégie personnalisée et collectivement après reversement dans la base de données nationale pour analyser le marché du travail danois ;

- de tenue d'un journal de recherche d'emploi ( joblog ) ouvert au conseiller emploi et au chômeur qui permet de préparer en amont les entretiens, de superviser entre les entretiens la recherche du demandeur d'emploi.

Jobnet sert aussi d'instrument de contrôle de la réalité des efforts de recherches menées. Le chômeur doit au moins une fois par semaine consulter les offres qui lui correspondent sur le portail et confirmer expressément en ligne son statut de demandeur d'emploi chaque semaine. 209 ( * )

III. LA RECHERCHE DE L'EFFICACITÉ PAR UNE STRICTE POLITIQUE DE RATIONALISATION BUDGÉTAIRE ET DE RESPONSABILISATION INDIVIDUELLE AUX PAYS-BAS ET AU ROYAUME-UNI

Les Pays-Bas ont fait le choix de confier l'accompagnement et le placement des chômeurs à l'organe central de gestion des assurances sociales, l'Institut de mise en oeuvre des assurances des travailleurs ( Uitvoeringsinstituut Werknemersverzekeringen - UWV ). Il s'agit d'un acteur essentiel des politiques sociales néerlandaises. Né en 2002 de la fusion de 6 instances précédentes, l'UWV a reçu du législateur 210 ( * ) la mission générale de mettre en oeuvre les différentes lois de protection sociale des salariés. Il a absorbé en 2009 le Centre pour le travail et les revenus (CWI) qui gérait les bureaux publics de placement. On peut diviser ses missions, constamment amplifiées et reformulées au fur et à mesure que les lois sociales évoluent, en quatre tâches essentielles :

- les évaluations médicosociales visant à déclarer une personne en situation de maladie ou d'inaptitude au travail ( arbeidsongeschiktheid ) 211 ( * ) et la gestion des dispositifs de réintégration et d'accroissement de la participation sur le marché du travail de ces personnes ;

- la gestion des allocations-chômage ( uitkering ) : enregistrement des demandes, calculs, versements, contrôle du respect des obligations ;

- le placement des demandeurs d'emplois et plus largement l'intermédiation entre l'offre et la demande sur le marché du travail ( arbeidsbemiddeling ) 212 ( * ) ;

- la gestion des données ( gegevensbeheer ), l'UWV servant de guichet unique d'enregistrement en matière de travail, de revenus et d'allocations de telle sorte que les personnes concernées n'aient qu'une seule fois leurs données personnelles à transmettre aux autorités néerlandaises.

L'UWV a été constitué comme une autorité administrative indépendante ( zelfstandig bestuursorgaan - zbo ) dotée de la personnalité morale 213 ( * ) . Il est placé sous la tutelle du ministre des affaires sociales et du travail mais revêtu d'une autorité publique propre ( openbaar gezag ), il échappe au contrôle hiérarchique direct du ministre. Sous la direction d'un conseil d'administration de 3 membres, il doit appliquer la politique sociale décidée par le gouvernement, sans en assumer la responsabilité politique devant le Parlement, mais il décide lui-même des voies et des moyens pour la mettre en place dans les limites de son budget. C'est par la contrainte financière, par l'encadrement du mandat des membres du conseil d'administration et par leur nomination qui lui revient que le ministre des affaires sociales peut amener l'UWV à infléchir son action.

Structurellement, les quatre missions fondamentales de l'UWV sont attribuées à quatre divisions différentes. C'est la division WERKBedrijf qui s'occupe du placement des chômeurs, de la réintégration dans le marché du travail des personnes qui en sont éloignées, de l'enregistrement des demandeurs d'emplois et des emplois vacants ( vacatures ) et, en général, de tous les dispositifs d'intermédiation visant à faire concorder l'offre et la demande d'emplois. 214 ( * )

Une grande réforme a eu lieu en 2012 pour alléger les prestations globales de l'UWV destinés aux demandeurs d'emploi et les recentrer sur les publics plus en difficulté, responsabiliser davantage demandeurs d'emploi et entreprises et laisser plus de tâches aux collectivités et aux agences d'intérim privées ( uitzendbureaus ). Grâce à la dématérialisation généralisée et à la mise en retrait de l'organisme dans un rôle d'accompagnement seulement complémentaire des efforts individuels, l'achèvement de la réorganisation de l'UWV devait rendre le service public de l'emploi néerlandais plus souple et plus efficace tout en réalisant des économies budgétaires massives.

Il convient de relever qu'au cours de la réforme a été supprimé l'ancien Conseil pour le travail et les revenus ( Raad voor Werk en Inkomen ) qui avait un rôle consultatif. Ainsi, les partenaires sociaux ont perdu toute inscription institutionnelle dans le système de mise en oeuvre de la politique de l'emploi défini par la loi en 2001. Cela ne les empêche pas d'émettre des avis informels et d'interpeller le gouvernement sur sa politique sociale.

La réforme s'est placée sous l'égide du slogan « Du travail plutôt qu'une allocation » 215 ( * ) . Elle visait à responsabiliser davantage les demandeurs d'emploi et les entreprises, l'UWV ne devant plus assurer qu'un rôle complémentaire. Les prestations de service d'accompagnement intensif et personnalisé pour préparer la réintégration sur le marché du travail ont été ciblées sur les personnes les plus éloignées de l'emploi (personnes handicapées ; jeunes sans formation ; inaptes ; seniors) et ne s'adressent plus en principe aux simples demandeurs d'emploi, titulaires de l'allocation chômage classique 216 ( * ) ou encore dans l'emploi mais en attente d'un licenciement notifié.

Pour ces derniers, bien que la loi sur le chômage de 1986 reconnaisse à chaque travailleur le droit à un soutien pour son insertion dans l'emploi 217 ( * ) , on en est revenu largement à un travail d'intermédiation basique, qui ne prévoit pas nécessairement de rencontres en face à face avec un conseiller-emploi dédié ( adviseur ). Toutefois, en 2016, le gouvernement a relâché partiellement cette approche par groupes cibles pour accorder plus d'espace à la personnalisation de l'accompagnement pour un public de demandeurs d'emploi plus large, en incluant ceux qui n'ont qu'entre 25 % et 50 % de chance de retrouver un emploi en un an après évaluation de leur profil par l'UWV. 218 ( * )

En particulier, le ministère des affaires sociales et du travail a ouvert 150 millions d'euros pour financer des aides à la formation. Ainsi les demandeurs d'emplois qui sont régulièrement inscrits auprès d'UWV et qui souhaitent suivre une formation dirigée vers un métier d'avenir en tension ( kansberoep ) et reconnue par l'État, peuvent recevoir des chèques-formation ( scholingsvoucher ) d'un montant maximal de 2 500 euros. 219 ( * ) Le succès de cette mesure est tel que par exemple en 2017, les crédits alloués étaient épuisés dès le 3 mars, si bien que la distribution de chèques-formation s'est arrêtée à cette date.

Un second dispositif vise spécifiquement une aide aux formations longues alternées débouchant sur un contrat de travail garanti par le futur employeur pour une durée d'au moins 6 mois. Dans ce cas, l'UWV accorde le maintien intégral de l'allocation-chômage ( brug-WW ) pendant le temps de la formation et son cumul avec huit heures de travail rémunérées auprès du futur employeur. En outre, l'UWV peut autoriser le maintien de l'allocation-chômage lors d'un placement à l'essai 220 ( * ) ( proefplaatsing ) chez un employeur.

Le nouveau gouvernement Rutte III réfléchit à de nouvelles mesures pour prolonger l'effort de personnalisation qui avait été mis de côté au profit de la digitalisation du placement et de l'accompagnement.

Comme au Danemark, un des axes essentiels de la réforme fut en effet la dématérialisation. Désormais, l'intermédiation est largement réalisée en ligne sur le site www.werk.nl : enregistrement des demandeurs d'emploi et de leur CV ; enregistrement des offres d'emplois transmises par les entreprises au sein de la plus grande base de postes vacants des Pays-Bas ; questionnaire sur les compétences pour définir des profils d'emploi et évaluer les chances de retrouver un emploi ( Werkverkenner ) ; moteurs de recherche pour sélectionner les offres et possibilité de déposer sa candidature à une offre repérée directement en ligne.

C'est sur le même site que l'on doit faire en ligne sa demande d'allocation-chômage. Ce système centralisé facilite également le contrôle par l'UWV de l'obligation de recherche active d'emploi qui pèse sur les demandeurs d'emploi. Hors cas particuliers justifiant des dérogations, en principe, le demandeur d'emplois doit postuler au moins à quatre offres en quatre semaines.

Tous les éléments sont rassemblés dans une interface et un dossier électronique individuel ( Mijn Werkmap). Par cette interface, tout demandeur d'emplois régulièrement inscrit communique avec l'UWV, envoie et reçoit des messages, des questions, des rapports, des conseils pour faciliter sa recherche d'emplois. Il reçoit également par cette interface les invitations éventuelles à rencontrer un conseiller dans une antenne du service public de l'emploi installée près de chez lui. Il peut s'inscrire à des formations ou des ateliers en ligne ou en présentiel. Il sollicite les chèques-formation et tout aide financière complémentaire en ligne. Des après-midi portes ouvertes sont organisées dans les antennes physiques d'UWV spécifiquement pour donner tous les renseignements sur les ressources numériques du site Internet et sur l'utilisation du dossier électronique individuel.

Enfin, il est indéniable que la réforme menée en 2012 avait aussi pour but de réaliser d'importantes économies budgétaires ( bezuinigingen) en période de crise. Le budget de l'UWV a été en fait réduit de moitié et son implantation territoriale drastiquement réduite de plus des deux tiers. Des 98 antennes précédentes, il ne reste plus que 30 antennes dont la localisation correspond approximativement aux 35 différents bassins de coopération pour le marché du travail ( arbeidsmarktregio's ).

