NOTE DE SYNTHÈSE
En
France, l'inscription sur les listes électorales est obligatoire, mais
le vote ne
l'est pas.
En effet, l'obligation de voter s'applique
uniquement pour les
élections sénatoriales, les grands
électeurs qui s'abstiennent sans raison valable étant
condamnés au paiement d'une amende de 4,57 €.
Face à la montée du taux d'abstention,
plusieurs
parlementaires appartenant aussi bien à la majorité qu'à
l'opposition ont, au cours des derniers mois, déposé des
propositions de loi tendant à rendre le vote obligatoire :
- M. Dominique Paillé, député de l'Union pour la
démocratie française (UDF), le 30 décembre
2002 ;
- MM. Laurent Fabius, Jean-Marc Ayrault et Bernard Roman,
députés socialistes, le 23 janvier 2003 ;
- M. Charles Cova, député de l'Union pour un mouvement
populaire (UMP), le 5 février 2003.
La loi n° 97-1027 du 10 novembre 1997 a introduit l'inscription
d'office sur les listes électorales, mais uniquement pour les jeunes
atteignant l'âge de dix-huit ans entre le 1
er
mars
de l'année en cours et le dernier jour du mois de février de
l'année suivante.
Comme
la seule sanction du défaut d'inscription sur les listes
électorales réside dans l'impossibilité de participer au
scrutin
, deux propositions de loi déposées le 26 mars
2003 visent l'inscription d'office de l'ensemble des citoyens sur les listes
électorales :
- n° 730 de M. Jean-Christophe Lagarde et de plusieurs de
ses collègues députés (UDF et UMP) ;
- n° 739 de M. Lionel LUCA, député (UMP).
Ces différentes propositions de loi amènent à s'interroger
sur les règles en vigueur dans plusieurs pays qui connaissent le vote
obligatoire.
En Europe, les Pays-Bas ont supprimé le vote obligatoire en 1970, de
sorte que l'obligation de voter ne subsiste plus qu'en Belgique, en
Grèce, au Liechtenstein, au Luxembourg, dans le canton suisse de
Schaffhouse et dans le Land autrichien du
Vorarlberg
.
Hors d'Europe, le principal pays où le vote est obligatoire est
l'Australie
, l'obligation de voter ne valant que pour les élections
nationales, car les différents États et territoires n'ont pas
tous adopté la même règle pour les élections qui
relèvent de leur compétence.
Les lois électorales analysées
(Land du Vorarlberg,
Belgique,
Liechtenstein,
Luxembourg, canton de Schaffhouse et
Australie) :
- prévoient plusieurs motifs d'abstention et facilitent
l'exercice du vote par correspondance ou par procuration ;
- sanctionnent la non-participation au vote d'une amende de montant
variable.
1) La reconnaissance de plusieurs motifs d'abstention et la possibilité
de voter par correspondance ou par procuration semblent constituer la
contrepartie de l'obligation de voter
Toutes les législations étudiées reconnaissent des
motifs d'abstention
. Dans certains cas (Land du Vorarlberg,
Liechtenstein, Luxembourg, canton de Schaffhouse), ces motifs sont
énumérés limitativement. Dans les autres, la loi
prévoit la possibilité de présenter une excuse, dont la
recevabilité est appréciée par le juge (Belgique) ou par
l'administration (Australie).
Par ailleurs,
en contrepartie de l'obligation de voter, la plupart des lois
ouvrent largement la possibilité de voter par procuration, par
correspondance, voire par anticipation ou à domicile
(1(
*
))
. Sauf dans le canton de Schaffhouse,
où la loi électorale ne pose aucune condition au recours au vote
par correspondance, ces diverses facilités sont néanmoins
réservées aux seuls électeurs qui, ne pouvant se rendre au
bureau de vote où ils sont inscrits, présentent une demande
motivée.
2) Une amende de montant variable sanctionne l'abstention
Toutes les lois électorales étudiées prévoient que
le non-respect de l'obligation de voter est sanctionné d'une
amende
.
Cette amende n'est pas partout symbolique
: si elle
s'élève à 3 francs suisses (soit environ
deux euros) dans le canton de Schaffhouse et à 20 francs
suisses (soit environ treize euros) au Liechtenstein, elle est comprise
entre 100 et 250 € pour une première abstention au Luxembourg
et se monte à 400 ou 700 € selon la nature de
l'élection dans le Land du Vorarlberg.
Dans plusieurs pays, le montant de l'amende est gradué selon qu'il
s'agit ou
non d'une première abstention
. Il en va ainsi en
Belgique, où l'amende, comprise entre 25 et 50 € pour une
première abstention, est portée de 50 à 125 € en
cas de récidive. De même, au Luxembourg, une première
abstention est sanctionnée d'une amende de 100 à 250 €
et, en cas de récidive dans les cinq ans, l'amende est comprise entre
500 et 1 000 €.
Les autres sanctions sont réservées aux récidivistes ou
aux personnes qui ne paient pas l'amende. Ainsi, en Belgique, la loi
prévoit que les électeurs qui s'abstiennent au moins quatre fois
au cours d'une période de quinze ans sont rayés des listes
électorales pour dix ans et ne peuvent, pendant ce temps, recevoir
aucune nomination, promotion ou distinction d'une autorité publique.
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* *
Dans les pays où elle subsiste, l'obligation de voter est ancienne : elle remonte à la fin du XIX e siècle ou aux années vingt. Inversement, les Pays-Bas l'ont supprimée en 1970, le canton suisse de Berne s'est opposé à son introduction en 1999 et elle fait l'objet de critiques croissantes en Australie, où les abstentionnistes se multiplient et refusent de payer les amendes. L'introduction d'une telle disposition en France ne s'inscrirait donc pas dans un mouvement général.