Le 11 juillet 2012, un accord a en effet été conclu entre l'association des maires néerlandais VNG, l'UWV et le ministère des affaires sociales pour dessiner la carte des nouveaux bassins de coopérations régionaux, les communes ayant une responsabilité particulière en matière d'action sociale et à l'égard des personnes les plus éloignées du marché du travail. Un Conseil stratégique national ( Programmaraad ) coordonne les différentes actions et apporte son soutien aux acteurs régionaux.

Les évaluations de la réorganisation du service public de l'emploi néerlandais menées par l'institut de recherches Panteia en 2015, l'inspection des affaires sociales néerlandaise en 2016 et par la Cour des comptes néerlandaise en 2017 ont noté qu'elle avait été caractérisée par une étatisation et une centralisation accrue du système au nom de l'efficacité, de l'égalité de traitement et de la gouvernabilité. Les coupes budgétaires ont transitoirement affectées au moins jusqu'en 2015 la qualité du service d'autant que le nombre de demandeurs d'emplois avait augmenté sous l'effet de la crise économique. C'est pourquoi le gouvernement néerlandais a remis l'accent sur la personnalisation des prestations de l'UWV en 2016. Progressivement, la dématérialisation portée par le site werk.nl porte ses fruits.

De même, la coopération entre les communes et l'UWV a pâti de la refonte du maillage territorial mais progressivement la situation s'améliore. En particulier, les communes et l'UWV ont construit des points-service-employeurs ( werkgeversservicepunt ) qui sert de guichet unique aux entreprises pour les aider à recruter le personnel adapté à leurs besoins, à remplir les offres vacantes dans les métiers en tension et à créer des places de travail adaptées pour les personnes handicapées ou très éloignées de l'emploi.

Parallèlement, l'UWV accroît sa coopération avec les agences de placement et d'intérim privées. En 2016, 93 000 demandeurs d'emploi ont retrouvé un travail grâce à un contrat d'intérim, dont seulement 9 % pour moins de 6 mois et plus de la moitié pour au moins un an. L'Institut souhaite qu'en 2020 au moins 20 % des personnes envoyées en intérim bénéficie d'une formation pour accroître leur chance de rester en emploi. L'UWV travaille avec les agences privées à monter des stages et des formations ciblées pour placer les allocataires des prestations chômage dans des métiers en tension (charpentier-menuisier, maçon, soudeur, mécanicien, magasinier, logisticien, dans l'entretien des espaces verts et l'horticulture). 221 ( * )

Le Royaume-Uni (Angleterre et Pays de Galles) a connu d'importantes réformes du marché du travail sous le premier gouvernement Cameron entre 2010 et 2015 sur la base d'une revue de l'état du droit du travail ( employment law review ). Ces réformes ont concerné notamment la refonte du droit du licenciement, la création d'un statut de travailleur actionnaire, l'intensification du recours au contrat « zéro heures » sans garantie d'un nombre minimal d'heures travaillées, la révision de la politique d'allocations et d'aides sociales. En matière d'accompagnement et de placement des chômeurs, la philosophie déjà ancrée de l'activation de la politique de l'emploi a été prolongée. Outre le renforcement du contrôle des obligations des demandeurs d'emploi et un durcissement des conditions d'allocations, la transformation a porté sur les structures chargées du service public de l'emploi et sur la mise en place de programmes pluriannuels ciblés sur certains publics (jeunes, chômeurs de longue durée).

En 2001 avait été créé par fusion du service public chargé du placement et de l'agence chargée des allocations chômage, une nouvelle agence gouvernementale autonome ( executive agency, quango ), dirigée par un Conseil d`administration, Jobcentre Plus (JCP). Ce mouvement de fusion et de création d'un guichet unique sous l'égide d'une autorité indépendante anticipait sur des réformes analogues dans les autres pays européens. Mais, en 2011, le Gouvernement britannique a pris la décision d'abroger le statut d'agence de Jobcentre Plus pour le réintégrer comme service du ministère des affaires sociales ( Department for Work and Pensions ). Ce fonctionnement en régie directe par le ministère en charge de toute la politique de l'emploi démarque le Royaume-Uni des autres pays de l'échantillon considéré. La décision a été motivée par l'objectif de réduction de 40 % de ses frais de fonctionnement imposée au ministère des affaires sociales et aux organes sous sa tutelle.

Jobcentre Plus conserve néanmoins, en tant que service ministériel, sa double mission de gestion des allocations et d'intermédiation sur le marché du travail. La première mission est touchée par la transformation du régime d'aides avec l'introduction d'une prestation universelle Universal Credit fusionnant progressivement 6 précédentes allocations et crédits d'impôts, ainsi que le durcissement des conditions et des contreparties demandées aux chômeurs sous l'empire de la loi de réforme de la protection sociale de 2012 222 ( * ) . La seconde mission a été concernée par la politique de dématérialisation en complément des entretiens en face-à-face avec un conseiller ( job coach ) et par l'ouverture de programmes spéciaux comme Work Programme pour les chômeurs de longue durée et Work Choice pour les demandeurs d'emploi souffrant d'un handicap. 223 ( * )

En novembre 2012 a été lancé Universal Jobmatch qui offre gratuitement à la fois une base d'offres d'emploi vacantes et un portail de recrutement en ligne ouvert à la fois aux bénéficiaires d'une allocation chômage et à toute personne cherchant un poste. Les bénéficiaires d'une allocation sont tenus de s'inscrire sur le site, qui est aussi accessible sur des terminaux informatiques installés dans les antennes locales de Jobcentre Plus. Leur activité de recherche d'emploi en ligne peut être surveillée par les conseillers emplois soit pour assurer un suivi entre les entretiens personnalisés, soit pour contrôler leurs obligations en contrepartie du bénéfice de l'allocation chômage.

Il semble que les fonctionnalités accessibles par ce portail Internet soient toutefois moins diverses et avancées que celles qui sont offertes sur les sites analogues au Danemark, aux Pays-Bas, en Flandre ou en Italie par exemple. La Chambre des Communes dans un rapport d'évaluation de 2014 a reconnu l'apport de Universal Jobmatch dans l'intermédiation tout en notant la tension entre la fonction de contrôle des obligations et la fonction de soutien à la recherche d'emploi, en relevant des imperfections dans la mise en ligne des offres d'emplois (doublons, mauvaise indexation, péremption des postes) et en souhaitant le développement de fonctionnalités permettant aux chômeurs de mieux évaluer leurs chances avant de postuler afin de cibler leurs efforts. 224 ( * )

En principe, les demandeurs d'emploi bénéficient d'un entretien initial de 40 mn dans une antenne au cours duquel est effectué un profilage et signée une convention de recherche d'emploi ( jobseeker agreement ) définissant leurs obligations. 225 ( * ) Puis, ils bénéficient d'entretien de suivi ( job-search review) en général toutes les deux semaines. Ces entretiens sont très brefs (4-7 mn d'après le National Audit Office ). Avec le ralentissement économique, leur durée a eu tendance à diminuer. Certains sont conduits par téléphone ou en groupe. Les entretiens personnalisés en profondeur ( work-focused interwiews ) sont organisés à la discrétion des conseillers emplois. 226 ( * )

L'action de Jobcentre Plus a aussi nettement évolué avec l'instauration du Work Programme 227 ( * ) , qui remplaça de juin 2011 à avril 2017 une série de dispositifs d'aide ciblés sur des publics précis qui avaient été mis en place par les précédents gouvernements travaillistes. L'idée était de désegmenter le soutien aux personnes les plus éloignées du marché du travail, de donner plus de latitude aux conseillers de Jobcentre Plus dans l'appréciation des situations et des instruments à mobiliser, enfin d'accroître le rôle des agences privées de placement en synergie avec un service public de l'emploi budgétairement contraint.

Étaient éligibles les bénéficiaires d'allocation sans emploi en principe depuis un an, mais la durée de chômage minimale pour être admis était réduite pour les jeunes de moins de 25 ans et d'autres publics très désavantagés dans leur recherche d'emploi en raison d'une incapacité (maladie,...) ou de leur situation (ancien détenu, ancien membre des forces armées, sans domicile fixe...). Il appartenait au conseiller de l'antenne locale de Jobcentre Plus d'adresser le chômeur aux acteurs privés gérant le programme. En fonction de leur situation, l'affectation et la participation au programme, qui pouvait durer jusqu'à deux ans, étaient obligatoires (cas fréquent) ou facultatives. Le programme était piloté par des agences privées de placement sous contrat qui disposait d'une très large liberté pour définir un parcours personnalisé de sortie du chômage et des actions d'accompagnement vers l'emploi adaptées aux personnes qui lui étaient adressées.

Dans ce dispositif, comme dans les mécanismes allemand et italien de chèque-reclassement, l'opérateur privé était payé aux résultats. Dans les trois premières années d'exercice, les opérateurs privés recevaient une faible rémunération d'entrée ( attachment payment) pour chaque chômeur qui leur était adressé. Ce forfait fut ensuite supprimé à partir de la 4 ème année de mise ne oeuvre du dispositif. Trois éléments de rémunération dépendaient ensuite de l'efficacité de l'opérateur à sortir la personne du chômage :

- un paiement à l'entrée dans l'emploi ( job outcome payment ), en principe lorsque le chômeur retrouve un emploi stable, versé au bout de 26 semaines dans l'emploi ;

- un paiement à la conservation de l'emploi ( sustainment outcome payment ), sous forme de sommes versées à l'agence privée toutes les 4 semaines supplémentaires où la personne placée reste dans l'emploi au-delà des 26 premières semaines. Ces versements pouvaient durer jusqu'à 52 semaines ;

- une prime supplémentaire ( incentive payment ) en cas de surperformance par rapport à un objectif fixé par le ministère de l'emploi sur le volume de chômeurs adressés à l'opérateur privé de placement.

Quantitativement, 1,81 million de demandeurs d'emploi ont participé au Work Programme entre juin 2011 et décembre 2015, 503 000 ont retrouvé un emploi stable résultant dans le paiement de l'opérateur privé. 228 ( * ) Ces résultats ont été considérés comme décevants, si bien qu'en novembre 2015, le gouvernement britannique a indiqué qu'il préparait le remplacement de Work Programme et Work Choice par un nouveau Work and Health Programme. Le principe de la délégation aux opérateurs privés des publics de chômeurs les plus difficile est conservé, de même que le paiement aux résultats, mais le nouveau programme sera plus restreint puisque son financement se montera à 130 millions £ (environ 145 millions d'euros) par an à partir 2019-2020 contre 416,4 millions £ (environ 470 millions d'euros) pour le seul Work Programme sur 2015-2016. Il restreint nettement les conditions d'éligibilité : il faudra désormais avoir passé deux ans sans emploi contre un an au plus dans l'ancien programme. Il sera rendu systématiquement facultatif. Aucune classe de chômeurs ne sera tenue d'y participer. Après une mise en oeuvre initiale au Nord-Ouest de l'Angleterre et au Pays de Galles fin 2017, il sera progressivement étendu au reste de l'Angleterre et en Ecosse en 2018. 229 ( * )

IV. DES ENJEUX FORTS DE PILOTAGE STRATÉGIQUE ET DE COORDINATION DES ACTEURS TERRITORIAUX ET PROFESSIONNELS EN ESPAGNE, EN ITALIE ET EN BELGIQUE

La dernière refonte du service public de l'emploi en Espagne date de 2015 230 ( * ) , lorsque le Gouvernement a été habilité à réviser le texte de la loi sur l'emploi de 2003. 231 ( * ) Pour accroître l'efficacité de la politique de l'emploi, compétence partagée entre l'État et les Communautés autonomes, et améliorer l'utilisation des fonds publics dans un contexte budgétaire très difficile, le gouvernement espagnol avait auparavant élaboré une nouvelle Stratégie espagnole d'activation pour l'emploi 232 ( * ) , en concertation avec les Communautés autonomes en associant les partenaires sociaux et articulée autour de six axes : orientation, formation, opportunité d'emploi, égalité des chances dans l'accès à l'emploi, incitation à l'entrepreneuriat et amélioration du cadre institutionnel du Système national de l'emploi.

Institutionnellement, la gestion de la politique de l'emploi est confiée au Système national de l'emploi qui recourt expressément à trois types d'instruments, l'intermédiation entre l'offre et la demande sur le marché du travail, les politiques actives de l'emploi et la coordination entre ces dernière et les transferts financiers contre le chômage. 233 ( * ) Le Système national de l'emploi est formé de la réunion du Service public d'État de l'emploi ( Servicio Público de Empleo Estatal - SEPE ) et des services publics de l'emploi des Communautés autonomes, qui doivent garantir à tout citoyen, dans des conditions de parfaite égalité, l'accès à des prestations gratuites. Il comprend deux organes : la Conférence sectorielle de l'emploi et du travail, forum de coopération entre l'État et les régions autonomes, et le Conseil général du système national de l'emploi, instance tripartite État-régions-partenaires sociaux capable de convenir d'accords généraux sur la politique d'emploi et de formation professionnel. 234 ( * )

C'est au Système national de l'emploi que revient la coordination de la stratégie espagnole d'activation pour l'emploi et sa déclinaison en plans annuels pour l'emploi. À l'appui de sa mission d'impulsion, de coordination, d'harmonisation et d'adaptation des services publics nationaux et régionaux de l'emploi, il peut compter sur un système d'information unifié, inscrit dans la loi, commun à toutes les structures, et destiné à intégrer toutes les données collectées : registre des demandeurs d'emploi, suivi de leur parcours et de leurs relations avec les services publics de l'emploi, suivi des actions d'orientation et de formation professionnelle, recours à des bureaux de placement extérieurs, statistiques.

Au niveau non plus stratégique mais opérationnel, la direction de la mise en oeuvre des politiques de l'emploi appartient au Service public d'État de l'emploi (SEPE) et aux services publics de l'emploi de chaque Communauté autonome.

Tout comme la plupart de ses homologues européens, le SEPE 235 ( * ) est une autorité administrative indépendante ( organismo autónomo de la Administración General del Estado ), sous la tutelle du ministre de l'emploi et de la sécurité sociale. Créé en 2003 pour remplacer l'ancien Institut national de l'emploi, il est doté de la personnalité morale et de l'autonomie de gestion, il dispose d'un patrimoine et d'une trésorerie propres. Sa direction est confiée à un directeur général, nommé par décret royal en conseil des ministres sur proposition du ministre et tutelle. Le directeur général répond à deux organes de supervision : le Conseil général (24 membres) et la Commission exécutive centrale (9 membres) qui en est un démembrement. Ces deux organes sont paritaires en étant composé d'autant de représentants de l'administration d'État que de représentants des employeurs et des salariés. 236 ( * )

Le SEPE est compétent pour gérer les allocations chômage et autres aides financières diverses ( prestaciones por desempleo ), définir au niveau national des dispositifs opérationnels d'orientation et de formation professionnelle en fonction des besoins des personnes et des entreprises, et réaliser des études et des analyses sur la situation du marché du travail et les mesures susceptibles de l'améliorer. C'est à lui également que revient de porter le système d'information unifié.

Les missions d'intermédiation stricto sensu , d'accompagnement présentiel personnalisé non seulement des demandeurs d'emplois, mais aussi des entreprises qui cherchent à recruter, sont assumées par les services publics de l'emploi des communautés autonomes. Tout chômeur a le droit, garanti par la loi, à l'élaboration d'un itinéraire individuel et personnalisé vers l'emploi, qui commence nécessairement par un premier entretien qui permet l'inscription du demandeur d'emploi et l'évaluation des prestations requises pour son insertion sur le marché du travail. 237 ( * )

Toutefois, le SEPE prend toutefois un rôle grandissant dans l'intermédiation via la politique de dématérialisation progressive : il gère en effet le portail www.empleate.gob.es accessible aux demandeurs d'emploi et aux entreprises qui agrègent toutes les données des portails locaux et également des bureaux de placement partenaires. Néanmoins, la politique de dématérialisation est moins poussée qu'au Danemark, aux Pays-Bas ou en Flandre, très en pointe.

L'Espagne a clairement fait le choix de maintenir une forte implantation territoriale et un accompagnement en présentiel généralisé. À côté de ses services centraux, le SEPE est tenu par la loi de déployer un réseau déconcentré sur l'ensemble du territoire. Il comprend 52 directions, une par province et celles de Ceuta et de Melilla. En outre, il déploie un vaste réseau d'antennes qui sont distribuées dans toutes les provinces et partagent leurs locaux avec les services publics de l'emploi des communautés autonomes, ce qui permet d'offrir un guichet unique aux usagers.

La collaboration entre le service public de l'emploi et les bureaux de placement ( agencia de colocación ) a été facilitée les dernières années et constitue aussi un des axes de réforme mis en avant par le gouvernement espagnol. Soumises à une réglementation propre, ces agences généralement privées peuvent être utilisées par le SEPE et les services des Communautés autonomes lorsqu'elles l'estiment nécessaire pour accélérer le retour à l'emploi de certains chômeurs. Depuis juillet 2014, les bureaux de placement n'ont plus besoin d'une autorisation préalable du service public de l'emploi, ni national, ni régional, pour proposer leurs prestations aux chômeurs. 238 ( * ) Elles en font simplement déclaration au service compétent.

Des conventions de partenariat peuvent être conclues entre les services publics de l'État ou des Communautés autonomes et les bureaux de placement. Par ce biais, les agences de placement privées peuvent se voir reconnues comme collaboratrices du service public et peuvent recevoir des subventions publiques. Elles s'engagent à offrir leurs prestations gratuitement aux demandeurs d'emploi et aux entreprises, le service public de l'emploi contractant s'engage pour sa part à assumer la charge financière correspondante selon les termes inscrits à la convention. Pour garantir une harmonisation des termes des conventions, le SEPE a finalisé en 2014 un Accord cadre définissant la procédure des agences de placement amenées à collaborer au service public de l'emploi. La plupart des Communautés autonomes 239 ( * ) y ont adhéré et une liste de 80 agences sélectionnées a été publiée au bulletin officiel.

Une telle répartition coordonnée des compétences entre l'État, agissant par le biais d'une agence nationale de pilotage de l'activation des politiques de l'emploi, les régions chargées du placement et de l'accompagnement de proximité, et des agences privées collaborant au service public, imprègne également très nettement le modèle de l' Italie . Toutefois, à la différence de plusieurs pays européens, notamment l'Allemagne, les Pays-Bas, le Royaume-Uni et l'Espagne, le calcul et le versement des différentes allocations ne sont pas confiés à une structure chargée aussi de l'accompagnement et du placement des chômeurs. La coordination des nombreuses structures existantes et l'articulation entre les politiques d'activation et d'indemnisation demeurent un enjeu en Italie.

L'état actuel du service public de l'emploi italien découle de trois vagues de réformes : les lois de décentralisation Bassanini de 1997 240 ( * ) sous le gouvernement Prodi, la loi Biagi 241 ( * ) de 2003 sous le gouvernement Berlusconi et le paquet « Jobs Act » 242 ( * ) de 2014-2015 sous le gouvernement Renzi. La première réforme transforme le système public de placement des chômeurs en instituant des centres pour l'emploi ( centri per l'impiego - cpi ) placés sous l'autorité des régions et régis par une législation différenciée adoptée par les régions elles-mêmes, dans le respect des garanties apportées par les lois nationales. La deuxième visait notamment à donner un cadre aux agences privées de placement, de recrutement et de travail temporaire ( agenzie per il lavoro ) avec accréditation auprès des autorités. La dernière réforme a revu les prestations d'indemnisation du chômage, dont la tutelle demeure confiée à la Sécurité sociale italienne ( Istituto Nazionale della Previdenza Sociale - INPS ), et mis l'accent sur l'activation des politiques de l'emploi, tâche confiée à une nouvelle agence nationale, l' Agenzia Nazionale per le Politiche Attive del Lavoro (ANPAL). L'accompagnement et le placement des chômeurs en Italie dépend désormais du réseau formé par l'ANPAL, les centres pour l'emploi des régions et les agences privées de placement.

Le pilotage et la coordination du réseau des structures publiques et privées dans le secteur de l'emploi sont assurés par l'ANPAL, qui est dotée de la personnalité morale, de l'autonomie organisationnelle, réglementaire, administrative et comptable, sous la tutelle du ministre du travail et des affaires sociales. 243 ( * ) L'Agence est dirigée par un conseil d'administration de trois membres : le président est nommé par décret du Président de la République sur proposition du ministre de tutelle, les deux autres membres sont nommés par décret du Président du Conseil, l'un sur proposition de la Conférence des régions et des provinces autonomes italiennes, l'autre sur proposition du ministre de tutelle. Le conseil d'administration est épaulé par un conseil de surveillance de 10 membres désignés par les partenaires sociaux, qui formule des propositions sur la stratégie et les lignes directrices de la politique décidées par le conseil d'administration. Les services de l'ANPAL sont placés sous la direction d'un directeur général nommé par décret du Président de la République sur proposition du ministre de tutelle. 244 ( * )

Suivant un modèle que l'on peut considérer comme classique en Europe occidentale, l'ANPAL met en oeuvre le système d'information unifié 245 ( * ) permettant la collecte et la mise à disposition de tous les acteurs concernés, y compris la Sécurité sociale italienne, les chambres de commerce et d'industrie et les Régions, des données sur le demandeur d'emploi et son parcours. Toutes les données sont rassemblées dans un dossier électronique personnel ( fascicolo elettronico del lavoratore ) qui facilite à la fois l'accompagnement, le suivi de prestations offertes et des formations et le contrôle des obligations. La dématérialisation concerne également les contacts avec les demandeurs d'emploi, puisque sur le portail de l'ANPAL www.anpal.gov.it , ces derniers peuvent :

- s'enregistrer en remplissant en ligne une déclaration de disponibilité immédiate ( dichiarazione di immediata disponibilità - DID ) aussi bien que dans un centre pour l'emploi ;

- remplir des questionnaires pour définir un profil d'employabilité ( profilo personale di occupabilità ) ;

- télécharger leur CV et consulter les offres d'emploi ;

- solliciter les aides auxquelles ils ont droit ;

- prendre rendez-vous dans un centre pour l'emploi pour engager leur parcours personnalisé.

Chaque demandeur d'emploi régulièrement inscrit doit conclure un pacte de service personnalisé avec un centre pour l'emploi qui contient la désignation d'un conseiller référent, la description du profil d'employabilité selon les modalités définies nationalement par l'ANPAL, les obligations de recherche d'emploi à la charge du chômeur, la fréquence des contacts avec le conseiller, l'engagement du demandeur d'emploi à suivre des formations, des parcours de requalification ou de renforcement des compétences et à accepter des offres d'emploi adéquates ( congrue ), selon les critères définis par l'ANPAL. 246 ( * )

La définition du profil personnel d'employabilité vise à mesurer la distance du demandeur au marché du travail. Elle prévoit le calcul du niveau de désavantage et de la probabilité de rester inemployé pendant un temps déterminé, indépendamment des causes initiales de la perte d'emploi. L'ANPAL distingue des facteurs individuels (genre, âge, nationalité, niveau d'études) et collectifs (dynamisme du marché du travail local, fréquence du chômage dans les familles de la région, densité entrepreneuriale) Un logiciel de l'ANPAL pondère ces critères en fonction des données transmises par le demandeur d'emploi lors de son enregistrement en ligne. Le niveau de désavantage comparatif du chômeur est ainsi calculé et ramené à une valeur comprise entre 0 et 1 : avec un indice proche de 0, on propose directement des offres de travail avec un contrat de travail immédiat ; avec un indice proche de 1, on envisage un parcours de requalification complète. Cette mesure quantitative aiguille le conseiller du centre pour l'emploi au moment de la conclusion du pacte de service personnalisé ; elle est ensuite réévaluée tous les 90 jours en fonction de l'évolution de la situation du chômeur.

Si, au bout de quatre mois du bénéfice de l'allocation-chômage refondue en 2014 ( Naspi ), le demandeur d'emploi n'a pas retrouvé de travail, il peut bénéficier d'un chèque-reclassement ( assegno di ricollocazione ) 247 ( * ) , selon des modalités proches du cas allemand. La demande peut être réalisée sur le portail de l'ANPAL ou auprès d'un centre pour l'emploi. Le chômeur choisit librement son prestataire, qui peut donc être une agence privée de placement accréditée. L'ANPAL tient le registre des opérateurs privés accrédités. Un programme intensif de recherche de travail avec désignation d'un tuteur est défini avec le prestataire sur 6 mois, reconductible une fois. Le montant du chèque-reclassement varie entre 250 et 5 000 euros en fonction du profil d'employabilité et du résultat. La particularité est que les sommes ne sont en effet versées au prestataire qu'en cas de réussite du placement avec l'obtention d'un contrat de travail à durée indéterminée, un contrat à durée déterminée d'au moins 6 mois 248 ( * ) , un contrat à temps partiel au moins à mi-temps ou un contrat d'apprentissage.

L'articulation du service public de l'emploi en Belgique reflète l'organisation fédérale du pays, de telle sorte que la décentralisation y est encore plus poussée qu'en Espagne et en Italie, au risque du cloisonnement géographique du marché du travail. Il faut distinguer les responsabilités au niveau fédéral d'une part, au niveau des régions (Flandres, Bruxelles-capitale et Wallonie) et communautés (française, flamande et germanophone), d'autre part.

L'Office national de l'emploi (ONEM) est une institution fédérale chargée pour l'ensemble du pays de l'assurance-chômage. Il évalue l'éligibilité des demandeurs d'emplois à une indemnisation, ouvre les droits, calcule le montant et assure le versement. En revanche, l'accompagnement vers l'emploi, les mesures d'activation et d'intermédiation relève de trois organismes régionaux et d'un organisme propre à la communauté germanophone.

Le contrôle des efforts de recherche d'emploi des bénéficiaires d'allocations de chômage ou d'insertion appartient également aux compétences des organismes régionaux. Une coopération interrégionale baptisée Synerjob a été mise en place à partir de 2007 entre les organismes régionaux pour tenter de limiter la fragmentation excessive du marché du travail belge et de faciliter la mobilité des demandeurs d'emploi.

La coupure entre politique passive et active de l'emploi est le reflet d'une division verticale entre l'État belge et les régions autonomes, alors qu'avant la régionalisation entre 1984 et 1989 de l'intermédiation et du placement des chômeurs, l'ONEM assurait une gestion centralisée et globale. Toutefois, les organismes régionaux de l'emploi peuvent aussi faire bénéficier certains publics d'aides particulières (aides à la mobilité, à la formation, en cas de reconversion d'entreprise ; aides spécifiques pour travailleurs handicapés, jeunes ou séniors sans emploi). La multiplication des aides à l'emploi régionales s'est amplifiée avec l'approfondissement du transfert de compétences en 2015.

Le danger réside plutôt dans le risque de dispersion inefficace des fonds, d'illisibilité et d'incohérence du schéma général tant pour les employeurs que pour les demandeurs d'emploi. Une rationalisation du régime des aides complémentaires de l'assurance chômage est d'ailleurs intervenue en Wallonie en 2017 pour en diminuer le nombre des ¾ par suppression ou fusion de dispositifs. Quatre nouvelles aides ciblées ont vu le jour au 1 er juillet 2017 mais reprennent des formes de subvention et de contrats aidés très classiques :

- « impulsion insertion » pour les jeunes de moins de 25 ans inoccupés depuis 18 mois avec un contrat de travail à temps plein sur 12 mois ;

- « impulsion - 25 ans » qui constitue une allocation pour les demandeurs d'emplois de moins de 25 ans peu ou moyennement qualifiés ;

- « impulsion 12 mois + » qui constitue une allocation pour les demandeurs d'emplois inoccupés depuis plus d'un an ;

- « impulsion 55 ans + » qui prend la forme de réduction de cotisations sociales patronales en cas d'embauche d'un sénior de 55 ans et plus.

On se concentrera dans la présente note sur le Forem, qui constitue le service public wallon de l'emploi et de la formation professionnelle, et son pendant flamand le VDAB. 249 ( * ) Les deux organismes ont des statuts analogues : ce sont des organismes d'intérêt public dotés de la personnalité juridique et de l'autonomie de gestion, sous la tutelle de leur gouvernement régional respectif. 250 ( * ) Elles sont gérées par un Comité de gestion ou Raad van Bestuur composé essentiellement de représentants des salariés et des employeurs, qui ont seuls voix délibérative et sont désignés par leurs organisations représentatives. Les présidents sont nommés par les gouvernements régionaux. Deux commissaires des gouvernements wallon ou flamand respectivement assistent aux réunions.

Des contrats pluriannuels de gestion ou beheersovereenkomsten sont en principe conclus entre le Forem et le gouvernement wallon et entre VDAB et le gouvernement flamand pour fixer des priorités et définir les engagements réciproques de chacune des parties. Cependant, en 2014, le gouvernement flamand n'a pas souhaité prolonger la méthode. Désormais le cadre à moyen terme des orientations du VDAB comme d'autres agences flamandes défini dans un document d'orientation global ( beleidsnota ) pour le secteur « Emploi, Économie, Recherche et Innovation » préparé par le gouvernement régional. La Wallonie poursuit en revanche la contractualisation.

Les deux organismes et leurs antennes proposent aux demandeurs d'emploi des prestations de conseil et d'orientation personnalisées comparables aux autres pays européens étudiés en présentiel et en ligne. L'utilisation intensive des nouvelles technologies est une des marques du VDAB tout comme de son homologue néerlandais l'UWV et du système danois. Par exemple, l'initiative « Labo » menée avec les universités vise le développement d'applications sur mobile et d'outils numériques adaptés ciblant certains publics. En outre, après l'inscription en ligne sur www.vdab.be, une interface d'assistance permet de procéder à un premier profilage du demandeur et de l'orienter soit vers un entretien dans un jobcenter , soit vers les solutions numériques (moteurs de recherche, dépôt de candidatures, etc.) qu'il gèrera en autonomie. Le système d'information est construit de telle sorte qu'en interne, une alerte soit déclenchée au bout d'un certain temps lorsqu'un demandeur d'emploi n'a reçu aucun service après son inscription pour qu'un conseiller prenne contact avec lui.

Il faut noter également le fort accent mis en Wallonie et en Flandre sur la formation professionnelle puisque les opérateurs ont la particularité d'être non seulement directement responsables de la politique de formation professionnelle mais aussi de pouvoir agir eux-mêmes en tant qu'organisme de formation et proposer des formations qualifiantes. C'est un des points positifs saillants relevés lors d'une mission d'évaluation européenne du VDAB. 251 ( * )

Malgré des structures semblables, les deux régions peuvent se distinguer par les accents différents qu'elles mettent sur les instruments à leur disposition en matière d'accompagnement et de placement. Cela peut s'expliquer par leur situation économique et leur culture politique divergente. C'est sans doute le cas en matière de recours aux agences privées de placement accréditées, qui semble plus encouragé en Flandre. 252 ( * ) Les accords conclus entre le gouvernement flamand et les partenaires sociaux pour l'emploi des séniors en 2008 et en 2011 ont insisté sur le développement des coopérations entre l'intermédiation publique de VDAB et l'intermédiation privée, notamment par les agences d'intérim et de reclassement après licenciement. 253 ( * )


* 1 Lei n° 29/87 de 30 de Junho, Estatuto dos Elitos Locais

* 2 Lei n° 11-A/2013 de 28 de Janeiro

* 3 The Local Authorities (Members' Allowances) (England) Regulations 2003, version amendée par 2003 No. 1692 Regulations du 7 juillet 2003

* 4 https://www.rbkc.gov.uk/sites/default/files/atoms/files/Councillor%20Allowance%20Entitlements%20for%202017-18_0.pdf

* 5 https://www.gov.uk/government/uploads/system/uploads/attachment_data/file/288309/Taxpayer-funded_pensions_for_councillors_and_other_elected_local_office_holders.pdf

* 6 1 ère partie, 1 er chapitre, §2 du règlement sur la rémunération, les indemnités et la retraite pour l'exercice d'une fonction communale du 9 décembre 2016 (Bekendtgørelse om vederlag, diæter, pension m.v. for varetagelsen af kommunale hver)

* 7 Ces conseils exécutifs, composés du maire, de conseillers et de membres du collège, gèrent le travail quotidien de la commune. Leur mission comprend la préparation des procédures pour le conseil municipal, la mise en oeuvre des décisions adoptées ou encore l'intégration des décisions dans la procédure politique lorsqu'il n'y a pas lieu de les soumettre préalablement au conseil. Seules les communes de Frederiksberg, Copenhague, Odense, Aalborg et Århus peuvent mettre en place ce système. Dans les faits, à présent, seule la commune d'Århus a opté pour cette organisation.

* 8 Composée de 55 membres, la représentation civique de la commune de Copenhague est l'équivalent dans cette ville du conseil municipal. Elle est présidée par le maire, et un 1 er et un 2 nd vice-président sont choisis au début de chaque mandature. https://www.kk.dk/artikel/om-borgerrepr%C3%A6sentationen-0

* 9 Bekendtgørelse om vederlag, diæter, pension m.v. for varetagelsen af regionale hverv

* 10 Ley 7/1985 de 2 de abril, reguladora de las Bases del Régimen Local.

* 11 Ley 27/2013, de 27 de diciembre, de racionalización y sostenibilidad de la Administración Local

* 12 Acte réglementaire permettant une modification législative sans habilitation préalable en cas d'urgence, mais demandant une ratification législative ultérieure.

* 13 Real Decreto-ley 1/2014 de 24 de enero, de reforma en materia de infraestructuras y transporte, y otras medidas económicas

* 14 La modulation va de 100 % de la rémunération d'un secrétaire d'État pour les élus des communes de plus de 500 000 habitants à 40 % pour les élus des communes comptant entre 1 000 et 5 000 habitants.

* 15 Sauf au Pays Basque et en Navarre, où les plafonds sont de la compétence de ces communautés forales.

* 16 Les membres de ces organes exécutifs locaux ne peuvent être membres de l'assemblée provinciale ou du conseil municipal ; en particulier, les échevins (wethouders) peuvent être recrutés en dehors des rangs des conseillers municipaux, sans avoir été soumis au suffrage des résidents de la commune.

* 17 Rechtspositiebesluit burgemeesters van 15 juni 1994

* 18 Au 1 er janvier 2017, les Pays-Bas comptaient 390 communes contre encore 415 en 2012. La population moyenne est de 40 000 habitants par commune. Le gouvernement Rutte II (2012-2017) avait comme projet de parvenir à une population moyenne de 100 000 habitants.

* 19 Ministerie van Binnenlandse Zaken en Koninkrijksrelaties, Circulaire van 1 novembre 2017, 2017-518206.

* 20 Les montants sont indexés sur les traitements de la fonction publique d'État.

* 21 Ministerie van Binnenlandse Zaken en Koninkrijksrelaties, Circulaire van 1 novembre 2017, 2017-518206.

* 22 Algemene pensioenwet politieke ambstdragers (Appa) van 10 december 1969

* 23 En dehors des élus locaux, l'indemnité de fin de de mandat est aussi prévue pour les ministres, les secrétaires d'État et les députés nationaux.

* 24 Wet aanpassing uitkeringsduur Appa van 13 september 2012 et Wet verkorting duur voortgezette uitkering Appa van 8 juli 2015

* 25 Art. 130 et suivants Appa

* 26 L'âge légal donnant droit à une retraite maximale est passé à 68 ans au 1 er janvier 2018.

* 27 Pour un échevin, cela comprend la rémunération, l'allocation de vacances et l'allocation de fin d'année.

* 28 Art. 133 Appa

* 29 Art. 133a Appa

* 30 Art. 133b Appa.

* 31 https://www.bundestag.de/blob/412882/62e9ca42cd064cb5b24a773cb7715481/wd-3-102-11-pdf-data.pdf

* 32 Baden-Württemberg Gemeindeordnung vom 24.07.2000, §42

* 33 Type de séance d'un conseil d'une collectivité territoriale en Allemagne, qui comprend entre autres des dispositions sur la constitution et l'organisation administrative.

* 34 KV M-V, §38-39

* 35 Landesverordnung über die Besoldung und Aufwandsentschädigung der hauptamtlichen Wahlbeamten auf Zeit in Mecklenburg-Vorpommern (KomBesLVO M-V) vom 3. Mai 2005

* 36 http://www.lbesa.mv-regierung.de/static/LBA/Inhalte/Besoldung/_Dokumentenliste/Bezgetabellen-2017.pdf

* 37 Kommunalverfassung für das Land Mecklenburg-Vorpommern (KV M-V) vom 13. Juli 2011, §27

* 38 Les autres membres du conseil, quant à eux, ont droit à une compensation mensuelle maximale de respectivement 160, 220 et 280 € selon le nombre d'habitants.

* 39 Entschädigungsverordnung M-V vom 27. August 2013

* 40 Beamtenversorgungsgesetz für das Land Nordrhein-Westfalen (LBeamtVG NRW) vom 14.06.2016, §118

* 41 LBeamtVG NRW, §31-§33

* 42 LBeamtVG NRW, §16

* 43 LBeamtVG NRW, §87

* 44 LBeamtVG NRW, §68

* 45 LBeamtVG NRW, §47

* 46 Tribunal administratif régional d'Émilie-Romagne, 22 septembre 2009 ; Conseil d'État italien, 25 septembre 2014.

* 47 Article 1471 du code civil italien.

* 48 Une exception est prévue pour les absences de service des conseillers municipaux des communes de moins de 1 000 habitants qui n'ont alors pas à en assumer la rémunération (DL n.138 13 août 2011, art. 16 comma 18).

* 49 Du dispositif sont exclues les communes de moins de 1 000 habitants qui font partie d'une communauté de communes (unioni di comuni). DL n.138 du 13 août 2011, art. 16 comma 18.

* 50 Ces montants sont calculés en prenant en compte le décret ministériel conjoint (Trésor et Intérieur) n.119/2000 et la réduction forfaitaire de 10 % imposée par la loi n.266/2005. Cf. Fiorenzo Narducci, « Amministratori degli enti locali - Status giuridico ed economico », Gli ordinamenti delle autonomie in Italia e in Europa , 2017. Des modulations non prises en compte dans le tableau sont prévues pour certaines catégories de communes par exemple, les communes touristiques qui connaissent un afflux de population à certaines périodes de l'année.

* 51 La procédure est fixée dans la circulaire INPS n.133 du 26 novembre 2012.

* 52 Legge n.296 du 27 décembre 2006, art. 1 comma 719.

* 53 Legge n.125 du 6 août 2015, art. 7bis

* 54 http://www.senat.fr/lc/lc176/lc176_mono.html#toc22

* 55 http://www.senat.fr/lc/lc176/lc176_mono.html#toc10

* 56 Ley Orgánica del Régimen Electoral General (LOREG) 5/1985 de 19 de junio

* 57 Ley 5/1990, de 15 de junio, de Elecciones al Parlamento Vasco

* 58 http://www.senat.fr/lc/lc176/lc176_mono.html#toc16

* 59 Legge regionale n. 3 - Introduzione del voto elettronico per il referendum consultivo, 23 febbraio 2015.

* 60 Ansa, « La Lombardia al voto con il sistema elettronico », 9 ottobre 2017

* 61 https://www.irishtimes.com/news/commission-on-electronic-voting-summary-and-conclusions-1.1138596

* 62 https://www.irishtimes.com/news/e-voting-machines-to-be-scrapped-1.722896

* 63 http://www.parliament.uk/documents/speaker/digital-democracy/electoralcommission.pdf

* 64 https://www.parliament.uk/business/commons/the-speaker/speakers-commission-on-digital-democracy/electronic-voting /

* 65 http://www.digitaldemocracy.parliament.uk/documents/Open-Up-Digital-Democracy-Report.pdf

* 66 Dispositions électorales spéciales, annexées à la loi électorale 2.10.1998/714.

* 67 http://www.vaalit.fi/sv/index/valinformation/utvecklingsprojekt/elektroniskrostning.html

* 68 http://oikeusministerio.fi/sv/artikkeli/-/asset_publisher/tyoryhma-nettiaanestyksen-riskit-suuremmat-kuin-hyodyt

* 69 Regeling goedkeuring stemmachines du 23 octobre 1989, modifié ensuite en 1997.

* 70 Algemene Inlichtingen- en Veiligheidsdienst (AIVD)

* 71 « Wij vertrouwen stemcomputers niet »

* 72 RB Amsterdam, 1 er octobre 2007 (2007 : BB4541)

* 73 Hermans & van Twist, Commissie Besluitvorming Stemmachines, Stemmachines: een verweesd dossier , april 2007.

* 74 K. Altes, Adviesrapport, Stemmen met vertrouwen , september 2007.

* 75 Commissie onderzoek elektronisch stemmen in het stemlokaal, Elke stem telt , december 2013.

* 76 Voorstel van wet van het lid Taverne houdende een tijdelijke experimentenregeling voor het gebruik van elektronische voorzieningen bij verkiezingen, 2015-2016, 33 354 , Nr 8, Verslag vastgesteld 8 april 2016.

* 77 Cf. site de la Commission électorale www.kiesraad.nl

* 78 Minister van Binnenlandse Zaken en Koninkrijksrelaties aan de Vorzitter van de Tweede Kamer, betreft uitkomsten marktuitvraag stemprinter en stemmenteller, 25 augustus 2017.

* 79 Des machines néerlandaises NEDAP avec enregistrement direct du vote sur la machine sans preuve papier.

* 80 Bundeswahlgesetz - Bwahl G, §35

* 81 2 BvC 3/07, 2 BvC 4/07 du 3 mars 2009

* 82 Il convient de noter que la Cour constitutionnelle allemande considère que le secret électoral n'est qu'une levée temporaire, une interruption pour l'acte de vote stricto sensu du principe de transparence/publicité qui gouverne la totalité de la procédure électorale.

* 83 BVerfGE 21, 200 du 15 février 1967

* 84 Art. 6 à 13, chapitre II, loi du 11 avril 1994 organisant le vote automatisé.

* 85 Art. 7 à 14, chapitre 3, loi du 7 février 2014 organisant le vote électronique avec preuve papier.

* 86 Pour mémoire, les élections belges suivent le principe de la représentation proportionnelle avec vote préférentiel.

* 87 Collège d'experts chargés du contrôle du système de vote et de dépouillement automatisés, Rapport sur les élections simultanées du 25 mai 2014 , Chambre des représentants de Belgique, 19 juin 2014, p. 75.

* 88 Le i das Eleições n° 9.504 de 30 de setembro de 1997, art. 59.

* 89 Lei n° 13.165 de 29 de setembro de 2015, art 2° e 12.

* 90 Lei das Eleições, art. 59-A.

* 91 Agência Brasil, « TSE encontra três falhas no sistema da urna electrônica em teste de segurança », 1 er décembre 2017

* 92 Riigikogu Election Act du 12 juin 2002, ch.7 §48 2 -§48 8

* 93 Municipal Council Election Act du 27 mars 2002

* 94 Sur un corps électoral de 900 000 personnes environ, 575 000 expriment leur suffrage, soit environ 65 % de participation aux élections législatives. Les votants par Internet sont au nombre d'environ 175 000.

* 95 https://www.valimised.ee/en/archive/statistics-about-internet-voting-estonia

* 96 State Electoral Office of Estonia, General Framework of Electronic Voting and Implementation thereof at National Elections in Estonia, 20 juin 2017.

* 97 Entré en vigueur le 1 er janvier 2003

* 98 https://www.bk.admin.ch/bk/fr/home/droits-politiques/groupe-experts-vote-electronique/vue-d-ensemble.html

* 99 http://www.ne.ch/autorites/CHAN/CHAN/elections-votations/Pages/vote-electronique.aspx

* 100 Commissie voor de Inlichtingen- en Veiligheidsdiensten (CIVD).

* 101 CIVD, Verslag vastgesteld 11 juli 2017 - TK 2016-2017, 34760, nr.1, p. 2

* 102 Wetten op de inlichtingen-en veilighiddiensten (Wiv) du 7 février 2002 et du 26 juillet 2017

* 103 Parlamentarisches Kontrollgremium

* 104 Gesetz über die parlamentarische Kontrolle nachrichtendienstlicher Tätigkeit des Bundes (Kontrollgremiumgesetz - PKGrG) du 29 juillet 2009

* 105 Le service fédéral de renseignement (Bundesnachrichtendienst - BND), le service de protection militaire (Militärischen Abschirmdienst - MAD) et l'Office fédéral pour la protection de la Constitution (Bundesamt für Verfassungsschutz - BfV).

* 106 La formation des organes internes au Bundestag prend généralement plusieurs mois.

* 107 Le dernier rapport couvre la période 2016-2017. Il est succinct et se contente de résumer les activités. Cf. PKGr, Bericht über die Kontrolltätigkeit (December 2015 - Oktober 2017), 19/422 du 16 janvier 2018.

* 108 Legge recante sistema di informazione per la sicurezza della Repubblica e nuova disciplina del segreto, n. 124 du 3 août 2007.

* 109 La loi de 2007 prévoyait un vote à l'unanimité. L'abaissement aux deux tiers est issu de l'art. 6 de la loi n. 133 du 7 août 2012.

* 110 Cf ; Giacomo Stucchi, président-rapporteur, Relazione annuale del Comitato per la sicurezza della Repubblica 2016, approuvé le 9 février 2017.

* 111 Intelligence Service Act 1994 du 26 mai 1994

* 112 Intelligence and Security Committee of Parliament (ISC)

* 113 Justice and Security Act 2013 du 25 avril 2013

* 114 Official Secrets Act 1989 du 11 mai 1989

* 115 Cf. Dominic Grieve QC MP, Président-rapporteur, ISC Annual Report 2016-2017, 20 décembre 2017, 116 p. Les sujets analysés couvrent le contre-terrorisme international (menaces, contremesures, leçons tirées), le terrorisme en Irlande du Nord, la cybersécurité et la capacité offensive de cyberattaque, les pays à surveiller (Russie, Chine, Iran, Corée du Nord), l'alliance Five Eyes pilotée par les États-Unis, l'impact du Brexit, l'analyse de la gestion et des dépenses des différents services.

* 116 Cette commission très influente a la charge de l'allocation de tous les crédits du budget ne correspondant pas à des dépenses obligatoires, ces dernières étant dans les faits restreintes aux programmes sociaux de Medicare, Medicaid, Social Security et aux salaires des fonctionnaires fédéraux.

* 117 Wolfgang Hromadka & Frank Maschmann, Arbeitsrecht Band 2 (Kollektivarbeitsrecht + Arbeitsstreitigkeiten) , Springer, 217 pp. 615-672 ; Sudabeh Kamanabrou, Arbeitsrecht , Mohr Siebeck, 2017, pp.  935-966.

* 118 Arbeitsgerichtsgesetz (ArbGG) du 3 septembre 1953, refondue le 2 juillet 1979.

* 119 ArbGG, §2. Cette compétence est détaillée précisément par le législateur.

* 120 ArbGG, §2a. Dans ce cas, il est fait renvoi au juge comme organe de contrôle de l'application des nombreuses lois sur la constitution de l'entreprise, sur la codétermination, sur les conseils de cadres dirigeants, sur la formation professionnelle...

* 121 ArbGG, §14 et s.

* 122 ArbGG, §33 et s. Les deux Länder les plus importants, la Bavière et la Rhénanie du nord -Westphalie comptent plusieurs tribunaux régionaux. À l'inverse, Berlin et le Brandebourg sont couverts par le même tribunal régional.

* 123 ArbGG, §40 et s.

* 124 ArbGG, §76

* 125 Le refus d'autoriser un recours en révision et une plaine pour violation de droit peut lui-même faire l'objet d'un recours (Nichtzulassungbeschwerde).

* 126 Arbeits- und Sozialgerichtsgesetz (ASGG) du 7 mars 1985, §2.

* 127 ASGG, §50

* 128 ASGG, §11

* 129 ASGG, § 15

* 130 ASGG, § 17

* 131 ASGG, § 22. Les 4 premiers groupes concernent les employeurs (1 : société membre d'une chambre de commerce et d'industrie ; 2 : professions libérales ; 3 : exploitants agricoles et forestiers ; 4 : collectivités territoriales), les 5 suivants concernent les salariés (5 : employés relevant d'une chambre professionnelle ; 6 : ouvriers relevant d'une chambre professionnelle ; 7 : salariés des transports ; 8 : salariés agricoles et forestiers ; 9 : employés de l'État et des collectivités territoriales)

* 132 Art. 147 Constitution belge.

* 133 Art. 160 Constitution belge.

* 134 Code judiciaire belge, art. 578 à 583.

* 135 Code judiciaire belge (Cjud), art. 82.

* 136 Cjud, art. 81. La composition peut inclure plutôt un travailleur indépendant dans d'autres contentieux. Le recours aux deux notions d'ouvrier et d'employé plutôt qu'à une notion générique de salarié ou de travailleur est typique du droit du travail belge. La Cour constitutionnelle belge s'oppose toutefois à ce que cette distinction introduise une différence de traitement dans la protection des droits des uns ou des autres (décision du 7 juillet 2011).

* 137 Ou pour les travailleurs indépendants sur proposition du ministre en charge des Classes moyennes. Il faut tenir compte également de critères linguistiques, la maîtrise du néerlandais ou du français selon le ressort (Cjud, art. 206).

* 138 Cjud, art. 197 à 202.

* 139 Cjud, art. 152.

* 140 Cjud, art. 138bis.

* 141 Cjud, art. 607.

* 142 Cjud, art. 215 et 216.

* 143 §3 des Règles de procédure des tribunaux du travail

* 144 §4 Employment Tribunals Act, 1996. Certaines affaires peuvent par exception être décidées par le seul juge professionnel.

* 145 England and Wales Court of Appeal, Yeboah v. Crofton CA [2002] Civ 794, pour un cas de discrimination raciale.

* 146 Chapitre 2, §1 loi (1974 :371) https://www.riksdagen.se/sv/dokument-lagar/dokument/svensk-forfattningssamling/lag-1974371-om-rattegangen-i-arbetstvister_sfs-1974-371

* 147 Chap. 2 § 2 de la loi précitée.

* 148 Wetboek van Burgerlijke Rechtsvordering (WvBR), art. 93

* 149 WvBR, art. 79.

* 150 Wet op de rechterlijke organisatie du 18 avril 1827, art. 47.

* 151 Uitvoeringsinstituut Werknemersverzekeringen, l'Institut de mise en oeuvre des assurances des salariés.

* 152 Burgerlijk Wetboek (BW), 7 : 671b. Parmi les motifs sérieux ouvrant la voie du licenciement par dissolution judiciaire du contrat de travail, on retrouve des comportements inadaptés du salarié, l'inaptitude professionnelle, une relation de travail perturbée, un changement de circonstances empêchant un fonctionnement satisfaisant de l'entreprise (BW 7 : 669, lid 3). Le salarié a également la possibilité de demander la dissolution du contrat de travail au juge cantonal sur le fondement de BW 7 : 671c.

* 153 BW 7 : 683 et abrogation de BW 7 : 685.

* 154 Ley 36/2011 du 10 octobre 2011 régulant la juridiction sociale (LJS)

* 155 TS, arrêts du 18 mars, 31 mai et 9 octobre 1991.

* 156 LJS 36/2011, art. 3. Le législateur espagnol a également clarifié certaines attributions respectives du juge civil et du juge social. En particulier, tout le droit des faillites et de la liquidation, y compris l'extinction, la modification et la suspension collective des contrats de travail de l'entreprise faillie (concursada), est confié en première instance au juge commercial au sein de l'ordre civil. Certaines de ses décisions ayant des conséquences ne matière d'emploi peuvent cependant donner lieu à un recours devant les juridictions sociales.

* 157 Ley 7/1989 du 12 avril 1989. Antonio Martín Valverde, Fermín Rodríguez-Sañudo Gutiérrez, Joaquín García Murcia, Derecho del Trabajo , 25 e , Tecnos, 2016, pp. 905 et s. & pp. 955 et s. L'appel (apelación) étant fermé, trois types de recours sont prévus en matière de contentieux du travail : la supplique (suplicación), la cassation et la cassation pour unification de la doctrine.

* 158 Art. 421, code de procédure civile italien.

* 159 Art. 409, code de procédure civile italien.

* 160 Art. 413, cpc.

* 161 Decreto Legislativo 51/1998 du 19 février 1998, art. 11.

* 162 Art. 433, cpc. La suppression de l'office de préteur par le décret législatif 51/1998 (art. 1 er ) a abouti à cette nouvelle organisation. Auparavant, le préteur était le juge du travail en première instance, l'appel étant renvoyé devant le tribunal civil du ressort en formation collégiale.

* 163 Legge 183/2010 du 4 novembre 2010.

* 164 Art. 28 de la loi 300/1970 du 20 mai 1970 portant statut des travailleurs. L'agissement antisyndical est caractérisé comme n'importe quel comportement destiné à empêcher ou limiter l'exercice de la liberté syndicale et de l'activité syndicale, ainsi que du droit de grève. Ont seules la capacité d'engager une action les branches territoriales des syndicats, ce qui exclut le salarié individuel, les organisations syndicales nationales mais aussi les représentants syndicaux dans l'entreprise (rappresentanza sindacale aziendale - RSA). Lorsque sont à la fois lésés les intérêts collectifs, représentés par l'organisation syndicale, et, les intérêts individuels d'un salarié dans l'exercice d'un de ses droits syndicaux, deux actions peuvent être parallèlement introduites devant le juge du travail, l'une par le syndicat local selon la procédure du statut de 1970, l'autre par le salarié selon la procédure ordinaire régie par l'art. 414 cpc. Cf. Severino Riva, Compendio di diritto del lavoro e della previdenza sociale , Simone ed., avril 2016.

* 165 Art. 442, cpc.

* 166 Le recours est entendu par le Tribunal Colegiado de Circuito, composé de trois magistrats professionnels qui, outre les recours d'amparo direct, traite les appels ordinaires en matière civile, commerciale, pénale et administrative.

* 167 Constitution mexicaine, art. 123, apartado A, fracción XX, dont les modalités d'application sont fixées par la loi fédérale du travail du 1 er avril 1970. Le représentant du gouvernement est désigné par le gouvernement de l'État fédéré dans le cas des conseils locaux ou par le gouvernement fédéral dans le cas du conseil fédéral.

* 168 Decreto por el que se declara reformadas y adicionadas diversas disposiciones de los artículos 107 y 123 de la Constitución Política de los Estados Unidos Mexicanos, en materia de Justicia Laboral.

* 169 Articles 202 et suivants du code de procédure civile suisse.

* 170 Loi cantonale du 11 février 2010 sur le tribunal des prudhommes, art. 12.

* 171 Organe composé de 100 députés exerçant le pouvoir législatif dans le canton de Genève (article 80 et suivants de la Constitution de la République et du canton de Genève).

* 172 Loi sur l'exercice des droits politiques du 15 octobre 1982, art. 121.

* 173 Groupe 1 : agriculture et paysagisme, conciergerie et nettoyage, bâtiment et matériaux de construction, industrie et artisanat ; groupe 2 : hôtellerie, cafés et restaurants, industrie, artisanat et commerce alimentaires ; groupe 3 : tourisme, transports, commerce non alimentaire ; groupe 4 : banques, assurances et sociétés de service, employés d'administrations publiques, d'établissements ou fondations de droit public ; groupe 5 : professions diverses, non comprises dans les autres groupes, notamment : professions médicales et paramédicales (y compris les pharmaciens et opticiens), professions juridiques et judiciaires, agents d'affaires et agents intermédiaires, professions artistiques, enseignement privé, presse et autres médias, ingénieurs et architectes, informatique, publicité, relations publiques, économie domestique et aides familiales

* 174 Les juges conciliateurs et les juges conciliateurs-assesseurs chargés de la conciliation préalable sont élus par le Grand Conseil, selon le même mode que les juges prud'hommes, sur la base d'une liste de candidats établie en commun par les partenaires sociaux, pour la même durée que les juges prud'hommes

* 175 On peut toutefois signaler l'exception fournie par l'abrogation d'un dispositif important de la loi Hartz I, entrée en vigueur le 1 er janvier 2003, qui visait à utiliser l'intérim comme passerelle vers l'emploi stable en CDI. Il était fait obligation à toutes les agences locales du service public de l'emploi (Agenturen für Arbeit), de créer dans leurs ressort des bureaux d'intérim de droit privé ou mixtes (Personal Service Agenturen) chargés de placer les chômeurs dans les entreprises sur des contrats de travail temporaire et, lorsqu'aucun poste en intérim n'était disponible, à poursuivre la formation ou la requalification des chômeurs. Le constat d'inefficacité et d'effet d'aubaine dressé par un rapport du ministère fédéral du travail en 2006 a conduit à l'abrogation du dispositif en 2008. Cf. Bundesministerium für Arbeit und Soziales, Die Wirksamkeit moderner Dienstleistungen am Arbeitsmarkt , 20 décembre 2006.

* 176 § 393 Sozialgesetzbuch (SGB) III (Livre III du code social)

* 177 Conformément au § 48b (1) du SGB II (Livre II du code social)

* 178 § 48b (3) SGB II

* 179 §3, Zielvereinbarung zwischen dem Bundesministerium für Arbeit und Soziales und der Bundesagentur für Arbeit zur Erreichung der Ziele der Grundsicherung für Arbeitssuchende im Jahr 2017 (SGB II-ZielVbg 2017), mars 2017

* 180 §4, SGB II-ZielVbg 2017

* 181 § 373 SGB III

* 182 § 381 SGB III

* 183 § 367 SGB III

* 184 Art. 28 (1) Grundgesetz (GG)

* 185 BVerfG, 2 BvR 2434/04 et 2 BvR 2433/04

* 186 Gesetz zur Änderung des Grundgesetzes (Artikel 91e) du 21 juillet 2010

* 187 Art. 91e (2) GG. Cependant, une option est prévue : l'État fédéral peut  « autoriser un nombre limité de communes et groupements de communes à accomplir seuls, sur leur demande et avec l'accord des autorités suprêmes du Land » la mission d'aide sociale aux chômeurs. Ce cas où les communes prennent seules en charge l'assistance aux chômeurs est baptisé Optionsmodell.

* 188 Gesetz zur Weiterentwicklung der Organisation der Grundsicherung für Arbeitsuchende du 3 août 2010

* 189 § 6d SGB II & § 44b SGB II

* 190 § 37 (1) SGB III

* 191 § 37 (2) SGB III. C'est le terme générique mais selon les Länder, l'appellation change sans que le concept diffère.

* 192 § 37 (3) SGB III.

* 193 Beschäftigungsförderungsgesetz du 26 juillet 1994.

* 194 “ Job - Aktivieren, Qualifizieren, Trainieren, Investieren, Vermitteln“(Job-AQTIV) Gesetz du 10 décembre 2001

* 195 Ils sont devenus des chèques d'activation et de recherche d'emploi (Aktivierungs- und Vermittlungsgutscheine) le 1 er avril 2012.

* 196 §45 (7) SGB III

* 197 § 296 (3) SGB III. Le code social permet cependant de porter ce montant à 2 500 euros pour les chômeurs de longue durée ou les travailleurs handicapés. Le montant comprend la TVA.

* 198 §45 (6) SGB III. Le succès ne peut être constaté par l'agence pour l'emploi dès lors que la durée de la relation de travail que noue le demandeur d'emploi est limitée d'emblée à moins de trois mois. Il n'y a pas de succès non plus, si l'opérateur privé réoriente le chômeur vers son ancien employeur.

* 199 §§ 2-3, Lov om organisering og understøttelse af beskæftigelsesindsatsen (Loi sur l`organisation et le soutien de l'action publique en faveur de l'emploi) du 23 décembre 2014.

* 200 § 7 loi de décembre 2014 précitée.

* 201 §§ 19-21 loi de décembre 2014 précitée.

* 202 § 32 loi de 2014 précitée.

* 203 §§ 24-25 loi de 2014 précitée.

* 204 §§ 28-29 loi de 2014 précitée.

* 205 Les forums pour la croissance sont des instances de coordination régionales des entreprises, des partenaires sociaux et des collectivités au service du développement économique local au Danemark.

* 206 § 27 bekendtgørelse af lov om en aktiv beskæftigelsesindsats (décret d'application de la loi pour une politique active de l'emploi) du 1 er juillet 2015

* 207 §§ 33-36 loi précitée de 2014

* 208 § 12 du décret précité de juillet 2015

* 209 § 11 du décret précité de juillet 2015

* 210 Wet structuur uitvoeringsorganisatie werk en inkomen (SUWI) du 29 novembre 2001.

* 211 Cette catégorie de personnes malades ou inaptes partiellement ou totalement à exercer un travail est très importante aux Pays-Bas. Elle est deux fois plus nombreuse que les chômeurs et représente environ 8 % de la population active. Sur les 1,4 million de personnes recevant une allocation de l'UWV, 940 000 environ étaient malades ou inaptes contre 450 000 chômeurs (Rapport de la Cour des comptes des Pays-Bas : Algemene Rekenkamer, UWV, balanceren tussen ambities en middelen , janvier 2017, p. 6). Un certain nombre de ces « inaptes » pourraient en fait être comptabilisés comme chômeurs dans d'autre pays. Être déclaré inapte ou être considéré comme chômeur par l'UWV n'ouvre pas les mêmes dispositifs d'accompagnement, ni les mêmes droits et obligations, le cadre légal étant différent. Pour éviter une présentation trop complexe et pour faciliter les comparaisons entre les systèmes de mise en oeuvre du service public de l'emploi entre les différents pays, la présente note se concentre sur les chômeurs.

* 212 Il convient de noter que l'UWV n'assume pas de mission à l'égard des personnes travaillant pour les autorités publiques, dans l'éducation ou comme sportifs professionnels. C'est la structure qui les emploie qui doit assurer leur reclassement en cas de cessation de la relation de travail.

* 213 Art.2 al.2 de la loi SUWI de 2001 précitée.

* 214 Art. 30a et 30 b de la loi SUWI précitée.

* 215 « Werk boven uitkering »

* 216 WW - uitkering, l'allocation prévue par la loi sur le chômage est une allocation parmi d'autres au sien de la politique de emploi ; les autres groupes (jeunes handicapés, inaptes, personnes en longue maladie, etc.) disposent d'autres allocations spécifiques.

* 217 Werkloosheidswet (WW) du 6 novembre 1986, art. 73.

* 218 Rapport de la Cour des comptes des Pays-Bas : Algemene Rekenkamer, UWV, balanceren tussen ambities en middelen , janvier 2017, pp. 9-10.

* 219 Le montant du chèque-formation peut être plus élevé si l'emploi est garanti à la sortie de la formation.

* 220 Art. 76a de la loi sur le chômage WW précitée.

* 221 Communique de presse de l'UWV, « Uitzendwerk biedt kansen voor WW'ers » (L'intérim offre des opportunités aux allocataires des prestations de chômage), 20 décembre 2017.

* 222 Welfare Reform Act 2012 du 8 mars 2012.

* 223 House of Commons, Work and Pensions Committee, The role of Jobcentre Plus in the reformed welfare system , HC 479, 20 janvier 2014, p. 5.

* 224 House of Commons, Work and Pensions Committee, rapport précité, HC 479, 20 janvier 2014, pp. 17-18 & pp. 33-35.

* 225 Depuis 2013, sous le régime des règles applicables à la nouvelle prestation Universal Credit, il peut leur être imposé jusqu'à 35 heures de recherche d'emploi par semaine.

* 226 House of Commons, Work and Pensions Committee, rapport précité, HC 479, 20 janvier 2014, p. 14.

* 227 Ce programme couvrait l'Angleterre, le Pays de Galles et l'Ecosse mais pas l'Irlande du Nord.

* 228 Aliyah Dar, “Work Programme: background and statistics”, House of Commons Briefing Paper Nr.6340, 21 mars 2016.

* 229 Andrew Powell, “Work and Health Programme”, House of Commons Briefing Paper Nr.7845, 8 janvier 2018.

* 230 Real Decreto Legislativo 3/2015 por el que se aprueba el texto refundido de la Ley de Empleo du 23 octobre 2015

* 231 Ley 56/2003 de Empleo du 16 décembre 2003

* 232 Estrategia Española de Activación para el Empleo, approuvée par le décret royal 751/2014 du 5 septembre 2014 et conforme à l'article 10 de la loi sur l'emploi de 2003 qui en définit le cadre.

* 233 Art. 5 de la loi sur l'emploi précitée

* 234 Art. 6 à 14 de la loi sur l'emploi précitée

* 235 Art. 15 à 18 de la loi sur l'emploi précitée.

* 236 Real Decreto 1383/2008 por el que se aprueba la estructura orgánica y de participa ción institucional del Servicio Público de Empleo Estatal du 1 er août 2008.

* 237 Art. 28 de la loi sur l'emploi précitée.

* 238 Real Decreto-ley 8/2014 de aprobación de medidas urgentes ara el crecimiento, la competitividad y la eficiencia du 4 juillet 2014.

* 239 Sauf l'Andalousie, la Catalogne et le Pays basque.

* 240 Legge n. 59/1997 , recante delega al Governo per il conferimento di funzioni e compiti alle regioni ed enti locali, per la riforma della Pubblica Amministrazione e per la semplificazione amministrativa du 15 mars 1997.

* 241 Legge n. 30/2003 recante delega al Governo in materia di occupazione e mercato del lavoro du 14 février 2003 et le décret législatif (équivalent fonctionnel d'une ordonnance) DL n. 276 du 10 septembre 2003.

* 242 Legge n. 183/2014 Jobs Act du 10 décembre 2014, suivie d'une série de décrets législatifs dont le plus important pour notre sujet est le DL n. 150 du 14 septembre 2015.

* 243 Art. 4 du décret législatif 150/2015 précité.

* 244 Art. 5 à 8 du décret législatif précité.

* 245 Art. 13 et 14 du décret législatif précité.

* 246 Art. 20 et 25 du décret législatif précité.

* 247 Art. 23 du décret législatif précité.

* 248 D'au moins 3 mois dans les régions très en difficulté du Sud : Basilicate, Calabre, Campanie, Pouilles et Sicile.

* 249 Vlaamse Dienst voor Arbeidsbemiddeling en Beroepsopleiding, littéralement le service flamand pour l'intermédiation sur le marché du travail et la formation professionnelle. On laisse de côté Actiris et l'ADG qui sont compétents respectivement dans la région Bruxelles-Capitale et auprès de la Communauté germanophone.

* 250 Art. 2 du décret du 6 mai 1999 relatif à l'Office wallon de la formation professionnelle et de l'emploi. Réciproquement, le VDAB est décrit comme une « agence indépendante externe » (extern verzelfstandgid agentschap - EVA) dans les documents officiels flamands.

* 251 European Network of Public Employment Service, Benchlearning Initiative External Assessment - PES of Flanders - VDAB, juillet 2015, pp. 3-4.

* 252 Le texte applicable est le décret de l'autorité flamande du 10 décembre 2010 relatif au placement privé.

* 253 Fons Leroy, « De samenwerking tussen private en publieke arbeidsbemiddeling ? Uitzend en VDAB: a never ending story », OVER-WERK, Uitgeverij Acco, janvier 2013, pp. 102-109.

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